ARTICLE  51 TER A (NOUVEAU) : ASSUJETTISSEMENT DES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS À LA REDEVANCE POUR POLLUTIONS DIFFUSES

I. DÉBATS SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE (SÉANCE DU VENDREDI 25 NOVEMBRE 2011)

Article additionnel après l'article 51 bis

M. le président. L'amendement n° II-135 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Marc, Mme M. André, MM. Frécon, Miquel, Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Patient, Patriat, Placé, Todeschini, Yung et Dantec, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Après l'article 51 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 213-10-8 du code de l'environnement, tel qu'il résulte de l'ordonnance n° 2010-1232 du 21 octobre 2010 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'environnement, est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Soit en raison de leur effet perturbateur sur le système endocrinien humain ou animal. »

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Je suis heureuse de constater que l'adoption de l'amendement précédent n'a pas fait tomber cet amendement...

Cet amendement vise à assujettir les perturbateurs endocriniens à la redevance pour pollutions diffuses, des perturbateurs que l'on retrouve dans de nombreux pesticides et composés chimiques.

Aujourd'hui, tout le monde commence - je dis bien « commence » ! - à évaluer l'effet dévastateur des perturbateurs endocriniens sur les jeunes enfants, notamment sur les petites filles, et sur l'équilibre génétique.

C'est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l'économie.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. La commission de l'économie a également émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Nous partageons vos préoccupations face aux pollutions émergentes et aux risques de santé, mais les connaissances sur les origines des produits des contaminations des milieux aquatiques dont nous disposons sont encore très partielles. Approfondir ces connaissances est le premier objectif du plan national sur les résidus de médicaments dans les eaux, qui a été lancé le 30 mai dernier, c'est-à-dire il y a quelques mois.

À ce jour, nous ne disposons pas encore des conclusions de ces travaux. Aussi, je vous saurai gré de ne pas en tirer des conséquences immédiates. Des incitations financières spécifiques seront probablement indispensables un jour ou l'autre, mais il est trop tôt pour se prononcer.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Je tiens à attirer l'attention de mes collègues sur le fait que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, l'OPECST, a rédigé un rapport sur cette question, ...

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Tout à fait !

Mme Catherine Procaccia. ... qui sera présenté mercredi prochain à la commission des affaires sociales.

Les conclusions de ce rapport vont peut-être dans votre sens, ma chère collègue, mais, pour ma part, je ne les connais pas. Peut-être le président de la commission de l'économie en sait-il un peu plus ?... Toutefois, il est dommage de ne pas prendre en compte les travaux des sénateurs et des députés qui siègent à l'OPECST.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Je suis ravie de l'intervention de Mme Catherine Procaccia.

En effet, il y a trois ans, un rapport de l'OPECST a pris en compte toutes les auditions menées sur la question des perturbateurs endocriniens, auditionnant les services de pédiatrie et d'endocrinologie dans les centres hospitaliers régionaux. Je puis vous dire, monsieur le secrétaire d'État, que le terme « émergents » est presque déjà obsolète, considérant les dégâts constatés : dans le service d'endocrinologie pédiatrique du CHR de Lille, les consultations ont été multipliées par deux, en raison du nombre de contaminés.

Aussi, je soutiens cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Pour réconcilier le Gouvernement et l'ensemble des sénateurs, je vous propose d'adopter cet amendement, qui fixera un cadre législatif, et il reviendra ensuite au Gouvernement, grâce aux travaux de l'OPECST notamment, d'en préciser le contenu exact.

Si nous n'adoptons pas cet amendement, vous aurez, dans quelque temps, monsieur le secrétaire d'État, des éléments d'information que vous ne pourrez pas traduire sur un plan législatif parce qu'il sera trop tard.

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Notre groupe votera également cet amendement portant article additionnel, dont l'objet est tout à fait justifié. Certes nous attendons encore des preuves, et de nombreuses enquêtes épidémiologiques sont encore nécessaires. Cependant, dès lors que le perturbateur a été identifié, on peut d'ores et déjà le considérer comme une pollution diffuse. Je ne vois pas où est le problème.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l'économie.

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Je veux confirmer les propos de ma collègue Catherine Procaccia, d'autant que le rapport de l'OPESCT a recueilli l'avis unanime de ses membres.

Par ailleurs, je partage les propos de notre collègue Marie-Christine Blandin sur les effets et les dangers des perturbateurs endocriniens. Je rappelle à nos collègues qui siègent au sein de l'OPESCT que cette question avait fait l'objet d'un débat, très instructif, sur les effets pervers qu'ils entraînent, en particulier lors de la petite enfance...

Mme Marie-Christine Blandin. Et de la grossesse !

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. ... et de la grossesse bien sûr. Je vous assure que nos collègues ne soupçonnaient pas les dégâts que ces perturbateurs peuvent provoquer.

Mme Chantal Jouanno. Chez les garçons aussi !

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. C'est pourquoi je soutiens d'autant plus cet amendement.

Mme Laurence Rossignol. Sagesse, monsieur le secrétaire d'État ?... Ce serait bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-135 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 51 bis .