M. Philippe Dallier, rapporteur spécial

II. PRÉSENTATION DE LA MISSION

A. LE PROJET DE BUDGET S'INSCRIT DANS LA TRAJECTOIRE DE RÉDUCTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

1. Une diminution programmée des crédits

Les deux exercices de programmation triennale de finances publiques successifs 1 ( * ) ont prévu une réduction progressive des crédits de la mission « Ville et logement ».

Crédits alloués à la mission « Ville et logement »

(en milliards d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1ère loi de programmation

7,63

7,66

7,30

7,53

7,28

7,37

Deuxième loi de programmation

7,65

7,61

7,63

7,56

7,61

7,50

Source : Commission des finances

La mise en perspective des deux « trajectoires » montre assez clairement les limites de la prévision . A mi-parcours de la période quinquennale couverte (2009-2013), le volume plafond des crédits nécessaires à l'exécution de la mission a été réévalué de 370 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 240 millions d'euros en crédits de paiement, soit des hausses respectives de 5,1 % et 3,3 % par rapports aux premiers objectifs. Il est en conséquence supérieur en 2011 à son niveau de 2009 en ce qui concerne les autorisations d'engagement .

Dans ce cadre d'ensemble, le projet de budget 2011 enregistre, par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, une baisse de 0,6 % en autorisations d'engagement et 2,5 % en crédits de paiement, très inégalement répartie en fonction des programmes de la mission.

Evolution des crédits de la mission à structure constante

(en euros)

AE

CP

LFI 2010

PLF 2011

Evolution

LFI 2010

PLF 2011

Evolution

Total Mission Ville et logement

7 696 599 400

7 646 894 582

- 0,6%

7 803 626 665

7 606 994 582

- 2,5 %

Programme 177 - Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 101 738 750

1 184 880 297

+ 7,5%

1 101 738 750

1 184 880 297

+ 7,5 %

Programme 109 -

Aide à l'accès au logement

5 369 794 300

5 285 354 585

- 1,6%

5 369 794 300

5 285 354 585

- 1,6 %

Programme 135 - Développement et amélioration de l'offre de logement

510 816 253

558 400 000

+ 9,3%

629 635 020

518 400 000

- 17,7 %

Programme 145 - Politique de la ville

714 250 097

618 259 700

- 13,4%

702 458 595

618 359 700

- 12,0 %

Source : projet annuel de performances « Ville et logement » annexé au projet de loi de finances pour 2011

Cette évolution globale est imputable à plusieurs facteurs dont les effets sont divergents :

- la poursuite du rebasage à la hausse de certaines dotations concernant l'hébergement d'urgence ;

- des mesures d'économies sur les aides personnelles au logement ;

- la débudgétisation d'une partie des crédits (CP) destinés au logement locatif social ;

- la baisse des crédits liée à la réforme des exonérations de charges sociales dans les zones franches urbaines votée dans le cadre de la loi de finances pour 2009.

2. La fin du plan de relance

L'examen du projet de budget de la mission « Ville et logement » pour 2011 doit aussi prendre en considération l'achèvement du « plan de relance de l'économie » dont la mise en oeuvre, à travers le programme 317 « Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité » a très largement soutenu les actions financées en 2009 et 2010.

Pour ces deux exercices, en effet, le plan de relance de l'économie a permis la mobilisation de 315 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour le logement, ouverts par les lois de finances rectificative du 4 février 2009 et initiale du 30 décembre 2010 et ainsi répartis :

- 243 millions d'euros pour le logement locatif social ;

- 50 millions d'euros pour le financement du « Pass foncier » ;

- 32 millions d'euros pour le financement de places dans les centres d'hébergement ;

- 133 millions d'euros pour l'amélioration de l'habitat et notamment la lutte contre l'habitat indigne et la précarité énergétique.

En outre, le plan de relance a apporté des financements complémentaires à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) pour 350 millions d'euros ainsi qu'à l'Agence de l'amélioration de l'habitat (ANAH) pour 200 millions d'euros.

La comparaison des seules dotations budgétaires inscrites en lois de finances initiales est donc trompeuse. La politique menée en direction du logement et de la ville sera, en effet, d'autant plus affectée par la fin du plan de relance qu'elle en a été une des grandes bénéficiaires.

B. LE RECOURS AUX FINANCEMENTS EXTRA BUDGÉTAIRES S'AMPLIFIE

1. Le maintien de la contribution d'Action logement à un niveau élevé

L'année 2011 est la troisième année d'application du dispositif mis en place par la loi de mobilisation pour le logement et de lutte contre l'exclusion (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009), qui vise à orienter par voie réglementaire les emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) , en substitution notamment du financement sur le budget de l'Etat des actions de l'ANRU et de l'ANAH.

Pour cet exercice, le décret du 22 juin 2009 a prévu les emplois suivants :

Les emplois de la PEEC pour 2011 définis par voie réglementaire

(en millions d'euros)

Financement du programme national de rénovation urbaine (PNRU)

770

Financement du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD)

95

Financement de l'ANAH

480

Total

1 345

Source : décret n°2009-747 du 22 juin 2009

Votre rapporteur spécial avait souligné, lors de sa mise en place, les limites d'un dispositif de financement qui conduit inéluctablement, en développant les contributions de « type subvention », à assécher les fonds disponibles d'Action logement constitués à 40 % du produit de la collecte annuelle et à 60 % des retours de prêts 2 ( * ) , soit respectivement 1,7 milliard et 2,5 milliards d'euros en 2009.

Il avait émis le souhait que l'année 2010 soit mise à profit pour élaborer un schéma de financement des interventions de l'ANRU et de l'ANAH soutenable à moyen et long terme .

Or, les perspectives pour le futur schéma triennal d'emplois pour 2012-2014, pour l'élaboration duquel la loi du 25 mars 2009 prévoit qu'à compter du 30 juin 2011, le Gouvernement engage une nouvelle concertation avec les représentants des organisations syndicales et patronales membres de l'Union d'économie sociale du logement (UESL), sont encore floues et parfois contradictoires .

La réponse adressée par le ministère du logement, sur ce sujet, à votre rapporteur spécial précise : « à ce stade, aucun projet de schéma d'emplois n'a été arrêté pour la période 2012-2014 au sein du Gouvernement. Toutefois, un scénario « fil de l'eau » qui consisterait à maintenir, pour cette période, le niveau actuel des enveloppes moyennes annuelles pour l'ensemble des emplois d'Action Logement ne devrait pas pouvoir être retenu. Deux orientations devraient être privilégiées.

D'une part, la lettre plafond du ministre en charge du logement prévoit que la contribution d'Action Logement au financement des agences devrait être maintenue à son niveau actuel en 2012 et 2013, confirmant ainsi le rôle d'acteur et de financeur clef d'Action Logement en faveur de la rénovation urbaine et du soutien à l'amélioration du parc privé.

D'autre part, la diminution du montant ou du volume de certains emplois, ainsi que la transformation de certaines aides en aides à retour plus rapide pourrait être envisagée. Cette orientation, qui permettrait aux collecteurs de disposer d'un fonds de roulement suffisant pour ne pas avoir à recourir à l'emprunt, sera explorée de façon plus approfondie dans la perspective des discussions qui seront initiées prochainement avec les partenaires sociaux d'Action Logement. Des simulations réalisées indiquent qu'il existe des scénarios permettant d'assurer la pérennité de l'intervention d'Action Logement sur la période 2012-2014 . »

Les responsables d'Action logement , rencontrés par votre rapporteur spécial, estiment pour leur part qu'au-delà d'une contribution annuelle des emplois subventionnés plafonnée à 1 milliard d'euros pour la nouvelle période triennale, le déséquilibre financier du système deviendra insupportable.

D'ores et déjà, 3 collecteurs sur 21 devraient se trouver en situation de déficit comptable à la fin 2010 et plus de la moitié le seront en fin d'exercice 2011.

Ils s'interrogent également sur la justification de la contribution apportée par la PEEC au financement des aides de l'ANAH, qui ont été réorientées en priorité vers le soutien aux propriétaires occupants modestes et la rénovation thermique du parc privé dans le monde rural, soulignant que la participation des entreprises a été instituée pour favoriser le développement de la construction de logements à destination des salariés des entreprises et les aides à la mobilité.

En parallèle d'une réévaluation de l'efficience des aides accordées par l'ANAH et de la définition d'un mode de financement plus adapté à sa destination, ils privilégient une réorientation des fonds de la PEEC vers trois objectifs : le logement des jeunes à l'entrée dans la vie active, le logement des salariés en difficulté et l'aide à la mobilité professionnelle.

Pour les mois à venir, votre rapporteur spécial affirme son attachement à l'application effective du principe de concertation sur la définition des enveloppes triennales, introduit dans la loi par le Parlement à l'occasion de la réforme du 1 %. Ce principe signifie en particulier que la définition des emplois de la PEEC ne doit pas résulter exclusivement des contraintes du financement à court terme des priorités de l'Etat mais prendre en compte également les orientations stratégiques des partenaires sociaux.

A défaut, il deviendrait légitime de s'interroger à nouveau sur la nature du prélèvement constitué par la PEEC et sur le bien-fondé de sa gestion hors du budget de l'Etat.

Il considère également que l'hypothèse d'un maintien, à la charge d'Action logement, d'un niveau annuel de contributions subventionnées à 1,250 milliard d'euros, évoqué par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat 3 ( * ) , ne paraît pas compatible avec la pérennité du système de la PEEC.

2. Le projet de loi de finances propose de faire appel aux ressources des HLM pour financer l'ANRU et compenser la baisse des aides à la pierre

Une des mesures les plus controversées associées au projet de budget pour 2011 de la mission « Ville et logement » 4 ( * ) est la proposition de création d'un prélèvement sur les ressources financières des organismes HLM , fondé sur leur assujettissement à la contribution sur les revenus locatifs (CRL).

Il est en effet prévu de confier à la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) la gestion d'un fonds alimenté par la CRL versée par les organismes de logement social, qui ne seraient plus exonérés de ce prélèvement à partir de 2011. Le produit attendu de cette mesure serait, en 2011, de 340 millions d'euros redistribués pour le financement des dépenses de construction de logements locatifs sociaux, via le financement des aides à la pierre (80 millions d'euros) et de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (260 millions d'euros).

Cette mesure est présentée , par le Gouvernement , comme un outil de mutualisation et de péréquation des ressources financières entre organismes HLM, mais également comme devant contribuer à la maîtrise des finances publiques par la suppression d'une niche fiscale instituée à leur profit.

Votre rapporteur spécial estime que cette présentation est, par plusieurs aspects, abusive et trompeuse .

Le non-assujettissement des organismes HLM à la CRL ne peut pas être considéré comme une niche fiscale . La CRL tire son origine de la contribution additionnelle au droit de bail, qui finançait l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) et les aides aux propriétaires bailleurs et occupants privés. Depuis l'origine, les bailleurs sociaux n'étaient donc pas concernés par cette imposition de même qu'ils ne bénéficient pas des aides de l'ANAH. En outre, si la qualification de niche fiscale devait être retenue, elle devrait s'appliquer à l'ensemble des logements non assujettis dont l'article 234 nonies du code général des impôts dresse une liste de douze catégories, parmi lesquels figurent les logements faisant partie de villages de vacances ou les locaux à la réhabilitation desquels l'ANAH a participé dans les quinze dernières années.

La nouvelle contribution proposée par l'article 99 du présent projet de loi ne peut être qualifiée d'instrument de péréquation . En effet, dans la mesure où son assiette est constituée de la masse des loyers perçus, elle s'applique indifféremment et uniformément à tous les organismes, quelle que soit leur situation financière, leur implication dans les opérations de construction en cours ou à venir, ou l'état de leur parc.

Enfin, s'agissant de l'ANRU , elle aboutit à écarter la perspective de la rebudgétisation, même partielle, du financement du programme de rénovation urbaine, dont l'Etat n'aura, en définitive, qu'inscrit les autorisations d'engagements en application de la loi de programmation et versé 350 millions d'euros en crédits de paiement, laissant à ses partenaires la tâche d'assurer le solde du financement des conventions signées, pour un montant total de 11,5 milliards d'euros.

3. Les conséquences du recours aux fonds de concours

Le recours à des financements extra-budgétaires conduit à réduire la portée de l'autorisation accordée par le Parlement à l'occasion de l'examen des lois de finances.

Ce procédé a pris une ampleur croissante dans la gestion de la mission « Ville et logement » depuis quelques années 5 ( * ) .

Une grande partie du financement de la politique du logement passe désormais par la voie réglementaire , notamment depuis la réforme de la participation des employeurs à l'effort de construction, dans le cadre de la loi de mobilisation pour le logement. Ce sont, en effet, des décrets qui déterminent désormais les emplois du 1 %, qui pouvaient précédemment faire l'objet de conventions entre les partenaires sociaux et l'Etat.

Le projet de budget pour 2011 voit l'apparition d'un nouveau procédé de débudgétisation qui prend la forme de la multiplication des fonds de concours.

On constate, ainsi, une exceptionnelle progression des montants concernés qui viennent abonder les crédits budgétaires de la mission « Ville et logement » sur le programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

Au cours des exercices précédents, le montant total de ces fonds de concours avoisinait 130 000 euros. Il s'élève à 93,130 millions d'euros en crédits de paiement dans le projet de budget 2011 6 ( * ) , représentant ainsi 18 % du total des crédits budgétaires de l'ensemble du programme.

Votre rapporteur spécial est très interrogatif face à l'utilisation de ces fonds de concours dont le contrôle échappe nécessairement à l'appréciation du Parlement. Ils constituent, en effet, des compléments aux dotations budgétaires dont l'administration dispose librement, même si l'article 17-II de la loi organique relative aux lois de finances dispose que « les recettes des fonds de concours sont prévues et évaluées par le projet de loi de finances » et que le décret n°2007-44 du 11 janvier 2007 pris pour son application a fixé des règles strictes s'agissant de l'utilisation des fonds de concours pour les dépenses d'investissement et de l'emploi des fonds.

C. LES DÉPENSES FISCALES DOIVENT ÊTRE MIEUX CONTRÔLÉES

1. Une tendance de fond à l'augmentation

Les dépenses fiscales liées à la mission « Ville et logement » sont pour leur quasi-totalité rattachées au programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

Elles s'élèvent à plus de 12 milliards d'euros , en progression de 5,8 % par rapport à 2010.

Dépenses fiscales rattachées à la mission « Ville et logement »

(en millions d'euros)

2010

2011

Programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables »

Impôts d'Etat

20

30

Impôts locaux, pris en charge par l'Etat

26

23

Programme 109 « Aide à l'accès au logement »

Impôts d'Etat

46

46

Impôts locaux, pris en charge par l'Etat

25

25

Programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement »

Impôts d'Etat

11 482

12 153

Impôts locaux, pris en charge par l'Etat

29

29

Programme 147 « Politique de la ville »

Impôts d'Etat

296

310

Impôts locaux, pris en charge par l'Etat

149

157

Total

Impôts d'Etat

11 844

12 539

Impôts locaux, pris en charge par l'Etat

229

234

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

2. Un retournement est possible grâce à la remise à plat des aides fiscales à l'accession

La tendance constatée depuis plusieurs exercices à la hausse de la dépense fiscale pourrait prendre fin ou s'inverser à compter de 2011 en raison des deux décisions prises par le Gouvernement et consistant à proposer d'une part un « rabotage » des niches fiscales et, d'autre part une refonte des aides à l'accession à la propriété .

L' article 58 du projet de loi de finances propose ainsi de réduire d'un pourcentage identique de 10 % chacune des dépenses fiscales (réductions et crédits d'impôt) comprises dans le champ du plafonnement global prévu à l'article 200-0 A du code général des impôts.

Compte tenu des dispositions de l'article 58 qui écartent du champ d'application de la mesure les dispositifs supprimés mais qui continuent à produire des effets 7 ( * ) , les dépenses fiscales rattachées à la mission « Ville et logement », concernées par cette mesure sont les suivantes :

Dépenses fiscales du domaine du logement concernées par la réduction de l'avantage en impôt procuré par certaines niches (article 58 du projet de loi de finances)

Mesure fiscale

Estimation 2011 (en millions d'euros)

Réduction d'impôt au titre des investissements dans des résidences hôtelières à vocation sociale

< 0,5

Réduction d'impôt accordée au titre de l'investissement immobilier locatif neuf (réduction d'impôt « Scellier »)

320

Réduction d'impôt au titre des investissements immobiliers dans le secteur de la location meublée non professionnelle (réduction d'impôt «  LMNP »)

20

Crédit d'impôt au titre des contrats d'assurance pour loyers impayés des logements locatifs conventionnés

6

Source : évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2011 et projet annuel de performances

Le projet de loi de finances inclut également, dans son article 56 , un dispositif ambitieux de simplification des aides à l'accession à la propriété portant création d'un nouvel outil unique, sous la forme d'un prêt à taux zéro renforcé ayant vocation à se substituer au dispositif actuel de prêt à 0 %, au crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunts et au Pass-foncier.

Bien que le coût global du nouveau dispositif en régime de croisière soit estimé à 2,6 milliards d'euros par an, et que les anciens dispositifs (intérêts d'emprunt et prêt à 0 %) continuent à produire des effets jusqu'en 2016 8 ( * ) , cette réforme serait de nature à procurer, à compter de 2012, une économie fiscale importante qui atteindrait 2,5 milliards d'euros en 2018 .

Économies attendues de la réforme des aides à l'accession à la propriété

(en millions d'euros)

Année fiscale

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Économie de dépense fiscale attendue

460

1 040

1 470

1 850

2 230

2 500

2 500

Source : Commission des finances

3. Une évaluation approximative et parfois contestable

Dans son rapport budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2010, votre rapporteur spécial avait appelé de ses voeux l' amélioration de l'évaluation des dépenses fiscales du programme « Ville et logement » dans deux directions : la systématisation de l'estimation des mesures fiscales qui reste très largement défectueuse et la mise en évidence du phénomène de « verdissement » des dispositifs fiscaux.

Sur le second point, les réponses du ministère au questionnaire budgétaire adressé par votre rapporteur spécial ont permis d'établir un premier bilan sous la forme d'un inventaire des diverses mesures dont il convient désormais d'évaluer et de suivre le coût et l'efficacité.

S'agissant de l'estimation des dépenses fiscales, aucune amélioration significative ne peut être constatée .

Evolution de l'estimation des dépenses fiscales de la mission

PLF 2010

PLF 2011

Nombre de dépenses fiscales rattachées à la mission

59

68

Nombre de dépenses fiscales estimées

(en % des dépenses fiscales)

32

(54 %)

40

(59 %)

Nombre de dépenses fiscales considérées comme négligeables*

(en % des dépenses fiscales)

9

(15 %)

9

(13 %)

Nombre de dépenses fiscales jugées « non chiffrables »

(en % des dépenses fiscales)

18

(31 %)

19

(28 %)

* est considérée comme négligeable au titre des évaluations figurant dans les projets annuels de performances, une mesure fiscale dont le coût est estimé inférieur à 0,5 million d'euros

Source : Commission des finances

L'insuffisance quantitative de l'évaluation se double, parfois, d' approximations méthodologiques dont la cause peut tenir dans l'absence de données aisément disponibles ou être liée à des hypothèses de calcul erronées. Dans ces conditions, certaines estimations peuvent apparaître très contestables.

Votre rapporteur spécial estime ainsi l'évaluation, à 25 millions d'euros, de la dépense fiscale correspondant au dégrèvement de taxe d'habitation en faveur des personnes de condition modeste relogées dans le cadre d'un projet conventionné au titre du programme ANRU 9 ( * ) , comme très largement surestimée.

Le mode de calcul retenu repose, en effet, comme l'ont indiqué les services du ministère des finances, sur l'hypothèse que tous les logements dont la démolition est prévue dans le cadre des conventions ANRU passées en comité d'engagement de l'agence 10 ( * ) , ont été concernés par cette mesure, ce qui supposerait notamment :

- que l'ensemble des logements étaient occupés ;

- que tous les locataires ont été relogés dans des logements dont la valeur locative était au minimum du triple de la valeur de leur logement initial ;

- que toutes les opérations de démolition prévues ont été réalisées dans leur intégralité.


* 1 Loi n° 2009-135 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 du 9 février 2009 et projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

* 2 En particulier des prêts à court et moyen terme aux ménages, de type « Pass-travaux ».

* 3 Interview de François Baroin dans les Echos, 6 juillet 2010.

* 4 Voir le commentaire de l'article 99 du projet de loi de finances, rattaché à la présente mission.

* 5 Contribution obligatoire des sociétés anonymes de crédit immobilier, réforme du 1% Logement.

* 6 L'origine et la destination de ces fonds de concours sont détaillés dans les commentaires portant sur le programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

* 7 Ces dispositifs comprennent les déductions au titre de l'amortissement « Robien classique », « Robien recentré », « Borloo neuf », « Robien SCPI » et « Borloo SCPI » ainsi que le crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt pour l'acquisition de l'habitation principale.

* 8 Effets décroissants de 3,450 milliards d'euros en 2011 à 250 millions d`euros en 2016.

* 9 Cette mesure, votée à l'initiative de votre rapporteur spécial et de notre collègue Serge Dassault dans la loi de finances pour 2009, a pour objet de faciliter les opérations de démolition/reconstruction en levant les réticences à quitter leur logement actuel de certains locataires qui craignent une hausse importante de leur taxe d'habitation. Elle permet la prise en charge, pendant une période de trois ans, de l'écart de taxation entre l'ancien logement et celui du relogement.

* 10 Soit 130 891 logements en juillet 2010.