Etudes de santé

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants.

Discussion générale

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.  - C'est avec un grand plaisir que je viens devant vous ce soir pour soutenir cette proposition de loi.

C'est un plaisir en vertu de l'amitié qui me lie à la fois au rapporteur Jean-Claude Etienne, éminent professeur, avec qui nous avons toujours travaillé en parfaite intelligence, et au président Jacques Legendre, dont les avis judicieux sur notre système d'enseignement éclairent toujours utilement l'action du Gouvernement et celle de son ministre de l'enseignement supérieur. Je les remercie sincèrement du travail qu'ils ont effectué pour faire avancer la cause des étudiants en santé, un sujet que votre rapporteur connaît bien puisqu'en 1997, déjà, il cosignait avec Jean-François Mattei et Jean-Marie Chabot un ouvrage plaidant pour la réforme de la première année des études de santé.

Je remercie également le président Nicolas About et le rapporteur pour avis Gérard Dériot, fort de l'expérience incontestable que lui confère sa profession de pharmacien, qui ont mis leurs compétences au service du bon avancement de cette réforme.

C'est un plaisir, aussi, de venir soutenir une initiative parlementaire commune au Sénat et à l'Assemblée nationale pour combattre résolument l'échec en première année d'études de santé, et de venir débattre avec tous d'un sujet qui me tient tant à coeur.

Chaque année, 57 000 jeunes s'engouffrent en première année de médecine et de pharmacie, avec très peu de chance de décrocher un concours... De fait, pour 80 % d'entre eux en médecine et 72,4 % en pharmacie, cette première année est synonyme d'échec et de vocation brisée. Pour la majorité d'entre eux cela signifie au mieux une nouvelle année de travail, de sacrifices et d'efforts qui aboutiront au même résultat, l'échec. Ainsi, un bon étudiant peut, à l'aube de sa vie professionnelle, perdre deux ans en première année de pharmacie et deux nouvelles années en première année de médecine, soit quatre ans d'études supérieures pour aboutir à un échec, sans équivalence et sans voie de réorientation. Ce gâchis de temps, d'énergie, d'espoirs et de rêves n'est plus acceptable.

Vous nous proposez d'agir, je réponds à votre appel. Vous savez ma détermination et ma volonté de faire de la licence une chance pour nos enfants : renforcer les socles de connaissances, ouvrir tous les cursus aux langues et au monde de l'entreprise pour faciliter les réorientations, l'insertion professionnelle et combattre l'échec.

Alors que toutes les composantes de l'université ont pris le chemin de la réforme de leur première année de licence et bénéficient, à ce titre, du plan « Réussir en licence », il serait incohérent de laisser de côté les formations de santé. C'est une chance à saisir et les présidents d'universités et directeurs d'UFR de santé ne s'y sont pas trompés puisqu'ils soutiennent tous votre initiative.

Ce plan vise à relever le défi d'amener 50 % d'une classe d'âge vers son chemin de réussite. On en est loin en études de santé. N'est-il pas temps de s'y acheminer ? Cela signifie entrer dans le système Licence-Master-Doctorat et le processus de Bologne et mettre fin à la sélection par défaut du concours unique pour organiser une première année d'études commune aux quatre professions de médecins, pharmaciens, dentistes et sages-femmes.

Tous ces professionnels de santé seront amenés à travailler ensemble et en coordination durant toute leur carrière. C'est bien le moment de le souligner, la veille du vote à l'Assemblée nationale de la réforme conduite par ma collègue Roselyne Bachelot, qui met en place les agences régionales de santé chargées de coordonner tous les acteurs de santé d'un même territoire. A l'évidence, cette coopération doit commencer dès la première année d'étude. Outre la richesse incontestable de l'ouverture à l'autre, des bénéfices en termes d'informations sur les carrières et métiers de santé, la collaboration de toutes les filières est le gage d'un meilleur fonctionnement de notre système de santé et d'une meilleure prise en charge des patients.

Une année commune sanctionnée par quatre concours distincts, cela permettra à chaque étudiant de construire son parcours de réussite en fonction de ses motivations et donc de sa vocation. C'est lui qui choisira la carrière qu'il souhaite embrasser.

Cela ne signifie pas pour autant la fin du numerus clausus ni de la sélection, nécessaire, comme dans toutes les filières d'exigence et d'excellence. Mais aujourd'hui, c'est un couperet sans appel pour de trop nombreux étudiants. Dans toutes les autres filières d'excellence, les étudiants échouant aux concours se voient reconnaître les crédits équivalents à leurs années de préparation. Des garanties du même ordre doivent être offertes aux étudiants de PCEM1 et de première année de pharmacie.

La proposition de loi que vous examinez aujourd'hui crée une année commune aux quatre professions de santé concernées. Pour que cette année ne soit plus seulement orientée vers le concours mais aussi vers d'autres parcours de formation, une nouvelle maquette est élaborée par des équipes pédagogiques engagées depuis de longs mois dans cette réforme. Poser des bases solides en sciences fondamentales tout en ouvrant l'enseignement aux matières plus littéraires permettra à ceux qui se réorienteront de réussir dans d'autres cursus.

Ceux qui auront commencé leur formation dans une autre filière avant de découvrir leur vocation de professionnel de santé ne sont pas oubliés. Parce qu'on ne sait pas toujours à 18 ans ce que l'on voudra faire toute sa vie, et qu'il est extrêmement enrichissant pour un professionnel de santé d'avoir étoffé ses connaissances dans d'autres domaines, et notamment en sciences humaines et sociales. La diversification des profils est un atout de plus et un gage de meilleure prise en charge des patients, de nouvelles passerelles sont ouvertes, qui donneront leur chance aux vocations tardives mais aussi une deuxième chance à ceux qui auront échoué à 18 ans et voudraient renouer avec leur première vocation. C'est encore une façon de réduire la pression et la tension qui règnent actuellement en première année.

Réduire le taux d'échec et mieux orienter chacun de nos étudiants, tel est le double objectif que poursuit cette réforme

Associer les pharmaciens à cette année commune prend alors tout son sens. Comment concevoir que les pharmaciens, conseils auprès de la population, experts des médicaments et vigiles des médecins prescripteurs ne partagent avec eux les bases de l'enseignement initial, fondement d'une culture commune... Cela ne se fera pas en un jour, je le sais. Mais je sais aussi que les autorités représentatives des pharmaciens y tiennent vraiment. J'ai confiance dans leur engagement moderne, sincère et résolu.

Les autorités représentatives des quatre professions concernées se sont beaucoup engagées pour faire avancer cette réforme : Elles ont participé, dès octobre 2007, à la mission orchestrée par le professeur Jean-François Bach, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, que j'avais moi-même chargé de réfléchir aux améliorations possibles à apporter à l'actuel PCEM1 ; elles ont participé, avec tous les partenaires concernés, à la concertation menée sur ses dix recommandations, pour définir les grands principes de la réforme et, avec la Direction générale de l'enseignement supérieur, à l'élaboration d'une véritable feuille de route de la réforme, dès le mois de juillet 2008, diffusée depuis lors à toutes les universités ; enfin, elles ont commencé à mettre en place, dans les universités, les outils et les équipes indispensables à la mise en oeuvre concrète de la réforme.

Votre vote, sur une réforme retardée depuis vingt ans, est très attendu. Toutes les conditions matérielles sont réunies pour que l'État accompagne les universités et les étudiants, pour le plus grand succès de la réforme. Vous avez voté en novembre dernier les moyens financiers du plan « Réussir en licence », élargis, pour la première fois depuis janvier 2009, aux UFR de santé. Cela représente jusqu'à 25 % d'augmentation de leurs moyens. Ces crédits seront utilisés en partie pour renforcer le tutorat car il nous semble que c'est le meilleur outil pour encourager les bons étudiants à persévérer et mener chacun vers la réussite.

J'entends associer tous les acteurs au travail de réflexion et de rédaction que nous menons actuellement sur les textes d'application. Les étudiants seront invités, comme les autres parties, à réfléchir avec nous aux modalités de mise en oeuvre de la réforme.

C'est leur intérêt qui guide mon action et a présidé à l'initiative des parlementaires Jean-Claude Etienne et Jacques Domergue. Au nom du Gouvernement, j'émets donc un avis très favorable sur ce texte qui rejoint et poursuit l'action politique que je mène depuis mon arrivée au ministère. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur de la commission des affaires culturelles.  - lls sont jeunes, ils ont 19 ou 20 ans. Ils veulent être pharmaciens, médecins, chirurgiens-dentistes ou sages-femmes. En juin 2008, ils étaient 57 000 à se présenter ; 44 509 ont été recalés. Pour que cet échec ne soit pas vécu comme une meurtrissure, nous devons accompagner ces étudiants fragilisés vers un rattrapage, grâce à un complément de formation. C'est à ce rendez-vous d'orientation que cette proposition de loi vous invite.

Pour n'avoir rien tenté ou presque dans ce domaine, l'accès des jeunes aux études de santé s'apparente à un vrai parcours du combattant, alors même que l'Europe a mis en place, à la suite des accords de Bologne, le principe d'une formation par unités d'enseignement semestrialisées, préfigurant le LMD.

Je veux vous dire combien j'ai eu à coeur de déposer ce texte alors que Jacques Domergue faisait de même à l'Assemblée nationale, qui a déjà pu, en vertu des aléas de l'ordre du jour, l'examiner.

Cette proposition de loi poursuit plusieurs objectifs.

En instaurant une première année commune aux études médicales, ontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques -alors qu'il n'existait jusqu'à présent qu'une première année commune aux trois premières disciplines-, ce texte vise à la fois à élargir les possibilités d'orientation des étudiants à l'issue de la première année et à donner une culture commune aux différentes professions de santé : vous savez, madame la ministre, que j'y suis très attaché. Il serait d'ailleurs souhaitable, à l'avenir, de proposer des formations communes à ces diverses filières tout au long du cursus. Il était nécessaire d'adjoindre la pharmacie à la première année commune. En effet, le rôle des pharmaciens ne se confine pas à la délivrance des médicaments ou aux analyses médicales : ils font également partie des équipes soignantes et concourent à la gouvernance des thérapeutiques.

Vous avez insisté, madame la ministre, sur les nouvelles passerelles. Je me contenterai de revenir sur les passerelles « entrantes », au sujet desquelles certains membres de la commission ont souhaité obtenir des précisions. Les étudiants titulaires d'un master, du diplôme d'une école de commerce ou d'un institut d'études politiques pourront dorénavant rejoindre la filière des études de santé ; ceux qui auront validé la troisième année des études de médecine, d'odontologie, de sage-femme ou de pharmacie pourront changer de filière sans repasser le concours correspondant : c'est le « droit au remords ».

Certains ont fait part de leurs réticences, mais j'ai consulté les représentants des étudiants et des enseignants. J'ai également obtenu l'accord écrit de la conférence des présidents d'université : beaucoup sont prêts à mettre en oeuvre cette réforme le plus rapidement possible. La conférence des doyens des facultés de pharmacie m'a également apporté son soutien ; quant aux doyens des facultés de médecine et d'odontologie, ils m'ont même exprimé cet après-midi une certaine acrimonie à l'idée que je pourrais être tenté de satisfaire les exigences de la minorité qui doute ! J'ai enfin été conforté par le soutien de beaucoup d'entre vous sur tous les bancs de cette assemblée.

Je fais grand cas des interrogations qui se sont exprimées, et je sais que vous aurez à coeur d'y répondre, madame la ministre. Tout le monde doit prendre la mesure de cette réforme ambitieuse. Toutefois la commission a souhaité laisser aux universités le temps nécessaire pour mettre en place le nouveau cursus en reportant d'un an l'entrée en vigueur du texte : c'est le sens d'un de nos amendements.

Cette proposition de loi prend pour la première fois en compte la nécessité d'accompagner les étudiants en situation d'échec et d'en finir avec un immense gâchis individuel et collectif. En outre il était nécessaire de mettre en place un tronc culturel commun aux professionnels de santé, car leur étroite collaboration est indispensable pour améliorer la performance de soins. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)

M. Gérard Dériot, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.  - La commission des affaires sociales a souhaité se saisir pour avis de cette proposition de loi qui, malgré sa brièveté, revêt une très grande importance. Il s'agit en effet de réformer le début du parcours des professionnels de santé, ce qui comporte un réel enjeu étant donné la démographie actuelle de ces professions et à la veille de l'examen du projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires ».

Comme l'a rappelé M. Etienne, ce texte vise avant tout à accroître les chances des étudiants qui s'engagent dans des études de santé : s'il est indispensable de maintenir une sélection dès le début des études médicales, il est inacceptable que celle-ci provoque un taux d'échec aussi élevé, sans équivalent à ce niveau d'étude dans le reste du système éducatif français. Les étudiants en situation d'échec, malgré de bons résultats parfois, doivent pouvoir se réorienter.

La mission confiée au professeur Jean-François Bach a permis de formuler des propositions concrètes. Notre commission souscrit entièrement aux quatre objectifs visés. Il s'agit d'abord de favoriser la réorientation rapide des étudiants ayant les plus grandes difficultés, afin de limiter le nombre des redoublements à l'issue de la première année. Ensuite, le rapprochement des quatre filières permettra de donner une culture commune à des personnes qui seront amenées à collaborer au cours de leur vie professionnelle, et d'élargir les possibilités offertes aux étudiants grâce à l'instauration de quatre concours distincts.

Le troisième objectif est d'améliorer la pédagogie en accompagnant le parcours de l'étudiant. Enfin, il s'agit d'offrir de nouvelles passerelles aux étudiants qui échouent aux concours -surtout aux « reçus-collés », qui ont eu la moyenne- et à ceux qui suivraient également d'autres cursus au début de leur parcours.

Ce texte crée le cadre législatif de la réforme que le Gouvernement et l'Assemblée nationale souhaitent voir mise en oeuvre dès la prochaine rentrée universitaire. Pour bien en mesurer les conséquences, j'ai procédé à l'audition de doyens de facultés de médecine et de pharmacie, et de représentants des étudiants. Comme mes collègues de la commission, qui ont fait de même dans leurs circonscriptions, j'en retiens trois conclusions. Tout d'abord, il existe un consensus sur le principe de la réforme : ainsi les étudiants en pharmacie, à l'origine sceptiques sur cette première année commune, en acceptent désormais le principe.

Le calendrier très volontariste du Gouvernement fait l'objet d'appréciations plus contrastées. Les présidents d'université, les recteurs et les doyens mènent une intense concertation avec les acteurs concernés afin d'appliquer l'organisation et les programmes nouveaux dès le mois de septembre, mais certaines universités auront plus de difficultés que d'autres à respecter ce délai. En tout état de cause, les textes d'application doivent être pris le plus rapidement possible car de nombreux points demeurent imprécis, notamment pour l'organisation des concours à la fin de la première année.

Enfin, la rapidité de mise en oeuvre de la réforme préoccupe tous les étudiants. Ils déplorent le manque d'information disponible pour les cursus actuels en première année ainsi que pour les lycéens, dont les parents s'inquiètent -vous aussi, madame la ministre, vous connaîtrez cela quand vos enfants grandiront... (Sourires)

Afin de rassurer les acteurs concernés et de nous éclairer, je souhaite obtenir votre engagement sur quatre points essentiels. En premier lieu, la sortie des textes d'application doit être la plus rapide possible et intervenir d'ici la mi-mars pour permettre l'inscription des lycéens. Les autorités universitaires en ont besoin pour leur communication, la réforme des procédures et l'information des étudiants. Le deuxième point concerne les étudiants actuellement en première année : malgré la réforme, il est nécessaire qu'ils puissent présenter deux fois le concours d'une même filière. Dans certains cas, un triplement de la première année serait donc autorisé. Cette demande, venue des étudiants, est tout à fait légitime pour une question d'équité. Le troisième point a trait à la future réorientation des étudiants à l'issue du premier semestre. Il semble que le ministère envisage une formule assez radicale : ne conserver après les premiers mois de formation que deux fois et demie à trois fois le nombre d'étudiants correspondant au numerus clausus. Les professeurs comme les étudiants jugent ce niveau trop restrictif. La concertation doit se poursuivre et les options de réorientation être bien réelles et effectives. Le quatrième point qui nous préoccupe concerne les moyens supplémentaires nécessaires. Vous nous avez déjà annoncé, madame la ministre, que les financements sont prévus.

La commission des affaires sociales a considéré que le délai prévu était un peu précipité et propose de reporter d'un an l'entrée en vigueur de cette réforme. Je remercie le président et le rapporteur de la commission des affaires culturelles de relayer cette demande. Il serait particulièrement dommageable que la mise en oeuvre ne soit pas à la hauteur des attentes exprimées tant par les enseignants que par les étudiants : notre pays doit continuer à disposer de professionnels de santé bien informés et bien formés.

Sous réserve de vos engagements, madame la ministre, et du report de l'application de la loi, la commission des affaires sociales votera cette proposition de loi. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Serge Lagauche.  - Nous discutons d'une proposition de loi inaboutie dans le contexte le plus défavorable qui soit : inutile de donner à la communauté universitaire un nouveau sujet de mobilisation ! La « mastérisation » de la formation des futurs enseignants, contre-productive et précipitée, constitue un point dur de la mobilisation et on nous propose aujourd'hui de jeter dans le bain des mesures mal ficelées, mal préparées, non négociées et précipitées... Le calendrier de cette énième réforme est tout aussi irréaliste.

Il est impossible d'organiser dans de bonnes conditions, dès la rentrée de septembre 2009, la première année des études de santé selon le dispositif proposé. Ainsi, la mise en oeuvre du LMD n'est toujours pas effective pour les études odontologiques et pharmaceutiques. Le processus de Bologne fixe comme date butoir 2010 : cela semble plus réaliste. Le calendrier gouvernemental nous conduirait au sacrifice d'une promotion !

Les procédures d'inscription des lycéens s'achèvent dans quelques semaines et aucune information sur cette réforme n'est encore disponible. Quant aux actuels primants, leur stress ne peut qu'être accentué par l'incertitude quant à leurs possibilités de redoublement. Et par quel miracle les équipements immobiliers seraient-ils prêts à accueillir tous les étudiants en première année dès la rentrée ? Le report de l'application de cette réforme s'impose.

Cette réforme est non seulement précipitée, mais insuffisante car beaucoup de professions de santé ne feront pas partie de cette licence. Certaines ont été, sans motif sérieux, exclues d'office du rapport Bach. La question de l'intégration de filières de formation universitaire a été trop rapidement évacuée. La démocratisation de l'accès à certaines filières aurait dû être envisagée. Ainsi, la préparation à la première année de kiné ne demande pas le même investissement financier que le concours des instituts privés. L'occasion de généraliser la procédure de sélection pour tous les futurs kinésithérapeutes a donc été manquée.

De fortes craintes pèsent également sur les conditions d'études. Madame la ministre, vous avez affirmé à l'Assemblée nationale que les étudiants de pharmacie pourront avant tout « améliorer leurs chances de réussite ». Cette affirmation est-elle sérieuse ? Les étudiants de pharmacie vont échanger des travaux dirigés à une trentaine d'étudiants contre des amphis surchargés en visioconférence. Avec l'augmentation des effectifs, le risque est grand de voir remise en cause la proportion des travaux dirigés par rapport aux cours magistraux. Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) a demandé à votre ministère « d'apporter tous les moyens matériels, humains et financiers nécessaires pour garantir une qualité pédagogique au moins équivalente à celle observée aujourd'hui dans chacune des filières concernées ». Le financement de la licence santé ne doit pas se faire « en redistribuant les moyens initialement alloués aux autres filières universitaires dans le cadre du plan Réussir en licence ».

Comment la première année pourra-t-elle servir également à ceux qui ne deviendront ni médecin, ni dentiste, ni sage-femme ni pharmacien ? La réorientation à l'issue du premier semestre se fera-t-elle sur le mode du volontariat ? Quelles filières les étudiants pourront-ils intégrer au second semestre et comment ? Nous ne disposons d'aucune étude statistique sur le parcours des étudiants afin d'affiner le dispositif de réorientation, ni sur les résultats du premier semestre des étudiants primants et leur réussite au concours en tant que doublants. La boucle de rattrapage qui oblige à faire un cursus de licence complet pour pouvoir repasser le concours ne me semble pas être la solution la plus appropriée. Si votre objectif était de ne pas rallonger un cursus déjà lui-même très long, il est loin d'être atteint.

Madame la ministre, ne gâchez pas l'occasion de donner corps au consensus sur la réforme des études de santé ! Nous partageons le diagnostic ainsi que l'essentiel des objectifs du rapport Bach, mais nous ne partageons ni la méthode, ni les modalités de mise oeuvre. Cette proposition de loi conduit notre assemblée à donner un blanc-seing au Gouvernement, or il nous faut être associés à la préparation des décrets pour pouvoir nous prononcer en toute connaissance de cause. Nous demandons le report de son application. (Applaudissements à gauche)

Mme Muguette Dini.  - Ce texte propose une réforme attendue et positive. Dès 2002, Luc Ferry et Jean-François Mattei, respectivement ministres de l'enseignement supérieur et de la santé, indiquaient l'intérêt d'une année d'études commune aux professions de santé, suggérant qu'elle soit rapidement menée. En septembre 2002, a été instituée la Commission pédagogique nationale de la première année des études de santé, chargée de faire des propositions sur le sujet. Les propositions de cette commission Debouzie se rapprochent de celles du professeur Bach, reprises dans la présente proposition de loi.

Quatre principes sous-tendent la création d'une année commune aux études de médecine, d'odontologie, de maïeutique et de pharmacie. Le premier est l'instauration d'une indispensable culture commune entre professions de santé. Le professeur Berland, président de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé, a souvent dénoncé leur cloisonnement dans lequel il voit un obstacle majeur à leur coopération.

Deuxième principe : cette année commune ne doit pas être une année blanche, de bachotage, mais doit être intégrée dans le cursus global de formation. Cela implique qu'elle prépare aux concours et assure une formation, partie prenante d'un cursus académique et professionnel. Ce doit être, selon le doyen Debouzie, une année « utile, constructive et apprenante ». C'est sur ce point que nombre d'étudiants demandent des garanties.

Le troisième principe, c'est l'absence de hiérarchisation des concours. L'actuel PCEM1 induit une hiérarchisation entre les professions de médecin, de chirurgien-dentiste et de sage-femme car l'existence d'un classement unique permet à un étudiant bien classé de choisir sa profession et contraint celui moins bien classé, à un choix par défaut, notamment lors de sa deuxième tentative au concours. La mise en place de quatre concours séparés devrait sans doute y remédier.

Le dernier principe, c'est la prévention de l'échec. La moitié des titulaires d'une mention « Bien » au baccalauréat échoue au concours de médecine et d'odontologie, alors qu'un tel taux d'échec n'est jamais observé dans les classes préparatoires des grandes écoles. En moyenne, environ 30 % d'une cohorte de PCEM1 intégrera PCEM2, en un, deux ou trois ans. Mais la moitié de cette cohorte quitte le PCEM1 sans aucun diplôme, sans aucune équivalence ou dispense. La proportion d'abandons après une première tentative est élevée. Environ la moitié des étudiants qui ne sont pas admis en seconde année de médecine ou de pharmacie retournent en Deug Sciences et Technologies. Environ 30 % se dirigent vers une profession paramédicale. L'avancée majeure de ce texte, c'est donc la prévention de l'échec par une réorientation des étudiants. Vous avez, madame la ministre, déclaré à la presse : « Il n'y aura pas de couperet mais il y aura l'ouverture dans les universités, de semestres de rebond ».

Mon groupe salue cette refonte de la première année d'études de santé mais nous demandons des garanties sur son organisation pédagogique. Il faut élaborer un nouveau programme commun aux études médicales des quatre professions en conservant le niveau actuel et les spécificités de chaque filière. A ce sujet, nous proposons un amendement d'appel relayant les inquiétudes des étudiants en pharmacie. Dans son rapport, le professeur Bach propose un programme identique pour le premier semestre et portant sur les matières fondamentales, les modules spécifiques étant introduits au second semestre. Surtout, il préconise que ce programme commun soit établi par les commissions pédagogiques nationales des trois filières et le Conseil de perfectionnement des sages-femmes. Quelle est votre position, madame la ministre, sur ce sujet ?

Nous demandons aussi des garanties sur l'organisation des quatre concours et la validation des connaissances. Ces concours seront-ils organisés par université ? Chaque étudiant sera-t-il libre de choisir le nombre de concours qu'il présentera ?

Nous demandons des garanties sur la mise en place de moyens et de supports éducatifs suffisants. L'accueil de tous les étudiants dans les locaux actuels est déjà problématique. Envisagez-vous le recours aux nouvelles technologies et supports numériques pour un enseignement à distance ?

Vous misez sur une meilleure orientation des futurs bacheliers, en les informant sur la difficulté et la longueur des études de santé. Il est question d'entretien préalable, de journée nationale d'information dans les lycées et d'opérations « portes ouvertes » dans les facultés. Qu'en sera-t-il ?

Nous demandons, enfin, des garanties sur les orientations possibles des étudiants en situation d'échec. Vers quelles filières seront-ils orientés ? Vous avez annoncé, sur le sujet, la réunion des doyens des universités et des facultés, au début de cette année. Qu'en est-il ressorti ?

Cette réforme nous semble une bonne idée mais son entrée en vigueur mérite plus de temps et ses modalités d'application, plus de garanties. (Applaudissements au centre)

M. François Autain.  - L'idée de rassembler dans une première année d'études commune les professions de santé n'est pas nouvelle, elle a été proposée par le professeur Debouzie dans un rapport élaboré à la demande de Jack Lang et de Bernard Kouchner, alors respectivement ministres de l'éducation nationale et de la santé, et remis en 2003 à leurs successeurs Luc Ferry et Jean-François Mattei. Que de temps perdu ! Il s'agissait alors des quatorze professions de santé existantes : le texte d'aujourd'hui est très en retrait par rapport à cette recommandation. Il est vrai qu'est intervenu entre temps le rapport Bach, beaucoup plus restrictif. C'est pourquoi la seule véritable nouveauté de ce texte est l'intégration de la pharmacie, puisque la maïeutique, dans de nombreuses universités françaises, bénéficie déjà d'une première année d'étude commune à la médecine et à l'odontologie.

Il est difficile de s'opposer à cette réforme, même si on regrette son manque d'ambition et le temps perdu. Un second rapport était-il indispensable ? Nous aurions sans doute encore attendu un moment sans l'heureuse initiative de notre éminent collègue le professeur Etienne, tant est grande l'indifférence du Gouvernement pour tout ce qui concerne les études des professions de santé. C'est à l'un de nos anciens collègues, le professeur Giraud, que nous devons la création d'une filière universitaire de médecine générale, le Gouvernement l'ayant oublié dans le cursus... Et souvenez-vous, monsieur le rapporteur pour avis, que notre commission n'avait même pas été saisie pour avis ! (M. Gérard Dériot le confirme)

On peut comprendre que l'organisation de cette première année soit fixée par voie réglementaire. Mais on aurait aimé connaître, au moins dans ses grandes lignes, l'arrêté qui sera bientôt publié. Cela aurait permis de calmer certaines inquiétudes peut-être infondées.

Ce texte a minima ne suffira pas à réduire le taux d'échec, voisinant les 80 %, au concours de fin de première année. Les chances de remédier à ce gâchis humain auraient été plus grandes s'il avait suivi les recommandations du rapport Debouzie qui préconisait une première année d'études commune aux quatorze professions de santé. Il aurait été sage de l'ouvrir, au moins, aux masseurs-kinésithérapeutes -qui ont lancé une pétition en ce sens- et sans doute aussi aux infirmiers. On aurait eu ainsi plus de chances de développer une culture commune aux métiers de santé et un rapprochement de leurs pratiques.

A cet égard, je m'étonne que l'on n'ait pas profité de l'intégration de la maïeutique dans la première année des études de santé pour accorder enfin à cette discipline la reconnaissance universitaire qu'elle mérite. Nous avions déposé un amendement en ce sens, il a malheureusement été écarté par la commission des finances en vertu de l'article 40. Le Gouvernement pourrait prendre l'initiative.

Il serait temps, s'agissant d'une profession qui compte des éléments masculins de plus en plus nombreux, de songer à remplacer le terme « sage-femme » par une appellation qui prenne en compte cette mutation. Celle de maïeuticien, reconnue par l'Académie française, ferait parfaitement l'affaire et j'ai déposé un amendement en ce sens.

Autre inquiétude : les conditions dans lesquelles les étudiants peuvent être réorientés à l'issue du premier semestre de la première année. Rien ne permet d'affirmer qu'une réorientation précoce est préférable à un redoublement d'autant que, dans l'hypothèse d'une réussite au concours, le redoublement fait gagner un à deux ans par rapport à la réorientation précoce. Nous manquons d'études comparatives. De même, on ne peut prétendre que les étudiants ayant une moyenne de moins de 7 sur 20 à l'issue du premier semestre ou de la première année n'ont qu'une très faible chance de réussir au concours, même à l'issue d'un redoublement.

Ensuite, cette disposition est diversement interprétée. D'un côté, la circulaire du 1er août 2008 présente la mesure comme « obligatoire, tant à l'issue du premier semestre que de la première année ».De l'autre, le coauteur et rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale indique que cette réorientation précoce n'est qu' « une simple faculté ». Une disposition pouvant donner lieu à des interprétations aussi contradictoires doit être supprimée.

Permettez-moi ensuite de douter de la faisabilité de cette possibilité de réinscription en première année offerte aux étudiants exclus précocement du système. Cette mesure, considérée comme une seconde chance de réussite, est un miroir aux alouettes. Les étudiants réorientés au premier semestre étant les plus mauvais, leur chance de valider une première année de licence est minime. Il leur faudrait donc attendre deux ans et demi avant de se réinscrire en première année d'études de santé, avec une chance de réussite nettement moindre que les redoublants classiques. Je crains que cette deuxième chance ne se transforme en une impasse.

Cette réforme va augmenter le nombre d'étudiants en première année, aggravant ainsi le gigantisme ou la massification auxquels doivent faire face les doyens. Les universités doivent avoir le droit de fragmenter le numerus clausus entre plusieurs unités de formation et de recherche (UFR) afin que chacune d'entre elles organise un concours, comme c'est déjà le cas dans certaines universités. Les priver de cette possibilité serait les affaiblir face à des cours privés dynamiques et onéreux et pourrait, en pénalisant les étudiants les plus modestes, porter atteinte à l'égalité des chances.

Je regrette d'ailleurs qu'aucune enveloppe financière spécifique n'ait été affectée à la première année dans le cadre de la loi de finances. Mais il n'est peut-être pas trop tard pour rectifier le tir puisque le report d'un an de cette réforme pourrait vous permettre, madame la ministre, d'inscrire dans la loi de finance pour 2010 les crédits nécessaires.

Voilà les observations qu'appelle cette proposition de loi qu'on aurait aimée plus ambitieuse et moins discriminatoire. La position finale du groupe CRC-SPG dépendra du sort réservé à ses amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC-SPG)

Mme Béatrice Descamps.  - Ce texte très attendu représente une étape importante dans la réforme des études de santé. Malgré la difficulté du concours, les étudiants sont toujours plus nombreux à s'inscrire. La probabilité de réussite est de 27 % seulement sur deux ans. Ce chiffre révèle un gâchis humain considérable. Le principe même d'un numerus clausus ne doit pas être remis en cause car, comme vous l'avez dit, madame le ministre, il est le prix de l'excellence. Chacun sait que les études médicales sont un choix risqué. Mais ce risque dissuade malheureusement beaucoup d'élèves qui n'oseront jamais s'engager dans cette voie. L'échec est difficile à supporter pour les jeunes qui sont bien souvent de bons élèves. De plus, lorsqu'ils redoublent et qu'ils sont à nouveau recalés, ils doivent repartir de zéro, car les possibilités de réorientation sont limitées. Quel gâchis et quelle perte de temps !

Je me réjouis que les propositions du rapport de M. Jean-François Bach soient aujourd'hui mises en oeuvre. La création d'une première année commune aux études médicales, odontologiques, de sages-femmes et pharmaceutiques en élargissant les débouchés offerts aux étudiants, va permettre de réduire le taux d'échec et le nombre de redoublements en première année.

En outre, la fin de première année sera sélective puisque l'entrée en première année ne l'est pas. Mais est-il utile d'attendre un an alors que les premiers mois révèlent déjà pour certains un retard important ? La réorientation en cours d'année est une disposition de bon sens, qui permettra à l'étudiant de gagner du temps. Alors que trop de jeunes redoublent pour se retrouver finalement sans diplôme au bout de deux ans, les étudiants pourront rejoindre une autre formation pour revenir ultérieurement tenter le concours d'entrée en médecine. Bien des situations d'échec pourront ainsi être évitées.

Enfin, les mesures permettant la diversification des profils des étudiants dans les études de santé sont intéressantes. Les connaissances scientifiques sont importantes, mais est-il normal que les étudiants aient tous le même profil ? Il y a pourtant parmi eux des talents et des vocations qui ne demandent qu'à se révéler. Je trouve donc intéressante l'idée de passerelles, pour des jeunes qui auraient découvert tardivement leur vocation. Vous souhaitez, madame le ministre, introduire de nouveaux programmes en première année, comme les sciences humaines et sociales, et l'anglais, ce qui ne peut qu'être bénéfique pour de futurs professionnels de la santé.

J'en viens aux craintes suscitées par cette réforme. Les étudiants qui connaîtront la première année de mise en application de la réforme s'inquiètent mais leur situation a été prise en compte et une certaine souplesse prévaudra : l'article 2 prévoit que la procédure de réorientation des étudiants à l'issue de la première année pourra être différée jusqu'à la rentrée universitaire 2011-2012.

Nous avons également reçu des courriers d'étudiants en pharmacie qui craignent de ne pas retrouver dans cette année commune leurs actuelles bonnes conditions d'étude, notamment les enseignements dirigés à effectifs restreints. Ce serait regrettable car les étudiants en pharmacie subissant également un taux d'échec important en première année, la réforme devrait leur être profitable. Pouvez-vous nous confirmer, madame le ministre, qu'ils ne seront pas perdus dans de grands amphithéâtres et qu'ils garderont en première année des enseignements spécifiques ?

De façon plus générale, cette réforme sera difficilement applicable dans certaines universités pour des raisons matérielles tenant à la configuration des locaux. Comment résoudre ces problèmes ?

Enfin, il est important de promouvoir l'exercice de la médecine générale. Vous travaillez en ce sens, madame le ministre, et nous avons adopté en février 2008 une proposition de loi du sénateur Francis Giraud tendant à créer de nouveaux corps d'enseignants pour cette discipline. Certaines régions manquent de médecins. La répartition du numerus clausus par faculté ne tient pas assez compte des besoins des territoires. Cette répartition est surtout établie en fonction du nombre de bacheliers reçus et des capacités de formation. Modulerez-vous ce numerus clausus en fonction d'autres critères ? Que ferez-vous pour que les étudiants se dirigent vers la médecine générale et s'établissent dans les régions qui manquent de praticiens ?

Je vous remercie pour vos réponses et je tiens à saluer votre détermination à mener une politique de réduction du taux d'échec à l'université, grâce au plan « Réussite en licence ». Je souhaite également remercier le rapporteur et le président de la commission pour la qualité de leurs travaux et de leurs analyses. Bien évidemment, le groupe UMP votera cette proposition de loi qui engage une réforme urgente. (Applaudissements à droite)

M. Gilbert Barbier.  - Une réforme des études médicales de plus ! Mais peut-être sera-t-elle la bonne ? Depuis longtemps, les études de santé focalisaient les critiques, nourrissant une abondante littérature comme en attestent les rapports Bach et Debouzie. Moins d'un étudiant sur cinq réussit à passer en deuxième année de médecine et un sur quatre en pharmacie, au terme d'une compétition aussi impitoyable qu'injuste : amphis bondés, élèves ayant la moyenne mais recalés en raison du numerus clausus. Pire, la plupart de ces étudiants peinent à se recycler, en dépit de leur bon niveau scolaire.

Pour pallier ces critiques, le texte, adopté le 16 décembre par l'Assemblée nationale crée une première année commune aux filières de médecine, sage-femme, odontologie et pharmacie. Il prévoit aussi une réorientation des étudiants les plus à la peine vers d'autres filières scientifiques, dès la fin du premier semestre ou au terme de la première année. Enfin, ce texte crée des « passerelles entrantes » pour des étudiants titulaires de certains masters ou diplômes afin de diversifier les profils.

Cette réforme traduit de bonnes intentions. La mutualisation des cours donnera une culture commune aux futurs médecins, aux sages-femmes, aux dentistes et aux pharmaciens. Mais, pourquoi avoir laissé de côté le reste des professions de santé ? Sans même parler des quatorze autres métiers, les kinés et les infirmières auraient mérité d'y figurer. S'agissant des kinés, beaucoup d'entre eux ont d'abord tenté les études médicales.

Le dispositif de réorientation des étudiants en difficulté devrait contribuer à diminuer le taux d'échec : un étudiant ayant obtenu, au bout d'un semestre, une moyenne inférieure à six, n'a pratiquement aucune chance de réussir le concours en fin d'année. Le réorienter immédiatement vers un autre cursus scientifique lui éviterait de perdre une année complète et lui donnerait un complément de formation utile pour retenter la première année des études de santé.

Sur quels critères les étudiants seront-ils jugés ? Va-t-on fixer une note minimale aux partiels en deçà de laquelle on estimera que l'étudiant ne peut réussir aux concours ou conservera-t-on un nombre d'étudiants en fonction du numerus clausus ? S'agira-t-il d'un simple conseil ou d'une obligation ? L'étudiant pourra-t-il s'inscrire dans un cursus qui ne soit pas scientifique ? Le texte prévoit en outre une procédure de réorientation en fin de première année, certainement pour les étudiants les moins bien classés aux concours. Ils devront valider une deuxième année de licence dans un autre cursus universitaire scientifique pour réintégrer la première année. Ce délai de rattrapage permet certes d'optimiser les chances de réussite aux concours mais il constitue un long détour et s'apparente à une sorte de pénitence : ce qui se faisait souvent en deux ans se fera en quatre !

Peut-être eût-il mieux valu organiser une sélection immédiate dès l'entrée en première année. Cette idée, politiquement peu correcte, pose la question de l'orientation des lycéens qui devrait être active, précoce et diversifiée, ces derniers ne mesurant pas toujours la difficulté des études.

Le dispositif de réorientation proposé suscite des inquiétudes chez les étudiants, notamment chez ceux actuellement inscrits en première année et qui, surtout en province, doivent souvent déménager pour poursuivre leurs études. Il faut donc leur apporter des précisions.

Les étudiants en pharmacie craignent que le contenu de l'enseignement en première année ne soit pas adapté à leur spécialité et perde en qualité. La réforme pose aussi des problèmes de logistique. Va-t-on adapter les locaux pour accueillir l'ensemble des étudiants, ou diviser les élèves sur deux sites dotés de systèmes de visioconférence ? Quels seront les moyens consacrés à cette réforme ?

Le texte est imprécis. Certes, il s'agit d'une proposition de loi et je vous interroge sur des questions d'ordre réglementaire. Mais il est bien difficile de se prononcer sans connaître les décrets d'application. Les échéances sont proches et ils sont certainement déjà rédigés... Je suis favorable à la réforme proposée. Néanmoins, son application dès la rentrée 2009 me paraît précipitée. Certaines facultés ne pourront être prêtes ; l'inquiétude qui en résulte parmi les étudiants pourrait se transformer en agitation. Le groupe RDSE présentera un amendement tendant à prévoir un report d'un an. Nous espérons vous convaincre ou, à défaut, avoir votre soutien sur l'amendement de repli que je défendrai.

Un mot enfin du numerus clausus : 7 300 places ont été ouvertes en médecine en 2008. Mais le Conseil de l'Ordre des médecins estime qu'il en faudrait 8 000 pour maintenir une couverture médicale satisfaisante du territoire en 2020. Quelles sont vos intentions à ce sujet, madame la ministre ? (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)

M. Philippe Darniche.  - La proposition de loi vise à réduire le taux d'échec en première année des études conduisant aux professions de santé. En 2008, 20 % des étudiants ont réussi leurs examens, ce qui signifie que plus de 44 000 ont échoué. Désormais ils pourront se réorienter vers d'autres filières ; des passerelles entrantes et sortantes sont créées -une souplesse que les Anglo-saxons maîtrisent depuis longtemps. La réforme est acceptée par la majorité des associations d'étudiants, après les réticences initiales. Mais je souhaite attirer votre attention sur la date de mise en oeuvre. Le délai est trop court d'ici la rentrée 2009 pour que toutes les décisions réglementaires soient prises, tous les ajustements opérés. L'organisation du concours de fin de première année n'est pas encore arrêtée. Les lycéens n'ont aucune information sur le nouveau cursus alors que les inscriptions en faculté seront closes dans un mois. Les étudiants actuels n'ont aucune visibilité à long terme. L'organisation matérielle, on me l'a confirmé à l'université de Nantes, pose problème. Bref, le report d'un an s'impose.

Je veux aussi vous interroger sur les étudiants actuellement en première année qui ne réussiront pas leur concours : le programme d'études sera renouvelé à 30 %, ce qui crée pour eux une situation discriminatoire. Il convient de corriger cette injustice en les autorisant à tripler leur année.

Enfin, le contenu des enseignements en pharmacie me préoccupe : la qualité risque de se dégrader. Que deviendront les 192 heures de travaux dirigés en petits groupes, le stage en officine ? S'ils disparaissent, ce sera un recul. A ce point du débat, je suis plutôt favorable au texte, mais j'espère obtenir des réponses à mes questions.

Mme Christiane Demontès.  - Une réforme de la première année des études de santé était nécessaire. Mettre un terme à un gâchis humain, donner plus de chances aux étudiants, revoir le contenu des enseignements afin de créer un socle de connaissances commun à tous les professionnels de santé -et pas uniquement fondé sur la culture scientifique- tout cela est pertinent. La réforme de la première année d'études doit faire partie intégrante d'un ensemble complexe qui repositionne la médecine dans une société changeante et confrontée à des défis sanitaires renouvelés.

Mais comment étudier cette proposition alors que l'Assemblée nationale débat en ce moment même du projet de loi « Hôpital, patient, santé, territoire » qui comporte un volet formation ? Le Gouvernement aurait dû procéder à une concertation sur les conclusions du rapport Bach qui a inspiré cette proposition. Vous vous y étiez engagée mais une fois encore, la précipitation l'a emporté.

Les deux articles renvoient à une multitude d'arrêtés ministériels : nous n'avons qu'une vision partielle, ce qui est fort dommageable. En 2008, seuls 20 % des étudiants ont pu, à l'issue de la première année, poursuivre des études de santé, les autres n'ayant guère de possibilités de réorientation. Situation inacceptable au regard des besoins en professionnels de santé.

En décembre dernier, madame la ministre, vous aviez annoncé votre intention de relever progressivement le numerus clausus pour répondre aux besoins locaux de santé. Mais votre collègue en charge de la santé ne tient pas le même discours...

Vous créez un tronc commun aux quatre sections. Si l'objectif est d'assurer un socle commun de connaissances autres que purement scientifiques, pourquoi n'avoir pas prévu des enseignements de philosophie, de psychologie, de sciences humaines ? Au premier semestre, ce sont les sciences dures qui dominent. Où est le changement, hormis la réorientation précoce ? Et pourquoi autoriser les étudiants, après deux années comptant pour la licence, à se présenter à nouveau ? On sait bien que l'échec est lié à une sélection sociale de plus en plus manifeste : les officines privées offrent un tutorat... à ceux qui en ont les moyens financiers.

Les facultés de sciences auront-elles la capacité d'intégrer des étudiants en cours d'année ? Organiseront-elles des parcours spécifiques ? Les étudiants recevront-ils une aide lorsqu'ils devront déménager ? Vous ne dites rien des aspects financiers. Vous prélèverez les dotations nécessaires sur les crédits du plan « Réussite en licence » : ils n'ont pas été votés pour cela ! Il serait plus sage de faire remonter les demandes des universités et dégager les sommes dans la prochaine loi de finances.

Notre ambition n'est pas, comme vous nous en accusez, de ne rien faire. Comme les doyens et les étudiants, nous sommes favorables à la réforme. Mais la précipitation nuit à la crédibilité. La concertation était indispensable. La proposition ne résout pas les difficultés actuelles. Les élèves de terminale sont pour certains déjà pré-inscrits en faculté de médecine mais ne savent rien de ce qui se prépare. Nous serons attentifs aux explications de la ministre et au sort qui sera réservé à nos amendements. Nous déciderons alors de notre vote sur l'ensemble. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Leleux.  - Chaque année, plus de 60 000 bacheliers s'engouffrent dans les facultés de médecine et de pharmacie dans l'espérance de recevoir une formation médicale universitaire. Ils ne seront que 13 % à être reçus au concours en fin de première année et 14 % au terme d'une année de redoublement Tous les autres, soit près de 75 %, découragés ou épuisés par ce parcours du combattant, doivent repartir à zéro dans leurs études supérieures, quand ils ne sont pas totalement découragés de le faire.

Cela crée de multiples effets pervers : concurrence exacerbée entre étudiants, hiérarchisation qualitative des filières consécutive aux choix de celles-ci en fonction du classement au concours commun, primat du scientifique dans les chances de succès, prolifération de coûteuses officines de bachotage, renoncement de certains bons étudiants à choisir une profession de santé. C'est pour mettre un terme à cette situation que cette proposition de loi nous est soumise.

Comme celle-ci donne une grande latitude au ministre de l'enseignement supérieur et au ministre de la santé dans la rédaction des décrets, il me semble utile que le débat parlementaire soulève quelques questions.

La création d'une année commune avec, en fin d'année, quatre concours différents, est de nature à ouvrir plus de débouchés aux étudiants, à créer une culture commune à des professions destinée à travailler ensemble. Elle permettra également de briser la hiérarchisation qualitative entre les professions, plus choisies par défaut en fonction d'une sélection liée aux classements au concours qu'à un véritable choix professionnel.

Toutefois, les numerus clausus devront être déterminés par les ministres non seulement en fonction de la capacité des sites universitaires à former, mais aussi en fonction des besoins territoriaux en matière d'offre de soins. S'agissant de la réorientation en cours et en fin de première année, l'important est de maintenir allumée, dans l'esprit de l'étudiant, la flamme de l'espérance d'un débouché.

A l'issue du premier semestre, il est possible d'identifier les étudiants qui ne conservent qu'une infime chance de franchir l'obstacle du concours en fin d'année. L'abandon des études médicales à ce stade serait-il obligatoire ou facultatif ? L'étudiant pourrait-il, en mars, rejoindre une filière en première année de licence, par exemple en sciences, pour ne pas perdre sa première année universitaire ? Selon quelles modalités ? Les universités sont-elles prêtes à organiser cette réorientation ?

Il est prévu d'interdire le redoublement à certains étudiants. A partir de quel multiplicateur du numerus clausus pensez-vous scinder le collège des recalés et celui des reçus-collés ? S'il est probable que les recalés devront reprendre leurs études supérieures dans une autre filière, est-il possible de proposer aux reçus-collés une équivalence dans une autre discipline universitaire ? Dans quelle mesure le reçu-collé qui échoue encore au terme de la deuxième année pourra-t-il bénéficier d'une équivalence dans une autre discipline ?

Les passerelles sont aussi de nature à enrichir le profil des professionnels de santé. L'accès aux professions de santé devrait être beaucoup plus ouvert aux étudiants sensibles aux sciences humaines. Il n'est pas besoin d'avoir un cerveau calibré pour résoudre, de tête, des équations différentielles de degré n pas plus que d'être un spécialiste du calcul matriciel pour faire un bon médecin à l'écoute de son patient.

Ma dernière question concerne l'intégration à venir des formations des professions paramédicales dans le moule LMD. Ne conviendrait-il pas de poursuivre les réflexions sur l'organisation de cursus complémentaires pour l'ensemble des professions de santé afin de forger de véritables solidarités dans le corps médical ?

Cette proposition de loi est un véritable progrès, dont le principe doit être adopté aujourd'hui. Cependant, compte tenu de l'inquiétude manifestée par certains étudiants, voire des lycéens en cours d'inscription, je soutiendrai les propositions de report d'un an de cette importante réforme, afin qu'elle puisse être appliquée dans les meilleures conditions. Le rapporteur nous a convaincus du bien-fondé de cette position, même si nous avons conscience qu'elle décevra tous ceux qui s'étaient beaucoup investis pour se préparer à une application de la réforme à la rentrée 2009 et qu'elle reporte les solutions avancées pour lutter contre le taux d'échec dramatique des étudiants concernés. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Les pharmaciens ont tout à gagner à cette réforme : ce qui fait la force de leur première année servira de modèle pour les autres filières.

Oui, j'ai associé les étudiants à la réflexion, -je les ai reçus encore cette semaine. Oui, il y aura un régime transitoire. Oui, je veillerai à ce que le triplement soit facilité.

Les coefficients multiplicateurs à la fin du premier semestre seront élevés la première année, pour être ensuite affinés. Ils devraient se situer entre quatre et cinq. Ils ne doivent pas être considérés comme des sanctions.

La date d'application ? Le mieux serait le plus tôt. Les trois quarts des présidents d'université se disent prêts. Mais ils ne sont que les trois quarts, nous sommes déjà en février et l'heure est tardive. Les délais sont courts, je comprends donc votre inquiétude et me soumettrai à votre sagesse. (Applaudissements sur les bancs UMP)

La discussion générale est close.

M. le président.  - Je vous remercie vivement pour votre concision.

Renvoi en commission

M. le président.  - Motion n°4, présentée par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires culturelles la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (n° 146, 2008-2009).

M. Yannick Bodin.  - Nous venons d'entendre quelques réponses mais demeurent encore bien des incertitudes.

Une réforme de la première année des études de santé est nécessaire : il n'est pas acceptable que le taux d'échec des étudiants dépasse les 80 %. Le professeur Bach a établi un diagnostic digne d'intérêt qui aurait mérité des échanges au sein de notre commission et avec le Gouvernement, d'autant que cette proposition de loi est censée s'en inspirer.

L'objectif qui doit être visé est l'amélioration de l'encadrement de l'étudiant afin d'éviter son échec ou de favoriser sa réorientation dans les meilleures conditions possibles. Cela suppose une meilleure préparation aux concours, une meilleure information des lycéens et des étudiants sur les études et les carrières médicales, qui donne des indications sur le numerus clausus par formation ainsi que sur les besoins des zones sous-médicalisées.

Ces données sont essentielles aux étudiants qui veulent appréhender leur futur métier. Le dispositif de réorientation aurait d'ailleurs eu toute sa place dans le plan « Réussir en licence » lancé en décembre 2007 ; mais la proposition de loi n'en fait pas mention.

Instituer une première année commune a le mérite d'éviter une sélection par défaut ; pourquoi cependant la limiter à quatre filières alors que, par exemple, 70 % des kinésithérapeutes sont recrutés par l'actuelle première année de médecine ? Il n'y a aucune justification à exclure les autres filières. Un travail plus approfondi permettrait d'apaiser les craintes des étudiants qui les ont choisies. Le texte ne dit rien non plus de la possibilité de passer plusieurs concours ; sans cette mention, comment justifier jusqu'à l'intitulé même du texte ?

Pour prévenir l'échec des étudiants, il faut organiser une réorientation pour les reçus-collés et ceux qui ont échoué à leurs examens ; cette réorientation pourrait avoir lieu soit dès le mois de janvier, soit à la fin de la première année. Pour les étudiants dont les résultats sont très insuffisants, la réorientation pourrait se faire vers une première année de licence de sciences. Les reçus-collés devraient pouvoir poursuive leurs études vers d'autres filières, leur première année étant validée. Sur ces sujets, le manque de précision de la proposition de loi est criant.

Enfin, le renforcement du tutorat : clef de voûte de la réforme des études de santé, il s'inscrirait parfaitement dans le plan « Licence », dont l'objectif est d'atteindre, à l'horizon 2012, 50 % d'une classe d'âge au niveau licence. Le texte est sur ce sujet très imprécis. Par qui ce tutorat sera-t-il assuré et sous quelle forme ? Des postes budgétaires seront-ils créés ? Combien d'heures y seront consacrées ? Veut-on laisser perdurer le système des officines privées, qui permettent aux seuls étudiants issus des milieux favorisés de préparer le concours en parallèle aux études à l'université ? Une nouvelle fois est posé le problème de l'égalité des chances à l'université. Je suis très attaché à la diversité sociale, comme en témoigne le rapport que j'ai présenté en septembre 2007 au nom de la commission des affaires culturelles unanime. (M. le président de la commission le confirme)

La réforme de la première année de médecine est nécessaire. Les propositions du rapport Bach ouvraient des pistes de réflexion. Nous avons accueilli avec espoir l'annonce d'un texte qui s'en inspirerait ; on s'aperçoit malheureusement à sa lecture qu'il ne propose rien de concret : c'est une coquille vide...

Une fois de plus, c'est la précipitation. Les doyens d'universités, qui appellent la réforme de leurs voeux, estiment qu'ils n'auront pas les moyens de s'organiser pour mettre en oeuvre la réforme à la rentrée prochaine. Le Gouvernement a transmis, le 1er août 2008, aux présidents d'universités concernées une circulaire les invitant à adapter leurs licences au schéma LMD dès la rentrée universitaire 2009-2010, afin « de favoriser une meilleure réorientation des étudiants des professions de santé au sein de ces professions et vers d'autres filières ». Mais, comme pour la réforme de la formation des maîtres, aucune indication ne leur a été fournie de sorte qu'un cadre commun soit respecté par tous. Ce qui explique pour une bonne part le mouvement actuel de protestation des étudiants. Nous vous avions pourtant prévenue lors du vote de la loi...

Le processus de Bologne impose aux États membres de se mettre en conformité avec le dispositif LMD avant 2010 ; prévoir l'application du texte à la rentrée 2010 semble donc plus réaliste et plus respectueux du travail qui doit être mené par les universités. Profitons de cette année supplémentaire pour organiser les concertations nécessaires. La précipitation est toujours cause d'échecs ultérieurs -voyez la réforme qui touche les enseignants-chercheurs ou celle du lycée que M. Darcos a dû abandonner au profit de missions confiées à MM. Descoings et Hirsch... Qui souhaiterait qu'étudiants et enseignants en médecine se joignent à une mobilisation qui enfle chaque jour davantage ? La sagesse commande de se donner du temps pour écouter.

Vous me direz sans doute, madame la ministre, que vous préciserez plus tard les contenus du texte. Mais la loi doit définir précisément le dispositif. Pour ce faire, il nous faut auditionner les présidents des universités des filières médicales, les étudiants, les professionnels... et le Gouvernement. Ce travail n'a été fait ni par la commission des affaires culturelles ni par celle des affaires sociales. Il est indispensable.

Trop de questions demeurant sans réponse, nous demandons le renvoi de ce texte en commission. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles.  - Il est difficile de soutenir que ce texte n'a fait l'objet d'aucune concertation. Il fait suite en effet à trois rapports élaborés entre 2003 et 2008, dont celui du professeur Bach d'il y a un an. La circulaire du ministère de l'enseignement supérieur d'août 2008 a défini les principales orientations de la réforme. M. Etienne a procédé à toutes les auditions nécessaires et poursuivi ses travaux jusqu'à la semaine dernière ; il a d'ailleurs déposé en octobre 2008 sur le bureau du Sénat une proposition de loi identique à celle dont nous débattons : les sénateurs intéressés ont eu toute latitude pour approfondir la question. J'ajoute que le report que nous proposons laissera le temps à la concertation de se déployer.

Il est vrai cependant que la proposition de loi fixe un cadre très général et renvoie à des textes règlementaires le soin d'en définir les modalités d'application. Il est ainsi légitime que nous demandions des éclaircissements au Gouvernement et plus généralement que nous nous préoccupions davantage des textes d'application des textes que nous votons -ce qui devrait être plus facile dans la nouvelle organisation de nos travaux.

Enfin, notre débat en commission ce matin a montré que cette réforme n'est pas sans lien avec des problématiques plus générales ayant un impact sur l'organisation et le contenu des formations médicales et paramédicales. Nous pourrions opportunément organiser des auditions sur ces questions, qui pourraient être communes avec la commission des affaires sociales si elle le souhaite.

Cette demande de renvoi en commission ne me semble pas justifiée ; je demande au Sénat de la rejeter. (Applaudissements à droite)

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis. Il est exact que la loi pose des principes, je sais les deux assemblées soucieuses que la loi ne soit pas bavarde... Je m'engage à ce que les textes d'application reflètent nos débats.

La motion n°4 n'est pas adoptée.

Discussion des articles

Article premier

I. - L'article L. 631-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :

« Art. L. 631-1. - I. - La première année des études de santé est commune aux études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de sage-femme. Les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé déterminent par voie réglementaire :

« 1° L'organisation de cette première année des études de santé ;

« 2° Le nombre des étudiants admis dans chacune des filières à l'issue de la première année des études de santé ; ce nombre tient compte des besoins de la population, de la nécessité de remédier aux inégalités géographiques et des capacités de formation des établissements concernés ;

« 3° Les modalités d'admission des étudiants dans chacune des filières à l'issue de la première année ;

« 4° Les conditions dans lesquelles les étudiants peuvent être réorientés à l'issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci ainsi que les modalités de leur réinscription ultérieure éventuelle dans cette année d'études.

« II. - 1. Des candidats, justifiant notamment de certains grades, titres ou diplômes, peuvent être admis en deuxième année ou en troisième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou de sage-femme.

« 2. Peuvent également être admis en deuxième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou en première année d'école de sage-femme des étudiants engagés dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou de sage-femme et souhaitant se réorienter dans une filière différente de leur filière d'origine ; cette possibilité de réorientation est ouverte aux étudiants ayant validé au moins deux années d'études dans la filière choisie à l'issue de la première année.

« Les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé arrêtent le nombre, les conditions et les modalités d'admission des étudiants mentionnés aux 1 et 2.

« III. - Le ministre chargé de la santé est associé à toutes les décisions concernant les enseignements médicaux, odontologiques et pharmaceutiques. »

II. - À la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « troisième ».

III. - Les arrêtés pris en application du présent article font l'objet d'une publication au Journal officiel.

Mme Maryvonne Blondin.  - Tout le monde l'a dit : au regard du taux d'échec en première année, une réforme est nécessaire. Outre que les modalités d'application du texte sont peu précises, l'article premier pose cependant un certain nombre de problèmes.

L'exclusion des futurs kinésithérapeutes risque d'être préjudiciable à la formation comme aux étudiants. Qui dit première année commune dit tronc commun et apprentissage d'une culture commune de la santé -nous en reparlerons lors de l'examen du projet « Hôpital, patient, santé, territoires ».

A l'heure actuelle, 68 % des étudiants kinésithérapeutes se présentent au concours commun via la première année de médecine. Les autres étudiants viennent de préparations privées, selon un principe de sélection par l'argent : 3 500 à 4 000 euros pour une année préparatoire non validante. La non-intégration de la kinésithérapie au tronc commun aboutira à la généralisation de ce système privé.

Les étudiants en pharmacie nous ont eux aussi fait part de leurs inquiétudes face à une réforme qui, si elle présente certains atouts, ne doit pas être conduite dans la précipitation, au risque de sacrifier les enseignements spécifiques. Leur première année fait aujourd'hui une large place aux travaux dirigés : 30 % en moyenne contre 10 % en première année de médecine. Les enseignants des facultés de pharmacie sont astreints à un minimum de 92 heures équivalent TD, ce qui n'est pas le cas des enseignants des facultés de médecine. Pourtant, le décret du 18 mars 1992 impose bien un minimum de 30 % de travaux dirigés, mais il n'est pas appliqué dans un nombre croissant d'universités, faute de moyens. L'année commune amplifierait le phénomène. Les classes de 30 à 40 élèves passeraient à 150 ou 200. Comment préserver, dans ces conditions, la qualité de l'enseignement ? Un recours accru aux téléconférences est inévitable, alors que nous savons tous que rien ne remplace un enseignement à dimension humaine.

Sans moyens financiers et humains, mal définis au regard du contenu de cet article, cette réforme risque d'accroître le gâchis qu'elle entend réduire.

M. Jean Milhau.  - Nous partageons le constat qui a conduit au dépôt de cette proposition de loi. Nous souscrivons au principe du regroupement dans un tronc commun laissant ouvert, en fin d'année, le choix de la spécialisation. Nous approuvons la possibilité de réorientations, que l'on pourrait peut-être ouvrir à d'autres disciplines que les seules scientifiques. Nous adhérons au principe des passerelles. Reste que la réussite de cette réforme tiendra, pour l'essentiel, aux modalités de sa mise en oeuvre. Or, nous ne savons rien des textes d'application et les inquiétudes qui se sont manifestées font apparaître que la concertation est insuffisante. Il faut l'approfondir, avec tous les acteurs, et par conséquent reporter d'une année l'entrée en vigueur de la réforme, conformément à la proposition de nos deux commissions. La majorité de notre groupe votera, sous cette réserve, cette proposition de loi.

Mme Samia Ghali.  - Que ce texte n'ouvre pas le débat sur la démocratisation des études justifierait à soi seul le renvoi en commission. La démocratisation de l'école et de l'enseignement supérieur est une réalité statistique. Le discours présidentiel prône la nécessaire ouverture des grandes écoles. Mais la vérité est que la démocratisation du supérieur concerne essentiellement les cycles courts et que les inégalités ont changé de forme : elles se traduisent dans la nature des cursus dans lesquels s'engagent les étudiants. Or, la filière la plus sélective, madame la ministre, reste, hélas ! la filière médicale. Le passage par des officines privées y est quasi obligatoire. Vous y trouvez tout ce dont vous avez besoin, à deux pas des facultés : enseignants qualifiés -agrégés compris-, préparations intensives, moyens, documentation choisie. De quoi faire rêver tous les étudiants ! Un seul désagrément, leur coût : il peut aller, pour une année préparatoire, jusqu'à 8 590 euros ! Vous imaginez bien que l'on y trouve pas les enfants d'ouvriers ou d'employés, réduits à se presser, à des horaires improbables, sur les bancs de la fac et de courir derrière les « polycops ». Pour ceux-là, les statistiques sont cruelles. Le mal est profond. Il faut certes revoir les cursus pour mettre fin à l'échec de 80 % des étudiants. Une première année commune, des passerelles, des équivalences ? Certainement. Mais il faut plus. Il faut des moyens. Il faut réfléchir au numerus clausus et au principe même du concours. La démocratisation de la médecine a échoué, elle est même en recul. Le concours est financiarisé, le parcours est privatisé. Il est urgent, madame la ministre, d'apporter une réponse et de prendre les mesures propres à rétablir l'égalité des chances. Mais aucune réforme ne pourra se faire sans concertation, à partir de principes clairs : c'est là ce qui manque à ce texte.

M. Claude Bérit-Débat.  - Cette proposition de loi nous donne l'occasion de relever le défi que pose la première année des études de santé. Il ne s'agit pas seulement de se conformer au processus de Bologne : la réforme est devenue indispensable. Les modalités de l'orientation et du concours -véritable couperet- sont mal adaptées au format LMD.

Mais les réponses ici apportées sont insuffisantes. Je regrette que certaines propositions du rapport Bach, comme celle qui concerne le tutorat, n'aient pas été retenues.

Ce n'est pas ainsi que nous romprons avec l'élitisme des carrières médicales !

Cette proposition de loi, qui ne se préoccupe pas de la mise en oeuvre pratique de la réforme et fait l'impasse sur la question des moyens, ne permettra pas de réduire le taux d'échec en première année. Prenons l'exemple de l'information des étudiants, qui constitue une arme redoutable en faveur de la reproduction sociale puisque les mieux informés sont ceux qui réussissent le mieux. Aucun système de diffusion de l'information auprès des aspirants étudiants n'a été prévu, alors que le rapport Bach avait envisagé de rendre obligatoire un entretien préalable entre l'étudiant potentiel et le corps universitaire.

L'harmonisation des différents cursus pose problème. Le nombre d'heures de travaux dirigés est actuellement plus élevé en pharmacie qu'en médecine ; qu'en sera-t-il dans le nouveau système ? Les cours magistraux, moins pédagogiques, provoquent un véritable écrémage -qui est peut-être l'objectif recherché- s'ils ne sont pas accompagnés de travaux dirigés.

Pour prévenir l'échec en première année, de nombreuses facultés ont mis en place un tutorat exercé par des étudiants avancés ou des chargés de TD, qui ont ainsi la possibilité de nouer un lien personnel avec les étudiants et de cerner leurs difficultés. Dans une discipline où le taux d'échec est abyssal -de l'ordre de 80 %- on aurait pu s'attendre à ce que la proposition de loi reprît cette idée simple et efficace ; il n'en est rien. Le tutorat aurait d'ailleurs permis de lutter contre la sélection par l'argent, puisque les officines privées occupent actuellement ce terrain.

Tout cela illustre le peu de cas que le Gouvernement fait de l'université. La réforme de l'enseignement supérieur n'aboutira pas si on n'y affecte pas les moyens humains et financiers nécessaires.

Des travaux dirigés regroupant 50, voire 70 étudiants ne peuvent remplir leur mission, c'est-à-dire à la fois d'apporter un soutien aux étudiants en difficulté et de permettre aux plus avancés d'approfondir leurs connaissances.

Quant aux cours magistraux, les amphithéâtres sont tellement bondés que l'on a parfois recours à la vidéoconférence : d'un point de vue pédagogique, il y a mieux !

Il faudrait envisager la première année des études de santé dans le cadre plus général du système universitaire français et européen. On va mettre en place en première année des modes de fonctionnement proches de ceux qui prévalent dans des disciplines non médicales ; il aurait été souhaitable de s'inspirer de leurs réussites et de leurs échecs.

Il ne suffit pas de permettre aux étudiants de s'inscrire, il faut leur donner les moyens de réussir : c'est ce que le texte actuel ne permet pas, mais ce sera l'objet de nos amendements.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :

et de sage femme

par les mots :

de sage-femme, d'infirmier et de kinésithérapeute

M. Serge Lagauche.  - Cet amendement tend à inclure dans la première année commune les études de kinésithérapeute et d'infirmier. Leur exclusion ne répond qu'à une logique de caste : alors que l'on inclut les pharmaciens qui n'exercent pas de tâches médicales, on exclut deux professions paramédicales.

Je rappelle que les infirmiers se voient déléguer des actes médicaux depuis le décret de 2004. Leurs compétences déléguées sont sans cesse accrues : depuis l'année dernière, ils peuvent pratiquer le rappel de vaccination antigrippale.

Près de 70 % des kinésithérapeutes passent le concours à la fin de la première année de médecine. De nombreux étudiants admis au concours et bien classés choisissent la kinésithérapie par vocation. Les soins dispensés par les kinésithérapeutes sont complémentaires des actes médicaux et demandent des connaissances médicales. Ajoutons que les futurs kinésithérapeutes sont le plus souvent contraints de financer des études très chères dans des établissements privés. Les cinq années d'études coûtent entre 25 000 et 38 000 euros, ce qui les rend inaccessibles à ceux qui n'appartiennent pas à des familles aisées. Ouvrir la première année aux futurs kinésithérapeutes serait donc un signe de démocratisation.

L'intégration des infirmiers et kinésithérapeutes favoriserait enfin l'interdisciplinarité qui constitue un atout supplémentaire pour ces professions.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

I - Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, remplacer le mot :

sage-femme

par le mot :

maïeutique

 

II - En conséquence procéder à la même substitution dans l'ensemble de la proposition de loi.

M. François Autain.  - Cet amendement vise à substituer au mot « sage-femme » le mot « maïeutique » dans le texte de la proposition de loi : appelons cette spécialité par son nom ! Celui-ci vient d'un mot grec qui signifie « art d'aider les femmes à accoucher » : il n'y a pas de terme plus juste.

En outre, il faut penser aux hommes qui exercent cette profession et s'habituer à parler de « maïeuticiens » : ce nom a été reconnu par l'Académie française.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Excellente référence !

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°8 : l'intégration des seuls pharmaciens pose déjà des problèmes d'organisation. Mais sur le fond, je partage votre préoccupation. Un jour viendra où les masseurs-kinésithérapeutes trouveront leur place dans le tronc commun des études de santé ; ils le réclament d'ailleurs. En revanche, les infirmiers ne sont pas demandeurs pour l'instant, et je n'ai pas l'habitude de donner à boire à celui qui n'a pas soif !

Avis également défavorable à l'amendement n°25 : j'ai moi-même employé tout à l'heure le mot « maïeutique », mais les sages-femmes souhaitent que l'on continue à les appeler ainsi.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Qu'en pensent les sages-hommes ?

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Mêmes avis. Certes, les futurs kinésithérapeutes poursuivent pour la plupart leurs études dans des écoles privées, mais les deux tiers d'entre eux passent leur première année en PCEM1, en vertu d'accords au cas par cas entre les écoles et les universités : cela leur revient moins cher que de s'inscrire dans une classe préparatoire privée. La réforme ne changera rien à ce système.

Les kinésithérapeutes n'ont pas vocation pour l'instant à être intégrés à la première année commune, car ils ne sont pas tous formés de la même façon. Mais c'est une mesure que nous n'excluons pas pour l'avenir.

Quant aux infirmiers, il n'est pas question pour l'instant de remplacer les Instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) par des cursus universitaires. Un rapport des trois inspections générales rendu récemment à Mme la ministre de la santé permettra d'envisager l'avenir de ces formations.

Les professions paramédicales sont pleinement associées à cette réforme, puisque des passerelles « entrantes » seront ouvertes pour permettre aux étudiants ayant accompli une première année d'études dans ces disciplines d'entrer en deuxième année d'études médicales, sous réserve de réciprocité. Il sera d'ailleurs toujours possible aux étudiants de première année d'études de santé de se réorienter vers des domaines paramédicaux.

Quant à l'amendement de M. Autain, vous comprendrez qu'il a suscité beaucoup d'interrogations au sein de mon ministère. Nous avons constaté que dans le mot composé « sage-femme », « femme » ne désigne pas la praticienne mais la patiente : une sage-femme est celle qui possède la science du corps féminin. (Marques d'étonnement)

On peut donc dire un ou une sage-femme. Ce terme, très populaire, est réclamé par la profession. Avis défavorable, mais je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'instruire ! (Sourires)

M. François Autain.  - Nous voulons rendre ce texte cohérent : on parle d'études de médecine, d'odontologie, de pharmacie, mais pas de sage-femme ! Le terme « maïeutique » serait plus approprié puisque l'on parle d'une science, non d'une personne.

M. Gilbert Barbier.  - Plutôt d'un art !

M. François Autain.  - Vous n'accédez aux demandes des sages-femmes que quand cela vous arrange !

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, insérer une phrase ainsi rédigée :

Les cours sont dispensés par un enseignant.

M. Claude Bérit-Débat.  - Face au manque de moyens de l'université, au manque de places dans les amphis, à la pénurie de professeurs, le recours à la vidéoconférence se développe.

Le refus de la généralisation de la vidéoconférence peut sembler un peu archaïque, mais nous souhaitons placer les étudiants dans les meilleures conditions d'apprentissage possibles. Un cours n'est pas seulement la transmission d'un savoir, c'est aussi un moment d'échanges entre les étudiants et leur professeur -surtout quand il s'agit de travaux dirigés. Or il est difficile d'interrompre ou d'interroger un écran... La première année est difficile : la vidéoconférence risque de la rendre encore plus sélective en compliquant les conditions de suivi des cours. La rationalisation des enseignements doit se faire au profit des étudiants.

Si les amphis sont bondés, on pourrait plutôt choisir d'augmenter le nombre d'enseignants. Au lieu de cela, aucun poste n'a été créé en 2008 et 450 seront supprimés cette année. Alors que les enseignants-chercheurs s'interrogent sur leur statut, les recrutements d'enseignants sont de moins en moins importants : cela ne pourrait-il constituer un élément de la réforme de l'enseignement supérieur ? Les enseignants, les étudiants, et pourquoi pas votre ministère, pourraient sans doute s'accorder aisément sur ce sujet.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Les formes d'enseignement dépendent de la thématique abordée et de l'importance du public concerné. Certaines thématiques, qui rassemblent un nombre important d'étudiants, imposent de faire appel à de nouvelles techniques. Une place demeure pour les enseignements en petit groupe, de type socratique, de compagnonnage.

Nous ne pouvons fermer la porte à tous les établissements qui mettent en place une démarche pédagogique innovante, telle l'université de Grenoble, qui a développé des méthodes de pointe. En outre, l'autonomie des universités porte également sur l'outil pédagogique. Avis défavorable.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis. En outre, nous avons créé en 2008 2 250 supports de monitorat, soit 700 équivalents temps plein, pour assurer des encadrements supplémentaires dans le cadre du plan licence.

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation par les mots :

, identique pour l'ensemble des établissements dispensant cette formation

M. Serge Lagauche.  - Nous souhaitons éviter que n'apparaissent trop de disparités de traitement entre universités. L'organisation de ce cursus par voie réglementaire risquerait d'aboutir à un enseignement à deux vitesses, où coexisteraient les bonnes facs et celles où personne ne souhaiterait plus étudier, faute de places aux concours et de bons débouchés à l'internat.

Les enseignements et les modalités du concours devraient être déterminés au niveau national. A défaut, les meilleures filières et formations ne seraient accessibles que dans certaines universités, réservées aux étudiants ayant préparé le concours dans le cadre d'officines privées.

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié bis, présenté par Mmes Férat, N. Goulet, Morin-Desailly, Payet et Dini et MM. Maurey, Détraigne, Dubois, Biwer, Amoudry et J.L. Dupont.

Compléter le 1° du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, par les mots :

en garantissant en particulier la dispense d'enseignements dirigés à hauteur de 30 % du volume horaire global pour les études de pharmacie

Mme Muguette Dini.  - Les travaux dirigés en première année représentent une part importante de l'enseignement. Dans le cas contraire, la qualité de la formation pourrait en être affectée. Nous sommes conscients du fait que cette question relève plutôt du domaine réglementaire, mais nous souhaitions attirer l'attention de Mme la ministre sur ce sujet.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Cette disposition ne relève pas du domaine législatif. Défavorable.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°24 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° L'information des lycéens et des étudiants sur les études et les métiers de la santé ;

M. Claude Domeizel.  - Le rapporteur a déclaré vouloir que les étudiants effectuent un vrai choix. Or, si l'on veut réduire le taux d'échec au concours, il faut d'abord éviter que trop d'étudiants s'y présentent sans renseignements suffisants. Cette information doit être accessible dès le lycée, se poursuivre en licence et ne pas se résumer à la consultation d'étudiants lors d'un salon ou d'une journée portes ouvertes dans une faculté. Elle doit être généralisée, accrue et améliorée.

Nous souhaitons inscrire cet objectif dans la loi au titre des mesures prises par voie réglementaire. Cet objectif répond aux préoccupations exprimées dans le rapport Bach.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Je comprends et partage cet objectif, mais ce texte me semble redondant avec le dispositif d'orientation active généralisé à la dernière rentrée et avec l'arrêté concernant les programmes. Au cours du premier semestre des études de santé, deux jours seront consacrés à la connaissance des formations et des métiers.

Retrait ou avis défavorable.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis. En outre, cette disposition ne relève pas du domaine législatif.

L'amendement n°11 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les modalités de l'entretien de pré-orientation et de motivation avec l'étudiant avant l'inscription en première année d'études de santé et les personnes habilitées à effectuer cet entretien ;

Mme Bernadette Bourzai.  - Cet amendement vise également à prévenir l'échec aux concours menant aux professions de santé en inscrivant dans la loi l'une des propositions contenues dans le rapport Bach et dont le pouvoir réglementaire doit fixer les modalités d'application : l'étudiant pourrait s'entretenir avec le doyen de la faculté de médecine. Jean-François Bach considère que cette disposition, cumulée à une information dès le lycée, constituerait une « véritable orientation active ».

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable. Cet entretien est prévu en cas d'avis négatif d'une université sur le choix d'orientation d'un bachelier dans le cadre du dispositif de réorientation active. M. Bach nous a rejoints sur ce point.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Cela n'est pas d'ordre législatif, mais ce sera précisé : je m'y engage. De plus, j'ai déjà fortement encouragé les doyens à mettre en place ces entretiens préalables qui existent déjà dans certaines universités, comme Rouen. Retrait ou rejet.

L'amendement n°12 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les modalités d'un tutorat, assuré par des étudiants des années supérieures ou par des enseignants pour des enseignements dirigés ;

M. Jean-Luc Fichet.  - La relation entre les étudiants de première année et ceux des années supérieures est fondamentale. Des expériences de tutorat sont déjà conduites avec succès dans de nombreuses facultés. Les conclusions du rapport Bach préconisaient un encadrement des élèves de première année, s'appuyant sur un tutorat impliquant des étudiants d'années supérieures, des maîtres de conférences ou des professeurs d'université. Il convient de donner une base légale à cette proposition de nature à diminuer l'échec en première année d'études de santé. C'est aussi la seule solution démocratique face à la multiplication des officines privées qui offrent leurs services moyennant 2 000 euros par an, tandis que le tutorat peut être dispensé pour 5 à 20 euros annuels.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Le tutorat est utile, y compris pour le tuteur car il n'y a rien de tel que d'enseigner pour apprendre. Mais, la loi de 2007 sur les libertés et les responsabilités des universités prévoit déjà ce tutorat, lequel relève de la responsabilité des universités. Retrait ou rejet.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - L'amendement est satisfait par la loi de 2007.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le contenu des programmes est établi en concertation avec les commissions pédagogiques des études de santé et celles des universités de sciences ;

M. Yannick Bodin.  - Le problème de la sélection par les maths est ancien ; celle-ci, malgré ses détracteurs, a la vie dure et, actuellement, la première année des études de santé est entièrement consacrée à l'enseignement des sciences dures, ce qui fait de ces disciplines un outil de sélection aux concours. Or, les étudiants qui s'apprêtent à passer le concours, ne sont pas forcément enclins à se former aux sciences dures, mais davantage désireux de faire connaissance avec les disciplines de leurs futures professions. Est-il opportun de sélectionner de futurs médecins ou dentistes par les maths ? Ce n'est pas parce que l'on résout n'importe quelle équation sans difficulté que l'on sera doué pour procéder à des réductions de fracture ou pour accoucher des triplés, dans les meilleures conditions ! Et inversement...

Nous souhaitons donc que les programmes de première année fassent l'objet de davantage de mixité entre les disciplines purement scientifiques et l'enseignement des pathologies ou de la dispense de soins. Notre amendement incite les commissions pédagogiques des universités concernées à coopérer lors de la définition, par voie réglementaire, des programmes de première année des études de santé.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Je suis d'accord sur le fond, mais cette préoccupation n'est pas d'ordre législatif.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même objection. Et puis, vous avez été entendus par avance puisque le groupe de travail Couraud a travaillé, depuis juillet 2008, sur les programmes du L1 santé avec toutes les commissions pédagogiques concernées et les doyens des facultés des sciences.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter le 2° du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 163-1 du code de l'éducation par deux phrases ainsi rédigées :

Toutefois, les universités peuvent répartir ce nombre entre plusieurs unités de formation et de recherche pour répondre à des besoins d'organisation et d'amélioration de la pédagogie. Un arrêté détermine les critères de répartition de ce nombre de façon à garantir l'égalité des chances des candidats.

M. François Autain.  - Il s'agit de laisser aux universités la possibilité d'adapter les modalités d'accueil des étudiants aux besoins d'amélioration de la pédagogie, face à un afflux massif d'étudiants souhaitant s'inscrire en première année d'études médicales. La rédaction actuelle du texte laisse supposer que le concours de fin de première année, ainsi que le nombre d'étudiants admis dans chacune des quatre filières sera fixé par université et non plus par faculté comme c'est le cas aujourd'hui. Cette liberté laissée aux universités permet d'atténuer l'effet des officines de cours privés et, donc, d'assurer une plus grande égalité des chances.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Il s'agit de conférer cette possibilité à des universités qui occupent plusieurs sites dans des quartiers sociologiquement différents. C'est notamment le cas de Lyon, Bordeaux et Toulouse. Avis favorable puisque vous avez accepté de rectifier votre amendement pour le rendre juridiquement acceptable.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Avis favorable. D'abord, j'apprécie l'exposé des motifs puisqu'il s'agit de respecter le principe de l'autonomie des universités. Mais je suis aussi d'accord sur le fond. Actuellement, le président d'une université n'a pas la possibilité de répartir le nombre d'étudiants admis dans chacune des filières. Cette possibilité se justifierait pourtant pour les universités composées de plusieurs sites sociologiquement différents, à condition qu'un arrêté précise les critères de répartition.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Une lueur dans le brouillard !

L'amendement n°26 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans le 4° du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :

à l'issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci

par les mots :

au terme de la première année des études de santé

M. François Autain.  - Je crains de ne pas obtenir sur cet amendement le même succès que sur le précédent.

La réorientation précoce des étudiants, à l'issue du premier semestre de la première année, vers un autre cursus, n'est pas le moyen adéquat pour augmenter leurs chances de réussir les épreuves de fin de première année. Réorienter un étudiant, après trois mois, vers une filière qu'il n'a pas choisi, en estimant que cela va contribuer à son épanouissement ainsi qu'à sa réussite ultérieure, ce n'est pas crédible. Il n'existe aucune statistique sur les résultats de premier semestre d'un étudiant primant et sur sa possible réussite au concours en tant que doublant. Dès lors, envisager le redoublement comme une perte de chance ou comme « une année inutile », ne peut être statistiquement justifié ; cela relève simplement d'un jugement subjectif. La réorientation précoce des étudiants de niveau insuffisant vers les facultés de sciences, dans le but de valider une deuxième année de licence afin qu'ils puissent, s'ils le souhaitent, représenter les concours de la première année d'études de santé n'est pas un bon calcul. Les étudiants réorientés au premier semestre étant les plus mauvais, leur chance de valider une première année de licence est minime et le rattrapage raté leur prendra deux ans et demi, ce qui leur fait perdre encore plus de temps. Enfin, la limitation des possibilités de redoublement et de réorientation ne vise qu'à limiter le nombre d'étudiants inscrits en première année et à masquer l'absence de moyens financiers accordés à cette réforme, pour laquelle aucun financement spécifique n'est prévu.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le cinquième alinéa (4°) du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation, après les mots :

de la première année des études de santé

insérer les mots :

, lorsqu'ils en font la demande,

M. Serge Lagauche.  - Les étudiants mal classés ont peu de chances de réussir à un deuxième concours.

De l'avis des étudiants concernés, il faudrait réserver cette possibilité de réorientation aux derniers 15 % d'une promotion.

Pour la réorientation précoce à l'issue du premier semestre, elle aboutira à sortir du cursus de santé vers les universités des sciences des étudiants en grande difficulté dans les matières de sélection du premier semestre, à savoir les sciences. Ainsi, des étudiants en situation d'échec en sciences se trouveraient réorienter vers une faculté de sciences. Cette réorientation précoce ne devrait se faire que sur la base du volontariat. Nous ne faisons d'ailleurs que reprendre là les demandes de différentes associations.

Je m'interroge aussi sur la manière dont les universités accueillantes pourront absorber un flot d'étudiants en début de second semestre alors qu'elles auront logiquement fait le plein d'étudiants en L1 dès le premier semestre.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - L'amendement n°27 est contraire à la position adoptée la semaine dernière par la commission : avis défavorable. Même avis sur l'amendement n°15.

L'amendement n°27, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'amendement n°15, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :

« Les étudiants ayant obtenu la moyenne aux épreuves de première année et ayant échoué au concours d'entrée en deuxième année, sont admis à s'inscrire une deuxième fois en première année d'études de santé.

Mme Christiane Demontès.  - Nous tenons beaucoup à cet amendement qui permettrait à un étudiant « reçu-collé », c'est-à-dire celui ayant obtenu la moyenne aux épreuves mais étant classé au-delà du numerus clausus au concours, de redoubler, ce qui était possible jusqu'à présent, mais qui ne le sera plus si cette proposition de loi est adoptée sans modification.

Désormais, un étudiant ayant échoué au concours devra passer par la case L2 sciences, soit deux années de perdues, pour pouvoir retenter sa chance. De plus, la sélection par les sciences au concours sera un jeu d'enfant pour un étudiant doté d'un L2 sciences, mais rien n'indique que la poursuite de sa scolarité dans l'une des filières de santé soit aussi aisée.

Ce système alambiqué entraînera une perte de temps et n'est nullement un gage de lutte contre l'échec en première année.

Comme certains de nos collègues, nous souhaitons donc maintenir la possibilité de redoublement.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Vous avez raison d'évoquer ce problème, mais un texte règlementaire vous donnera satisfaction. Je souhaite donc le retrait de cet amendement.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis. Un arrêté prévoira ces aménagements et je m'engage à ce que ces bons étudiants puissent valider leur première année de licence en sciences en même temps qu'ils pourront redoubler.

Mme Christiane Demontès.  - Nous sommes obligés de vous faire confiance car tout ne figurera pas dans cette loi. Nous maintenons quand même cet amendement extrêmement important pour nous car nous ne voulons pas faire un chèque en blanc au Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - C'est la Constitution qui détermine les domaines respectifs de la loi et du règlement.

L'amendement n°16 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 631-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :

« Les étudiants ayant obtenu la moyenne aux épreuves de première année et ayant échoué au concours d'entrée en deuxième année peuvent être admis en deuxième année de licence de sciences, à leur demande, selon des modalités fixées par voie réglementaire.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Les étudiants « reçus-collés », non admis au concours mais ayant obtenu la moyenne, devront voir leur première année d'études de santé validée afin d'intégrer la L2 en sciences. Cette possibilité permettrait d'atténuer l'échec brutal en fin de première année.

Dans une passerelle qui marcherait à l'envers, certains titulaires de diplômes n'ayant rien à voir avec les études médicales pourraient intégrer la deuxième ou la troisième année de médecine. La logique serait respectée s'il pouvait en aller de même pour les « reçus-collés ».

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Cette mesure figurera dans un texte règlementaire. Je propose aux auteurs de l'amendement de le retirer après avoir obtenu confirmation de Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Même avis et même garantie.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous allons maintenir notre amendement car tout ce qui est du domaine règlementaire affaiblit cette proposition de loi.

Si tout est mis en oeuvre pour limiter le traumatisme de l'échec en fin de première année, il serait logique de voter cet amendement pour donner un signe fort aux étudiants qui veulent embrasser la carrière médicale.

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

L'amendement n°5 rectifié n'est pas défendu.

L'article premier, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 635-1 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les formations d'enseignement supérieur permettant l'exercice des professions d'auxiliaires médicaux, mentionnées au Livre III de la Quatrième partie du code de la santé publique, sont sanctionnées par les diplômes de licence, master ou doctorat. »

M. Serge Lagauche.  - Toutes les formations d'enseignement supérieur paramédicales doivent être intégrées au processus de Bologne, appliqué en France par le système LMD.

Les États membres sont tenus de mettre en place un espace européen de l'enseignement supérieur avant 2010, structuré autour de deux cycles : un premier cycle d'au moins trois ans et un second cycle court ou long, les deux ayant été retenus en France, avec la maîtrise et le doctorat.

Les professions paramédicales ont toutes vocation à entrer dans le système LMD. Les études menant aux professions d'infirmier, d'orthophoniste ou de kinésithérapeute durent trois ans et pourraient ainsi être sanctionnées par une licence.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Une concertation est engagée sous la responsabilité de Mme la ministre de la santé qui exerce la tutelle sur la plupart de ces formations. En outre, cette disposition n'est pas de nature législative. (Exclamations à gauche) Je suis désolé, mais il faut respecter la hiérarchie des normes !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis défavorable à cet amendement pour un autre motif : cette loi n'a pas vocation à traiter des autres professions médicales. Un travail est en cours sous la responsabilité de Mme Bachelot et il faut lui laisser le temps d'aboutir.

L'amendement n°18 est retiré.

Article 2

La présente loi entre en vigueur à compter de l'année universitaire 2009-2010.

La réorientation des étudiants à l'issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci est mise en place au plus tard à compter de la rentrée universitaire 2011-2012.

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par M. Etienne, au nom de la commission des affaires culturelles.

A la fin du premier alinéa de cet article, remplacer les années :

2009-2010

par les années :

2010-2011

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - A l'issue de ses consultations, votre rapporteur a proposé hier matin à la commission de reporter d'un an le délai d'application de cette loi et la majorité de la commission y a été favorable.

Nous tenons beaucoup à cette réforme essentielle pour lutter contre l'immense taux d'échec en fin de première année et nous attachons plus d'importance à l'adoption de ce principe qu'à sa date d'application. Le report d'un an permettra d'assurer le succès de cette réforme dans la sérénité. En outre, cette année supplémentaire permettra aux universités de parfaire leurs propositions et aux lycéens d'être mieux informés de cette réforme.

M. le président.  - Amendement identique n°1, présenté par M. Dériot, au nom de la commission des affaires sociales.

M. Gérard Dériot, rapporteur pour avis.  - Amendement identique pour les mêmes raisons. C'était la position initiale de la commission des affaires sociales, et la commission des affaires culturelles s'est alignée sur nous.

M. le président.  - Amendement identique n°3, présenté par M. Milhau et les membres du RDSE.

M. Jean Milhau.  - Cet amendement est défendu.

L'amendement n°7 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°19, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. Serge Lagauche.  - Même position que la commission.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. About et les membres du groupe UC.

A la fin du premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

à compter de l'année universitaire 2009-2010

par les mots :

au plus tard à compter de l'année universitaire 2010-2011

Mme Muguette Dini.  - Il est en retrait par rapport aux précédents, donc sans grand intérêt.

M. le président.  - Amendement identique n°30, présenté par M. Barbier et les membres du RDSE.

A la fin du premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

à compter de l'année universitaire 2009-2010

par les mots :

au plus tard à compter de l'année universitaire 2010-2011

M. Gilbert Barbier.  - C'était un amendement de repli...

Les amendements n°s 2 et 30 sont retirés.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis convaincue que, pour le bien-être des étudiants, il faut tout faire pour mettre en oeuvre la réforme le plus rapidement possible ; les autorités universitaires et les équipes pédagogiques partagent mon sentiment. Nous travaillons depuis plus d'un an sur le terrain avec les acteurs concernés ; les circulaires ont été diffusées ; une enquête de la conférence des présidents d'universités a révélé que trois universités sur quatre seraient prêtes pour la rentrée 2009. Néanmoins, nous sommes en février, les lycéens sont en train de s'inscrire dans l'enseignement supérieur : je reconnais que la réforme n'est pas encore adoptée et que les délais imposés sont très courts. Je comprends vos inquiétudes et m'en remets à la sagesse du Sénat.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Très bien !

M. Claude Domeizel.  - A entendre Mme la ministre, tout est déjà décidé, les circulaires sont parties... C'est la même situation que pour l'audiovisuel ! Cela dit, je voterai les amendements, contre l'avis réel du Gouvernement.

Les amendements identiques n°s6 rectifé, 1, 3, 19 et 23 sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par M. Autain et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer le second alinéa de cet article.

M. François Autain.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le second alinéa de cet article, remplacer les années :

2011-2012

par les années :

2012-2013

M. Serge Lagauche.  - Les réorientations seront lourdes à gérer, il est bon de conserver un système de transition et de réformer dans la sérénité. Je demeure dubitatif sur l'efficacité de cette réforme mais réglons les problèmes les uns après les autres afin de nous donner plus de chances de réduire l'échec. Dans la logique du report que nous venons de décider, remettons à 2012-2013 l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions relatives à la réorientation.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - L'amendement n°29 est contraire à l'objectif de réduction du taux d'échec. Je vous fais remarquer que les étudiants viennent de passer le contrôle des connaissances du premier semestre, mais ne connaissent toujours pas leurs notes... Il y a là une lacune à combler. Défavorable. Le n°20 en revanche est la suite logique du report à la rentrée 2010. L'expérimentation souhaitée pourra être menée. Favorable.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Défavorable au n°29, favorable au n°20.

L'amendement n°29 n'est pas adopté.

L'amendement n°20 est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 2, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 juin 2009, le Gouvernement dépose sur le bureau des deux assemblées, un rapport établissant les possibilités de mise en oeuvre d'aides aux étudiants, inscrits en licence d'études de santé, s'engageant à s'installer dans les zones déficitaires en professions de santé. Les conclusions de ce rapport font l'objet d'un débat au sein des commissions parlementaires chargées des affaires culturelles et sociales.

M. Serge Lagauche.  - La loi de 2005 sur le développement des territoires ruraux comprenait la création de bourses pour les internes en médecine qui s'engageraient à s'installer pendant cinq ans en zone déficitaire. A cela s'ajoutaient des exonérations fiscales. Depuis lors, on a suggéré de contraindre les étudiants à s'installer dans les zones déficitaires, on a évoqué l'idée de taxer les praticiens s'installant en zone déjà bien pourvue en professionnels de santé. Je penche pour des bourses significatives accordées par l'État aux étudiants en échange d'un engagement d'installation. Il serait bon d'avoir un débat éclairé par un rapport et débouchant si nécessaire sur un texte de loi.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Je serai intéressé par la réponse du Gouvernement. Sagesse.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Défavorable, ce n'est pas le sujet du présent texte. En outre, je ne voudrais pas empiéter sur les compétences de ma collègue ministre de la santé. Votre amendement trouverait mieux sa place dans le projet de loi sur l'hôpital.

M. Gérard Cornu.  - Je comprends la position du Gouvernement, mais cet amendement traite d'un véritable problème de société. Nous pourrions aussi envisager d'obliger les étudiants à effectuer leur internat dans des hôpitaux ruraux, afin qu'ils découvrent des territoires qu'ils ne connaissaient pas. Quoi qu'il en soit, je crois préférable d'en discuter plutôt à l'occasion du projet de loi de Mme Bachelot.

M. Serge Lagauche.  - Certes, mais vous avez, madame la ministre, aussi un rôle à jouer sur cette question : il doit être possible de faire découvrir aux étudiants l'intérêt de la médecine en zone rurale...

L'amendement n°21 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Lagauche et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 2, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 juin 2009, le Gouvernement dépose sur le bureau des deux assemblées, un rapport établissant les moyens financiers nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme de la première année commune aux études de santé. Les conclusions de ce rapport font l'objet d'un débat au sein des commissions parlementaires chargées des finances, des affaires culturelles et des affaires sociales.

M. Yannick Bodin.  - Il était sage de reporter l'entrée en vigueur de la réforme, d'autant que les financements sont insuffisants. Les crédits du plan « Réussir en licence » représentent, pour 2008-2012, 730 millions d'euros. Ils ne pourront couvrir aussi toute la réorganisation de la première année des études de santé.

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur.  - Mieux vaut demander à Mme la ministre que le budget pour 2010 fasse clairement apparaître, au sein du plan « Réussir en licence », les crédits destinés au financement de la réforme de la première année des études de santé. Nous pourrons débattre alors des moyens.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Chaque L1, en sciences humaines, en droit, en économie-gestion, en sciences, aura sa part. Toutes les filières ont à mettre en place la nouvelle organisation. Le budget 2009 comprend, pour la première fois depuis bien longtemps, une réallocation des ressources en fonction du nombre des étudiants ; les universités pluridisciplinaires de santé ont été les grandes bénéficiaires de l'opération.

Quelques chiffres : 4 millions supplémentaires pour l'université d'Angers, 5 millions pour Lille II...

M. Jacques Legendre, président de la commission  - Excellente université !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - ... et 4 millions pour Montpellier I.

C'est colossal, d'autant que tous les emplois d'enseignants-chercheurs ont été redéployés vers ces universités.

Je m'engage donc à ce que les moyens soient là pour le L1 santé, comme pour les autres L1.

M. Yannick Bodin.  - Il faut que soit affiché un engagement financier défini et ciblé : c'est la raison d'être de notre amendement. Si cet engagement était gravé dans le marbre, nous dormirions plus sereinement cette nuit. (Sourires)

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

Vote sur l'ensemble

M. le président.  - Nous allons procéder au vote sur l'ensemble ; je ne saurais trop vous inciter à la concision.

M. Serge Lagauche.  - Dans le cadre de ce qu'a dit le président Legendre, nous sommes d'accord sur ce dispositif avec le report d'un an. La ministre a parlé de sagesse ; comme nous sommes sages, nous allons nous abstenir, non faute de vous faire confiance, madame la ministre, mais parce que nous n'avons pas de certitudes sur le rythme de ce qui va venir. Nous ne perdons pas espoir de tomber pleinement d'accord avec vous.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Nous restons sur notre faim parce qu'il y a trop de renvois au décret et parce qu'il aurait été plus sain de ne pas disjoindre ce débat de celui sur la réforme hospitalière. Ce sont pourtant les études médicales qui font les praticiens de demain !

Nous nous abstiendrons.

Mme Muguette Dini.  - Mme la ministre a en partie répondu à nos questions. Je dois faire confiance à sa parole, sans avoir la certitude qu'elle pourra faire tout ce qu'elle nous a dit. Si elle ne le pouvait, cette loi ne serait pas la bonne loi qu'elle paraît ce soir.

Je voterai cette loi et je vous fais confiance.

M. François Autain.  - Le groupe CRC-SPG s'abstiendra : nous restons sur notre faim, même si nous avons obtenu le report d'un an auquel nous tenions, car beaucoup de nos questions sont restées sans réponse, peut-être à cause de l'heure. Ce texte s'en remet beaucoup au règlement ; dans un tel cas, nous aimerions que le Gouvernement nous fasse connaître la teneur des textes d'application en présentant sa réforme ! Nous n'avons pas non plus obtenu satisfaction sur la réorientation précoce, ce que je regrette.

M. Philippe Darniche.  - Nous avons fait ce soir un grand pas en avant ; les réponses du Gouvernement me rassurent ; c'est sans hésitation ni regret que je voterai ce texte.

Mme Françoise Laborde.  - Le RDSE sera unanime à voter ce texte puisque nous avons obtenu satisfaction sur le report. Nous serons très vigilants sur les décrets d'application.

M. Gérard Cornu.  - Bien sûr, l'UMP votera ce texte. Nous n'avons pas peur du règlement puisque la ministre s'est engagée.

Je félicite notre brillant rapporteur. (Applaudissements à droite et au centre)

M. le président.  - N'oubliez pas le rapporteur pour avis et le président de la commission ! (Sourires)

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 12 février 2009, à 10 h 45.

La séance est levée à 1 h 45.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 12 février 2009

Séance publique

A 10 HEURES 45, ET A 15 HEURES

1. Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n° 183, 2008-2009).

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (n° 196, 2008-2009).

A 22 HEURES

2. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 72-4 de la Constitution, sur la consultation des électeurs de Mayotte sur le changement de statut de cette collectivité.

_____________________________

DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. Bernard Saugey un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures (n° 34, 2008-2009) ;

- M. Adrien Gouteyron un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'État du Qatar amendant la convention du 4 décembre 1990 en vue d'éviter les doubles impositions et l'accord sous forme d'échange de lettres du 12 janvier 1993 (n° 38, 2008-2009) ;

- M. Adrien Gouteyron un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur les successions et sur les donations (ensemble un protocole) (n° 144, 2007-2008) ;

- M. Adrien Gouteyron un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République arabe syrienne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (n° 274, 2007-2008) ;

- M. Adrien Gouteyron un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et à prévenir l'évasion fiscale (n° 275, 2007-2008) ;

- M. Bernard Saugey, rapporteur de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures (n° 34, 2008-2009), le texte de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale ;

-  Mme Josette Durrieu un rapport d'information fait au nom des délégués élus par le Sénat sur les travaux de la Délégation française à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale au cours de la première partie de la 55ème session ordinaire -2008- de cette assemblée, adressé à M. le  Président du Sénat, en application de l'article 108 du Règlement.