Jeudi 2 juillet 2020

- Présidence de Mme Jacky Deromedi, présidente d'âge -

La réunion est ouverte à 10 heures.

Réunion constitutive

Mme Jacky Deromedi, présidente. - Il me revient, en ma qualité de présidente d'âge, d'ouvrir la première réunion de la commission d'enquête pour l'évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion.

Nous devons tout d'abord procéder à l'élection du président. J'ai reçu la candidature de notre collègue Alain Milon.

La commission d'enquête procède à la désignation de son président, M. Alain Milon.

- Présidence de M. Alain Milon, président -

M. Alain Milon, président. - Je vous remercie de la confiance que vous m'accordez pour présider nos travaux. Nous devons à présent désigner nos trois rapporteurs, ainsi que les membres du bureau. Pour les rapporteurs, j'ai reçu les candidatures de Mme Catherine Deroche, M. Bernard Jomier et Mme Sylvie Vermeillet.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Lorsqu'une commission d'enquête est créée, notre tradition parlementaire veut que majorité et opposition aient chacune soit la présidence soit l'élaboration du rapport. C'est d'ailleurs ainsi qu'a procédé l'Assemblée nationale pour sa propre commission d'enquête, alors que cette législature ne brille pourtant pas particulièrement par son ouverture aux groupes d'opposition... C'est un problème récurrent au Sénat : notre coutume de démocratie parlementaire n'est pas respectée. J'en ai fait part au président Larcher. Il est de notre intérêt à tous de respecter cette tradition.

M. Alain Milon, président. - La majorité sénatoriale n'est pas la majorité présidentielle et il ne s'agit pas d'un droit de tirage d'un groupe politique : la création de cette commission d'enquête a été demandée par le Président du Sénat et décidée en séance publique. La Conférence des présidents a donné son accord à notre organisation.

La commission procède à la désignation de ses rapporteurs, Mme Catherine Deroche, M. Bernard Jomier et Mme Sylvie Vermeillet.

M. Alain Milon, président. - Je vous propose ensuite de désigner les vice-présidents, de manière que, conformément à l'usage, les deux groupes ayant les effectifs les plus importants aient chacun deux représentants au bureau, et à ce que chaque autre groupe ait un représentant.

J'ai reçu les candidatures de M. René-Paul Savary pour le groupe Les Républicains, de Mme Angèle Préville pour le groupe socialiste et républicain, de M. Martin Lévrier pour le groupe La République en Marche, de Mme Véronique Guillotin pour le groupe du RDSE, de Mme Éliane Assassi pour le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste, de M. Emmanuel Capus pour le groupe Les Indépendants - République et territoires et de M. Philippe Adnot pour les non-inscrits.

La commission procède à la désignation des autres membres de son bureau : M. René-Paul Savary, Mme Angèle Préville, M. Martin Lévrier, Mmes Véronique Guillotin et Éliane Assassi et MM. Emmauel Capus et Philippe Adnot.

M. Alain Milon, président. - La mission des commissions d'enquête prend fin par le dépôt de leur rapport et, au plus tard, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date de l'adoption de la résolution qui les a créées, en l'espèce le 30 juin. Nous sommes donc tenus par la date du 29 décembre 2020. Cette date peut sembler lointaine, mais n'oublions pas que nos travaux s'interrompront en août, que le mois de septembre sera marqué par les élections sénatoriales, que nous entrerons ensuite dans la période budgétaire et sociale et que nous aurons probablement à examiner en deuxième lecture le projet de loi relatif à la bioéthique. La commission d'enquête de l'Assemblée nationale a déjà entamé ses travaux et procédé à l'audition d'un certain nombre de responsables.

C'est la deuxième fois depuis 2005 - après la commission d'enquête créée à la suite de l'incendie de Lubrizol, qui vient de conclure ses travaux -, que le Sénat crée une commission d'enquête hors droit de tirage - celle-ci l'est à l'initiative du Président du Sénat.

La feuille de route tracée en sept points par la proposition de résolution est claire et nous dessine un programme chargé, qui devra trouver sa place dans un calendrier contraint et dans un contexte où l'épidémie n'est pas terminée.

Nous disposons de pouvoirs de contrôle renforcés, tel que celui d'entendre toute personne dont nous souhaiterions recueillir le témoignage ou d'obtenir la communication de tout document que nous jugerions utile. Le principe est que les auditions des commissions d'enquête sont publiques, sauf si nous en décidons autrement. En revanche, tous les travaux non publics de la commission d'enquête, autres que les auditions publiques et la composition du bureau de la commission, sont soumis à la règle du secret pour une durée maximale de trente ans. J'appelle donc chacun d'entre nous à la plus grande discrétion sur ceux de nos travaux qui ne seront pas rendus publics. Le non-respect du secret est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal, soit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. En outre, l'article 100 du Règlement du Sénat prévoit que « tout membre d'une commission d'enquête qui ne respectera pas les dispositions du paragraphe IV de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relatives aux travaux non publics d'une commission d'enquête pourra être exclu de la commission par décision du Sénat prise sans débat sur le rapport de la commission après avoir entendu l'intéressé » et que cette exclusion « entraînera pour le sénateur qui est l'objet d'une telle décision l'incapacité de faire partie, pour la durée de son mandat, de toute commission d'enquête ».

J'invite plus généralement chacun à une certaine retenue dans son expression publique sur nos travaux. Dans cette crise, je crois que nous avons beaucoup souffert d'une communication brouillonne, voire contradictoire, d'affirmations aussi péremptoires que versatiles et du déballage public de querelles d'ego. Tirons-en tous les enseignements et soyons aussi sobres dans notre communication qu'opiniâtres dans nos interrogations.

Mme Catherine Deroche, rapporteure. - En tant que rapporteure de la branche maladie au sein de notre commission des affaires sociales, j'ai déjà réalisé trente-cinq auditions. Avec mes deux co-rapporteurs, nous souhaitons établir le diagnostic de ce qui s'est passé, en commençant par le terrain. Nous ferons également probablement un déplacement dans un territoire particulièrement touché, ainsi qu'un déplacement à l'étranger, afin d'étudier comment cette pandémie a été gérée dans d'autres pays. Nous aurons, sur certains points, besoin d'un regard scientifique : l'épidémie n'est pas terminée et le virus circule encore.

M. Bernard Jomier, rapporteur. - Le texte de la résolution créant notre commission d'enquête est très large dans ses attendus, avec, toutefois, huit thématiques plus spécifiques. En adoptant unanimement ce texte, nous avons choisi de centrer nos travaux sur la gestion de la crise sanitaire, qui est d'abord une crise de santé publique.

Notre assemblée doit contribuer à l'analyse de cette crise. Nous suivons le travail mené par l'Assemblée nationale avec beaucoup d'attention. Dans un premier temps, le Sénat devra écouter ce qui s'est passé dans les territoires : écouter les professionnels de l'hôpital, ceux de ville ou des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sur les difficultés rencontrées et les carences constatées. Ce n'est qu'à partir de cette réalité de terrain que nous pourrons utilement interroger les responsables au plus haut niveau de l'État.

Notre président Alain Milon nous a proposé une approche fondée sur la confrontation des points de vue, à laquelle je souscris. Nous ne sommes pas un tribunal, mais les méthodes du tribunal - qui mettent en confrontation différents points de vue pour faire émerger la vérité - ont une vertu.

La question scientifique est fondamentale, mais elle se heurte malheureusement au défaut de culture scientifique de notre pays. Cela a créé beaucoup de trouble et de déstabilisation dans l'opinion publique. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ?

La gestion d'une épidémie est politique : les pouvoirs répondent à l'épidémie différemment, selon leurs valeurs politiques. Nous avons ainsi pu constater une opposition brutale de méthodes entre régimes autoritaires - comme la Chine qui a eu une gestion inédite - et démocraties. Il sera très intéressant d'entendre les représentants de ces différents pays.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Nous partageons tous le même état d'esprit : nous ne sommes pas un tribunal et nous devons identifier ce qui a dysfonctionné afin que les choses s'améliorent. Je suis favorable à votre méthode qui consiste à partir du terrain et à susciter des confrontations, afin d'éviter de subir des plaidoyers unilatéraux.

S'agissant du périmètre de notre commission, nous sommes bien dans le champ de la crise sanitaire et non pas celui de la crise économique ni de la crise sociale. Nous allons devoir établir les faits. Dans certains secteurs, je n'ai pas bien perçu cette réalité : par exemple, quelle a été la situation réelle à l'école ? Il m'a semblé que la réalité était bien différente de ce qui nous était dit. Idem pour les décès, les Ehpad, etc.

Parmi les paramètres retenus pour lutter contre cette crise, il y a la peur, mais aussi les libertés publiques. Celles-ci ont été restreintes, avec notre accord plus ou moins enthousiaste. Était-ce utile ? Nous serons peut-être amenés à réviser notre propre positionnement. La question des libertés publiques n'est peut-être pas au coeur de la crise sanitaire, mais elle en constitue un corollaire incontournable.

M. Jean-François Rapin. - Notre objectif n'est pas de polémiquer. Nous souhaitons comprendre ce qui s'est passé et, le cas échéant, réviser les protocoles. Il y a probablement eu des failles et nous devons travailler pour l'avenir. Il me semblerait intéressant d'auditionner la commissaire européenne à la santé, afin de voir comment l'Europe a réagi.

Mme Laurence Cohen. - Je partage la philosophie générale de ce qui vient de nous être présenté par nos deux co-rapporteurs. N'oublions pas de nous pencher aussi sur la situation des premiers de cordée : ceux qui, malgré le confinement, ont dû aller travailler avec des protections plus ou moins fiables.

N'oublions pas non plus qu'aujourd'hui notre regard est différent car nous avons amélioré notre connaissance du virus. Ne soyons pas des juges intransigeants.

Le protocole applicable à la réouverture des écoles m'a paru, ainsi qu'aux pédiatres qui nous ont alertés, très anxiogène pour les enfants. Il aura probablement des conséquences psychologiques : les consultations des psychologues sont d'ores et déjà très chargées. Pourra-t-on examiner les protocoles qui sont mis en place aujourd'hui ? Les parents se sentent très seuls.

Mme Michelle Meunier. - Je suis en accord avec ce qui a été dit par nos rapporteurs. Nous ne sommes pas la seule commission d'enquête sur le sujet, aussi pouvons-nous peut-être nous permettre de faire un pas de côté et d'aborder les aspects philosophiques, éducatifs, voire éthiques de cette crise. Je relisais récemment le rapport que le Comité consultatif national d'éthique (CNCE) avait consacré il y a quelques années aux questions d'éthique et de vieillissement : il contient des choses très intéressantes.

M. David Assouline. - Je suis d'accord avec l'essentiel de ce qui a été dit. Nous sommes entrés dans l'ère de la post-vérité ; il n'y a plus de faits établis et les vérités varient selon la popularité, le bagout ou l'aura de tel ou tel.

Notre commission d'enquête est politique, au sens où elle est composée d'hommes et de femmes politiques. Elle doit traiter la question de la vérité qui est devenue la question la plus politique de notre démocratie. Plus que de lancer des polémiques ou de mettre en accusation, nous devons établir les faits de la façon la plus précise et la plus dépassionnée possible. C'est ainsi que nous pourrons aider la société. Après tant de controverses, d'inquiétudes, de peurs, nous avons besoin d'une base sur laquelle nous appuyer pour nous faire une opinion et agir pour l'avenir. Il faudra identifier tout ce qui a fait controverse et répondre à chacune de ces polémiques.

M. Alain Milon, président. - Le plus agaçant a été la génération spontanée d'épidémiologistes et de virologues...

M. Roger Karoutchi. - Tous ces experts qui sont passés à la télévision ont plutôt contribué à inquiéter la population.

Si cette commission d'enquête veut faire oeuvre utile, elle doit faire des propositions sur la réorganisation de notre système d'alerte et sur la mise en place d'un système de précaution impliquant les hôpitaux, l'État et les collectivités locales, afin de faire face à une éventuelle nouvelle pandémie.

Pourquoi n'étions-nous pas prêts, alors que nous sommes un pays développé qui aurait l'un des systèmes de santé les plus performants ? Notre système de santé était-il correctement organisé ?

Quant à notre système de prévention, organisé entre l'État et les collectivités territoriales, il a été dramatiquement déficient. Tous les matins, nous avons dû bricoler sur les masques, les tests, les centres Covid... Nous avons besoin d'un système organisé et clair : qui fait quoi ? Qui assume la responsabilité ?

Le Gouvernement vient d'annoncer que les entreprises devaient constituer un stock de dix semaines de masques. Pourquoi pas ? Mais va-t-on aussi le demander aux collectivités ? Dans quelles conditions ?

Aucune des propositions du rapport de 2015 de Fabienne Keller sur les maladies infectieuses n'a été appliquée... Il faut mettre toutes les autorités publiques en face de leurs responsabilités. On ne pourra pas refaire un confinement de deux mois et demi : il nous faut une autre organisation efficace et structurée pour faire face aux prochaines vagues pandémiques et la population doit pouvoir se dire que le système fonctionne pour la protéger.

M. Alain Milon, président. - La crise sociale et économique que nous connaissons actuellement n'est que la conséquence de la crise sanitaire et de sa gestion. Nous allons donc examiner cette crise sanitaire de manière approfondie en vue de formuler des propositions pour éviter à l'avenir de vivre de telles crises.

M. Damien Regnard. - Nous avons tous vécu cette crise de manière différente. Je suis Français établi hors de France. Fin décembre, j'avais déjà entendu parler du coronavirus ; en janvier, les écoles françaises au Vietnam fermaient ; le 6 février, Air France arrêtait ses vols en provenance et vers la Chine, mais Aéroports de Paris a continué à recevoir quotidiennement des vols d'Air China, sans aucun équipement spécifique ; le 8 février, je recevais des messages d'alerte très précis de Wuhan et de Hong Kong ; le 9 février, j'étais accueilli à Bamako par des personnes en combinaison, on prenait ma température, on me donnait du gel hydroalcoolique et on me faisait remplir une fiche ; pendant ce temps, à Roissy, à part une affichette, rien !

Le virus n'avait ni passeport ni frontière. Nous devons tirer sérieusement des leçons de cette gestion à nos frontières. Quelque 180 000 Français ont été rapatriés par les consulats qui ont, parfois sciemment, mis des personnes contaminées dans les avions. Je souhaiterais donc que nous entendions le centre de crise du ministère de l'Europe et des affaires étrangères qui a fait un travail remarquable ainsi que l'ambassadeur de France en Chine - et le consul de France à Wuhan -, qui nous ont alertés très tôt - dès la fin du mois de janvier -, mais qui n'ont pas été entendus ou écoutés.

Aujourd'hui, la crise continue, parfois de manière catastrophique, aux États-Unis, au Brésil, au Mexique, au Chili, etc. La moitié de la planète a été confinée ; il faudra faire un bilan de ce qui s'est passé afin de faire face aux futures pandémies.

M. René-Paul Savary. - Comme Catherine Deroche, je suis favorable à des auditions de terrain - médecins généralistes, hôpitaux publics et privés, etc. - car on y entend parfois un discours très différent de celui des médias, des préfets ou des agences régionales de santé (ARS). Ce qui nous importe, ce n'est pas le nombre de masques qui ont été commandés, mais le nombre de masques qui sont arrivés !

Nous devrons auditionner des acteurs des territoires les plus touchés - Île-de-France et Grand Est -, mais aussi de ceux qui n'ont pas été touchés, là où le plan Blanc a conduit à déprogrammer des interventions et où nous avons peut-être occasionné plus de dégâts par le renoncement aux soins. Les mesures de ce plan auraient peut-être mérité d'être différenciées.

Nous avons également besoin d'outils statistiques plus fiables. On a bien vu qu'au départ on ne comptabilisait que les décès à l'hôpital, puis sont venus les décès en Ehpad. Quid encore aujourd'hui du nombre de morts à domicile ? Nous devons élaborer des protocoles qui pourront fonctionner très rapidement.

Mme Annie Guillemot. - La gestion de cette crise est à corréler avec le taux d'abstention observé dimanche dernier au second tour des élections municipales. Ce qui me remonte du terrain c'est, d'une part, que les gens ne comprennent pas toutes les attaques entre médecins, et d'autre part, que personne ne semble responsable. Il y a des protocoles, mais personne ne les suit. Avec ma collègue Dominique Estrosi-Sassone, nous avons été sidérées de constater que les agents des foyers d'hébergement des personnes sans abri ne disposaient d'aucun équipement de protection ! Ils étaient vraiment en souffrance et en difficulté. L'ARS m'a soutenu qu'elle n'était pas responsable des masques, mais que cette responsabilité incombait à Santé publique France. Et les masques du Rhône étaient partis dans le Maine-et-Loire...

En tant que maire de Bron, lors de la crise du H1N1, je participais à des réunions très régulières et extrêmement structurées. Toute une organisation avait été mise en place. La menace avait été prise au sérieux. Les maires rassuraient la population et ils avaient été étroitement associés à la gestion de crise. Or, ils ne l'ont pas été cette fois-ci : l'ARS a même refusé l'ouverture d'un centre Covid à Villeurbanne, qui pourtant était prêt à fonctionner.

M. Alain Milon, président. - Lors de la crise du H1N1, nous disposions d'un vaccin, ce qui est totalement différent de la situation actuelle. La commission d'enquête dont j'avais été le rapporteur avait montré que la gestion de la crise avait été certes bien organisée, mais insuffisamment avec les médecins.

Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je remercie nos collègues pour leurs contributions. Nous allons nous replonger dans les préconisations du rapport de Fabienne Keller. Nous allons devoir analyser très finement la chronologie des premières semaines à partir de l'annonce du premier cas en Chine. La généralisation du plan Blanc a eu des conséquences non négligeables sur le renoncement aux soins : nous n'avons diagnostiqué cette année que la moitié des cancers habituellement diagnostiqués chaque année. Il y aura des conséquences lourdes en cancérologie, mais aussi en cardiologie.

M. Martin Lévrier. - Je partage très largement ce qui a été dit, mais faisons attention : c'est très français de voir ce qui ne va pas et de toujours nous comparer à ceux qui sont meilleurs que nous. N'oublions pas aussi que nous avons des forces. Il y a certes eu des erreurs, mais il faut aussi voir ce qui a fonctionné.

Nous devrons aussi nous interroger sur notre décision collective d'avoir maintenu le premier tour des élections municipales. Cela a eu une très grosse incidence, alors que l'Italie nous implorait depuis huit jours de prendre la situation au sérieux.

Mme Véronique Guillotin. - Je partage l'essentiel de ce qui a été dit et je me réjouis de l'état d'esprit dans lequel débute cette commission d'enquête. Je soutiens l'idée d'auditionner la commissaire européenne chargée de la santé, car cette crise a impacté le quotidien des habitants de la région Grand Est, dont le bassin de vie est parfois à cheval avec le Luxembourg, la Belgique ou l'Allemagne. Les différences de réglementation et le blocage des frontières ont été problématiques. En outre, avec l'étude Discovery, l'Europe n'a malheureusement pas brillé.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. - Je suis d'une région et d'un département qui ont été particulièrement touchés. En tant que médecin dans des établissements médico-sociaux pour patients polyhandicapés, j'ai constaté un retard à l'allumage, si je puis dire. J'ai voulu interdire les visites, protéger mes patients, mais il m'a été rétorqué que c'était une atteinte à la liberté individuelle. Il aurait pourtant été plus prudent de les isoler.

Nous avons fait du bricolage, reçu des ordres et des contre-ordres. Tout cela a été très compliqué. Les maires ont été en première ligne : du fait de la fermeture des cantines des écoles, qui a été problématique pour les populations très défavorisées, les maires ont assuré la distribution de repas, ouvert des centres Covid, etc.

Enfin, je tiens à dénoncer la cacophonie des médecins qui se relayaient dans les médias : nous n'avions pas besoin de cela !

Mme Angèle Préville. - Je partage tout ce qui a été dit et suis ravie de travailler dans cette belle unanimité.

Nous interrogerons-nous sur le confinement lui-même ? Je pense en effet que les modalités selon lesquelles il a été mis en place sont propres à compromettre un prochain confinement. Je pense notamment à mon département du Lot : le confinement aurait pu y être plus souple. Les maires de très petites communes ont été confrontés à la délation. Les personnes à faibles revenus n'osaient plus sortir de peur d'écoper d'une amende de 135 euros.

M. Alain Milon, président. - Nous avons bien l'intention de travailler sur le confinement, sur ses raisons et ses conséquences.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Et sa pertinence !

M. Alain Milon, président. - Le confinement a probablement permis de stopper l'épidémie.

Mme Jocelyne Guidez. - Avez-vous prévu de recevoir l'association des aidants ? Cela me semble très important, car ils ont énormément souffert et le répit n'est pas au rendez-vous.

M. Alain Milon, président. - Notre première réunion aura lieu le 9 juillet et sera consacrée à la gestion de la crise dans la région Grand Est.

La réunion est close à 11 h 10.