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Table des matières



Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 25 octies (Suite)

Article 25 nonies

Article 25 decies

Article 25 undecies

Article 25 duodecies

Article 25 terdecies

Article 27 bis

Article 27 ter AA

Article 27 ter AB

Article 27 ter AC

Conclusions de la Conférence des Présidents

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 27 ter AC (Suite)

Article 27 ter AD

Article 27 ter AE

Article 27 ter AF

Article 27 ter AG

Article 27 ter A

Article 27 sexies A

Article 27 octies

Article 28

Article 28 bis

Article 29

Article 29 bis

Article 29 quinquies

Article 29 sexies

Article 31




SÉANCE

du lundi 18 octobre 2010

12e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Roger Romani,vice-président

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. Jean-Noël Guérini.

La séance est ouverte à 10 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

Rappel au Règlement

M. Guy Fischer.  - Nous sommes effarés par l'intransigeance irresponsable du Premier ministre hier sur TF1...

M. Nicolas About.  - Remarquable Premier ministre !

M. Guy Fischer.  - ... qui a fait une intervention aux relents de thatchérisme. Face à l'autoritarisme d'un Premier ministre droit dans ses bottes, nous demandons à nouveau que les organisations syndicales soient reçues ainsi que celles qui représentent la jeunesse. La voie du dialogue est la seule à même de satisfaire l'immense majorité du peuple en colère. Persévérer dans le passage en force est une erreur potentiellement fatale !

Nos travaux vont se prolonger d'une semaine au moins. Je demande que la réunion de la commission -prévue demain à 17 heures pour étudier le PLFSS- soit reportée. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)

M. Jean-Pierre Bel.  - L'intervention du Premier ministre hier pose des difficultés pour tout le pays. S'il y a blocage, c'est du dialogue, ce qui est offensant pour les parlementaires. Il n'est pas à la hauteur de la situation en disqualifiant les propositions du parti socialiste.

M. Nicolas About.  - Il voit clair !

M. Jean-Pierre Bel.  - Le Gouvernement et la majorité doivent faire un geste. Nous avons un rendez-vous national dans un an et demi. J'ai entendu un ancien Premier ministre suggérer un temps de réflexion au sujet du report de 65 à 67 ans.

M. Nicolas About.  - Vous le prendrez comme Premier ministre, si vous gagnez !

M. Jean-Pierre Bel.  - Nous abordons ce débat toujours dans un esprit constructif, toujours le même. (M. Nicolas About rit) Je vous en prie ; le sujet est sérieux.

M. Nicolas About.  - Pardon.

M. Jean-Pierre Bel.  - Il faut tout remettre à plat en réunissant les partenaires sociaux. J'appelle la majorité à mettre fin au dialogue de sourds : ne comptez ni sur la fatigue des parlementaires ni sur l'épuisement des Français ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales  - Monsieur Fischer, nous avons déjà reçu les organisations représentatives. Cela suffit. L'heure est maintenant au débat parlementaire.

Un « passage en force » ? Nous prenons ici tout le temps nécessaire au débat. Enfin, il va de soi que la réunion initialement prévue par la commission a été annulée, sans fixer de nouvelle date.

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Nous abordons cette troisième semaine dans un esprit constructif. Nous sommes heureux de participer au débat serein et approfondi au Parlement.

Discussion des articles (Suite)

Article 25 octies (Suite)

M. le président.  - Amendement n°424, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Pour les professions ne disposant pas d'un service de médecine du travail, ce service est mis en place trois mois après l'entrée en vigueur de la présente loi.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - La médecine du travail des employés de maison ne prend en charge que les personnes ayant un seul employeur.

Le dispositif de l'article 25 octies n'est pas satisfaisant pour nombre de professions, notamment parce que la fonction de médecin du travail sera confiée à des médecins de ville n'ayant pas obtenu le diplôme imposé par l'article L. 4623-2 du code du travail.

M. le président.  - Amendement n°1024, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Cet article organise des régimes dérogatoires en matière de médecine du travail offerte à certaines catégories de travailleurs : une négociation de branche pourrait la confier à des non spécialistes. C'est une régression inacceptable !

Un médecin du travail doit être titulaire d'un diplôme spécifique. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)

M. le président.  - Amendement n°1025, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Fischer.  - Nous sommes fondamentalement opposés à toutes les dérogations introduites par cet article. Il s'agit des intermittents du spectacle, des mannequins, de tous les salariés de particuliers employeurs, enfin des VRP.

La dérogation introduite organiserait un nivellement par le bas.

Nous manquons déjà de médecins généralistes, d'ailleurs non formés à la tâche très particulière de médecin du travail.

M. le président.  - Amendement n°1026, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - La loi sur la médecine du travail n'était pas assez respectée ; le Gouvernement propose un statut dérogatoire applicable à tous les salariés précaires.

L'adoption de l'article en ferait les victimes d'une médecine du travail au rabais.

M. le président.  - Amendement n°1027, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Avec cet article 4, les intermittents du spectacle deviendront bientôt des intermittents de la santé !

Les particuliers employeurs ne devraient-ils pas prendre en charge l'organisation d'une véritable médecine du travail pour leurs salariés ?

L'article permet le recours à des médecins de ville, au lieu de médecins du travail. Nous refusons de donner une base légale au moins-donnant social !

M. le président.  - Amendement n°1028, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il s'agit ici des mannequins qui ne sont pas seulement les top models faisant la une de la presse people. Leur travail est physiquement exigeant.

Aujourd'hui, la surveillance est effectuée tous les douze ou six mois, selon que le mannequin exerce auprès d'une ou plusieurs agences. Comme celles-ci sont tentées de leur imposer régimes et chirurgie esthétique, ce serait une très mauvaise idée que d'alléger cette surveillance.

M. le président.  - Amendement n°1029, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Odette Terrade.  - Il y a environ 6 000 médecins du travail pour 23 millions de salariés : c'est insuffisant. Outre une formation spécialisée commune, certains suivent en outre une formation complémentaire en ergonomie ou en toxicologie par exemple. Travaillant en équipe, les médecins font bénéficier leurs confrères de leur expérience, souvent en liaison avec d'autres professionnels de santé. Il serait donc absurde -pour des raisons purement comptables- de confier ce travail à d'autres praticiens. Le Gouvernement impose encore une fois sa logique à court terme, irresponsable puisque sans suivi, les pathologies vont s'installer et les dépenses de santé s'accroître.

M. le président.  - Amendement n°1030, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Les VRP subissent une souffrance au travail particulière, notamment en raison des déplacements. Aux risques physiques s'ajoutent des risques psychiques, notamment à cause de la prégnance des relations interindividuelles au travail. Face à ce mal-être, l'aide du médecin du travail est primordiale. Bien qu'indépendant de l'entreprise, ce médecin la connaît ; il peut suggérer des évolutions utiles pour les VRP.

Le dispositif dérogatoire introduit par cet alinéa méconnaît l'ensemble de ces besoins.

M. le président.  - Amendement n°1031, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - La moitié environ des médecins du travail auront pris leur retraite au cours des dix ans à venir. L'article 25 octies organise un dispositif dérogatoire, avec l'intervention de médecins libéraux n'ayant pas suivi la formation spécifique nécessaire. Vous optez pour la facilité au lieu du volontarisme qui mettrait l'accent sur les effectifs et la formation.

L'amendement n°529 n'est pas soutenu.

M. le président.  - Amendement n°1239, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 8

1° Première et deuxième phrases

Remplacer le mot :

convention

par le mot :

protocole

2° Deuxième phrase

Remplacer le mot :

conventions

par le mot :

protocoles

M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Je reprends les amendements Dériot, à commencer par celui-ci, qui est rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°1032, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Nous refusons cet article, car même la formation introduite par la commission ne ferait pas des généralistes des médecins du travail. Le patronat s'engouffrerait volontiers dans une brèche qui satisfait une demande présentée en 2009 par le Medef. Vous voulez externaliser en quelque sorte la fonction des médecins du travail en la confiant aux praticiens de ville, déjà en nombre insuffisant.

Combattre la pénibilité ne peut passer par le démantèlement de la médecine du travail.

M. le président.  - Amendement n°1033, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

Mme Odette Terrade.  - D'après cet alinéa, le Gouvernement pourrait fixer par décret des dispositions dérogatoires assurant la santé au travail de certaines catégories de salariés. Certes, la diversité des employeurs particuliers complique l'organisation d'un service de santé au travail, mais tout est question de volonté politique. Les salariés assurant les services aux personnes sont souvent des femmes, qui ont des conditions de travail physiquement pénibles et touchent de petits salaires. La visite chez le médecin du travail peut être leur seul accès à un suivi médical. Déjà 36 % des Français renoncent, faute de moyens, à des soins, y compris primaires.

L'amendement n°654 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°1240, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'évaluation du recours à des médecins non spécialisés en médecine du travail prévu au huitième alinéa de l'article L. 4625-2, dans un délai de cinq ans après l'entrée en vigueur de la présente loi.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet amendement invite le Gouvernement à remettre un rapport évaluant le recours à des médecins non spécialisés en médecine du travail pour le suivi médical de certaines catégories de travailleurs. Il dressera, au bout de cinq ans, un bilan de ce dispositif, indiquant son utilisation, les catégories de travailleurs visées et si cette modalité apparaît ou non efficace pour la protection des travailleurs.

Je ne voudrais pas oublier de demander au ministre où en sont les négociations sur la médecine du travail dans la fonction publique.

Les dérogations prévues par cet article sont nécessaires et la commission en a renforcé l'encadrement. Elle est donc défavorable à l'amendement n°424, ainsi qu'aux amendements n°s1024, 1025, 1026, 2017. L'amendement n°1028 concerne les mannequins, un sujet très important. Avis défavorable car nous avons imposé le suivi, par des pédiatres, des enfants mannequins. Même avis défavorable aux amendements n°s1029, 1030, 1031 -une formation est nécessaire !- 1032 et 1033.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Commençons par la médecine préventive dans le service public. L'accord sur la santé et la sécurité au travail a été signé par sept des huit organisations syndicales. Dans ce cadre, la prévention a été évoquée.

Il a été proposé de lever les obstacles au recrutement des médecins : désormais, il serait possible de travailler dans le secteur public et dans le privé, les médecins pourraient être contractuels. Enfin, la mutualisation des services de santé au travail pourrait être instituée par des employeurs publics.

J'en viens aux amendements : le Gouvernement repousse l'amendement n°424, les amendements n°s1024 à 1031. Il accepte l'amendement n°1239, repousse les amendements n°s1032 et 1033, et accepte l'amendement n°1240.

L'amendement n°424 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s1024, 1025 et 1026.

M. François Autain.  - L'amendement n°1027 dénonce la non-protection des salariés précaires. Seules des visites régulières permettent de diagnostiquer les risques très en amont. Or, l'article 25 octies atténue la surveillance médicale de salariés particulièrement exposés. Il s'agit des intermittents du spectacle, des mannequins, des VRP. J'en profite pour évoquer la situation de nos assistants parlementaires : pourquoi ne bénéficient-ils plus de la visite annuelle de la MSA ?

De façon générale, pourquoi les travailleurs précaires seraient-ils vus par des médecins généralistes plutôt que par des médecins du travail ? Quel mépris pour des métiers atypiques, mais magnifiques ! Avez-vous lu le livre de Claudie Gallay, L'amour. est une île ?

M. Gérard Longuet.  - C'est parfois un archipel. (Sourires)

M. Pierre Fauchon.  - Un volcan !

M. François Autain.  - Il montre des artistes de théâtre, au Festival d'Avignon, se débattant dans les difficultés de la vie quotidienne.

Nous n'acceptons pas qu'un accord de branche ou un décret prive ces personnes d'une véritable médecine du travail ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Pourquoi ne pas dédier un service spécifique de médecine du travail pour les intermittents du spectacle ? Leurs employeurs, parfois financièrement florissants, pourraient y contribuer. Il y a bien une agence dédiée de Pôle emploi. (Applaudissements sur les bancs CRC)

L'amendement n°1027 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s1028, 1029, 1030 et 1031.

Mme Annie David.  - L'amendement n°1239 est rédactionnel ? Vous remplacez « protocole » par « convention ». Par coordination, il faudrait donc changer le genre de l'article. Vous voyez que l'opposition ne nous empêche pas d'être constructifs...

M. Charles Revet.  - Et comment

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Je rectifie en conséquence l'amendement.

L'amendement n°1239 rectifié est adopté.

L'amendement n°1032 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°1033.

L'amendement n°1240 est adopté.

M. Guy Fischer.  - Vous voyez combien nous sommes attentifs au débat ! Mme David nous a manqué ce week-end ; elle retrouve sa place ! (Sourires et applaudissements) Nous ne pouvons accepter la substitution des médecins du travail par des généralistes...

M. Nicolas About.  - Ou des spécialistes en pédiatrie !

M. Guy Fischer.  - ... qui assument déjà 25 à 30 consultations par jour. Un médecin du travail doit disposer de temps face à chaque patient, pour déceler des maladies professionnelles qui n'apparaissent que peu à peu ; il lui faut plutôt une heure que dix minutes ! Vous présentez toujours le « moins pire » pour une avancée. Nous ne marchons pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC-SPG)

M. Jean Desessard.  - Et Mme David vous évite le « plus pire » ! (Sourires)

M. Jacky Le Menn.  - La médecine du travail ne peut être laissée à l'à-peu près. On ne peut l'abandonner à la misère. Nous manquons de médecins généralistes, certains quartiers des grandes villes et certaines zones rurales n'en ont plus. J'ai eu beaucoup de mal à organiser des cours pour que les médecins généralistes collent à l'évolution technique de la médecine. Comment voulez-vous qu'ils trouvent en plus le temps de s'occuper de médecine du travail, avec ses pathologies très spécifiques ?

Il faut rendre le métier plus attractif et en faire grossir la carotte financière. On a mis en place des ARS, il faut aller plus loin et repenser toute l'organisation médicale. Sans doute faudra-t-il y mettre un peu d'argent mais il y aura un considérable retour sur investissement : les employeurs ont intérêt à avoir des travailleurs en bonne santé. S'il faut leur forcer la main, faisons-le !

Mme Christiane Demontès.  - Cet article illustre bien ce qui nous sépare. Il est vrai que les quatre professions en cause n'ont pas encore accès à la médecine du travail. Mais plutôt que d'en déduire la nécessité de dérogations qui iront forcément, comme d'habitude, vers le bas, il faudrait penser une réorganisation de la médecine du travail qui permette de les y insérer dans le dispositif de droit commun.

A la demande du groupe CRC, l'article 25 octies est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 182
Contre 153

Le Sénat a adopté.

Article 25 nonies

M. le président.  - Amendement n°265, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

Supprimer cet article.

M. Jean Desessard.  - Le coeur du problème de la médecine du travail est sa dépendance envers l'employeur. Le nombre de médecins diminue, on les remplace par des infirmiers et des ergonomes ; vous allez de plus en plus vers une médecine utilitariste, chargée de remettre au plus tôt les salariés au boulot ! En diminuant le nombre de médecins du travail, vous diminuez certes la quantité des paperasses mais dans l'intérêt de qui ?

M. le président.  - Amendement identique n°425, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste et apparentés.

M. Jacky Le Menn.  - Cet article prévoit une disposition courante... mais en matière commerciale ! L'introduire ici est révélateur de votre état d'esprit et de votre volonté de faire de la médecine du travail un service d'aide à l'employeur. Ce n'est plus cette médecine qui est organisée mais le marché de la prévention et de la protection des salariés ! On est ouvertement dans l'ère de la marchandisation de la santé, dans la même logique ultralibérale que la loi HPSCT.

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Par sa réécriture, la commission est allée au-devant de vos préventions. Défavorable à ces amendements.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Il ne faut pas charger d'un tel poids idéologique cette transposition d'un article du code du commerce. Ce n'est pas au « président du conseil d'administration » que la convention est soumise, mais au conseil lui-même, qui est un organisme paritaire.

M. Jean Desessard.  - Avec voix prépondérante du président !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Vous êtes mal placé pour nous reprocher un prétendu dogmatisme, vous qui êtes en mission, monsieur le ministre. Votre habileté ne suffira pas à déjouer notre attention.

La médecine du travail gêne le patronat. Comme les organisations professionnelles ne veulent pas de la réforme voulue par lui, vous passez par votre majorité parlementaire pour la mettre en oeuvre par petites touches. La santé au travail devient un marché où il y a de l'argent à faire... Le pragmatisme que vous revendiquez cache mal votre idéologie. Les Français l'ont bien compris.

M. Jean Desessard.  - Le président du conseil d'administration a voix prépondérante : alinéa 6.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Comme partout !

Les amendements identiques n°s265 et 425 ne sont pas adoptés.

L'article 25 nonies est adopté.

Article 25 decies

M. le président.  - Amendement n°426, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

qui travaillera sous l'autorité d'un médecin du travail du service de santé au travail possédant une expérience minimale de dix années.

Mme Gisèle Printz.  - Il s'agit en fait, pour vous, de gérer la pénurie sans tenter d'y remédier. Quelque 4 000 médecins du travail sont proches de l'âge de la retraite -soit plus de la moitié. Comment seront-ils remplacés ?

Le recours à un interne n'est pas absurde. Encore faut-il que ce soit considéré comme une étape de sa formation grâce au tutorat exercé par un confrère expérimenté.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Je propose de sous-amender cet amendement intéressant pour remplacer « possédant une expérience minimale de dix années » par « expérimenté ».

M. Jean-Pierre Godefroy.  - D'accord.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Favorable au sous-amendement n°1241, qui évite un effet de seuil, et à l'amendement ainsi modifié.

Le sous-amendement n°1241 est adopté, ainsi que l'amendement n°426, sous-amendé.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Cet article règle-t-il bien la situation des internes, qui ont un statut intermédiaire entre étudiants et salariés ? La commission des affaires sociales s'est inquiétée de la question du mi-temps thérapeutique, considéré du point de vue de leur retraite.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - La réponse est positive.

L'article 25 decies, modifié, est adopté.

Article 25 undecies

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet article est court, mais soulève de nombreuses passions. Ou bien il est inutile, vu l'article 95 du code de déontologie : ou bien il menace l'indépendance des médecins du travail, qui sont des salariés protégés. Faut-il croire qu'il y aurait des tentations ? Votre réforme est mal conçue. Les médecins du travail sont dépossédés de leurs prérogatives et deviennent de simples exécutants. Nous craignons pour leur indépendance.

Ils subissent des pressions importantes de la part des employeurs. On l'a vu hier dans le cadre de la mission sur l'amiante ou plus récemment de celle sur le mal-être au travail. Nos interlocuteurs nous ont décrit les manoeuvres d'intimidation qu'ils avaient subies. Il faut donc renforcer leur indépendance. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°427, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Christiane Demontès.  - Schubert prenait encore des leçons de contrepoint quelques jours avant sa mort... Dans une perspective moins artistique mais non dénuée d'importance, nous nous référons au code du travail et plus précisément à ses articles L. 4622-2, L. 4622-1 et L. 4622-6. Tout est en place pour opérer le glissement auquel se livre le projet de loi.

Cet article est une feinte : l'édifice constitué par ses deux phrases ne tiendra pas longtemps -leurs rédacteurs le savent. Il arrivera forcément un moment où le projet de service entrera en conflit avec le réel, comme le médecin du travail avec le conseil d'administration. Se retrouvera-t-on devant les prud'hommes ?

M. le président.  - Amendement n°1217, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Alinéa 1

Rédiger comme suit cet alinéa :

La section 2 du chapitre II du titre II du livre VI de la quatrième partie du code du travail est complétée par un article L. 4622-14 ainsi rédigé :

II. - Alinéa 2

Remplacer la référence :

L. 4622-13

par la référence :

L. 4622-14

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Correction d'une erreur de référence. Défavorable à l'amendement n°427.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même avis que la commission.

L'amendement n°427 n'est pas adopté.

L'amendement n°1217, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°428, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, première phrase

Supprimer cette phrase.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Au lieu d'un directeur gestionnaire, vous voulez un directeur organisateur. Les modifications apportées par la commission -paritarisme, transparence du fonctionnement du conseil d'administration- n'y changent rien au fond.

L'indépendance du directeur du service ne sera même pas garantie. Et c'est lui qui devra garantir celle du médecin du travail... C'est une absurdité. Et comment demander à un salarié de garantir l'indépendance d'un autre salarié ? Seule la loi peut garantir une indépendance ! L'objectif est bien que plus personne ne soit indépendant...

M. le président.  - Amendement n°1242, présenté par M. Dériot.

Alinéa 2, première phrase 

Remplacer le mot :

organise,

par les mots :

met en oeuvre, en lien avec l'équipe pluridisciplinaire de santé au travail et

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - La commission a repris cet amendement de M. Dériot, qui marque bien les responsabilités.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Nous ne remettons pas en cause les articles garantissant l'indépendance ; nous ajoutons une garantie !

Défavorable à l'amendement n°428 et favorable à l'amendement n°1242.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Le code du travail est clair. L'ajout apporté par cet article va compliquer les choses et le président du conseil d'administration pourra se dédouaner de sa responsabilité, grâce à la présence d'un filtre, ce salarié chargé de garantir une indépendance qu'il ne peut faire appliquer. Je suis persuadé qu'on va au devant de contentieux importants.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le ministre fait preuve d'un grand talent de prestidigitateur. Les syndicats ne veulent pas de la réforme de la médecine du travail voulue par le patronat, on l'insère ici en faisant croire qu'indépendance du médecin du travail et garantie apportée par le directeur du service sont équivalentes. Va-t-on écrire que le ministre de la justice garantit l'indépendance des magistrats du parquet ?

Votre talent est grand, mais vous ne nous ferez pas prendre des vessies pour des lanternes !

Mme Isabelle Debré.  - Nous n'essayons même pas !

L'amendement n°428 n'est pas adopté.

L'amendement n°1242 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°429, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Christiane Demontès.  - Amendement de repli. Dans son communiqué du 25 juin 2010, le Conseil de l'Ordre des médecins a insisté sur l'importance qu'il attribue à l'indépendance des médecins du travail et souhaité que le directeur du SST ne joue qu'un rôle de coordinateur ou de facilitateur.

M. le président.  - Amendement n°616 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf, Beaumont et Darniche.

Alinéa 2, seconde phrase

Après le mot :

indépendance

insérer le mot :

technique

M. Philippe Dominati.  - C'est une façon de rappeler le lien contractuel avec l'employeur.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Heureusement que M. Dominati met les choses au point !

M. le président.  - Amendement n°1243, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et des membres de l'équipe pluridisciplinaire mentionnés à l'article L. 4622-8

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Défavorable aux amendements n°s429 et 616 rectifié. Nous reprenons l'amendement Dériot : il paraîtrait anormal que les membres non médecins de l'équipe pluridisciplinaire ne bénéficient d'aucune garantie d'indépendance, ce qui affaiblit leur crédibilité envers les salariés. C'est une des recommandations de la mission sur le mal-être au travail.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement n°429 rectifié et à l'amendement n°616 rectifié -la précision est inutile. Favorable à l'amendement°1243.

L'amendement n°429 n'est pas adopté.

L'amendement n°616 rectifié est retiré.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il était trop explicite !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Vous nous avez refusé des amendements qui allaient dans le même sens que l'amendement de M. Dériot que vous reprenez à votre compte ! En réalité, vous assimilez le médecin du travail à des personnes qui n'ont aucune garantie d'indépendance. La bonne volonté de M. Dériot ne pourrait se traduire par un progrès que si l'on précisait que l'équipe pluridisciplinaire a les mêmes garanties d'indépendance que le médecin du travail -ce qui était le sens de nos amendements que vous avez refusés lors de la précédente séance.

Mme Annie David.  - En effet, nous avons demandé que les membres de l'équipe pluridisciplinaire bénéficient de l'indépendance accordée au médecin du travail ; votre rédaction ne va pas dans ce sens, puisqu'elle organise une régression pour les médecins du travail.

La rédaction proposée par M. Dominati était claire et explicite sur vos intentions !

Nous regrettons le rejet de nos amendements tendant à assurer l'indépendance de l'équipe pluridisciplinaire, mais vous pourriez profiter de la seconde délibération pour les accepter.

L'amendement n°1243 est adopté.

Mme Raymonde Le Texier.  - L'article 25 undecies ne s'est guère inspiré du rapport remis le 25 juillet par la mission « Mal-être au travail ».

M. Guy Fischer.  - Ils n'en veulent pas.

Mme Raymonde Le Texier.  - Ce rapport proposait notamment d'assurer l'indépendance des services de médecine au travail. Il faut combattre la pénurie qui frappe cette spécialité, mais vous préférez lui porter un coup de grâce avec l'article 25 undecies : c'est le directeur du service, nommé par l'employeur, qui garantirait l'indépendance des praticiens ! L'essence même du médecin du travail est en train de disparaître.

En novembre 2007, 70 services du travail avaient la même adresse que le Medef ! Au lieu d'un système de protection, vous nous proposez un système d'influence.

Nous voterons contre l'article. (Applaudissements à gauche)

M. François Autain.  - J'ai déjà exprimé mon hostilité à l'article 25 decies. Le présent article supprime l'indépendance du médecin du travail, puisque le directeur sera sous l'autorité du chef d'entreprise. Vous changez radicalement le statut de la médecine du travail, au détriment des salariés.

Nous voterons contre l'article. (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe socialiste, l'article 25 undecies, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 182
Contre 153

Le Sénat a adopté.

Article 25 duodecies

M. Guy Fischer.  - Nous continuons l'examen des dispositifs dérogatoires. Il s'agit d'une médecine du travail au petit pied !

Avec ce texte, vous refusez de créer les conditions d'un dialogue social performant et utile. A qui ferez-vous croire que de prétendues difficultés techniques imposent le recours au décret ?

Pour les moissons, les vendanges, la cueillette des pommes dans le Finistère sud ou celle des olives en Basse-Provence, l'agriculture utilise des travailleurs saisonniers. La MSA est organisée pour les prendre en charge, mais cela suppose que les employeurs mettent au pot et attendent les résultats de la visite d'embauche. Il en va de même pour le tourisme : les employeurs d'une station donnée pourraient être mis à contribution pour installer un service de médecine du travail dans les services de Pôle Emploi, plutôt que dans ceux du Medef et de la CGPME !

Face à la pénurie, vous sacrifiez des millions de salariés, souvent jeunes, au principe de réalité, car le patronat accepte la médecine du travail, sous réserve qu'elle ne coûte pas plus cher qu'avant.

Nous sommes fermement opposés à l'article ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. le président.  - Amendement n°1034, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Annie David.  - Les médecins du travail doivent éviter l'altération de la santé physique et mentale du travail, mais ils ne sont que 7 500... Face à cette pénurie, le Gouvernement propose de recourir aux médecins de ville pour toute une série de professions.

A l'extrême rigueur, on pourrait accepter un dispositif temporaire, à condition d'organiser simultanément une montée en charge de la médecine du travail. Nul besoin d'être fin analyste pour comprendre que le Gouvernement est pris d'une névrose obsessionnelle, tant il veut comprimer les dépenses publiques. Il va jusqu'à commettre des actes incohérents : s'est-il interrogé sur le coût des dispositions dérogatoires ? Non ! Dommage que M. Vasselle n'aie pas posé plus de questions sur ce sujet...(Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1034, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1035, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Odette Terrade.  - Cet article institue le moins-disant social ; c'est un inventaire à la Prévert énumérant les dérogations.

Les employeurs saisonniers des stations touristiques pourraient être mis à contribution, de même que les employeurs de salariés travaillant à une certaine distance.

De fausses raisons prétendument pratiques sous-tendent ce moins-disant social.

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Défavorable.

Mme Odette Terrade.  - Vous invoquez le bien-être individuel des travailleurs pour instituer des régimes dérogatoires favorables aux employeurs.

La médecine du travail mérite mieux que vos approximations. Le Medef veut contrôler les services de médecine du travail, ce que favorise votre rédaction renvoyant au décret pour le satisfaire.

L'amendement n°1035 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1036, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Ajouté par l'Assemblée nationale, cet article autorise des dérogations réglementaires pour niveler prestations et surveillance par le bas.

L'amendement n°1036, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1037, présenté par Mme David et les membres du groupe  CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Odette Terrade.  - Nous refusons les dérogations qui sont autant de nivellements par le bas. Nos conceptions sont diamétralement opposées : vous prétendez organiser un progrès ; nous voulons que tous les salariés bénéficient du même régime.

L'amendement n°1037, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1038, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Fischer.  - Les réponses du rapporteur et du Gouvernement sont d'un laconisme désespérant ! Cet article a été voté dans la précipitation par l'Assemblée nationale...

Mme Catherine Procaccia.  - Pas ici !

M. Guy Fischer.  - ... dans des conditions ne permettant pas un débat approfondi, puisque le Gouvernement a déposé ses amendements en séance, mettant les députés devant le fait accompli.

Nous dénonçons l'effet d'annonce de l'article, dont l'alinéa 4 renvoie à un décret d'application. Nous ne sommes pas dupes ni sur la forme, puisque nombre de décrets ne paraissent jamais, ni sur le fond : qui paiera ? La sécurité sociale ou le patronat ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même avis. Je ne voudrais pas laisser croire à M. Fischer que nous n'aurions pas d'arguments. Vos amendements sont répétitifs ; nous avons au moins un parallélisme des formes ! (Sourires) Pas de concertation ? Les rapports sur le sujet sont antérieurs à 2008 et nombreux, de nombreuses réunions de concertation -24 en 2009- ont eu lieu. Si c'est de la précipitation, j'en perds mon latin.

Ce n'est pas en mettant tout le monde sous la même toise que la santé sera mieux protégée : des adaptations peuvent être nécessaires pour mieux protéger certains salariés ; on peut ainsi organiser le suivi des salariés de sous-traitants par le service de donneur d'ordre. Ce que vous appelez dérogation est à nos yeux adaptation à des situations particulières. Il n'y a aucune arrière-pensée : ne nous faites pas de procès d'intention !

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je voterai l'amendement.

Les modifications introduites à l'Assemblée nationale ne vont jamais dans le bon sens. Je citerai l'absorption de l'Afsset par l'Afssa, bien plus complaisante. Vous avez fait allusion à des rapports : vous n'avez pas parlé de la proposition de loi de Mme Demessine que le Sénat a examinée ; tant Mme Desmarescaux pour la commission que Mme Létard pour le Gouvernement étaient favorables à l'indépendance de la médecine du travail.

Vous dites que l'uniformisation est parfois inadaptée : soit, mais si des ajustements sont nécessaires, pourquoi ne pas les indiquer dans la loi ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Parce que le domaine est réglementaire.

M. Guy Fischer.  - Nous ne pourrons jamais nous rapprocher du Gouvernement sur ces questions, comme sur bien d'autres. Il s'agit ici de salariés précaires, soumis à une intolérable inégalité de traitement, que vous consacrez. La loi de 1946 était proprement révolutionnaire, mais le Medef et la CGPME sont ultra-combatifs contre la protection des salariés.

Le collectif « Sauvons la médecine du travail » a dénoncé une pénurie organisée : il y a aujourd'hui 7 000 médecins du travail, ils seront 1 000 dans cinq ans ! Déjà certaines visites périodiques sont assurées par des infirmières. On assiste en outre à un détournement consternant des missions confiées aux médecins du travail. Ceux-ci craignent de ne plus pouvoir, demain, intervenir sur les postes de travail. Ce que vous proposez revient à confier les campagnes contre le tabagisme aux fabricants de cigarettes ou à confier au renard la clé du poulailler ! (Exclamations)

M. Nicolas About.  - Ou le grand capital au parti communiste !

M. Guy Fischer.  - Nous avons eu, avec les organisations professionnelles, un dialogue fructueux : nous vous en faisons profiter aujourd'hui.

L'amendement n°1038 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1039, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Nos explications peuvent vous sembler répétitives, mais des millions de salariés sont concernés.

Pendant les missions temporaires, l'entreprise utilisatrice est responsable des conditions de travail, mais l'examen d'embauche est effectué par le médecin de l'entreprise de travail temporaire.

Qu'arrivera-t-il demain avec cet article ? L'entreprise utilisatrice devra-t-elle encore informer l'entreprise d'intérim quant aux caractéristiques du poste de travail ? La médecine du travail n'est pas seulement chargée du contrôle individuel du salarié, mais aussi de la surveillance collective.

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Avis défavorable. Les salariés temporaires sont concernés par l'accord de 2002, repris dans l'alinéa 5. Votre amendement supprimerait la transposition de cet accord.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°1039 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1040, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les principes de 2002 sont de moins en moins respectés, au point de compromettre le suivi des salariés par la médecine du travail. Avec l'appel aux médecins de ville, vous prétendez étendre la médecine du travail à budget constant.

Nous continuerons à expliquer la réalité de votre projet, ne vous en déplaise !

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Une médecine du travail est enfin organisée pour des stagiaires de la formation professionnelle. Défavorable.

L'amendement n°1040, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1041, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Les coûts excessifs sont trop souvent opposés aux demandes des salariés pour améliorer la prévention : le patronat répond toujours que c'est trop cher ! La prévention a un coût, mais la mort d'un salarié sur un chantier en a aussi un ! Et les 150 000 morts de l'amiante aussi ont un coût.

Les médecins de ville n'ont pas les mêmes connaissances que les médecins du travail expérimentés. A l'heure où l'exigence de rentabilité alimente le stress, nous refusons tout nivellement par le bas.

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - Avis défavorable. Ces dispositions sont applicables par voie réglementaire.

L'amendement n°1041, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1042, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Cet alinéa concerne les salariés exécutant le contrat de travail dans une entreprise autre que celle qui les emploie. Ils ne doivent pas relever d'une médecine au rabais !

Pour être efficace, le médecin du travail d'une entreprise doit suivre tous les salariés. Avec votre texte, les personnes mises à disposition d'une autre entreprise resteront au milieu du gué.

A l'heure où les exigences inhumaines de productivité provoquent maladies cardiovasculaires et suicides, est-il opportun d'affaiblir la médecine du travail ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur  - La mesure relève de la partie réglementaire du code. Avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.  - Avis défavorable.

M. François Autain.  - L'article 25 duodecies est inacceptable, car il organise la gestion de la pénurie.

La pénibilité au travail est une notion collective : c'et un corps de métier dans son ensemble qui est exposé à la violence au travail.

La réalité, c'est une diminution constante des moyens dont dispose la médecine du travail. Cet article n'est qu'un effet d'annonce. Comment comptez-vous faire en sorte que ces salariés bénéficient vraiment des services d'un médecin du travail ?

L'amendement n°1042 n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

La séance reprend à 15 heures.

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - La commission a quatre amendements du Gouvernement à examiner ; je propose qu'elle le fasse à la suspension, avant le dîner.

Mme Annie David.  - Ne peut-on les connaître ?

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Ils sont en ligne depuis trois jours.

M. Michel Billout.  - S'il se confirme que le Gouvernement tente de remettre en cause l'exercice du droit de grève, nous demandons l'interruption de nos travaux. Hier matin, le préfet de Seine-et-Marne a réquisitionné le personnel de la raffinerie Total de Grandpuits, alors que les critères de sécurité ou d'urgence, mentionnés à l'article L.22-15-1 du code général des collectivités territoriales ne sont pas réunis. Je suis conscient des difficultés de nos concitoyens...

M. Charles Revet.  - Vous en êtes cause !

M. Michel Billout.  - ... face aux pénuries de carburant ; mais le responsable en est le recours à la force et l'autisme du Gouvernement ! (Protestations à droite)

M. le président.  - Ceci n'est pas un rappel au Règlement !

M. Michel Billout.  - L'exercice du droit de grève a valeur constitutionnelle ! (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)

M. le président.  - Amendement n°1043, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Cet alinéa concerne ceux qui ont recours au travail détaché : vous rompez en leur défaveur le principe de l'égalité d'accès à la médecine du travail. Les salariés isolés qui ne seront plus suivis médicalement  sont exposés au harcèlement moral et à des troubles psychosociaux -qui pourraient devenir un nouveau drame comparable en gravité à celui de l'amiante.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet amendement supprimerait toutes les dispositions réglementaires favorables à ces travailleurs ! Contre l'amendement.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°1043 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1044, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Fischer.  - Les régimes dérogatoires abaissent toujours les droits existants. Vous voulez remplacer la notion de pénibilité collective par celle d'invalidité individuelle ; nous ne pouvons nous en contenter.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Mêmes arguments que précédemment.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1044 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1045, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Comment voir là une avancée considérable du droit du travail ? On le peut d'autant moins que cet article renvoie à des décrets, dont on ne sait rien.

S'agissant des saisonniers, il faudrait réfléchir aux moyens de les rapprocher de la médecine du travail. Ce n'est pas la voie que vous empruntez.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Même argument que précédemment.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°1045 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°430, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Avant l'alinéa 12

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Ces travailleurs bénéficient d'une protection égale à celle des autres travailleurs.

« Des règles et modalités de surveillance adaptées ne peuvent avoir pour effet de modifier la périodicité des examens médicaux définie par le présent code. »

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous sommes réservés sur cet article même si nous voyons bien la difficulté concrète qu'il y a à rapprocher ces travailleurs de la médecine du travail. Comme nous ne voulons pas être naïfs, nous déposons cet amendement : ces salariés migrants et précarisés doivent être assurés d'une protection égale à celle des autres travailleurs.

Cet amendement est compatible avec le plan santé au travail.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La première phrase manque de précision... Sagesse.

M. Éric Woerth, ministre.  - Plutôt favorable. La réticence viendrait de la rigidité sur le nombre exact de visites. Or on ne peut non plus afficher un objectif inférieur...

Ce que nous voulons, c'est que tous ces travailleurs accèdent à la médecine du travail.

Mme Annie David.  - Comment le ministre du travail peut-il dire froidement que des centaines de milliers de salariés n'ont pas accès à la médecine du travail ? C'est très grave !

M. Charles Revet.  - Vous n'avez rien fait avant !

M. Éric Woerth, ministre.  - Je ne parle ni froidement, ni chaudement : je prends en compte la réalité que nous constatons et nous essayons d'améliorer les choses.

L'amendement n°430 est adopté.

M. le président.  - A l'unanimité !

Amendement n°432, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

M. Jacky Le Menn.  - Les travailleurs saisonniers sont souvent embauchés à plusieurs reprises par le même employeur. Ils doivent en quelques semaines lui apporter l'essentiel de son chiffre d'affaires annuel, dans des conditions de travail et d'accueil dérogatoires du droit commun et souvent indécentes.

M. le président.  - Amendement identique n°1046, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Annie David.  - J'ajoute que cet alinéa nous paraît particulièrement provocateur.

Le propre du travail saisonnier, c'est sa précarité. A celle du statut, vous ajoutez celle de la médecine. Il faudrait que le statut du travail saisonnier fût amélioré sensiblement.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet article donne la chance de rendre possibles des adaptations locales, négociées par les partenaires sociaux.

M. Éric Woerth, ministre.  - Également défavorable.

Les amendements identiques n°s432 et 1046 ne sont pas adoptés.

Mme Annie David.  - Cet article 25 duodecies prévoit de nouvelles dérogations qui nous font douter de votre volonté de rapprocher les salariés des médecins du travail, lesquels ont déjà trop de salariés en charge. Vu leur âge moyen supérieur à 50 ans, il y a un risque de disparition de la profession...

Je regrette que M. Vasselle n'ait pas questionné plus avant le Gouvernement sur le coût du transfert que vous voulez opérer de la médecine du travail vers les médecins. Quand Mme Parisot fronce les sourcils, vous obtempérez !

M. René-Pierre Signé.  - Le Gouvernement fait une confusion, qui n'est pas innocente, entre pénibilité et incapacité. Des études ont montré que l'état de santé des travailleurs en fin de carrière dépendait largement de la pénibilité de leur tâche. Celle-ci n'est pas forcément cause d'invalidité mais elle en comporte le risque.

La pénibilité objective justifierait une majoration des trimestres de cotisation. Concernant environ 30 000 personnes, une telle disposition ne coûterait pas très cher. Mais ni le Gouvernement, ni le patronat ne veulent en reconnaître la réalité.

La remise en cause des médecins du travail aura aussi des effets sur la qualité de la prévention. Ce refus de prendre en compte la pénibilité est une des injustices majeures que comporte ce projet de loi.

M. Guy Fischer.  - Dans cette réforme hâtive, bâclée, introduite à la hussarde, nous ne pouvons nous retrouver. Les parcours professionnels atypiques sont souvent associés à un état de santé dégradé. Je sais que les souffrances diverses sont associées aux conditions de travail. La visite du médecin du travail est souvent la seule visite médicale de l'année. Les employeurs dédaignent le code du travail et recrutent sur un marché mondial du travail où la protection des salariés n'est pas une préoccupation première. Pourquoi avoir obstinément refusé notre proposition de loi sur le mal-être au travail ? Nous y inscrivions l'activité spécifique de la médecine du travail dans le champ de la prévention.

A la demande du groupe CRC, l'article 25 duodecies est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

Article 25 terdecies

M. le président.  - Je crois bien que c'est la première fois que nous avons un article ainsi numéroté !

Amendement n°433, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Cet amendement de cohérence, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°517 rectifié, présenté par MM. Pointereau, César, Cornu, Doublet, Laurent et Revet.

Avant l'alinéa 1, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Les dispositions de l'article L. 4622-9 du code du travail ne s'appliquent pas aux catégories de travailleurs dont les employeurs sont mentionnés à l'article L. 717-1 du code rural et de la pêche maritime. »

M. Charles Revet.  - Les dispositions de l'article L. 4622-9 n'ont pas lieu de s'appliquer aux salariés du particulier employeur et aux voyageurs, représentants et placiers lorsqu'ils relèvent des professions agricoles, car ils bénéficient déjà de la surveillance médicale du travail assurée par les services de santé au travail des caisses de mutualité sociale agricole.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Sagesse pour cette disposition de bon sens.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable.

Mme Annie David.  - Fort bien pour ces salariés mais ceux, comparables, qui n'appartiennent pas au secteur agricole vont être exclus de la santé au travail.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ces services existent dans le cadre de la MSA.

M. Éric Woerth, ministre.  - C'est juste un transfert juridique, que nous confirmons.

L'amendement n°517 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°1216, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Alinéa 3

Remplacer la référence :

L. 4622-8

par la référence :

L. 4622-15

II. - Alinéa 4

Remplacer la référence :

L. 4622-13

par la référence :

L. 4622-14

L' amendement de coordination n°1216, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 25 terdecies est adopté.

L'article 26 demeure supprimé, de même que les articles 26 bis, 26 ter, 26 quater, 27 et 27 bis A.

Article 27 bis

M. le président.  - Amendement n°1047, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Annie David.  - Nous sommes contre le fait que le salarié soit encouragé à se servir de son compte épargne temps pour cesser, de manière progressive, son activité. Ce n'est pas conforme à la loi de 2008.

Encourager une retraite par capitalisation individuelle va contre le principe du temps de repos dû au salarié : un repos bon pour la santé et bon aussi pour la productivité, ce que les patrons ne comprennent même pas !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet article est tout à fait compatible avec l'esprit de la loi.

M. Charles Revet.  - Bien sûr !

L'amendement n°1047, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 27 bis est adopté.

M. le président.  - La Conférence des Présidents va se réunir à 16 heures. Souhaitez-vous que nous continuions nos débats ou que nous suspendions ? (Exclamations à droite)

Mme Raymonde Le Texier.  - Je comprends que nos collègues de la majorité ne veuillent pas d'une suspension ; pour nous, qui présentons des amendements et argumentons, nous la souhaitons.

Mme Annie David.  - Nous souhaitons que tous les présidents puissent participer à cette conférence, à commencer par le président Fischer !

M. Charles Revet.  - Il est parti !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - La suspension de séance aurait un avantage : nous pourrions étudier dès maintenant les quatre amendements du Gouvernement que Mme Dini a évoqués tout à l'heure.

M. David Assouline.  - Il ne devrait quand même pas y avoir un tel clivage sur ce sujet. Ceux qui viennent en tour de garde ne veulent pas le passer en suspension de séance. Pour ceux qui travaillent assidument en séance, une telle suspension n'est pas superflue.

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Les amendements du Gouvernement sont en ligne depuis samedi... Il serait raisonnable de suspendre la séance.

M. François Autain.  - Il est exceptionnel qu'on organise de façon impromptue une Conférence des Présidents pendant une séance. A circonstance exceptionnelle, mesure exceptionnelle...

M. Gérard Longuet.  - Samedi soir, nous étions à 92 heures de débat, dont 81 heures à l'examen des articles, et 44,8 % du temps de parole a été utilisé par le groupe communiste et 39 % par le groupe socialiste, l'UMP ayant renoncé pour l'essentiel à son temps de parole. Je propose une brève suspension de séance, avant que vous ne continuiez à parler et nous à vous entendre en silence, sauf quand l'exaspération nous pousse à répondre !

La séance, suspendue à 16 heures, reprend à 16 heures 40.

M. le président.  - La Conférence des Présidents se poursuit.

Article 27 ter AA

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet article incite les entreprises à prévenir la pénibilité au travail. Ce n'est pas inintéressant, mais ne concerne que des entreprises de plus de 50 salariés alors que la moitié des salariés français travaillent dans une entreprise en employant moins. S'ajoute l'intervention d'un décret. Je déplore également le montant peu dissuasif de la sanction prévue, qui pourra encore être réduite si l'entreprise fait des efforts d prévention. Dommage que l'article en reste à une obligation de moyens, non de résultats. Et l'accord visé peut l'être au niveau de la branche : le contrôle en sera mois facile.

Enfin, la référence au plan de 2002 en faveur de l'emploi des seniors laisse rêveur, car on n'en voit guère la concrétisation dans les chiffres du chômage : selon l'Unedic, le chômage des seniors a augmenté de 16,6 % entre août 2009 et août 2010. Si on escompte le même succès, il y a de quoi être dubitatif.

Mme Annie David.  - M. Fischer voulait s'exprimer sur cet article. Je regrette que la tenue de la Conférence des Présidents simultanément à nos travaux l'empêche de le faire. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Il aura droit à un petit supplément, rassurez-vous !

Mme Annie David.  - Je partage l'avis de M. Godefroy. Cet article met en quelque sorte en musique le très injuste article 25, qui ne prend pas en compte la pénibilité différée, qui exclut notamment les victimes de troubles psychosociaux, qui refuse de considérer les risques par métier.

Il exclut en outre les 4 millions de salariés travaillant dans les TPE et PME ; le Gouvernement en fait des salariés de seconde zone.

Quant à la pénalité de 1 %, déjà peu importante, elle pourra être modulée par l'autorité administrative en fonction des efforts de prévention faits par l'entreprise. Le plan d'action sera décidé unilatéralement par l'employeur lorsque les partenaires sociaux auront échoué à trouver un accord. J'ajoute que les salariés exposés à l'amiante sont très en colère, car l'exposition à l'amiante ne justifierait qu'un taux d'invalidité inférieur à 10 %.

M. Éric Woerth, ministre.  - Vous ne pouvez pas dire ça !

M. Michel Teston.  - Selon le Robert, est pénible ce qui donne de la peine ou de la fatigue, ce qui se fait avec difficulté ou est difficile moralement. Et est invalide celui qui n'est plus en état de mener une vie active ou de travailler du fait d'une mauvaise santé ou de blessures. Voilà qui marque clairement la différence entre pénibilité et invalidité. Les partenaires sociaux proposent leur définition de la pénibilité au travail : elle résulte de sollicitations physiques ou psychiques qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles susceptibles d'influer sur l'espérance de vie des salariés. On sait que l'espérance de vie d'un ouvrier est inférieure de plusieurs années à celle d'un cadre et l'écart est encore plus grand si l'on considère la vie en bonne santé.

Or, le Gouvernement indemnise un dommage sans prendre en compte le vécu des intéressés. En 2003, l'enquête « Surveillance médicale des risques professionnels » a montré que 56 % des salariés français étaient exposés à au moins une source de pénibilité -sans que cela se traduise nécessairement par une invalidité. Nous proposons que les salariés se voient appliquer des majorations d'annuités en fonction de critères tels que travail de nuit, travail posté ou port répété de charges lourdes.

M. le président.  - Amendement n°1048, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Après les mots :

du même code employant au moins

remplacer les mots :

cinquante salariés

par les mots :

onze salariés

M. François Autain.  - Selon le représentant de la CGT à l'assemblée plénière de 2005 du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, 80 % des salariés exposés à des risques professionnels travaillent dans des entreprises de moins de dix salariés.

Selon le rapport du 27 mai 2008, publié par l'Assemblée nationale, les petites entreprises posent un problème particulier, car la prévention de la pénibilité n'est guère assurée. En outre, ces entreprises sont particulièrement nombreuses dans les secteurs caractérisés par un travail pénible.

Notre amendement propose que les PME de 11 à 49 salariés doivent, elles aussi, conclure des accords en vue de réduire la pénibilité. Nous reprenons le même seuil que pour la présence d'une section syndicale.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La prévention de la pénibilité passe assurément par une réflexion sur le travail. L'article 27 ter AA devrait inciter les entreprises concernées à l'action. Nous veillerons à son application.

L'expérience montre l'efficacité du dispositif tendant à augmenter l'emploi des seniors.

En revanche, l'amendement n°1048 n'est pas réaliste.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

Mme Annie David.  - Il s'agit de 4 millions de salariés ! Un texte sur le dialogue social est censé les concerner...

On sait que les salariés subissent souvent des conditions de travail très dures. Vous prétendez ériger la santé au travail en priorité, mais vous refusez de prendre en considération 4 millions de salariés. Il est vrai que vous n'êtes pas dérangés par les perspectives de voir un maçon travailler jusqu'à 67 ans !

Vous ne donnez pas une belle image du Parlement ! Cela me met en colère ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Éric Woerth, ministre.  - Ne vous mettez pas en colère ! Je vous entends mais il est rare qu'un maçon prenne aujourd'hui sa retraite à 65 ans, car sa vie professionnelle commence tôt : le dispositif des carrières longues s'applique. En outre, il a généralement tous ses trimestres. Ne cédons pas aux fantasmes !

L'âge de 67 ans permet à ceux qui n'ont pas tous leurs trimestres de prendre leur retraite à taux plein, c'est la retraite à la carte.

Pour le reste, commençons par développer le dialogue social. Celui-ci doit se dérouler sous des formes adaptées dans les petites entreprises.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - J'admire votre raisonnement, monsieur le ministre : avec votre réforme, un maçon devra bien attendre deux ans de plus pour prendre sa retraite à 62 ans.

D'autre part, l'amendement de notre collègue est parfaitement réaliste, car le code du travail n'est qu'approximativement appliqué dans les petites entreprises.

Les salariés des PME ont particulièrement besoin du dispositif interdit par cet article.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Les sous-traitants ne comportent souvent qu'un très faible nombre de salariés : je le vois aussi dans le nucléaire. Votre dispositif les écarte des accords de prévention.

M. Éric Woerth, ministre.  - N'oubliez pas que les accords de branche s'appliquent aux petites entreprises !

M. François Autain.  - Pour ne pas allonger les débats, je renonce à mon temps de parole. (Sourires)

L'amendement n°1048 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1049, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Après les mots :

dont l'effectif comprend au moins

remplacer les mots :

cinquante salariés

par les mots :

onze salariés

M. Jean-Claude Danglot.  - Par cohérence, nous proposons de reprendre le seuil de onze salariés.

Une PME de mon département a exposé ses 27 salariés à un taux considérable de dioxine, d'où un grand nombre de cancers de la thyroïde.

Pourquoi exempter les PME de leurs obligations ? La prévention et la pénibilité doivent être assurées partout.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Même avis défavorable pour le même amendement.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable

Mme Annie David.  - M. le ministre a mentionné les accords de branche. Certes, mais ce ne sont pas toujours les représentants des salariés qui négocient dans les petites entreprises. Il existe des « conseillers des salariés » qui ont cette fonction. J'en profite pour rendre un hommage particulier à mon mari, qui est l'un d'entre eux ! (M. le ministre et de nombreux sénateurs applaudissent)

L'amendement n°1049 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1050, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Après les mots :

couvertes par un accord

supprimer les mots :

ou un plan d'action

M. Michel Billout.  - Le Gouvernement et sa majorité privilégient une approche individuelle et médicalisée de la pénibilité. En outre, ils se limitent à des sanctions symboliques en l'absence d'un accord sur la réduction de la pénibilité. La productivité de nos salariés est l'une des plus élevées au monde ; ce n'est pas sans conséquence pour leur santé !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable : il ne faut pas pénaliser les entreprises ayant appliqué un plan d'action.

L'amendement n°1050, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°637 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf et Darniche.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Philippe Dominati.  - Cet amendement supprime la pénalité de 1 % des gains et rémunérations des salariés potentiellement concernés par la pénibilité en cas de défaut de plan d'action car la notion de pénibilité n'est pas définie. Pour le ministre, la sanction ne devrait pas être appliquée mais la commission n'est pas du même avis ; cette dissonance m'inquiète.... Reportons à plus tard un débat aujourd'hui prématuré.

M. le président.  - Amendement n°449, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Alinéa 5

Remplacer les mots :

1 % au maximum

par le pourcentage :

3 %

II. - Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Gisèle Printz.  - Nous proposerons le même taux pour l'emploi des seniors et l'égalité salariale entre hommes et femmes. Le taux de 3 % est dissuasif, sans être prohibitif. Il n'est pas cohérent de dénoncer le déficit de la sécurité sociale et de refuser la prévention !

Pour la deuxième année consécutive, la branche AT-MP est en déficit, malgré la sous-déclaration de nombreux accidents ou maladies du travail.

M. le président.  - Veuillez conclure !

Mme Gisèle Printz.  - Il n'est que temps d'être ferme envers les employeurs. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°1051, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Après les mots :

Le montant de cette pénalité est fixé à

remplacer le taux :

1 %

par le taux :

10 %

Mme Éliane Assassi.  - Vous vous contenez d'un dispositif symbolique négligeant les entreprises de moins de 50 salariés. Il semble en outre que l'article pose un principe, dont l'application dépendra d'un décret. On peut craindre une poursuite de la course au moins-disant social. Avec l'effet de seuil, il suffira de déplacer les salariés victimes de la pénibilité au travail.

M. le président.  - Amendement n°1052, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Après les mots :

l'entreprise n'est pas couverte par l'accord

supprimer les mots :

ou le plan d'action

Mme Odette Terrade.  - Une directive européenne impose aux employeurs de veiller à la santé de leurs salariés : la Cour européenne inclut l'environnement du travail, ce que le droit français ne prend pas en compte.

Votre approche satisfait les besoins du patronat, au lieu de protéger la santé des salariés. Ceux-ci ne sont pas entendus ; ils connaissent pourtant la réalité des risques !

Les plans d'action restent habituellement des voeux pieux : supprimons-les du dispositif !

M. le président.  - Amendement n°450, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

M. Jacky Le Menn.  - Cet alinéa dispose que l'autorité administrative fixe la pénalité, « après prise en compte des efforts fournis par l'entreprise ». La rédaction est sympathique, mais la santé des travailleurs, c'est aussi leurs souffrances et parfois leur mort ! Nous nous opposons à la possibilité de modulation, surtout compte tenu de la modicité du taux.

La pénalité risque de devenir symbolique, au nom de difficultés économiques ou de « réalités locales ». Encore une fois, c'est le principe « deux poids, deux mesures » : la régression sociale pour les salariés, la compréhension pour le patronat !

Il faut donc reconstruire un édifice pour éviter la règle de l'injustice. Ce n'est pas sans raison si les multiples ouvrages sur la souffrance au travail connaissent un grand succès ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement identique n°639 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf, Beaumont et Darniche.

M. Philippe Dominati.  - J'ai déjà exposé les motifs de ma réticence envers le système proposé, qui repose sur une notion mal définie. Il n'appartient nullement à l'autorité administrative de fixer la pénalité !

Mme Annie David.  - Pour une fois, je suis d'accord avec M. Dominati.

M. le président.  - Amendement identique n°1053, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

M. Jean-Claude Danglot.  - Il n'y a pas de fatalité pour que la santé des salariés soit détériorée. La Cour de cassation rappelle sans cesse l'obligation de résultat qui, en la matière, pèse sur les employeurs.

L'employeur doit anticiper, mais, nous n'acceptons pas que la sanction soit mesurée aux efforts réalisés.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - J'ai déjà exposé notre intérêt pour la prévention de la pénibilité. Donc, avis défavorable aux amendements n°s63 rectifié, 449, 1051 et 1052. Idem pour les trois amendements identiques n°s450, 639 rectifié et 1053, qui tendent à négliger les efforts accomplis par l'employeur.

M. Éric Woerth, ministre.  - Certains veulent augmenter la pénalité ; d'autres préfèrent la réduire...

Prendre en compte les efforts fournis permet d'appliquer le principe de proportionnalité.

Restons-en au texte de la loi : 1 % de la masse salariale, ce n'est pas rien !

L'amendement n°637 rectifié est retiré.

L'amendement n°449 n'est pas adopté.

Mme Annie David.  - Nos amendements résument tout ce que nous reprochons à l'article 27 ter AA. Monsieur le ministre, l'autorité administrative ne pourra pas augmenter la pénalité : sa seule marge de manoeuvre sera à la baisse.

Rappelez-vous le tollé soulevé par la perspective de classer les entreprises selon la pénibilité du travail : M. Darcos avait évoqué les feux vert, orange et vert. Devant la réaction du Medef, le Gouvernement a fait marche arrière...

Vous devriez pourtant vous intéresser à la pénibilité, qui n'est pas sans influence sur la santé, donc les charges de la sécurité sociale.

Nous connaissons tous les différences entre un accord et un simple plan d'action. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1051 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s1052, 450, 639 rectifié et 1053.

M. le président.  - Amendement n°451, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le produit de cette pénalité est affecté à la branche accidents du travail - maladies professionnelles de la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? La branche AT-MP existe, c'est elle qui doit bénéficier du produit de cette pénalité. Le mécanisme proposé a été inventé par M. Méhaignerie ; son ingéniosité me laisse admiratif!

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ce fonds est transitoire et votre analyse est convaincante. Sagesse très favorable à cet amendement.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable aussi.

L'amendement n°451 est adopté.

Mme Christiane Demontès.  - A l'unanimité !

M. le président.  - Amendement n°1054, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Cet article ne concerne que les entreprises de plus de 50 salariés. Pourquoi un tel seuil ? La santé d'un seul salarié devrait être jugée sérieuse ! S'il n'y a pas de sanction sévère, l'incitation aux entreprises n'est que de la poudre aux yeux.

L'amendement n°1054, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°452, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

M. Yannick Botrel.  - Le principe de l'accord de branche est très utile pour les petites entreprises, sauf en matière de sécurité et de pénibilité. Cet alinéa donne le signal qu'il laissera faire, en s'en contentant ici. Les accords de prévention de la pénibilité doivent être pris par établissement.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'objectif est d'inciter les entreprises à prendre de telles dispositions. Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°452 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1055, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 13

Remplacer la date :

1er janvier 2012

par la date :

30 juin 2011

Mme Éliane Assassi.  - Il y a urgence à engager et conclure des accords en matière de pénibilité. S'agissant de l'emploi des seniors, le ministre reconnaît que nombre d'entreprises préfèrent en passer par des sanctions financières ; qu'en ira-t-il pour la pénibilité ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Laissez aux partenaires sociaux le temps de négocier !

L'amendement n°1055, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme Raymonde Le Texier.  - Cet article imite les dispositifs existants pour l'emploi des seniors et pour l'égalité des salaires entre hommes et femmes. Gageons qu'il ne sera pas plus efficace. Le flou laissé sur le montant de la pénalité entretient le doute. En fait, la mesure n'a pas été conçue pour être efficace, mais pour faire croire que le Gouvernement s'en préoccupe.

Signer un plan ou un accord, c'est bien. Ces brevets de bonne conduite ne devraient pas tenir lieu d'engagement effectif. Entre sous-estimation des risques, mise sous tutelle de la médecine du travail et plans de prévention non coercitifs, on n'améliore pas réellement la situation des travailleurs. Le but du texte n'est que d'anticiper les désagréments qui pourraient résulter, pour les employeurs, de la pénibilité. Nous voterons contre.

M. Guy Fischer.  - Le recours au contentieux de recouvrement sera facile, d'autant que la pénalité ne sera applicable qu'aux entreprises comptant au moins 50 salariés. Et l'on nous tire les larmes des yeux sur la prolifération de la paperasserie !

Dans l'agriculture, ce n'est pas le vigneron ni le petit arboriculteur qui est en cause, mais le céréalier briard ou le betteravier picard.

Une ergonomie au petit pied va se mettre en place. Il est à craindre que cet article ne vise en fait qu'à donner au patronat les moyens d'éteindre nombre de contentieux liés à la pénibilité ou au harcèlement. On serait, en ce cas, devant un recul imposé au monde du travail. Nous nous y opposerons par scrutin public.

M. Gérard Longuet.  - Naturellement, le groupe UMP soutient cet article, mais il insiste pour que l'on puisse procéder à une comparaison internationale ou au moins européenne, métier par métier. Il faut être le plus juste possible pour les salariés, mais en tenant compte de ce qui se fait chez nos partenaires. Je me rappelle l'affaire du pilotage à deux des Airbus qui a suscité de graves conflits en France, alors qu'ailleurs il allait de soi depuis longtemps. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Éric Woerth, ministre.  - Il va de soi que nous ne voulons pas porter atteinte à la compétitivité de nos entreprises, mais l'existence de bonnes conditions de travail y contribue. Nous ferons le comparatif que vous souhaitez.

A la demande du groupe CRC, l'article 27 ter AA est aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

Article 27 ter AB

Mme Annie David.  - Cet article crée un comité scientifique qui aura pour mission d'apprécier les conséquences de l'exposition à des activités pénibles identifiées comme telles. Mais sa composition sera fixée par décret. Nous sommes choqués de cette manière de toujours remettre à plus tard ce qu'il est urgent de faire dès maintenant. Vous faut-il une étude pour vérifier que la terre est ronde ? La pénibilité aussi est un fait, on sait qu'elle écourte la vie ! Vous passez votre temps à créer des comités, des observatoires, des missions qui produisent rapport sur rapport, qui vous dispensent d'agir. On sait pourtant déjà que la France est un des pays où le problème de la pénibilité se pose avec le plus d'acuité ! Mais les effets différés de la pénibilité, les troubles psychosociaux sont pour le Medef des épouvantails ! Rappelez-vous les affirmations des fabricants de tabac ou d'amiante.

M. le président.  - Amendement n°877, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

en bonne santé

M. Guy Fischer.  - Le Conseil d'orientation sur les conditions de travail (Coct) est une instance consultative qui doit participer à l'élaboration de la politique nationale en matière de prévention et de sécurité au travail ; il peut faire des recommandations pour l'amélioration des conditions de travail. Le rapporteur nous propose d'en reconnaître l'existence législative. L'Observatoire de la pénibilité a-t-il rendu des travaux ? On n'en voit pas trace... Vous créez un comité scientifique ; sera-t-il davantage réuni ?

La notion d'espérance de vie est trop vague : il faut prendre en compte l'espérance de vie en bonne santé, donc toutes les formes de pénibilité, y compris différées.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - On ne peut plus se contenter d'incantations ! Le besoin d'un comité scientifique est achevé, madame David. L'amendement n°877 est trop restrictif.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis défavorable.

Mme Annie David.  - La nocivité de certains produits et la pénibilité de certaines tâches ont de longtemps été démontrées. Que vous faut-il de plus ?

Combien de fois s'est réuni l'Observatoire du Coct ? Jamais, à ce qu'il semble. Qu'ajoutera un comité scientifique qui ne se réunirait pas davantage ? Les salariés continueront d'être exposés à des produits dangereux, à souffrir de cancers à peine à la retraite. La rentabilité des entreprises a besoin de la bonne santé des travailleurs -voilà un langage que vous devriez pouvoir entendre !

On connaît les facteurs de pénibilité, on est d'accord là-dessus même -pour certains- avec le Medef ! Faut-il un comité scientifique pour comprendre que les 3x8, 365 jours par an, nuisent gravement à la santé ?

M. Éric Woerth, ministre.  - La bonne santé des salariés est bonne d'abord pour eux-mêmes.

Mme Annie David.  - Alors passez aux actes !

M. Éric Woerth, ministre.  - C'est ce que fait ce texte. Nous passons à une phase opérationnelle. Le comité scientifique devra faire des études sur les risques attachés à telle ou telle condition de travail et ce qui en résulte pour les salariés exposés. Il s'agit d'améliorer la connaissance de la pénibilité, pour éviter l'injustice qu'il y aurait à ce que certains puissent partir prématurément en retraite alors que d'autres ne le pourraient pas parce que la pénibilité de leur travail n'aurait pas été prouvée.

Ce comité se réunira, soyez-en sûr ! Un rendez-vous est fixé pour 2013, sur le fondement de ses travaux.

M. Guy Fischer.  - Nous voudrions pouvoir vous croire ! Mais la littérature scientifique ne manque pas d'études sur la pénibilité différée. Il faut agir tout de suite.

Le choix du critère de l'espérance de vie ne suffit pas : il faut aussi considérer la santé. Pour les femmes, l'espérance de vie est de 84 ans, mais seulement de 64 ans si c'est en bonne santé. Pour les hommes, on passe de 77 à 63 ans. Nous défendons l'exigence de l'épanouissement de chacun après une vie de travail.

L'amendement n°877 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°510 rectifié, présenté par M. Gilles, Mlle Joissains, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, Cambon, Trillard, Revet et Milon.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L'observatoire de la pénibilité du Conseil d'orientation sur les conditions de travail est composé de représentants de l'État, de représentants des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national, de représentants des organisations syndicales de salariés représentatives au plan national interprofessionnel et de personnalités qualifiées.

M. Charles Revet.  - Nous souhaitons nous assurer de la représentativité de tous les employeurs et syndicats de salariés. Nous reprenons pour cela les critères retenus pour la composition du Coct.

M. le président.  - Amendement identique n°585, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste.

M. Nicolas About.  - Il est défendu.

L'amendement n°493 n'est pas défendu.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cela relève du règlement : sagesse.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable.

M. Guy Fischer.  - Nous avions rectifié l'amendement n°1056 rectifié pour qu'il s'applique à l'alinéa 3.

M. le président.  - Amendement n°1056 rectifié bis, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

La composition de cet observatoire de la pénibilité devra se faire selon une procédure qui garantit l'objectivité scientifique de ses travaux, la pluralité de ses membres et l'indépendance de cette structure vis-à-vis du politique. Les règles de désignation de ses membres, fixées par décret, s'inspirent de celles du Conseil d'orientation sur les conditions de travail.

Mme Annie David.  - Nous l'avions initialement rattaché à l'alinéa 4, que la commission a supprimé. Nous prévoyons une composition un peu différente de cet Observatoire, pour en renforcer le pluralisme et l'indépendance.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques n°s510 rectifié et 585 sont adoptés.

L'amendement n°1056 rectifié bis tombe.

M. Charles Revet.  - Vous avez tout de même satisfaction !

M. le président. - Amendement n°878, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les conclusions de l'Observatoire de la pénibilité sont rendues publiques.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Les salariés qui ont supporté des dizaines d'années de travaux pénibles ne sont ni des malades ni des handicapés, mais des personnes dont l'espérance de vie est réduite ; ils sont des centaines de milliers à vieillir prématurément. Une réforme juste aurait consisté à prendre des mesures pour éradiquer la pénibilité.

Les conclusions et éventuelles recommandations de l'Observatoire de la pénibilité qu'entend créer cet article doivent être rendues publiques.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Précision utile. Sagesse favorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable avec sagesse ! (Sourires)

L'amendement n°878 est adopté.

M. le président.  - A l'unanimité !

Amendement n°1207, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Nous avons récrit le chapitre ; cet alinéa est reporté ailleurs.

L'amendement n°1207, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'amendement n°662 n'est pas défendu.

L'article 27 ter AB, modifié, est adopté.

Article 27 ter AC

M. Jacky Le Menn.  - Cet article soulève des difficultés de compréhension et d'application pour l'ouverture des droits concernés, dès lors que tous les types de lésions peuvent faire l'objet d'une reconnaissance. On veut faire coexister deux dispositifs différents pour la reconnaissance des mêmes lésions et les conséquences à en tirer.

La coexistence de deux systèmes avec des taux différents et des critères différents sera en outre source d'inégalités -celui proposé s'ajoute aux dispositions de l'article L. 351-7 du code de la sécurité sociale. En l'état, votre dispositif de retraite par inaptitude est inachevé, redondant, inéquitable et coûteux.

M. David Assouline.  - Ce nouveau tour de passe-passe introduit une incapacité permanente, qui néglige ceux qui auront subi un travail pénible. L'astuce est de ne pas prendre en compte l'exposition, mais seulement les séquelles constatées à un moment donné. Vous mettez en place une procédure individualisée, qui reprend mot pour mot les thèses du Medef. Vous présentez comme une avancée le taux de 10 % d'invalidité... qui s'appliquera à 30 000 personnes tout au plus, parmi des millions de salariés exposés aux produits toxiques ou à d'autres facteurs de pénibilité.

Qu'allouerez-vous aux victimes de l'invalidité ? Ce qui est aujourd'hui possible pour tous : partir à 60 ans. Une fois de plus, ce que votre propagande mensongère présente comme un progrès est une régression pour ceux qui n'ont d'autre patrimoine que leur droit à la retraite. Quelle humiliation pour ceux qui auront trimé toute leur vie ! C'est intolérable ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - D'aucuns se font violence pour quitter leur emploi, mais beaucoup d'autres piaffent d'impatience. Or, pour bénéficier de la retraite, ils devront prouver que le taux d'invalidité de 10 % est directement imputable à leur profession. Les deux tiers des cancers professionnels se déclarent après 60 ans. Vous excluez aussi les personnes soulevant régulièrement des charges lourdes, les salariés en travail de nuit ou posté dont l'espérance de vie en bonne santé est pourtant compromise.

Le Gouvernement annonce un progrès, en disant que les intéressés partiront plus tôt. Qu'est-ce à dire ? Qu'ils pourront partir en retraite à 60 ans comme aujourd'hui ?

Quatre de nos amendements ont été déclarés irrecevables au nom de l'article 40. En fait, la charge publique en question n'existe pas encore : elle est instituée par l'article ! Il revient au Parlement de tracer son périmètre ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Guy Fischer.  - Cet article propose un recul sensible par rapport à l'existant. Ce texte augmente le nombre d'annuités exigées, repousse les limites d'âge, puis instrumentalise la médecine du travail au profit des entreprises. Et voici que l'article organise une nouvelle régression sociale !

Un décret fixera ses conditions d'application. Trois doigts coupés vaudront-ils un trimestre ?

Le départ anticipé sera conditionné par une carrière longue ou l'invalidité. Ce n'est plus la retraite par répartition, c'est la retraite par réparation ! Vous n'autorisez pas les travailleurs usés à partir en retraite ; vous les mettez à la réforme !

Vous organisez ici l'absence de réparation pour la pénibilité, mais une commisération hypocrite pour les victimes exploitées. En leur faisant ainsi la charité, vous permettez au patronat de se débarrasser des salariés âgés en mauvaise santé. Pour ceux en bonne santé, il restera la rupture conventionnelle, une monstruosité juridique efficace d'après les statistiques. Pouvez-vous d'ailleurs nous en donner une évaluation ?

Mme Annie David.  - Malgré les modifications apportées par l'Assemblée nationale et notre commission, cet article apporte une mauvaise réponse à la pénibilité. Selon l'Insee, l'écart d'espérance de vie s'accroît entre ouvriers et cadres. Pour compenser cette injustice flagrante, le Gouvernement a fait un mauvais choix : s'il avait réellement opté pour l'équité, il aurait institué un droit collectif de départ anticipé. Il faut assurer une certaine équité face au différentiel d'espérance de vie en bonne santé.

On pourrait raisonner comme on le fait avec la progressivité de l'impôt sur le revenu.

Au lieu de quoi vous utilisez l'invalidité pour éliminer la prise en compte de la pénibilité, selon un mécanisme excluant nombre de salariés exposés à un risque aux effets différés.

Qui plus est, le salarié devra prouver en partant à la retraite que son invalidité est imputable aux risques subis pendant sa vie professionnelle. A lui d'apporter toutes les preuves !

M. Roland Courteau.  - Humiliant !

Mme Annie David.  - Remplacer la pénibilité par l'incapacité est une régression ! D'où l'unanimité négative soulevée par votre dispositif. (Applaudissements à gauche)

M. Bernard Vera.  - A part le Medef, cet article laisse les juristes perplexes, car il ne traite pas de la pénibilité ; il aborde explicitement l'incapacité permanente. Vous confondez les notions ou prétendez le faire !

Vous nous avez mis au défi de démontrer la soumission des médecins du travail envers les employeurs. Nous avons relevé ce défi et vous en lançons un : trouvez un juriste ou un médecin pour qui cet article concerne la pénibilité au travail !

L'invalidité est une notion médicale ; l'aptitude au poste de travail est appréciée par le médecin du travail.

Des critères de pénibilité existent : le travail de nuit, le travail à la chaîne ou l'exposition aux produits toxiques. Là, vous autorisez les malades ou mutilés à partir en retraite un peu plus tôt.

Plus grave : vous mettez en cause les présomptions d'imputabilité existant aujourd'hui à propos des maladies et accidents du travail.

M. Charles Revet.  - (L'orateur est accueilli avec enthousiasme à droite, puis à gauche) Merci.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Vous avez donc des choses à dire !

M. Charles Revet.  - Certaines professions sont pénibles pour ceux qui les exercent. Il s'agit souvent de métiers manuels. De nombreux professionnels du bâtiment, de la mer, de l'agriculture, pourront justifier un traitement particulier de leur cas. J'ai constaté dans nos ports la pénibilité de certains emplois -ce qui ne justifie nullement le blocage suicidaire de nos ports.

Monsieur le ministre, pourriez-vous préciser la procédure à suivre pour les intéressés ? Qui jugera et selon quels critères ? (« Très bien ! » à gauche)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Les manifestants sont nombreux aujourd'hui -et seront nombreux demain- à évoquer la pénibilité au travail, mais vous sautez à pieds joints au-dessus de cette notion. La confusion entre pénibilité et incapacité permanente met hors jeu la prévention de certaines pathologies.

Vous ignorez délibérément la possibilité de calculer l'espérance de vie liée à chaque profession. On pourrait en tenir compte pour l'admission à la retraite. Pour vous, le travailleur n'a rien subi tant que l'exposition à un risque n'a pas suscité de pathologie avérée ! Il faudrait au moins que vous fassiez un geste pour compenser la pénibilité, ce dont vous ne manifestez aucune volonté. Votre démarche confond sophisme et dialectique !

A l'instar de toute la loi, cet article organise une régression sociale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Marie-Christine Blandin.  - Relier directement l'invalidité à une exposition professionnelle peut être ardu : même les victimes de l'amiante ont affronté en justice les avocats des employeurs invoquant des antécédents familiaux ou de tabagisme, alors que les fibres d'amiante sont visibles à la radiographie. Qu'en sera-t-il demain des autres atteintes ? L'étude épidémiologique très complète relative aux incinérateurs démontre une incidence incontestable de ces installations. Mais la conclusion de l'expert fait qu'il était impossible de prouver la relation avec la pathologie ! Que dira-t-on à la caissière de supermarché souffrant de troubles musculo-squelettiques ; qu'elle a porté ses enfants ou de trop lourds cabas ? ; et aux sourds du marteau-piqueur qu'ils sont trop allés au concert ? Je ne caricature pas (marques dubitatives à droite) parce que chaque fois que j'assiste à des procès, je constate que les avocats des employeurs les défaussent de toute responsabilité. (Applaudissements à gauche)

Conclusions de la Conférence des Présidents

M. le président.  - Lors de sa réunion du lundi 18 octobre, la Conférence des Présidents a décidé de reporter à jeudi 21 octobre après-midi le scrutin solennel sur l'ensemble du projet de loi, avec deux explications de vote par groupe (une pour les sénateurs non-inscrits).

Dans le cas où le débat sur ce projet de loi ne serait pas terminé dans le courant de l'après-midi du jeudi 21, elle a décidé de le poursuivre le soir et la nuit du jeudi et de siéger, éventuellement, sur ce projet de loi le vendredi 22, le samedi 23 et le dimanche 24 octobre, le matin, l'après-midi, le soir et la nuit

Puis, à la suite du vote sur l'ensemble, le projet de loi organique relatif à la limite d'âge des magistrats de l'ordre judiciaire sera examiné selon les modalités prévues antérieurement.

La séance de questions orales du mardi 19 octobre, matin, est annulée.

Le programme de la semaine d'initiative du lundi 25 octobre au jeudi 28 octobre demeure sans changement.

L'ordre du jour est ainsi réglé.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 27 ter AC (Suite)

M. Éric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement ne confond rien. L'inaptitude au poste n'a rien à voir avec la retraite. L'incapacité est en lien avec la branche AT-MP. Nous allons plus loin en introduisant une retraite anticipée par rapport aux autres Français. L'Assemblée nationale a ramené le taux de 20 à 10 %, ce qui satisfait à une logique humaine. Le mieux est bien sûr que le salarié ne subisse aucune séquelle. Il faut bien faire le lien avec l'exposition à un risque et l'invalidité : au-delà de 20 %, le départ sera de droit ; entre 10 et 20 %, une commission établira la traçabilité.

Pour la caissière citée, la relation avec son travail sera sans doute facile à établir. L'approche épidémiologique ne peut s'appliquer sans précaution à tous les risques. D'où l'intérêt du comité scientifique.

Monsieur Revet, le Gouvernement n'a pas adopté une logique de métiers, mais il est clair que les manutentionnaires sont particulièrement exposés aux lombalgies et autres dorsalgies et qu'ils rentreront eux aussi facilement dans les 10 %.

La séance est suspendue à 19 heures 30.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

La séance reprend à 21 heures 35.

M. le président.  - Amendement n°365 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Supprimer cet article.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Monsieur le ministre, j'ai été sensible à vos arguments. Je regrette néanmoins que la distinction que vous faites entre incapacité et invalidité ne se retrouve pas dans cet article qui prive un nombre considérable de travailleurs souffrant pourtant de lésions liées à leur activité professionnelle. Il exclut de facto la grande partie des salariés pourtant concernés et ne prend pas en compte ceux qui subissent des lésions différées, notamment les cancers.

Enfin, quelle sera la grille servant de référence ? Celle des anciens combattants ? De la Cotorep ? Des assurances ?

M. le président.  - Amendement identique n°434, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Mme Christiane Demontès.  - Cet article ne répond pas au préjudice en termes d'espérance de vie dont sont victimes les salariés ayant été exposés à la pénibilité. Il ne tient pas compte de la survenue de maladies graves à effet différé dont le nombre ne cesse de croître. Il ne prend pas non plus en compte une majorité de victimes de pathologies liées au travail pour lesquelles il n'existe pas de tableau de maladies professionnelles

Cet article n'apporte donc aucun progrès à la situation des travailleurs exposés à la pénibilité et aux risques professionnels.

M. le président.  - Amendement identique n°1057, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Cet article qui fait l'unanimité contre lui, à l'exception du Medef, confond pénibilité et incapacité permanente de travail déjà avérée.

Il est mensonger de prétendre que vous créeriez un nouveau droit à partir de la reconnaissance de la pénibilité. Vous remettez en cause la présomption d'imputabilité qui existe aujourd'hui.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet article traite pour la première fois la pénibilité à effet immédiat, observable au moment où le travailleur part en retraite. Notre commission salue cette avancée importante ; elle insiste sur l'importance du décret d'application qui devra énoncer des critères clairs et identiques partout.

Nous savons bien que cet article ne saurait épuiser la réflexion sur la pénibilité au travail. Il faudra aussi examiner la pénibilité à effet différé et formuler des propositions en la matière.

Défavorable aux trois amendements de suppression.

M. Éric Woerth, ministre.  - La grille retenue sera la grille AT-MP.

A la demande du groupe UMP, les amendements identiques n°s365 rectifié, 434 et 1057 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 152
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1058, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Odette Terrade.  - Votre mécanisme est mauvais : il ne retient qu'une analyse médicale et individuelle, au lieu de prendre en compte la pénibilité de certaines professions.

Cet article restera dans les annales comme une occasion manquée, une de plus.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°1058 est mis aux voix par scrutin public. (Exclamations à gauche)

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1059, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Claude Danglot.  - Vous ne prenez pas en compte la pénibilité différée. Le taux d'incapacité permanente de 20 % est scandaleux et indécent : 20 %, c'est un bras ou un oeil en moins !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

M. le président.  - Je suis saisi d'une demande de scrutin public.

M. Jean Desessard.  - Par qui ?

M. le président.  - Le groupe UMP. (Exclamations à gauche)

L'amendement n°1059 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 153
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1060, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Des formes nouvelles de pénibilité apparaissent, dues à la pression psychique sur les salariés, au harcèlement moral. Leurs effets sont différés, comme ceux de l'amiante. Il y a altération de l'espérance de vie sans incapacité. Près d'un million et demi de travailleurs sont astreints à manipuler des charges plus de vingt heures par semaine ; 2,95 millions de travailleurs sont astreints à des postes répétitifs ; un million travaillent de nuit ; 3,61 millions sont exposés à des nuisances thermiques... Par respect pour eux, et pour que la réforme ne soit pas une escroquerie, il faut voter cet amendement.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

M. le président.  - A la demande de l'UMP...

M. Gérard Longuet.  - Nous renonçons, pour alléger les débats ! (Sourires)

L'amendement n°1060 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°435, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéas 4 à 8

Supprimer ces alinéas.

Mme Bernadette Bourzai.  - Ce dispositif est inadapté puisqu'il ne prend pas en compte les pathologies à effet différé. Les derniers chiffres de la Dares, font état de deux pathologies majeures : les troubles musculo-squelettiques, qui représentent 70 % des maladies professionnelles et les affections causées par l'amiante qui en représentent 15 %.

Des maladies nouvelles émergent, dont un quart sont des cancers. Il faudrait donc réviser le tableau des maladies professionnelles pour les prendre en compte.

Vous refusez le mot « pénibilité ». Il faut faire semblant de ne pas connaître la réalité pour croire que les personnes atteintes de telles affections peuvent en prouver aisément le lien avec leur profession.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - La France est le pays qui reconnaît le mieux les cancers d'origine professionnelle.

M. Gérard Longuet.  - Précision bienvenue.

L'amendement n°435 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1061, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Fischer.  - Nous répétons que nous souhaitons une approche collective de la pénibilité du travail. Pour complaire au Medef, vous voulez diviser les salariés, car vous craignez la force du collectif, la seule dont disposent les salariés.

C'est ainsi que, minutieusement mais sûrement, vous supprimez toutes les références collectives. Dans cet esprit, vous réduisez la part fixe du salaire au profit de parts variables individualisées.

La pénibilité n'est pas une affaire individuelle. Sans les études américaines sur les cancers dus à l'amiante, ceux-ci n'auraient pas été reconnus.

Pierre Bourdieu parlait d'un « retour à l'individualisme », sorte de prophétie auto-réalisante qui tend à détruire les fondements philosophiques du Welfare State et en particulier la notion de responsabilité collective... Le retour à l'individu, c'est aussi ce qui permet de « blâmer la victime », seule responsable de son malheur, et de lui prêcher la self-help, tout cela sous le couvert de la nécessité inlassablement répétée de diminuer les charges de l'entreprise » (Marques d'impatience à droite, l'orateur ayant dépassé son temps de parole). Vous ne me ferez pas taire !

L'amendement n°1061, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Cet article réunit tous les éléments de votre conception de la pénibilité. M. Revet reconnaît qu'il y a des métiers pénibles mais n'en déduit pas que tous les salariés qui les exercent subissent cette pénibilité.

Celle-ci peut être évaluée collectivement, en prenant en compte l'espérance de vie. Ces salariés qui ont subi la pénibilité d'un métier, les employeurs refusent de les embaucher s'ils perdent leur emploi à 50 ans, ce qui est fréquent.

Vous reconnaissez que les caissières de supermarché subissent des TMS, mais vous pensez qu'ils peuvent résulter d'avoir porté des paquets ou leurs enfants ; c'est le cas toutes les femmes ! On voit la subtilité de votre dialectique...

En substituant l'invalidité à la pénibilité, vous privez les salariés exerçant des métiers pénibles de la possibilité de partir en retraite plus tôt. (Applaudissements à gauche)

Mme Raymonde Le Texier.  - Cet article est censé prouver que le Président Sarkozy a eu la bienveillante générosité de concéder ce privilège dans sa grande mansuétude. Ce privilège supposé, que vous présentez comme une avancée considérable, n'est qu'un moindre mal pour un petit nombre de salariés, alors que vous privez tous les salariés de la possibilité de partir en retraite à 60 ans.

La pénibilité n'est pas l'invalidité. Si vous aviez écouté les médecins du travail, que vous vouez aux gémonies, vous auriez faire la différence. Vous entrez dans la logique de la marchandisation des corps. (Protestations sur les bancs UMP) Vous distribuez une prime à la casse des travailleurs, et non à la prévention. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Pour 10 % de votre corps, vous avez droit à la retraite à 60 ans ! (Applaudissements à gauche)

Mme Claire-Lise Campion.  - De nombreuses études scientifiques démontrent que la pénibilité a des effets délétères à long terme ; c'est ce que défendent chercheurs, médecins du travail et enseignants regroupés dans l'Association pour le développement des études et des recherches épidémiologiques sur la santé et le travail. Des synthèses ont été diffusées par l'Inserm, l'INVS, le Centre d'études de l'emploi ou l'Agence nationale de sécurité sanitaire.

Ces effets se manifestent après la fin de la vie professionnelle, ce qui invalide tout examen médical lors du départ à la retraite. N'est-il pas temps de prendre en compte ces études scientifiques ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Cet article est parfaitement emblématique du texte. Vous continuez à entretenir la confusion entre pénibilité et incapacité permanente. Vous persistez à refuser de prendre en compte les pathologies induites par les nouvelles pratiques professionnelles. Avec votre approche individuelle et minimaliste, vous préférez infliger une double peine aux personnes concernées : elles sont malades et devront le prouver ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - La pénibilité n'est pas l'invalidité, mais elle peut la provoquer. Nous voterons cet article parce qu'il institue un droit nouveau permettant une meilleure prise en compte des cas individuels. (Applaudissements sur les bancs UMP)

A la demande du groupe CRC-SPG, l'article 27 ter AC est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 334
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 182
Contre 152

Le Sénat a adopté.

Article 27 ter AD

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Le financement du dispositif « pénibilité » ne reposera pas sur la branche vieillesse, mais sur la branche AT-MP -200 millions seraient chaque année en jeu à l'horizon 2018. Le dispositif sera financé par une cotisation supplémentaire de 0,05 % à charge des employeurs, cotisation qui sera modulée selon les secteurs d'activité. Les entreprises auront intérêt à sous-déclarer les accidents, surtout parmi les PME. Comment par ailleurs seront traités les salariés des sous-traitants ?

M. le président.  - Amendement n°441, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Maryvonne Blondin.  - Le financement par la branche AT-MP est cohérent avec la reconnaissance individuelle. Alors que des millions de salariés sont concernés, le texte s'en remet en quelque sorte aux transactions entre branches selon la logique pollueur-payeur. La pénibilité doit être prise en charge par la société tout entière.

M. le président.  - Amendement identique n°1067, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

M. Jean-François Voguet.  - Les dépenses engendrées par le nouveau dispositif dit de « pénibilité » sont mises à la charge de la branche AT-MP car la seule prise en compte de la pénibilité se fait sur le terrain de la maladie ou de l'accident du travail avec séquelles. Aujourd'hui, votre projet n'est pas financièrement équilibré. Nous y reviendrons en discutant le PLFSS.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Il serait curieux de reporter sur la branche vieillesse le financement du dispositif !

Les amendements identiques n°s441 et 1067 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°367 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 4, première phrase

I. - Supprimer les mots :

couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge fixé en application de l'article L. 351-1-4

II. - Supprimer les mots :

qui peuvent être modulés par secteur d'activité

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 dispose que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) est financé par une contribution de l'État, dans les conditions fixées en loi de finances, et par une contribution de la branche AT-MP dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale.

La grande majorité des bénéficiaires du Fiva étaient employés dans les chantiers navals et aucune modulation du taux AT-MP par secteur d'activité n'a été prévu. Nous demandons le même traitement ici.

M. le président.  - Amendement identique n°486 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Rozier et MM. J. Gautier et Cambon.

M. Jacques Gautier.  - Il vient d'être défendu...

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La logique veut qu'on module la contribution selon les secteurs.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

Mme Annie David. - Nous disons depuis des heures, sans être entendus, qu'il y a des secteurs concernés plus que d'autres par la pénibilité !

M. Éric Woerth, ministre. - C'est vrai, mais cela ne veut pas dire que tous les salariés de ces secteurs sont exposés à la pénibilité.

L'amendement n°367 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1068 rectifié, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant de la contribution mentionnée à l'alinéa précédent est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale. Une commission présidée par un magistrat à la Cour des comptes remet tous les trois ans, au Parlement et au Gouvernement, un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évaluant le coût réel des dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 351-1-4 pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. La composition de la commission est fixée par voie réglementaire. »

M. Bernard Vera.  - Cet amendement de repli propose que la loi de financement de la sécurité sociale fixe chaque année le montant de cette contribution. Nous proposons en outre qu'un rapport triennal soit remis aux parlementaires pour leur permettre d'assurer une sorte de veille. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La modulation est la règle pour les cotisations à la branche AT-MP.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - C'est sûr.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Je ne suis pas hostile au rapport demandé...

M. Éric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement non plus, à condition de supprimer la référence à une nouvelle commission issue de la Cour des comptes.

M. Bernard Vera.  - Nous acceptons cette rectification.

M. le président. - L'amendement n°1068 rectifié bis se lira comme suit :

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant de la contribution mentionnée à l'alinéa précédent est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale. Un rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale évalue le coût réel des dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge prévu à l'article L. 351-1-4 pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. »

L'amendement n°1068 rectifié bis est adopté.

M. Guy Fischer.  - L'article 27 ter AD procède à un siphonage de la branche AT-MP, dont les ressources sont modulées par secteur d'activité en vertu d'un principe de responsabilité. Au demeurant, si le nombre d'accidents mortels diminue dans le bâtiment, on y relève des incapacités temporaires de travail toujours plus longues et un accroissement du nombre de maladies professionnelles.

L'argent public va financer le maintien des seniors au travail. Le paysage à venir du monde du travail est connu : moins de préretraites, un recours toujours plus réduit aux carrières longues, plus de ruptures conventionnelles du contrat de travail. L'amendement présenté par Mme Procaccia illustrait les exigences du patronat. Hier, M. Le Maire a déclaré que la réforme était entre les mains du Sénat qui pouvait y apporter des aménagements. Pour l'instant, on ne voit rien venir, car vous êtes droits dans vos bottes. Votre loi est contraire aux intérêts des travailleurs.

L'article 27 ter AD est adopté.

Article 27 ter AE

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet article comporte la production d'un rapport sur la retraite des travailleurs non-salariés. Les professions artisanales ou commerciales ont, elles aussi, besoin d'un dispositif adapté. Selon les estimations du RSI, 700 à 800 personnes pourraient être concernées chaque année ; j'insiste sur la nécessité de travailler sans tarder avec ses responsables.

Mme Annie David.  - Cet article ajouté par la commission traite du départ anticipé des non-salariés non-agricoles. Nous ne contestons pas la production d'un rapport, mais constatons que les non-salariés sont davantage écoutés que les salariés... Cette fois on va être à l'écoute, on va confronter les idées, de sorte que la loi soit écrite sous la dictée des organisations représentatives avec l'encre du consensus...

Nous refusons ce dialogue asymétrique qui prive les salariés du droit au chapitre.

L'article 27 ter AE est adopté.

Article 27 ter AF

M. Guy Fischer.  - S'il ne fallait produire qu'une preuve de l'impréparation de ce texte, il suffirait de cette série d'articles. Il s'agit ici des agriculteurs. Comme nous sommes dans le monde agricole, il importe de freiner la détérioration du ratio actifs/retraités. On aurait pu au moins solliciter les syndicats de salariés agricoles ! La possible apparition d'un excédent permettra à l'État de se désengager du financement du Ffipsa...

Nous voterons la suppression de l'article.

Mme Françoise Cartron.  - Depuis les années 1970, les exploitants et les salariés agricoles sont de plus en plus isolés sur leurs exploitations. Un accord sur la pénibilité a été signé en décembre 2008 par une majorité de partenaires sociaux. Il s'agissait de renforcer les commissions paritaires d'hygiène et de sécurité, de développer l'information et les bonnes pratiques ; la MSA s'est investie de longue date dans le champ de la santé au travail et a fait un travail remarquable.

L'accord européen de 2005 a prévu une information spécifique sur les TMS ; un guide a été élaboré. Le futur plan pluriannuel de prévention 2011-2015 a retenu six priorités : risques chimiques, TMS, troubles psychosociaux, risques liés aux animaux et aux équipements, spécificités des petites entreprises.

Le CES a jugé cette politique « particulièrement intéressante » dans son rapport relatif à la médecine au travail. La prévention est fondamentale pour la prise en compte de la pénibilité. Ici, le Gouvernement confond sciemment pénibilité et invalidité, une assimilation inacceptable qui tourne le dos au dispositif des contrats de travail de fin de carrière. Pour le Gouvernement, la pénibilité ne relève que de considérations budgétaires ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°443, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Michel Teston.  - Cet amendement vient d'être excellemment défendu.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable aux amendements de suppression.

L'amendement n°443, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1236, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 4

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

« III. - Les I et II sont également applicables à l'assuré justifiant d'une incapacité permanente d'un taux inférieur à celui mentionné au I, sous réserve :

« a) Que le taux d'incapacité permanente de l'assuré soit au moins égal à un taux déterminé par décret ;

« b) Que l'assuré ait été exposé, pendant un nombre d'années déterminé par décret, à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels mentionnés à l'article L. 4121-3-1 du code du travail ;

« c) Qu'il puisse être établi que l'incapacité permanente dont est atteint l'assuré soit directement liée à l'exposition à ces facteurs de risques professionnels.

« Une commission pluridisciplinaire dont l'avis s'impose à l'organisme débiteur de la pension de retraite est chargée de valider les modes de preuve apportés par l'assuré et d'apprécier l'effectivité du lien entre l'incapacité permanente et l'exposition aux facteurs de risques professionnels. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de cette commission ainsi que les éléments du dossier au vu desquels elle rend son avis sont fixés par décret. »

M. Éric Woerth, ministre.  - L'amendement étend le dispositif aux non-salariés agricoles.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Marie-Christine Blandin.  - J'avais déjà attiré l'attention sur les risques d'injustice qui pouvaient naître de l'alinéa 7 de l'article 27 ter AC ; ici les choses sont encore plus claires : dans le paragraphe c), il est question des « modes de preuve apportés par l'assuré ». Établir le lien de causalité ne sera pas aisé...

Vous ne pouvez ignorer les perturbations de la fertilité masculine ou féminine induite par l'usage des pesticides. Certains enfants naissent avec un sexe indéterminé. (Mouvements divers à droite) Cela vous fait rire ? A Lille, la consultation spécialisée a dû doubler ses effectifs et elle reçoit principalement des paysans qui viennent en famille... Les salariés chargés de l'épandage de produits phytosanitaires peuvent être concernés pourvu qu'ils dépendent de la MSA.

Mme Annie David.  - Cet article et le suivant montrent que le Gouvernement veut masquer son incapacité à procurer aux agriculteurs un revenu décent et des prix rémunérateurs, de réévaluer les retraites agricoles et de mettre fin aux inégalités. L'amendement du Gouvernement met un terme au paradoxe relevé par la FNSEA, mais pourquoi en priver les salariés agricoles ?

M. Gérard Lasfargues, professeur de médecine et santé au travail au CHU de Tours relève que si certains facteurs de risques professionnels sont susceptibles, à long terme, de provoquer des effets irréversibles et sévères sur l'état de santé, le temps de latence est parfois long et les expositions ne sont pas toujours vécues comme pénibles -c'est le cas des agents cancérogènes. Il note aussi que trois types de conditions de travail peuvent entraîner, après de longues durées d'exposition, un risque élevé de problèmes de santé différés : les efforts physiques, les conditions d'environnement agressif et les contraintes de rythme de travail et d'horaire atypique. Les activités agricoles sont à l'évidence concernées.

M. Éric Woerth, ministre.  - Les salariés agricoles bénéficient de prestations identiques à celles des salariés du régime général -mais le financement de celles-ci relèvent de la MSA.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous avons exprimé notre désaccord pour l'ensemble du dispositif, mais dès lors qu'il existe, il n'est pas anormal qu'il concerne aussi les non-salariés agricoles.

L'amendement n°1236 est adopté.

L'article 27 ter AF, modifié, est adopté.

Article 27 ter AG

M. Claude Lise.  - Les travailleurs agricoles de la banane ont été largement exposés au chlordécone, un pesticide utilisé contre les charançons, bien que son interdiction ait été préconisée dès 1968. En 1979, le Centre national de recherche sur le cancer l'a déclaré cancérigène pour l'homme, ce qui n'a pas empêché son utilisation dans les Antilles jusqu'en 1993 -1990 en métropole... Mal informés, salariés et petits producteurs l'ont utilisé dans les pires conditions.

Un rapport publié l'an dernier par l'OPECST a relevé une sur-incidence de certains cancers dans les Antilles et fait la liaison avec l'exposition au chlordécone. En réalité, toutes les conséquences de cette exposition professionnelle ne sont pas connues.

La plupart des retraités agricoles perçoivent une retraite particulièrement modeste et ne pourront tous suivre les parcours de soins adéquats. Je demande que le Gouvernement présente un rapport sur ce sujet et étudie la mise en place d'un système spécifique, inspiré par exemple de ce qui a été fait pour l'amiante. Les milliers de travailleurs concernés ne doivent pas être les oubliés de la réforme des retraites. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°444, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Près de 50 000 salariés agricoles ont vu leur cas étudié de près lors d'une enquête de la Dares en 2003 : 20 % sont exposés à de mauvaises conditions de travail ; 80 % au moins subissent des contraintes posturales. L'exposition aux micro-organismes et à des produits phytosanitaires multiples, dont certains cancérigènes, est très fréquente. Les protections individuelles et collectives sont la plupart du temps insuffisantes.

Il faut donc combiner prévention en amont et départ anticipé à la retraite.

La MSA a mis en oeuvre une surveillance médicale spécifique.

L'amendement n°444, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 27 ter AG est adopté.

Article 27 ter A

Mme Raymonde Le Texier.  - Créer un fonds spécifique pour la prise en compte de la pénibilité reconnaît implicitement la responsabilité des employeurs.

Que le salarié soit volontaire ne garantit rien, car il risque d'être tributaire de son patron : comme toujours, l'accord de gré à gré entérine le rapport de forces déséquilibré.

Nous craignons que des salariés soient acculés à un choix contraire à leur santé.

Il y a eu une rude bataille entre les branches accidentogènes, comme le bâtiment ou la chimie et celles qui ne le sont pas, comme la banque. La puissante Fédération du bâtiment a su récupérer ce qu'elle avait dû concéder puisque le Fonds de soutien sera subventionné par l'État et recevra des recettes de la branche Accidents du travail : les employeurs font ainsi payer la casse physique de leurs salariés par ceux-ci et obtiennent une subvention de la Caisse !

Mme Odette Terrade.  - On est en passe de reconnaître que la pénibilité au travail a des effets sur la retraite. Mais, mauvaise nouvelle, la dureté nouvelle du travail n'est pas prise en compte quand il n'y a pas trace visible.

Les salariés souffrent et l'objectif devrait être de prendre en compte cette souffrance en mettant la dimension humaine de l'entreprise au centre des préoccupations. Il n'y a pas plus de solution individuelle à la pénibilité qu'à la retraite

M. Ronan Kerdraon.  - Ainsi va la vie en Sarkozie avec un amendement qui n'a pas donné lieu à grand débat à l'Assemblée nationale : on laisse aux entreprises le soin de conclure des accords prenant en compte la pénibilité. Mais le petit coin enfoncé par M. Méhaignerie dans le monde merveilleux des entreprises est insupportable pour le Medef, qui dénonce un risque de nouveaux régimes spéciaux. Votre dispositif se réduit à améliorer les conditions de fins de carrière des salariés.

M. le président.  - Amendement n°445, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Roland Courteau.  - Des entreprises de dimension internationale ont d'ores et déjà signé des accords sur la pénibilité. Est-ce à dire que les petites entreprises ne seraient pas concernées par la pénibilité ? Elles sont souvent des sous-traitantes des grandes.

Quelles branches sont susceptibles de signer les accords qu'évoque cet article ? Les disparités sont grandes, en fonction de la pénibilité, mais aussi de la qualité des relations dans les entreprises et de la puissance syndicale. Cet article est la conséquence de votre refus de prendre en compte la pénibilité comme phénomène collectif. Il faut revenir à la table des négociations ! (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement identique n°1069, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Mme Annie David.  - Le rapporteur écrit que cet article est inspiré par un accord conclu dans le groupe Rhodia. Curieuse référence... L'éventail est vaste dans cet article confus, dont on voit mal pourquoi il serait borné au 31 décembre 2013.

Des accords de branche existent déjà ; ils sont inégalitaires par nature. Oui, mais un ministre qui se targue de créer du droit devrait plutôt chercher à définir des conditions générales au lieu de s'en remettre aux accords de branche.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ce dispositif expérimental s'inspire des bonnes pratiques à l'oeuvre dans certaines entreprises, comme Rhodia dont j'ai reçu le DRH. Nous voulons encourager les partenaires sociaux à négocier des accords collectifs. La commission ne peut que soutenir cette démarche, et donc s'opposer à la suppression de cet article.

M. Éric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement est attaché à cet article qui élargit les possibilités de partir en retraite plus tôt, voire encore plus tôt. On envisage les fins de carrière, hors cessation anticipée d'activité.

Nous tenons à cet article important, d'autant qu'il s'agit d'une expérimentation.

Les amendements identiques n°s445 et 1069 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°617 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°1070, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

M. Guy Fischer.  - Cet article apporte une mauvaise et dangereuse réponse à la question de la prise en compte de la pénibilité ; il créerait de nombreuses inégalités entre les salariés. Il risque de surcroît de remettre en cause les accords de branche déjà conclus en matière de prise en compte de la pénibilité.

Pourquoi à titre expérimental ? Pourquoi seulement jusqu'en décembre 2013 ? Est-ce à dire qu'il s'agirait d'une terra incognita ? Découvrez-vous la pénibilité ? Ses conséquences pour la santé sont avérées. Cet article hétéroclite relève de la pétition de principes. Seule une étrange logique peut conduire un ministre se targuant de construire un droit uniforme à s'en remettre aux accords de branche.

M. le président.  - Amendement n°1071, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - (Marques d'impatience à droite) Allez-vous demander une clause de pénibilité pour les sénateurs de la majorité ? (On s'énerve) Le ministre nous dit qu'on a supprimé les retraites anticipées. Qu'il reconnaisse tout simplement qu'on a fabriqué des chômeurs.

M. le président.  - Amendement n°1072, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Il a été présenté

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable aux amendements n°s1070, 1071 et 1072.

Les amendements n°s1070, 1071 et 1072, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°1073, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°618 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps, MM. Lecerf et Beaumont, Mme Hermange et M. Darniche.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L'organisation de ce temps partiel ne peut prendre la forme d'une cessation anticipée d'activité.

M. Philippe Dominati.  - Il faut encadrer cette possibilité : le recours au temps partiel ne doit pas pouvoir prendre la forme d'une cessation anticipée d'activité déguisée qui serait peu cohérente avec la politique d'emploi des seniors : le rapport de la commission le mentionne.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°1073 et à l'amendement n°618 rectifié, inutile.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable à l'amendement n°1073. Mais le Gouvernement était plutôt favorable à l'amendement n°618 rectifié : il ne faut pas que le temps partiel, regroupé, soit utilisé comme une cessation anticipée d'activité.

L'amendement n°1073 n'est pas adopté.

Mme Christiane Demontès.  - L'article 27 ter A a été surnommé « article Rhodia ». L'article 3 de l'accord Rhodia prend en compte le travail en horaire continu et semi-continu ; il permet, pour les volontaires, un départ en retraite deux ans en avance, donc à 60 ans mais à condition d'avoir passé 30 années dans un travail posté. C'est encore trop pour certains représentants patronaux : la question qui fâche est de savoir qui paie. Rhodia versera pendant ces deux ans 75 % de la rémunération de référence. Il n'est pas impossible que cet accord Rhodia se pérennise. C'est insupportable pour les patrons ! Heureusement, l'amendement Méhaignerie prévoit un financement par le biais d'un fonds de soutien. L'amendement Dominati vise à prévenir un paiement par les entreprises. Nous voterons contre. (Ah ! à droite)

L'amendement n°618 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°1074, présenté par Mme David et les membres du groupe  CRC-SPG.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Claude Danglot.  - Le dispositif mis en place par cet alinéa est totalement inefficace, à l'image de votre réforme. A vos yeux, tout se monnaye, même la pénibilité. Qu'est-ce que cet accord a de plus que les conventions collectives ? La loi ne saurait prévoir tous les cas. On voit avec l'article 55 de la loi SRU ce qu'il en est des sanctions financières : dans les Hauts-de-Seine, les communes UMP préfèrent payer l'amendement qu'applique l'article ! (Exclamations sur les bancs UMP) On voit ce qu'il en est de votre prétendue rénovation du dialogue social ! Il suffira qu'un employeur présente un plan d'action sans contenu pour échapper à toute sanction.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1074 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°446, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 6 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Gisèle Printz.  - Le système est bien rodé : au fil des lois, le compte épargne temps est devenu le réceptacle de toutes les dispositions du temps partiel. Quand Martine Aubry l'a créé, ce compte devait faciliter l'usage de la RTT. Vous en faites une aumône pour compenser la pénibilité et le trop faible salaire de ceux qui exercent les missions les plus pénibles.

M. le président.  - Amendement n°1075, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Il ne suffit pas d'avoir effectué un travail pour bénéficier de vos grâces, il faut que cela ait duré très longtemps. La pénibilité n'a pas à se monnayer !

M. le président.  - Amendement n°619 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps, MM. Lecerf et Beaumont, Mme Hermange et M. Darniche.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

M. Philippe Dominati.  - Le versement de primes de pénibilité aurait un effet pervers. Les branches et les entreprises se dédouaneraient ainsi de tout effort de prévention et d'amélioration des conditions de travail visant à ne pas laisser durablement les salariés dans des situations de pénibilité. Les salariés seraient incités à ne pas changer de poste ou de conditions de travail pour ne pas perdre le bénéfice de la prime.

M. le président.  - Amendement identique n°1076, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

M. Jean-Claude Danglot.  - On connaît, grâce aux organisations syndicales, les critères de pénibilité. L'homme ne doit pas perdre sa vie à la gagner. Votre monétisation de la souffrance est inacceptable. Accepteriez-vous qu'un salarié renonce à son droit de retraitE contre une prime ?

Vous considérez que tout est à vendre et acheter, y compris l'espérance de vie en bonne santé !

M. le président.  - Amendement n°1077, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Claude Danglot.  - Je l'ai présenté.

M. le président.  - Amendement n°1078, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-François Voguet.  - Si l'on veut que les seniors puissent être exploités jusqu'à 67 ans, il faut organiser leur présence au-delà du raisonnable. Du temps de Robert Boulin, Lionel Stoleru et François Périgot, l'État mettait la main au pot et les entreprises mettaient en préretraite les plus anciens. L'État se pliait sans barguigner aux désidérata des patrons. Vous cherchez maintenant une façon de faire passer la pilule. Vous instrumentalisez le souhait du salarié ancien en accumulant les congés dans les mois précédant sa retraite. Étrange manière de combattre la pénibilité...

M. le président.  - Amendement n°1079, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

Mme Michelle Demessine.  - Vous créez un fonds financé par les employeurs. Soit. Mais vous vous inscrivez dans une logique de branche, alors que nous voudrions une disposition législative, qui s'impose à tous et constamment. La loi est fondée sur le principe de l'universalité de son action.

Nous regrettons que ce fonds ne serve pas à l'amélioration des conditions de travail du salarié.

M. le président.  - Amendement n°584 rectifié, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste.

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les entreprises ainsi exonérées ne peuvent bénéficier de la prise en charge des dispositifs d'allègement ou de compensation de la pénibilité par le fonds dédié de la branche.

M. Jean-Paul Amoudry.  - Cet amendement de bon sens précise que les entreprises exonérées de la contribution au fonds dédié à la prise en charge des dispositifs d'allègement ou de compensation de la pénibilité au sein de la branche ne pourront pas bénéficier des prestations de ce fonds.

M. le président.  - Amendement n°488 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Gournac et J. Gautier, Mme Rozier et M. Cambon.

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L'accord prévoit également les conditions d'application du dispositif d'allègement ou de compensation de la charge de travail des salariés temporaires occupés à des travaux pénibles.

M. Jacques Gautier.  - L'accord collectif applicable à l'entreprise utilisatrice doit organiser les conditions d'application aux salariés temporaires occupés à des travaux pénibles, des mesures d'allègement ou de compensation de la charge de travail mises en place par ces entreprises pour leurs propres salariés.

A défaut il sera très difficile pour l'entreprise de travail temporaire d'organiser a posteriori les conditions d'un allègement ou d'une compensation de leur charge de travail.

M. le président.  - Amendement n°1080, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

Mme Annie David.  - Nous refusons l'article dans le rapport visé par cet alinéa, d'ailleurs flou. La pénibilité ne se monnaye pas, elle se combat !

présidence de M. Gérard Larcher

M. le président.  - Amendement n°447, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéas 12 à 13

Supprimer ces alinéas.

M. Jacques Mahéas.  - L'article crée in fine un fonds de soutien aux entreprises qui emploient des salariés à des travaux pénibles. Le dispositif était cohérent jusqu'à l'intervention de M. Dominati.

Vous avez été plus prudent ici que lorsque vous avez souhaité créer une caisse des fonctionnaires de l'État : on parle ici d'une simple expérimentation. Bien que nous refusions le principe des plans d'action, il est cohérent d'exempter les entreprises concernées.

Le président Méhaignerie a trouvé la façon la plus simple pour abonder le fonds : mettre à contribution les contribuables ! Vous bricolez une tuyauterie pour faire bénéficier les employeurs d'une aide nationale et régionale. (M. le président coupe la parole à l'orateur)

M. le président.  - Amendement n°1081, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Cette disposition n'a pas lieu d'être car la cotisation AT-MP de chaque entreprise est liée aux accidents du travail et maladies professionnelles déclarées. Vous mettez en place un dispositif dérogatoire pour siphonner la branche AT-MP au profit du patronat.

M. le président.  - Amendement n°448, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 12, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Les recettes de ce fonds sont constituées par le produit de la pénalité définie à l'article L. 138-29 du code de la sécurité sociale.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Il est étrange de consacrer de l'argent public à compenser la pénibilité, sans mettre les employeurs à contribution. L'effet incitatif sur l'entreprise est réduit à néant !

M. le président.  - Amendement n°622, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps, MM. Lecerf et Beaumont, Mme Hermange et M. Darniche.

Alinéa 12, dernière phrase

Après les mots :

maladies professionnelles

insérer les mots :

, qui ne peut être supérieure à celle de l'État,

M. Philippe Dominati.  - Tirant la leçon des fonds amiante et de leur constante sous-dotation par l'État, cet amendement établit un cofinancement équilibré entre l'État et la branche AT-MP afin de ne pas aggraver le solde déjà déficitaire de la branche.

M. le président.  - Amendement n°1082, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-François Voguet.  - Cet alinéa dispose qu'un décret en Conseil d'État fixera les modalités d'application de l'article, sans mentionner la consultation des organisations syndicales.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Les amendements n°s446 et 1075 tendent à supprimer des alinéas : défavorable. Il en va de même pour les amendements n°s619 rectifié, 1076, 1077, 1078 et 1079.

Avis favorable à l'amendement n°584 rectifié, de même qu'à l'amendement n°488 rectifié.

La commission repousse les amendements n°s1080, 447, 1081 et 448. Elle accepte l'amendement n°622, mais pas l'amendement n°1082.

M. Éric Woerth, ministre.  - Le Gouvernement est favorable aux amendements identiques de M. Dominati et Mme David n°s619 rectifié et 1076, car il serait paradoxal d'inciter les entreprises et les salariés à conserver les postes de travail pénibles.

Idem pour les amendements n°s584 rectifié et 488 rectifié.

L'amendement n°622 me pose problème : un amorçage d'argent public est nécessaire, mais pas au point d'égaler la contribution du fonds AT-MP. Défavorable aux autres amendements.

L'amendement n°446 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°1075.

M. Daniel Raoul.  - Vous touchez l'acmé de l'hypocrisie avec ce texte.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Des sépulcres blanchis, il y en a partout !

M. Daniel Raoul.  - Et à Marseille ?

M. Jean-Claude Gaudin.  - Plus blanc que blanc ! (Sourires)

M. Daniel Raoul.  - Je ne comprends pas que l'on supprime une prime liée à la pénibilité : les intéressés ne percevront rien, tout en conservant leurs conditions de travail.

Je voterai contre les amendements identiques n°s619 rectifié et 1076.

M. Jacques Mahéas.  - Je me demandais comment le ministre allait se dépatouiller de ce dispositif. M. Dominati propose que les collectivités territoriales participent au dispositif. Bien sûr : leurs finances sont florissantes !

Nous verrons dans quel sens ira le Gouvernement pour que le fonds de soutien serve à quelque chose. (Mouvements divers à droite) Nous discutons cette loi pas à pas. Puisque vous êtes présents, écoutez ceux qui ont quelque chose à dire. La complication de cette loi me rappelle les Prisons de Piranèse. Si vous ne connaissez pas ces magnifiques gravures du XVIIIe siècle, allez les contempler !

Les amendements identiques n°s619 rectifié et 1076 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°1077 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s1078 et 1079.

L'amendement n°584 rectifié est adopté, de même que l'amendement n°488 rectifié.

L'amendement n°1080 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s447, 1081 et 448.

L'amendement n°622 est adopté.

L'amendement n°1082 n'est pas adopté.

A la demande du groupe CRC-SPG, l'article 27 ter A, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 334
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l'adoption 182
Contre 152

Le Sénat a adopté.

L'Article 27 ter demeure supprimé, de même que les articles 27 quater et 27 quinquies.

Article 27 sexies A

M. Éric Woerth, ministre.  - Je souhaite la réserve de l'article 27 sexies A jusqu'à mercredi, pour mettre au point une rédaction solide. Il s'agit de l'amiante. La commission a procédé à des avancées que nous acceptons ; il faut peaufiner le texte.

M. Gérard Dériot, vice-président de la commission des affaires sociales.  - Sur le fond, le Gouvernement est donc d'accord. Je pense que la commission approuve la réserve.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Si c'est pour avoir un texte plus solide, j'accepte la réserve jusqu'à mercredi.

Mme Annie David.  - Je suggère que la commission se réunisse avant la séance publique.

M. Gérard Dériot, vice-président de la commission.  - S'il y a amendement du Gouvernement, la commission se réunira, bien sûr.

La réserve est acceptée.

Les articles 27 sexies et 27 septies demeurent supprimés.

Article 27 octies

M. le président.  - Amendement n°1083, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Remplacer l'année :

2014

par l'année :

2012

Mme Annie David.  - Pourquoi repousser le rapport à 2014 ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La date de 2014 est cohérence avec le dispositif.

L'amendement n°1083, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1167 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf et Darniche.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Philippe Dominati.  - Il convient de ne pas présumer des conclusions du rapport du Gouvernement pour évaluer le dispositif de compensation de la pénibilité.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La commission souhaite que la réflexion sur la pénibilité à effet différé soit lancée sans tarder.

Le sous-amendement n°1167 rectifié est retiré.

L'article 27 octies est adopté.

Article 28

Mme Jacqueline Alquier.  - Cet article étend le régime des exploitants agricoles à leurs aides familiaux, une disposition que nous demandions depuis longtemps.

A l'époque de M. Jospin, les chefs d'exploitation avaient bénéficié de droits gratuits. Dommage que ce ne soit pas repris aujourd'hui. Dommage que le champ d'application de l'article soit aussi étroit. Je rappelle à ce sujet que les retraites agricoles ne dépassent guère 645 euros pour les chefs d'exploitation. Il faudrait au moins les porter à 709 euros, montant de l'allocation remplaçant le minimum vieillesse.

M. Yannick Botrel.  - Cet article constitue une avancée, mais qui ne règle pas le fond du problème : la faiblesse des retraites agricoles.

M. Roland Courteau.  - Une honte !

M. Yannick Botrel.  - Près de 90 % des intéressés sont en dessous du seuil de pauvreté. Les pensions agricoles sont calculées sur l'ensemble de la carrière au lieu des 25 meilleures années de droit commun.

Pour échapper au couperet de l'article 40, le groupe socialiste demande un rapport. La réforme des retraites aurait mérité une véritable réflexion sur les retraites agricoles, qui nécessitent un examen global. Dans l'agriculture, le départ à 62 ans ne prend pas en compte la durée des carrières, ni l'absence de congés.

Nous ne pouvons être défavorables à l'article, mais vous demandons la justice pour les agriculteurs retraités. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Guy Fischer.  - Le secteur agricole est emblématique du fossé qui se creuse entre riches et pauvres. Toutes branches confondues, les agriculteurs sont en colère et inquiets, car ils ne bénéficient pas de prix rémunérateurs.

L'extension de la RCO est une mesure d'équité favorisant les personnes les plus démunies, notamment les épouses qui ont contribué sans reconnaissance aucune à la vie de l'exploitation. Cependant, le Gouvernement ne veut pas attribuer de droits gratis, contrairement à ce qui avait été décidé en 2003. La retraite complémentaire sera donc symbolique, pendant longtemps.

J'ajoute que les agriculteurs surcotisent souvent à la retraite complémentaire. Quelles seront les modalités retenues dans le décret ?

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a revalorisé les retraites des conjoints collaborateurs qui cotisent davantage depuis la création de leur régime en 1999. Nous proposons d'étendre la pension de réversion aux couples pacsés depuis plus de deux ans.

Mme Christiane Demontès.  - La retraite des agriculteurs concerne 4 millions de nos concitoyens, salariés pour la moitié.

Les retraites agricoles sont particulièrement faibles : les chiffres ont déjà été cités. Ils reflètent la faiblesse des revenus agricoles, inférieurs à 16 000 euros annuels pour 70 % des exploitants.

En période de crise, les cours insuffisants plombent les revenus. J'ajoute que les pensions sont assises sur la moyenne de la totalité des carrières, et non sur les meilleurs années.

Les crises des prix agricoles n'épargnent personne, avec des baisses atteignant 34 % ! Le présent texte ne change rien à la situation, qui menace 200 000 à 300 000 emplois.

Le gouvernement de M. Jospin avait élaboré un plan national, relevant les retraites jusqu'à 80 % ! L'effort budgétaire avait été très substantiel.

Conjointement, un régime complémentaire avait vu le jour, largement subventionné par l'État.

A l'Assemblée nationale, l'UMP a refusé d'étendre le régime complémentaire aux conjoints.

En 2008, le Président de la République a dénoncé à Rennes «  une situation indigne ».

M. le président.  - Concluez.

Mme Christiane Demontès.  - Il s'était engagé à y remédier. Or, ce texte ne comporte presque rien. L'extension de la RCO ne change pas le sort des retraités.

M. le président.  - Amendement n°267, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

I. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

6° À l'article 4 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « ou un non-salarié ».

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean Desessard.  - La baisse catastrophique des prix agricoles traduit les conséquences calamiteuses d'une politique libérale.

En 1999, les revenus agricoles ont fortement baissé.

En 2007, 80 % des non-salariés agricoles percevaient moins de 750 euros par mois, ce qui les place sous le seuil de pauvreté.

De nombreux retraités agricoles ne perçoivent que des pensions très faibles. Notre amendement garantirait une pension décente à tous.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'objectif est louable, puisqu'il étend aux non-salariés le principe posé en 2003. Vous avez cependant oublié de revoir les assiettes des cotisations.

Avis défavorable à cet amendement incohérent.

M. Éric Woerth, ministre.  - Les retraites agricoles sont très récentes. Il est évidemment regrettable que les retraites agricoles soient si faibles, mais les cotisations versées sont aussi considérablement plus basses.

M. Jean Desessard.  - J'aurais aimé plus de compréhension de la part du rapporteur à propos d'une retraite atteignant 85 % du Smic. Que vous refusiez mon amendement est une chose, mais le mot « incohérent » est de trop.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - J'avais simplement opposé deux propositions que vous aviez faites.

L'amendement n°267 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°41, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le Gouvernement remet au plus tard, dans les six mois qui suivent la promulgation de cette loi, aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, un rapport étudiant l'opportunité de la suppression de la référence de la durée minimale de cotisation dans le cadre de la majoration des retraites des non salariés agricoles.

Mme Annie David.  - L'article L. 732-25-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit la possibilité de bénéficier d'une majoration de pension, mais sous condition difficile à remplir : celle de la durée minimale de cotisation prévue à l'article L. 732-25 du code de la sécurité sociale. Cela revient à exiger des non-salariés agricoles qu'ils disposent d'une carrière complète. Cela écarte donc de ce dispositif de majoration ceux des non-salariés agricoles dont les carrières sont incomplètes, alors même que leurs pensions sont les plus faibles.

Comme toujours, les femmes sont les principales victimes.

La demande d'un rapport est motivée par l'article 40...

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il ne peut y avoir de majoration de surcote pour une carrière incomplète.

Mme Annie David.  - J'ai un courrier de M. Le Maire, ministre de l'agriculture, dans lequel il indique qu'avec M. Fillon et M. Woerth, il est attentif au niveau des petites pensions agricoles. Cela ne semble pas suffisant pour accepter un rapport qui ne vous aurait rien coûté.

L'amendement n°41 n'est pas adopté.

M. Claude Jeannerot.  - Cet article 28 est une exception -timide- au sein d'un texte globalement régressif.

La RCO mise en place par la loi du 4 mars 2002 s'inscrivait dans un mouvement de fond que le Gouvernement de gauche avait fortement accéléré.

Malheureusement, ce sont les conjoints et aides familiaux qui n'avaient pu être intégrés dans la loi, dont l'article 5 comportait toutefois un dispositif de principe. Depuis, la majorité gouvernementale n'a rien fait.

Aujourd'hui, le Gouvernement semble enfin disposé à reprendre le sujet, mais avec un bémol.

La rédaction de l'article 28 prévoit une restriction forte en écartant les personnes déjà cotisantes, soit 10 % et 56 000 personnes qui ont déjà ce statut. Il faudra élargir le champ d'application de cet article, que nous allons voter car il est positif, bien que tardif et insuffisant.

L'article 28 est adopté.

Article 28 bis

Mme Jacqueline Alquier.  - Cet article propose une réflexion sur une modification du mode de calcul de la retraite de base agricole, en le fondant sur les 25 meilleures années. Notre proposition en ce sens a été repoussée par l'Assemblée nationale, quand un amendement fort proche, mais émanant de l'UMP était adopté -témoignage du mépris dans lequel vous tenez l'opposition.

M. Yannick Botrel.  - Rien ne justifie que les retraites agricoles ne soient pas fondées sur les 25 meilleures années. Les résultats d'exploitation sont très variables d'une année l'autre, ne serait-ce qu'à cause des crises et des aléas climatiques.

A cause de l'article 40, nous ne pouvons demander qu'un rapport pour faire avancer les choses -en espérant qu'il ne reste pas lettre morte.

M. Claude Domeizel.  - Comment accepter que le calcul des pensions soit fondé sur 162 trimestres ? Les demandes du monde agricole sont récurrentes. Le report de 65 à 67 ans constituera une extrême injustice, qui pénalisera les conjoints d'exploitants au premier rang desquels les femmes.

Le gouvernement Jospin s'était engagé à porter les pensions agricoles à 75 % du Smic. Depuis 2002, on n'a pas avancé. Il manque encore 350 euros... tandis que la majorité multiplie les cadeaux fiscaux aux plus aisés et les niches fiscales. Illustration supplémentaire du double langage de l'UMP et du Président de la République, celui-ci ayant promis en début de mandat de réduire les poches de pauvreté dans le monde agricole. Il lui est décidément bien difficile de passer de la parole aux actes.

M. le président.  - Amendement n°42, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger ainsi cet article :

Le Gouvernement remet, dans les douze mois qui suivent l'adoption de la présente loi, aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Senat, un rapport évaluant les différents mécanismes à mettre en place pour garantir, dans un souci d'alignement avec le régime général, aux salariés non agricoles une retraite au moins égale à 85 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance. À ce titre il étudie notamment la possibilité de n'appliquer les coefficients d'adaptation qu'aux pensions atteignant 85 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance net.

Mme Michelle Demessine.  - Nous sommes favorables à tout commencement de mesures visant à remédier aux injustices que subit le monde agricole. La référence aux 25 meilleures années n'est pas satisfaisante ; il faut se référer aux dix meilleures. Depuis la réforme de la PAC en 1992, les prix agricoles ont baissé de 30 % ; la crise de 2008 a démontré les effets délétères des opérateurs financiers sur les marchés agricoles à terme.

M. le président.  - Amendement n°43, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les évolutions législatives et réglementaires permettant d'augmenter de 25 % d'ici à 2012 les pensions majorées de référence pour les non salariés agricoles.

Mme Odette Terrade.  - L'article 40 nous contraint de ne demander qu'un rapport... Contrairement aux promesses, en 2009, seul le minimum vieillesse pour une personne seule a bénéficié d'une augmentation de 6,95 %. Or 90 % des mono-pensionnés agricoles n'atteignent pas le seuil de pauvreté, soit 817 euros par mois. Les revalorisations n'ont été, dans 40 % des cas, que de 10 euros !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La commission s'en tient au rapport du Gouvernement. Défavorable à ces amendements.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°42 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°43.

M. Jean Desessard.  - L'article 28 bis illustre la frilosité du Gouvernement -sauf lorsqu'il s'agit de relever les limites d'âge- et les incohérences du rapporteur. On augmente les cotisations des fonctionnaires au nom de la convergence, mais pour les polypensionnés, seulement un rapport ; pour les retraites des agriculteurs, seulement un rapport. Où est la convergence ?

M. Claude Jeannerot.  - Pourquoi le projet de loi initial ne comportait-il aucune disposition concernant l'alignement du mode de calcul des retraites agricoles sur celui du régime général ? Espérons que cet article permettra une relance du débat sur le montant indigne des pensions versées au monde agricole.

L'article 28 bis est adopté.

Article 29

Mme Jacqueline Alquier.  - Cette mesure facilitera l'accès de nombreux retraités au minimum vieillesse ; nous nous en réjouissons. Mais il faudrait en étendre le champ d'application aux pacsés et aux concubins. L'usage de l'article 40 nous contraint une nouvelle fois à réclamer un rapport pour faire entendre nos propositions.

M. Yannick Botrel.  - Cet article présente une avancée, puisqu'il permet à l'agriculteur de porter sa pension à 708,95 euros pour une personne seule. C'est encore loin du Smic, mais c'est une avancée par rapport aux 645 euros que perçoivent en moyenne les chefs d'exploitation.

De nombreux agriculteurs renoncent au minimum vieillesse en raison du risque de recours sur succession. La proposition du Gouvernement est cependant insuffisante ; on est loin du « traitement équitable des assurés » dont parlait la loi de 2003. Le taux de retraite de réversion des veuves n'est que de 54 %. C'est scandaleux ! Les polypensionnés seront les grands perdants, et ils sont nombreux.

M. Claude Domeizel.  - Ce projet de loi s'inscrit dans la logique des réformes de 1993 et de 2003. Un exploitant agricole ayant une carrière complète touche une pension de 700 euros -980 dans le régime général. Et le montant des retraites servies diminue.

Face à cette situation, le Gouvernement ne fait preuve d'aucune détermination et s'est bien gardé de faire bénéficier les femmes retraitées de la retraite complémentaire obligatoire ; 15 000 conjointes d'exploitant ne perçoive rien. Voyant la paupérisation de leurs aînés, nombre d'agriculteurs renoncent au minimum vieillesse par crainte du recours sur succession ; nombreux sont ceux qui ne perçoivent que 300 ou 400 euros.

Nous sommes en droit de vous interroger sur les conséquences budgétaires de cet article, notamment pour le FSV.

M. Jean Desessard.  - Les retraités agricoles touchent des pensions ridicules ; pour compenser, ils vendent leurs exploitations très cher, ce qui freine l'installation des jeunes agriculteurs.

L'article 29 est adopté.

Article 29 bis

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - L'assurance-veuvage a été abrogée dans la loi de 2003, en contrepartie de l'abaissement de l'âge d'accès à la réversion à 50 ans au 1er juillet 2009 puis sans condition d'âge au 1er janvier 2011. Vous êtes revenus sur cette promesse lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Cet article rétablit l'assurance-veuvage, mais exclut les pacsés, ce qui est discriminatoire. La Halde s'en est d'ailleurs émue.

Mme Gisèle Printz.  - Cet article réintroduit l'assurance-veuvage abrogée en 2003. Les pacsés seront sans doute de plus en plus nombreux : ils doivent bénéficier aussi de la pension de réversion, comme la Halde l'a recommandé. Lors de sa campagne, M. Sarkozy plaidait en ce sens, y compris, disait-il, pour les couples homosexuels. Il semble qu'il ait une fois de plus oublié ses promesses... Il faut mettre fin à cette discrimination.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je tiens beaucoup à la question de la réversion entre les pacsés. Je l'avais évoquée lors de l'examen d'une de nos propositions de loi. La majorité, la rapporteure Mme Panis, la présidente de la commission, le représentant du Gouvernement avaient éludé, et la commission des lois...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Non ! Elle n'a rien dit !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Admettons que la commission des lois n'ait rien. On ne peut se contenter de nous répondre que l'on ne va pas créer un droit à un moment où on manque d'argent. S'il y a plus de pacs, il y a moins de mariages, les choses s'équilibrent ; et ce n'est pas le nombre de couples homosexuels qui pèseront financièrement...

M. le président.  - Amendement n°1210, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Alinéa 17, première phrase

Supprimer (deux fois) les mots :

en Conseil d'État

II. - Alinéa 23, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

III. - Après l'alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 356-5. - Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret. »

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Amendement de simplification.

M. le président.  - Amendement n°651, présenté par M. Fouché.

Alinéa 51

Supprimer cet alinéa.

M. Alain Fouché.  - De nombreux rapports sur les droits des conjoints survivants ont été produits ces dernières années, de celui de la Mecss à celui du Cor de décembre 2008. Un nouveau document n'est pas nécessaire.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis que la commission.

L'amendement n°1210 est adopté. L'amendement n°651 n'est pas adopté.

L'article 29 bis, modifié, est adopté.

L'article 29 ter demeure supprimé, ainsi que l'article 29 quater.

Article 29 quinquies

M. le président.  - Amendement n°945, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger comme suit cet article.

Après l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 242-1-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 242-1-1 A. - Les gratifications résultant de la réalisation d'un stage visé à l'article 9 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances sont assujetties aux cotisations visées à l'article L. 241-13. Un décret précise les modalités d'application du présent alinéa.

« Un décret précise la part de la gratification qui est soumise à la part salariale des contributions visées à l'article L. 242-1 ainsi que les modalités de recouvrement et de validation des droits acquis. »

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Nous voulons de vraies garanties pour les stagiaires qui, selon Génération précaire, sont 1,2 million. Le passage par un stage après les études est devenu une étape indispensable, c'est plus simple et moins coûteux pour les entreprises qui demandent une expérience professionnelle.

Ces stages, souvent sur des emplois réels, peuvent durer des années et contribuent au dynamisme de l'économie. Mais les stagiaires ne cotisent ni pour le chômage, ni pour la retraite...

M. le président.  - Amendement n°948, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer les mots :

éventuellement sur la base d'un forfait,

M. Guy Fischer.  - Une nouvelle fois, le Gouvernement repousse à plus tard la prise en compte des réalités. Notre jeunesse subit un véritable bizutage social avant d'obtenir un emploi, en moyenne à 27 ans, et encore en CDD. Autant d'années pendant lesquelles les jeunes ne cotisent pas pour la retraite.

Le Gouvernement se contente d'un rapport, dont on peut espérer que les conclusions ne seront pas purement et simplement celles qu'annonce cet article.

M. le président.  - Amendement n°947, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :

II. - La participation des détenus aux activités professionnelles organisées dans ou en dehors des établissements pénitentiaires donne lieu à l'établissement d'un contrat de travail entre l'administration pénitentiaire, l'employeur et le détenu. Ce contrat prend en compte les conditions spécifiques inhérentes à la détention.

Il énonce les conditions de travail et de rémunération du détenu et précise ses droits et obligations professionnelles qu'il doit respecter ainsi que la protection sociale dont il bénéficie.

Il stipule en particulier les indemnités perçues en cas d'accident de travail et de perte d'emploi.

Il précise notamment les modalités selon lesquelles le détenu, dans les conditions adaptées à sa situation et nonobstant les dérogations du contrat de travail au droit commun, bénéficie des dispositions relatives à l'insertion par l'activité économique prévues aux articles L. 5132-1 à L. 5132-17 du code du travail.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous n'avons pas eu de chance à propos de la réversion des pacsés... Je pose maintenant la question du travail des détenus, qui doivent pouvoir signer un contrat de travail avec l'employeur et l'administration pénitentiaire. L'Observatoire international des prisons a dénoncé les conditions de travail des détenus.

En 2009, le salaire moyen des détenus a été de 233 euros. A ce compte, il n'est pas utile de délocaliser ! Un homme qui a travaillé ainsi plus de 21 ans s'est vu proposer à sa sortie, à 60 ans, une retraite de 22,40 euros brut.

M. le président.  - Amendement n°1178, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet, au plus tard le 31 décembre 2010, aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, un rapport portant sur l'assimilation des périodes de travail en détention comme des périodes de cotisations à part entière.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Cet amendement est justifié par ce que je viens de dire.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°945. Favorable à l'amendement n°948. Défavorable aux amendements n°s947 et 1178.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable pour les stages : nous voulons d'abord un rapport. Je dirai la même chose pour les prisons, ce qui me fait accepter l'amendement n°1178, pourvu que vous nous laissiez davantage de temps, jusqu'au 30 juin 2011.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Soit, à titre personnel.

L'amendement n°945 n'est pas adopté.

L'amendement n°948 est adopté.

L'amendements n° 947 n'est pas adopté.

L'amendement n°1178 rectifié est adopté.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Les aspirations des jeunes sont banales, or elles ne sont pas satisfaites : après leurs études, ils se retrouvent stagiaires, sous-payés, et sans cotisation pour la retraite. Le Gouvernement vient de publier un décret interdisant les stages hors cursus, mais en multipliant les exceptions.

Il en coûte 450 euros pour ajouter une expérience professionnelle à leur CV. Encore faut-il en avoir les moyens.

Une jeunesse désenchantée est en première ligne sur le front de l'emploi. Un simple rapport du Gouvernement ? Nous nous abstiendrons.

M. Jean Desessard.  - De nombreux jeunes enchaînent des stages, car ils peinent à s'insérer sur le marché du travail. Le Gouvernement n'est pas frileux pour reculer les bornes d'âge et faire payer les salariés ; le rapporteur n'est pas en reste au nom de la cohérence ! Mais quelle frilosité pour les polypensionnés, les salariés non agricoles ! Où est la justice du texte ? S'il y avait un point sur lequel un rapport s'imposait, c'est la question du premier emploi des jeunes.

L'article 29 quinquies, modifié, est adopté.

Article 29 sexies

M. Jacky Le Menn.  - De nombreux obstacles entravent le départ à la retraite des personnes handicapées, qui doivent réunir trois conditions cumulatives. L'article permettra-t-il au million de travailleurs handicapés de partir à la retraite ? A priori, oui, mais de nombreux obstacles demeurent, comme la règle des 25 meilleures années ou l'apparition d'un handicap en cours de travail.

La reconnaissance du caractère handicapé d'une personne arrive souvent tard. La condition de 30 ans sera donc éliminatoire.

Enfin, l'article ne concerne pas les fonctionnaires. Il serait bon de le revoir.

M. le président.  - Amendement n°1234 rectifié, présenté par le Gouvernement.

I. - Faire précéder cet article de la référence :

I

II. - Après les mots :

code de la sécurité sociale,

insérer les mots :

au III des articles L. 643-3 et L. 723-10-1 du même code et à l'article L. 732-18-2 du code rural et de la pêche maritime,

M. Éric Woerth, ministre.  - Cet amendement étend aux travailleurs non-salariés le dispositif adopté par le Sénat.

L'amendement n°1234 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 29 sexies, modifié, est adopté.

L'article 30 est adopté.

Article 31

M. Jean Desessard.  - Nous abordons le non-respect de l'obligation de diagnostic sur l'égalité salariale entre hommes et femmes. Depuis 30 ans on n'a pas avancé. Le vrai sujet des retraites concerne les inégalités salariales, outre l'incidence du départ à 67 ans. Il faut sanctionner les entreprises qui traitent différemment les salariés hommes et femmes.

M. Claude Domeizel.  - L'écart entre hommes et femmes en matière de retraite est avéré, largement en raison des discriminations subies par les femmes au cours de leur carrière, malgré un diplôme souvent plus élevé. D'où vient l'écart ? Largement du travail à temps partiel et du moindre nombre d'heures supplémentaires. A quelques semaines du 31 décembre, le bilan du dispositif incitatif est décevant, puisque 40 % des branches n'avaient entamé aucune négociation depuis 2008.

Nous voulons conforter l'égalité professionnelle entre hommes et femmes, en sanctionnant les entreprises qui ne font rien.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Cet article institue une pénalité pouvant atteindre 1 % de la masse salariale, à la charge des entreprises n'ayant rien fait pour assurer l'égalité entre hommes et femmes.

Toutefois, cette sanction pourra être modulée, à la baisse, en fonction des efforts des entreprises. Il faut donc établir une grille d'appréciation. Le seuil de 50 salariés est positif, mais je regrette la mise à l'écart des TPE car l'égalité est un droit universel.

Mme Odette Terrade.  - L'égalité professionnelle entre hommes et femmes aurait mérité un débat au grand jour. La discrimination que subissent les femmes vient s'ajouter aux rapports de classe.

Aujourd'hui, le taux d'activité des femmes atteint 80 %, à l'issue d'évolutions historiques très contrastées. Elles sont majoritaires dans de nombreux postes de la fonction publique. Dans le secteur privé, un plafond de verre s'ajoute aux discriminations salariales.

Les accords de branche relatifs à l'égalité entre hommes et femmes sont assez récents. Le Gouvernement vise ici les entreprises de plus de 50 salariés, où l'égalité est déjà revendiquée par les organisations syndicales.

Avec un effet de seuil, le texte s'arrête en chemin. Les chefs d'entreprise battront leur coulpe, avant de se congratuler chaque année d'être sur la bonne voie, même sans progrès réel !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les discours du Gouvernement sur les femmes n'ont pas manqué, notamment depuis que l'injustice de la réforme des retraites envers les femmes a été mise en évidence. Celles ayant élevé au moins trois enfants bénéficient d'un régime spécifique... à condition d'être nées entre 1951 et 1956 !

L'article 30 satisfait enfin une vieille revendication, mais il faudra patienter jusqu'en 2012 ! Quand vous accordez un droit, vous le différez. Il n'en va pas de même quand vous en supprimez un, c'est toujours d'application immédiate.

La loi du 23 mars 2006, relative à l'égalité salariale, a institué des négociations de branche sur l'égalité salariale entre hommes et femmes. Vous repoussez le dispositif au bénéfice d'une nouvelle disposition... applicable à partir de 2012 ! Encore une fois, vous lâchez la proie pour l'ombre.

Vient enfin la mesure phare de l'article : la sanction par versement de 1 % de la masse salariale dans les entreprises de plus de 50 salariés. Les employeurs préféreront payer plutôt que d'assurer l'égalité des rémunérations. Nous proposons 10 %, dès onze salariés.

Mme Annie David.  - L'article 31 est important pour l'égalité salariale. Ce n'est pas de notre faute s'il arrive à 3 heures du matin, alors que rien n'empêcherait de lever la séance et de le reprendre à une heure raisonnable. Comme par hasard, le débat s'accélère quand on aborde l'égalité entre hommes et femmes. Les femmes sont plus touchées par le chômage, avant de percevoir des pensions de retraite inférieures. Malgré toutes les lois, l'inégalité professionnelle n'a pas reculé malgré des diplômes plus élevés que ceux des hommes.

Parmi les retraités pauvres, huit sur dix sont des femmes. 30 % des femmes partent à la retraite à 65 ans contre 5 % des hommes, pour ne pas subir de décote. Elles sont nombreuses à ne percevoir que les 677 euros du minimum vieillesse.

Pourquoi cet article au milieu de la loi sur les retraites ? Vous devriez plutôt faire respecter les lois existantes sur l'égalité professionnelle. Que deviendra la sanction figurant dans le code du travail ?

Bien sûr, le taux de 1 % est un maximum... Les lois antérieures avaient fixé le délai limite au 31 décembre 2010, mais vous accordez encore un délai aux entreprises ! Est-ce ainsi que vous ferez cesser ce que vous avez dénoncé vous-même, monsieur le ministre, comme le scandale de la République ?

M. le président.  - Amendement n°581, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 2242-5 du code du travail, après les mots : « porte notamment » sont insérés les mots : « sur l'égalité salariale, ».

M. Jean-Claude Merceron.  - L'objet de cet amendement est de préciser que l'accord relatif à l'égalité professionnelle mentionné à l'article L. 2242-5 du code du travail porte, en particulier, sur l'égalité salariale.

L'amendement n°581, repoussé par la commission et le Gouvernement, est retiré.

M. le président.  - Amendement n°1085, présenté par Mme Terrade et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 2242-5-1. - Les entreprises d'au moins onze salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l'employeur lorsqu'elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l'égalité professionnelle mentionné à l'article L. 2242-5. Les modalités de suivi de la réalisation des objectifs et des mesures de l'accord sont fixées par décret.

Mme Annie David.  - L'article 31 est très insuffisant pour assurer l'égalité professionnelle entre hommes et femmes. Le mieux à faire est de supprimer l'article, pour discuter ensuite une vraie loi.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Défavorable.

M. Gérard Longuet.  - Il est statistiquement exact que les femmes travaillent plus souvent à temps partiel que les hommes. Mais l'Ined et l'Insee ont montré en 2005 que 61,5 % des intéressées l'avaient choisi pour convenance personnelle et familiale. En outre, 13 % des postes concernés sont par nature à temps partiel. Au total, 17 % des femmes concernées n'ont pas choisi le travail à temps partiel parce qu'elles n'ont pas trouvé autre chose.

Au total, 16 % des salariés exercent une activité professionnelle à temps partiel. Nous devrions réfléchir au moyen de mettre le temps partiel au service de l'épanouissement de salariés. (Applaudissements à droite)

Mme Annie David.  - Bien sûr, ce type d'emploi est parfois choisi pour des raisons de convenance personnelle et familiale. Pourquoi n'est-ce pas le cas des hommes ? Pourquoi les femmes ne trouvent-elles pas autant d'emplois à temps plein que les hommes ? Le travail à temps partiel peut être choisi...

M. Gérard Longuet.  - Dites-le !

Mme Annie David.  - Encore faut-il en avoir les moyens. Les femmes travaillant à temps partiel bénéficieront-elles d'une retraite équitable ?

M. Gérard Longuet.  - Elles auront un soutien familial et leurs enfants leur seront reconnaissants !

Mme Annie David.  - Dans la plupart des cas, la « convenance familiale et personnelle » s'explique par l'impossibilité d'obtenir une place en crèche.

M. Jean Desessard.  - Le raisonnement de M. Longuet contredit celui du ministre, qui a mis l'accent sur les inégalités professionnelles, tout en annonçant leur résorption. En tout cas, s'il y a choix, le temps partiel procure un revenu d'appoint dans un couple mais s'il se sépare ? Vous devriez proposer de venir en aide à la femme qui a choisi de travailler sous cette forme. Et si le temps partiel est toujours choisi, les retraites des femmes seront toujours réduites ...

Mme Raymonde Le Texier.  - M. Longuet s'est lancé sur un terrain délicat.

M. Gérard Longuet.  - J'ai cité le résultat d'une enquête réalisée par l'Ined et l'Insee. Elle concerne toutes les femmes.

Mme Raymonde Le Texier.  - Celles que je rencontre qui travaillent à temps partiel pour des raisons de convenance auraient préféré soit rester chez elles, soit travailler à plein temps.

Quant à leur retraite, vous avez dit, mezzo voce, qu'elles pourront compter sur la reconnaissance de leurs enfants.

M. Gérard Longuet.  - La solidarité intergénérationnelle existe. Nous ne sommes pas dans une société d'égoïsme.

Mme Raymonde Le Texier.  - Ma mère, âgée de 95 ans, fait des économies, car elle est obsédée par le placement en maison et ne veut pas être à la charge de ses enfants. Nous, nous aidons nos enfants, nous ne partageons vraiment pas la même conception.

M. Claude Domeizel.  - Je ne comptais pas expliquer mon vote sur l'article 31, mais M. Longuet a évoqué le choix par les femmes du travail à temps partiel.

M. Gérard Longuet.  - J'ai cité une étude de l'Insee.

M. Claude Domeizel.  - Dans mes permanences, je reçois des femmes qui me sollicitent pour avoir un travail à temps complet, au lieu des horaires éclatés pendant la journée.

Je connais la fonction publique territoriale. Le temps partiel y est utilisé par des femmes qui choisissent de le faire. Il est vrai que les femmes sont plus souvent candidates pour les empois à temps partiel, mais elles demandent souvent de passer à temps plein.

Dans le privé, le temps partiel est subi !

L'amendement n°1085 n'est pas adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, mardi 19 octobre 2010, à 14 heures 30.

La séance est levée à 3 heures 15.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mardi 19 octobre 2010

Séance publique

A 14 HEURES 30, LE SOIR ET, ÉVENTUELLEMENT, LA NUIT

Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites (n°713, 2009-2010).

Rapport de M. Dominique Leclerc, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°733, 2009-2010).

Texte de la commission (n°734, 2009-2010).

Avis de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances (n°727, 2009-2010).

Rapport d'information de Mme Jacqueline Panis, fait au nom de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (n°721, 2009-2010).