Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales.

Patrimoine immobilier de l'État à l'étranger

M. Richard Yung.  - L'État possède un patrimoine immobilier considérable à l'étranger, d'une valeur de 4,5 à 5 milliards. Aujourd'hui, on vend les bijoux de famille, ce qui se justifie parfois : la vente de l'hôtel de la rue Monsieur permet la rénovation du Quai d'Orsay ; à Tokyo, une nouvelle ambassade a été construite. Mais dans d'autres cas, la décision est plus problématique : d'abord, une résidence d'ambassadeur est un lieu de l'activité diplomatique. Ensuite, après avoir vendu, il faut louer ; et quand on loue, le fruit de la vente disparaît en quelques années : on a croqué le magot !

Le Gouvernement peut-il faire le point sur la question ? Où en est le projet de création d'une agence foncière de l'Etat à l'étranger, qui semble abandonné au profit d'un partenariat avec une filiale de la Caisse des dépôts ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Richard Yung.  - Je serai très bref.

M. le président.  - Certes, mais il y a dix-huit questions !

M. Richard Yung.  - Enfin, toutes ces opérations manquent de transparence. Le Quai d'Orsay a beaucoup de mal à s'ouvrir aux élus ; à défaut de dialoguer, nous aimerions être informés !

M. Henri de Raincourt, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - Le ministère des affaires étrangères gère 1 500 biens immobiliers à l'étranger dans 160 pays. Certains ont une grande valeur historique ; l'entretien de ce parc coûte cher. Le ministère cherche à le valoriser, par exemple en louant les espaces de réception des ambassades. Il faut continuer dans cette voie.

Le Conseil de modernisation des politiques publiques avait envisagé en 2008 la création d'une agence, mais les contraintes juridiques et les difficultés financières ont fait renoncer à ce projet. Mme Alliot-Marie a donc engagé une négociation avec la Sovafim, société anonyme à capitaux publics créé en 2006, pour étudier différentes possibilités de délégation de maîtrise d'ouvrage sur quelques grosses opérations immobilières à l'étranger. Cette formule souple et pragmatique apparaît aujourd'hui bien plus efficace que celle de la constitution d'un opérateur ad hoc.

M. Richard Yung.  - Je reste sur ma faim : nous n'avons aucune précision sur la politique immobilière de l'Etat à l'étranger. Elle est pourtant planifiée, au moins à court terme... Les Français de l'étranger sont très sensibles à cette question : les bâtiments diplomatiques sont un peu leur mairie et leur préfecture ! Souvent, ils apprennent les décisions en lisant le journal : ce fut par exemple le cas pour la vente de la villa du consul général à Hong-Kong.

Abattoirs en Loraine

Mme Gisèle Printz.  - La fermeture de la chaîne d'abattage des agneaux de l'abattoir Charal à Metz a retenti le mois dernier comme un coup de tonnerre ; elle oblige les éleveurs à parcourir des dizaines de kilomètres, au péril de leur diversification. Des filières entières sont menacées, et l'abattage clandestin est encouragé. Quid de l'abattage rituel des musulmans ?

Le ministère appelle de ses voeux une agriculture française diversifiée, fondée sur des circuits courts. Quelles solutions alternatives envisage-t-il en l'occurrence ?

M. Henri de Raincourt, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Le Maire, actuellement au Parlement européen.

Dans certaines zones, les abattoirs connaissent des difficultés en raison de la faiblesse du tonnage qu'ils ont à traiter ; pourtant ils contribuent au maintien d'activités agricoles et à la valorisation des produits locaux. Le ministère a lancé un audit économique et sanitaire.

Par ailleurs, le ministre de l'agriculture a demandé différentes études au Conseil général de l'agriculture, de l'aménagement et des espaces ruraux. Elles portent notamment sur la façon d'assurer une meilleure prise en compte de la dimension territoriale de l'organisation de nos filières d'élevage : l'impératif de compétitivité n'exclut pas le maintien d'un réseau efficace d'abattoirs de proximité ; les rapports sont attendus pour mai 2011.

Enfin, à la suite de la suppression du Plan d'équipement en abattoir, un Observatoire national des abattoirs réunissant administration et professionnels de la filière a été créé.

C'est donc une réflexion d'ensemble qui est conduite sur l'avenir de notre réseau d'abattage, au service de l'avenir de nos filières d'élevage.

Mme Gisèle Printz.  - J'espère, sans en être sûre, que les éleveurs seront rassurés. Se donner les moyens d'une vue d'ensemble est une bonne chose.

Droits de plantation

M. Robert Tropeano.  - Dans le secteur viticole, des droits de plantation existent en France depuis 1936, en Europe depuis 1970. Or la Commission européenne veut libéraliser le secteur en supprimant ces droits, ce qui fait craindre une surproduction, la baisse des prix et la suppression d'emplois. La superficie plantée pourrait passer de 464 000  à 1 670 000 hectares!

Un répit de deux ans a été accordé. Seule l'Allemagne a fortement pris position. Comment le Gouvernement compte-t-il constituer un front de pays favorables à la régulation ?

M. Henri de Raincourt, ministre auprès de la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - La suppression des droits de plantation a été décidée fin 2008, afin de favoriser l'adaptation de l'offre à la demande. Les pays producteurs avaient obtenu le maintien de cette régulation jusqu'en 2015, voire 2018. Le risque, c'est de favoriser des plantations compétitives, des plantations massives de tel ou tel cépage en fonction de la mode, alors qu'en matière vitivinicole, il faut du temps.

Le président de la République a réaffirmé lors de ses voeux au monde agricole son opposition à cette réforme ; le rapport de Mme Vautrin va dans le même sens. M. Le Maire fait tout pour convaincre nos partenaires. La signature d'une position commune avec l'Allemagne sur la PAC montre que nos idées avancent.

M. Robert Tropeano.  - Je ferai part de ces annonces aux viticulteurs de mon département, qui se font énormément de souci sur l'avenir de la viticulture.

Protection des consommateurs de services financiers

M. Christian Cambon.  - La crise financière soulève la question de la protection des souscripteurs de produits financiers, dont la maîtrise exige des connaissances pointues : la crise des subprimes et l'accablante affaire Madoff illustrent cette urgence.

L'organisation Consumers International a appelé à des mesures internationales, qui pourraient être prises par le G20. Mme Lagarde estime que nous payons le prix de « l'inventivité » du secteur financier. Elle a promis des avancées dans le cadre du G20. Les associations de consommateurs doivent être mieux associées à la gestion et les États devraient coordonner leur politique. Quelles sont les pistes privilégiées ? Il y va de la confiance nécessaire entre les épargnants et la finance internationale.

M. Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.  - Le Gouvernement partage vos préoccupations. Cette année, le G20 tirera les leçons de la crise financière pour la protection des consommateurs. Mme Lagarde en a fait un axe de travail de la présidence française. Les 18 et 19 février, elle proposera que la réunion d'octobre soit l'occasion d'établir des règles communes. En ce qui me concerne, vous savez avec quelle attention constante je veille à la protection des consommateurs.

M. Christian Cambon.  - Merci de cette réponse précise. Je sais l'importance que vous accordez à cette question. Les systèmes d'alerte des régulateurs doivent être revus ; il faut restaurer le lien de confiance entre les épargnants et le monde économique.

Pratiques de la grande distribution

M. Claude Biwer.  - L'Autorité de la concurrence a dénoncé, dans deux avis rendus le 7 décembre 2010, les entraves à la concurrence imposées par la grande distribution. Les grandes enseignes lient à elles des magasins présentés comme indépendants, et délèguent à des marques l'animation des rayons, ce qui favorise les industriels au détriment des PME. Comment le Gouvernement compte-t-il porter remède à cette situation, préjudiciable aux consommateurs comme aux producteurs ?

M. Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.  - A propos des contrats d'affiliation des magasins indépendants, l'Autorité juge insuffisante la concurrence dans certaines zones. Les clauses de non-concurrence peuvent aller jusqu'à 50 ans ! Le Gouvernement est particulièrement sensible à cet avis. En effet, dans une période de marges de manoeuvre budgétaires restreintes, les mesures renforçant la concurrence entre opérateurs constituent un des moyens de renforcer le pouvoir d'achat des consommateurs.

Plusieurs pistes, identifiées notamment par l'Autorité de la concurrence, seront expertisées en lien avec les professionnels concernés : alignement de la durée des différents contrats, encadrement des clauses de non-réaffiliation et de non-concurrence post-contractuelles, encadrement des droits de priorité au profit des groupes de distribution.

Quant au « management catégoriel », phénomène récent, l'Autorité de la concurrence rappelle dans son avis que les « capitaines de catégorie » sont principalement des conseillers des distributeurs et n'ont a priori pas de pouvoir décisionnaire sur leur politique commerciale ; elle formule plusieurs recommandations et appelle à la préparation d'un code de bonnes pratiques.

Enfin, j'appuie tout à fait la décision de Catherine Vautrin, présidente de la CEPC, prise lors de la réunion du 15 décembre 2010, de lancer un groupe de travail sur le projet d'élaboration d'un code de bonnes pratiques.

Pour protéger le consommateur, je compte d'abord sur le dialogue. Mais le Gouvernement n'hésitera pas, en cas de déséquilibre ou d'abus, à faire fermement appliquer la LME.

M. Claude Biwer.  - Je suis rassuré quant à vos intentions. Mieux vaut un bon accord qu'un mauvais procès : tenons compte des attentes des producteurs et des consommateurs, même s'il est parfois difficile de les concilier.

Accueil des gens du voyage

M. Hervé Maurey.  - La loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage rend les maires responsables de la réalisation d'aires d'accueil et de l'application du schéma départemental. Le coût pour les communes est d'autant plus lourd que ces équipements son régulièrement dégradés. L'imposition de cette charge aux communes semble contraire au principe de subsidiarité, puisqu'il s'agit de nomades. Il serait logique que cette charge soit affectée à l'État.

Ma question écrite d'il y a deux ans étant restée sans réponse, je l'ai transformée en proposition de loi, cosignée par M. Richert, devenu depuis ministre chargé des collectivités locales. Qu'en pense le Gouvernement?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Les communes de plus de 5 000 habitants et quelques autres, si elles sont identifiées par le schéma départemental, ont l'obligation de participer à la réalisation des aires d'accueil. Elles reçoivent une subvention de 70 %, voire de 100 % pour les aires de grand passage ; en outre, les régions, départements et caisses d'allocations familiales peuvent apporter des subsides.

Cette politique peut être mise en oeuvre au niveau intercommunal.

En cas de dégradation, le maire peut porter plainte. Voilà pourquoi le Gouvernement n'entend pas modifier la loi.

M. Hervé Maurey.  - Vous avez bien voulu me rappeler le dispositif législatif, qui ne m'était pas totalement inconnu...

Les communes ne « participent » pas au financement des aires d'accueil : elles en ont la responsabilité !

Le taux de 70 % est largement théorique : en pratique, il n'est jamais atteint ! Je regrette que l'Etat n'envisage pas de faire évoluer la législation : le problème des nomades dépasse les compétences de la commune et de l'intercommunalité et relève de la solidarité nationale.

Assainissement collectif

M. Jean-Claude Merceron.  - Le Conseil d'État considère qu'une canalisation située sous une voie privée desservant plusieurs propriétés constitue une extension du réseau public. Les communes sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées.

L'extension du réseau collectif à des impasses privées est parfois difficile à réaliser. Dans ce cas, les communes peuvent-elles être exonérées de l'obligation de raccordement ou de celle d'assurer la collecte des eaux usées domestiques collectées par des systèmes d'assainissement individuels ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Les règles de droit commun s'imposent aux voies privées, si elles sont incluses dans une zone d'assainissement collectif.

Néanmoins, en vertu d'un arrêté interministériel du 19 juillet 1960, un arrêté du maire approuvé par le préfet peut prévoir des exonérations à deux conditions cumulatives : l'immeuble doit être difficilement raccordable et équipé d'un système d'assainissement autonome. La commune peut se voir rembourser les frais par les propriétaires.

M. Jean-Claude Merceron.  - J'espère que votre réponse permettra aux collectivités locales, notamment vendéennes, de trouver une solution : l'objet de ma question est d'éviter tout contentieux inutile.

Dépôt d'explosifs de Saint-Crespin-sur-Moine

Mme Catherine Deroche.  - Je voudrais interroger le Gouvernement sur le plan de prévention des risques technologiques (PPRT) du dépôt d'explosifs de Saint-Crespin-sur-Moine, qui a reçu un avis défavorable unanime des conseillers municipaux concernés. Pourquoi l'État n'indemniserait-il pas la réduction du risque à la source auprès de l'entreprise Nitro-Bickford, plutôt que les travaux incombant aux propriétaires ? Pourquoi ne pas tirer parti du fonds de prévention des risques naturels majeurs, que M. le député Roland Blum veut élargir ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Les plans de prévention des risques technologiques sont mis en oeuvre une fois que les sociétés concernées ont accompli leur part de la réduction des risques. L'État et les collectivités peuvent alors participer financièrement à la réduction des risques. Le cas que vous évoquez n'entre pas dans les conditions imposées pour cette participation. Toutefois, un crédit d'impôt de 30 % pourra être accordé. Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs est déjà très sollicité et ne peut l'être en sus pour des risques technologiques.

Mme Catherine Deroche.  - C'est ce qui nous avait déjà été dit... Nous allons continuer à travailler sur ce dossier.

Autoroutes franciliennes

M. Bernard Vera.  - Alors que les tronçons à péage des autoroutes franciliennes ne commencent ordinairement qu'au-delà d'une cinquantaine de kilomètres de Paris, le secteur La Folie-Bessin-Dourdan est payant dès 23 kilomètres de Paris. Ce surcoût, injuste pour les usagers, accroît les problèmes de saturation du réseau secondaire. Une rencontre a eu lieu le 20 octobre 2010 à l'initiative de Mme Koscuisko-Morizet. Plusieurs pistes ont été évoquées ; quelles suites leur seront-elles données pour mettre un terme rapidement à cette injustice ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - L'État a confié à la société Cofiroute la concession de l'autoroute A 10, qui a réalisé les travaux. C'est pourquoi la section évoquée est payante, pour tous les usagers, même si les usagers locaux peuvent bénéficier d'un abattement. Ils peuvent aussi profiter de la gare de bus autoroutière implantée sur votre commune, exemple remarquable d'une intermodalité bien pensée et plébiscitée par les usagers.

La rencontre du 20 octobre dernier a permis de mettre sur la table quelques idées simples : possibilité d'améliorer le dispositif d'abonnements, grâce a un abondement des collectivités locales et de développer l'offre de transports en commun ou le covoiturage, grâce à la mise en place de parkings à Dourdan, Ablis et Allainville.

Une étude de trafic va être conduite par Cofiroute, afin de mesurer les flux affectant la zone concernée. Les résultats de cette étude, connus au second trimestre de cette année, seront partagés avec les élus locaux pour améliorer l'offre de transport au profit des habitants du sud des Yvelines et de l'Essonne.

M. Bernard Vera.  - Je suis à la fois inquiet et optimiste.

Je suis inquiet, car les ministres répètent la même chose sans qu'aucune solution satisfaisante ne soit trouvée. La mise à contribution des collectivités territoriales est déjà considérable, aggravée par le fait que le caractère payant de l'autoroute a pour effet un report massif de la circulation vers le réseau secondaire.

Cofiroute dispose des moyens suffisants : la Cour des comptes a plusieurs fois insisté sur la nécessité de revoir les relations de l'Etat avec les sociétés d'autoroute, qui bénéficient de très généreuses délégations de service public...

Je reste quand même résolument optimiste : la réunion de demain permettra de faire le point. Je souhaite que la discussion permette rapidement de déboucher sur des solutions concrètes et efficaces ; c'est aussi le voeu des associations et des élus.

Services à la personne

M. René-Pierre Signé.  - Le secteur du service à la personne est très utile pour de nombreuses familles, en particulier pour les personnes âgées. Mais il est à craindre que la suppression des exonérations de cotisations patronales ne remette en cause ces emplois, au détriment de ceux qui en bénéficient. À Château-Chinon, la levée de l'exonération de charges aurait de graves conséquences sur notre centre social.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Cette réforme est indispensable pour réduire les déficits publics ; nous en attendons 460 millions. Toutefois, les personnes les plus fragiles, en situation particulière de handicap ou de perte d'autonomie ne sont pas concernées ; les exonérations de charges à hauteur de 1,6 milliard sont maintenues. Le sont aussi les avantages fiscaux ; le coût du travail déclaré reste ainsi plus intéressant que celui du travail dissimulé.

Les aides au secteur du service à la personne ont augmenté de 50 % en cinq ans, pour atteindre 6,6 milliards ; le soutien reste massif.

Les ZZR ne seront pas concernées par la réforme.

M. René-Pierre Signé.  - Les sénateurs avaient voté le maintien de l'abattement de 15 %, mais le Gouvernement a obtenu qu'ils reviennent sur ce vote après une seconde délibération. Vos 460 millions -somme dérisoire au regard des déficits- iront vers les chômeurs de longue durée. Creuser un trou pour en boucher un autre a déjà été pratiqué par certain sapeur...

Des gens peuvent être dépendants sans être des handicapés lourds ; ce sont eux qui sont concernés par le maintien à domicile. Le président de la République évoque une cinquième branche et l'on prend 460 millions à des services qui permettraient le maintien chez eux de gens dépendants. Mesurez mieux le coût de telles mesures !

Pollution par l'aluminium

Mme Anne-Marie Payet.  - L'aluminium se trouve presque partout aujourd'hui. Or, à doses régulières, ce métal serait très nocif pour la santé. A l'exception de Paris, nombre de distributeurs d'eau potable ajoutent des sels d'aluminium pour rendre l'eau plus claire. Selon un chercheur, M. Guy Berthon, à fortes doses ou à doses régulières l'aluminium est toxique. La norme OMS de 200 milligrammes par litre n'est qu'une référence de qualité et non une limite ; elle est souvent dépassée.

Certaines études ont mis en évidence le lien entre une eau potable trop chargée en aluminium et certains cas de démence proches de la maladie d'Alzheimer, des douleurs articulaires, des anémies... (Mme Marie-Thérèse Hermange se montre curieuse d'entendre la réponse du Gouvernement)

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.  - Si certains effets ont pu être observés chez des sujets exposés professionnellement ou des hémodialysés, la relation causale avec la maladie d'Alzheimer n'a pas été établie. L'OMS a fixé une norme de 200 microgrammes d'aluminium par litre d'eau ; c'est un indicateur de la qualité du traitement, non un objectif de santé. L'Afssa veille cependant à ce que ce seuil soit respecté ; elle a constaté que 97 % des contrôles ont été satisfaisants. Il n'y a pas lieu de modifier la réglementation.

Mme Anne-Marie Payet.  - Votre réponse m'étonne. A 100 microgrammes, le risque d'Alzheimer augmente de 50 % ! Des alternatives à l'usage de l'aluminium pour le traitement de l'eau existent, celle qui est utilisée à Paris, mais d'autres aussi.

Ordres professionnels paramédicaux

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - L'inscription à un ordre de certains professionnels médicaux et paramédicaux a été rendue obligatoire, alors qu'elle est coûteuse -de 75 à 300 euros- et paraît inutile à beaucoup, notamment à ceux qui exercent une activité salariée. Au total, 470 000 paramédicaux ne sont pas inscrits à leurs ordres respectifs. Dès lors que le contrôle revient désormais aux ARS, pourquoi imposer l'inscription à un ordre ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.  - De nombreux infirmiers demandaient depuis des années la création d'un ordre. Depuis cette création, guère plus de 10 % des infirmiers s'y sont inscrits ; les cotisations ne rentrent pas. Mme Bachelot a insisté pour que la cotisation soit diminuée et une possibilité de modulation a été introduite dans la loi HPST ; M. Bertrand a demandé que son montant soit « symbolique ». Mais l'ordre, organisme indépendant de droit privé, ne veut pas baisser sa cotisation, car sa situation financière est délicate. Je souhaite qu'il fasse des propositions de sortie de crise. Je souhaite aussi que les infirmiers puissent continuer à exercer librement leur métier dans l'intérêt de tous.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - La question des ordres professionnels pour les paramédicaux est agitée depuis plusieurs décennies. Le coût des cotisations est prohibitif. Vous souhaitez une sortie de crise ; encore faut-il qu'elle ne soit pas au détriment des employeurs. Pourquoi n'avoir pas évoqué les podologues et les kinésithérapeutes ? Dès que vous aurez trouvé une solution, dites-le nous !

Sécurité sociale étudiante

Mme Catherine Procaccia.  - Les deux régimes de sécurité sociale étudiante, Smerep et LMDE, offrent des services très limités en l'absence de télétransmission, particulièrement le second. Les remboursements prennent souvent deux mois ou plus. Il est impossible de joindre un interlocuteur par téléphone et même par mail -j'en ai fait moi-même l'expérience. Il faut de six mois à un an pour rééditer une carte vitale perdue. Et je pourrais évoquer une bureaucratie tatillonne jusqu'à l'absurde.

Cette situation, qui pénalise d'abord les plus démunis, est d'autant plus malvenue que la santé des étudiants est mal suivie. Que peut faire le Gouvernement pour améliorer les choses ? Y a-t-il un médiateur accessible aux assurés ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.  - Les difficultés que vous évoquez sont dues pour l'essentiel à la mise en place de la carte vitale avec photographie. La situation devrait donc s'améliorer désormais. Mais la nature même du régime étudiant est source de difficultés opérationnelles. La mobilité des jeunes ne fait que compliquer les choses. La récente convention d'objectifs permettra d'améliorer la qualité du service, de diminuer les délais de remboursement et de répondre aux réclamations.

Mme Catherine Procaccia.  - Il y a plus de quatre ans que la carte vitale avec photographie a été mise en place ! Pourquoi imposer aux étudiants un renouvellement annuel de leur inscription à une mutuelle ? Votre réponse correspond à celle que m'a faite la LMDE, plus prompte à répondre aux parlementaires qu'aux étudiants !

Régime minier

M. Jean-Marc Todeschini.  - Le rapport Bur sur le régime social minier fait l'unanimité contre lui, car il remet en cause les principes fondamentaux de gratuité, de qualité et de proximité. Il témoigne d'une grande méconnaissance de la situation. S'il suivait les conclusions de ce rapport, insultantes pour la mémoire minière, le Gouvernement renforcerait le sentiment d'abandon déjà très prégnant dans le bassin mosellan. Pourquoi un tel acharnement, que dénoncent les élus de tous bords ? Quid de l'abrogation du décret du 31 décembre 2009 ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.  - M. Bertrand ne partage pas votre avis sur le rapport Bur, dont il apprécie au contraire la qualité.

L'offre de soins du régime est indispensable et doit être préservée ; il faut donc une modernisation et une réforme financière pour assurer la pérennité du régime. Les acquis fondamentaux de celui-ci ne sont pas remis en cause.

Le ministre engagera donc une concertation sur la base du rapport Bur, à laquelle seront associés organisations syndicales et élus locaux.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Sur le terrain, les élus y compris ceux de l'UMP ont une autre vision que la vôtre ! L'unanimité s'est faite localement contre le rapport Bur. Modernisation, dites-vous ? D'expérience, nous entendons restrictions et éloignement des lieux de soin.

Maladies rares

M. Marc Laménie.  - Ma question porte sur les délais et conditions de mise en oeuvre du deuxième plan consacré à la prise en charge des maladies rares. Le premier, qui couvrait la période 2005-2008, a permis des avancées significatives, qui ont fait l'objet en 2009 d'une évaluation. A quand le deuxième ? Et avec quels financements ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.  - Le ministère a entrepris un important travail de préparation du deuxième plan. Les principales associations de patients ont été entendues.

Le plan devrait paraître avant la fin du mois. Il renouvellera l'ambition en améliorant la qualité de la prise en charge des malades, en développant la recherche et en stimulant la coopération européenne et internationale. Les financements seront mieux répartis et les actions mieux coordonnées. Une banque nationale de données épidémiologiques sera créée, ainsi qu'une structure d'impulsion de la recherche.

Soyez rassuré, le Gouvernement tiendra ses engagements.

M. Marc Laménie.  - Je vous remercie sincèrement pour votre écoute et vos propositions. Encore merci.

CHU en Guadeloupe

M. Jacques Gillot.  - Après ce qu'à subi Haïti, vous ne pouvez ignorer que la Guadeloupe est située dans une région à forte intensité sismique. C'est dans cette perspective que s'inscrit la reconstruction du centre hospitalo-universitaire de Pointe-à-Pitre en conformité avec les normes parasismiques. Des inquiétudes demeurent sur le bouclage financier de l'opération ; pouvez-vous confirmer les engagements de l'État ?

Les états généraux de l'outre-mer ont prévu la mise en oeuvre d'un cycle complet d'études de médecine à l'université Antilles-Guyane. Où en est-on de ce campus santé ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État.  - L'État a apporté une aide pour l'acquisition du terrain où sera construit le CHU de Guadeloupe. Le total des investissements sera en deux tranches porté à 770 lits pour une surface globale de 80 000 mètres carrés. La proposition instruite par l'ARS est examinée au ministère. La décision de financement suivra.

La création d'un cursus complet aux Antilles est prévue, mais le projet n'est pas encore finalisé. Il sera examiné le moment venu avec le plus grand intérêt.

M. Jacques Gillot.  - Nous attendions un signal fort. Nous ne sommes pas encore rassurés.

La séance, suspendue à 11 heures 30, reprend à 11 heures 40.

Fermeture des maisons d'arrêt

M. Jean-Pierre Michel.  - En juillet, le prédécesseur de M. le garde des sceaux a annoncé la fermeture de nombreuses maisons d'arrêt, sans tenir compte de l'état réel des établissements ni des possibilités de rénovation, pas plus que de l'équilibre territorial ou des conséquences économiques et sociales de ces décisions. Quelles sont les intentions du ministère, s'agissant en particulier de la maison d'arrêt de Lure, sous-préfecture de Haute-Saône, qui vient de perdre son tribunal de grande instance après d'autres services publics ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - La restructuration du parc immobilier pénitentiaire permettra la mise en oeuvre de la loi pénitentiaire, l'amélioration du taux d'exécution des peines et des conditions de détention ainsi que l'encellulement individuel. Les 45 propositions de fermeture d'établissements annoncées en juillet sont en cours de réexamen, en concertation avec les personnels et les élus locaux. Je connais l'importance de la maison d'arrêt de Lure pour la vie de cette ville. Je sais l'attachement du personnel et des élus à ces établissements. Une décision sera prise à la fin de ce semestre. En ce qui concerne Lure, je prendrai l'avis des élus et me rendrai sur place.

M. Jean-Pierre Michel.  - Je reconnais là votre bon sens, et attends votre décision. Vos propos sont plutôt de bon augure. On prévoit la fermeture de petites maisons d'arrêt et la construction de très gros établissements ; les conditions de détention et de travail sont pourtant bien meilleures dans les premières que dans les seconds. Le Contrôleur général l'a constaté à Lure, établissement qui a été jugé par ailleurs conforme aux normes européennes.

Certains détenus n'ont pas leur place dans les grands établissements, notamment lorsqu'ils requièrent une prise en charge psychiatrique. De petits centres spécialement aménagés pourraient les accueillir, en liaison avec les hôpitaux psychiatriques.

Adoption d'enfants haïtiens

M. Alain Milon.  - La convention de La Haye de 1993 prévoit que lorsqu'une adoption n'opérant pas rupture des liens de filiation préexistants a été prononcée dans l'État d'origine de l'enfant, elle peut être convertie en adoption produisant cet effet à la double condition que l'État d'accueil le prévoie et que le représentant légal de l'enfant ait donné un consentement libre et éclairé à cette conversion. La France a repris cette disposition en 2001.

Entre 2001 et 2009, selon le service de l'adoption internationale (SAI) du ministère des affaires étrangères, 4 199 enfants haïtiens ont été adoptés par des Français ; on estime à plusieurs milliers les adoptions haïtiennes ainsi converties au vu d'actes reçus par des notaires ou de juges de paix. Durant cette période, jamais le SAI n'a averti les familles d'avoir à légaliser ces actes ; les tribunaux ne s'en sont pas davantage préoccupés.

Or les autorités haïtiennes seraient hostiles à ces conversions en adoption plénière ; sur le fondement de l'information relayée par le SAI, les actes de consentement n'ont pas été légalisés.

Qu'en est-il, monsieur le garde des sceaux ? On voit certains tribunaux refuser au second enfant d'une famille ce qu'ils ont accordé au premier malgré la parfaite identité des dossiers...

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Haïti n'est pas signataire de la convention de La Haye de 1993. Le consentement des parents est exigé pour l'adoption simple comme pour l'adoption plénière ; en cas de conversion, il faut s'assurer du caractère libre et éclairé de ce consentement.

La Cour de cassation a rappelé par un arrêt du 4 juin 2009 que le non-respect de l'exigence de légalisation suffit à refuser de reconnaître tout effet en France d'un acte étranger. Depuis fin 2009, le site internet du ministère des affaires étrangères informe les adoptants du refus des autorités haïtiennes de légaliser les consentements donnés en vue de l'adoption plénière -qui n'existe pas en droit haïtien. Les autorités françaises n'entendent pas passer outre la volonté du gouvernement haïtien en légalisant elles-mêmes ces actes. Ce sont les relations de confiance entre les deux pays qui ont permis l'arrivée en urgence en France d'enfants haïtiens, en décembre dernier.

J'ai rappelé aux procureurs généraux, le 22 décembre 2010, les exigences imposées par le droit international public et la Cour de cassation.

M. Alain Milon.  - Devant les tribunaux, les familles concernées ont parfois le sentiment d'être traitées comme des voleuses d'enfants,

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je ferai en sorte que l'accueil soit amélioré.

La séance est suspendue à midi.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 heures 30.