III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE (2ÈME SÉANCE DU LUNDI 14 NOVEMBRE 2011)

Article 41

M. le président. « Art. 41. - L'article 199 sexvicies du code général des impôts est ainsi modifié :

A. À la première phrase du I, l'année : « 2012 » est remplacée par l'année : « 2015 ».

B. Le deuxième alinéa du II est ainsi complété : « Toutefois, pour les logements ayant fait l'objet d'un dépôt de demande de permis de construire à compter du 1 er janvier 2012, le taux de la réduction d'impôt est de 14 %. »

Sur l'article 41, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. J'interviens sur l'article 41 pour évoquer une sortie apaisée de la loi Demessine, qui s'appliquait aux résidences de tourisme en zone de revitalisation rurale et qui a été supprimée fin 2010 par le Sénat.

Cette loi a eu des effets positifs en créant des équipements touristiques dans des territoires souvent défavorisés, mais aussi des effets négatifs en raison de la défaillance de certains promoteurs peu scrupuleux, entraînant le non-achèvement des travaux dans les résidences, puis l'absence et le retrait de gestionnaires. Toujours par effet domino, les services de l'État, constatant la rupture du contrat initial ouvrant droit à des avantages fiscaux, ont été conduits à prendre des mesures confiscatoires, telles que le non-reversement de la TVA sur travaux et la reprise de réductions d'impôts qui étaient prévues. Ces sanctions se sont ajoutées au fait que de nombreux investisseurs particuliers de certains sites lancés en 2007 et 2009 n'ont toujours pas reçu le moindre loyer, ce qui a provoqué des drames personnels.

Si j'interviens depuis cette période auprès des divers ministres du budget, comme je vous l'ai dit jeudi dernier, madame la ministre, c'est pour demander d'atténuer les effets de ces carences en cascade en faveur de personnes qui n'ont pas la fortune des Bettencourt, Arnault ou Pinault, et qui ont cru pouvoir se constituer un patrimoine pour leur retraite ou pour leur descendance.

Je souhaite, dans le cadre de cet article 41, vous alerter afin que vous acceptiez de solder, pour des sommes relativement modiques, les conséquences désastreuses d'encadrement d'une loi qui a manifestement pâti de l'absence de verrous de sécurité financière entre les trois groupes concernés par ce type d'opération : promoteurs, gestionnaires, investisseurs.

Je ne suis pas hors sujet en évoquant ces problèmes à propos de l'article 41, qui traite bien de réductions d'impôt non soumises à des zonages et à des plafonds de loyer ou de ressources. Je pense même rester dans votre coeur de cible, madame la ministre, puisque vous proposez de prolonger le dispositif de fin 2012 à fin 2015, preuve, à vos yeux, de son utilité. Niche fiscale soit, mais, à l'inverse de celles dont les seuls bénéficiaires sont des foyers riches, si ce type de mesure abaisse les impôts des contribuables concernés, il constitue aussi un levier efficace pour l'emploi, les investissements et le développement en ZRR.

Dès lors, ce choix devrait vous engager aussi à régler, au coup par coup et au plus vite, les problèmes des investisseurs dans des résidences de tourisme, qui ont signé des contrats qu'ils espéraient gagnants et qui se sont révélés perdants. Je compte sur vous, madame la ministre, pour évoquer ce problème.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

M. Jean-Paul Lecoq. La composante communiste du groupe GDR a déposé un amendement de suppression de cette niche fiscale, qui a été rejeté par les services de l'Assemblée. Nous avons néanmoins des choses à dire.

L'État a le devoir de permettre à tous nos concitoyens de vivre dignement. Cela suppose un droit universel au logement, en priorité pour ceux qui ont des difficultés financières, comme les chômeurs, les jeunes, les travailleurs précaires, qui sont de plus en plus nombreux. Cette niche fiscale, à l'instar du dispositif Scellier, finance le logement privé et ne poursuit aucunement l'objectif prioritaire de loger tout le monde décemment. Elle doit donc, en effet, être supprimée.

En revanche, l'argent récupéré doit être alloué non pas à la réduction des déficits, comme vous vous y engagez, mais à la construction de logements sociaux. Nos amendements avaient pour but de favoriser la construction par les collectivités publiques de logements sociaux, qui permettent de réduire des loyers devenus excessifs du fait de la spéculation immobilière. En d'autres termes, nous vous proposions de jeter les bases d'une politique du logement digne d'une société démocratique, en estimant que leur rejet serait la preuve, une fois de plus, que votre politique ne sert pas l'intérêt général mais bel et bien les intérêts particuliers des promoteurs immobiliers, des grands groupes du BTP et de tous les spéculateurs fonciers.

Nos amendements ont été déclarés irrecevables, mais nous tenions à faire valoir ces arguments.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. On a bien compris, au travers des dispositions proposées par le Gouvernement, qu'on s'achemine vers la fin d'un accompagnement par la défiscalisation des résidences de tourisme. Autant je souscris à l'objectif de réduction de la dépense fiscale, autant je considère, je l'ai dit dans la discussion générale, que cette réduction de la dépense fiscale doit se faire selon une approche intelligente, n'allant pas forcément vers un système uniformisé, mais prenant en compte aussi bien les effets produits économiquement que fiscalement par la dépense fiscale.

Le dispositif en faveur des résidences de tourisme a permis de construire les capacités d'hébergement de la France et d'en faire la première destination touristique au monde. Aujourd'hui, le secteur touristique est confronté à deux enjeux : la poursuite de la construction de résidences neuves, la rénovation de villages anciens, ce qui est absolument nécessaire sachant qu'une grande partie du parc touristique français date des années 70. Or ce sont les deux finalités du dispositif.

À cela s'ajoute le fait que ce dispositif, en vitesse de croisière, ne coûte qu'une vingtaine de millions d'euros par an au budget de l'État, même si nous avons eu un pic au cours de l'année 2010, malheureusement déjà redescendu du fait du coup de rabot opéré l'an dernier.

Quels sont les avantages qu'en retire l'État ? D'abord, des créations d'emplois pour la durée des chantiers, de l'ordre d'un emploi pendant un an par logement. Des créations d'emplois pérennes dans le secteur du tourisme : 0,6 emploi par logement en exploitation. De la TVA, c'est-à-dire de la recette fiscale, sur le chiffre d'affaires annuel par logement ; ce chiffre d'affaires, estimé à 30 000 euros annuels par logement et soumis à un taux moyen de TVA de 10 %, fait rentrer 2 700 euros de TVA par an, donc 54 000 euros sur une période de vingt ans. Environ 40 % de ce chiffre d'affaires est réalisé par une clientèle étrangère qui contribue à la balance des paiements pour 12 millions d'euros par millier de logements. On peut ajouter la fiscalité locale : taxes d'urbanisme, contribution économique territoriale, taxe foncière, taxes de séjour.

Aujourd'hui, en termes de fiscalité, ce dispositif rapporte donc plus à l'État qu'il ne lui coûte.

S'agissant enfin de la dépense fiscale elle-même, il existe une contrepartie : ces investisseurs perdent le droit d'amortir le bien immobilier. Il y a donc un retour de fiscalité dans le temps pour l'État.

Comme cela était envisagé lorsque l'échéance était fixée à 2015, j'aurais souhaité que nous puissions peser les avantages et les inconvénients du dispositif afin d'en avoir une appréciation globale, pour les finances de l'État comme pour l'impact touristique. Le tourisme est un secteur créateur d'emplois - il n'en existe plus tant que cela dans notre pays - et il contribue largement à la balance des paiements.

Je conçois que nous adoptions aujourd'hui une mesure d'urgence, mais je tenais à rappeler ces fondamentaux. Le problème des opérations en cours se pose ; je l'évoquerai lors de l'examen de l'amendement du Gouvernement.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 769 rectifié, présenté par le Gouvernement. Il fait l'objet de deux sous-amendements, le n° 807 de M. Michel Bouvard et le n° 804 rectifié de M. Carrez.

L'amendement n° 769 rectifié présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« Après le deuxième alinéa du II de l'article 199 sexvicies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, pour les logements acquis en 2012, le taux de la réduction d'impôt est de 14 %. »

La parole est à Mme la ministre pour présenter l'amendement.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le président, si vous me le permettez, je souhaite répondre à M. Nayrou avant de présenter l'amendement. Bien entendu, le Gouvernement est extrêmement attentif à la situation de tous les investisseurs qui ont bénéficié du dispositif Demessine. Nous ferons un traitement au cas par cas de chaque situation afin de nous assurer que ce dispositif n'a pas été détourné de son objet.

S'agissant à présent de l'amendement n° 769 rectifié, je voudrais dire à MM. Censi et Bouvard que le dispositif qui porte leur nom a effectivement été un formidable outil pour développer l'immobilier touristique. Nous ne nions évidemment pas son utilité au cours des années passées.

Néanmoins, avec la disparition du dispositif Scellier, le recentrage du prêt à taux zéro et la volonté affichée du rapporteur général de travailler à une politique de l'offre, nous remettons aujourd'hui à plat la politique du logement. Je saisis cette occasion pour dire à René-Paul Victoria que nous aurons également cette discussion sur l'outre-mer, puisque le dispositif Girardin en faveur du logement social a connu une forte croissance, et qu'il demeure épargné par la réduction des niches fiscales.

Dès lors, maintenir le dispositif Censi-Bouvard et la défiscalisation reviendrait à refuser de remettre à plat le système, et à conserver pour les résidences touristiques un avantage fiscal quelque peu similaire au dispositif Scellier dans son mode de fonctionnement.

Nous vous proposons donc, par cohérence, de supprimer la réduction d'impôt sur les locations meublées non professionnelles, à l'identique de ce qui est prévu pour le dispositif Scellier. La prorogation jusqu'au 31 décembre 2015 serait ainsi supprimée et le champ d'application du taux de réduction d'impôt serait réduit.

Je rappelle néanmoins qu'il y a une différence majeure en termes de fiscalité entre l'investissement dans le locatif meublé non professionnel et dans l'immobilier normal. Lorsque l'on investit dans les résidences touristiques, il est possible de récupérer la TVA à 19,6 %, ce qui représente un avantage considérable pour les investisseurs. Cet avantage sera maintenu, je tiens à le préciser devant la représentation nationale.

M. le président. Le sous-amendement n° 807 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

Compléter l'alinéa 3 par les mots :

« à l'exception des logements acquis, soit neufs ou en l'état futur d'achèvement ayant fait l'objet d'un dépôt de demande de permis de construire avant le 1 er janvier 2012, soit achevés depuis au moins quinze ans et faisant partie d'un ensemble immobilier dont un logement au moins a été acquis ou réservé avant le 1 er janvier 2012 ».

La parole est à M. Michel Bouvard pour soutenir le sous-amendement n° 807.

M. Michel Bouvard. Ce sous-amendement a trait à la question des programmes de rénovation mis en vente en 2011. Il est inenvisageable que la part des logements qui ne font pas encore l'objet d'une promesse de vente ou d'achat au 1 er janvier 2012 ne puisse pas bénéficier du même taux de défiscalisation que les logements neufs construits avec un permis de construire obtenu en 2011. Ces programmes de rénovation, déjà démarrés à ce jour, seraient gravement mis en péril au milieu de leur réalisation et de leur commercialisation.

Par ailleurs, l'amendement du Gouvernement n'évoque pas ce qui se passe après le 31 décembre 2012 pour les opérations en cours. Or, toute opération en cours doit pouvoir être conduite jusqu'à son terme dans sa globalité - travaux et commercialisation - dans les conditions en vigueur au moment où elle a été décidée et mise en oeuvre. C'est le minimum que peuvent attendre les opérateurs.

Un certain nombre de programmes en rénovation ne seront pas achevés avant le 31 décembre 2012. Sans ce dispositif de défiscalisation, l'équilibre financier de ces opérations actuellement lancées serait profondément modifié. Certaines opérations risquent même de ne pas pouvoir aller à leur terme. La configuration est très différente de la production de logements en Scellier. Avec le dispositif Scellier, on achète un appartement, qui compte quelques parties communes. Dans le cas présent, il existe des services communs : accueil des touristes, restauration, balnéothérapie pour certains équipements. Si l'opération est bloquée, on risque de fragiliser les principaux opérateurs touristiques au moment même où ils sont confrontés à la réduction de la demande liée au coup de rabot. Il ne faut pas les fragiliser davantage, et il faut que les opérations en cours puissent s'achever dans les conditions qui prévalaient lorsqu'elles ont été montées.

De même, pour un logement en Scellier, dès lors que vous avez votre permis de construire, même si cela peut prendre du temps, comme l'a démontré Gilles Carrez s'agissant du Perreux, l'opération peut être lancée. En montagne, il faut d'abord obtenir l'autorisation de créer une unité touristique nouvelle, ce qui signifie une à deux années de procédure pour obtenir l'arrêté d'UTN, en espérant qu'il ne sera pas attaqué par les associations écologistes. Il faut ensuite payer des compensations environnementales, des protections contre les risques naturels. Ce sont donc des opérations qui, avant même de donner le premier coup de pioche, ont déjà engagé entre un million et 1,5 million d'euros de dépenses. Si ces opérations ne peuvent pas être menées à leur terme, les sociétés devront passer des provisions pour dépréciations, et tout cela diminuera l'impôt sur les sociétés perçu par l'État.

M. le président. Le sous-amendement n° 804 rectifié présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

I. - Compléter l'alinéa 3 par les deux phrases suivantes :

« Ces dispositions ne s'appliquent pas aux acquisitions pour lesquelles le contribuable justifie qu'il a pris, au plus tard le 31 décembre 2011, l'engagement de réaliser un investissement immobilier. À titre transitoire, l'engagement de réaliser un investissement immobilier peut prendre la forme d'une réservation, à condition qu'elle soit enregistrée chez un notaire ou au service des impôts avant le 31 décembre 2011 et que l'acte authentique soit passé au plus tard le 31 mars 2012. »

II. - Compléter cet amendement par l'alinéa suivant :

« II. - Les pertes de recettes pour l'État sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts. ».

La parole est à M. le rapporteur général pour défendre le sous-amendement n° 804 rectifié.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il est vrai que nous avons affaire à un dispositif un peu plus compliqué que le Scellier, il s'agit du Censi-Bouvard, qui s'applique aux résidences avec services, à savoir les résidences pour étudiants, les résidences pour personnes âgées et les résidences de tourisme.

Comme l'a très bien expliqué Michel Bouvard, les choses sont plus complexes parce que l'on ne vend pas un logement individuellement, comme c'est le cas pour le Scellier dans un immeuble. Ce que l'on réalise, c'est un ensemble, avec des services et des parties communes importantes. Il faut donc faire très attention aux mesures de transition.

Malheureusement, nous avons l'habitude des mesures de transition : le régime fiscal des résidences avec services change en moyenne tous les deux ans, et je pourrais presque dire chaque année.

La règle appliquée est celle de la date d'acquisition. Soit l'opération porte sur du neuf, et c'est au moment de la signature de la vente en état futur d'achèvement que s'applique le régime fiscal. Soit l'opération porte sur la rénovation de l'existant, et c'est alors la date de l'acquisition qui entre en compte. Concernant le sous-amendement de M. Bouvard, ce n'est jamais la date du dépôt du permis de construire qui est prise en compte.

L'amendement que je propose, et qui a été adopté par la commission des finances, porte sur la transition entre 2011 et 2012. Il prévoit, à l'image de ce que nous avons prévu pour le dispositif Scellier que, si le contrat de réservation a été passé avant le 31 décembre 2011 et l'acte authentique signé avant le 31 mars 2012, c'est bien le régime pour 2011 qui s'appliquera.

En revanche, M. Bouvard soulève un point qui reste sans réponse : que se passe-t-il après 2012 ? Nous sommes là dans le vide complet. Dans le cas d'une opération qui s'étendrait au-delà de 2012, je suis incapable de répondre à la question de M. Bouvard. Je pense que la proposition de la commission des finances pour encadrer la transition de 2011 à 2012 devrait satisfaire M. Bouvard, mais elle ne règle rien au-delà de 2012.

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Pour des non-spécialistes, il est nécessaire de se livrer à un exercice de littérature comparée particulièrement complexe. Entre les différentes versions, initiale et rectifiée, de l'amendement n° 769 du Gouvernement, le sous-amendement de la commission des finances, lui-même rectifié, et celui de M. Bouvard, et alors même que les exposés des motifs ne changent pas, je vous assure que pour comprendre ce qu'il advient du Censi-Bouvard, il faut être expert.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut au moins être député !

Mme Sandrine Mazetier. Non, il ne faut pas être au moins député, et je ne sais d'ailleurs pas qui il faudrait être puisque vous-même, monsieur le rapporteur général, n'avez pas de réponse à la question soulevée par M. Bouvard !

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Il faut être Censi ou Bouvard ! (Sourires.)

Mme Sandrine Mazetier. J'aimerais au moins avoir la réponse sur le devenir du dispositif Censi-Bouvard, sans même parler de la transition envisagée pour l'année 2012.

Dans l'unique exposé des motifs de l'amendement n° 769 dans sa version initiale puis dans sa version rectifiée, vous expliquez que puisque le dispositif Scellier disparaît, le Censi-Bouvard, ou Bouvard-Censi, disparaît lui aussi. Est-ce bien le cas ? Et dans ce cas, ces amendements portant sur un article non rattaché, et donc, par définition, sur des exercices ultérieurs à 2012, pourquoi parle-t-on de permis de construire dans certains cas, d'acquisition en VEFA dans d'autres cas, qui portent tantôt sur 2011, tantôt sur 2012 ?

Quant au fond, la suppression du dispositif Censi-Bouvard ne nous dérange pas, au contraire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement, sur les sous-amendements n° 807 et 804 rectifié.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement donne un avis favorable au sous-amendement n° 804 rectifié, présenté par Gilles Carrez.

En réponse à Mme Mazetier, je lui confirme que le dispositif Censi-Bouvard sera supprimé à partir de 2013. S'il est fait mention de dates antérieures dans les sous-amendements de Gilles Carrez et de Michel Bouvard, c'est parce que ce sont des dates à partir desquelles les délais vont courir pour permettre l'extension ou constater la disparition des droits.

M. le président. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Je comprends bien les questions de Sandrine Mazetier, qui entre dans les arcanes de la commission des finances, laquelle traite de sujets complexes.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Et elle n'y entre pas par effraction ! (Rires.)

M. Yves Censi. Le sous-amendement de Michel Bouvard se réfère à des ensembles immobiliers et pas simplement à des acquisitions réalisées par un seul individu.

Les réhabilitations et rénovations concernent en effet pour la quasi-totalité d'entre elles des résidences. Il a été beaucoup question de résidences de tourisme, mais le rapporteur général a rappelé qu'il s'agissait également de résidences de personnes âgées - les EHPAD - et de résidences étudiantes, sujet que vous connaissez bien, madame la ministre.

Je crains que le sous-amendement de M. le rapporteur général ne concerne pas ces ensembles collectifs et ces groupes d'acquéreurs.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je remercie Gilles Carrez d'avoir montré que nous entrons dans l'inconnu au-delà de 2012 et je me permets, madame la ministre, d'insister sur ce point.

Je vais prendre un exemple que je connais bien : la rénovation d'un village de vacances. D'anciens villages de VVF ont été repris pour partie par Belambra. À Capbreton, plusieurs tranches de rénovation auront lieu. Mais le montage financier, l'économie du projet est conçue compte tenu d'une vue d'ensemble. Si les travaux de rénovation sont interrompus après la première tranche, alors qu'il en reste encore deux, on ne pourra plus achever l'opération. Il faudra donc l'abandonner et, à la place de sites rénovés et remis à niveau - les attentes de la clientèle de 2011 n'étant pas celles des années soixante-dix - on aura des friches touristiques, qui ne seront plus commercialisables.

Il faut permettre à l'opération préalablement identifiée d'aller à son terme dans les conditions selon lesquelles le montage initial a été fait. C'est le sens du sous-amendement que j'ai déposé.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Monsieur Censi, l'amendement de la commission des finances règle la question de la transition 2011-2012. Mais je voudrais prendre un autre exemple, ayant une portée théorique.

Une résidence de tourisme en construction, - je ne parle pas de réhabilitation - sera vendue fin 2012 aux trois quarts. Elle l'aura été pour partie sous l'empire du régime de 2011 - acte authentique signé avant le 31 mars 2012, réservation avant le 31 décembre 2011 - puis pour le reste sous l'empire du régime de 2012. Mais un quart de la résidence reste à vendre. L'équilibre général de l'opération - c'est là que l'on rejoint la notion d'ensemble immobilier évoqué par Yves Censi - n'est donc pas atteint et on risque de se retrouver, comme dans l'exemple de M. Bouvard pour les opérations de rénovation inachevées, avec une opération de construction inachevée, car un quart manquera. On voit donc bien que des mesures au-delà de 2012 sont nécessaires, pour achever ces ensembles immobiliers qui forment un tout.

Peut-être me direz-vous, madame la ministre, que l'on verra les mesures de transition fin 2012. Mais il faut tout de même s'interroger à ce propos dès maintenant.

M. Michel Bouvard. Il faut passer des provisions tout de suite dans les comptes des sociétés !

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Je veux rappeler le coût de ce dispositif.

M. Michel Bouvard. 20 millions !

Mme Sandrine Mazetier. Pour 2010, monsieur Bouvard ! Pour 2011, on l'estime à 55 millions. Il est bon de préciser de quoi on parle pour les députés qui ne sont pas membres de la commission des finances ou pour les citoyens qui nous écoutent.

Il s'agit de la politique menée par cette majorité et ce gouvernement. Il s'agit d'un dispositif d'incitation au locatif. Les bénéficiaires du Censi-Bouvard sont des contribuables qui acquièrent un logement pour le mettre en location, un logement qui n'est pas « zoné », donc qui se situe n'importe où en France, y compris là où il n'y a pas de besoins.

C'est un avantage fiscal considérable : 25 % de réduction de l'investissement réalisé avec un plafond de 300 000 euros. Les personnes qui nous écoutent sont pour la plupart très loin de ces montants d'impôt.

Cet avantage fiscal considérable était accordé à des personnes qui faisaient l'acquisition d'un logement dans une résidence avec services, pour étudiants par exemple - mais il ne s'agit pas de logements du CROUS ou d'aides aux étudiants bénéficiaires de l'APL - à des personnes qui réalisaient un investissement très fructueux puisqu'il n'était soumis ni à condition de zone, ni même à condition de loyer.

L'État a dépensé 20 millions d'euros en 2010, probablement 55 millions en 2011 pour aider des personnes qui avaient de l'argent à réaliser un placement hyperfructueux, sans même que cela profite aux locataires.

C'est l'illustration de vos priorités. Ce ne sont pas les nôtres.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Nous avons monté un nombre considérable d'opérations- je parle en tant que co-président du comité de massif des Alpes, et en tant que président du groupe montagne de l'Assemblée nationale - pour sauver des équipements de tourisme social dans des régions où celui-ci est indispensable, tant sur le plan social que sur le plan économique.

La plupart des stations moyennes ne sont en effet solvables que grâce à des lits de tourisme social. Si nous ne rénovons pas ces lits, un nombre considérable de stations petites et moyennes disparaîtront dans l'ensemble des massifs.

Et si nous n'adoptons pas le sous-amendement présenté par M. Michel Bouvard, nous risquons de nous trouver dans une situation qui conduira, fin 2012, à un constat de non-solvabilité des opérations que nous avons incité à monter, car la défiscalisation nous permettait de sortir d'une situation dégradée. Nous courrons à la catastrophe, non seulement avec des friches touristiques, mais pire encore avec des friches touristiques dans le domaine du tourisme social, ce qui serait dramatique.

La réhabilitation de logements dans nos régions a été considérable. Nous risquons une spirale infernale pour de nouvelles UTN, car nous n'aurons pas pu réhabiliter suffisamment de lits. Le sous-amendement de M. Michel Bouvard est tout à fait fondé pour les territoires de montagne, que je connais bien.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton . Ce débat est intéressant. Lorsque nous réviserons d'autres dispositifs fiscaux, il nous faudra être tout aussi attentifs à la continuité et au bon « atterrissage » des opérations.

Nous sommes un certain nombre - disons les choses comme elles sont - à être acteurs au titre de nos différentes responsabilités du montage de ces opérations, ce qui nous rend très sensibles à leur continuité.

J'en tire trois enseignements.

Premièrement, lorsque nous prenons des dispositions fiscales qui concernent des acteurs économiques plus éloignés de nos identités propres, ce souci de continuité doit également nous inspirer. Cela ressort à l'évidence de ce débat, tant au regard du temps que nous y consacrons qu'au regard de l'enjeu.

Deuxièmement, les propos de notre collègue Joël Giraud montrent combien tout un secteur d'activité est totalement dépendant de l'argent public. Sans doute cela peut-il cesser à un moment, sinon les difficultés financières de notre pays ne s'arrêteront jamais.

Troisièmement, autant je suis d'accord avec la logique d'opération décrite par Michel Bouvard, qui paraît très juste et très cohérente, autant je partage l'exigence de continuité qu'évoquait M. le rapporteur général, afin d'éviter qu'un trou dans le financement ne déstabilise complètement certaines opérations, autant je suis convaincu qu'il faudra définir soigneusement ce qu'est une opération. Je vois assez bien avec quelle commodité un certain nombre d'opérations pourraient être décrites aujourd'hui afin d'introduire une sorte de poursuite conventionnelle du dispositif au-delà du délai raisonnable.

(Le sous-amendement n° 807 n'est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 804 rectifié est adopté.)

(L'amendement n° 769 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements n os 572 et 668 tombent.

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2011-2012/20120052.asp#P614_142175