III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE (2ÈME SÉANCE DU MARDI 15 NOVEMBRE 2011)

Article 44

M. le président. « Art. 44. - Aux 1°, 2° et 3° du a du 1, aux b et c du 1 et au 4 de l'article 200 quater A du code général des impôts, l'année : « 2011 » est remplacée par l'année : « 2014 ».

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, inscrit sur l'article 44.

M. Jean-Paul Lecoq. Je serai bref, puisque nous avons déjà débattu de ce problème lors de l'examen des précédents articles.

Je tiens tout de même à revenir sur la maîtrise des risques technologiques. Voici, un petit plus de dix ans, l'usine AZF explosait à Toulouse et, aujourd'hui, nous mettons en oeuvre les plans de prévention des risques technologiques avec toutes les difficultés que l'on sait s'agissant de l'association des différents acteurs, parfois financièrement antagoniques. On demande aux industriels de maîtriser les risques à la source et d'investir dans cette maîtrise des risques. Certains changent d'ailleurs leurs process de production afin de limiter la dangerosité. Une clause de la loi Bachelot précise que cela doit être économiquement acceptable pour les industriels. L'objectif n'est effectivement pas de faire couler les entreprises. Cette dimension d'« économiquement acceptable » ne concerne que les industriels et n'existe pas pour les particuliers. Or, on l'a constaté tout à l'heure, les particuliers qui vivent près de ces usines sont économiquement fragiles et ne peuvent investir dans les solutions qui leur sont proposées pour se protéger du risque de pollution imposé par les industriels. Si autant de temps s'est écoulé entre la catastrophe de Toulouse et la mise en oeuvre des PPRT, c'est que le sujet est compliqué et qu'il a fallu trouver un consensus pour que les uns ne s'opposent pas aux autres. Je vous rappelle que, lors des événements de Toulouse, des ministres importants à l'époque et redevenus, depuis, ministres, avaient imaginé d'implanter les usines à la campagne. Or ce n'était pas crédible. Il fallait, au contraire, sécuriser les usines et veiller à ne pas exposer les gens à un risque létal. Les expulsions ont commencé. Ma ville compte dix-sept sites Seveso. C'est un record dans notre pays. Il convient, aujourd'hui, de respecter les uns et les autres. Ceux qui subissent doivent surtout mesurer l'effort de la collectivité - ce peut être l'État - ou de l'industriel. La loi Grenelle a prévu un crédit d'impôt de 40 %. Or ce taux a varié à de multiples reprises. Nous avons tenté, l'année dernière, en commission mixte paritaire, de le faire remonter, tellement les populations étaient inquiètes. Je sais que nous sommes, ici, un certain nombre d'élus locaux à nous battre pour que les populations ne s'opposent pas aux sites industriels. Nous essayons de créer les conditions pour y parvenir, mais il faut nous y aider. J'insiste auprès de Mme la ministre et auprès du rapporteur général. Je mesure l'effort proposé dans le cadre du doublement du plafond et je note que l'on n'appliquera pas le rabot. Or, et j'insiste, ce taux de 40 % proposé dans la loi Grenelle n'a satisfait personne, mais tout le monde a fait l'effort de l'accepter.

Nous demanderons dans l'amendement que nous défendrons le maintien de ce taux, en ajoutant le plafonnement proposé par la commission. Il n'y aurait pas d'abus de la part des gens qui vivent une telle situation.

Je rappelle qu'il ne s'agit pas de niches fiscales. Dans ces communes, on a encore une culture industrielle. Dans ma ville, on construit une usine qui va notamment traiter des huiles. Je ne suis pas sûr qu'il y ait un grand nombre de villes en France où l'on accepterait ce type d'usines. Nous associons les populations aux efforts, à la culture du risque et à l'acceptabilité des industries. Le Gouvernement doit comprendre que ce sont des zones précieuses pour notre pays et pour notre avenir.

M. le président. Sur l'article 44, je suis saisi de deux amendements, n os 697 et 517, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 697 présenté par M. Chanteguet, M. Plisson, M. Tourtelier, Mme Gaillard, M. Bouillon, M. Bono, Mme Darciaux, M. Duron, M. Brottes, Mme Quéré, Mme Massat, M. Rogemont, Mme Filippetti et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :

« 1° L'article 200 quater A est ainsi modifié :

« a) Aux 1°, 2° et 3° du a du 1, au c du 1 et à la première phrase du 4, l'année : « 2011 » est remplacée par l'année : « 2014 ».

« b) Le b du 1 est supprimé ;

« c) Le a bis du 5 est supprimé ;

« 2° Après l'article 200 quater A, est inséré un 23° bis A ainsi rédigé :

« 23 bis A

« Crédit d'impôt pour dépenses de protection contre le risque technologique

« Art. 200 quater A bis. - 1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu au titre des dépenses effectivement supportées pour réduire la vulnérabilité à des aléas technologiques.

« Ce crédit d'impôt s'applique aux dépenses payées entre le 1 er janvier 2012 et le 31 décembre 2015 pour la réalisation de travaux prescrits aux propriétaires d'habitation au titre du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, sous réserve que ces dépenses de travaux soient payées dans un délai de quatre ans suivant l'approbation du plan de prévention des risques technologiques prévu à l'article L. 515-15 du même code.

« 2. Le crédit d'impôt s'applique pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année du paiement de la dépense par le contribuable.

« 3. Pour un même logement, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt ne peut excéder, au titre d'une période de trois années civiles consécutives comprises entre le 1 er janvier 2012 et le 31 décembre 2015, la somme de 30 000 €.

« 4. Le crédit d'impôt est égal à 40 % du montant des dépenses mentionnées au 1.

« 5. Les travaux mentionnés au 1 s'entendent de ceux figurant sur la facture d'une entreprise. Le crédit d'impôt est accordé sur présentation des factures, autres que les factures d'acompte, des entreprises ayant réalisé les travaux et comportant, outre les mentions prévues à l'article 289 du présent code, l'adresse de réalisation des travaux, leur nature ainsi que la désignation et le montant des travaux mentionnés au 1.

« 6. Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis , des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires.

« 7. Lorsque le bénéficiaire du crédit d'impôt est remboursé dans un délai de cinq ans de tout ou partie du montant des dépenses qui ont ouvert droit à cet avantage, il fait l'objet, au titre de l'année de remboursement et dans la limite du crédit d'impôt obtenu, d'une reprise égale à 40 % de la somme remboursée. Toutefois, aucune reprise n'est pratiquée lorsque le remboursement fait suite à un sinistre survenu après que les dépenses ont été payées. ».

« II. - Ces dispositions ne sont applicables qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû. »

« III. - La perte de recettes pour l`État est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. ».

La parole est à Mme Claude Darciaux, pour soutenir l'amendement n° 697.

Mme Claude Darciaux. Lors du Grenelle 2 de l'environnement, il avait été décidé un crédit d'impôt de 40 % du montant des travaux, avec un plafond de 30 000 euros et le bénéfice d'un prêt à taux zéro, afin de soutenir les riverains.

Certes, le crédit d'impôt ne peut pas à lui seul apporter une solution mais c'est une incitation forte et il est absolument nécessaire d'en porter le taux à 40 % et de l'étendre aux propriétaires et aux bailleurs ainsi qu'aux PME et aux PMI. Le fait d'avoir abaissé le taux à 30 % mettra en difficulté un certain nombre de riverains de ces sites Seveso car le blocage des négociations pour le financement des mesures réparatrices, des PPRT, et la signature des conventions entraînera des dégâts collatéraux. Alors que 420 PPRT avaient été prescrits et devaient être signés en 2008, 110 seulement sont réalisés en 2011 et d'autres sont en négociation. J'ai bien peur qu'à la suite du rabotage de ce crédit d'impôt, les négociations ne soient bloquées et que nous n'arrivions pas à signer les PPRT.

M. le président. L'amendement n° 517 présenté par M. Carrez, Rapporteur général au nom de la commission des finances et M. Pélissard, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

« I. - L'article 200 quater A du code général des impôts est ainsi modifié :

« 1° Aux 1°, 2° et 3° du a du 1, au b du 1 et au 4, l'année : « 2011 » est remplacée par l'année : « 2014 » ;

« 2° Le 4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre des dépenses mentionnées au b du 1, la somme mentionnée au premier alinéa est majorée de 5 000 euros pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et de 10 000 euros pour un couple soumis à imposition commune. »

« II. - Les dispositions du 2° du I du présent article sont applicables aux dépenses payées à compter du 1 er janvier 2012.

« III. - Les dispositions du 2° du I du présent article ne sont applicables qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

« IV. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 517

M. Gilles Carrez, rapporteur général . C'est un amendement proposé par M. Pélissard, que nous avons adopté à l'unanimité. Il tend à doubler les plafonds, et à faire ainsi passer pour un couple de 10 000 à 20 000 euros le plafond du crédit d'impôt à 30 % hors rabot pour les dépenses de financement de travaux prescrits par les plans de prévention des risques technologiques.

Cet amendement est gagé par la suppression d'une incitation fiscale qui n'a plus lieu d'être, qui concerne les ascenseurs électriques à traction possédant un contrôle avec variation de fréquence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement de la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

M. Jean-Paul Lecoq. Il s'agit parfois de gros travaux. Les gens peuvent être exposés à différents risques. Soit c'est un risque toxique, et ils doivent créer chez eux une pièce totalement étanche pour se mettre à l'abri. Soit c'est un risque thermique, et les matériaux doivent résister à une forte chaleur en cas de boil over . Soit c'est un risque sur pression, après une explosion, et les vitrages doivent pouvoir résister. Je vous rappelle qu'à Toulouse, c'est parce qu'une fenêtre a explosé qu'il y a eu une victime dans un lycée.

À moins de ne pas connaître les tarifs des métiers du bâtiment, mais je pense que vous les connaissez, vous savez que 20 000 euros, c'est peu pour ce type de travaux, qui exigent de la technicité et des matériaux de très grande qualité. Ce n'est pas la maison à 100 000 euros, il faut vraiment l'avoir en tête.

Le doublement du plafond proposé par la commission, c'est déjà un effort, mais il me semble important de garder un taux de 40 % et je pense qu'il faut voter l'amendement présenté par mes collègues socialistes.

M. le président. Madame Darciaux, maintenez-vous votre amendement ou vous ralliez-vous à celui de la commission ?

Mme Claude Darciaux. Je le maintiens. Initialement, le plafond était à 30 000 euros. La commission propose 20 000 euros. C'est un plus mais ce n'est pas suffisant. Nous devons absolument donner un signe fort aux populations comme aux PME. N'oublions pas les PME qui se trouvent dans les sites Seveso, qui ont besoin de ce crédit d'impôt.

(L'amendement n° 697 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 517 est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 44 est ainsi rédigé et les amendements n os 469, 470, 363 et 365 tombent.