M. Jacques GENEST, rapporteur spécial

PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE GÉNÉRALE DE LA MISSION

Dotée de 2,757 milliards d'euros en crédits de paiement, la mission AGTE comprend trois programmes poursuivant des objectifs diversifiés et d'ampleur inégale :

- le programme 307 « Administration territoriale » qui porte principalement les moyens du réseau préfectoral ( 1,690 milliard d'euros ) ;

- le programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative » finance essentiellement certaines expressions de la vie politique du pays ( 125,6 millions d'euros ) ;

- le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » est un programme réservoir qui finance les moyens généraux du ministère de l'intérieur et certaines interventions de ce dernier ( 941,1 millions d'euros ).

Les dotations de la mission s'inscrivent en nette diminution (-349,6 millions d'euros), cette évolution traduisant essentiellement la fin du cycle électoral chargé de l'année en cours.

A. APRÈS UNE ANNÉE 2017 PLUTÔT DÉPENSIÈRE...

Les crédits budgétaires ouverts en 2017 extériorisaient une hausse de 21,9 % des moyens de la mission par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 (+ 557,4 millions d'euros) et avaient atteint 3,106 milliards d'euros .

Par rapport à la consommation effective des dotations constatée en 2016, qui avait bénéficié de reports de crédits élevés, la programmation pour 2017 conduisait à une augmentation des charges de la mission un peu inférieure mais atteignant encore près de 15,1 % (soit un supplément de près de 406 millions d'euros ).

1. En 2017, le poids de charges « exceptionnelles »...

Une grande partie de l'augmentation des crédits pouvait être attribuée à des charges exceptionnelles, résultant d'abord de changements de périmètre d'une année sur l'autre (près de 100 millions d'euros), avec notamment l'inclusion dans la mission du fonds interministériel de prévention de la délinquance , pour 80,4 millions d'euros, mais aussi, et surtout, du calendrier électoral .

En effet, c'est principalement l'alourdissement des dotations du programme 232 de financement de la vie politique et culturelle (+ 237,3 millions d'euros par rapport aux dépenses de 2016 et + 370 millions d'euros environ par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale) qui avait contribué à l'alourdissement des charges budgétées. Cette dernière évolution était bien entendu déterminée par le cycle électoral particulièrement dense en 2017 (voir infra ).

2. ... mais aussi d'une dynamique soutenue d'autres dépenses plus discrétionnaires

Toutefois, en dehors des circonstances particulières à l'exercice 2017, l'on avait pu relever que, de façon inhabituelle, les charges de la mission étaient programmées sur une base suffisamment dynamique pour que le plafond de la programmation pluriannuelle alors en vigueur se trouve dépassé. De la même manière, la contribution régulière de la mission à la réduction des dépenses publiques se trouva inversée par une croissance soutenue des dotations (2,9 % pour les programmes 307 et 216), qui pouvait être analysée comme n'étant pas seulement la conséquence de facteurs extérieurs mais comme attribuable à certains choix discrétionnaires portant, en particulier, sur les rémunérations mais venant aussi de mesures plus structurelles (« plan préfecture nouvelle génération », investissements informatiques et immobiliers).

À titre d'exemple, les suppléments de crédits du programme 307 qui finance le déploiement territorial du ministère à travers son réseau préfectoral et représente le programme le plus lourd financièrement dans l'ensemble de la mission, de l'ordre de 51 millions d'euros, résultaient de choix de politique salariale mais aussi de dépenses de réorganisation d'une série de missions dans le cadre du « plan préfecture nouvelle génération » (PPNG).

3. L'exécution budgétaire de 2017 reste entourée d'incertitudes

Le premier projet de loi de finances rectificative pour 2017, déposé par le Gouvernement au début du mois de novembre, propose la ratification d'annulations de crédits intervenues dans le cadre du décret d'avances du 20 juillet 2017 pour un montant limité (31,8 millions d'euros en autorisations d'engagement - AE - et 26 millions d'euros en crédits de paiement - CP). Votre rapporteur spécial relève qu'une fois de plus c'est le programme d'administration territoriale de l'État qui subit la plus grande part des ajustements prévus (21,5 millions d'euros en AE et 21 millions d'euros en CP).

Ces mouvements de crédits qui matérialisent quelques économies pourraient ne pas constituer le dernier mot de l'exécution budgétaire. Du fait des impasses financières caractérisant la ligne prévue pour acquitter les indemnités contentieuses (89,6 millions d'euros), des moyens supplémentaires pourraient devoir être dégagés sauf à ce que le Gouvernement finance une fois de plus ces déficits de crédits par ponction sur les autres moyens de la mission.

Votre rapporteur spécial consacre de plus amples développements aux conditions dans lesquelles le ministère de l'intérieur pourvoit aux dépenses de contentieux mises à sa charge mais souhaite d'emblée signaler l'impact significatif qu'elles ont par le désordre qu'elles créent dans la programmation budgétaire et dans l'exécution des crédits de la mission.

B. ... LA PROGRAMMATION POUR 2018 TRADUIT, AU-DELÀ DES APPARENCES, UN RETOUR À UNE SITUATION PLUS TENDANCIELLE

Le projet de budget pour 2018 extériorise une très forte réduction des crédits qui reculent de plus de 11 %.

Cette évolution est due au programme 232dont les dotations se replient de 344 millions d'euros (soit une baisse de 73 %), somme à mettre en regard d'une diminution globale des crédits de 349,7 millions d'euros.

Ainsi, la quasi-totalité des économies de la mission est attribuable au programme 232 dont les dépenses se trouvent principalement déterminées par un cycle électoral lourd d'événements en 2017 et dénué de rendez-vous significatifs d'un point de vue budgétaire en 2018.

Évolution des crédits de la mission AGTE
(2018/2017)

(en milliers d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

De fait, les dotations des deux autres programmes sont marquées par une grande stabilité, le niveau des crédits demandés subissant une légère baisse en valeur, toutefois plus accusée en volume une fois prises en compte les perspectives d'inflation.

Quant aux changements de périmètre, s'ils conduisent à relever les dotations de la mission, ils ne modifient que marginalement l'appréciation sur la dynamique des crédits.

Tout juste peut-on observer qu'ils aboutissent à une légère minoration, en affichage, de la dynamique des crédits du programme 216. À périmètre constant, ceux-ci progresseraient de 1,7 % contre un repli de 0,4 % à périmètre courant (pour un écart de 19,5 millions d'euros).

Évolution des crédits du programme 307
à périmètre constant

Source : ministère de l'intérieur

Évolution des crédits du programme 307
à périmètre courant

Source : ministère de l'intérieur

Évolution des crédits du programme 216
à périmètres courant et constant

Source : ministère de l'intérieur

C. UNE MISSION PLACÉE SOUS FORTE CONTRAINTE DANS LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE DES FINANCES PUBLIQUES

Le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques prolonge la stabilisation des dotations de la mission AGTE pour la période qu'il recouvre (2018-2020). Les crédits seraient inchangés en 2019 et progresseraient de 150 millions d'euros en 2020.

Évolution des plafonds de crédits de paiement
de la mission (2018-2020)

Source : commission des finances du Sénat d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

Ces plafonds placent la mission au rang des missions non prioritaires appelées à financer la dynamique d'autres dépenses des administrations publiques centrales telle qu'elle ressort des objectifs d'évolution de la dépense publique énoncés à l'article 7 du projet de loi de programmation pluriannuelle. Ceux-ci tablent sur une progression des dépenses en question de 2 % en volume au cours de la période 2019-2020.

On relèvera sans doute qu'avec un niveau de dépenses supérieur de 7 % en 2020 à celui de début de période, la programmation de la mission AGTE semble dépasser la norme de dépense. Mais, il faut compter avec les échéances électorales programmées d'ici 2020. D'importants rendez-vous électoraux sont prévus parmi lesquels, les principaux scrutins à venir sont les élections européennes (2019), les élections municipales (2020) et les élections sénatoriales (2020 également). Celles-ci paraissent budgétées sur des bases historiques alors qu'il est vraisemblable que certains facteurs, les frais d'adressage de la propagande électorale par exemple, joueront à la hausse des dépenses électorales .

En somme, la programmation pluriannuelle, en tablant sur la modération de dépenses difficilement pilotables, trace un cadre budgétaire dont la mise en oeuvre fait peser d'emblée sur les autres dépenses de la mission la perspective de redéploiements accentuant encore la contrainte financière qu'elle place comme horizon de leur gestion.

Il est vrai que le Gouvernement annonce une dématérialisation de la propagande électorale, qui devrait selon lui permettre une économie de 414,3 millions d'euros sur la période 2018-2022. Mais, quoi qu'il en soit de sa concrétisation, en toute hypothèse, cette perspective ne toucherait pas les élections municipales selon les projets du Gouvernement aujourd'hui connus si bien qu'elle n'impacte que fort modérément la programmation à l'horizon 2020.

Dans ces conditions, c'est bien une baisse en volume des moyens de la mission que recèle la programmation triennale .

II. LA RÉSISTANCE DES CRÉDITS DE PERSONNEL MALGRÉ UNE BAISSE DU PLAFOND D'EMPLOIS

A. VUE D'ENSEMBLE SUR LES ÉVOLUTIONS DE CRÉDITS PAR NATURE

La mission AGTE est majoritairement une mission d'effectifs ce dont témoigne le poids des dépenses de personnel dans le total des crédits en 2017 (65,7 % du total). Cette caractéristique s'accentue en 2018, la part des crédits de personnel dans le total de la mission atteignant 73,2 %.

Cette déformation de la structure des crédits est en réalité un retour à une situation habituelle aux exercices budgétaires sans rendez-vous électoraux majeurs.

Évolution des crédits par nature de dépenses
(2018/2017)

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat

La dynamique des différentes dotations verrait les évolutions suivantes.

Pour les crédits de fonctionnement de la mission, ils se replieraient de 295 millions d'euros (- 37,7 %),soit un peu plus que la baisse des crédits de fonctionnement portés par le programme 232 (- 277 millions d'euros) résultant du cycle électoral, qui contribueraient toutefois à plus de 90 % du repli des dépenses prévues à ce titre ; les autres programmes de la mission auraient à économiser 18 millions d'euros de frais de fonctionnement.

Cumulés, les crédits d'investissement et d'intervention (un peu plus de 9 % des dotations de la mission) subiraient un repli de plus de 34 millions d'euros (plus de 13 %).

Pour les crédits de personnel , ils suivraient un repli beaucoup plus modéré, de 1 % (soit une économie de 20,4 millions d'euros), très sensiblement inférieur à la baisse des dotations de la mission (- 11 %).

Les crédits de personnel de la mission relèvent des trois programmes qu'elle regroupe mais leurs poids respectifs dans ces programmes, comme, à un moindre titre, les évolutions programmées pour 2018, sont très contrastés.

C'est également au programme 232 que la baisse des crédits de personnel se trouve liée (- 39,6 millions d'euros), tandis que les deux autres programmes de la mission verraient une certaine progression de ces dotations (+ 19,3 millions d'euros).

On note qu'au terme d'un différentiel d'évolution entre les dépenses de personnel du programme 307 d'administration territoriale (AT) et du programme 216 de conduite et de pilotage des politiques de l'intérieur (CPPI) celui-ci verrait renforcé son poids relatif dans les dépenses de personnel de la mission.

Données relatives aux crédits de personnels de la mission

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat

B. LES CRÉDITS DE PERSONNEL ENTRE AUGMENTATION ET INCERTITUDES

Les crédits de personnel atteignent au total 2 018,8 millions d'euros. Une fois neutralisée la diminution des crédits de titre 2 programmés au titre du programme 232 du fait des besoins apparus en 2017 pour traiter les opérations électorales, les crédits de personnel extériorisent une hausse très modérée pour le programme 307 (+ 0,7 %) mais plus dynamique pour le programme 216 (+ 3,7 %). Ces évolutions sont assez largement indépendantes des variations d'emplois. Elles demeurent incertaines dans un contexte où demeure un besoin de clarification des impacts de la politique salariale du Gouvernement.

1. Les crédits de personnel du programme 307 sont au même niveau qu'en 2015, année précédant la mise en oeuvre du plan préfecture nouvelle génération
a) Une augmentation du coût par agent qui n'est que partiellement due à la revalorisation indiciaire

Malgré sa modération, on note que l'augmentation des dépenses de personnel du programme 307 contrasterait avec la nouvelle (voir infra ) franche réduction des effectifs .

Le projet de loi de finances pour 2018 est fondé sur un schéma d'emplois comportant la suppression de 415 ETP mais l'effet des schémas d'emplois de 2017 et 2018 (- 8,8 millions d'euros) serait compensé par l'impact du glissement-vieillesse technicité pour 6,7 millions d'euros et par des mesures catégorielles pour 8 millions d'euros. Celles-ci se décomposent en des mesures statutaires (+ 4,2 millions d'euros), dont 2,7 millions d'euros au titre de l'application du protocole PPCR, et en mesures indemnitaires (3,7 millions d'euros) dont 3,2 millions d'euros au titre du « régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel » dit « RIFSEEP » du corps préfectoral.

L a dynamique des dépenses de personnel résulte de la coexistence de mesures de logique opposée , les unes visant à accroître la part indiciaire des rémunérations (le PPCR), les autres accentuant l'influence des primes (le RIFSEEP), qui manifeste une certaine souplesse dans la détermination des principes de rémunération suivis par le ministère.

Votre rapporteur spécial observe encore qu'à l'échéance du plan préfecture nouvelle génération, qui aura vu supprimés 1 300 ETP (soit 5 % des effectifs de 2015), les crédits de personnel du programme pour 2018 seraient légèrement supérieurs au niveau de 2015 . En bref, le coût par agent aura augmenté de 5 % sur période triennale d'application du PPNG.

Cette augmentation ne peut être attribuée que pour une faible part à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique . Mise en oeuvre en deux temps (1 er juillet 2016 et 1 er février 2017) pour 1,2 % au total, en année pleine cette revalorisation a alourdi les charges de 14,8 millions d'euros (estimation sur la base des effectifs de 2016) contre un supplément de dépenses de 75,5 millions d'euros par rapport à un coût par agent constant depuis 2015.

Impact de la revalorisation du point d'indice de 1,2 point
en juillet 2016 et février 2017

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

D'autres éléments jouent parmi lesquels il faut prendre en considération les mesures d'accompagnement du plan préfecture nouvelle génération.

Elles consistent à modifier la structure d'emplois du programme en remplaçant des emplois de catégorie C par des postes de catégories A et B. Les cibles de ce repyramidage sont à l'horizon 2020 pour la filière administrative de 23 % de catégorie A, 35 % de catégorie B et 42 % de catégorie C. Elles demanderont des moyens supplémentaires par rapport à la situation actuelle où la répartition des emplois des préfectures suit le schéma suivant : 19,6 % de catégorie A ; 32,3 % de catégorie B et 48,12 % de catégorie C. En tout état de cause, les surcoûts liés aux seules promotions internes atteindraient plus de 1 million d'euros en 2018 par rapport à la situation de 2017. Le surcoût du repyramidage sur la période 2016-2020 devrait atteindre 6,7 millions d'euros hors contribution aux pensions.

b) Une hypothèque à lever

La politique salariale du Gouvernement pour 2018 comporte quelques imprécisions qui relativisent la programmation des crédits de personnel. Dans ce contexte, se dessine une mécanique par laquelle la suspension annoncée du PPCR pourrait financer au niveau macro budgétaire les mesures prises pour compenser l'alourdissement de la contribution sociale généralisée (CSG).

La suspension du PPCR pourrait conduire à une économie de 4,97 millions d'euros en 2018 pour le programme 307 en comptant les cotisations au compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Estimation des effets du PPCR sur le programme 307
en régime sans suspension

À effectifs constants et sur la base des hypothèses cumulées sur la période 2016-2020, le PPCR se traduirait par un surcoût annuel employeur de 21,5 millions d'euros par an sur le programme 307 à compter de 2021, dont 9,93 millions d'euros de cotisations patronales supplémentaires au CAS « Pensions » (cotisations à hauteur de 74,6 % de l'assiette en 2021). Sur la base des mêmes hypothèses, les cotisations salariales au CAS « Pensions » augmenteraient de 1,48 million d'euros par an (cotisations à hauteur de 11,10 % de l'assiette en 2021).

Mesure nouvelle / an

2016

2017

2018

2019

2020

Total
PPCR

total Hors-CAS pension (21+22+23)

1 070 000

4 425 418

2 729 587

1 633 216

1 784 514

11 642 735

total CAS pension

1 610 000

4 030 957

2 238 498

983 544

1 074 657

9 937 655

total surcoût annuel

2 680 000

8 456 375

4 968 085

2 616 760

2 859 171

21 580 390

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La suspension du PPCR est contemporaine des mesures envisagées pour compenser aux fonctionnaires l'alourdissement de la CSG.

Le bilan global de ces ajustements appelle des précisions mais, d'ores et déjà, force est de relever le lien entre la compensation de la hausse de la CSG et le report du protocole PPCR et de sa contribution à l'amélioration de la situation indiciaire des agents.

Il conviendrait que le Gouvernement dépose un amendement de crédits afin de tirer les conséquences de ses décisions afin que le Parlement ne soit pas conduit à voter sur des propositions de crédits virtuelles.

2. Des dépenses de personnel du programme 2016 d'administration générale du ministère de l'intérieur plus dynamiques que celles du programme d'administration territoriale de l'État

En loi de finances initiale pour 2017, la masse salariale du programme 216 s'élevait à 483,54 millions d'euros. Le projet de loi de finances pour 2018 la porte à 501,67 millions d'euros, soit une augmentation des crédits de titre 2 de 18,13 millions d'euros qui contraste avec la stabilité des crédits de même titre prévus pour le programme 307 d'administration territoriale de l'État.

a) L'augmentation du plafond d'emplois

Le plafond d'emplois du programme se trouve augmenté de 156 ETPT ( 2,1 %) correspondant pour l'essentiel à un transfert de 119 ETPT du fait de la création de la commission du contentieux du stationnement payant. Cette nouvelle juridiction administrative spécialisée résulte d'une réorganisation du système de sanctions pour infractions au stationnement.

La modification du régime des infractions
au stationnement payant

Prévue à l'article 63 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropole s, la dépénalisation du stationnement payant est la conséquence du remplacement du paiement spontané de l'usager par une redevance d'occupation du domaine public appelée« forfait de post-stationnement » , dont le montant est déterminé par la collectivité.

L'ordonnance n° 2015-45 du 23 janvier 2015 a organisé la création d'une nouvelle juridiction administrative spécialisée, la commission du contentieux du stationnement payant, qui sera saisie des recours contre les avis de forfait de post-stationnement, après recours préalable obligatoire devant la collectivité compétente. Présidée par un magistrat administratif ayant le grade de président, cette commission sera composée de magistrats administratifs et de magistrats judiciaires.

L'incidence financière de cette réforme, qui présente une singularité budgétaire forte, avec le rattachement d'une juridiction au budget du ministère de l'intérieur, est encore incertaine.

Le volume d'affaires est très élevé. D'après le ministère de l'intérieur, 559 654 contestations étaient enregistrées en 2013 devant les officiers du ministère public. Il n'est pas certain dans ces conditions que les effectifs prévus, malgré leur déjà forte ampleur, suffiront à traiter ce stock contentieux . Par ailleurs, même si les collectivités territoriales sont appelées à exercer désormais davantage de responsabilités dans la police de l'occupation de leur domaine, elles devraient faire face à des charges nouvelles très lourdes du fait du traitement préalable des demandes gracieuses.

En dehors de ce transfert, on peut relever le transfert de 7 ETPT au titre de la prévention de la délinquance et de la radicalisation, dont 4 ETPT pour le seul secrétariat général du comité interministériel éponyme.

La répartition des emplois du programme est marquée par la prédominance des emplois d'administration centrale qui se renforce du fait de la création de la commission susmentionnée.

Répartition du plafond d'emplois
par niveau de service

Service

LFI 2017

ETPT

PLF 2018

ETPT

Administration centrale

4 018

4 179

Services régionaux

178

192

Services départementaux

1 790

1 786

Opérateurs

18

18

Services à l'étranger

Autres

1 326

1 311

Total

7 330

7 486

Source : programme annuel de performances pour 2018

Les effectifs des services régionaux correspondent aux agents de la délégation à la sécurité routière (DSR) affectés au sein des directions de l'environnement, de l'aménagement et du logement pour les DOM (DEAL) et de la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Île-de-France (DRIEA), ainsi qu'aux effectifs de la filière sociale affectés en préfecture.

Les effectifs des services départementaux comprennent la majorité des inspecteurs et délégués du permis de conduire et des effectifs déconcentrés dédiés à la sécurité routière. Le nombre des ETPT départementaux d'inscrirait en légère baisse alors que les besoins paraissent pour le moins peu satisfaits.

La ligne « Autres » correspond aux personnels des cultes dans les départements concordataires.

La ligne « Opérateurs » regroupe 18 agents portés par le programme 216 en poste à l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), service rattaché au programme 303 « Immigration et asile ».

b) Une augmentation des crédits de personnel à structure constante

L'augmentation des crédits de personnel excède légèrement celle du plafond d'emplois. Une fois neutralisés les changements de périmètre du programme, les crédits de personnel connaissent une dynamique de 2,9 %.

Hors transferts, les principaux facteurs d'évolution des dépenses de personnel pour 2018 sont les suivants :

- l'impact d'un schéma d'emplois qui prévoit la réduction de 35 ETP (- 1,8 million d'euros) ;

- l'enveloppe catégorielle (+ 1,9 million d'euros hors CAS) qui permet notamment le financement de mesures statutaires ministérielles et interministérielles ;

- la baisse dans l'utilisation des rétablissements de crédits (+ 10 millions d'euros) par rapport à la programmation pour 2017 ;

- le solde net du GVT (5 millions d'euros) qui détermine une hausse des coûts salariaux de 0,9 % (hors cotisations au CAS « Pensions »).

Comme pour les crédits du programme 307, des inconnues pèsent sur l'issue des annonces du Gouvernement évoquées précédemment.

C. UNE MISSION VRAIMENT GÉNÉRALISTE

La mission a une vocation affirmée de support de politiques publiques dont la conduite opérationnelle est confiée à d'autres services que les services en charge de la gestion de ses crédits. C'est en grande partie une « mission-réservoir », ce dont témoigne l'importance des déversements de crédits vers des programmes extérieurs.

Ils ont pour effet de préempter près d'un cinquième des dotations ouvertes au titre de la mission AGTE même si celle-ci bénéficie, de son côté, de quelques ressources supplémentaires en provenance d'autres missions.

Le tableau ci-après récapitule ces échanges entre la mission et des missions extérieures.

Bilan prévisionnel des déversements de crédits
entre la mission et d'autres missions

(en milliers d'euros)

Source : projet annuel de performances pour 2018

Le bilan net des déversements entre les missions extérieures et la mission AGTE atteindrait 566,9 millions d'euros en 2018 et suivrait la répartition suivante, qui fait ressortir la place particulière occupée par la mission « Sécurités » comme bénéficiaire des dotations ouvertes au titre de la mission « AGTE ».

Source : projet annuel de performances pour 2018

Par ailleurs, compte tenu des compétences exercées dans le cadre du programme 307, programme qui rassemble près de 62 % des crédits de la mission AGTE et finance principalement les services d'administration générale de l'État dans les territoires (réseaux des préfectures et sous-préfectures), les moyens regroupés dans la mission sont difficilement attribuables à une politique publique déterminée.

Les attributions des réseaux d'administration générale de l'État ne relèvent qu'en partie d'un principe de spécialité des compétences et se trouvent partagées avec les acteurs locaux selon des répartitions de responsabilités mouvantes si bien que l'analyse de l'utilisation des crédits en termes de performance supposerait, pour être systématisée, des progrès de méthode sans doute assez illusoires dès lors qu'on désirerait la généraliser. C'est donc sur des périmètres ponctuels, qui ne recouvrent pas la totalité du champ de la mission qu'il est possible, moyennant parfois quelques approximations, d'approcher l'efficacité des moyens budgétisés dans la cadre de la mission AGTE.