II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Article 62 bis (nouveau)

I. - Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le 2° de l'article L. 5123-2 est abrogé ;

2° L'article L. 5123-7 est abrogé.

II. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2012 et s'applique aux conventions signées à compter de cette date conformément au premier alinéa de l'article L. 5123-1 du code du travail.

III. RAPPORT SÉNAT N° 107 (2011-2012) TOME III ANNEXE 30 A

Commentaire : le présent article vise à supprimer l'allocation spéciale du Fonds national de l'emploi (ASFNE) destinée aux préretraites versées dans le cadre de plans sociaux.

I. LE DROIT EXISTANT

Créé par la loi n°63-1240 du 18 décembre 1963, le Fonds national de l'emploi (FNE) contribue au financement de mesures destinées à remédier aux conséquences des mutations et des reconversions industrielles et a vocation à intervenir en cas d'urgence et de façon temporaire et ponctuelle. Dépourvu de la personnalité juridique, il regroupe, au sein du ministère de l'emploi, des crédits budgétaires, notamment ceux du programme 103 dédiés au financement de l'allocation spéciale versée à titre de pré-retraite dans le cadre de plans sociaux.

Aux côtés de la participation des partenaires sociaux (Unedic) et des entreprises, il apporte la part de l'Etat dans cette mesure de reclassement des salariés touchés par la crise. L'ASFNE permet à leurs bénéficiaires (salariés de plus de 57 ans, voire 56 ans à titre dérogatoire en cas de liquidation judiciaire ou de salariés peu qualifiés) de percevoir environ 65 % de leur salaire brut antérieur jusqu'à l'ouverture de leurs droits à retraite.

Les conditions restrictives d'entrée dans le dispositif ont conduit à une extinction progressive de la mesure. Une instruction de la DGEFP du 19 décembre 2007 a rappelé le caractère exceptionnel de son application. Alors qu'au cours des années 1990, près de 50 000 entrées dans le dispositif ont été comptabilisées en 1993 pour un volume de 180 000 bénéficiaires indemnisés, seulement 1 215 personnes y ont adhéré en 2010 23 ( * ) . Selon les derniers chiffres fournis par le Gouvernement, à la fin du mois d'août 2011, seulement 492 entrées dans le dispositif avaient été enregistrées depuis le début de l'année pour un nombre total d'allocataires de 5 675. Pour 2012, sur la base d'un rythme d'entrées égal à celui constaté sur la période allant de janvier à août 2011, le nombre moyen mensuel d'allocataires est estimé à 3 962.

La dotation budgétaire consacrée à l'ASFNE pour 2012 est fixée à 49,6 millions d'euros, le coût global de la mesure étant estimé à près de 69 millions d'euros d'allocations, également financées par des participations à hauteur de 11 millions d'euros pour les entreprises et 8 millions d'euros pour l'UNEDIC.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l' initiative du Gouvernement , l'Assemblée nationale a adopté le présent article qui supprime « les allocations spéciales en faveur de certaines catégories de travailleurs âgés lorsqu'il est établi qu'ils ne sont pas aptes à bénéficier de mesures de reclassement » (2° de l'article L. 5123-2 du code du travail) et abroge en conséquence les dispositions relatives à la conclusion des conventions mettant en oeuvre ces allocations (article L. 5123-7 du code précité).

La suppression de toute nouvelle entrée dans le dispositif est fixée au 1 er janvier 2012. Les contrats souscrits avant cette date restant valable jusqu'à leur terme normal, les allocataires actuels du dispositif bénéficient du maintien de leur revenu de remplacement jusqu'à leur retraite.

Le Gouvernement justifie la mise en extinction progressive du régime des ASFNE par deux motifs :

- les faibles volumes d'entrées nouvelles dans le dispositif depuis 2007 pose des difficultés de gestion et remettent en cause l'égalité de traitement des salariés licenciés pour motif économique, dès lors que la mobilisation du dispositif n'est pas automatique mais soumise à des « considérations d'espèce » et des critères d'attribution très restrictifs qui donnent de « faux espoirs » aux impétrants ;

- le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), qui remplace sur l'ensemble du territoire la convention de reclassement personnalisé (CRP) et le contrat de transition professionnelle (CTP) depuis le 1 er septembre dernier, a vocation à devenir le dispositif de droit commun en faveur des salariés des entreprises de moins de 1 000 salariés affectées par des restructurations.

L'économie liée à l'arrêt de nouvelles entrées est estimée à 7,56 millions d'euros dès 2012.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Il ne s'agit pas d'une mesure anodine de suppression d'un dispositif en extinction. En effet, le faible volume actuel de bénéficiaires de l'ASFNE est directement causé par les restrictions d'accès mise en oeuvre par le Gouvernement.

D'autre part, il n'est remplacé par aucun dispositif car le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) n'a pas pour objet de financer des préretraites. Or le Gouvernement ne garantit pas que les personnes peu qualifiées, qui auraient pu prétendre à l'ASFNE, seront admises au bénéfice du CSP. D'ailleurs, les crédits affectés au CSP, qui s'établissent à 87,2 millions d'euros pour 2012, ne couvrent pas le niveau de consommation des crédits cumulés en 2010 par les CRP (59,47 millions d'euros) et les CTP (143,22 millions d'euros).

Aussi faut-il considérer l'arrêt de l'ASFNE comme la suppression pure et simple d'une mesure d'âge en faveur des salariés les moins reclassables.

Votre rapporteur spécial n'est certes pas opposé par principe à la simplification des dispositifs de reclassement professionnel lorsqu'ils sont redondants. Ainsi, le regroupement des CRP et des CTP au sein des CSP peut-il être considéré comme une bonne mesure d'administration et de gestion qui a été recommandée par la Cour des comptes et étudié en amont de son adoption en loi de finances rectificative pour 2011. Tel n'est pas le cas du présent article qui résulte d'un amendement déposé dans la précipitation, en séance publique, sans examen par la commission des finances de l'Assemblée nationale et sans concertation préalable avec les partenaires sociaux.

Décision de votre commission : votre commission des finances vous propose de supprimer cet article.