M. Charles GUENÉ, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LE PROGRAMME 164 « COUR DES COMPTES ET AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES »

- Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières », dont près de 87 % des crédits concernent les dépenses de personnel, connait une diminution de son budget (- 1,8 % en AE et - 0,9 % en CP) .

- Le plafond d'emplois du programme s'établit à 1 840 ETPT, soit un niveau identique à 2012 et 2013 .

- L'impact en 2014 de la réforme des juridictions financières , intervenue en 2012, devrait être faible ( 0,6 million d'euros ).

- Votre rapporteur spécial se félicite que le coût total de cette réforme ait été revu à la baisse : 7,19 millions d'euros en CP cumulés de 2012 à 2016.

- Votre rapporteur spécial tient à saluer la nouvelle présentation stratégique du programme qui permet une analyse pertinente et complète des objectifs du programme.

Au 10 octobre 2013, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement au questionnaire budgétaire concernant le présent programme, 100 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

LA COUR DES COMPTES ET LES AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES EN 2014

IV. LE PROGRAMME 164 : « COUR DES COMPTES ET AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES »

A. LA FINALITÉ DU PROGRAMME

Le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » répond aux prescriptions des articles 14 27 ( * ) et 15 28 ( * ) de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Il englobe la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) :

- 20 29 ( * ) chambres régionales des comptes (CRC) au lieu de 27 ( cf. infra ),

- 4 chambres territoriales des comptes (CTC), situées en outre-mer 30 ( * ) .

L'article 47-2 de la Constitution révisée par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 dispose que « La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l'action du Gouvernement. Elle assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances et de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l'évaluation des politiques publiques ».

Le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud , est responsable du présent programme.

À la demande du Sénat, cinq enquêtes sont réalisées chaque année depuis 2003 dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF, et deux contrôles budgétaires ont été menés par des rapporteurs spéciaux bénéficiant, au titre de l'article 58-1°, du concours technique d'un magistrat de la Cour des comptes (en 2008 et 2009). Les enquêtes, après une « audition pour suite à donner », sont intégrées au sein d'un rapport d'information de votre commission rédigé par le rapporteur spécial compétent.

À ces enquêtes, s'ajoutent les transmissions des documents administratifs élaborés par la Cour des comptes ( référés et rapports particuliers ) qui donnent lieu, pour certains, à un suivi sous la forme d'auditions publiques.

En outre, la LOLF, en son article 58, a introduit deux nouvelles attributions d'assistance de la Cour au Parlement :

- le dépôt d' un rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement , relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur et aux comptes associés, par mission et par programme ;

- la certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'Etat.

La certification des comptes de l'Etat pour l'exercice 2012

La Cour des comptes a rendu public, le 28 mai 2013, l'acte de certification des comptes de l'État pour l'exercice 2012 par lequel elle certifie que le compte général de l'État de l'exercice 2012 est régulier et sincère et donne une image fidèle de la situation financière et du patrimoine de l'État, sous cinq réserves substantielles et deux autres réserves .

Ces cinq réserves substantielles portent sur :

- le système d'information financière (Chorus notamment) ;

- les dispositifs ministériels de contrôle interne et d'audit interne ;

- les produits régaliens ;

- les actifs et passifs du ministère de la défense ;

- les participations et les autres immobilisations financières.

Les progrès réalisés en 2012 permettent à la Cour de lever seize parties des réserves substantielles qu'elle avait formulées sur les comptes de l'État de 2011. Elle en tire la conséquence en ne qualifiant plus de « substantielles » une réserve relative au patrimoine immobilier et une autre relative aux passifs non financiers .

Source : Cour des comptes

Parallèlement, l'article 12 de la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale confie à la Cour des comptes, outre l'établissement du rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, la mission de certifier les comptes combinés des branches du régime général de la sécurité sociale .

Il est possible que ces missions de certification s'enrichissent encore davantage dans les prochaines années. Dans son rapport « Agences de notation : pour une profession règlementée » 31 ( * ) , notre collègue Aymeri de Montesquiou préconisait une certification des comptes de certaines collectivités territoriales par les juridictions financières , afin de « garantir la qualité des comptes aux investisseurs, sans passer par le truchement des agences » . Une expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales figure dans le projet de loi n° 497 (2012-2013) de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale , déposé par le Gouvernement sur le bureau du Sénat le 10 avril 2013.

Enfin, votre rapporteur spécial tient à mentionner le fait qu'à compter du mois d'octobre 2013, la Cour des comptes s'engage dans la certification des comptes du Sénat , sur l'exercice 2013.

B. LA STRUCTURATION DU PROGRAMME

Initialement, le présent programme était structuré en quatre actions. Afin de rendre compte de manière plus détaillée des missions des juridictions financières, il a été profondément remanié lors du PLF pour 2013 et compte, depuis, sept actions , de volume inégal.

1. Sept actions reflétant les missions des juridictions financières

L'action 21 (« Examen des comptes publics ») regroupe la certification directe de certains comptes publics (Etat et Sécurité sociale), l'information du Parlement sur la qualité des comptes d'administrations publiques non certifiées, le contrôle juridictionnel sur les comptes des comptables publics, la vérification de la qualité et de la régularité des comptes des collectivités et organismes publics et l'activité de commissaire aux comptes d'organisations internationales du Premier président de la Cour des comptes.

L'action 22 (« Contrôle des finances publiques ») consiste en l'assistance au Parlement et au Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances et de financement de la sécurité sociale : remise des trois rapports annuels (sur les finances publiques, sur l'exécution du budget de l'Etat et sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale), enquêtes au titre de l'article 58-2° de la LOLF, avis des CRTC sur les budgets locaux après saisine du préfet ainsi que sur les marchés et conventions de délégations de service public.

L'action 23 (« Contrôle des gestions publiques ») recouvre l'ensemble des contrôles sur la régularité et la qualité de la gestion des collectivités et des organismes publics par la Cour des comptes et les CRTC. Cette activité est celle qui mobilise le plus de moyens.

L'action 24 (« Évaluation des politiques publiques » ) permet d'apprécier l'efficience et l'efficacité des politiques publiques.

L'action 25 (« Information des citoyens » ), reconnue par la loi constitutionnelle de 2008 précitée, recouvre l'activité de publication ainsi que l'activité de représentation de la Cour et des CRTC, assurées par le Premier président, le Procureur général, les présidents de chambre, les présidents de CRTC ou les autres magistrats.

L'action 26 (« Mise en jeu de la responsabilité des comptables publics et des gestionnaires publics ») consiste en l'engagement de procédures juridictionnelles à l'encontre des comptables publics et des gestionnaires de fait, qui sont responsables sur leurs deniers personnels. La Cour et les CRTC peuvent en outre saisir la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) ou le juge judiciaire à l'encontre de l'ensemble des gestionnaires en cas d'irrégularité ou de faute de gestion.

L'action 27 (« Pilotage et soutien des juridictions financières ») regroupe, pour la Cour, le pilotage exercé par le Premier président, le secrétariat général, le parquet général, les présidents de chambres (rapporteur général inclus) et les missions d'inspection et de contrôle, ainsi que le soutien, qui comprend l'activité de l'ensemble des services administratifs (à l'exception du greffe et de la documentation). Dans les CRTC, la même distinction est opérée.

2. La répartition des crédits par action

Ces sept actions sont de volume inégal. Ainsi, les actions de contrôle des gestions publiques (23) et de pilotage et de soutien (27) absorbent chacune plus du quart des CP du programme (respectivement 27,8 % et 25 %) . L'action de mise en jeu de la responsabilité des comptables et gestionnaires publics représente, quant à elle, à peine plus de 2 % du programme .

Le tableau ci-après présente la part des actions dans le programme en fonction du montant de leurs crédits, avant et après la ventilation de l'action de pilotage et de soutien :

Répartition des crédits de paiement (CP) par action

(en millions d'euros)

Actions

Avant ventilation

Après ventilation

Crédits de paiement pour 2014

Part dans le programme

Crédits de paiement pour 2014

Part dans le programme

21. Examen des comptes publics

39,4

18,2 %

52,2

24,0 %

22. Contrôle des finances publiques

15,9

7,3 %

21,5

10,0 %

23. Contrôle des gestions publiques

60,1

27,8 %

81,1

37,0 %

24. Évaluation des politiques publiques

34,7

16,0 %

46,8

21,0 %

25. Information des citoyens

7,3

3,4 %

9,8

5,0 %

26. Mise en jeu de la responsabilité des comptables publics et des gestionnaires publics

4,7

2,2 %

6,3

3,0 %

27. Pilotage et soutien des juridictions financières

54,2

25,0 %

0,0

0,0 %

Ensemble

216,3

100,0 %

217,7

100,0 %

Après ventilation, 1,3 million d'euros viennent abonder les crédits de la mission en provenance du programme 309 « Entretien des bâtiments de l'Etat » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

Source : projet annuel de performances pour 2014 de la mission « Conseil et contrôle de l'Etat »

C. UN BUDGET EN DIMINUTION : - 1,8 % EN AE ET - 0,9 % EN CP

Au préalable, votre rapporteur spécial rappelle qu'eu égard à l'importance accordée aux missions de contrôle, d'évaluation et de jugement des comptes publics, le présent programme n'est pas soumis aux contraintes habituelles de régulation budgétaire .

Ce programme, dont près de 87 % des crédits concernent les dépenses de personnel , s'appuie sur une enveloppe de 216,27 millions d'euros 32 ( * ) de CP , en diminution de 2 millions d'euros (- 0,9 %) par rapport au budget accordé pour 2013, et de 214,93 millions d'euros en AE (- 4 millions d'euros , soit - 1,8 % par rapport à 2013).

Cette diminution concerne tous les titres de dépenses (hors les dépenses d'intervention, stabilisées à 50 000 euros), y compris les dépenses de personnel .

1. Une diminution « optique » observée sur tous les titres de dépenses...

Au sein du programme, les dépenses en CP hors titre 2 (dépenses de personnel) diminuent de 2,6 % et s'établissent à 28,2 millions d'euros.

Les dépenses de fonctionnement , qui représentent 12,7 % des crédits du programme, diminuent de 2,3 % pour atteindre 27,4 millions d'euros. Au sein de ces crédits de titre 3, 12,3 millions d'euros constituent des crédits immobiliers (correspondant aux locations et aux loyers budgétaires, au chauffage, à l'entretien courant et au nettoyage des locaux), en diminution de 0,95 million d'euros par rapport à 2013.

Les dépenses d'investissement (0,7 million d'euros) diminuent de 13 % en CP.

Seules les dépenses d'intervention restent stables à 50 000 euros inscrits pour prendre en charge les cotisations versées à des organisations internationales de contrôle.

Cette tendance à la baisse concerne également les dépenses de personnel (- 0,7 % , cf. infra ).

Néanmoins, cette diminution peut être qualifiée « d'optique » puisqu'elle résulte essentiellement du transfert de crédits au bénéfice du Haut Conseil des finances publiques (HCFP).

2. ...pour l'essentiel imputable à la création du Haut Conseil des finances publiques (HCFP)

Cette diminution globale s'explique par les prélèvements opérés sur le présent programme en vue de doter le nouveau programme 340 « Haut Conseil des finances publiques », crée par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques ( cf. infra ).

En effet, rattaché structurellement à la Cour des comptes, bien qu'indépendant et autonome budgétairement, le Haut Conseil a été créé à moyens constants 33 ( * ) .

Pour 2014, le prélèvement sur le programme 164 au profit du HCFP s'élève à 0,82 million d'euros , dont 0,37 million d'euros en titre 2 et 0 ,45 million d'euros répartis sur les autres titres .

Aussi, à « structure constante », c'est-à-dire hors transfert au bénéfice du HCFP, les crédits hors dépenses de personnel du programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » sont identiques à ceux demandés en PLF pour 2013 . Les crédits de personnel, pour leur part, sont toujours en diminution (- 0,5 %) ce qui témoigne d'un réel effort de stabilisation de la masse salariale des juridictions financières.

3. ... et à la stabilité des moyens humains du programme

En 2014, les dépenses de personnel diminuent de - 0,7 % et s'établissent à 188 millions d'euros , en dépit des contributions d'équilibre au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » (qui pèsent pour un quart des dépenses de personnel) et de diverses mesures catégorielles (la création du grade d'attaché hors classe suite à la mise en oeuvre du corps interministériel des attachés, la poursuite de la revalorisation du statut des magistrats des CRTC). À « structure constante », la diminution constatée est de - 0,5 % . Cette diminution résulte donc d'un pilotage efficace de la masse salariale.

En effet, pour 2014, le plafond d'emplois reste stable à 1 840 ETPT, dont près du tiers (30,7 %) est affecté au profit de la seule action 23 « Contrôle des gestions publiques » .

Il est à noter que les juridictions financières ont entrepris une politique de requalification des emplois en faveur de la fonction de contrôle, en concentrant leurs efforts de recrutement sur les catégories A + et A. Cette tendance est facilitée par les départ d'agents de catégorie B et C intervenus en 2012 et 2013 à la suite du regroupement de 7 CRC dans le cadre de la réforme des juridictions financières .

Les actions 27 (« Pilotage et soutien des juridictions financières »), 21 (« Examen des comptes publics ») et 24 (« Évaluation des politiques publiques ») regroupent 55,3 % des ETPT du programme avec respectivement 22,2 %, 17,6 % et 17,2 % des effectifs .

Vers de nouveaux besoins liés aux missions de certification ?

Depuis la mise en oeuvre de la certification des comptes de l'État et de la Sécurité sociale, en 2006, la Cour s'est engagée dans une politique de recrutements extérieurs d'experts, issus des grands cabinets d'audit, destinée à faire face à ces nouvelles missions.

En effet, la nécessité de disposer d'équipes rapidement opérationnelles a conduit à privilégier le recrutement en contrats à durée déterminée (CDD) de trois ans (éventuellement renouvelables pour deux ans) d'experts disposant d'une qualification professionnelle et de connaissances techniques particulièrement adaptées. Avec la possibilité de transformation des CDD en contrats à durée indéterminée (CDI), ainsi que l'octroi d'une prime annuelle en fonction des performances individuelles, on observe une professionnalisation de la mission de certification . Au 31 juillet 2013, 27 experts extérieurs étaient affectés aux missions de certification des comptes de l'État (10 pour les comptes du régime général de la sécurité sociale).

À l'avenir, ces missions pourraient évoluer avec notamment l'instauration de la certification des comptes de certaines collectivités territoriales, pour lesquelles un renforcement en ETPT du programme serait alors envisageable.

En outre, la mission d' évaluation des politiques publiques (sur la base de laquelle votre commission des finances sollicite désormais la Cour, comme l'avait illustré, l'an dernier, l'enquête au titre de l'article 58-2° de la LOLF relative aux frais de justice 34 ( * ) ) implique la définition de nouvelles méthodologies et procédures. Dans cette perspective, l'apport des experts extérieurs est sans doute bénéfique afin de développer une nouvelle compétence « métier ».

4. Le faible impact de la réforme des juridictions financières sur le budget du programme

En 2014, l'impact de la réforme est marginal , l'essentiel des dépenses ayant été supporté sur les exercices 2012 et 2013 et financé par redéploiements.

Historique et portée de la réforme

Le projet de loi portant réforme des juridictions financières, voulue par l'ancien Premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, afin d'instituer un grand organisme public d'audit, d'évaluation et de contrôle et de prendre en compte les effets de la révision constitutionnelle de 2008, reposait sur trois axes principaux : la rénovation des procédures de jugement des ordonnateurs et des gestionnaires publics , la prise en compte des missions non juridictionnelles de la Cour des comptes et la réorganisation institutionnelle des juridictions financières .

Néanmoins, le projet de loi n'ayant pu être examiné en séance publique en raison de l'encombrement du calendrier parlementaire, ses principales dispositions ont été reprises dans la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles précitée. Mais la portée de la réforme a été considérablement limitée en cours de discussion.

Par ailleurs, les dispositions du projet de réforme initial relatives à la certification et aux missions non juridictionnelles avaient, pour leur part, déjà été adoptées dans la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 .

Seul l'axe de réforme relatif à l'organisation structurelle des CRC a donc pu voir le jour , grâce à loi du 13 décembre 2011 précitée, dont l' article 46 prévoit que le siège et le ressort de ces chambres sont fixés par décret en Conseil d'Etat sans que leur nombre puisse excéder vingt.

Le décret n° 2012-255 du 23 février 2012 relatif au siège et au ressort des chambres régionales des comptes a fixé le siège et le ressort des vingt CRC : quatorze en métropole (Arras, Bordeaux, Dijon, Epinal, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Noisiel, Orléans, Rennes, Rouen, Strasbourg et Toulouse ), cinq en outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte) et une en Corse (Bastia) .

a) Le chiffrage pour 2014

Pour 2014, la restructuration de la cartographie des juridictions financières n'a qu'un faible impact budgétaire, estimé à 0,6 million d'euros, ainsi répartis :

- en ce qui concerne le titre 2 , le dispositif d'accompagnement (constitué de la prime de restructuration de service et du complément spécifique de restructuration au titre de la mobilité interne et de l'indemnité de départ volontaire, de l'indemnité d'accompagnement à la mobilité, qui permet le maintien du niveau de rémunération pendant trois ans et/ou de l'aide à la mobilité du conjoint en ce qui concerne la mobilité externe ) a bénéficié à 195 collaborateurs (18 % des effectifs totaux des CRTC) et devrait occasionner un coût de 0,27 million d'euros en 2014 ;

- s'agissant des dépenses hors titre 2, elles sont estimées à 0,33 million d'euros, dont l'essentiel porte sur des travaux immobiliers ou informatiques liés au regroupement.

Sur le titre 3, plus précisément, si une économie globale de 0,95 million d'euros est attendue en crédits immobiliers, en raison du regroupement de 7 CRC (fermeture des sièges), celle-ci a été absorbée par les dépenses d'aménagement et de mises aux normes des locaux des CRC regroupées. En outre, une augmentation des frais de déplacement des magistrats et de leurs assistants ( 2,6 millions d'euros, soit + 0,1 million d'euros par rapport à 2013) est à prévoir dans le cadre des contrôles sur pièce et sur place du fait de l' élargissement du ressort territorial des CRC regroupées.

Votre rapporteur spécial relève que l'essentiel des coûts de la réforme aura donc été supporté sur les exercices 2012 et 2013.

b) Le bilan global de la restructuration territoriale des CRC

Dans son rapport de l'an dernier, votre rapporteur spécial avait souhaité connaître les estimations de la Cour des comptes sur l'impact net de cette réforme .

D'après les informations dont il disposait, le regroupement de sept CRC pouvait avoir un surcoût prévisionnel estimé par la Cour des comptes à 6 millions d'euros en titre 2 pour les années 2012 et 2013 , dont 4,6 millions d'euros pour la seule année 2013 au titre de la mise en oeuvre du dispositif financier d'accompagnement des départs volontaires.

S'agissant des travaux immobiliers , la Cour des comptes estimait les dépenses à 6 millions d'euros en CP cumulés sur les années 2012 à 2015, dont un surcoût de 1,9 million d'euros pour 2013.

Au total, en CP cumulés, le surcoût de la réforme pouvait donc être évalué à 12 millions d'euros.

Dans les réponses au questionnaire parlementaire adressé par votre rapporteur spécial au Premier président, un bilan des coûts de la réforme est dressé. Il apparaît que celui-ci est nettement en dessous des estimations formulées l'an dernier puisqu'il s'établit à 7,19 millions d'euros en CP cumulés de 2012 à 2016 , comme le détaille le tableau ci-après.

Impact budgétaire de la réforme des CRC

(en million d'euros)

Titre 2

Hors titre 2

TOTAL

2012

1,57

1,47

3,04

2013 (prévisionnel)

1,10

1,91

3,01

2014

(prévisionnel)

0,27

0,33

0,60

2015

(prévisionnel)

0,27

0

0,27

2016

(prévisionnel)

0,27

0

0,27

TOTAL

(prévisionnel)

3,48

3,71

7,19

Source : Cour des comptes

Cette réactualisation à la baisse s'explique par le nombre de personnel des juridictions ayant opté pour une mobilité externe , qui s'est finalement avéré plus faible que la prévision . En effet, sur les 195 personnels concernés (51 magistrats et 144 agents, majoritairement de catégories B et C), 95 (44 magistrats et 51 agents) ont choisi de rester au sein des juridictions financières , soit en intégrant la chambre de regroupement, soit en étant affecté dans la chambre de leur choix.

Cette réforme structurelle devrait néanmoins, à terme, engendrer des économies qui semblent pour l'instant encore difficiles à estimer. Lors de son audition par votre rapporteur spécial 35 ( * ) , le Premier président de la Cour des comptes a estimé que le total des dépenses hors titre 2 induites par la réforme (3,7 millions d'euros) pourrait être rentabilisé en quatre ans .

D. UNE MESURE DE LA PERFORMANCE AMBITIEUSE

Le travail de réflexion au sein des juridictions financières afin de perfectionner les indicateurs de performance du présent programme avait été mené à son terme en vue du projet de loi de finances pour 2012. Depuis, le projet annuel de performances (PAP) comporte six objectifs et dix indicateurs .

1. Des objectifs fidèles aux missions stratégiques essentielles des juridictions financières

Objectif 1 : garantir la qualité des comptes publics.

Il vise à mesurer les activités de certification et de jugement des comptes des comptables publics.

Objectif 2 : Contribuer à l'amélioration de la gestion publique et des politiques publiques.

Il apprécie l'efficacité de l'examen de la gestion des collectivités publiques et des organismes nationaux ainsi que de l'évaluation des politiques publiques.

Objectif 3 : Assister les pouvoirs publics.

Cet objectif, consacré à la seule Cour des comptes, mesure les travaux d'assistance au Parlement et au Gouvernement pour le contrôle de l'exécution des lois de finances et de financement de la sécurité sociale ainsi que l'évaluation des politiques publiques. C'est dans ce cadre qu'entrent les enquêtes demandées par le Parlement en vertu de l'article 58-2° de la LOLF.

Objectif 4 : Informer les citoyens.

Cet objectif vise à assurer la publicité des travaux des juridictions financières.

Objectif 5 : Sanctionner les irrégularités et la mauvaise gestion.

Cet objectif concerne la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire et personnelle des comptables publics par la Cour et les CRTC ainsi que l'engagement de la responsabilité des ordonnateurs et autres gestionnaires publics par la CDBF.

Objectif 6 : Améliorer le fonctionnement des juridictions financières.

Il mesure l'efficacité de la fonction de pilotage et de soutien.

Votre rapporteur spécial estime qu'il y a lieu, à nouveau, de se féliciter de la présentation stratégique du présent programme , dont les objectifs apparaissent pertinents , et couvrent désormais la totalité du champ d'action de la Cour des comptes et des CRTC. Il souligne tout particulièrement la prise en compte des missions d'assistance au Parlement (objectif 3), activité désormais essentielle de la Cour des comptes mais dont la mesure faisait défaut.

En 2013, six nouveaux indicateurs avaient été introduits.

2. Des performances très satisfaisantes

Au regard de la diversité des finalités du présent programme et de l'importance de l'aspect qualitatif des missions des juridictions financières, mesurer les performances de la Cour des comptes et des CRTC s'avère délicat. Néanmoins, celles-ci ont toujours veillé à respecter les exigences liées à la mesure et à améliorer celle-ci en bâtissant des indicateurs rigoureux .

Pour 2014, tous les indicateurs témoignent d'un niveau de performance très satisfaisant avec des résultats se maintenant ou progressant.

C'est le cas, par exemple, de tous les indicateurs mesurant un délai de réalisation des travaux :

-  la réalisation des travaux demandés par les pouvoirs publics dans les délais (3.1) atteint un taux de 95 % ;

-  les délais des travaux d'examen de la gestion (2.2) sont fixés en 2014 à « 16-19 mois » pour la Cour et à « 13-15 mois » pour les CRTC, valeur identique à la cible poursuivie ;

-  les délais de jugement (5.1), décliné pour la Cour des comptes (prévision de 12 mois en 2014), les CRTC (prévision de 9 mois en 2014) et la Cour de discipline budgétaire et financière (prévision de 36 mois en 2014), connaissent même une amélioration, dans le cas des CRTC, avec une cible encore plus ambitieuse (8 mois en 2015).

Le maintien ou l'amélioration de la performance concernent également les indicateurs d'efficacité , exprimés en pourcentage :

-  la part de la masse financière jugée ou certifiée par la Cour et les CRTC (indicateur 1.1) s'est stabilisée au taux satisfaisant de 15 % à 25 % en 2013 (prévision actualisée). La même cible est fixée pour 2014 et 2015 ;

- l'indicateur mesurant les suites données aux recommandations des juridictions financières (2.1), qui est l'indicateur représentatif du programme , est stabilisé à 75 % pour 2014, correspondant, selon la Cour, à un juste milieu recherché entre des recommandations peu ambitieuses (plus de 80 % de réalisation) et des recommandations qui le seraient trop (taux de réalisation inférieur à 50 %) ;

- les effets sur les comptes des travaux de certification (1.2), exprimés par le taux de prise en compte des corrections proposées par la Cour, sont revus à la hausse et fixés à 65 % pour 2014 (la prévision pour 2013 était fixée à 50 %) ;

- l'efficience de la gestion des ressources humaines (6.1), exprimé par le ratio nombre de gestionnaires/effectifs gérés s'améliore avec une prévision à 2,32 % en 2014 , contre 2,38 % en 2013. L'indicateur prévoit une cible de 2,29 % en 2015 .

Enfin, il convient de relever que l'indicateur mesurant les retombées presse (4.1), qui mesure pour la Cour et, nouveauté du PAP 2014, pour les CRTC, les articles de presse écrite, les émissions radiotélévisées ainsi que les sites Internet d'organes de presse et les blogs, connait un changement méthodologique. Désormais, les retombées presse recouvrent, pour la Cour, toutes les citations de la Cour des comptes et de son Premier président au cours d'une année civile (et non plus les seules retombées relatives à un rapport dans les 30 jours suivant sa publication). La même mesure s'applique aux CRTC. Cette modification entraîne une augmentation considérable du nombre de retombées presse comptabilisées pour la Cour des comptes : 18 000 retombées sont prévues en 2014 , contre 3 700 en 2013.

Votre rapporteur spécial observe que l'interprétation de cet indicateur est néanmoins sujette à « l'aléa médiatique », puisque la médiatisation des travaux d'une institution dépend directement de la sensibilité du sujet traité, de son impact sur l'opinion publique à un moment donné et non de la qualité intrinsèque des travaux réalisés .


* 27 L'article 14 dispose que « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».

* 28 L'article 15 dispose que « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

* 29 Le décret n° 2012-255 du 23 février 2012 relatif au siège et au ressort des CRTC a fixé le siège et le ressort des vingt CRC, en application de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles. Quatorze ont leur siège en métropole, cinq en outre-mer et une en Corse (cf. infra).

* 30 Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ainsi que Saint-Pierre et Miquelon.

* 31 Rapport d'information n° 598 (tome I) au nom de la mission commune d'information sur les agences de notation présidée par Frédérique Espagnac (Sénat, 2011-2012, p.111), déposé le 18 juin 2012.

* 32 Somme à laquelle il convient d'ajouter 1,12 million d'euros au titre des fonds de concours.

* 33 Le décret n° 2013-398 du 13 mai 2013 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance avait ouvert 0,78 million d'euros en AE et en CP au titre des crédits nécessaires au fonctionnement du HCFP pour la fin de l'année 2013, gagés sur les crédits du programme 164.

* 34 Sénat, Rapport d'information n° 31 (2012-2013) d'Edmond Hervé, « Pour une meilleure maîtrise des frais de justice », déposé le 10 octobre 2012.

* 35 Le 16 octobre 2013.