II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N°3805 XIIIÈME LÉGISLATURE PREMIÈRE LECTURE

Le présent article gèle de manière pérenne plusieurs dotations de fonctionnement et d'investissement appartenant à l'enveloppe normée, de manière à ne pas alourdir la contrainte qui pèsera au final sur les variables d'ajustement.

Les dotations visées sont sensiblement les mêmes que celles visées l'année dernière : y a été ajoutée la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), créée par la LFI 2011 à partir de la fusion de la DGE des communes et de la DDR. Par ailleurs, le présent article ne fait plus référence à la dotation pour les titres sécurisés dont le gel a été voté l'année dernière de manière pérenne (alors que les autres ne l'ont été que pour l'année 2011).

Compte tenu du gel de l'enveloppe normée au moins jusqu'en 2014 et afin d'éviter de voter chaque année une disposition législative, le présent article prévoit un gel qui s'appliquera à compter de 2012 jusqu'à une éventuelle nouvelle intervention du législateur.

I.- LE POIDS DES DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT AU SEIN DE L'ENVELOPPE NORMÉE

A.- LES DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT

1.- Les dotations générales de décentralisation (DGD)

La DGD a été créée en 1983 en vue d'assurer un complément de financement de l'ensemble des compétences transférées ( 25) . Elle est le solde entre les charges transférées et les impôts d'État qui ont eux-mêmes été transférés en compensation. Il s'agit d'une dotation globale et libre d'emploi. En réalité, il convient plutôt de parler de plusieurs DGD, puisqu'à la suite de l'intégration dans la DGF en 2004 de l'essentiel des montants versés aux départements et aux régions, seuls demeurent identifiables certains concours particuliers.

a) Les DGD de la mission Relations avec les collectivités territoriales

- Les dotations destinées à la Corse

La loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse ainsi que la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse ont organisé le transfert de compétences à la collectivité territoriale de Corse et conduit à l'émergence d'une DGD spécifique à cette collectivité. Par ailleurs, la loi du 13 mai 1991 a instauré parallèlement à la DGD une dotation de continuité territoriale visant à financer les obligations de service public définies par la collectivité territoriale en matière de liaisons aériennes et maritimes entre l'île et le continent. Ces deux dotations sont retracées au sein de la mission Relations avec les collectivités territoriales.

- Les DGD de droit commun

Cette même mission retrace également la DGD résiduelle, obéissant au principe de compensation supplétive des transferts de compétences. Il s'agit de la somme de l'ensemble des concours particuliers créés ponctuellement ( 26) et des montants de DGD visant à compenser les transferts des actes I ou II de la décentralisation pour les communes, les départements et les régions.

Au sein de cet ensemble, il convient également de distinguer la DGD versée aux régions d'outre-mer en compensation des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004. Dans la mesure où la TIPP ne s'applique pas dans ces régions, leur compensation est versée uniquement sous forme de DGD, qui perd de ce fait, pour ces collectivités, son caractère résiduel.

b) Les DGD « Formation professionnelle »

L'historique de la DGD Formation professionnelle prend sa source dans la création par les premières lois de décentralisation des Fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle. En effet, la dotation servait initialement à alimenter ces fonds. Elle est aujourd'hui retracée sur le programme 103 de la mission Travail et emploi.

Ici encore, l'appellation de dotation est trompeuse tant les compensations sont multiples. Elles résultent du transfert progressif de 1983 à 2004 de nouvelles charges de l'État vers les régions.

2.- Les autres dotations indexées comme la DGF

a) La dotation spéciale pour le logement des instituteurs (DSI)

La DSI a été créée par l'article 94 de la loi du 2 mars 1982, afin de compenser aux communes le transfert de la charge du logement des instituteurs. La création du corps des professeurs des écoles a cependant vocation à éteindre progressivement la DSI, puisque l'indemnité de logement est désormais intégrée au traitement de ces fonctionnaires. C'est pourquoi la DSI est diminuée chaque année, après indexation, pour tenir compte du nombre exact d'instituteurs bénéficiaires d'un droit au logement.

b) La dotation « élu local »

La loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux a prévu des dispositions relatives à la revalorisation des indemnités des maires et des adjoints, aux autorisations d'absence et à la formation. La dotation « élu local » vise à assurer, aux petites communes rurales, les moyens financiers adaptés à la mise en oeuvre de ce statut de l'élu.

c) Le fonds « catastrophes naturelles »

L'article 110 de la loi de finances pour 2008 (n° 2007-1822 du 24 décembre 2007) a instauré un Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles. Il doit permettre de contribuer à la réparation de dégâts causés par certains événements climatiques ou géologiques. En effet, certains sinistres, bien qu'importants pour les collectivités territoriales concernées, ne relèvent pas d'une ampleur telle, ou sont trop localisés, pour qu'ils justifient la mise en oeuvre de la solidarité nationale. L'article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales, créé par la loi de finances pour 2008, prévoit que le Fonds sera « doté de 20 millions d'euros par an », cette somme étant prélevée sur le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP).

d) La dotation pour les titres sécurisés

La dotation pour les titres sécurisés a été créée par l'article 136 de la loi de finances pour 2009 (n° 2008-1425 du 27 décembre 2008), dans l'objectif d'indemniser les communes équipées par l'État en stations d'enregistrement des demandes et remise des titres d'identité et de voyage sécurisés, pour l'activité générée par les demandes de titres émanant de citoyens ne résidant pas dans la commune d'implantation. Il s'agit d'une compensation forfaitaire et annuelle versée aux communes disposant de tels équipements au 1 er janvier de l'année en cours. Son montant, indexé comme la DGF, s'élève ainsi en 2010 à 5 030 euros par an et par station.

B.- LES DOTATIONS D'INVESTISSEMENT

Les concours de l'État aux dépenses d'équipement des collectivités locales sont répartis sur trois types de supports : des crédits budgétaires de la mission Relations avec les collectivités territoriales gérés de façon déconcentrée à l'échelle départementale, des prélèvements sur les recettes de l'État répartis sous forme d'enveloppe dite « fermée » en fonction de critères légaux (DRES et DDEC) et des prélèvements sur les recettes de l'État ayant un caractère évaluatif, le versement à chaque collectivité étant fonction de paramètres non budgétaires mais fixés par la loi. Les dotations entrant dans les deux premières catégories sont concernées par la présente mesure.

1.- Les subventions dont la gestion est déconcentrée

Il s'agit de la dotation globale d'équipement, elle-même décomposée en DGE des communes et DGE des départements dont les régimes diffèrent, et de la dotation de développement rural (DDR), la DGE des communes et la DDR ayant été fusionnées en LFI pour 2011 au sein de la DETR. Ces dotations doivent normalement évoluer chaque année comme la FBCF des administrations publiques.

2.- Les concours en faveur des équipements scolaires

Créées par les articles 16 et 17 de la loi du 22 juillet 1983, la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) et la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) ont vocation à compenser les dépenses d'équipement et d'investissement des établissements publics d'enseignement transférés à ces collectivités. La loi de finances pour 2008 n'a pas modifié la règle d'indexation des masses de la DRES et de la DDEC, qui demeure l'évolution de la FBCF des administrations publiques. En revanche, les deux dotations sont devenues des prélèvements sur les recettes de l'État. Par ailleurs, l'article 104 de la loi de finances rectificative pour 2007 a organisé le financement des collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy et fixé les modalités de calcul et d'attribution d'une dotation globale de construction et d'équipement scolaire (DGCES), prévue en faveur de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy au titre des collèges et lycées transférés par le département et la région de Guadeloupe.

3.- Les concours dépourvus de pilotage

Deux autres prélèvements sur recettes sont versés en section d'investissement sur les budgets des collectivités territoriales. Ils partagent la caractéristique d'être inscrits sous forme évaluative dans le budget de l'État, puisqu'il ne s'agit pas d'enveloppe normée. In fine leur total réel n'est inscrit qu'en loi de règlement après constatation en exécution des effets de la loi. Il s'agit du FCTVA et du produit des amendes de police.

II.- LA MESURE PROPOSÉE : UN GEL PÉRENNE TIRANT LES CONSÉQUENCES DE L'ENVELOPPE NORMÉE

A.- UN GEL PÉRENNE DES DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT

Le présent article prévoit de geler de manière pérenne toutes dotations qui n'avaient, dans la LFI 2011, été gelées que de manière transitoire. Le tableau ci-dessous récapitule les dotations ainsi visées en précisant les alinéas du présent article procédant à leur gel ainsi que leur montant reconduit en 2012.

DOTATIONS GELÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE

• (en millions d'euros)

NOMS DE LA DOTATION

ALINÉA OPÉRANT LE GEL

MONTANTS 2012

• Dotation générale de décentralisation (mission RCT)

• 1° du paragraphe I

• 1 513

• Dotation spéciale pour le logement des instituteurs

• 2° du paragraphe I

• 26

• Dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR)

• 3° du paragraphe I

• 615,7

• Dotation « élu local »

• 4° du paragraphe I

• 65

• DGE des départements

• 5° du paragraphe I

• 224,5

• DDEC

• 6° du paragraphe I

• 326,3

• DRES

• 6° du paragraphe I

• 661,2

• Dotation générale de décentralisation (Corse)

• 7° du paragraphe I

• 40

• Dotation globale de construction et d'équipement scolaire de Saint-Martin

• 7° du paragraphe I

• 2,6

• DGD formation professionnelle

• Paragraphe III

• 1 702

Source : Documents budgétaires

B.- LE GEL DE CES DOTATIONS EST-IL SUFFISANT DANS LE CONTEXTE ACTUEL ?

Le Rapporteur général s'interroge toutefois sur ce gel en valeur des dotations de fonctionnement et d'investissement mentionnées ci-dessus, au vu du besoin de financement de la DGF qui pèse considérablement sur les composantes de la DGF elle-même ainsi que sur les compensations d'exonérations de fiscalité locale. En effet, une baisse relative de ces dotations pourrait permettre de soulager la DGF, notamment du bloc communal, ou encore de modérer la baisse des compensations d'exonérations de fiscalité locale, afin de financer un accroissement des sommes allouées à la péréquation.

Le Rapporteur général souligne en ce sens que les dotations de fonctionnement concernées par le présent article ne participent pas à la péréquation, certaines d'entre elles correspondant par ailleurs à des constantes historiques. À titre d'exemple, il est difficile de cerner l'impératif qui commande de minorer les compensations d'exonération de taxe foncière, plutôt que les vieilles compensations sous forme de DGD.

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La Commission adopte l'article 7 sans modification .