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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Hommage aux ambassadeurs africains

Dépôt de rapports

Rappel au Règlement

Sociétés publiques locales (Deuxième lecture)

Discussion générale

Discussion des articles

Article premier

Article premier bis A

Articles additionnels

Commission mixte paritaire (Demande de constitution)

Rappel au Règlement

Gendarmerie (Question orale avec débat)

Conférence des Présidents

Modernisation de l'agriculture (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article premier (Suite)




SÉANCE

du mercredi 19 mai 2010

100e séance de la session ordinaire 2009-2010

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, Mme Christiane Demontès.

La séance est ouverte à 14 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Hommage aux ambassadeurs africains

M. le président.  - J'ai l'honneur de saluer les ambassadeurs représentant les pays africains, anciennes colonies françaises ayant accédé en 1960 à l'indépendance. Nous célébrons cette année le cinquantenaire de leur indépendance et nous venons de nous retrouver dans les salons de Boffrand pour un moment de convivialité.

Cette année, pour marquer les liens particuliers qui nous unissent, nous qui avons eu une histoire commune, des troupes de chacun de ces pays défileront sur les Champs-Elysées le 14 juillet. Chacun ici se souvient que Brazzaville fut un jour la capitale de la France libre.

A quelques jours de l'ouverture, à Nice, du XXVe sommet des chefs d'État d'Afrique et de France, chacun mesure l'importance de nos relations avec l'Afrique.

Je veux aussi saluer la mémoire de nos collègues qui, sous la IVe République, représentaient dans cet hémicycle les territoires situés sur le continent africain : ils étaient 58, soit près d'un sénateur sur cinq. Je salue leur apport à notre vie politique et, souvent, après les indépendances, leur apport à la mise en place des institutions de leurs jeunes États.

Mesdames et messieurs les ambassadeurs, nous avons une histoire commune. Avec ses pages glorieuses et ses pages douloureuses, celle-ci est un lien indissoluble entre nous. C'est aussi le socle sur lequel il nous appartient de consolider, jour après jour, l'amitié entre nos peuples. Nos relations seront alors d'autant plus fortes qu'aujourd'hui, elles ne sont plus imposées mais librement choisies de part et d'autre.

Je vous remercie de votre présence. (Applaudissements)

Dépôt de rapports

M. le président.  - M. le Premier ministre a communiqué au Sénat le projet de contrat d'objectifs et de moyens entre l'État et l'Institut national de l'audiovisuel pour la période 2010-2014, ainsi que le rapport sur l'état semestriel des sommes restant dues par l'État aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale au 31 décembre 2009.

Acte est donné du dépôt de ces documents. Le premier a été transmis à la commission des finances ainsi qu'à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication ; le second à la commission des affaires sociales. Ils seront disponibles au bureau de la distribution.

Rappel au Règlement

M. Jean Louis Masson.  - Le délai de réponse aux questions écrites s'allonge de manière anormale. J'interroge le ministre de l'intérieur ; un député l'interroge deux mois après et c'est d'abord à celui-ci qu'il a répondu et l'on me renvoie à cette réponse.

M. le président.  - Vous n'êtes pas le premier à soulever ce problème. J'interviendrai auprès du Gouvernement et en rendrai compte au Sénat.

Sociétés publiques locales (Deuxième lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, pour le développement des sociétés publiques locales.

Discussion générale

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Je m'associe à votre hommage rendu aux ambassadeurs africains.

Une proposition de loi similaire à celle de M. Raoul avait été déposée par M. Schosteck, député, ainsi que par notre collègue Jean-Léonce Dupont. Cette initiative a donc fait l'unanimité des parlementaires.

La loi du 13 juillet 2006 a créé les sociétés publiques locales d'aménagement (Spla). Le texte que nous examinons aujourd'hui pérennise cette institution et crée des SPL aux compétences élargies, en tenant compte du critère in house de la jurisprudence européenne.

Nous devons veiller à la fiabilité de ce nouveau cadre juridique, afin que certaines actions d'aménagement échappant aux règles européennes de concurrence, n'exposent pas les collectivités à la censure de la Cour de Luxembourg.

Il faut donc préciser que ces SPL n'exerceront leur action que pour leurs actionnaires et sur leur territoire, et que le contrôle de l'autorité publique soit analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services.

Le contrôle de légalité du préfet sera renforcé, à qui tous les documents idoines seront transmis.

La loi ne prévoyant pas de décrets d'application, elle sera applicable dès promulgation ; il faudra tout de même une circulaire de précision. Des ajustements seront peut-être nécessaires dès les premiers retours d'expérience. (Applaudissements au centre et à droite)

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

M. Jacques Mézard, rapporteur de la commission des lois.  - Cette proposition de loi crée un nouvel instrument au service de nos collectivités, dont les investissements représentent les trois quarts de l'investissement public. Elle a été adoptée par nos deux assemblées à l'unanimité, avec des amendements qui n'en modifient pas l'équilibre général.

L'exonération de la mise en concurrence résulte de la nature même de l'entreprise, l'autorité publique doit exercer sur la SPL un contrôle « analogue » à celui qu'elle exerce sur ses propres services. Nous avons donc un régime sécurisé, avec un capital entièrement détenu par les collectivités territoriales.

Ce texte est donc conforme à la jurisprudence européenne et loin de nuire au secteur privé du bâtiment il en favorisera l'action. La Fédération des entreprises publiques locales est très favorable à ce texte, ainsi que toutes les associations d'élus. Medef et associations d'entrepreneurs du bâtiment ont marqué leur inquiétude, à tort me semble-t-il. L'unanimité des deux assemblées parlementaires devrait les rassurer.

L'article premier bis A, ajouté par l'Assemblée nationale, prévoit qu'il n'y ait pas mise en concurrence, comme actuellement pour les services publics. Il transpose la jurisprudence de la Cour du Luxembourg, dans son arrêt Carbotermo du 11 mai 2006. Nous approuvons cette harmonisation utile et ce verrou supplémentaire. Nous avons adopté sans modification les rédactions revues par l'Assemblée nationale.

Les SPL représentent 80 % des entreprises publique agissant dans les autres pays européens, ce qui n'empêche nullement nos entreprises d'y agir. Leur introduction en France ne doit donc pas inquiéter les entreprises.

Les SPL n'ont accès ni aux subventions de l'État ni aux prêts de la CDC pour la construction de logements sociaux. L'Union sociale de l'habitat n'a donc pas à s'inquiéter. Si, dans l'avenir, on souhaite que les SPL puissent construire des logements sociaux, il faudra modifier le texte.

La commission l'a adopté conforme à l'unanimité, car il favorisera l'investissement des collectivités locales. (Applaudissements sur la plupart des bancs)

M. Jean Louis Masson.  - J'approuve tout à fait ce texte. Les premières interventions des collectivités locales dans la vie économiques ont été mises en place dans les trois départements d'Alsace-Moselle, il y a 130 ans, conformément au droit local. Il est très bon que les collectivités locales puissent intervenir ainsi sans passer par la mise en concurrence. Je voterai donc avec satisfaction ce texte.

M. Antoine Lefèvre.  - Contrairement aux idées reçues, les collectivités locales ont de plus en plus tendance à intervenir directement dans l'action économique et l'investissement. Elles contribuent largement au développement économique de notre pays. Cette proposition de loi permettra d'agir avec plus de rapidité et d'efficacité que la législation actuelle, trop lourde. Elle fait gagner du temps pour la réalisation des projets, dans une vision de long terme, conforme à l'intérêt général.

L'Union européenne, que l'on accuse souvent de tous les maux, accepte tout à fait un tel type de sociétés, qui favorisent l'action des collectivités au bénéfice de la cohérence de leurs territoires.

J'apprécie beaucoup le consensus que ce texte aura suscité dans les deux assemblées. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - En cette époque où les collectivités locales sont particulièrement malmenées, cette proposition de loi fait figure d'heureuse exception en s'opposant aux dogmes libéraux sur les vertus de la concurrence. Il a fallu la loi de 2006 portant engagement national pour le logement, pour que soient créées des sociétés publiques locales d'aménagement, dont cette proposition de loi élargit les possibilités d'action.

Nous avions approuvé ce texte en première lecture, nous approuvons aussi les amendements qui ont été adoptés. Nous nous félicitons du consensus que suscite ce texte - plus conforme à notre vision des choses qu'aux dogmes libéraux. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Daniel Raoul.  - Il y a plus d'un an, je déposai une proposition de loi, que je me félicite de nous voir soumise aujourd'hui pour une deuxième lecture que j'espère ultime. Sa gestation a été longue : neuf mois ! Je remercie ceux à qui l'on doit sa sortie du tunnel, où tant d'autres textes sont encore embouteillés.

Les députés ont bien bordé ce texte, et l'ont sécurisé juridiquement. La jurisprudence communautaire des « prestations intégrées » pose une condition : que l'autorité publique exerce sur l'autorité publique un contrôle « analogue » à celui qu'elle exerce sur ses propres services.

La pratique des sociétés 100 % publiques, courante en Europe, ne l'était pas encore en France. Les SPL sont des sociétés moyennes régies par le code de commerce ; leur actionnariat sera exclusivement constitué de personnes publiques, qui devront être au moins deux : le nombre de sept était sans doute excessif. Les SPLA devront pouvoir exercer par délégation de leurs titulaires les droits de préemption et d'expropriation.

Les collectivités territoriales voient ici leurs moyens d'action s'améliorer. Les SPL font l'unanimité des élus locaux, dont ils connaissent l'esprit avec les SPLA. Les entrepreneurs privés doivent être rassurés par les verrous qui auront été mis. Ils ne sont pas menacés par cet outil nouveau au service des collectivités locales.

Je vous remercie des intentions de vote que vous avez exprimées. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Ma tâche est malaisée, ou trop aisée, après ces interventions si excellentes que je n'ai rien à y ajouter de pertinent, sauf à rappeler le délai déraisonnable entre notre première lecture du 4 juin 2009 et notre seconde, aujourd'hui.

Ce texte équilibré sécurise pleinement le statut des SPL grâce à l'application de la jurisprudence in house, c'est-à-dire de « prestations élargies ». Avec deux actionnaires, on protège ces sociétés contre les dérives qui auraient été possibles avec un seul.

Cet outil juridique au service des collectivités locales n'aura d'incidence financière ni pour celles-ci, ni pour l'État.

Au total, ce texte répond pleinement aux besoins des collectivités locales. Ce dispositif rassurera les entreprises et organisations qui craignaient une nouvelle concurrence. Pour toutes ces raisons, notre groupe RDSE suivra les conclusions de notre excellent rapporteur. (Applaudissements au centre, à droite et sur les bancs socialistes)

M. Charles Gautier.  - Les collectivités locales vont être dotées d'un outil dont disposent déjà la plupart des collectivités européennes. Le projet ne peut faire que l'unanimité. En France, il y a 1 100 SEM dans tous les domaines économiques. Trente-cinq pour cent de leur capital est privé. Pour certaines d'entre elles, la perte du marché signifie la mort. Il fallait donc doter les élus locaux d'un outil leur permettant de concilier droit communautaire et principe de libre administration locale. C'est ainsi qu'ont été créés les Spla en 2006. Mais il n'en existe qu'une dizaine. Notre collègue Raoul a donc présenté cette proposition de loi qui améliore leur statut et qui facilite leur gestion.

Nos villes doivent se transformer : il fallait rendre nos collectivités plus réactives. Diverses professions nous ont alertés : elles craignent cette nouvelle concurrence. Pourtant, ce texte permet aux collectivités de se doter d'un outil de gestion moderne et adapté des services publics. Faut-il craindre que les collectivités locales retrouvent une nouvelle capacité d'action ?

Cette proposition de loi a été votée à l'unanimité du Sénat et de l'Assemblée nationale. Ce cas de figure est assez rare. (On le confirme sur les bancs socialistes) Nous espérons que notre assemblée réitérera cette unanimité afin que les collectivités puissent disposer rapidement de cet outil performant. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Marc Daunis.  - L'essentiel a été dit. D'abord, je souhaite féliciter Daniel Raoul : nous l'attendions, il l'a fait ! (Sourires)

Cette proposition de loi peut apparaître modeste, à l'image de son auteur, mais elle est composée d'articles très utiles. Certes, ce n'est pas un texte révolutionnaire, il ne passionnera pas les médias, mais quelle satisfaction pour les collectivités !

Si ce texte obtient le soutien unanime de notre assemblée, c'est parce qu'il est pragmatique ; cette qualité nous fait parfois défaut. La création des SPL répond à un besoin vital pour l'administration de nos territoires. Cet instrument nous permet à la fois d'appliquer le droit communautaire et de respecter le principe de libre administration des collectivités. Il est quelque peu agaçant d'entendre les grands groupes privés ou certains organismes professionnels - dans des secteurs où la concurrence joue toujours parfaitement- s'inquiéter de la création des SPL, qui existent d'ailleurs chez tous nos voisins européens.

Les Spla voient enfin leurs statuts consolidés. J'ai moi-même contribué à la mise en place de cette expérimentation en 2006. Les craintes avaient été nombreuses, mais l'expérimentation s'est déroulée à la satisfaction générale, y compris des operateurs.

Je suis étonné qu'on veuille aujourd'hui restreindre le champ d'application des SPL ou de rendre leur fonctionnement plus lourd. Et pis, il sera toujours possible d'adapter ce dispositif. Pour une fois que l'on fait quelque chose de simple, de grâce, ne compliquons pas les choses.

Je voterai cette heureuse initiative avec enthousiaste ! (Applaudissements sur tous les bancs)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. P.  Dominati.

Alinéa 5

Supprimer les mots :

ou toutes autres activités d'intérêt général

Je m'associe à l'hommage rendu à M. Raoul. Il a su profiter du retour de l'État dans l'économie pour soumettre cette proposition de loi qui permet de déroger au principe de passation des marchés publics.

Il s'agissait, à l'origine, d'une bonne idée. Mais elle remet en cause de grands principes. Aujourd'hui, le Gouvernement reproche aux collectivités de nombreux dérapages. (Exclamations sur les bancs socialistes) C'est le retour de l'entreprise publique.

M. Jean-Jacques Mirassou. - Les sociétés ! 

M. Philippe Dominati.  - J'en suis préoccupé, pour les entrepreneurs, notamment les petits. Que va-t-il se passer lors du renouvellement des contrats ? Les collectivités vont s'abstenir de suivre les règles des marchés publics.

Il faut donc restreindre le champ d'application de la loi et instaurer des garde-fous lors de la contractualisation.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. P. Dominati.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Afin d'assurer le respect de ces exigences, la mise en oeuvre ainsi que les modalités de réalisation des activités confiées à ces sociétés font systématiquement l'objet d'un contrat entre celles-ci et les collectivités actionnaires.

M. Philippe Dominati.  - Je l'ai défendu.

M. Jacques Mézard, rapporteur.  - Avis défavorable sur ces deux amendements. Il ne faut pas restreindre l'action des SPL. Pour quelles raisons les petites entreprises seraient-elles inquiètes ? (« Bien au contraire » sur les bancs socialistes) Que cela puisse inquiéter de très grandes entreprises sur certains secteurs, on peut le concevoir. Mais bien évidemment les SPL feront appel aux entreprises.

Le second amendement traite de la contractualisation. Mais les SPL respecteront les règles en vigueur !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Je souhaite le retrait.

Plutôt que de tenter de restreindre le champ d'application des SPL, il est préférable de sécuriser leur mode de contrôle.

En outre, le contrôle de légalité continuera à s'exercer.

M. Philippe Dominati.  - Je ne suis pas très satisfait par la réponse de M. le ministre. Néanmoins, je retire mes amendements.

Les amendements n°s 5 et 6 sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par MM. Houel et Bécot.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Un contrat ne peut être conclu entre une collectivité territoriale et une société publique locale pour l'une des opérations visées au deuxième alinéa de l'article L. 1531-1 du présent code, que si l'initiative privée s'est avérée défaillante. Cette situation ne peut résulter que de l'absence de réponse des entreprises privées aux consultations lancées pour cet objet.

M. Michel Houel.  - Je retire mes deux amendements puisque M. le rapporteur souhaite que le texte soit adopté conforme ; j'aurais des scrupules à rompre cette belle unanimité ! Je souhaite néanmoins faire entendre une autre petite musique

En tant qu'élu local, je n'ai pas été habitué à ce qu'on passe des marchés sans appel à concurrence. Nous ne pouvions pas mettre en concurrence au-delà de 4 000 euros. Nous sommes ensuite passés à 20 000 euros. Merveilleux ! Nous repassons à 4 000 euros. C'est dommage. Et pendant ce temps-là, les SPL pourront passer des marchés de plusieurs millions sans publicité ni appel à concurrence! Je crains que ce texte ne provoque bien des contentieux...

Je retire mes amendements mais je ne suis pas convaincu et je ne voterai pas ce texte : je m'abstiendrai.

L'amendement n°1 est retiré, ainsi que l'amendement n°2.

L'article premier est adopté.

Article premier bis A

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. P. Dominati.

Supprimer cet article.

M. Philippe Dominati.  - En réalité, nous profitons du droit communautaire pour créer des dérogations. La collectivité va donner un caractère dérogatoire permanent à la SPL qu'elle va créer. Cet article m'inquiète.

M. Jacques Mézard, rapporteur.  - Cet amendement va à l'encontre du but recherché par son auteur. L'Assemblée nationale voulait sécuriser un peu plus la disposition en prévoyant une délibération sur toute délégation de service public.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Même avis. Le dispositif est vraiment sécurisé.

M. Philippe Dominati.  - Je ne suis pas convaincu. L'aspect dérogatoire fragilise le dispositif. Je retire néanmoins mon amendement.

L'amendement n°7 est retiré.

L'article premier bis A est adopté.

L'article premier bis est adopté.

L'article 2 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Repentin.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lorsqu'elles interviennent pour réaliser des opérations de logement social, les sociétés publiques locales et les sociétés publiques locales d'aménagement sont soumises aux dispositions du titre VIII du livre IV du code de la construction et de l'habitation ainsi modifié :

1° L'intitulé du titre VIII du livre IV est complété par les mots : « et aux sociétés publiques locales » ;

2° Le chapitre premier du titre VIII du livre IV est ainsi modifié :

a) Son intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions relatives aux sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux » ;

b) Avant l'article L. 481-1, il est inséré une division ainsi intitulée :

« Section 1

« Dispositions générales » ;

c) Après l'article L. 481-7, il est inséré une division ainsi intitulée :

« Section 2

« Dispositions relatives à la mobilité des locataires » ;

d) Les articles L. 482-1 à L. 482-4 deviennent respectivement les articles L. 481-8 à L. 481-11 ;

3° Le chapitre II du titre VIII du livre IV est ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Dispositions relatives aux sociétés publiques locales

« Art. L. 482-1. - Les sociétés publiques locales sont agréées par le ministre chargé du logement en vue d'exercer une activité de construction ou de gestion de logements sociaux, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

« En cas d'irrégularités graves ou de fautes graves de gestion commises par une société agréée en application de l'alinéa précédent, ou en cas de carence de son conseil d'administration ou de son conseil de surveillance, le ministre chargé du logement peut retirer cet agrément. Le retrait est prononcé après avoir mis les dirigeants de la société en mesure de présenter leurs observations dans le délai d'un mois. Les décisions prises sont communiquées au conseil d'administration ou au conseil de surveillance et au directoire de l'organisme, dès sa plus proche réunion.

« Dans les six mois qui suivent le retrait de son agrément, la société doit céder son patrimoine conventionné à un organisme d'habitations à loyer modéré, ou à une société d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux, ou à une autre société publique locale agréée ou à un organisme agréé au titre de l'article L. 365-2.

 « Art. L. 482-2. - Les dispositions du présent code applicables aux sociétés d'économie mixte le sont pour les sociétés publiques locales agréées. »

M. Thierry Repentin.  - Vos services ont-ils analysé les conséquences de la mise en place des Spl sur les logements sociaux ? Il ne faudrait pas que ces sociétés permettent aux maires d'attribuer des logements sociaux à qui il souhaitent.

Lorsqu'un SPL disparaîtra, il faudra aussi que le patrimoine reste dans le champ du logement social. Enfin, l'Union européenne n'a pas une vision positive du logement social. Elle n'admet les aides que dans la mesure où elles sont très encadrées. Ce texte est-il eurocompatible ? Qu'en sera-t-il demain ?

M. le président.  - Amendement identique n°4 rectifié, présenté par MM. Braye et Jarlier.

M. Dominique Braye.  - Les SPL et Spla vont-elles intervenir comme opérateurs en matière de logement social ? Si tel est le cas, il faut qu'elles soient soumises aux mêmes règles que les organismes HLM.

Dès la création des SPL et le renforcement des Spla, il faudra prévoir la délivrance d'un agrément. Le comité de modernisation des politiques publiques a demandé la modernisation du secteur du logement social, mais il est difficile d'obliger le monde HLM à se structurer alors qu'on crée dans le même temps un nouvel organisme.

Les bailleurs sociaux étudient immédiatement les financements PLS et PLU aux SPL. Si demain les SPL faisaient de recours pour obtenir des Plai, elles en obtiendraient immédiatement le droit. La directive services s'appliquera ! L'État serait ainsi condamné à ouvrir de tels financements aux SPL. Pour vous protéger, je vous propose donc cet amendement.

M. Jacques Mézard, rapporteur.  - Défavorable. En l'état, les SPL ne pourront pas réaliser des logements sociaux, comme je l'ai dit lors de la discussion générale. Certes, demain, il pourra y avoir une modification législative, mais nous n'y sommes pas encore.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Ces amendements visent à instituer une procédure d'agrément préalable du ministre chargé du logement pour les SPL. Les SEML, dont le capital est mixte, ne sont pas soumises à cette contrainte. Il serait curieux d'y soumettre les SPL alors que leur capital sera à 100% public.

Je vous confirme, Monsieur Repentin, qu'il n'y a pas de problème de compatibilité avec le droit communautaire.

Retrait ?

M. Thierry Repentin.  - Les SEML n'ont effectivement pas besoin d'agrément mais elles sont soumises au code de la construction et de l'habitat qui impose des règles très précises. Je ne suis pas convaincu par votre analyse d'autant que le ministre du logement hier me disait qu'il était perplexe face à cette loi. Je retire néanmoins mon amendement.

L'amendement n°3 est retiré.

M. Dominique Braye.  - Vous avez répondu comme si je n'avais pas présenté d'argumentation. La directive services s'appliquera ! Vous ne m'avez pas entendu. Je ne vais cependant pas maintenir mon amendement, même si mon analyse juridique est la bonne. Nous nous retrouverons.

L'amendement n°4 rectifié est retiré.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Le paradoxe serait d'en venir à inciter les SEML à concurrencer les organismes HLM. Les SPL seront soumis aux mêmes règles si jamais ils voulaient faire des logements sociaux. Les SPL n'ont certainement pas cette vocation. Faut-il les soumettre à cette tentation ?

M. François Rebsamen.  - Les SPL ont noué des partenariats publics avec des collectivités. Pourquoi seraient-elles tentées de concurrencer leurs propres organismes HLM ? J'ai créé une Spla il y a trois ans, tout se passe très bien et les entreprises locales se félicitent de la création de ce nouvel organisme : sa rapidité d'action les comble.

Les Spl vont fleurir, et l'économie en profitera : il faut en rendre grâce à notre collègue Raoul. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Dominique Braye.  - Pour avoir des idées, les gens n'ont pas besoin de nous ! Sans doute la Seine-et-Marne est-elle un département parfait, nous ne vivons pas dans le même monde !

Si tout le monde est persuadé que les bailleurs sociaux font le meilleur travail pour le meilleur prix, il n'y a pas de problème. (Sourires) Mais il existe des élus qui ne pensent pas comme nous : ils peuvent être tentés de mettre de l'ordre...

Nous sommes dans un monde où la réalité prime ! L'argent public doit être économisé, nous dit-on du matin au soir. Avec les SPL, certains se préparent déjà à faire du logement social.

La proposition de loi est définitivement adoptée.

La séance est suspendue à 16 heures 20 pour reprendre à 16 heures 25.

Commission mixte paritaire (Demande de constitution)

M. le président.  - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du Règlement.

Rappel au Règlement

M. Jean-Louis Carrère.  - La question aurait justifié la présence du ministre de l'intérieur et de son collègue de la défense. Ce dernier se défausse chaque fois qu'il est question de la gendarmerie, ce pilier de la République.

Ce n'est pas le sénateur Carrère qui est en cause mais la gendarmerie. française !

M. Jean-Pierre Bel.  - En Conférence des Présidents, on nous avait assurés que les ministres concernés seraient présents.

Ce n'est pas à M. Marleix que j'en ai : notre amitié pour lui est grande.

Gendarmerie (Question orale avec débat)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la question orale avec débat portant sur la situation de la gendarmerie nationale.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - L'heure est grave. Le Gouvernement continue dans la confusion, à preuve le parcours de la Loppsi 2, bel exemple de cafouillage, texte ajourné puis confirmé qui serait encore ajourné au 15 août - non, aux premiers jours de septembre ! On en rirait si le sujet n'était pas si grave. La Loppsi 2 porte sur la période 2009-2013 ; nous sommes en 2010... Quelle considération pour le Parlement et les élus locaux ! Le projet de loi est encalminé ; est-il mort ? Ne faut-il pas prévoir un texte pour 2011-2014 ? La loi sur la gendarmerie avait connu des péripéties similaires - et avait même été mise en oeuvre avant d'être votée !

Ce nouvel ajournement n'augure rien de bon. Comment interpréter les récents changements à la tête de la gendarmerie, le limogeage du directeur général et son remplacement par un membre du cabinet du ministre de l'intérieur ? Les réactions caporalistes qui s'abattent sur les gendarmes « coupables » de critiques pourtant modérées et raisonnées sont l'indice d'une certaine nervosité.

M. Jean-Claude Carle.  - Jospin...

M. Didier Boulaud.  - Il n'a pas sanctionné les gendarmes, vous les avez soutenus dans la rue, alors !

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Du pays profond montent des mots durs. La gendarmerie souffre ; et le ministre de la défense toujours se défile comme une anguille lorsqu'on demande à l'entendre.

Les élus ne comprennent pas pourquoi vous abandonnez certains territoires, qui ont aussi besoin de sécurité. Si la recherche exacerbée d'économies devient l'alpha et l'oméga des politiques publiques, alors je ne me reconnais plus dans cette République qui tourne le dos à ses valeurs !

Il n'y a pas de plan global de suppression de brigades ; à moins qu'il ne soit local... Quid des projets d'ajustement des zones de compétence ? Quelles relations entre ceux-ci et la création de communautés de brigades confiées à la police nationale ? Cela implique-t-il l'éviction de la gendarmerie des zones périurbaines ? Ce que vous appelez des ajustements, souvent lourds de conséquence pour la vie locale, ne sont décidés ni menés en concertation avec les élus. Pas plus de concertation avec les gendarmes, qui s'expriment comme ils peuvent dans des revues comme celle des retraités de la gendarmerie, véritable thermomètre de la fièvre qui a pris cette arme.

Au lieu d'aplanir les relations entre police et gendarmerie, vous les exacerbez, vous jetez de l'huile sur le feu. Un jeu pervers de comparaison s'installe. Et c'est tout le système de sécurité intérieure qui est désorganisé. La situation devient préoccupante en milieu rural et dans les zones périurbaines. Avez-vous pour projet de cantonner la gendarmerie en milieu rural ?

Ce n'est pas le projet de Loppsi 2 et ses financements fondés sur l'assurance que demain on rasera gratis, qui ramènera la confiance !

J'ai mal à la gendarmerie. On fermera 175 brigades d'ici 2012, les effectifs baisseront 3 509 équivalents temps plein entre 2009 et 2011 ; on va fermer quatre écoles sur huit. Dans les Landes, la gendarmerie ne pouvait plus faire de patrouille en véhicule, fin 2009, faute de crédits.

Le statut militaire de la gendarmerie risque fort de périr sous les coups de votre rigueur budgétaire, entre RGPP et rigueur annoncée. Puisque vous aimez tant chiffres et découpage (sourires) donnez-nous en sur les fermetures à venir de brigades et les diminutions d'effectifs ! Les élus sont inquiets. Ce n'est pas la seule pensée de la gauche que j'exprime ainsi. Le 27 avril 2010, un député UMP de la Moselle dit son inquiétude et ajoute que « la rumeur commence à gronder ». Un député Nouveau Centre du Rhône interroge le ministre sur la « dévalorisation de certaines actions de nos forces de gendarmerie ». Pas de réponse, ni à l'un ni à l'autre.

Dans l'Ain, il faut se déplacer pour porter plainte. Dans les Bouches-du-Rhône, on veut fermer des casernes sans concertation. Dans le Doubs, la pérennité de l'escadron de Besançon est menacée -106 familles sont concernées.

La première richesse de la police et de la gendarmerie, ce sont ceux qui y travaillent. Ne les démoralisez pas avec votre obsession du chiffre et de la communication ! (Applaudissements à gauche)

M. Didier Boulaud.  - Quel réquisitoire !

M. Jean Faure.  - La loi du 3 août 2009 était la première sur la gendarmerie depuis celle du 28 germinal an VI. Il est vrai que depuis 2002, c'était le ministre de l'intérieur qui gouvernait à 90 % la gendarmerie...

La commission de la défense du Sénat avait constitué un groupe de travail sur la gendarmerie, que je présidais et qui reflétait la diversité de notre Assemblée. Ses dix-sept recommandations ont été adoptées à l'unanimité ; je m'en suis beaucoup inspiré pour rapporter la loi du 3 août 2009

En liaison avec M. Courtois, rapporteur de la commission des lois, j'ai présenté une vingtaine d'amendements ; le projet de loi est passé de dix articles à 27 après la CMP. Nous avons récrit l'article définissant les missions de la gendarmerie - ce qui n'avait jamais été fait dans la loi- pour consacrer son statut militaire, son ancrage territorial et son rôle en matière de police judiciaire.

La question des relations avec le préfet avait suscité des interrogations des élus. Il nous semblait nécessaire de concilier le rôle central du préfet avec le respect de la chaîne hiérarchique.

La procédure de réquisition ne paraissait pas compatible avec le rattachement au ministère de l'intérieur. Nous l'avons supprimée, mais maintenue dans les cas où jouait la dimension militaire de la gendarmerie. Grâce à la loi de 2009, nous allons vers une parité de traitement et de carrière entre police et gendarmerie. Bref, nous avons oeuvré pour le maintien du dualisme de nos forces. M. Carrère a repris un certain nombre de déclarations de députés de la majorité ; mais c'est M. Urvoas, député et secrétaire national du part socialiste en charge des questions de sécurité qui a écrit, dans un rapport pour la Fondation Jean Jaurès : « ni la police, ni la gendarmerie n'ont, pour l'heure, à pâtir du rapprochement et de la mutualisation».

M. Jean-Claude Carle.  - Très bonne étude !

M. Jean Faure.  - Le rapport qui doit être remis au Parlement d'ici l'été 2011 nous donnera une évaluation précise de l'application de cette loi. Plutôt que de s'inquiéter, attendons sa publication pour débattre en toute sérénité.

Je salue la décision du ministre de l'intérieur de rapprocher le directeur de la gendarmerie de la place Beauvau et celle du Président de la République de nommer un gendarme à la tête de la gendarmerie.

M. Didier Boulaud.  - C'était déjà le cas auparavant !

M. Jean Faure.  - Les gendarmes resteront des militaires et n'auront donc pas le droit de se syndiquer. On peut toutefois envisager des modes d'expression compatibles avec ce statut.

M. Didier Boulaud.  - C'était dans les conclusions du groupe de travail ; au moment de la loi, vous vous êtes couchés !

M. Jean Faure.  - Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce qu'il en sera pour la gendarmerie du gel annoncé de la dépense publique dans les trois ans à venir ?

Lors d'un déplacement en Afghanistan...

M. Didier Boulaud.  - Un voyage UMP !

M. Jean Faure.  - ...nous avons constaté les conditions de l'engagement de nos 150 gendarmes sur le terrain. Est-il envisagé de renforcer le dispositif ? En Géorgie, il est question de réduire notre engagement d'un tiers, ce qui risque d'être mal perçu, tant par les Géorgiens que par les Russes, et d'affaiblir notre influence au sein de la mission de l'Union européenne.

M. Robert Hue.  - Ce n'est pas la peine de noyer le poisson !

M. Jean Faure.  - Ne peut-on remplacer nos gendarmes par des réservistes ou des experts civils ?

Le groupe UMP réaffirme son attachement au statut militaire de la gendarmerie et fait confiance à nos gendarmes ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Didier Boulaud.  - Cela leur fait une belle jambe !

M. Robert Hue.  - Neuf mois après sa promulgation, la loi d'août 2009 suscite toujours autant de craintes. Il n'est nullement prématuré de l'évaluer. Elle passe mal, tant auprès des élus locaux qui n'étaient pas demandeurs d'une réforme que des gendarmes.

L'application mécanique de la RGPP conduit à des réductions d'effectifs qui se traduisent par la suppression de 175 brigades territoriales. Tandis que la Loppsi 1 avait chiffré à 7 000 les effectifs supplémentaires nécessaires, 1 300 emplois sont supprimés en 2010, ce qui n'est guère cohérent avec l'augmentation de la population et de la délinquance dans les zones de compétence de la gendarmerie. La réforme de cette dernière n'était voulue ni par les gendarmes ni par les policiers, attachés à leurs cultures propres. Elle a été imposée brutalement, sans analyse ni concertation. Le but est à terme de constituer une force unique de sécurité sous la seule autorité civile.

Vous voulez faire disparaître la spécificité, l'identité de chacune des forces. La répartition inéquitable des missions et les pressions des syndicats de policiers sont créatrices de conflits. Les gendarmes s'interrogeront sur les différences de statut, en termes de disponibilité et de représentation. Veut-on inciter les gendarmes à souhaiter eux-mêmes une harmonisation statutaire ?

M. Josselin de Rohan.  - C'est bien s'avancer.

M. Robert Hue.  - Des craintes ont été formulées, autant que les gendarmes peuvent le faire. Le Président de la République a une façon bien à lui de répondre au malaise et aux critiques, en renvoyant le directeur général de la gendarmerie, en radiant des cadres -sanction disproportionnée- un chef d'escadron qui s'exprimait en tant que chercheur au CNRS. Mesurez-vous l'effet désastreux de ces pratiques ?

La presse a évoqué un temps la création d'un secrétariat d'État chargé de rapprocher la gendarmerie de la police, les policiers municipaux, les milices privées et pourquoi pas les douanes ?

Cette loi pose plus de problèmes qu'elle ne saurait en résoudre. (Applaudissements à gauche)

Mme Nathalie Goulet.  - Je n'étais pas convaincue par la loi de 2009 que je n'ai pas votée. On disait jadis la police de pouvoir et la gendarmerie d'État ; comprenne qui pourra.

Toute remise en cause du statut militaire de la gendarmerie serait inacceptable, ce qui n'interdit pas, au contraire, d'oeuvrer à une meilleure coordination des forces ou à l'harmonisation des carrières et des traitements.

« La gendarmerie est une arme d'élite », disait le capitaine Kleck, du groupement de gendarmerie d'Argentan, évoquant la transmission de ses valeurs, ses missions au service de la justice et la disponibilité de ses hommes, sa fidélité au pouvoir légal, ajoutant qu'elle assure la sécurité des citoyens sur l'ensemble du territoire, et même en Afghanistan ou à Haïti. Les craintes que j'entends ici ne sont sans doute pas arrivées jusqu'à La Ferté Macé !

Nous attendons encore les décrets sur les grilles indiciaires et les conditions d'avancement.

Plusieurs initiatives ont été mises en oeuvre pour favoriser l'égalité des chances des jeunes issus de milieux défavorisés ou de l'immigration. De nombreux rapports alarmants font apparaître des discriminations inquiétantes à l'intérieur de la gendarmerie. En février 2006, le ministre de l'intérieur de l'époque, M. Sarkozy, plaidait pour l'intégration de toutes les populations dans une communauté de valeurs, celle des citoyens de la République et assurait que l'État devait montrer l'exemple ; l'égalité républicaine ne pouvait à ses yeux rester un concept virtuel.

Où en est le programme des cadets de la République ? Il était aussi question d'attribuer le statut d'aspirant de gendarmerie à certains étudiants...

Si vous êtes libre fin juin, je vous invite à inaugurer dans le bocage ornais la nouvelle gendarmerie de Passais-la-conception, qui devrait porter le nom d'un ancien parlementaire et militaire, d'un authentique gaulliste : Daniel Goulet. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Pierre Bel - M. Carrère a dressé un tableau juste du moral des troupes. Les gendarmes doutent de leur présent et craignent pour leur avenir. Nos concitoyens, eux, hésitent entre résignation et colère.

L'Ariège comptait trois brigades. Celle de Foix, chef-lieu, a vu ses effectifs baisser jusqu'à sa fermeture. Les zones d'intervention des autres se sont mécaniquement étendues, mais leurs effectifs stagnent. C'est le maillage territorial qui est mis à mal. Le cas n'est pas unique.

Lors de la discussion de la loi du 3 août 2009, nous nous étions opposés au rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, estimant qu'il signifiait à terme la fin de l'identité de cette force.

M. Faure a cité le rapport de notre collègue député pour la fondation Jean Jaurès. Il aurait pu en lire aussi la page où M. Urvoas craint un « véritable séisme » à la suite des redéploiements territoriaux et relève que « le mécontentement de l'arme, déjà perceptible, ne fera que croître » si les équilibres ne sont pas respectés.

Nous sommes attachés à l'existence de deux forces de sécurité, une civile et une militaire. Aujourd'hui, la plus modérée des critiques mène à des sanctions. La gestion des ressources humaines comme des matériels est défaillante. Dans mon département, 40 % des casernes appartiennent à l'État, qui ne se soucie guère de leur entretien, à l'inverse des collectivités territoriales pour les bâtiments qui dépendent d'elles.

Nous attendons des informations fiables et des réponses sur le maillage territorial et les redéploiements. Vous ne cessez depuis huit ans de parler de sécurité, sans que suivent les actes. C'est que vous vous attaquez à ce qui marche sans réformer ce qui ne marche pas. Vous créez ainsi le désordre.

Cette méthode est mauvaise. La sécurité est un droit pour nos concitoyens et une ardente obligation pour ceux qui gouvernent. (Applaudissements à gauche)

M. Didier Boulaud.  - Une politique à la godille !

M. Raymond Vall.  - Le débat tenu en janvier dans cet hémicycle ne nous a pas rassurés. Nous ne le sommes toujours pas. Le rapprochement est une fusion qui ne dit pas son nom. La sanction sévère récemment prononcée contre un gendarme illustre le malaise qui règne dans le corps. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Ce rapprochement s'inscrit dans un contexte plus vaste de fragilisation des services publics, en totale contradiction avec les affirmations du Président de la République, lequel a reconnu lui-même le 9 février que la seule norme comptable ne peut servir de politique d'aménagement du territoire. Supprimer plus de 2 500 postes en deux ans est donc incompréhensible.

Le département du Gers est particulièrement touché par le rapprochement de la police et de la gendarmerie, qui voit ses effectifs décroître. Pourtant, sa démographie augmente de 5 %. Faut-il imaginer qu'il n'y aura plus qu'une caserne pour 4 ou 5 cantons avec la création des conseillers territoriaux alors que nous en avons construit et rénové une quinzaine ? Quelles compensations avez-vous prévues pour les collectivités qui les ont financées ? Les élus et la population sont donc inquiets.

Le fonctionnement de la gendarmerie mérite certes d'être modernisé. L'insuffisance des moyens matériels conduira pourtant à s'interroger sur la volonté du Gouvernement d'améliorer la sécurité. J'ai donc lancé une pétition contre la suppression des postes. Plus de la moitié des maires de toutes tendances l'ont signée dans le Gers.

Comment, monsieur le ministre, comptez-vous préserver l'avenir de la gendarmerie et assurer la sécurité des Français, que leur garantit la Déclaration des droits de l'homme ? (Applaudissements au centre et sur les bancs socialistes)

M. Didier Boulaud.  - Un réquisitoire de plus !

M. René-Pierre Signé.  - Excellent !

M. Jean-Claude Carle.  - La Haute assemblée exerce une fois de plus son rôle de contrôle du Gouvernement. C'est la preuve que la révision constitutionnelle était nécessaire.

M. Didier Boulaud.  - Certainement pas !

M. Jean-Claude Carle.  - Evaluation ne rime pas avec précipitation ! La loi a été votée il y a moins d'un an et nous en sommes au deuxième débat. Jean Faure, dont je salue le travail de rapporteur de la loi de 2009, a rappelé que celle-ci ne remet pas en cause le statut militaire du gendarme. Il ne faut pas attiser les craintes des uns et des autres. Il ne s'agit pas d'une OPA de la police sur la gendarmerie ni d'une fusion acquisition. Nos contradicteurs n'ont pas lu le texte, il me semble. (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Didier Boulaud.  - C'est la pratique qui compte !

M. Jean-Claude Carle.  - Cette loi établit un équilibre entre police et gendarmerie pour répondre aux besoins de sécurité de nos compatriotes. La mission de défense de la gendarmerie au sens large est sanctuarisée dans ce texte. Avec les apéros géants, en zone de police, si le statut de la gendarmerie n'existait pas, il n'y aurait plus que la police municipale pour intervenir.

Le statut militaire répond à un code et à des valeurs. C'est aussi l'engagement des gendarmes que l'on oublie trop souvent.

M. Didier Boulaud.  - C'est une oraison funèbre !

M. Jean-Claude Carle.  - Ils interviennent en France et aussi à l'étranger. Si les gendarmes exercent des fonctions régaliennes, ils exercent bien d'autres missions. Ce sont des acteurs incontournables de l'aménagement du territoire ; ils sont un maillon du vivre ensemble. La concertation avec les collectivités et les gendarmes est donc nécessaire pour optimiser les investissements.

Nous comptons sur vous pour maintenir le périmètre missionnel voulu par le législateur. Des décrets et circulaires ne doivent pas le remettre en cause. (Applaudissements à droite)

Mme Virginie Klès.  - Je partage les propos et les convictions de M. Carrère.

Je veux me faire le porte-parole des gendarmes qui sont engagés au service de notre sécurité et de nos concitoyens, qui vivent dans nos communes et dont les enfants vont dans nos écoles. Oui, ils sont inquiets, comme les policiers d'ailleurs.

Leurs chefs ont relayé leurs craintes, mais sans doute avec beaucoup de modération. Vous ne les avez pas entendus, parce qu'ils sont tenus à la modération et à la réserve. Ce devoir de réserve, je ne me l'applique pas.

M. Josselin de Rohan.  - C'est n'importe quoi, vous n'êtes pas leur porte-parole.

Mme Virginie Klès.  - Ils ont bien raison d'être inquiets ; ils se sentent bousculés, contraints par la logique du chiffre. Ils s'inquiètent d'un transfert de 23,5 millions à la police alors qu'ils ils travaillent dans des locaux vétustes et des logements indécents où parfois la température ne dépasse pas 14 degrés l'hiver. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Josselin de Rohan.  - C'est faux !

Mme Virginie Klès.  - Quand la Lopsi sera-t-elle votée ? Et avec quels moyens ? On leur impose des exigences de résultats mais leurs missions s'élargissent. La délinquance augmente ? On réduit leurs moyens.

La technologie ne règlera pas tout ! Il faudra bien que des hommes et des femmes se déplacent pour arrêter ceux que votre « vidéoprotection » aura identifiés !

Les élus aussi sont inquiets devant l'évolution qu'ils constatent : des escadrons disparaissent, des communautés d'agglomération passent en zone police. Et je pourrais parler des conditions de travail, de celles qu'on fait aux époux ou aux épouses et aux enfants, à chaque mutation.

A-t-on besoin de RGPP pour réduire les moyens consacrés à la gendarmerie ? Et l'on trouve encore des hommes et des femmes prêts à servir dans la gendarmerie ! Il est temps de leur tirer un grand coup de chapeau.

M. Josselin de Rohan.  - Démagogie.

Mme Virginie Klès.  - On ne peut que s'inquiéter d'une logique qui pousse à faire appel à la sécurité privée ou à la police municipale sans concertation avec les élus! Il faut réaffirmer notre attachement au service public de la sécurité et aux hommes et aux femmes de la gendarmerie ! (Vifs applaudissements à gauche)

M. Josselin de Rohan.  - Contrevérités et démagogie !

M. Jacques Gautier.  - Nos ancêtres les Gaulois craignaient que le ciel leur tombe sur la tête. Nous avons connu la peur de l'an mille et les prédictions de Nostradamus annonçant la fin du monde. Souvent ceux qui attisent les peurs sont ceux qui en profitent.

Aujourd'hui, certains annoncent une perte du statut militaire de la gendarmerie. Il y a quelques semaines nous sommes allés rencontrer nos gendarmes en Afghanistan.

M. Didier Boulaud.  - Seulement l'UMP !

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Nous aussi sommes élus, et au suffrage universel à deux tours, et nous avons été exclus de ce voyage !

M. Jacques Gautier.  - La loi de 2009 a pu inquiéter. La gendarmerie restera sous statut militaire. Depuis 2002, elle était déjà rattachée opérationnelle au ministère de l'intérieur. Ces forces sont complémentaires. J'ai connu comme maire la fermeture de ma gendarmerie, mais c'était une autre époque : M. Richard, ministre de la défense, l'avait décidée.

Vous reprochez l'application de la RGPP mais il n'est pas anormal de mutualiser ce qui peut l'être, sans toucher au statut. Vous tonnez contre d'éventuelles suppressions de brigades. Les efforts déployés en équipements montrent que l'on peut faire aussi bien sinon mieux, avec un dispositif plus restreint.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - C'est du charabia !

M. Jacques Gautier.  - Nous n'en sommes plus à la loi de 2009 ! Ce matin, notre commission s'est saisie de la Lopsi 2. La gendarmerie sera ainsi à même de mieux protéger les Français.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Il n'y a pas de moyens !

M. Jacques Gautier.  - La Lopsi 2 permettra à la gendarmerie de se moderniser. Le monde et les menaces évoluent, il faut s'y adapter, ce que font nos gendarmes sans état d'âme. C'est en 2001 qu'ils ont déposé leurs képis, en manifestant contre le ministre Alain Richard ! (Exclamations indignées sur les bancs socialistes ; applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Et vous défiliez avec eux !

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - La liberté d'expression d'un chercheur gendarme a été bafouée puisqu'il a été rayé des cadres. Pourtant la loi, du 24 mars 2005 garantit aux militaires la liberté d'exprimer leurs opinions en dehors de leur service, dans le respect du secret défense et avec discrétion. C'est une loi libérale mais un militaire l'enfreint-il s'il critique, en tant que chercheur, l'institution à laquelle il appartient en tant que militaire ? Un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme répond par la négative. Bien évidemment, un militaire n'a pas à jeter l'opprobre sur l'institution à laquelle il appartient, mais on ne peut l'empêcher de s'exprimer, surtout lorsqu'il s'agit de propos scientifiques.

Il est donc nécessaire de clarifier le statut du gendarme chercheur afin que chacun sache exactement où sont les limites. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Fouché.  - Les gendarmes ne risquent-ils pas l'alignement de leurs retraites sur le régime général ? Leur statut est protecteur, certes, mais ils sont astreints à des obligations de service. Une concertation approfondie est-elle prévue avec le Conseil de la fonction militaire ? Et à l'échelon du département ? (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Remarquable !

M. René-Pierre Signé.  - Excellente question !

M. Didier Boulaud.  - Que nous approuvons entièrement.

M. Daniel Reiner.  - La passion qui anime ce débat prouve qu'il était nécessaire. Nous sommes dans une situation incohérente où se télescopent la loi de 2009, la Lopsi qui prônait une augmentation des effectifs et la RGPP qui induit leur déflation. Voici comment cela se passe sur le terrain. Après la suppression de deux brigades dans mon département l'année dernière, la commune de Neuves-Maisons est aujourd'hui touchée. Jusqu'en 2004, elle bénéficiait d'un commissariat de police. Le ministre de l'intérieur de l'époque -vous en connaissez le nom- a voulu qu'une gendarmerie le remplace. A sa demande, les élus l'acceptèrent à l'époque, contre l'engagement que les effectifs seraient portés à 38 gendarmes. En 2009, un courrier informait les élus que la brigade allait perdre dix gendarmes et qu'un rapprochement était envisagé avec deux autres brigades. Stupeur des élus ! La parole officielle était reniée. J'ai donc interrogé le ministre de l'intérieur. Il m'a été répondu par la voix de Mme Penchard qu'il s'agissait d'une « réflexion » qui donnait lieu à concertation. Effectivement, j'ai participé en préfecture à une réunion avec 69 maires. On nous a informés des décisions du Gouvernement. Nous avons donc appris un marchandage entre le ministre de l'intérieur et la secrétaire d'État à la famille puisque Mme Morano est élue de la circonscription. Il n'y aurait plus que huit suppressions au lieu de dix, et ce serait un progrès.

Tout cela n'est ni sérieux ni respectueux. Si la commune de Neuves-Maisons avait construit une gendarmerie, on ne serait pas là, nous dit-on ! On l'aurait fermée, comme on a fait ailleurs !

J'espère que cet exemple n'est pas exemplaire... Il s'agit d'une mauvaise méthode, qui suscite la méfiance. Une fois de plus, le service public s'éloigne de la population. La sécurité est votre priorité ? Drôle de façon de l'assurer dans mon département ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jacques Berthou.  - Comme maire, je veux vous faire prendre conscience de l'état de la délinquance en France. Nous sommes confrontés chaque jour à une multitude de faits qui scandalisent nos concitoyens, lesquels se retournent vers leurs élus. « Que faites-vous, monsieur le maire ? Rien, pas plus que la police et la gendarmerie. »

Dans ce contexte alarmant, vous réduisez les moyens avec la RGPP, en supprimant 1 300 postes de gendarmes.

Vous allez à contresens et accentuez l'insécurité de notre pays. M. Sarkozy avait créé 12 000 emplois dans la police et la gendarmerie quand il était ministre de l'intérieur : vous allez les supprimer d'ici 2013 ! La RGPP ne devrait pas s'appliquer aux forces de sécurité.

En réduisant le nombre de gendarmes, vous réduisez la proximité avec nos concitoyens. Ce n'est pas en supprimant quatre écoles de gendarmerie sur huit que vous améliorerez leur formation. Je lance un cri d'alarme : donnez plus de moyens à la gendarmerie.

Les Français jugeront vos résultats, pas vos professions de foi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Je tiens à excuser l'absence aujourd'hui du ministre de l'intérieur : il est retenu à l'Assemblée nationale. Le 14 janvier, il s'était exprimé devant le Sénat sur le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur.

Il lui semblait à l'époque qu'il était prématuré de tirer un bilan de la loi de 2009. « Cette réforme historique ne touche ni aux missions, ni au statut de la gendarmerie », disait-il.

Certains d'entre vous estiment que le rattachement vaut fusion : c'est faux. De celle-ci, il n'a jamais été question. Je ne suis pas titulaire de la charge mais je suis tout de même secrétaire d'état à l'intérieur après l'avoir été à la défense et depuis quelques mois, je suis amené à inaugurer fréquemment des casernes et des logements. Je me déplace très souvent, dans de nombreux départements. Et j'irai bientôt dans le Haut-Rhin et le Gard...

Mme Nathalie Goulet.  - Et dans l'Orne !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Quand je fais une inauguration, je ne me contente pas de couper le ruban, je parle avec ceux qui m'entourent, je prends mon temps. Je n'ai pas ressenti le désarroi que vous décrivez, ni cette colère ou ce malaise.

Certes, il y a des interrogations, mais les gendarmes sont fiers de leur mission et globalement satisfaits de leurs logements.

D'ailleurs, on n'en a jamais autant construit. On est loin de la description misérabiliste qu'en a faite Mme Klès.

Le rattachement a pour but d'adapter notre système de sécurité aux nouveaux défis de la délinquance. Cette unité de commandement permettra d'assurer l'efficacité de nos forces. (On en doute à gauche) Il fallait renforcer la coopération opérationnelle et mutualiser les moyens. Depuis septembre nous avons installé dans chaque département des cellules anti-cambriolages : les cambriolages ont diminué de 30 % en zone gendarmerie et de 23 % en zone police dans les Pyrénées orientales où j'étais récemment.

La coopération inter-opérationnelle entre police et gendarmerie va permettre la création d'une unité de lutte contre l'insécurité routière, d'une direction internationale de la sécurité intérieure. Les services territoriaux et centraux des d'information générale seront réorganisés prochainement. La mutualisation de la logistique progresse : systèmes d'information, fichiers judiciaires, achats. On aurait d'ailleurs pu y penser plus tôt ! (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Il n'y avait pas besoin de la fusion pour cela !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Enfin, nous voulons respecter l'équilibre entre les forces de sécurité. Le rôle de la gendarmerie est irremplaçable. Il n'est pas question de remettre en cause le dualisme actuel.

La fusion n'est pas à l'ordre du jour : elle n'a aucun sens et aucun intérêt. Il n'y aura pas fusion mais intégration.

M. René-Pierre Signé.  - C'est la même chose !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - L'intégration s'inscrit dans la logique des missions de la gendarmerie qui est une force de police à statut militaire. Certes, les effectifs du ministère de l'intérieur ont ainsi augmenté d'un tiers, ce qui est considérable.

La réussite de cette réforme repose sur l'équilibre.

Équilibre dans le traitement du personnel, équilibre dans les missions effectuées par les uns et les autres. La loi de 2009 reconnaît la police judiciaire comme une mission essentielle de la gendarmerie. Nous n'aurons jamais assez de policiers et de gendarmes pour lutter contre les délinquants. Équilibre enfin dans les zones de compétences territoriales. Je tiens à rassurer certains d'entre vous : l'État ne se désengage pas. Inutile de diffuser des contre-vérités, prétendument puisées à bonne source.

Cessez de diffuser des contre-vérités sous couvert de prétendues sources bien informées ; ces rumeurs ont déjà été démenties par M. Hortefeux. Non, il n'a jamais été envisagé de fermer des brigades sous couvert de RGPP.

M. Jean-Pierre Bel.  - Et à Foix ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - N'inquiétons pas les gendarmes, à qui je rends un hommage solennel. (Applaudissements sur les bancs UMP) Oui, la gendarmerie participe au mouvement de réduction des dépenses publiques. La RGPP ne signifie pas suppressions mais rationalisation !

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - C'est comme le « populaire » d'UMP !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Tous les régimes de retraite devront être examinés, monsieur Fouché, mais dans la concertation. (On en doute sur les bancs socialistes)

C'est l'immobilisme qui nous condamnerait à avoir une sécurité au rabais. L'effort porte d'abord sur le recentrage des forces de l'ordre sur leur coeur de métier. Nous allons assouplir les modes d'intervention des forces mobiles de maintien de l'ordre, de manière à proportionner les moyens aux besoins.

Nous adaptons en permanence l'ancrage territorial à la réalité de la démographie et de la délinquance. Les élus locaux sont écoutés.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Faux !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Conseiller général moi-même, je le constate.

C'est cette concertation qui a permis de maintenir à Neuves-Maisons un effectif de 46 militaires pour 40 000 habitants, soit mieux que la moyenne nationale. Dans le Gers, les effectifs ont augmenté de cinq gendarmes entre 2002 et 2008. Les évolutions à venir se feront en concertation avec les élus.

Point de plan de dissolution de la gendarmerie, mais volonté de coller aux réalités du terrain. M. Carrère parle de 175 fermetures de brigades d'ici 2012. D'où vient ce chiffre ? Je l'ignore. Il s'agit d'une désinformation manifeste !

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Et les 3 500 suppressions de postes ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Il ya des transferts de gendarmes vers les départements où la délinquance s'accroît, mais aussi pour la sécurité des plages. Les chiffres confirment le bien-fondé de notre politique.

M. Jean-Pierre Bel.  - Même pour les violences aux personnes ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - La coopération sur le terrain porte ses fruits : le nombre de cambriolages ne cesse de diminuer depuis quatre mois. Loin des débats partisans, nos deux forces de sécurité travaillent en confiance.

Nous travaillons aussi à l'étranger, comme pour porter secours au peuple haïtien après le séisme. La gendarmerie se distingue par sa capacité de projection vers l'Afghanistan, la Géorgie, le Kosovo, la Côte-d'Ivoire et par la protection de nos postes diplomatiques exposés.

Cinq gendarmes sont morts en service depuis le début de l'année. C'est une contribution très lourde au service de nos concitoyens. Je le répète : il n'est pas question que disparaissent les spécificités militaires de la gendarmerie - ce qui signifie entre autres que les gendarmes ne peuvent mettre publiquement en cause la politique du Gouvernement. Notre détachement en Afghanistan sera renforcé de 40 gendarmes.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Et on l'apprend ainsi !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - La loi du 3 août 2009 prévoit les compétences exclusives de la gendarmerie dans certaines zones. Des brigades sont créées chaque mois ; il n'y a pas de remise en cause des capacités d'enquête de la gendarmerie. A Châteaurenard une brigade et des logements ont été inaugurés cette année, ce qui montre que la présence de la gendarmerie dans les Bouches-du-Rhône est développée.

Vous avez évoqué la remise en cause par un officier de gendarmerie de la fusion avec la police.

Cet officier n'en est pas à son premier manquement. La Cour de Strasbourg l'a d'ailleurs débouté de ses requêtes précédentes. Le Conseil d'État a maintenu sa radiation des cadres.

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Vous ne suivez pas toujours les avis du Conseil d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Plus souvent que vous ne croyez !

Non, monsieur Hue, la réforme n'a pas été mise en oeuvre brutalement ; elle est progressive. Je suis prêt à venir avec vous dans le Val-d'Oise voir ce qu'il en est.

Le dispositif d'égalité des chances, madame Goulet ? Il fonctionne bien et permet de diversifier le recrutement. Le décret que vous évoquez est paru au Journal officiel le 12 mai : je vous en offrirai la photocopie !

Foix est située en zone de police, monsieur Bel ; il est donc logique de recentrer les brigades de gendarmerie vers leurs zones. Je ne veux pas faire entrer la politique dans ce débat (exclamations à gauche) ; je me garderai donc de rappeler le temps où un certain officier de gendarmerie fut promu préfet après certaines activités peu déontologiques...

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Paralipse!

M. Alain Marleix, secrétaire d'État.  - Il n'y a pas eu diminution du nombre de gendarmes dans votre département, monsieur Vall, mais une petite augmentation.

Le mois d'avril confirme les bons résultats du premier trimestre pour la lutte contre la délinquance : la faible augmentation des atteintes aux personnes est compensée par une nette baisse des atteintes aux biens et des escroqueries.

La rencontre suivie d'un déjeuner du chef de l'État avec les responsables de la gendarmerie, le 21 avril dernier, était une première. Le Gouvernement fait confiance à la gendarmerie, acteur majeur de la sécurité en France, et lui donnera les moyens indispensables à l'accomplissement de ses nouvelles missions au service de nos concitoyens et de la République. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Louis Carrère, auteur de la question.  - Monsieur le ministre laisse entendre que nos chiffres seraient des inventions de nature à saper le moral des troupes. Alors, vous les supprimez ou non ces postes ? Mettez en cohérence vos paroles d'estime pour la gendarmerie, auxquelles je souscris, avec vos actes.

Selon vous, l'immobilisme aurait condamné la gendarmerie. J'entends encore Mme Alliot-Marie nous jurer, la main sur le coeur, qu'il n'était « pas question » de rapprocher la gendarmerie et la police. C'était du temps de M. Chirac...

Les jours d'inauguration, les gens ne se plaignent pas ? Ce sont des jours de fête, mais votre sagacité devrait vous permettre de percevoir le désarroi des gendarmes ! Et qui a payé ces casernes que vous inaugurez ? Les collectivités locales que vous rackettez !

Ne masque pas les difficultés de la gendarmerie sous des mots ronflants. Maintenez les effectifs, préservez le statut, rendez les gendarmes heureux, pour qu'ils soient plus efficaces dans la lutte contre l'insécurité ! Cessez de privilégier la politique du chiffre, et renforcez les contrôles dans les zones accidentogènes !

Je conteste vos chiffres. Les crédits de paiement de la Lopsi 2 sont pathétiques ; ils ne corroborent absolument pas vos propos. Je le regrette pour la gendarmerie et pour la République ! (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Les esprits sont échauffés ; il est vrai que la gendarmerie nous passionne tous.

La séance est suspendue à 19 heures.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 h 35.

Conférence des Présidents

M. le président.  - Je vous donne lecture des conclusions de la Conférence des Présidents.

Ces conclusions appellent-elles des observations ?

M. Gérard Le Cam.  - Le projet de loi de modernisation agricole est particulièrement saucissonné. Nous nous étions préparés à travailler ce vendredi. Il n'en sera rien parce que le Président de la République se déplace dans le Lot-et-Garonne pour le vanter. La semaine prochaine, il en sera de même : nous devrons travailler le samedi alors que nous avions prévu d'être dans nos mairies. (Applaudissements à gauche et sur plusieurs bancs du centre et de la droite)

M. Didier Guillaume.  - Cette loi a été annoncée en début d'année et nous devons néanmoins l'examiner en urgence et la commission a tellement remanié le texte initial qu'une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Et maintenant l'ordre du jour est totalement bouleversé. On nous dit que le Sénat siègera vendredi et samedi prochains alors que nous avions d'autres occupations prévues. Cette loi est-elle si peu importante qu'on veuille la saucissonner ainsi ? Drôle de façon de travailler ! (Applaudissements à gauche)

Les conclusions de la Conférence des Présidents sont adoptées.

Modernisation de l'agriculture (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n°229, au sein de l'article premier.

Discussion des articles (Suite)

Article premier (Suite)

M. le président.  - Amendement n°229, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Alinéa 6

Après le mot :

politique

insérer le mot :

publique

II. - En conséquence, dans l'ensemble de cet article, après le mot :

politique

insérer le mot :

publique

M. Gérard Le Cam.  - Une politique de l'alimentation, enfin... Mais même si mes amendements étaient adoptés, les orientations inscrites dans cet article laisseraient à désirer. Tout dépendra de la suite que le gouvernement y donnera. Ainsi de l'aide alimentaire. Le projet de loi de finances pour 2010 a réduit les crédits destinés à la prévention et à l'exclusion. L'Insee estime que 8 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté. Alors que les Restos du coeur accueillent un public sans cesse plus nombreux, dont des agriculteurs, les crédits prévus sont en baisse. Les pouvoirs publics doivent prendre la mesure de ce phénomène. Le Gouvernement devrait donc se préoccuper de la politique de l'alimentation au lieu de dépenser les deniers publics à pourchasser ls sans papiers jusque dans les locaux d'organisations humanitaires.

M. Gérard César, rapporteur de la commission de l'économie.  - La commission avait donné un avis défavorable mais, après expertise, elle souhaite entendre le Gouvernement.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.  - Fixer comme objectif l'alimentation dans ce projet de loi est un geste politique important. J'espère qu'il sera suivi au plan européen.

Pour défendre la légitimité de l'agriculture et des agriculteurs, il faut se fixer un tel objectif. En outre l'enjeu social est majeur. Tous les acteurs doivent travailler ensemble pour obtenir des résultats, comme cela été fait pour la sécurité routière.

Pour la première fois, nous fixons une orientation forte. Comme il s'agit d'intérêt général, le Gouvernement souhaite promouvoir une politique publique de l'alimentation.

M. Gérard César, rapporteur.  - Si j'ai bien compris, le Gouvernement est favorable. La commission aussi ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Vous avez parlé de politique publique de l'alimentation. Un geste du Gouvernement ? Peut-être, mais pour le moment, ce ne sont que des mots. Joignez le geste à la parole.

Hier, M. Raffarin a dit que chacun doit être maître chez soi et que le ministre de la santé n'avait pas à empiéter sur vos attributions. N'est-ce pas un peu contradictoire? Nous verrons bien. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°229 est adopté

M. le président.  - Amendement n°89, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Alinéa 7, première phrase

Après les mots :

l'accès

insérer les mots :

, dans des conditions économiquement acceptables par tous,

II. - Alinéa 7, seconde phrase

Supprimer les mots :

, de ses contraintes

Mme Odette Herviaux.  - La définition de la politique de l'alimentation que vous voulez mener n'est pas assez large. Il faut ajouter la notion de plaisir gustatif, ce qu'a accepté la commission. En revanche, n'auront accès à la qualité nutritionnelle et gustative que ceux qui auront des moyens suffisants. La fracture alimentaire est une triste réalité. Cette politique doit donc s'attaquer aux disparités sociales. Nous en sommes plus à l'époque de la signature du Traité de Rome qui parlait de prix raisonnables. Nous reprenons la formule aujourd'hui appliquée à l'accès à l'eau pour tous. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°517 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, MM. Fortassin, Tropeano, de Montesquiou, Mézard, Milhau, Chevènement et Vall, Mme Laborde et MM. Plancade, Alfonsi et Marsin.

Alinéa 7, seconde phrase

Après les mots :

à chacun

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

, quelle que soit sa situation économique et financière, les conditions du choix de son alimentation en fonction de ses souhaits et de ses besoins nutritionnels, pour son bien-être et sa santé.

Mme Françoise Laborde.  - La crise économique et ses incidences sur le pouvoir d'achat des Français ont remis l'alimentation au coeur de leurs préoccupations, en les contraignant à des arbitrages délicats. Pour beaucoup, la dépense alimentaire devient la variable d'ajustement.

La politique de l'alimentation doit offrir à chacun les conditions d'un véritable choix de son alimentation en fonction de ses souhaits et de ses besoins nutritionnels, ce qui implique, à défaut d'une action sur le pouvoir d'achat, d'agir sur les prix et les marges.

M. le président.  - Amendement n°225, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7, seconde phrase

Supprimer les mots :

de ces contraintes

Mme Odette Terrade.  - La santé est en partie conditionnée par l'alimentation mais le gouvernement fait un choix sanitaire. La fracture alimentaire est une réalité. Il convient donc de garantir l'accès de tous à une alimentation de qualité.

Conditionner les choix alimentaires aux contraintes économiques c'est donc pénaliser les plus modestes. La prévention est la meilleure arme pour mettre un terme à divers maladies dont l'obésité qui ne cesse de se développer dans notre pays. Le Gouvernement doit se donner les moyens de ses ambitions.

M. Gérard César, rapporteur.  - Les produits alimentaires représentent 13,3 % du budget des ménages. Les conditions économiquement acceptables qui valent pour l'accès à l'eau valent aussi pour l'alimentation d'accès à l'eau et à l'alimentation. Je souhaite la rectification de l'amendement de Mme Herviaux en supprimant la deuxième partie de l'amendement car il existe bien des contraintes comme la maladie.

Mme Odette Herviaux.  - J'accepte.

M. Gérard César, rapporteur.  - Si l'amendement n°89 rectifié est adopté, le 517 rectifié est satisfait. Je suis en revanche défavorable au 225

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis favorable au 89 rectifié et défavorable aux deux autres.

L'amendement n°517 rectifié est retiré.

L'amendement n°89 rectifié est adopté.

L'amendement n°225 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°593 rectifié, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

I. - Alinéa 7, première phrase

Supprimer les mots :

produite dans des conditions durables

II. - Alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans une perspective de souveraineté alimentaire, elle s'appuie sur une agriculture durable, pourvoyeuse d'emplois dans les territoires et elle est mobilisée pour répondre à la demande interne.

M. Jacques Muller.  - Il convient d'articuler notre politique alimentaire avec notre politique agricole. La souveraineté alimentaire ne relève pas pour nous de la survie, comme dans les pays pauvres, mais de la sécurité. Nous dépendons beaucoup trop des importations pour produire : 80 % des élevages dépendent de l'importation de tourteaux de soja. En outre, notre agriculture doit respecter le principe du développement durable. Donnons un cap, un souffle à la politique de l'agriculture. Le Grenelle a montré la voie. Suivons-la. Voilà ce qui doit figurer dans le préambule de cette loi.

M. Gérard César, rapporteur.  - Alimentation et agriculture sont complémentaires mais ne peuvent se confondre. L'autosuffisance est un objectif européen, pas celui d'un seul État membre. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Il ne s'agit pas ici du préambule mais du titre premier qui définit une politique publique d'alimentation : avis défavorable.

M. Jacques Muller.  - Vos réponses ne me satisfont pas. Il faut manger des fruits et légumes ? Cette filière est déficitaire : elle ne peut se développer que dans les cultures péri-urbaines ; il faut les y aider ! Nous devons répondre à la demande de nos concitoyens et arrêter de produire pour la seule exportation.

En Alsace, on finance la monoculture du maïs pour satisfaire l'industrie agricole allemande alors que cette région ne produit pas tous les fruits et les légumes qu'elle pourrait. Et comment ne pas parler de création d'emplois, dès sinon le préambule, du moins l'ouverture du projet ?La souveraineté alimentaire a une dimension géostratégique. La France souhaite faire entendre sa voix dans le concert des nations comme lors de la guerre d'Irak. Mais cette position ne sera pas durable si on n'a pas d'autonomie alimentaire et donc politique. L'embargo sur le soja avait, au début des années 70, mis nos éleveurs en grande difficulté. Notre agriculture est grosse consommatrice de pétrole. Il faut réduire cette dépendance. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nathalie Goulet.  - Nous sommes en train de créer un droit à une nourriture saine, gouteuse, produite de façon durable, -une sorte de droit opposable. Comment le faire appliquer, avec quels moyens et dans quelles conditions ? Nous connaissons le lien entre santé et alimentation et nous avons eu un intéressant débat grâce à M. Dériot sur les dangers de l'obésité.

Je suis effarée par cet article, plein de bons sentiments, mais inapplicable.

M. Daniel Dubois.  - Je croyais que la France était le pays de la gastronomie et que nos productions étaient de bonne qualité. Hier, tout le monde s'accordait pour défendre l'agriculture française et aujourd'hui on a l'impression qu'il s'agit de la pire ! Revenons à la raison. Certes, l'obésité est un réel problème, mais elle n'est pas due aux produits fournis par nos agriculteurs. Il y a trop de non-dits déplaisants dans certains propos. (Protestations à gauche) Nous voterons contre cet amendement.

M. René Beaumont.  - Merci d'avoir fait de l'alimentation une priorité politique, monsieur le ministre. Si d'autres États l'avaient fait, ils n'en seraient pas au point où ils en sont. J'entends qu'on nous fait la morale. Mais pourquoi refuser d'exporter ? Il faut être cohérent.

J'aurais préféré que M. Muller reste dans son rôle d'écologiste en prônant le transport fluvial pour livrer le blé du Grand Est ? (Applaudissements à droite)

Mme Odette Herviaux.  - Ces mises en cause sont inutiles.

M. Muller n'a pas attaqué les produits français, qui sont de qualité.

Relisez cet amendement ! La souveraineté alimentaire est une priorité pour l'Europe et pour tous les États ; l'agriculture durable : bien sûr ! ; la création d'emplois dans nos territoires : évidemment ; la réponse à la demande interne : elle n'est pas exclusive. Nous voterons cet amendement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°593 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 151
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°91, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 8, première phrase

Remplacer le mot :

Gouvernement

par les mots :

ministre en charge de l'agriculture, le ministre en charge de la santé publique et le ministre en charge de l'économie

M. Claude Bérit-Débat.  - La politique de l'alimentation doit être définie après concertation avec divers ministères.

M. le rapporteur a estimé en commission que cet amendement n'avait pas lieu d'être. J'en doute.

Vous pensez, Monsieur le ministre, que ce programme sera piloté par votre ministère. Fort bien ! Lors de votre nomination, vous avez été désigné comme ministre de l'alimentation. Mais quelle place sera réservée au ministère de la santé ? Il doit être associé au programme pour les aspects nutrition, prévention, éducation. Mieux vaut l'écrire. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard César, rapporteur.  - Ce texte confie au Gouvernement la conduite de ce programme. Le ministère de l'alimentation a vocation à piloter cette politique qui a néanmoins un caractère interministériel évident. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Défavorable également : il est à la fois plus précis et plus juste de garder le texte de la commission. Pourquoi ne pas citer le ministère de l'éducation nationale ? Celui de la culture ? Ils sont pourtant concernés eux aussi.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - M. Dubois nous disait tout à l'heure que tous les Français se nourrissent correctement. On en est loin : il suffit d'étudier les pathologies de certains quartiers. Le ministère de l'éducation nationale est concerné; indiquons-le donc dans la loi afin de l'impliquer avec les autres ministères. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°91 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°90, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 8, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et après consultation des instances qualifiées en matière scientifique

Mme Renée Nicoux.  - Le Conseil national de l'alimentation (CNA) sera impliqué dans la définition de la politique de l'alimentation du Gouvernement et du programme national pour l'alimentation. Il peut être d'une grande utilité si ses recommandations sont suivies d'effet, mais il n'a pas vocation à se substituer aux instances scientifiques.

Mieux vaut donc ne pas définir dès maintenant ces instances, afin de ne pas réduire le champ.

M. Gérard César, rapporteur.  - Le CNA est le bon niveau pour ces conseils, qui ne peuvent relever des seules instances scientifiques : il y a aussi un enjeu de société. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement serait redondant avec les dispositions existantes dans le code rural.

L'amendement n°90 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°219 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Bailly, Doligé, Cornu, Billard et Houel.

Alinéa 8, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et du Conseil national de la consommation

M. Rémy Pointereau.  - L'article premier ne parle pas des consommateurs, à qui pourtant l'alimentation est destinée ! Je propose donc de soumettre pour avis le programme national pour l'alimentation au Conseil national de la consommation (CNC) tout comme il est fait pour le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire (CSO).

Je préfère avoir l'avis de consommateurs autres que celui de scientifiques de tous poils qui se contredisent, ou d'écolos-bobos qui ne savent pas reconnaître le blé de l'épeautre! (Rires)

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement n'est pas illégitime... Favorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

M. Didier Guillaume.  - Nous voterons cet amendement mais cette agression gratuite est tout à fait déplacée. M. Muller n'a pas une tête d'écolo-bobo ! (Sourires)

M. Jacques Muller.  - Je revendique l'étiquette écolo : venez chez moi partager le verre de l'amitié bio et vous me donnerez ensuite un coup de main pour mon potager. Il demande beaucoup de travail ! (Rires et applaudissements à gauche)

M. Daniel Dubois.  - Nous votons cet amendement à deux mains : nous ne cessons de répéter que les consommateurs ont un rôle à jouer.

L'amendement n°219 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°230, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 8, dernière phrase

Supprimer le mot :

trois

M. Gérard Le Cam.  - Ce n'est pas tous les trois ans que le Parlement doit être informé, mais tous les ans ! Il y a urgence : l'obésité guette les Français en 2020...

M. Gérard César, rapporteur.  - Désolé pour mon homonyme Gérard, (sourires) mais l'avis est défavorable parce que la politique de l'alimentation s'inscrit dans une perspective pluriannuelle. Et rien n'empêche le Parlement d'évaluer quand il le veut la politique du Gouvernement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable, même si les intentions de M. Le Cam sont louables. Trois ans, c'est la bonne durée, et rien n'empêche les parlementaires de se saisir du sujet.

L'amendement n°230 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°323, présenté par M. Dériot.

Alinéa 9

Après le mot :

prévoit

insérer les mots :

, en liaison avec le programme national nutrition santé,

M. Gérard Dériot.  - La mise en place d'un programme national pour l'alimentation est l'occasion de renforcer l'articulation nécessaire entre politique de santé et politique de l'alimentation. Cet amendement vise à éviter une juxtaposition des outils de l'action gouvernementale, dont les effets néfastes sur le traitement de l'obésité avaient été soulignés par le rapport de l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé dès 2005.

Par sa nature même, le futur programme national pour l'alimentation est appelé à croiser les objectifs du programme national nutrition santé qui existe depuis 2000 et est piloté par la direction générale de la santé. Les mesures prises dans les deux programmes PNA et PNNS doivent être au moins cohérentes et même complémentaires.

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement nous interpelle. Le professeur Houssin a souhaité que le PNNS reste à part du PNA. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse. Il y a un problème de fond et un problème de circonstance. Sur le fond, votre amendement a du sens ; pour les circonstances, Mme Bachelot n'a pas encore rendu son arbitrage...

M. Gérard César, rapporteur.  - Sagesse.

Mme Nathalie Goulet.  - Je suis extrêmement favorable à cet amendement pour une simple question de lisibilité. On considère que 41 % des Français sont en surcharge pondérale. Je vais faire plaisir à M. Muller : ne serait-ce que pour des raisons grenello-compatibles, il n'est pas utile de multiplier les rapports.

L'amendement n°323 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°231, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - l'offre d'un logement décent et sûr en faveur des personnes les plus démunies ;

Mme Odette Terrade.  - Même si l'affirmation d'objectifs ne suffit pas à transformer la réalité, nous souhaitons élargir la portée de ce projet de loi. Un grand nombre de pauvres vivent en hôtel, qui est devenu une modalité courante de l'hébergement d'urgence. Quelle portée a le discours sur la qualité de l'alimentation auprès de ceux qui n'ont que le rebord de la fenêtre en guise de réfrigérateur ?

M. Gérard César, rapporteur.  - Le logement est très important, mais pas tout à fait l'objet de ce projet de loi. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°231 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°232, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par les mots :

consommés par l'homme ou l'animal

Mme Odette Terrade.  - N'oublions pas les aliments destinés aux animaux : ils peuvent avoir un impact sur la santé humaine lors de leur consommation. Je pense notamment à l'autorisation par Bruxelles de la pomme de terre génétiquement modifiée. Chaque pays doit maintenant faire jouer la clause de sauvegarde pour protéger la santé de ses concitoyens. Les OGM pénètrent à notre insu dans la chaine alimentaire : le PNA doit en tenir compte.

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement est satisfait par notre alinéa 12. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le sujet, d'importance, est parfaitement traité par les alinéas 11 et 12.

L'amendement n°232 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°325 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Pointereau.

Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - la traçabilité des produits agricoles, transformés ou non, susceptibles d'être consommés par l'homme ou l'animal ;

M. Rémy Pointereau.  - Cet amendement complète la liste des actions à mettre en oeuvre en y intégrant la traçabilité des produits agricoles.

M. Gérard César, rapporteur.  - L'amendement est largement satisfait par le texte de la commission. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°325 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°591, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - le bien-être animal ;

M. Jacques Muller.  - La manière dont on traite les animaux d'élevage a un effet sur la santé humaine. Ainsi, on utilise plus d'antibiotiques pour soigner les animaux d'élevage que pour les humains !

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - C'est vrai, les conséquences en sont graves pour les embryons humains.

M. Pierre Bernard-Reymond.  - Protégez les moutons des loups !

M. Gérard César, rapporteur.  - Défavorable : le bien-être animal relève de la législation communautaire.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Le problème est réel ; il est traité à l'échelle européenne et aura peut-être des effets négatifs sur notre élevage porcin. Défavorable.

M. Jacques Muller.  - Je voulais attirer l'attention de mes collègues sur cette question.

L'amendement n°591 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°234, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 13

Après le mot :

information

insérer les mots :

tout au long de la scolarité, de la maternelle aux études supérieures,

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - L'éducation à la nutrition ne peut être faite seulement dans les familles ; elle doit être dispensée tout au long de la scolarité.

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement est plus restrictif que le texte de la commission : l'information doit concerner tous les publics, pas seulement les élèves et les étudiants. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis. Il vaut mieux garder une formule très générale, quitte à apporter les précisions nécessaires dans les décrets d'application.

L'amendement n°234 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par M. Chastan et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 13

Après les mots :

modes de production

insérer les mots :

, en particulier des produits locaux,

M. Yves Chastan.  - La consommation de produits locaux contribue à la préservation des emplois ruraux et agricoles et de l'environnement. Il importe de l'inscrire dans ce texte : il est nécessaire de développer, au sein d'un Programme national de l'alimentation, des actions éducatives dirigées vers les citoyens dès le plus jeune âge.

M. Gérard César, rapporteur.  - L'amendement est satisfait par l'alinéa 17 de notre rédaction.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

M. Yves Chastan.  - Mon amendement rejoint celui sur la saisonnalité, repris par la commission, et celui de M. Pointereau sur les consommateurs.

M. Didier Guillaume.  - A certains moments, il faut afficher clairement ses choix. Nous l'avons dit dans la discussion générale : les étudiants mangent dans des fast food ! Les agriculteurs doivent vivre de leur production ; nous voulons l'afficher, quitte à alourdir le texte de la loi. Les consommateurs doivent être mis au coeur du processus.

Je regrette donc ces deux avis défavorables qui viennent de nous être opposés.

M. Claude Bérit-Débat.  - Je suis attaché à ce que les produits locaux soient dégustés et mis en valeur. Chacun sait que les fraises du Périgord sont les meilleures : il serait dommage de donner des fraises d'Espagne ! (Sourires)

M. Gérard César, rapporteur.  - En commission, nous avons évoqué ce problème et l'alinéa 17 répond tout à fait à votre demande.

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°520 rectifié, présenté par MM. Collin et Fortassin, Mme Escoffier, MM. Tropeano et de Montesquiou, Mme Laborde et MM. Chevènement, Mézard, Plancade, Milhau, Vall, Baylet, Barbier, Alfonsi, Marsin et Detcheverry.

Alinéa 13

Après les mots :

en matière

insérer les mots :

de goût,

Mme Françoise Laborde.  - L'initiation au goût est selon le baromètre 2008 du Credoc, la troisième priorité, derrière l'équilibre alimentaire et l'hygiène, assignée par les Français à l'éducation à l'alimentation. Comme tous les apprentissages, celui du goût doit commencer très jeune.

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement est important mais le texte de la commission - que vous avez sous les yeux- vous donne satisfaction. Retrait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis : l'alinéa 15 est parfaitement clair et dit la même chose !

Mme Françoise Laborde.  - Je préférais ma rédaction...

L'amendement n°520 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°647, présenté par M. César, au nom de la commission.

Alinéa 13

I. - Remplacer les mots :

et de l'origine

par les mots :

, de l'origine

II. - Après le mot :

production,

insérer le mot :

et

L'amendement rédactionnel, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°233, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

et le bien-être animal

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Il est bon d'encourager les agriculteurs à aller au-delà des normes impératives en matière de bien-être animal. (Exclamations à droite)

M. Gérard Le Cam.  - Qu'avez-vous contre le bien-être animal ?

M. le président.  - Amendement n°592, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

et sur le bien-être animal

M. Jacques Muller.  - Il a été très bien défendu.

M. Gérard César, rapporteur.  - J'allais répondre à Mme Laborde, en pensant au foie gras ! (Rires) Il ne faut pas en rajouter sur les règles européennes en la matière.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Vous m'ôtez les mots de la bouche. (Sourires) Le projet de loi évoque d'ailleurs « les conditions de production ».

Mme Odette Herviaux.  - Je partage le fond de cet amendement mais il faut être prudent avec des notions comme celle de « bien-être animal ». Notre époque souffre d'un grave anthropomorphisme qui incite à faire plus pour les animaux que pour les humains. (« Très bien ! ») Quand on voit dans l'élevage porcin à quoi mènent les règles sur le « bien-être animal », il y a de quoi s'inquiéter. Les animaux ont des réactions d'animaux, les plus forts s'en prennent aux plus faibles... Gare à ce que nous allons dire aux enfants ! Je propose de nous abstenir sur ces amendements. (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Gérard Le Cam.  - Breton moi aussi, je connais bien les problèmes des élevages intensifs. Effectivement, il faut être prudent : une étude a montré que les salariés agricoles souffrent de s'occuper d'animaux qui souffrent. Il faut voir, animaux par animaux, élevage par élevage, comment améliorer les choses, en prenant des précautions.

M. Jacques Muller.  - J'avais accepté de retirer l'amendement 591 ; je maintiens celui-ci parce que l'information et l'éducation sont importantes en la matière. La loi parle de « modes de production », pas de « conditions de production ». Ce n'est pas la même chose.

L'amendement n°233 n'est pas adopté non plus que l'amendement n°592.

M. le président.  - Amendement n°120 rectifié, présenté par M. Chatillon.

Alinéa 13

Après les mots :

d'équilibre et de diversité alimentaires,

 Insérer les mots :

de besoins spécifiques à certaines populations,

M. Gérard César, rapporteur.  - Je reprends cet amendement de M. Chatillon qui a dû s'absenter en raison d'un décès dans sa famille. La précision apportée par cet amendement me paraît utile.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis très favorable. On ne saurait trop se préoccuper des problèmes nutritionnels de certains groupes.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Sans doute, mais l'information de ces publics est-elle possible?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Excellente question ! Cela relève du règlement. Je ferai très attention à cette question que je connais particulièrement bien. Je m'engage à ce que les précisions nécessaires soient apportées par étiquetage ou tout autre moyen.

L'amendement n°120 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°235, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

notamment à travers la mention obligatoire des produits génétiquement modifiés ou nourris avec des produits génétiquement modifiés

M. Gérard Le Cam.  - Il faut mentionner la présence d'OGM même lorsqu'il ne s'agit que de traces. Les risques dus à la présence d'OGM dans la chaîne alimentaire ne sont pas encore clairement identifiés. Tant que demeure l'incertitude scientifique, la traçabilité doit être assurée au consommateur.

M. Gérard César, rapporteur.  - Les OGM ne sont pas l'objet de ce texte. Retrait.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis. Le débat sur les traces d'OGM est mené au sein de l'Union européenne.

L'amendement n°235 est retiré.

M. le président. - Amendement n°236, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

notamment à travers la mention obligatoire et systématique de l'origine des denrées alimentaires par voie d'étiquetage ou d'affichage

M. Gérard Le Cam.  - Le consommateur doit pouvoir faire son choix en connaissance de cause. Un étiquetage adéquat permettrait de faire prendre conscience aux consommateurs de l'impact écologique de leurs choix. Souvenez-vous du retentissement du Cauchemar de Darwin !

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement est satisfait : l'indication du pays d'origine peut figurer sur les étiquettes. Voyez l'alinéa 4 de l'article premier bis.

M. Gérard Le Cam.  - « peut... » !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis. Je vous renvoie à l'alinéa 35 de l'article 6.

M. Jacques Muller.  - Dans le texte, il est dit « peut » et non pas « doit » ! Les évolutions qualitatives reposent en grande partie sur les consommateurs. Ces derniers doivent être bien informés.

M. Daniel Dubois.  - Nous avons voté tout à l'heure un amendement pour remettre le consommateur dans le jeu. C'est un acteur fondamental. « Peut » et « doit » ne sont pas synonymes.

Notre groupe votera donc cet amendement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Pouvoir et devoir, c'est le sujet du soir. (Sourires) Nous n'aurions pas été gênés par la substitution de l'un par l'autre mais nous aurions été à l'encontre de la réglementation communautaire. Et les industriels nous auraient aussitôt attaqués devant la Cour de Luxembourg. En revanche, le décret sera plus contraignant et nous demanderons à l'Union européenne de modifier sa réglementation en ce sens.

L'amendement n°236 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°518 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, MM. Fortassin et Tropeano, Mme Laborde et MM. de Montesquiou, Vall, Chevènement, Milhau, Mézard, Plancade, Barbier, Alfonsi, Marsin et Detcheverry.

Après l'alinéa 14,

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - la transparence dans la fixation des prix alimentaires ;

Mme Françoise Laborde.  - La baisse des prix agricoles depuis deux ans ne s'est pas traduite dans les magasins.

M. Gérard César, rapporteur.  - L'article 6 traite de l'Observatoire des prix et des marges : c'est là qu'il faut présenter l'amendement. Avis défavorable.

L'amendement n°518 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°519 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier et MM. Fortassin et Tropeano.

Après l'alinéa 14,

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - la juste répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière alimentaire ;

Mme Françoise Laborde.  - N'oublions pas les agriculteurs qui ont vu leurs revenus baisser considérablement depuis deux ans alors que l'industrie agro-alimentaire et la grande distribution ne se sont jamais aussi bien portées !

M. Gérard César, rapporteur.  - Vous posez la question de l'Observatoire des prix et des marques. Votre amendement est satisfait.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Défavorable.

M. Gérard Le Cam.  - L'Observatoire n'a aucune compétence en matière de répartition de la valeur ajoutée. Il ne peut qu'observer...

M. Alain Vasselle.  - Cet amendement est intéressant. Est-il satisfait ? Quel sera le caractère contraignant de l'Observatoire ? C'est bien de faire de l'affichage, encore faut-il que la grande distribution accepte de réduire ses marges. Il ne faudrait pas que le Président de la République soit obligé de négocier à chaque fois une nouvelle répartition de ces marges.

Monsieur le ministre, vous n'avez pas les coudées franches, à cause de l'Europe. Vous devez agir par le décret : il faudra faire de même avec l'Observatoire.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce texte a un temps d'avance sur les modifications que nous espérons dans les règlements européens. C'est un sujet de fond. Nous nous battons pour faire changer des positions rétrogrades en matière d'étiquetage, d'organisations de producteurs et d'interprofessions. Les règles n'ont pas vocation à rester intangibles ; le problème, c'est que l'Union européenne n'est pas en capacité de les changer. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Ce texte est en avance, nous dites-vous ! M. Vasselle se félicite que le Président de la République soit là pour négocier sur les marges. On y perd son latin ! (Mme Panis s'exclame) L'examen de ce projet de loi est un peu chaotique. A droite, du côté des bien-pensants, on se félicite de l'initiative du Président de la République. A gauche, du côté des sceptiques, on s'interroge sur la portée de ce projet qui évolue ainsi au gré des initiatives présidentielles : est-ce vraiment une loi pour l'agriculture du 21e siècle ? Les amendements de Mme Laborde sont intéressants. On en reparlera à l'article 6 ? Il faudrait un peu plus de sérénité et de transparence. On navigue à vue.

M. Daniel Dubois.  - Il s'agit d'un grand sujet. On nous répond Observatoire des prix et des marges ! Croyez-vous vraiment qu'il va pouvoir répartir autrement les marges ? En commission on nous a dit que ceux qui ne s'y associeraient pas encourraient une amende de ...2 250 euros !

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°519 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°228, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 16

Après le mot :

modes

insérer le mot :

locaux

M. Gérard Le Cam.  - Aucune référence n'est faite à l'agriculture biologique et locale. La politique alimentaire doit comporter le moins de produits importés possibles. Faire de l'alimentation une priorité, c'est freiner la mainmise des grandes surfaces et mettre un terme à la malbouffe nationale. Nous sommes le deuxième pays au monde à consommer des pizzas, après les Américains. Le gouvernement manque de vision globale : il doit viser à renforcer le tissu social en privilégiant les produits locaux. C'est ainsi qu'on relocalisera productions et emplois, dans le respect de l'environnement.

M. Gérard César, rapporteur.  - Cet amendement à l'alinéa 16 crée une confusion avec l'alinéa 17 sur les circuits courts. Défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Monsieur Le Cam, vos arguments sont contradictoires. Vous reprochez au Gouvernement de ne pas avoir une vision globale de la politique publique de l'alimentation et vous vous restreignez ici aux modes de production locaux. Enfin, pour conclure dans un sourire, je ne suis pas d'accord avec ce que vous avez dit sur la pizza : elles peuvent être d'une grande qualité.

L'amendement n°228 n'est pas adopté.

Prochaine séance demain, jeudi 20 mai 2010, à 9 heures.

La séance est levée à 23 heures 55.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 20 mai 2010

Séance publique

A 9 HEURES

Proposition de loi tendant à abroger le bouclier fiscal, présentée par M. Thierry Foucaud et les membres du groupe CRC-SPG (n° 381, 2009-2010).

Rapport de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n° 439, 2009-2010).

Proposition de loi visant à assurer la sauvegarde du service public de la télévision, présentée par M. Jack Ralite et les membres du groupe CRC-SPG (n° 384, 2009-2010).

Rapport de M. Jack Ralite, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n° 431, 2009-2010).

A 15 HEURES ET LE SOIR

Questions d'actualité au Gouvernement.

Suite du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (Procédure accélérée) (n° 200, 2009-2010).

Rapport de M. Gérard César et M. Charles Revet, fait au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (n° 436,2009-2010).

Texte de la commission (n° 437, 2009-2010).