M. Jacques GENEST, rapporteur spécial

SECONDE PARTIE :
LES PRINCIPAUX ENJEUX DU BUDGET DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE

Le projet de budget pour le programme d'administration territoriale pour 2018 prévoit une quasi-stabilité des moyens de l'administration territoriale tout en témoignant de quelques nuances, certaines actions (le pilotage des politiques gouvernementales, en particulier) se trouvant plus contraintes que d'autres (la coordination de la sécurité des personnes et des biens, le contrôle de légalité).

Ainsi, le renforcement des moyens correspondant à certaines des missions financées par le programme est réalisé par des redéploiements internes qui peuvent être jugés paradoxaux compte tenu des priorités affichées par le ministère ces dernières années.

Par ailleurs, il reste à vérifier que le relèvement du niveau d'effort réalisé pour surmonter les faiblesses constatées dans certaines des missions d'administration territoriale atteindra effectivement les objectifs qu'il paraît poursuivre.

Évolution des crédits de paiement des actions
du programme 307

(en millions d'euros, hors fonds de concours et attributions de produits)

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

Évolution 2018-2017

Action 01 - Coordination de la sécurité des personnes et des biens

165,5

172,5

4,20%

Action 02 - Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres

686,8

688,3

0,20%

Action 03 - Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales

150

153,4

2,30%

Action 04 - Pilotage des politiques gouvernementales

523,1

514,2

-1,70%

Action 05 - Animation et soutien du réseau

165,3

161,7

-2,20%

Total programme 307

1690,7

1690,1

-0,04%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2018

I. UN ÉTAT DE PROXIMITÉ EN PERTES DE MOYENS

Programmant une diminution des effectifs du programme, le projet de budget pour 2018 prolonge une tendance bien installée de réduction des effectifs du réseau territorial d'administration générale de l'État, qui s'est traduite par une perte de substance de pans entiers du réseau et a conduit à une révision à la baisse de ses ambitions.

A. UNE BAISSE GLOBALE DES EFFECTIFS QUI, POUR AVOIR PROFITÉ DE CERTAINS TRANSFERTS DE CHARGES, EST INSTALLÉE PARTICULIÈREMENT DANS LE RÉSEAU DES SOUS-PRÉFECTURES

Le projet de loi de finances pour 2018 est fondé sur un schéma d'emplois comportant la suppression de 415 ETP , décomposé comme suit :


• - 415 ETP au titre de PPNG ;


• - 30 ETP au titre de la mesure « externalisation des fonctions logistiques, immobilières et résidentielles » (EFLIR) ;


• + 30 ETP au titre du renfort des services de l'éloignement.

Il doit être resitué dans une tendance installée de baisse continue des effectifs du réseau préfectoral , qui a conduit à réduire ses missions et son déploiement sur le territoire dans des conditions parfois équivoques et avec des effets peu probants sur la qualité de l'action de l'État .

Au total, au cours de la décennie écoulée (2007-2017), le plafond d'emplois du programme d'administration territoriale aura rétrogradé de 3 357 ETPT soit un repli de 11 % des effectifs.

Une partie de cette diminution d'effectifs est due à des transferts vers d'autres administrations dans le cadre de la délégation des compétences de gestion du FEDER aux régions (- 211 ETPT en 2016) et du transfert des services interministériels départementaux des systèmes d'information et de communication (SIDSIC) dans le cadre de la mutualisation mise en oeuvre en 2016 (- 679 ETPT).

Il n'en reste pas moins que les effectifs du réseau préfectoral ont subi des ajustements répétés que précise l'encadré ci-après.

Évolution des emplois du programme 2011-2018

Source : commission des finances du Sénat

Chronique des réductions d'emploi du réseau préfectoral

Les réductions d'effectifs du réseau préfectoral ont découlé successivement des « mandats » des révisions générales des politiques publiques - RGPP1 (de 2009 à 2011) et RGPP2 (définis initialement pour la période de 2012 à 2013 mais appliqués uniquement en 2012) - puis, à compter de 2013, du cadre d'action du plan ministériel de modernisation et de simplification (PMMS) et, enfin, pour la période 2016-2018, de la mise en oeuvre du « plan préfectures nouvelle génération » (PPNG).

1- Les mandats RGPP1

Rappel des cibles RGPP 1

Une économie de 2 107 ETPT devait être réalisée sur 3 ans, de 2009 à 2011, répartie comme suit :

- contrôle de légalité : 450 ETPT ;

- système d'immatriculation des véhicules (SIV) : 339 ETPT ;

- carte nationale d'identité, passeport : 260 ETPT ;

- Fonctions support : 1 058 ETPT.

B) Réalisation des mandats RGPP 1

Globalement, les objectifs ont été atteints. Le ministère suggère cependant que, dans le détail, les réductions d'emplois ont pu différer de celles qui avaient été programmées. Dans sa présentation du bilan de la RGPP 1, il fait valoir que les « résultats doivent être par ailleurs appréciés en fonction des obstacles rencontrés et notamment :

- les difficultés initiales du SIV (calendrier différé, problèmes techniques lors de l'installation de l'application) ;

- la fréquentation des usagers aux guichets des préfectures n'a pas enregistré la baisse escomptée ;

- le report de la mise en place de la carte nationale d'identité électronique (CNIe) ;

- la réduction limitée des actes transmissibles au titre du contrôle de légalité ».

En bref, d'autres missions que celles initialement prévues pour receler des gains de productivité ont dû compenser une plus grande rigidité des emplois mobilisés par ces missions .

2- Les mandats RGPP 2

Rappel de la cible

En 2012, les mesures RGPP 2 relatives au programme 307 « Administration territoriale » prévoyaient la suppression de 475 ETPT qui se répartissaient comme suit :

- rationalisation de la délivrance des titres : 200 ETPT ;

- contrôle de légalité et de la réglementation : 225 ETPT ;

- rationalisation des fonctions support et de la représentation de l'État : 50 ETPT.

Réalisation

La réduction d'effectifs liée au schéma d'emplois (- 380 ETP) a été inférieure à la baisse du plafond d'emplois (- 475 ETPT). Le programme 307 a réalisé un schéma d'emplois de - 383 ETP en 2012. En effet, un renfort de + 110 ETP a bénéficié au programme 307 par « atténuation » du schéma d'emplois ainsi ramené à - 365 ETP, afin de renforcer les équipes dans le cadre du déploiement du logiciel dit « Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France » (AGDREF).

En gestion, l'objectif a été durci de 15 ETP et porté à - 380 ETP pour contribuer à la réalisation du schéma d'emplois du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».

L'effort final a été très majoritairement porté sur les missions suivantes :

- rationalisation de la délivrance des titres : 142 ETP ;

- contrôle de légalité et de la réglementation : 108 ETP ;

- rationalisation des fonctions support et de la représentation de l'État : 133 ETP.

3- Les réductions d'effectifs en 2013

En loi de finances initiale pour 2013, le schéma d'emplois pour 2013 tablait sur la suppression de 450 ETP et se trouvait compatible avec une baisse du plafond de 53 ETPT, compte tenu des évolutions observées l'année précédente. Cet effort de réduction correspondait à un taux de non-remplacement de 46 % des départs en retraite prévisionnels, contre 42 % en 2012.

Les réductions d'effectifs liées à l'application du schéma d'emplois ont porté prioritairement sur les fonctions support (ex : la gestion budgétaire, les emplois de résidence et le nettoyage), les effectifs affectés au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire, qui avaient fortement diminué entre 2009 et 2012, étant à peu près préservés.

4- Les réductions d'effectifs en 2014

En loi de finances initiale pour 2014, la baisse du plafond d'emplois s'est à nouveau accusée avec - 398 ETPT.

Le schéma d'emplois pour 2014 a été fixé à - 550 ETP correspondant à une amplification du taux de non-remplacement porté à 56 % des départs en retraite prévisionnels, contre 46 % en 2013.

Ces réductions d'effectifs étaient, pour partie, explicitées par le plan ministériel de modernisation et de simplification, qui les justifiait notamment par des opérations de mutualisation et d'externalisation déjà engagées (exemple : fonctions supports et gestion budgétaire).

Les suppressions d'emplois ont majoritairement porté sur les missions suivantes :

- les emplois de résidence ;

- les fonctions de nettoyage ;

- la gestion budgétaire (régionalisation des plateformes Chorus) ;

- la sécurité ;

- les naturalisations ;

- l'asile ;

- le contentieux ;

- les élections.

5- Les réductions d'effectifs en 2015

Pour 2015, le schéma d'emplois a été fixé à - 180 ETP pour une baisse du plafond de 262 ETPT.

Les gains d'effectifs à réaliser ont été justifiés comme suit :

- régionalisation de la fonction financière et mise en place des services facturiers : - 40 ETP ;

- création des plateformes régionales pour l'instruction des passeports : - 60 ETP ;

- création des plateformes régionales d'instruction des demandes d'acquisition de la nationalité française par décret et par mariage : - 80 ETP.

6- La mise en oeuvre du plan préfectures nouvelle génération (2016-2018)

Dans le cadre du PPNG, 1 300 ETP sont appelés à être supprimés au cours de la période de 2016 à 2018.

En 2016, le schéma d'emplois s'est élevé à + 31 ETP, décomposé comme suit :

- 200 ETP au titre de PPNG ;

+ 30 ETP au titre du plan d'accueil des migrants ;

+ 185 ETP au titre des renforts du pacte de sécurité ;

+ 16 ETP au titre de l'augmentation de la demande d'asile.

En 2017, le schéma d'emplois s'élève à - 485 ETP, décomposé comme suit :

- 685 ETP au titre de PPNG ;

+ 185 ETP au titre du 2 nd volet du pacte de sécurité ;

+ 15 ETP au titre du renfort « asile ».

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

B. LE DÉPLOIEMENT TERRITORIAL DE L'ADMINISTRATION PRÉFECTORALE, ENTRE VOLONTARISME PEU PROBANT ET LENTE MAIS RÉELLE ATTRITION

Les suppressions d'emplois prévues pour 2018 touchent principalement l'échelon départemental.

Cette situation n'est pas nouvelle, la rationalisation du déploiement régional liée à la diminution du nombre des régions ayant eu peu d'effets sur le niveau des effectifs régionaux tout en suscitant des inquiétudes sur l'impact de la régionalisation de l'administration générale de l'État sur sa capacité à demeurer à l'écoute des territoires (voir infra ).

La présentation de la politique d'emploi du ministère comme concernant l'échelon départemental est équivoque, les documents budgétaires ne décomposent pas les évolutions d'emplois entre préfectures et sous-préfectures. Or, dans le passé, les baisses d'effectifs ont principalement touché le niveau infradépartemental d'administration territoriale de l'État, les sous-préfectures, au point de poser avec une acuité très forte la question de la carte des sous-préfectures.

La redéfinition des missions et les réorganisations des ressources humaines qui n'ont pas épuisé leurs effets sont marquées par des perspectives de réduction d'effectifs qui, inévitablement, renforceront l'acuité de la pression sur le déploiement fin du réseau préfectoral, le niveau des sous-préfectures, appelé à mettre en oeuvre ces changements et à assumer ces contraintes renforcées.

S'il est justifié que la carte des sous-préfectures évolue du fait des modifications de la carte de la France décentralisée, qui évolue de son côté, et des mutations économiques et sociales des territoires, qu'il faut prendre en compte, encore faut-il tenir compte du sentiment d'abandon territorial de nombre de nos compatriotes, particulièrement dans les territoires ruraux, et préserver les moyens d'un réseau appelé à matérialiser au plus près la présence de l'État.

1. Une réduction du nombre des préfectures de régions consécutive à la réforme territoriale aux effets limités et incertains

À compter du 1 er janvier 2016, sept nouvelles régions se sont substituées à seize régions actuelles 1 ( * ) . La réforme de la carte territoriale implique une réorganisation des services déconcentrés de l'État en régions. Des préfets préfigurateurs ont été nommés le 22 avril 2015 afin d'élaborer des propositions d'organisation des services régionaux.

Les préfectures n'ont été qu'en partie concernées par cette réorganisation, la création des nouvelles régions ne remettant pas en cause l'implantation géographique des services préfectoraux.

Certes, le nombre de préfectures de région a été réduit 2 ( * ) . Il n'y a plus en France métropolitaine que 13 préfectures de région au lieu de 22.

Certaines missions exercées actuellement dans les préfectures de département chef-lieu de région ont été progressivement centralisées au siège de la nouvelle région , comme la gestion des ressources humaines des agents en préfecture et la gestion des budgets opérationnels du programme 307 (BOP) correspondant aux crédits du programme délégués aux services déconcentrés, c'est-à-dire aux préfets de région 3 ( * ) . Cette régionalisation des missions aura des impacts budgétaires plutôt modérés et concentrés sur une faible proportion des effectifs du réseau.

Jusqu'à présent, les réorganisations liées à la fusion des régions ont essentiellement impacté les agents des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR) et les agents affectés dans des services de préfectures à vocation régionale. Il a en effet été décidé de rapprocher les SGAR des régions fusionnées et positionner la nouvelle organisation du SGAR auprès du nouveau Préfet de région. La nouvelle organisation des SGAR est en place depuis la fin du premier semestre 2016.

Au total, 337 agents ont été touchés par la réforme régionale (230 agents en SGAR et 107 sur des missions dites de niveau régional en préfectures) ont été réaffectés sur de nouveaux emplois après une mobilité fonctionnelle ou plus rarement géographique. L'impact de la réforme sur les effectifs est difficile à apprécier sachant que, si le ministère de l'intérieur indique que 30 % des emplois des SGAR supprimés auraient été économisés, d'autres facteurs, comme la délégation aux régions de la gestion des fonds européens ont également pu jouer.

D'un point de vue fonctionnel, les réformes mises en oeuvre appellent une réelle vigilance . En premier lieu, la concentration de la mission de conception dans les préfectures régionales crée un risque d'éloignement par rapport aux réalités locales et, peut-être, de concentration de l'attention sur les grandes métropoles où ces centres de coordination se trouvent localisés . La constitution de grandes directions régionales des ministères spécialisés alimente cette inquiétude. Par ailleurs, paradoxalement, la régionalisation peut aggraver les difficultés de coordination des services , le préfet de région devant lui-même s'adresser à des interlocuteurs plus nombreux et, parfois, difficilement accessibles, le maintien de la spécificité, voire d'une complète autonomie des services ministériels résistant, ou même profitant de la fiction d'une intégration dans de grandes directions. Des coûts supplémentaires de coordination pourraient en résulter, sans doute variables selon les capacités de délégation manifestées par chacun des responsables, coûts d'autant plus élevés que les directions régionales ont conservé des déploiements sur plusieurs sites faute de pouvoir réellement mettre en oeuvre des mobilités géographiques très exigeantes en moyens d'accompagnement.

Dans ce contexte, l'on peut s'interroger sur un sentiment diffus de déclassement des échelons préfectoraux de niveau départemental non sélectionnés pour abriter les nouveaux pôles régionaux. Préoccupation classique, les agents des structures ayant perdu leur vocation à exercer des compétences décisionnelles s'inquiètent de pouvoir subir une certaine inertie dans le déroulement de leur carrière du fait d'un désavantage comparatif. Quant aux chefs de poste départementaux, un certain éloignement par rapport au centre régional et de celui-ci par rapport à leurs préoccupations territoriales peut nourrir une forme de lassitude. La situation des sous-préfets relève de mêmes hypothèses.

2. Quelle présence de l'État au niveau infradépartemental ?

Parallèlement à la réorganisation du réseau des préfectures de région, le Gouvernement précédent entendait poursuivre la réforme des sous-préfectures, en particulier au regard de leur déploiement.

Jusqu'à présent, cette volonté s'est principalement traduite par un redécoupage des arrondissements qui a pris une certaine ampleur. Il s'est agi principalement d'assurer une plus grande cohérence entre la carte des arrondissements et celle des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Présentation des mesures portant sur les arrondissements

Les mesures relatives à la carte des arrondissements ont, depuis la déconcentration de la procédure par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, deux sources possibles, selon qu'elles sont prises par les préfets de région ou par décret.

1. Modifications de limites d'arrondissement réalisées par les préfets de région ces trois dernières années :

Jusqu'en février 2016, douze ans après l'adoption de la loi susmentionnée, 33 modifications de limites d'arrondissement ont été mises en France par les préfets de région. Elles concernaient 72 arrondissements dans 29 départements (dont 1 en outre-mer).

En 2015 et début 2016, 11 modifications de limites d'arrondissements ont été réalisées dans 10 départements. À l'exception du Rhône, où la carte a été profondément remaniée pour tenir compte de la création de la métropole de Lyon, les arrêtés préfectoraux n'ont modifié qu'à la marge les limites d'arrondissements : seules 17 communes au total ont changé d'arrondissement afin de permettre la création de communes nouvelles (une commune ne pouvant être divisée entre deux arrondissements).

L'instruction du 12 février 2016 a été suivie d'évolutions plus nombreuses :

- la carte des arrondissements a été remaniée par arrêté préfectoral dans 63 départements 4 ( * ) , entrainant un changement d'arrondissement pour 2 064 communes ;

- 5 autres modifications sont prévues dans les prochains mois : Aube, Doubs, Oise, Deux-Sèvres, Vosges.

2. Modifications de limites d'arrondissement réalisées par le Gouvernement depuis 2015 :

À ces modifications effectuées par les préfets de région, s'ajoutent plusieurs modifications de limites effectuées par décret :

- réforme de la carte des arrondissements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin (décrets n°2014-1720, 2014-1721 et 2014-1722 du 29/12/2014) : huit arrondissements (soit un tiers des arrondissements de ces trois départements) ont été supprimés et les limites des arrondissements ont été adaptées à celle des intercommunalités,

- modification de limites départementales ayant emporté modification des limites d'arrondissements : pour permettre la création de communes nouvelles, une commune de Loire-Atlantique a été rattachée au Maine-et-Loire et une commune de l'Aisne a été rattachée à la Marne ;

- réforme de la carte des arrondissements de la Loire-Atlantique et de la Marne : la fusion de Châteaubriant & d'Ancenis (Loire-Atlantique) a été prononcée par décret du 29/12/2016 (entrée en vigueur au 1 er /01/2017, le nouvel arrondissement « Châteaubriant-Ancenis »se substituant aux deux précédent) et la fusion de Châlons-en-Champagne & de Sainte-Menehould (Marne) a été prononcée par décret du 29/03/2017 (entrée en vigueur au 1 er /04/2017, par suppression de Sainte-Menehould).

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Les adaptations mises en oeuvre n'ont entraîné la suppression que de dix arrondissements , dont huit dans le cadre de l'expérimentation conduite en 2014 dans un contexte particulier marqué par l'histoire. Les simples modifications de limites d'arrondissements n'entraînent pas d'économies : elles induisent des reports de charge entre sites (préfecture et sous-préfectures), que le préfet de département gère par une modulation des moyens ou des missions entre ces sites.

Si les implantations territoriales ont été globalement préservées ce dont il faut se féliciter, il reste qu'ainsi qu'a pu le souligner notre collègue, Hervé Marseille, en tant que précédent rapporteur spécial des crédits de la mission dans son rapport 5 ( * ) consacré à la situation des sous-préfectures, celles-ci n'ont pas moins à faire face à des ambiguïtés concernant leurs missions, dont elles pâtissent, mais aussi à la lente attrition de leurs moyens et à ses incidences sur le contour de leurs missions et les performances obtenues.

La vocation et la relance des sous-préfectures reposent sur des bases et des conditions faiblement documentées que traduit un réel décalage entre les ambitions et les moyens .

D'un côté, l'échelon infradépartemental se trouve consacré au nom de sa nature de niveau de proximité, de l'autre, ses moyens subissent un sourd déclin au terme duquel certaines situations locales ressortent comme particulièrement inquiétantes sans que les organisations alternatives mises en oeuvre n'apportent de solution acceptable.

Certaines sous-préfectures disposent d'effectifs quasiment « symboliques ». Ainsi, 58 sous-préfectures ont 10 ETPT ou moins et 136 entre 10 et 30 ETPT parmi lesquelles 40 disposent de moins de 12 ETPT. Seules 25 sous-préfectures dépassent un contingent d'effectifs de plus de 40 ETPT, si l'on ajoute aux personnels des sous-préfectures ceux postés dans les centres d'expertise et de ressources titres (CERT) qui ont été déployés pour centraliser le traitement de la chaîne numérisée de délivrance des titres sécurisés.

Ces données ne préjugent pas de la pertinence du déploiement du réseau. Celle-ci paraît sans détermination bien claire. Le rapport de notre collègue Hervé Marseille a pu montrer qu'il existait une grande hétérogénéité dans les situations si bien que, ni le nombre des habitants, ni celui des services de l'État ne sont des facteurs explicatifs d'une carte des sous-préfectures inerte face aux changements multiples du contexte des territoires. Par ailleurs, en-deçà d'un certain niveau de moyens le maintien des unités concernées ne peut que se poser.

Votre rapporteur spécial veut souligner que, dans ce domaine, l'essentiel est bien que, dans les territoires, les différents usagers et partenaires de l'État puissent trouver une qualité de service répondant à leurs attentes.

En toute hypothèse, les budgets consacrés aux dispositifs préfectoraux dans les territoires ressortent comme très hétérogènes sans que toujours des données de contexte ne semblent le justifier .

La présence infra-territoriale de l'État est indispensable tant pour les usagers que pour les élus, en territoire rural comme en territoire urbain. Votre rapporteur spécial rappelle son attachement à garantir l'accès de tous à des services publics de proximité , dans un contexte où le « besoin d'État » s'exprime fortement de la part des citoyens.

À cet égard, l' évolution des modalités de présence de l'État dans les territoires et d'accès aux services publics de proximité ne paraît pas offrir de réelle équivalence .

Il s'agit de créer des points de contact de proximité, à travers la mise en place de Maisons de l'État (MdE) et de Maisons de services au public (MSAP) .

Les Maisons de l'État (MdE) et les Maisons de services au public (MSAP)

D'après la circulaire du Premier ministre du 15 octobre 2014 sur la création des Maisons de l'État : « Il convient de distinguer les Maisons de services au public et les autres projets de ce type, des Maisons de l'État. Constituant deux formes de regroupement de services publics de proximité, ces formules se distinguent par leur nature juridique, leurs objectifs, leur échelle d'implantation privilégiée, et leurs moyens.

Les Maisons de services au public ont un fondement législatif, un objectif tourné vers l'usager et le grand public, et des moyens de fonctionnement humains mutualisés et encadrés. Elles sont généralement implantées à un échelon infra-arrondissement, même si elles peuvent dans certains cas, en fonction des spécificités territoriales, être créées dans des chefs-lieux d'arrondissement. Elles visent à faciliter les démarches des usagers et à améliorer la proximité des services publics dans des territoires ruraux, urbains ou périurbains en situation de déficit de services publics. Elles ont été définies par la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Elles reposent sur un principe de mutualisation des services : les agents qui les animent proposent des prestations assurées par différents services publics relevant de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements, des organismes nationaux ou locaux chargés d'une mission de service public ainsi que des services privés, principalement à destination du grand public. Le fonctionnement des Maisons de services au public est porté par des collectivités locales, en partenariat avec les opérateurs, ou par les opérateurs eux-mêmes, selon une logique de service rendu.

Les Maisons de l'État , quant à elles, permettent une rationalisation et une meilleure visibilité de la présence de l'État dans des territoires ruraux, urbains ou périurbains présentant des enjeux particuliers de maintien de cette présence, via une mutualisation des locaux et de certaines fonctions support : elles accueillent des services de l'État privilégiant plutôt l'appui aux collectivités territoriales mais sans exclure les services dédiés aux usagers, tels ceux des sous-préfectures délivrant des titres ou ceux des services des finances publiques, ainsi que les opérateurs eux-mêmes, soit via des permanences, soit via des missions de plein exercice. Les missions des Maisons de l'État sont assurées par les agents des services qui y sont rassemblés ».

Les MSAP 6 ( * ) peuvent regrouper des services publics relevant de l'État ainsi que des d'opérateurs et entreprises de service public comme Électricité de France (EDF), la Société nationale des chemins de fer (SNCF), La Poste, ainsi que des organismes de sécurité sociale comme les Caisses d'allocation familiale (CAF) ou les caisses de Mutualité sociale agricole (MSA). Mais ces structures n'impliquent pas nécessairement des services de l'État.

Les MdE, créées par arrêté préfectoral, sont souvent localisées sur le site de la sous-préfecture, et regroupent en priorité des services de proximité de l'État - soit totalement, soit par l'organisation de permanences périodiques - comme des administrations déconcentrées (par exemple des directions départementales des territoires ou des directions départementales des finances publiques) ou des opérateurs nationaux (par exemple des délégations territoriales de l'Office national des forêts, de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ou des Agences régionales de santé). Elles ont pour principale vocation d'assurer un service de conseil et d'ingénierie territoriale à destination des porteurs de projets locaux comme les collectivités territoriales, les entreprises ou les associations. Elles permettent également une rationalisation des implantations immobilières de l'État.

Il existe 77 MdE créées ou en cours de création et 1 068 MSAP, avec des formes de mutualisation de services très hétérogènes selon les territoires 7 ( * ) .

S'agissant des « Maisons de l'État » l'échantillon des 22 Maisons de l'État créées entre 2014 et 2015 enseigne que le coût moyen d'un projet est de 320 000 euros. Les services concernés sont essentiellement les sous-préfectures, les unités territoriales des directions départementales des territoires (et de la mer, UT-DDT(M)) et les services des inspecteurs de l'éducation nationale (IEN) :

- 95 % des Maisons de l'État accueillent une sous-préfecture, 86 % une UT-DDT(M), les services des IEN (27 %) étant les troisièmes les mieux implantés ;

- les délégués du défenseur des droits (36 %), les unités départementales de l'architecture et du patrimoine (32 %) et les directions départementales de la protection des populations (23 %) sont aussi représentés dans les Maisons de l'État, plus particulièrement pour des permanences ;

- d'autres services participent aux Maisons de l'État, soit en les intégrant physiquement, soit en y tenant des permanences : centres d'information et d'orientation, unités ou agences territoriales de l'Office national des forêts, centres des finances publiques, unités départementales des DIRECCTE ou des DREAL, Douanes, services de la protection judiciaire de la jeunesse, Points d'accès au droit, Pôle emploi, mission locale, CPAM, CAF, UDAF...

Ces 22 implantations représentent un coût total de travaux de 6 958 000 euros qui ont été financés par des crédits locaux, et au niveau national à hauteur de 72 %, soit 5 022 000 euros, par des sources interministérielles.


* 1 Loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

* 2 Depuis son institution en 1964, le préfet de région est le préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région.

* 3 La gestion des crédits déconcentrés du programme 307, c'est-à-dire les crédits dédiés aux dépenses de personnel et de fonctionnement des préfectures, est confiée aux préfets de région, qui les répartit ensuite entre les différentes unités opérationnelles (UO).

* 4 Ain, Aisne, Allier, Alpes-de-Haute-Provence, Ardèche, Ariège, Aude, Aveyron, Bouches-du-Rhône, Calvados, Charente, Charente-Maritime, Corrèze, Corse-du-Sud, Côte-d'Or, Côtes-d'Armor, Creuse, Dordogne, Drôme, Eure, Finistère, Gard, Haute-Garonne, Gers, Hérault, Ille-et-Vilaine, Indre, Indre-et-Loire, Isère, Jura, Loir-et-Cher, Loire, Loiret, Lot, Maine-et-Loire, Manche, Mayenne, Morbihan, Nièvre, Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Haut-Rhin, Rhône, Haute-Saône, Saône-et-Loire, Seine-Maritime, Seine-et-Marne, Yvelines, Somme, Var, Vaucluse, Vendée, Vienne, Yonne, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d'Oise.

* 5 « Sous-préfectures : l'État à proximité »Rapport d'information d'Hervé Marseille, fait au nom de la commission des finances n° 420 (2016-2017) - 15 février 2016.

* 6 Le part du financement des MSAP qui incombe à l'État est portée par le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ».

* 7 Le CIMAP du 17 juillet 2013a décidé de la généralisation des MSAP sur l'ensemble du territoire, avec un objectif de 1 000 maisons d'ici 2017. Lors du comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015, le Gouvernement a avancé cette date à la fin d'année 2016. La loi« NOTRe »prévoit que les schémas départementaux d'amélioration de l'accessibilité des services au public fassent l'objet d'une refonte à compter du 1 er janvier 2016, ce qui sera l'occasion de revoir les modalités d'accès aux services publics dans les territoires.