Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale

III. LE CONTENTIEUX « STERIA », PEU ÉTENDU MAIS À L'ISSUE ENCORE INCERTAINE

A. ORIGINE DU CONTENTIEUX

Des réclamations ont été introduites par un certain nombre de sociétés mères intégrantes françaises en vue d'obtenir la restitution de l'impôt sur les sociétés payé à raison de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes de source communautaire qu'elles perçoivent de filiales détenues à au moins 95 %, en application des dispositions combinées des articles 145, 216, 223 A et 223 B du code général des impôts.

La critique adressée par ces sociétés porte sur le fait que la neutralisation de la quote-part de 5 % représentative des frais et charges au moment de la réception, par une société mère française, de dividendes par ailleurs exonérés, est limitée à ceux provenant de sociétés intégrées fiscalement . Or, le périmètre d'une telle intégration ne pouvant, par définition comporter que des filiales établies en France, dont les résultats entrent dans le champ de l'impôt sur les sociétés français, les dividendes de source française se trouvent totalement exemptés d'impôts alors que les dividendes de source communautaire demeurent imposés sur la base de cette quote-part de 5 %.

B. LE DISPOSITIF A ÉTÉ MODIFIÉ À LA SUITE DE L'ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE

La Cour de justice de l'Union européenne a été saisie d'une question préjudicielle au regard de la liberté d'établissement et a rendu sa décision à l'automne 2015 18 ( * ) . La Cour a invalidé le mécanisme français contesté.

L'article 40 de la loi de finances rectificative pour 2015 19 ( * ) a ainsi tiré les conséquences de cette jurisprudence. Pour les exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2016, la neutralisation de la quote-part de frais et charges afférentes aux dividendes versés entre sociétés d'un même groupe a été supprimée. Le taux de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes éligibles au régime mère-fille que perçoivent les sociétés membres d'un groupe d'autres membres ou de sociétés établies dans un autre État de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen qui, si elles étaient établies en France, rempliraient les conditions pour être membre de ce groupe, en application des articles 223 A ou 223 A bis , autres que celle d'être soumise à l'impôt sur les sociétés en France a quant à lui été abaissé à 1 % .

C. AUCUN DÉCAISSEMENT RÉALISÉ EN 2015, MAIS UN COÛT INCERTAIN POUR LES DEUX EXERCICES SUIVANTS

En 2015, ce contentieux n'a donné lieu à aucune décision d'admission ni aucun jugement favorable aux sociétés requérantes, aucun décaissement n'a donc été opéré à ce titre sur cet exercice. En 2016, à la date du 22 août, les décaissements opérés s'élevaient à 243 millions d'euros, intérêts moratoires compris.

À cette date, 257 affaires étaient en cours , dont 38 dossiers pendants devant les juridictions administratives et 219 au stade de la réclamation, pour un enjeu en droits de 499 millions d'euros .

Prévision pour 2016 et 2017

(en millions d'euros)

2016

2017

2018

340

300

300

Source : réponse du ministère de l'économie et des finances au questionnaire de la rapporteure spéciale


* 18 Cour de Justice, affaire C-386/14 - Groupe STERIA SCA c./ ministère des finances et des comptes publics.

* 19 Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.