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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Loi de finances pour 2012 (Suite)

Gestion des finances publiques Provisions

Article 32 (État B)

Article 64 quinquies

Engagements financiers de l'État

Régimes sociaux et de retraite

Remboursements et dégrèvements

Article 32 (État B)

Questions prioritaires de constitutionnalité

Loi de finances pour 2012 (Suite)

Immigration, asile et intégration

Agriculture, pêche, alimentation

Article 48

Article 48 bis

Article 48 ter

Conseil et contrôle de l'État

Pouvoirs publics

Article 32 (État B)

Direction de l'action du Gouvernement

Article 32 (État B)




SÉANCE

du vendredi 2 décembre 2011

33e séance de la session ordinaire 2011-2012

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Secrétaire : Mme Catherine Procaccia.

La séance est ouverte à 10 h 5.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Loi de finances pour 2012 (Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l'Assemblée nationale. Nous abordons l'examen des crédits affectés à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et à la mission « Provisions ».

Gestion des finances publiques Provisions

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Cette mission porte les ressources destinées au ministère des finances. Elle finance essentiellement la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et droit indirects (DGDDI).

En 2012, 11,56 milliards d'autorisations d'engagement et 11,6 milliards de crédits de paiement sont demandés, soit une diminution de 1,4 %. Ces économies reposent sur des moindres dépenses de fonctionnement ; l'achèvement de l'installation de Chorus en représente un tiers.

À n'en pas douter, l'enjeu est le pilotage de la masse salariale qui absorbe 75 % des crédits de la mission, ceux-ci équivalant 7 % des dépenses de personnel de l'État.

Si la masse salariale augmente de 1,21 %, les dépenses de personnel diminuent de 0,74 %, grâce au non-renouvellement d'un départ à la retraite sur deux.

Mais le Gouvernement recourt aux décrets d'avance pour combler les manques dus à un taux de départs moindre que prévu. Espérons que le chiffre annoncé pour 2012 sera le bon...

La fusion de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) est un succès. Une réforme réussie coûte cher : 38 millions en 2011, plus 12 millions ouverts par décrets d'avance. Pourquoi la programmation de ces dépenses est-elle insuffisante ? En ira-t-il de même en 2012 ?

La lutte contre la fraude fiscale est une priorité, et je m'en félicite. Mais où sont les indicateurs pour en mesurer l'efficacité ? Il ne faudrait pas que les moyens du contrôle fiscal soient sacrifiés...

La commission des finances s'interroge sur la dotation de 10 millions dans le programme 148 pour financer une nouvelle aide au maintien à domicile pour les fonctionnaires de l'État. Que recouvre-t-elle exactement ? Cette aide, qui s'ajoute à l'APA, est-elle vraiment indispensable ?

La commission des finances vous propose d'adopter les crédits de cette mission, tels que modifiés par l'amendement qui va vous être présenté.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La mission Provisions est une mission originale, regroupant des crédits visant à couvrir des dépenses indéterminées au moment de la loi de finances initiale qui sont ensuite réparties par voie réglementaire entre les missions.

Pour 2012, les crédits atteignent 478 millions en autorisations d'engagement et 178 en crédits de paiement. L'Assemblée nationale, en seconde délibération, les a minorés de 88,75 millions.

Le compte spécial reprend d'une main ce qu'on lui prend de l'autre. Il est donc en équilibre. Le déficit est normal : le Gouvernement fait des prévisions réalistes.

L'Assemblée nationale a introduit deux articles, dont le 64 quinquies qui autorise la cession du domaine de Souzy-la-Briche, dont l'entretien est coûteux. La commission des finances a estimé manquer d'informations pour l'autoriser ; des précisions de la part du Gouvernement seraient bienvenues.

La commission des finances a proposé l'adoption de ces crédits.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - La fonction publique continue d'évoluer au fil des restructurations et de la RGPP.

L'accompagnement des agents au long de ce processus est un impératif, et un gage d'efficience. Le budget affecté s'élève à 230 millions en crédits de paiement, soit une hausse de 3,08 %. L'action sociale croît de 5,22 %, les crédits de formation, quant à eux, baissent de 1,01 %.

La baisse des effectifs, conséquence du principe du « 1 sur 2 », n'est pas sans inquiéter. Les territoires les plus fragiles ont besoin du soutien de l'État, et de ses services déconcentrés. L'État employeur doit permettre à ses personnels de se former et de s'adapter aux réformes. Le fléchissement des dépenses de formation continue inquiète, d'autant qu'on l'observe dans tous les ministères... Faut-il rappeler l'importance capitale de la formation ?

Les 25 classes préparatoires intégrées sont un succès : le taux de réussite à un concours de la fonction publique dépasse les 50 %. C'est un facteur de vitalité et de diversité de l'administration.

Un regret : la loi du 3 août 2009 sur la mobilité des fonctionnaires n'a eu que peu d'effets...

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - On y travaille !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis.  - Il est vrai que la RGPP n'encourage guère la mobilité choisie...

J'en viens au programme « Action sociale », je me réjouis de la réintroduction de l'aide d'assistance ménagère à domicile pour les pensionnés de l'État fragiles.

M. François Sauvadet, ministre.  - Merci de votre soutien.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis.  - Cette aide existe pour les autres pensionnés : il fallait rétablir l'équité. On peut ainsi éviter de recourir à l'APA. La Cnav sera en charge de cette aide.

Le cycle des élections professionnelles rénovées s'est achevé le 22 novembre. Quels enseignements en a-t-on tirés ? La commission des lois a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du programme 148.

Je vais maintenant lire le rapport de Mme Joissains, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Modernisation de l'État ».

Les objectifs et indicateurs de performance du programme ne sont pas très satisfaisants. L'objectif n°1 : rendre lisible la modernisation de l'État, et son indicateur, n'est guère lisible ! Ne vaudrait-il pas mieux parler de l'avancée de la modernisation de l'État ?

Il faut s'assurer que la modernisation n'entraîne pas une dégradation du climat social. Aucun indicateur n'est prévu. Si les fonctionnaires sont démotivés, la qualité de la fonction publique en pâtira...

Le périmètre du programme n'est pas non plus très cohérent : il faut revoir la nomenclature budgétaire et réunir, dans un même programme, la direction générale de l'administration et la direction générale de la fonction publique.

L'autorité en charge des jeux en ligne dépend de Bercy, soit. Mais une autorité administrative indépendante (AAI) n'est soumise à aucune tutelle, et pourrait relever d'un programme dédié aux AAI en charge de la régulation économique, à l'image du programme créé en 2008 réunissant les autorités de la protection des droits et libertés.

La DGMF ne compte que 140 équivalents temps plein : comment une aussi petite structure peut-elle piloter l'ambitieuse modernisation de l'État ? Son objectif est d'aboutir à une démarche participative et un transfert de technologies. L'école de la modernisation de l'État est un succès, avec 500 stagiaires. Les collectivités territoriales pourraient s'inspirer utilement de cette initiative.

La commission n'a pas suivi Mme Joissains, et a donné un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.

M. Jean-Yves Leconte.  - Les investissements de la Chancellerie sont insuffisants.

Le partenariat public-privé (PPP) devient la norme. Pour l'administration pénitentiaire, les engagements privés représentent 1 milliard ! La Cour des comptes a remis un rapport sur le sujet, dénonçant ces opérations extrabudgétaires, qui masquent les dettes. Les PPP ne peuvent se substituer à l'emprunt. L'engagement de l'État doit être comptabilisé. Les PPP doivent se plier aux règles des marchés publics. Y recourir pour tenter de rester dans les clauses de Maastricht n'est pas acceptable : une règle européenne doit être établie et s'appliquer à tous.

Ce type d'opérations fait peser un véritable risque d'asphyxie sur les finances de l'État. L'augmentation des loyers, à horizon de cinq à dix ans, pèsera lourdement sur le budget du ministère de la justice.

Les loyers sont passés de 29 à 52 millions d'euros -et atteindraient 630 millions en 2022 !

Les prochains budgets devront payer cette facilité que l'on s'accorde aujourd'hui et que dénonçait, en son temps, M. Philippe Séguin.

Envisagez-vous de mieux encadrer les PPP ? Quand l'étude demandée à la Cour des comptes sur le prochain palais de justice de Paris sera-t-elle achevée ?

Mme Marie-France Beaufils.  - Vaste sujet, à aborder en si peu de temps...

Le lien entre la DGFiP et la fonction publique, c'est la trop fameuse RGPP : réduction générale de la présence publique ! La DGFiP est un exemple patent de la RGPP, avec une réduction continue des effectifs.

Des dizaines de milliers d'emplois ont été supprimés, sans économies réelles à la clé. Les services fonctionnent à flux tendu, le stress au travail explose. Faut-il citer Chorus, exemple caractérisé de ces errements ?

Le Gouvernement se félicite des succès de la lutte contre la fraude fiscale. Pourtant, sur le terrain, on entend un autre son de cloche... La baisse des contrôles inquiète. Conséquence de la RGPP, les compétences viennent à manquer. Quel mépris pour le service public... (M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances, s'exclame) Que vaut le coût budgétaire de 30 000 suppressions de postes contre le coût social de 30 000 chômeurs supplémentaires ? Nous ne voterons pas ce budget.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - La fonction Ressources humaines de cette mission avec 74 % des crédits de paiement, et par l'impact qu'elle emporte sur les collectivités territoriales et les citoyens, est essentielle.

La fusion entre la DGI et la DGCP a été exemplaire. C'est une réussite, saluée par la Cour des comptes. Mais les disparités sur le territoire demeurent, sur le plan de l'immobilier ou du personnel. L'accès au guichet unique qui était son principal objet, s'est trouvé quelque peu malmené. Les économies n'ont pas été à la hauteur des espérances, car rattrapées par la hausse de la rémunération des agents et l'harmonisation des régimes. La DGFiP a vu ses effectifs baisser de 3 %, mais la masse salariale augmente de 1 %...

Les élus locaux s'interrogent sur la future carte d'implantation des services. Je n'ignore pas l'exigence de modernisation, mais il y a un seuil au-delà duquel on ne peut aller, sauf à entamer le principe de proximité.

Je pense à l'ingénierie, au service de conseil et expertise financiers. Il faut préserver le maillage, en concertation avec le niveau local.

Notre groupe s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - La mission « Provisions » est destinée à couvrir des dépenses indéterminées. La mission « Gestion des finances publiques », elle, regroupe les crédits destinés au Minefi. Veuillez excuser Mme Pécresse, retenue à l'Assemblée nationale.

Cette mission doit plus que jamais être exemplaire. La clé de la maîtrise des dépenses, ce sont les réformes.

2012 marquera l'an I de la nouvelle DGFiP. La Cour des comptes, dans son enquête sur la fusion, a précisé que cette réforme, voulue par le président de la République, a été mise en place dans les délais, et que ses objectifs ont été atteints. Preuve que l'on peut réformer des administrations de grande taille ! La Cour a salué l'accompagnement des personnels : c'est une réussite indéniable, d'autant qu'il s'agit d'une fusion totale. Il est possible de réformer l'État en étant plus efficace.

Les résultats sont au rendez-vous, monsieur Dallier. Les statuts ont été modernisés, les parcours professionnels rénovés. Les missions sont exercées plus efficacement. Tous les indicateurs d'efficacité ont progressé. La qualité du service pour les usagers s'est améliorée, avec le guichet fiscal unique. De 750 centres des impôts, on est passé à 2 400 points de contact sur l'ensemble du territoire. On est loin d'une dégradation du service ! Les services de la DGFiP font partie des services publics de proximité. L'élu local et le président du conseil général que je suis y est très attaché. Le taux de satisfaction dépasse les 90 % ; 70 % des usagers ont constaté une amélioration alors que le déploiement du guichet unique vient de s'achever.

La fusion a permis en outre des économies sans précédent, grâce à d'importants gains de productivité. Avec le non-remplacement de deux départs sur trois, nous avons supprimé 12 000 postes. Le chiffrage a été strictement respecté. Le retour catégoriel -gagnant-gagnant- a été assuré, comme le président de la République s'y était engagé. Tous les personnels ont bénéficié de mesures indemnitaires, ainsi que de mesures d'accompagnement. Mme Pécresse et moi-même y tenions car tous, par leur implication, ont permis la réussite de cette fusion. Pour la première fois en 2011, la masse salariale a baissé en volume, évolution que nous devons également à la fusion.

Le contrôle fiscal ? Je veux lever toute ambiguïté. Mme Pécresse a présenté un bilan de la lutte contre la fraude fiscale. Nous avons renforcé les moyens du contrôle fiscal pour lutter contre les fraudes, notamment dans les paradis fiscaux. Les contrôles ont rapporté 16 milliards d'euros en 2011, 1 milliard de plus qu'en 2010. Les résultats sont au rendez-vous. Depuis 2008, le nombre de contrôles se maintient.

Le Gouvernement ne relâche pas son effort, les chiffres en attestent : 8 millions récupérés au titre de la lutte contre l'économie souterraine.

La fonction publique est au coeur des préoccupations du Gouvernement, pour preuve, la création d'un ministère de la fonction publique de plein exercice. Le Gouvernement a souhaité que le programme contribue à l'effort de maîtrise budgétaire.

Pour 2012, 10 millions supplémentaires seront dévolus à l'aide au maintien à domicile. La demande sociale est très forte. Pour la première fois, le Comité interministériel à l'action sociale a adopté le budget que nous lui avions proposé. Le dialogue avec les syndicats n'a jamais été aussi nourri !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - N'exagérons rien.

M. François Sauvadet, ministre.  - Les agents n'ont jamais été autant accompagnés : c'est indispensable pour répondre aux évolutions. Nous prêtons une grande attention notamment aux risques psychosociaux.

Merci à Mme Gourault de son soutien sur ce sujet, qui est important.

Le Premier ministre l'a dit mardi : il faut en finir avec l'idée que le non-remplacement d'un agent sur deux serait automatique et brutal. Non, c'est un objectif global : le ministère de la justice, par exemple, a été épargné. La RGPP serait le pire des maux ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - C'est un gros mot, oui !

M. François Sauvadet, ministre.  - En responsabilité, nous avons recherché en permanence l'efficience. Regardez l'Italie, l'Espagne, la Grande-Bretagne ! 300 000 licenciements en deux ans au Royaume-Uni, baisse des pensions, baisse des traitements dans la plupart des pays européens ! Le Gouvernement a choisi un processus gagnant-gagnant.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Mais non !

M. François Sauvadet, ministre.  - Les économies réalisées ont été redistribuées aux agents à plus de 50 % ! La Cour des comptes nous a même reprochés d'en avoir trop fait ! Les fonctionnaires se sont mobilisés lors des dernières élections professionnelles, preuve que le dialogue social est nourri et efficace.

Sur la mobilité, nous pourrons encore progresser. La loi fondatrice de 2009 a été une grande avancée. Nous avons engagé une réforme en profondeur, et nous travaillons à améliorer encore l'application de la loi, notamment pour la mobilité interministérielle. Oui, il faut accompagner les agents dans le changement : les crédits destinés à la formation s'élèvent à 2,2 milliards, en augmentation de 3,8 %.

Nous avons fait le constat en 2007 que l'action de l'État était uniforme, que les démarches administratives s'étaient complexifiées, qu'on comptait 300 000 agents de plus en trente ans malgré la décentralisation... Ces constats nous ont amenés à concevoir une réforme qui mette les Français au coeur de l'action de l'État. Les résultats sont là, les usagers ont été rapprochés des services publics. (Mme Christiane Demontès le conteste) Efficacité et maîtrise de la dépense publique vont de pair. La RGPP a entraîné des économies cumulées de 10 milliards entre 2009 et 2011, 15 milliards à l'horizon 2013 ; ce n'est pas rien.

Mme Joissains s'est interrogée sur les crédits de l'autorité des jeux en ligne ; leur rattachement au Minefi s'explique par des facteurs historiques. Une modification de la maquette budgétaire ne se justifie pas : cette agence participe notamment à la lutte conte la fraude.

Un indicateur du climat social ? La RGPP, je l'ai rappelé, s'est accompagnée d'une intensification du dialogue social. Au printemps, nous examinerons un texte pour résorber la précarité dans la fonction publique. D'après les derniers sondages, 78 % des cadres se mobilisent pour la réforme ; faisons-leur confiance pour mener à bien des transformations parfois difficiles mais nécessaires.

La direction générale de la modernisation de l'État (DGME), une direction importante malgré la faiblesse de ses effectifs, mène un travail important de pilotage. Point important, son recrutement est pluri ministériel. Elle joue un rôle de générateur.

S'agissant de la politique immobilière de l'État, nous avons réalisé 265 millions d'économies en 2011. Les administrations concourent au désendettement de l'État à hauteur de 15 % du produit de leurs cessions. Ce taux augmentera dans les années qui viennent, pour atteindre 30 % en 2014.

Sur le domaine de Souzy-la-Briche, les choses sont claires : il s'agit de céder un bien dont l'État n'a plus l'usage. C'est de la bonne gestion. Mme Pécresse précisera les chiffres, et la transparence de l'opération sera garantie.

M. Leconte s'inquiète des investissements du ministère de la justice. Franchement, ce qui est préoccupant, plus que les PPP, c'est l'effort qu'il faut fournir pour construire suffisamment de places dans nos prisons. Nous étudions les suites à donner au rapport de la Cour des comptes sur le sujet.

Article 32 (État B)

Mme la présidente.  - Amendement n°II-36, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

    Autorisations d'engagement    

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local Dont titre 2

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État Dont titre 2 

Conduite et pilotage des politiques économique et financière Dont titre 2

Facilitation et sécurisation des échanges Dont titre 2

Entretien des bâtiments de l'État

Fonction publique Dont titre 2

10 000 000

0

10 000 000

0

TOTAL

10 000 000

10 000 000

SOLDE

-10 000 000

-10 000 000

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.  - Nous revenons sur ces fameux 10 millions, qui financent le rétablissement d'une aide ménagère supprimée en 2009, mais désormais, nous dit-on, mieux ciblée...

L'APA n'a-t-elle pas vocation à bénéficier à toutes les personnes dépendantes ? Ensuite, 10 millions, c'est trop ou trop peu ! Certes, vous avez passé un accord avec les syndicats...

M. François Sauvadet, ministre.  - Le Gouvernement attache beaucoup d'importance au respect des accords syndicaux, qui sont le ciment du dialogue social. Le montant retenu correspond au ciblage retenu : ce n'est ni trop ni trop peu.

Vous feriez preuve d'une grande sagesse en retirant cet amendement. À défaut, avis défavorable.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.  - Il y a eu un accord avec les syndicats, dont acte. Mais sur le fond, je ne suis pas convaincu : l'APA existe.

L'amendement n°II-36 est retiré.

Mme Marie-France Beaufils.  - Il est normal que l'État intervienne pour le public, comme les caisses le font pour le privé !

M. François Sauvadet, ministre.  - Le dossier est géré par la Cnam. Je vous donnerai toutes les précisions utiles.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.  - Merci !

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », mis aux voix par assis et levé, ne sont pas adoptés.

Les crédits de la mission « Provisions », approuvés par la commission, ne sont pas adoptés.

Les crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » approuvés par la commission, ne sont pas adoptés.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.  - Plus de réserve parlementaire ! (Sourires)

L'article 64 quater est adopté.

Article 64 quinquies

Mme la présidente.  - Amendement n°II-38, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Cet article autorise la cession par l'État du domaine de Souzy-la-Briche.

Depuis 2007, cette propriété était mise à la disposition du Premier ministre, après avoir été, après une donation, à la disposition du président de la République. Les actes de donation datent de 1969, 1972 et de 1975. Ce domaine est coûteux pour les finances publiques, et sa vente pourrait rapporter 4,5 millions, ce qui n'est pas négligeable en ces temps difficiles.

Le Gouvernement passe par la loi, contrairement à ce qui s'était passé pour le domaine de Compiègne. Je lui donne donc un bon point. Cela étant, cette attitude s'explique sans doute par l'exigence des donateurs...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Dura lex, sed lex.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - La commission n'étant pas suffisamment éclairée sur les conditions de la cession, elle préfère supprimer l'article.

M. François Sauvadet, ministre.  - À vous entendre, dans cette affaire, le positif l'emporte tout de même sur le négatif ! Va-t-on garder longtemps au sein de l'État des biens coûteux ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - La question est : comment cède-t-on ?

M. François Sauvadet, ministre.  - Par appel d'offres et avec un prix minimal fixé par France Domaine. La procédure est tout à fait transparente. Pourquoi cette suspicion ? Les Français, à qui l'on demande des efforts, ne comprendront pas. N'ayez crainte ! Que le Sénat fasse preuve de sa légendaire sagesse...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - La flagornerie ne vous mènera à rien !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.  - Le ministre a dissipé toute ambiguïté. Ce bien coûte 200 000 euros par an en entretien ; en outre, il se dégrade, entre fuites et problèmes d'humidité. Retarder la cession serait prendre le risque que le bien perde de la valeur, et que les conditions soient moins favorables... Peut-être est-ce par nostalgie que certains ne veulent pas renoncer à ce domaine...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - D'abord, les ayants droit sont en droit -sans jeu de mots- de demander un remploi des sommes qui tomberont dans l'escarcelle de l'État conformément à une vocation qu'ils souhaitent voir perdurer. Dans l'affaire de Compiègne, France Domaine avait mis des conditions... Et puis il y a une exigence de reconstitution forestière. L'Office national des forêts (ONF) a-t-il été consulté ? Il faut vérifier tous les points qui ont posé difficulté lors de la cession du domaine de Compiègne.

En l'état, nous ne pouvons pas voter l'article. Il y aura d'autres lois financières d'ici la fin de l'année...

M. François Sauvadet, ministre.  - Nous ne pouvons pas rester dans cette situation, avec sur les bras un domaine qui coûte aussi cher ! Avec un appel d'offres et un prix fixé par France Domaine, la transparence sera totale, personne ne peut le contester. Pour discuter avec les ayants droit, nous avons besoin de l'habilitation du Parlement. Nous reviendrons devant la commission des finances pour rendre compte des conditions et du périmètre de la cession. Ne repoussons pas à demain ce que nous devons faire aujourd'hui. Sans faire allusion à la grande Histoire, j'en appelle, madame la rapporteure générale, à l'esprit de responsabilité que nous avons en partage !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Précisément !

L'amendement n°II-38 est adopté.

L'article 64 quinquies est supprimé.

M. François Sauvadet, ministre.  - Madame Bricq, vous êtes méchante avec le Gouvernement !

Engagements financiers de l'État

Mme la présidente.  - Nous allons maintenant examiner la mission « Engagements financiers de l'État » et les comptes spéciaux « Accords monétaires internationaux » « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » « Participations financières de l'État ».

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances, en remplacement de M. Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Frécon.

Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » progressent de 6 %, en raison de l'évolution inexorable des intérêts de la dette ; ils atteindront 48,8 milliards d'euros en 2012. Déjà le spread franco-allemand a atteint des chiffres sans précédent. Notre situation est très préoccupante ; ce n'est plus un secret bien gardé dans l'hémicycle, tout le monde aujourd'hui en est conscient. L'affaire se noue avec les Allemands et pourrait se dénouer avec eux ; le tout est de savoir si ce sera dans le bon sens...

La détérioration de nos conditions de financement tient aux incertitudes sur l'avenir de la zone euro ; elle reflète aussi les doutes des marchés sur la solidité de la signature de la France. Je ne ferai pas de pronostic sur le devenir de notre triple A mais on sait qu'une augmentation de taux de 1 % renchérirait de 2 milliards les charges d'intérêts la première année...

En période de crise, l'État garant est plus que jamais sollicité. Les garanties sont hors bilan, indolores, voire lucratives, mais elles n'en restent pas moins une épée de Damoclès sur la tête des Français. Nous aimerions plus de clarté sur ces engagements de l'État et allons demander une enquête à la Cour des comptes sur le sujet.

La forte baisse des crédits du programme « Épargne » ne doit pas conduire à reconstituer la dette de l'État auprès du Crédit foncier de France, résorbée en 2011.

Comme chaque année, une somme de 5 milliards est inscrite, côté recettes, au compte spécial « Participations financières de l'État », qui retrace les opérations de l'État actionnaire. On sait que les rentrées seront moindres -au 5 septembre, elles n'étaient que de 181 millions... Les dépenses atteindront au moins 700 millions avec les prises de participation au capital de La Poste et d'Areva. Pour la cinquième année consécutive, aucun versement n'est prévu pour réduire la dette héritée du Crédit Lyonnais, qui s'élève à plus de 4,3 milliards d'euros et doit être remboursée en 2014. Que compte faire le Gouvernement ? Une reprise de dette par l'État ?

Depuis septembre 2010, l'État s'est engagé dans une nouvelle stratégie de développement industriel ; la présence d'administrateurs de l'État dans les organes de gouvernance n'a aucune traduction concrète dans la gestion des entreprises : le taux de féminisation n'est pas plus élevé, la hausse des rémunérations n'est pas tempérée, les résultats ne sont pas meilleurs.

Nous proposons d'adopter les crédits du compte spécial « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et de rejeter les crédits des comptes spéciaux « Participations financières de l'État » et « Accords monétaires internationaux ».

M. Henri Tandonnet, en remplacement de M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Ce compte « Participations financières de l'État » retrace les opérations de l'État actionnaire. L'année 2011 marque un tournant ; la crise a de lourdes conséquences sur la valeur de ces participations : 88,2 milliards en 2010, 69,8 en 2011, moins de 60 ce mois.

Je note d'abord le caractère approximatif du compte, recettes et dépenses n'étant qu'indicatives ; 5 milliards d'euros de recettes étaient prévus en 2010 pour 2,9 milliards d'encaissements. Le niveau d'information du Parlement est proche de zéro. Je conçois qu'une certaine discrétion soit nécessaire en la matière, mais ne faut-il pas trouver un équilibre ?

La dimension industrielle de l'action de l'Agence des participations de l?État (APE) est plus forte. La nomination d'un commissaire aux participations financières l'an dernier est une bonne chose. Désormais, des études sectorielles sont demandées. Toutefois, ne faudrait-il pas revoir l'articulation entre les acteurs : l'APE, la CDC, le Fonds d'investissement stratégique ? Toutes les participations de l'État se justifient-elles ? Étant donné le contexte de nos finances publiques, ne faudrait-il pas recentrer l'action de l'État sur les entreprises stratégiques, privilégier une gestion plus dynamique et affecter le produit des cessions au désendettement de l'État ?

M. Maurey préconisait l'abstention ; la commission ne l'a pas suivi en votant contre.

Mme Marie-France Beaufils.  - Depuis quelques mois, la dette publique s'invite dans toutes les discussions. La surenchère médiatique sert à imposer l'austérité et de nouveaux sacrifices à ceux qui travaillent et produisent les richesses du pays. Seul compte le diktat du triple A, imposé à la République par des agences de notation qu'on a laissées libre d'agir à leur guise.

Mais nos finances publiques souffrent d'abord de l'insuffisance des recettes ! Le débat sur la première partie du projet de loi de finances au Sénat l'a bien montré.

Depuis la loi sur la banque de France de 1973, la France s'est privée d'un outil précieux de politique monétaire, l'émission de valeur. S'en est ensuivi l'emprunt Giscard indexé sur l'or -endettement à long terme pour couvrir des besoins à court terme- avec les conséquences que l'on sait pour le budget de l'État.

Aujourd'hui, l'État doit se financer sur le marché et émet un volume croissant de bons du Trésor sur formule, c'est-à-dire fait marcher la planche à billets... à titre onéreux. Il est donc plus que temps de s'interroger sur le statut de la Banque centrale européenne (BCE), clé de voûte de notre système monétaire. J'ai entendu les propos du président de la République hier soir. La BCE comme prêteur de dernier ressort ? Cela figure déjà dans le traité de l'Union européenne consolidé et le mini-traité de Lisbonne.

Nous ne nous opposerons pas à l'adoption des crédits de la mission et nous suivrons le rapporteur spécial sur les comptes spéciaux.

M. Yvon Collin.  - La charge de la dette explose : plus 6,3 milliards en 2011, plus 2 milliards en 2012 ! La dette représentera 87,4 % du PIB en 2012, voire 95 % en 2013 d'après notre collègue Dominique Baert, rapporteur spécial de l'Assemblée nationale. Une telle dette est-elle soutenable ? On en doute quand une célèbre agence de notation déclare, le 17 octobre, que la note de la France est sous surveillance. Le lendemain, des banques françaises revendaient massivement des titres de notre dette.

L'évolution des taux directeurs, l'inflation, mais aussi l'aide à la Grèce et l'apport au Fonds européen de stabilité financière (FESF) alourdissent la dette et la charge de la dette.

Les deux tiers de notre dette sont détenus par des non-résidents, contre moins de la moitié il y a dix ans. Aucun danger ? Je n'en suis pas sûr : notre dépendance, notre vulnérabilité, en sont augmentées.

Les collectivités territoriales sont souvent méprisées par l'État. Grâce pourtant à leur dépôt de 30 milliards au Trésor, il a moins à emprunter sur le marché.

Comment atteindre un déficit de 3 % en 2013 si la croissance ralentit encore ? L'austérité et la réduction des dépenses ne sont pas la solution. Il faut, au contraire, relancer la croissance.

Notre groupe n'approuvera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Dominati.  - La France est attaquée sur les marchés comme jamais depuis la création du marché unique. La clé, c'est notre crédibilité à respecter notre engagement de désendettement, avec à l'horizon l'équilibre budgétaire pour 2016. Il n'y a pas d'autre voie. Si l'on s'en écartait, le réveil serait douloureux. Notre souveraineté nationale, l'Europe, seraient mises en cause. Nous devrions, comme la Grèce et le Portugal, baisser salaires et pensions.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Comme Pierre Laval !

M. Philippe Dominati.  - Heureusement, la détermination du président de la République et du Gouvernement à désendetter la France est totale. Les Français sauront s'en souvenir, le moment venu.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - On peut toujours rêver !

M. Philippe Dominati.  - Ne tenez pas compte des promesses démagogiques d'une opposition prête à tout pour revenir au pouvoir !

M. Alain Néri.  - Les promesses, c'est votre spécialité !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Nous avons promis de revenir à 3 % !

M. Francis Delattre.  - Le pédalo est déjà très chargé !

M. Philippe Dominati.  - Les masques tombent. La commission des finances a promis de taxer les entreprises à hauteur de 20 milliards !

M. Alain Néri.  - Nos dépenses sont gagées !

M. Philippe Dominati.  - La majorité hésite d'autant moins à faire preuve d'imagination qu'elle sait que ce qu'elle vote ne sera pas appliqué...

L'accroissement de la dette a été limité en France, par comparaison avec nos principaux partenaires : 17,9 %, contre 19,1 % en moyenne en Europe et 29,5 % aux États-Unis. Preuve que le plan de relance a été un succès.

Le groupe UMP votera ces crédits, dans un esprit de responsabilité, et apporte tout son soutien au président de la République et au Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Le message est répétitif. Les crédits n'augmentent pas : électroencéphalogramme plat. On peut s'interroger sur le manque de volonté politique du Gouvernement, en cette période de crise. Vous avez pourtant à votre disposition l'Agence de participation de l'État, la Caisse des dépôts et consignations, Le Fonds stratégique d'investissement (FSI) et un ministre en charge du secteur -qui n'est pas là aujourd'hui.

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - Ce n'est pas bien de dire cela !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - L'État joue son rôle d'actionnaire, dans un esprit strictement comptable, voire de rentier. Il aurait dû se montrer plus offensif, lancer une vraie stratégie industrielle, courageuse et crédible ancrée dans les territoires. L'État aurait dû se montrer stratège -cesser les cessions et renforcer sa participation dans les secteurs stratégiques d'avenir.

S'il l'avait fait chez Renault, on aurait évité bien des délocalisations. Dois-je évoquer les Fonderies du Poitou, comme l'a fait hier notre collègue Raffarin, ou encore EADS, avec le suspense autour du devenir de l'étonnant M. Lagardère fils ? Dans ce dossier, l'État doit reprendre la main ; le rapport de force dans l'actionnariat va évoluer. Il est inadmissible que le Parlement ne soit pas informé au jour le jour.

Il faut cesser de brader les actifs de l'État, et s'engager dans la voie de la conquête ! Le budget du compte spécial « Participations financières de l'État » manque d'ambition et de sincérité ; nous voterons contre.

M. Joël Guerriau.  - La dette publique s'élève à 1 700 milliards : il faudrait sept années consécutives de recettes fiscales pour la rembourser. Sans parler de nos 1 200 milliards d'engagements hors bilan : financement des pensions, garantie de l'épargne, Dexia... Peut-être est-ce la raison pour laquelle la majorité du Sénat rejette toutes les missions de ce budget.

À l'automne 2008, j'étais vice-président du Conseil international des caisses d'épargne. On accusait à tort l'État français de financer les banques françaises. En réalité, il en a retiré un bénéfice de 2,4 milliards, tout en réussissant à stopper un vent de panique.

La charge de la dette explose : 48,8 millions, soit plus que le rendement de l'impôt sur les sociétés. Il faudrait une croissance de 2,5 % pour la résorber. Or les prévisions ne sont pas favorables. Le remboursement de l'emprunt ne peut plus se concevoir comme un pari sur l'avenir. S'endetter pour rembourser, cette fuite en avant doit laisser la place à une politique courageuse de réduction des dépenses. J'adhère aux propos de Mme Pécresse.

Les marchés sont fébriles, la croissance patine, et nous nous apprêtons à émettre encore des bons du Trésor... Je persiste à penser que nos fondamentaux sont bons, et que nous conserverons notre note. Il faut prendre les mesures nécessaires, pour échapper à une crise à l'argentine ou à la russe. Il faut nous désendetter. Le groupe UCR votera les crédits de cette mission.

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - Monsieur Mirassou, sachez que Mme Pécresse défend le collectif à l'Assemblée nationale, et que le Gouvernement est bien représenté ici !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - N'extrapolez pas sur ce que j'ai dit !

M. François Sauvadet, ministre.  - Les mots ont un sens, a fortiori à cette tribune.

Les crédits de cette mission s'élèvent à 179,9 milliards. Le besoin de financement sera essentiellement couvert par des émissions à moyen et long terme, de deux à cinquante ans. La charge de la dette, attendue à 48,8 milliards, est en légère hausse.

Les Français sont sensibles à ce sujet, en effet les agences de notation ont toutes confirmé notre AAA, avec perspective stable. Le Gouvernement est déterminé à ce qu'il en reste ainsi : c'est une politique responsable vis-à-vis des générations futures. Les agences de notation prennent acte de notre action et confirment que nos choix sont les bons.

Si l'écart avec l'Allemagne s'est creusé, les conditions de financement de la France restent bonnes. D'autres États notés AAA ont été confrontés à un écart de taux similaire. Le Gouvernement met tout en oeuvre pour atteindre les objectifs ; nous n'avons pas à rougir de notre gestion.

Un tiers de la dette est détenue par des résidents, un tiers par des résidents de la zone euro, un tiers par des résidents hors zone euro. C'est un équilibre satisfaisant. Nous voyons dans l'élargissement et la diversification géographique des détenteurs un gage de stabilité. Les Pays-Bas, la Finlande, l'Autriche, tous notés AAA, font de même.

Sur le programme « Épargne », je vous assure que la dette envers le Crédit foncier ne sera pas reconstituée, et l'exécution sera couverte de manière suffisante.

Le compte d'affectation spéciale « Participations » s'inscrit dans le cadre d'une vision industrielle renouvelée, monsieur Mirassou. L'État actionnaire doit contribuer activement à la politique industrielle française, le président de la République l'a rappelé. Les chiffres sont encourageants : investissements en hausse de 7 % dans les entreprises à participation publique en 2010, valeur ajoutée en hausse de 2 % la même année. La féminisation atteint 15 % dans les organes de gouvernance, proche de l'objectif de 20 %. L'État impose la plus grande modération en matière de rémunérations des dirigeants, qui n'augmenteront pas. Cette vision industrielle a pris toute sa dimension dans le contexte de sortie de crise : les dividendes perçus par l'État sont restés stables, sachant que l'État n'applique pas le même taux de distribution à toutes ces entreprises.

L'État actionnaire mène une réflexion sectorielle, avec une entreprise d'ingénierie de premier plan regroupant l'expertise de la RATP et de la SNCF. Le Fonds stratégique d'investissement est un outil précieux. L'État veillera à la situation sociale dans les entreprises dont il est actionnaire : l'emploi ne doit pas y être une variable d'ajustement.

Comme chaque année, 5 milliards sont inscrits en recettes au compte « Participations financières de l'État ». Vous comprendrez que le Gouvernement ne puisse communiquer sur les détails financiers des cessions qu'il envisage. L'augmentation du capital de La Poste, le rachat des titres d'Areva au CEA, pour 270 millions, figurent parmi les principales dépenses prévues. Aucun maquillage des comptes concernant l'EPFR-Crédit lyonnais : les conditions de refinancement sont avantageuses. Des cessions d'actions par l'État dans les grandes entreprises cotées, France Telecom ou Air France, ne sont pas envisageables. Enfin, le groupe Lagardère a confirmé qu'il ne se désengagerait pas d'EADS. L'État français restera un actionnaire engagé.

Je vous invite à voter ces crédits. La dette, nous l'avons en partage. Faisons preuve de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs UMP)

présidence de M. Charles Guené,vice-président

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - La commission des finances est favorable à la mission « Engagements », défavorable au compte d'affectation spéciale « Accords monétaires », favorable au compte d'affectation spéciale « Avances », défavorable au compte d'affectation spéciale « Participations ».

Ne craignez pas le résultat de la prochaine présidentielle : les engagements européens de la France nous engagent, monsieur Dominati, et le candidat que je soutiens veut s'inscrire sur une trajectoire d'équilibre en 2017 avec retour à 3 % en 2013.

Les crédits de la mission « Engagements » sont adoptés.

Les crédits du compte d'affectation spéciale « Accords monétaires » ne sont pas adoptés.

Les crédits du compte d'affectation spéciale « Avances » sont adoptés.

Les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations » ne sont pas adoptés.

Régimes sociaux et de retraite

M. le président.  - Nous allons maintenant examiner la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte spécial « Pensions ».

M. Francis Delattre, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les crédits de cette mission et du compte d'affectation spéciale retracent les subventions d'équilibre versées par l'État à certains régimes spéciaux. Ils s'élèvent à 6,6 milliards en autorisations d'engagement et crédits de paiement, une hausse de 9,8 % par rapport à 2011.

Celle-ci s'explique par le déséquilibre démographique de ces régimes et la disparition de la surcompensation. Cette hausse a dépassé les plafonds prévus dans la programmation pluriannuelle de plus de 130 millions. Si l'exercice de prévision est délicat, on pourrait quand même affiner l'évaluation.

Une contribution exceptionnelle de 200 millions est versée au compte d'affectation spéciale « Pensions », dont les crédits augmentent de 2 milliards, pour s'établir à 54,6 milliards. Il restera dynamique pour quelques années encore. Le besoin de financement actualisé à dix ans, au taux d'intérêt du marché, s'élèverait à 50 milliards d'euros. Pourquoi le taux d'actualisation médian n'est-il cette année que de 1,53 %, contre 1,63 % en loi de finances pour 2011 ?

Quid de la décristallisation des dossiers relevant des anciennes colonies ? Pourquoi le ministère de la Défense a-t-il procédé à des recrutements pour gérer ce dossier ? Le fonds spécial des pensions des entreprises industrielles de l'État est en déficit. La Cour des comptes appelle à une meilleure gestion des ouvriers d'État, et surtout à un arrêt des recrutements sous ce statut. Qu'en est-il du suivi des heures supplémentaires ?

Le paiement des droits à pension est une obligation irréfragable de l'État. La commission des finances, en toute responsabilité, a donc émis un avis favorable à ces crédits.

Je suis heureux d'avoir adressé ma première intervention à cette tribune à un ancien collègue. (Sourires)

M. François Sauvadet, ministre.  - Merci !

Mme Christiane Demontès, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales.  - Les crédits augmentent, mais sans lien avec l'évolution des régimes spéciaux concernés. Une ligne nouvelle de 250 millions est ainsi destinée à faciliter la gestion du compte d'affectation spéciale. L'année 2012 verra la fin de compensation spécifique vieillesse, qui sera remplacée par des crédits budgétaires.

La contribution de l'État continue donc à progresser. Certains de ces régimes, voués à l'extinction, n'ont plus de cotisants ou presque : seule la solidarité peut les financer. Les régimes de la SNCF et de la RATP sont voués à l'alignement avec le régime général des fonctionnaires. Ce n'est pas le cas pour les mineurs et les marins, dont les conditions de travail sont pénibles et les carrières courtes.

À la suite de l'accélération du report de l'âge de départ à la retraite, le Gouvernement envisage-t-il de modifier les conditions prévues pour la RATP et la SNCF ? A-t-on évalué les coûts correspondants à la soulte prévue ?

Ces crédits traduisent le concours de la solidarité nationale à ces régimes, en fort déficit. Je regrette que l'on oublie le régime des exploitants agricoles, lui aussi pénalisé par un déséquilibre démographique.

La commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Sauvadet, ministre.  - Merci.

Mme Marie-France Beaufils.  - La situation des salariés ou ex-salariés dépendant de ces régimes spéciaux est au coeur de cette mission. Les subventions d'équilibre versées par l'État augmentent : je m'en félicite. À l'heure où l'on demande aux collectivités locales de contribuer à la réduction des déficits, je rappelle le rôle de la CNRACL et donc des agents des collectivités territoriales.

Mais la pression monte sur le compte d'affectation spéciale. Nombre d'agents publics ont en effet hâté leur départ à la retraite, craignant, à juste titre, les effets de votre réforme des retraites. En 2014, le budget de l'État économisera 800 millions du fait du report de l'âge de départ, et 600 millions du fait de la baisse des pensions.

Je regrette votre logique purement comptable. Le non-remplacement d'un départ sur deux, le gel du point d'indice rendent le compte d'affectation spéciale de plus en plus difficile à équilibrer. La baisse de la qualité des prestations servies n'est pourtant pas la solution car l'une des autres particularités de ce compte, c'est leur faible évolution.

Notre groupe s'abstiendra.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Ces crédits correspondent à des dépenses obligatoires sur lesquelles les marges de manoeuvre sont faibles, je serai donc brève.

Les bénéficiaires du régime des mines sont soulagés de la décision prise par le Gouvernement.

En revanche, nous aurions aimé que soit apportée une solution au déséquilibre structurel du régime agricole, vrai sujet de préoccupation dans mon département. Le régime des exploitants agricoles accuse en effet un déficit de 1,400 milliards en 2010 et de 5 milliards en 2012. Malgré la reprise partielle de sa dette, le sort des exploitants agricoles reste très fragile...

Mme Christiane Demontès, rapporteure pour avis.  - Très bien !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Sous cette réserve, nous voterons ce budget. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - La décision qu'a prise le Gouvernement d'accélérer la réforme des retraites ne concerne pas le régime spécial des marins, mais bien ceux de la RATP et de la SNCF. La mesure annoncée est injuste et inefficace. Vu le faible taux d'emploi des séniors, c'est les jeter dans la logique mortifère du chômage et de l'assistanat. Nous ne pouvons la cautionner.

Je regrette le recul de l'âge de départ des conducteurs routiers de 55 à 57 ans. Le Gouvernement ne tient aucun compte de la pénibilité. Enfin, le régime des mines, en voie d'extinction pour des raisons démographiques, la solidarité nationale doit prendre le relais. Or vous la démantelez de manière méthodique.

En temps de crise, mieux aurait valu trouver des solutions pérennes de financement pour notre protection sociale plutôt que le court-termisme et des plans d'austérité tous les trois mois ! Nous ne vous suivrons pas dans cette voie, qui effrite encore davantage notre protection sociale.

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - J'ai également plaisir à retrouver M. Delattre dans l'enceinte de cette Haute assemblée...

Ces crédits recouvrent les subventions d'équilibre versées aux régimes spéciaux, les rapporteurs l'ont rappelé. L'augmentation de près de 10 % s'explique par la baisse du nombre de cotisants.

La réserve de 250 millions pour le compte « Pensions » est nécessaire pour alimenter la part employeur.

Le compte d'affectation spéciale affiche une progression de ses crédits de 2 milliards, en raison de l'évolution des pensions civiles et militaires. Les recettes augmentent du fait de la hausse des cotisations des fonctionnaires et des employeurs. L'effet de la réforme des retraites se fait déjà sentir : 440 millions en 2012, plus 19 millions dus à l'accélération de la réforme, qui était incontournable, madame Demontès. Pour l'actualisation nous avons retenu le taux de l'OAT, indexé sur l'inflation à l'horizon 2029, qui était de 1,53% au 31 décembre 2010.

S'agissant de la décristallisation des pensions des anciennes colonies, les personnes concernées devront présenter une demande avant le 1er janvier 2013. La mesure de revalorisation concerne 300 000 personnes, ce qui justifie le détachement temporaire -j'y insiste- de cinq agents.

La différence entre les 34 000 ouvriers d'État et les 25 000 équivalents temps plein relevée par la Cour des comptes ne s'explique pas par le temps partiel mais par le périmètre incluant GIAT et DCNS. Comment opérer un meilleur suivi des heures supplémentaires qui ouvrent droit à pension pour les ouvriers d'État ? M. Longuet s'est engagé à suivre ce dossier et à limiter le nombre d'heures supplémentaires, surtout en fin de carrière.

L'adossement du régime RATP au régime général est à l'étude.

Madame Escoffier, la reprise par la Cades de la dette du régime des exploitants agricoles dans le PLFSS pour 2012 témoigne de la volonté du Gouvernement d'apporter des réponses.

Les crédits de la mission sont adoptés, de même que le compte spécial, l'article 65 et l'article 66.

Remboursements et dégrèvements

M. le président.  - Nous allons maintenant examiner la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale de la commission des finances.  - Cette mission est très spécifique : son évolution dépend de paramètres exogènes si bien que ses crédits se constatent plus qu'ils ne se pilotent.

Malgré l'inertie du Gouvernement face aux suggestions du Parlement, je persiste à croire qu'une modification de la maquette et une meilleure évaluation sont possibles et nécessaires. Peut-on s'en passer après une réforme aussi importante que celle de la taxe professionnelle ?

Les crédits s'élèvent à 84,9 millions. Pour autant, il faudra tirer les conséquences des votes intervenus.

Cette mission enregistre les effets de l'abrogation du bouclier fiscal, du recentrage du crédit d'impôt « développement durable », du rabot sur les dépenses fiscales et de la suppression du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt.

Le montant global de la prime pour l'emploi s'élève à 2,5 millions en 2012, moins qu'en 2011. Cela s'explique par le gel du barème et l'imputation du RSA sur la prime. Le montant moyen en a été ramené à 444 euros, contre 501 en 2008.

Les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux diminuent sans que l'autonomie des collectivités territoriales progresse. Cela pose question quand le ministre des collectivités territoriales invite les élus locaux, encore ce matin dans La Tribune, à contribuer davantage à l'effort de maîtrise de la dépense publique !

La commission propose l'adoption de ces crédits.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Bis repetita non placent...

Je dénoncerai, cette année encore, le désintérêt du Gouvernement pour cette mission. L'administration ne répond pas dans les temps aux questionnaires budgétaires. Quid de la maquette budgétaire ? Il y a d'autres critères pour une juste évaluation...

La baisse de la part de la fiscalité locale prise en charge par l'État m'inquiète, à l'instar de Mme Beaufils.

Je me réjouis qu'une mission soit créée sur les effets de la réforme de la taxe professionnelle, sous la houlette de M. Guené. Ses conclusions, je l'espère, entraîneront une modification de ces crédits. (Applaudissements à gauche)

Mme Annie David.  - Je passe sur le problème du périmètre de la mission pour insister sur tous les éléments extérieurs qui viennent en modifier les crédits.

Effectivement, ceux-ci se constatent... Les politiques publiques ont souvent été limitées à un simple ajustement fiscal : plan de relance, réforme du CIR, etc. En revanche le tableau est largement insuffisant : selon la Cour des comptes et le Conseil des prélèvements obligatoires, pour l'impôt sur les sociétés il faut retenir le chiffre de 100 milliards. Le régime des groupes, c'est 35 milliards ! L'imposition à taux privilégié des dividendes infra-groupes, 18 milliards ! La niche Copé, 8 milliards ! Nous disposons d'une trop faible information sur le coût réel des niches et des mesures correctrices de l'impôt. Un document annexe serait bienvenu !

M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.  - Le Gouvernement a renvoyé les questionnaires budgétaires, pour la plupart, dans les délais prévus. S'il y a eu du retard, je le regrette.

La maquette budgétaire est conforme à la constitution financière de l'État, la Lolf. Elle permet de vous soumettre un projet annuel de performance définissant les objectifs de chaque mission. L'évaluation de la performance est au coeur de nos préoccupations. Là encore, rien n'est figé. Mais attention à l'excès d'indicateurs ; leur stabilité permet d'utiles comparaisons.

La réforme de la taxe professionnelle de 2009 visait d'abord à améliorer la compétitivité des entreprises françaises. Comme le Premier ministre l'a rappelé lors du Congrès des maires, toutes les garanties ont été prises pour les finances des collectivités territoriales. Je le sais en tant que président de conseil général. Pour 2012, la dotation de compensation s'élèvera à 3,4 milliards.

Je vous remercie de votre avis favorable.

Article 32 (État B)

M. le président. - Amendement n°II-377, présenté par le Gouvernement.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs)

691 345 000

691 345 000

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs)

TOTAL

691 345 000

691 345 000

SOLDE

691 345 000

691 345 000

M. François Sauvadet, ministre.  - Il s'agit d'un pur amendement de coordination avec les amendements adoptés par le Sénat lors de la première partie du présent projet de loi de finances.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale.  - La commission ne peut qu'être favorable.

L'amendement n°II-377 est adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés, le groupe CRC s'abstenant.

La séance est suspendue à 13 h 40.

*

*          *

présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président

La séance reprend à 15 h 40.

Questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 2 décembre 2011, quatre décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité.

Loi de finances pour 2012 (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances. Nous allons examiner maintenant la mission « Immigration, asile et intégration ».

Immigration, asile et intégration

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les crédits pour 2012 augmentent de 12,1 % en autorisations d'engagement, pour atteindre 561 millions, et de 12,6 % en crédits de paiement, pour 632 millions d'euros. La mission dépasse ainsi de 15 % les plafonds fixés par la loi de programmation 2011-2014. Seuls 13,5 % des crédits sont consacrés à l'action répressive, essentiellement aux centres de rétention administrative (CTA).

La hausse des crédits tend à faire cesser la sous-dotation des moyens consacrés aux demandeurs d'asile -hébergement et allocation temporaire d'attente (ATA)- qui augmenteront de 25 %. Cependant, les demandes d'asile ont augmenté à un rythme soutenu en 2011 : les inscriptions suffiront-elles ? Le seul allongement des délais de traitement des demandes par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) coûte très cher -15 millions par mois...

Pourrions-nous en savoir plus sur la réforme du droit d'asile que vous venez d'annoncer, monsieur le ministre ? Les principaux pays d'origine des demandeurs sur les premiers mois de l'année sont le Rwanda, le Bangladesh et le Kosovo ; ne s'agit-il pas d'immigration économique ?

L'apparente diminution de la subvention de l'État à l'Ofpra pour charges de service public est contrebalancée par une augmentation des recettes propres ; celles-ci auront progressé de 42 % en trois ans, passant de 108 millions en 2009 à 154 millions en 2012.

La commission des finances a repoussé les crédits de la mission. Je ne saurai inviter le Sénat à en faire autant. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Corinne Bouchoux, rapporteure pour avis de la commission des lois.  - Un proverbe chinois dit : « Dis-moi comment tu traites les étrangers, je te dirai qui tu es ».

Jusqu'ici, la politique du Gouvernement reposait sur deux principes : les étrangers en situation régulière doivent être accueillis dans des conditions qui permettent leur parcours d'intégration jusqu'à la naturalisation ; les étrangers en situation irrégulière doivent être reconduits à la frontière. Le paradigme a-t-il changé ? Nous nous interrogeons sur les conséquences que les nouvelles exigences linguistiques auront pour les étrangers, notamment pour les femmes sans instruction qui résident depuis longtemps en France ; nous nous inquiétons des risques de marchandisation des apprentissages dès lors qu'ils seront dispensés hors de préfectures.

Le nouveau traitement des demandes de naturalisation par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) ne sera-t-il pas source d'inégalités ?

L'immigration légale a augmenté de 4 % cette année. Monsieur le ministre, avez-vous véritablement, comme je l'ai lu dans la presse, l'intention de réduire à 180 000 personnes le nombre d'étrangers en situation régulière ? L'affaire des étudiants étrangers cause des dommages considérables à notre image internationale. La moitié seulement des 462 cas suivis par la Conférence des grandes écoles aurait trouvé une solution.

Enfin, l'accueil dans les préfectures reste indigne, malgré le dévouement et le professionnalisme des fonctionnaires.

M. Jean-Claude Gaudin a atténué hier la portée de vos propos. Sans angélisme, nous souhaitons une autre politique plus conforme aux valeurs républicaines.

La commission est défavorable aux crédits. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - L'asile n'est pas un codicille de la politique de l'immigration : celle-ci est fixée par le Gouvernement mais celui-là est un droit.

La hausse des demandes d'asile est sans précédent, dites-vous, mais c'est inexact ; le chiffre de 65 000 avait été atteint en 2004. Les crédits pour 2012 sont manifestement sous-évalués, avec 409 millions pour le programme 303, alors que plus de 522 millions seront consommés en 2011 ! La hausse des crédits est virtuelle. Voilà qui met en doute la sincérité du budget.

La commission s'inquiète du recours excessif aux procédures « prioritaires », ce qui prive un quart des demandeurs d'asile de droits essentiels. De quels éléments le préfet dispose-t-il pour estimer que la demande est abusive ? Dans nombre de cas estimés tels, l'Ofpra ou la CNDA ont donné raison aux demandeurs... En outre, la CEDH statuera prochainement sur le caractère non suspensif du recours devant la CNDA.

La situation des centres d'accueil de demandeurs d'asile (Cada) est inquiétante ; moins de 40 % des personnes éligibles y ont accès. L'augmentation du nombre de places ne pèserait pas sur les finances de l'État lorsque l'on sait que l'hébergement en Cada coûte 25 euros par jour, moins que l'addition de l'ATA et du coût de l'hébergement d'urgence... On a le sentiment que le Gouvernement organise la pénurie.

La liste des pays « sûrs » est sujette à caution. D'ailleurs, le Conseil d'État a annulé cette liste en 2009 et 2010.

Monsieur le ministre, vous avez dit vouloir réduire le nombre de demandeurs d'asile ; mais il ne dépend pas de vous ! Le droit d'asile est un droit reconnu par la Convention de 1951 dont la France est signataire.

M. Charles Revet.  - Sous conditions !

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.  - Bien sûr.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas votre budget.

Grotius a écrit en 1625 Le droit de la guerre et de la paix où on lit : « On ne doit pas refuser une demeure fixe à des étrangers qui, chassés de leur patrie, cherchent une retraite, pourvu qu'ils se soumettent au gouvernement établi, et qu'ils observent toutes les prescriptions nécessaires pour prévenir les séditions. (...) C'est le propre des barbares de repousser les étrangers ». Une phrase à méditer ! (Applaudissements à gauche)

M. Alain Néri, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - La mission consacrée aux demandeurs d'asile doit garantir de bonnes conditions de séjour pendant l'instruction du dossier par l'Ofpra, ainsi que l'accès aux soins.

Que la France soit le deuxième pays par le nombre de demandes, avec un flux, en hausse constante, estimé à 60 000 en 2011, est à son honneur ! Sur le papier, le budget 2012 semble traduire la hausse du nombre de demandeurs, qui se sont accrus de 14 %, puisque les autorisations d'engagement et les crédits de paiement connaissent une évolution du même ordre. Pour l'hébergement d'urgence, les crédits passeront de 40 millions à 90 ; pour l'ATA, de 54 à 80 millions. Cependant, les délais restent trop longs : ils atteignent deux ans en cas de recours devant la CNDA -15 000 recours au cours du premier semestre, soit 10 % de plus qu'un an plus tôt. Les délais de cette instance sont inacceptables sur le plan humain, avec de lourdes conséquences budgétaires, notamment faute de places suffisantes en Cada.

Les crédits pour 2012 restent inférieurs aux sommes dépensées en 2011. Au lieu de sous-estimer systématiquement les dépenses, il faudrait inscrire des crédits correspondant aux besoins.

L'extension de la liste des pays dits « sûrs » est une atteinte aux droits de l'homme. Refuser le droit d'asile pour des raisons de dépôt tardif de la demande fait fi de la protection constitutionnelle à laquelle les demandeurs ont droit. (Protestations à droite)

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.  - Mais non !

M. Alain Néri, rapporteur pour avis.  - La protection due à des êtres en danger ne doit pas être diminuée pour des raisons misérablement électoralistes !

La commission des affaires étrangères vous propose de repousser ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Raymond Couderc, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Présidant une structure support d'un Cada, je connais bien le sujet. Les crédits du programme 303 augmentent de 12 % en autorisations d'engagement, à 553 millions d'euros, et de 14 % en crédits de paiement, à 560 millions d'euros.

M. Charles Revet.  - Il fallait le dire !

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Un budget sous-dimensionné !

M. Raymond Couderc, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - L'an dernier, les crédits étaient restés stables.

Sur l'action 2, 408 millions sont inscrits, soit 24,8 % de plus. La sous-budgétisation a disparu, ce qui permettra de créer 9 000 places d'hébergement d'urgence ; plus de 21 000 personnes percevront l'ATA. Certes, les crédits restent inférieurs à la consommation 2011, mais le progrès doit être salué.

Les délais de traitement des demandes par l'Ofpra et la CNDA se sont dégradés et avoisinent deux ans en cas de recours ; les recrutements prévus devraient permettre de réduire ce délai de moitié d'ici 2013.

Un pilotage régional de l'hébergement d'urgence a été mis en place pour procéder à un rééquilibrage géographique.

Monsieur le ministre, vous avez décidé d'inscrire l'Arménie, la Moldavie, le Monténégro et le Bangladesh parmi les pays dits « sûrs ». C'est une bonne décision si l'on veut que le droit d'asile ne soit pas galvaudé.

M. Charles Revet.  - C'est ce que M. Sueur a oublié !

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Je n'ai rien dit !

M. Raymond Couderc, rapporteur pour avis.  - Il est tout à l'honneur de la France d'augmenter son effort pour respecter sa tradition d'accueil ; je voterai les crédits malgré l'avis négatif de la commission ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Évoquer le budget sans évoquer la politique du Gouvernement n'aurait aucun sens. Les cinq dernières lois ont toutes la même philosophie : mieux contrôler l'entrée et le séjour des étrangers, améliorer les conditions d'intégration des étrangers en situation régulière, sanctionner davantage ceux qui détournent la loi. Selon les uns, notre législation est laxiste, selon d'autres, elle est trop répressive...

En 2012, les crédits consacrés à l'asile et à l'intégration augmenteront plus vite que ne le prévoyait la loi de programmation ; la commission des finances n'a cessé de souligner la sous-budgétisation. Au demeurant, les prévisions pour 2012 semblent optimistes, avec 60 000 demandes officiellement prévues. En 2011, il a fallu augmenter les crédits de l'hébergement d'urgence et de l'allocation d'attente.

Globalement, les Cada n'auront accueilli en 2011 que 31,4 % de demandeurs. Il est de la responsabilité de l'État d'offrir à tous les demandeurs d'asile les mêmes chances d'obtenir le statut, comme le préconisait un rapport de 2010 de l'Igas.

La seule réduction d'un mois du délai de traitement des demandes économiserait 15 millions, mais l'évolution est en sens contraire -plus 32 jours entre 2009 et 2011.

Les centres de rétention administrative (CRA) offrent 1 826 places en 2011, mais l'objectif de 2 700 places est encore loin... Il est souhaitable de réduire la taille maximale de ces établissements. Je souligne qu'il est nécessaire d'en créer un à Mayotte.

Je veux croire que votre administration nous permettra de rester le pays des droits de l'homme.

La majorité du RSDE ne votera pas ce rapport, les autres s'abstiendront ou voteront pour. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE)

Mme Éliane Assassi.  - Pourquoi devons-nous examiner les crédits d'une mission dont le ministère a été supprimé et qui ne représentent que 15 % de la politique conduite envers les populations étrangères ? À mon sens, la réponse est : pour pouvoir stigmatiser celles-ci en prétendant qu'elles coûtent et attiser les peurs pour détourner l'attention de l'échec de la politique du Gouvernement. Votre ultime argument ? Le risque de voir un étranger élu maire en Seine-Saint-Denis. Nos concitoyens sont pourtant en majorité favorables au droit de vote des étrangers non communautaires lors des scrutins locaux. Ces étrangers vivent chez nous, travaillent chez nous, paient leurs impôts chez nous ; ils doivent pouvoir voter chez nous.

Après le durcissement des règles de regroupement familial et de l'accueil des étudiants étrangers, vous vous en prenez au droit d'asile. La sous-dotation des crédits qui y sont consacrés pèse sur la situation et la dignité des intéressés, en violation des obligations de la France. Pour beaucoup, c'est la course à la survie avec 10,83 euros par jour...

Votre circulaire sur les étudiants étrangers contredit les conventions passées avec des établissements étrangers. Cette circulaire rend inefficaces les 2 milliards d'euros consacrés à la formation des étudiants étrangers.

Votre effrayante politique du chiffre vise des personnes qui ont parfois toutes leurs attaches en France. Les Roms sont vos principales victimes : on en compte 80 % parmi les personnes reconduites à la frontière, alors que dans leur pays ils subissent racisme et misère. Cette politique d'expulsion coûte cher, 12 000 euros par reconduite...

Au lieu de vous attaquer au chômage et à la précarité que vivent les immigrés, vous construisez des places en centres de rétention.

Le groupe CRC votera contre votre budget ! (Applaudissements à gauche)

M. André Trillard.  - (Applaudissements sur les bancs UMP) La grandeur de la France doit beaucoup à sa tradition d'accueil. Il est donc essentiel de ne pas transformer le droit d'asile en variable de la politique d'immigration.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Très juste !

M. André Trillard.  - Il reste que le détournement du droit d'asile est réel.

L'allongement des délais pénalise les véritables demandeurs, ce qui menace le droit d'asile lui-même. J'ajoute que le coût des délais allongés est considérable, avec 15 millions d'euros par mois supplémentaire. Je salue votre volonté de briser ce cercle vicieux.

La lutte contre les filières clandestines de passeurs est indispensable. Vous agissez en ce sens.

La loi du 16 juin 2011 prévoit une procédure spécifique pour les auteurs de déclarations fausses ou tronquées. Mais cela ne suffit pas, non plus que le nouveau régime d'admission à l'aide juridictionnelle.

Vous avez annoncé une réforme du droit d'asile : délai pour déposer la demande, suspension des prestations sociales des demandeurs fraudeurs, extension de la liste des pays « sûrs ». La France reste malgré tout attractive par rapport aux États voisins.

On est encore loin de la procédure européenne harmonisée souhaitée par le Commissaire Barrot en 2010... L'arrêt rendu le 21 janvier 2011 par la CEDH a remis en question le règlement « Dublin 2 ». Une coordination au sein de l'espace Schengen est plus indispensable que jamais ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Yves Leconte.  - Le programme 301 est un instrument du ministère de l'intérieur, sans rapport avec l'aide au développement. Ses 28 millions d'euros devraient rejoindre le programme 303.

La politique du Gouvernement, c'est la politique du chiffre. Les Français paient, les étrangers trinquent, la France est humiliée...

L'Ofii voit ses ressources fiscales plafonner, alors que le Gouvernement augmente les taxes imposées aux étrangers. Un scandale ! Mais je ne me fais pas d'illusion sur le sort final de l'amendement adopté par la majorité sénatoriale...

Nous récusons fermement votre circulaire du 31 mai, qui doit être retirée. Un recours est d'ailleurs instruit par le Conseil d'État. Cette année est l'année Curie ; avec votre politique, Maria Sklodowska serait reconduite à la frontière à peine diplômée. Les Français paient, les étrangers trinquent, la France est humiliée...

Nous ne voterons pas votre budget. (Applaudissements à gauche)

Mme Esther Benbassa.  - Cette mission est à l'image de votre politique : désastreuse. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Les sénateurs écologistes dénoncent votre acharnement à expulser, une politique d'éloignement, au coût exorbitant, révélateur de l'attitude de la France, d'autant que, comme le souligne Mme Bouchoux, elle est de plus en plus financée par les étrangers eux-mêmes ! Et parlons de l'accueil ! Il est indigne. Comment la France, terre des Lumières, peut-elle laisser femmes et enfants dormir dans la rue dans une file d'attente ! Le Gouvernement tourne le dos à l'idéal de fraternité : vous optez pour une politique xénophobe qui rappelle les années 30. On sait comment la recherche d'un bouc émissaire s'est terminée...

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.  - C'est indigne ! Insupportable !

Mme Esther Benbassa.  - L'Histoire ne se répète pas, mais on ne joue jamais impunément avec le feu ! Avec plusieurs collègues, nous avons décidé de parrainer six étrangers sans papiers. Nous demandons, monsieur le ministre, que vous traitiez les dossiers que nous vous apporterons après la séance avec toute l'attention qu'ils méritent.

Monsieur le ministre, après votre circulaire de mai, le sort réservé aux étudiants étrangers est lui aussi indigne, c'est un professeur d'université qui vous le dit ! (Applaudissements à gauche) Quel gâchis d'intelligence ! Les États-Unis achètent des cerveaux, nous excellons à brader ceux que nous avons formés...

Votre politique heurte de front notre conception d'une société juste et démocratique. Les sénateurs Verts ne voteront pas ce budget. (Applaudissements à gauche)

M. Gilbert Roger.  - Je souhaite revenir sur l'allongement du délai de traitement des demandes d'asile -100 jours en 2008, 159 au début de cette année.

Son allongement pourrait s'expliquer par l'accroissement du nombre des demandeurs, et notamment des mineurs non accompagnés. On en est à 58 000 demandes, qui pourraient atteindre le chiffre de 64 000 en 2012. Mais depuis des années, et cela continue, le Gouvernement sous-évalue systématiquement les crédits. Le ministre évalue à 90 jours le « délai raisonnable ». En fait de conformité aux normes européennes, il s'agit surtout d'empêcher les migrants de déposer une demande d'asile pendant qu'ils sont placés en rétention en vue de leur éloignement. Vous considérez que les demandes d'asile seraient avant tout économiques, ce que la Cimade dément.

Comment le gouvernement compte-t-il réduire les délais d'instruction des dossiers des demandeurs d'asile ? Comme toujours, en restreignant des droits à seule fin électoraliste. Une fois de plus, vous voulez apporter des réponses simples à des questions complexes, en chassant sur les terres du Front national. (Applaudissements à gauche)

M. Richard Yung.  - Je suis le cinquième socialiste à intervenir...

M. Charles Revet.  - Eh oui !

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Notre intérêt est renouvelé. (Sourires)

M. Richard Yung.  - Nous avons énergiquement combattu la loi Besson qui a inventé les mariages gris et allongé la durée maximale de la rétention. Ne vous étonnez pas que nous nous opposions à la traduction budgétaire de cette politique. La France a besoin de main-d'oeuvre. « L'immigration peut être une aubaine pour les pays industrialisés » titre, non un organe bolchévique, mais celui des milieux d'affaires, La Tribune.

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.  - Elle s'est souvent trompée, récemment.

M. Richard Yung.  - Le président de l'Ofii, M. Klarsfeld, se répand dans les journaux et les télévisions, pour refuser le droit de vote des étrangers, au motif que l'intégration serait en échec. On peut donc s'interroger sur l'efficacité de son action. La subvention de l'Office diminue de 1 million. C'est incompréhensible ! Les budgets d'immigration sont le plus souvent insincères, puisque une ou deux fois par an, des décrets d'avance ajoutent 40 à 50 millions d'euros par an, excusez du peu ! (Applaudissements à gauche)

M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.  - (Applaudissements à droite) M. Couderc et Mme Escoffier ont disséqué la problématique financière de ce projet budgétaire. Sur la création d'emplois, nous proposons en effet de créer 60 emplois consolidés au profit de l'Ofpra et de la CNDA, pour accélérer le traitement des dossiers. J'insiste sur l'augmentation substantielle des moyens pour l'intégration au profit de l'Ofii : 80 millions sont ajoutés pour l'hébergement des demandeurs d'asile. En 2012, nous aurons besoin de moindres crédits, grâce aux mesures adoptées.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Le Gouvernement suivant paiera la facture !

M. Claude Guéant, ministre.  - Les délais d'instruction diminueront, ce qui fera gagner 15 millions par mois, et nous reviendrons en 2012 à un an de délai moyen contre deux ans il y a quelques mois. Le centre de rétention administrative de Mayotte ouvrira en 2014.

MM. Karoutchi, Néri, Trillard, Mme Assassi, M. Roger, sont revenus sur l'asile. Je répète que le Gouvernement est fidèle à notre devoir en matière d'asile politique. La France a toujours accueilli tous les persécutés du monde. Elle continuera mais ce n'est pas, monsieur Sueur, parce qu'on demande l'asile qu'on est persécuté.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Je n'ai pas dit cela !

M. Claude Guéant, ministre.  - Je l'ai entendu. Sans doute un lapsus.

Nous aurons eu entre 58 000 et 60 000 demandes cette année. Dans le même temps, se réduit le nombre de statuts octroyés par les instances compétentes -lesquelles ne dépendent pas de l'administration. De nombreuses demandes sont présentées sans motif probant pour la juridiction compétente. Il est clair que la demande d'asile est un moyen pour pénétrer, puis demeurer dans notre pays. Plus les délais d'instruction sont longs, plus s'accroît l'attractivité de notre pays ; plus longtemps l'étranger est resté sur notre territoire, plus il est difficile de le renvoyer. Voilà pourquoi il faut réguler la demande d'asile.

La première mesure que nous avons prise est d'améliorer les délais, la deuxième de mettre en place un examen prioritaire des dossiers. Il y a matière à prolonger la liste des pays sûrs. Ce matin même, l'Ofpra a envisagé d'en ajouter quatre.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Qui décide qu'une demande est abusive ? Le préfet ?

M. Claude Guéant, ministre.  - Ce ne sont pas les préfectures, c'est l'Ofpra, l'administration n'a rien à voir dans ces procédures.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Ce sont les préfets qui décident que c'est prioritaire.

M. Charles Revet.  - N'insistez pas !

M. Claude Guéant, ministre.  - L'immigration légale concerne 200 000 personnes par an, soit la population d'une ville comme Rennes. Nous souhaitons la réduire. Il faut que les étrangers se sentent bien chez nous et que nous nous sentions bien avec eux. L'intégration exige un effort de chacun. Il est plus facile d'intégrer un peu moins de monde que d'en intégrer plus. Quand j'ai évoqué l'échec scolaire, ce n'était pas pour stigmatiser une catégorie, mais pour exposer un problème, car ceux qui échouent ont moins de chance de réussite professionnelle. Il faut donc trouver des solutions efficaces.

J'ai dit vouloir réduire de 10 % le nombre des immigrés légaux, en particulier au titre du travail. Le bâtiment par exemple n'a pas besoin d'autant d'étrangers qu'on le dit. Avec 2,8 millions de demandeurs d'emploi, nous devons faire d'abord appel aux Français et aux étrangers en situation régulière. (Applaudissements à droite) La France n'a pas vocation à faire venir des chômeurs supplémentaires. Que 24 % des étrangers résidant chez nous soient demandeurs d'emploi, ce n'est pas un succès de l'intégration !

Sur la question des étudiants étrangers, le Gouvernement mène une politique destinée à favoriser leur accueil. En 2007, nous en avons accueilli 46 000 nouveaux ; en 2011, 60 000. Ce n'est pas là une politique de réduction de l'accueil. La circulaire que j'ai signée avec Xavier Bertrand ne fait que rappeler le droit des étudiants titulaires d'un mastère ou d'un doctorat d'avoir un contrat de six mois avec une entreprise pour obtenir une première expérience professionnelle. Il ne suffit pas d'avoir fait des études en France pour avoir le droit d'y rester toute la vie.

Nous veillons à ce qu'il n'y ait pas de dumping social, ni de pillage des élites de certains pays. Le président du Bénin se plaint de ne plus disposer que de cinq cardiologues ; ses hôpitaux sont dans une situation dramatique tandis que les deux tiers des médecins béninois exercent à Paris.

Nous luttons contre les séjours irréguliers. L'objectif que j'ai fixé après le vote de la loi de juin, de 30 000 reconduites à la frontière, sera atteint voire dépassé. Va bientôt paraître un décret permettant de fermer pendant trois mois les établissements employant de la main-d'oeuvre irrégulière.

Les mariages gris sont une réalité, socialement et humainement douloureuse. Bon an, mal an, les tribunaux en annulent un millier.

M. Jean-Yves Leconte.  - Ce n'est pas au Gouvernement de décider !

M. Claude Guéant, ministre.  - Ce sont les tribunaux qui décident, pas le Gouvernement ni l'administration.

Les États de l'Union européenne sont sur la même ligne. L'Espagne a vivement regretté d'avoir beaucoup régularisé ; elle est maintenant en ligne avec le pacte européen.

La présidence polonaise a facilité le dialogue avec le Parlement européen. Hier et ce matin nous étions encore en réunion avec les représentants des principaux pays européens et avec la Commission : tout le monde est d'accord pour veiller à ne pas devenir plus attractif et à coordonner les réponses. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - L'article L. 741-2 du code d'entrée et de séjour des étrangers précise bien que le préfet est compétent pour enclencher la procédure prioritaire. Qui décide que la demande est abusive ? Le préfet. Pour les personnes concernées, cela a beaucoup d'importance. (« Bravo ! » et applaudissements à gauche)

M. Claude Guéant, ministre.  - La procédure est engagée par le préfet, mais c'est l'Ofpra qui décide de cette transmission. Pour les pays sûrs, l'Ofpra décide seul. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis.  - Ceci, je ne l'ai pas contesté.

Les crédits de la mission sont rejetés.

Agriculture, pêche, alimentation

M. le président.  - Nous allons examiner maintenant les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » et ceux du compte spécial « Développement agricole et rural ».

M. Yannick Botrel, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les crédits de la mission, d'un peu moins de 3,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement, ne représentent que 20 % de concours publics à l'agriculture, l'Union européenne en fournissant la moitié. La baisse prévue par rapport à 2011 a été nuancée par l'Assemblée nationale, en raison de l'adoption d'une mesure d'allégement des charges mais un coup de rabot de 36 millions a été par ailleurs donné. Au total, donc, l'augmentation n'est que de présentation.

Le programme 154 regroupe plus de la moitié des crédits, c'est le support privilégié des interventions du ministère. Paradoxalement, seuls 2 % des crédits de la mission sont consacrés aux aléas climatiques, ce qui en fait l'action la moins dotée du programme. À ce niveau, la sincérité budgétaire est en cause. Les moyens consacrés à l'assurance récolte sont même en baisse de 25 % en 2012. Une telle sous-budgétisation appelle à relancer la réflexion sur la couverture des risques agricoles par les mécanismes de marché. La loi de modernisation imposait au Gouvernement de réfléchir à la réassurance publique avant février 2011. Cette obligation n'a pas été respectée.

La réforme des principaux opérateurs du programme doit conduire à des économies significatives. Je pense par exemple au regroupement des Haras nationaux et de l'École nationale d'équitation au sein de l'Institut français du cheval et de l'équitation ; je pense aussi à la création de l'Agence de services et de paiement ainsi qu'à la fusion des principaux offices agricoles au sein de FranceAgriMer. L'évolution des subventions attribuées aux opérateurs ne doit pas se traduire par une détérioration des prestations.

Je déplore la nouvelle diminution des crédits affectés au programme 206, qui concerne la sécurité sanitaire de l'alimentation. Cela remet en cause notre capacité à réagir en cas de crise grave. Le Gouvernement doit veiller à ne pas trop se reposer sur l'autocontrôle des professionnels.

L'instauration d'une contribution additionnelle de 2 euros par hectare pour l'exploitation des forêts va dans le sens préconisé par le rapport Bourdin, mais reste timide.

Il nous est proposé d'exonérer de cotisations sociales les employeurs relevant du régime de la protection sociale agricole, dans la limite de vingt salariés. Je suis sceptique. Évitons les trappes à bas salaires et avançons vers la convergence sociale en Europe. Je reste circonspect sur le coût budgétaire de 210 millions avancé par le Gouvernement.

Certes la mesure répond à des attentes professionnelles fortes et ne saurait donc être rejetée. Quant à l'article 48 ter, il ne pose pas problème.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose de rejeter les crédits de la mission et d'adopter sans modification ceux du compte d'affectation spéciale ainsi que les trois articles rattachés.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Les dépenses fiscales rattachées à la mission sont chiffrées dans notre rapport.

Le rapport Guillaume affiche des résultats satisfaisants pour les dépenses fiscales rattachées à la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales : parmi les 37 mesures, 28 sont jugées efficaces. Les 9 autres niches ne représentent que 2 millions d'euros, soit moins de 1 % des dépenses fiscales attachées à la mission. Pourrions-nous disposer d'un récapitulatif global dans le projet annuel de performances ?

Je me félicite que le programme 149 « Forêt » bénéficie d'une nouvelle nomenclature en 2012. L'Office national des forêts, sur lequel j'ai rédigé un rapport en 2012, voit sa subvention augmenter pour la première fois depuis trois ans. Ce n'est malheureusement pas suffisant. Avec 9 500 salariés, il a perdu plus du tiers de ses effectifs en vingt-cinq ans. Je m'interroge sur le climat social dégradé qui en découle. La mise en place du compte d'épargne assurance pour la forêt doit être diffusée auprès des sylviculteurs. Où en est-on ?

Nous préconisons, sur le programme 215, une ventilation des dépenses de personnel entre les programmes de la mission. La structure actuelle n'est justifiée ni par la mise en oeuvre de la Lolf, ni par la réorganisation du ministère.

Le recensement général agricole, obligatoire pour tous les États membres de l'Union européenne, s'est terminé cette année. Pouvez-vous nous en dresser un bilan ?

Dans un compte d'affectation spéciale, le montant des engagements doit être ajusté au long de l'année en fonction des recettes constatées. Une utilisation optimale des crédits est requise. Malgré une période difficile, de nouvelles compétences lui ont -paradoxalement- été dévolues. Les comités scientifiques pour les appels à projets représentent une avancée notable. Dans son rapport de 2008, la Cour des comptes a relevé que la répartition des aides tend à reproduire les subventions, dans une logique de financement pérenne. C'est aux antipodes de la performance !

Je suis favorable à l'adoption de ces crédits à titre personnel, contrairement à l'avis de la commission, mais je suis d'accord avec elle pour adopter ceux du compte d'affectation spéciale.

J'ai suggéré dans mon rapport sur l'ONF de revoir le partage des frais de garderie du régime forestier. Ce texte fait un premier pas dans cette direction ; je m'en réjouis. (Applaudissements à droite)

Mme Renée Nicoux, rapporteure pour avis de la commission de l'économie.  - Ce budget n'est pas votre seul outil. La situation agricole s'améliore globalement depuis 2009. La diversité des territoires et des productions est une richesse, mais les inégalités se creusent ; la sécheresse a encore pénalisé les éleveurs en 2011. L'observatoire des prix et des marges observe sans pouvoir intervenir, alors que le déséquilibre entre l'amont et l'aval demeure.

Le rapport de force entre producteurs, industriels, et grande distribution ? Il reste inchangé ! Les agriculteurs sont de plus en plus exposés aux aléas climatiques et économiques. Face à cela, les décisions du G20 agricole sont décevantes : rien sur la régulation des marchés, nous restons prisonniers de la vision libérale de l'OMC.

Les négociations sur la PAC amèneront peut-être à réduire les enveloppes. La PAC reste orientée par les marchés. Le verdissement des aides va dans le bon sens mais doit être développé.

En application du plan d'économies annoncé par le Premier ministre, 22 millions d'euros supplémentaires ont été retirés à l'Assemblée nationale. Les gels de crédits ont encore amputé les moyens réels du ministère. La rallonge de 210 millions d'euros pour l'allègement des charges sociales ne doit pas faire illusion. Bref, c'est un budget de dépenses obligatoires, qui vous donne peu de marges de manoeuvre pour faire face aux imprévus : les crédits sont à l'étiage. La baisse des charges sociales soulage momentanément les agriculteurs, sans apporter de solution réellement durable.

Dans notre rapport, nous avons rappelé le potentiel de développement de l'agriculture ultramarine.

La commission est défavorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à gauche)

Mme Odette Herviaux, rapporteure pour avis de la commission de l'économie.  - L'installation des jeunes agriculteurs est un enjeu crucial, pour les exploitants vieillissants, surtout dans l'élevage allaitant. Sans installation, pas de continuité des exploitations et moins de progrès technique. Certes, les crédits budgétaires progressent, auxquels s'ajoutent des exonérations fiscales.

Au total, l'État et l'Union européenne consacrent 350 millions d'euros à l'installation des jeunes, mais les résultats sont insuffisants. J'ajoute que les chambres d'agriculture doivent faire mieux avec des crédits en baisse.

La sécurité sanitaire des aliments fait l'objet d'une grande exigence des consommateurs. Pourtant, les moyens de combatte les maladies végétales ou animales diminuent de 3 % malgré la réalité de nouvelles mesures. La réduction des effectifs est inquiétante, au point d'inquiéter le syndicat des inspecteurs sanitaires vétérinaires. Vous procédez à un désarmement progressif de l'arsenal de sécurité sanitaire.

L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) disposera de crédits en baisse, alors qu'investir dans la sécurité sanitaire est rentable.

J'en viens à la politique européenne des pêches : la Commission veut réduire les quotas et les rendre marchandisables. L'enjeu majeur de modernisation des équipements est négligé.

Les crédits de la pêche sont largement consacrés à la sortie de flotte et à l'assurance chômage. Il faudrait avoir une vision plus offensive de la pêche et soutenir des projets aquacoles innovants.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à gauche)

M. Gérard César, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Pour nourrir 9 milliards d'humains à l'horizon 2050, il faut produire !

La France est bien placée. Mais le maintien d'une agriculture française suppose que les agriculteurs gagnent bien leur vie ; bravo pour la baisse des charges !

Malgré la baisse des crédits consacrés à la forêt, l'État ne l'abandonne pas. Ainsi, les dépenses liées à la tempête Klaus sont maintenues à un niveau très élevé.

Les ressources de l'ONF bénéficient de la hausse de la redevance versée par les communes forestières.

L'assurance agricole reste insuffisante, malgré la prise en charge à 75 %par l'Europe. En effet, la combinaison d'une franchise de 25 % et d'un seuil de perte au moins égal à 30 % met en doute l'intérêt de l'assurance.

J'en viens à la viticulture, qui relève pour l'essentiel de crédits européens -soit 250 millions d'euros. La production de vin est indispensable à la ferme France, mais la réforme de 2008 aboutit à une catastrophe : la perte des droits de plantation, qui devraient disparaître au plus tard en 2018. Mme Merkel et M. Sarkozy ont appelé à les rétablir ; quatorze États européens ont fait de même, sans réussir à faire fléchir la Commission. Malgré le soutien du Parlement européen, nous faisons du surplace. Il manque 66 voix émanant de deux pays pour atteindre la majorité qualifiée au Conseil européen.

Contrairement à la commission, je suis, à titre personnel, favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Henri Tandonnet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Les crédits de la mission -soit 3,5 milliards- sont préservés, ce dont on peut se réjouir. S'ajoutent les niches fiscales -soit 2 milliards- positivement appréciées par le rapport Guillaume.

S'agissant de la baisse des charges, mon point de vue est positif : il fallait réagir à la perte de parts de marché.

La crise du concombre et de la tomate, liée à la bactérie e-coli a coûté 25 millions d'euros au ministère mais il aurait fallu aller plus loin en améliorant la compétitivité de la filière fruits et légumes. L'Assemblée nationale a adopté un amendement réduisant les charges patronales des exploitations jusqu'à vingt salariés.

Mais les charges sociales ne sont pas les seuls fardeaux : les charges administratives doivent être simplifiées.

M. Charles Revet.  - Exact !

M. Henri Tandonnet, rapporteur pour avis.  - Sur la gestion de l'eau, le ministère se désengage. Il faut donc trouver d'autres investissements : les agences de bassin prennent le relais, avec le concours de certaines collectivités territoriales.

En juin, le président de la République a annoncé un plan de cinq ans pour la création de retenues collinaires, qui deviendront rapidement vitales. Le dossier ne doit pas relever de la seule compétence du ministère de l'écologie.

Malgré l'avis négatif de la commission, je me prononce, à titre personnel, pour leur adoption. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Raymond Vall, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - La crise de l'élevage, à cause de la sécheresse, a conduit les éleveurs à décapitaliser. Le rapport Bailly a fait le point sur la filière et l'Institut de l'élevage a confirmé. La demande mondiale de viande progresse, sans profiter à nos éleveurs. Mettre en place un GIE Export a été envisagé, mais les crédits consacrés à l'exportation sont en baisse.

Que deviendront les éleveurs laitiers après 2014 ? La proposition du nouveau contrat de Lactalis est repoussée par les éleveurs. Où en est la négociation du paquet lait qui devait être conclue à la fin de l'année ?

La prime à l'éleveur allaitant résistera-t-elle à la réforme de la PAC ?

L'enjeu de la modernisation demeure. En 2012, plusieurs plans sont maintenus, mais leur ampleur est modeste. Nous n'avons pas rattrapé notre retard sur l'Allemagne par exemple en matière de photovoltaïque et de méthanisation, souvent moins par manque de crédits qu'à cause de la réglementation.

M. Yannick Botrel, rapporteur spécial. - C'est vrai !

M. Raymond Vall, rapporteur pour avis.  - Le lien entre agriculture et alimentation peut faire du consommateur un allié du producteur de qualité. Merci pour la possibilité désormais ouverte aux collectivités territoriales de faire appel aux circuits courts.

En revanche, les buts fixés en agriculture biologique ne seront pas atteints : les crédits sont maintenus mais l'avantage fiscal est divisé par deux, ce qui est un très mauvais signal.

J'en viens aux territoires ruraux enclavés.

Dans le Gers, vous avez rencontré les forces vives du département. Si nous n'y prenons garde, tous les efforts seront anéantis dans les territoires isolés. Même les stockages, faute de transports routiers ou ferrés convenables, seront délocalisés vers les ports et les grands axes !

Avoir maintenu ces crédits est à votre honneur, monsieur le ministre, mais la priorité à la compétitivité sur les marchés internationaux compromet le modèle français d'agriculture diversifiée.

C'est pourquoi je suis défavorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Charles Revet.  - Dommage !

Mme Mireille Schurch.  - Monsieur le ministre, vous avez déclaré qu'il ne fallait pas laisser croire aux paysans que leur réussite dépendait des crédits du ministère.

Certes, les dotations européennes prédominent, mais cela ne justifie pas votre coup de rabot de 22 millions.

Au-delà de la poursuite des politiques de solidarité et d'aménagement du territoire vous pouvez donner des impulsions dans les domaines du revenu, de la formation, de l'agronomie, de la transmission, etc. Une loi d'orientation agricole est urgente, pour proposer autre chose à la ferme France et infléchir la PAC dans un sens plus équitable.

Pour réduire le coût des salariés peu rémunérés, vous mettez à contribution tous les agriculteurs et instituez une taxe sur les boissons sucrées en compromettant la lutte contre l'alcoolisme.

Ce tour de passe-passe ne convainc personne. La présidente des producteurs de légumes de France a observé qu'il y a là une machine à perdre, pénalisant la bonne rémunération des salariés. La productivité, autre volet de la compétitivité, trouve ses limites, avec des truies à 28 porcelets l'an et des vaches à plus de 15 000 litres de lait. On ne peut systématiquement tordre le cou des paysans, et faire du dumping social, dites-vous. Passez aux actes !

Les négociations sur le lait avec Lactalys montrent les difficultés d'aboutir à une négociation équilibrée. L'Observatoire des prix et des marges a publié son rapport, très instructif : la marge brute des grandes surfaces avoisine 50 % pour la viande de porc. Il faut rendre incompressible la marge du premier maillon !

Merci, monsieur le ministre, pour la liberté accordée aux collectivités territoriales de privilégier les circuits courts.

La sécheresse a privé certains éleveurs de l'Allier, à cause de la règle de 13 % de perte de revenus, de toute indemnisation. Comme tous les crédits n'ont pas été consommés, ne pourrait-on retenir 45 % de perte de fourrage ?

Le stockage de l'eau concerne surtout les cultures d'irrigation. Il faut également étudier le développement de cultures peu gourmandes en eau.

Première région agricole, la Bretagne subira d'importantes pertes de revenus à cause de la réforme de la PAC, inspirée par le dogme de la concurrence libre et non faussée, alors que nos priorités devraient être de mieux nourrir tous les humains.

Le dernier recensement agricole devait permettre d'apprécier les dégâts occasionnés par la politique suivie.

L'aide aux jeunes agriculteurs pourrait-elle être rétroactive de cinq ans ?

Le déséquilibre des rapports de force pèse sur les producteurs et les consommateurs.

Le Gouvernement n'ayant pas la volonté d'une politique à la hauteur des besoins, les sénateurs CRC voteront contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Charles Revet.  - Le ministère de l'agriculture respecte la loi de programmation 2011-2014.

Pour 2012, vous avez retenu des priorités pour faire face à une conjoncture difficile et renforcer la compétitivité de l'agriculture.

L'installation de jeunes agriculteurs reste prioritaire, puisqu'elle est reconduite depuis la hausse obtenue en 2009.

L'allègement de charges de 210 millions pour le travail permanent vient compléter l'allègement lié au travail saisonnier. Cette mesure favorisera l'embauche de salariés permanents. Merci !

En Allemagne, les besoins en main-d'oeuvre sont largement assurés par des entreprises de travail intérimaire fournissant des salariés par rotation.

Pour le biogaz, l'Allemagne qui produit 1 400 MW avec la méthanisation, est au premier rang, notamment dans le secteur porcin, qui bénéficie d'un avantage certain sur nos éleveurs.

La convergence européenne devra prendre en compte les disparités des coûts de production. Au-delà du soutien, il faudra des moyens de régulation pour faire face à la volatilité des marchés.

La pêche et l'aquaculture me tiennent à coeur. Grâce à la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche les Assises de la mer ont permis à notre pays de faire des propositions pour une réforme ambitieuse de la politique commune en 2012. Toutes les mesures du plan Pêche durable et responsable sont engagées pour relever le défi écologique, social et économique de la pêche. Désormais, les pêcheurs sont représentés dans des comités régionaux ou départementaux. Vous renforcez l'expertise de l'Ifremer, afin de développer la nécessaire coopération entre pêcheurs et scientifiques. Le comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes a été installé : ne pourrait-il pas étendre son expertise à toutes les zones économiques ?

Où en est l'élaboration des schémas régionaux de développement de l'aquaculture ? Le plan pour une pêche durable et responsable passe par la signature de contrats bleus, qui ont été reconduits.

J'ai évoqué l'an dernier l'allongement des périodes de pêche de la coquille Saint-Jacques à Dieppe et Fécamp. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Avec le groupe UMP, je voterai votre budget ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Aymeri de Montesquiou.  - Vous avez pu mesurer dans le Gers, avec le président de la République, les difficultés et le courage, la passion des agriculteurs. Être agriculteur, c'est une philosophie de vie.

Voltaire disait : « On a trouvé en bonne politique le secret de faire mourir de faim ceux qui en cultivant la terre font vivre les autres. »

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Bravo Voltaire !

M. Aymeri de Montesquiou.  - Il faut le faire mentir !

Le programme 584 vise à adapter les filières agricoles aux nombreux défis actuels ; avec raison, vous voulez accroître la compétitivité. Les agriculteurs veulent des marges plus que des rendements.

Grâce à l'allègement des charges pesant sur les travailleurs agricoles, l'agriculture allemande a dépassé la nôtre. Après avoir exonéré nos salariés occasionnels, nous devons étendre le dispositif aux salariés permanents.

Les entrepreneurs agricoles attendent plus de liberté. La réglementation européenne frôle l'aberration et est relayée par une administration française à la limite de l'autisme. Quel serait l'avantage de la télédéclaration ?

L'agriculture raisonnée limite les intrants, mais évitons l'absurdité ! Laissons les agriculteurs choisir le moment opportun pour l'épandage des engrais ! Les semis sont en avance de deux mois dans le Gers : pourquoi attendre le 15 janvier ?

Avec bon sens, vous proposez de stocker l'eau en hiver, pour l'utiliser en été. Que pensez-vous du projet de barrage de Charlas, à l'étude depuis douze ans ?

Pour répondre aux crises, nous avons besoin d'assurance et de réassurance publique. Je regrette donc la baisse des crédits consacrés à l'assurance, qui passeront de 33 millions à 25.

Les agriculteurs doivent diversifier leur production et leur activité, car la biprofessionnalisation stabilisera les ressources. Mais le haut débit est vital. Le Gers est candidat pour devenir territoire d'expérimentation pour la technologie 4G.

Votre budget prévoit les crédits d'installation pour 7 000 jeunes agriculteurs, ce dont je me félicite.

La PAC est indispensable, mais ne pourrait-on envisager de garantir un certain prix des céréales, dans le plafond d'une certaine production à l'hectare ?

La taxe sur les plus-values de terres rendues constructibles préservera la surface exploitable, qui a régressé au troisième rang européen. Cette année, nos exportations agricoles ont progressé grâce à la qualité.

Pour nourrir 9 milliards d'êtres humains, la production agricole devra augmenter de 70 % : c'est colossal. Il est inacceptable que 20 % de la population mondiale soit sous-alimentée.

Avec le président de la République, vous avez réuni le premier G20 agricole de l'histoire, car l'agriculture du XXIe siècle refuse de laisser les humains mourir de faim. Vous avez abouti parce que cette négociation avait une âme avez-vous dit. Donnez-lui un coeur, avec une stratégie adaptée.

Le groupe UCR votera vos crédits. (Applaudissements sur les bancs UCR et UMP).

Mme Bernadette Bourzai.  - Je partage les analyses de M. Botrel, Mmes Nicoux et Herviaux sur les faiblesses de ce budget.

Après la crise sanitaire attribuée à tort aux producteurs de concombres, vous vous attaquez à la sécurité sanitaire et à la réassurance publique. Où est le rapport prévu pour fin 2010 ? Nous risquons d'attendre encore !

La situation de l'ONF demeure préoccupante. La contribution des communes et la subvention exceptionnelle de l'État pour 2012 suffiront-elles, malgré les suppressions d'emplois ? Les suicides de forestiers continuent aussi, alors que l'ONF se préoccupe non de la forêt mais de productivité et de compétitivité !

La suppression de 280 postes de l'enseignement agricole qui figure dans la mission « Enseignement scolaire », est inadmissible. C'est une véritable saignée.

L'agriculture de demain devra concilier performance économique et performance écologique. En dix ans, notre agriculture a perdu la moitié de ses exploitations : il n'en reste que 500 000.

Pour la première fois, le secteur céréalier et oléagineux compte plus d'exploitations que celui de l'élevage. Le Limousin subit une évolution comparable ; il a subi en outre la sécheresse du printemps qui se prolonge en cet automne.

La nouvelle restructuration qui se profile est d'autant plus inquiétante que la transmission est incertaine au regard de l'âge moyen des chefs d'exploitation. Il est urgent de mettre en oeuvre une politique volontariste d'installation de nouveaux agriculteurs. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons un amendement qui double la taxe sur les plus-values foncières lors de la vente de terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement en zone urbaine ; son produit sera affecté à l'installation de jeunes agriculteurs.

Face aux difficultés, vous proposez des exonérations de charges, pour 200 millions. Mais ce que vous donnez d'une main, vous le reprenez de l'autre avec la taxe sur le fioul ! Le secteur des fruits et légumes, pourtant très utilisateur de main-d'oeuvre, risque de ne pas en bénéficier. De surcroît, ces exonérations risquent de créer une trappe à bas salaires dans l'agriculture. Nous sommes sensibles aux attentes de la profession, mais nous ne sommes pas dupes du moment choisi pour cette annonce et nous ne sommes pas convaincus qu'elle améliore la compétitivité.

S'il ya une véritable distorsion de concurrence au niveau européen sur le coût du travail, c'est à ce niveau qu'elle doit se régler. Un accord entre le Parti socialiste et le SPD a d'ailleurs été signé pour instaurer un salaire minimum dans l'agriculture. L'écart se creuse dans les secteurs les plus intenses en main-d'oeuvre, dans des filières comme le maraîchage, l'horticulture ou l'arboriculture. Nous serons attentifs aux résultats du Conseil européen et à la réforme de la PAC pour la période 2014-2020. Il faudra rester vigilant, car les négociations ne font que commencer.

M. le président.  - Vous avez dépassé votre temps de parole !

Mme Bernadette Bourzai.  - Nous approuvons les objectifs de la réforme, mais sommes plus nuancés sur les moyens que vous proposez. Nous aimerions avoir plus d'informations sur les résultats du G20 agricole.

M. le président.  - J'invite chacun à respecter son temps de parole ; nous pourrions ainsi terminer cette mission vers 21 heures.

M. Yvon Collin.  - Notre agriculture a un rôle clé à jouer pour relever le défi alimentaire mondial. Pour cela, il faut non seulement produire plus, mais aussi mieux. Pour nourrir 9 milliards d'individus en 2050, qui plus est dans le contexte du dérèglement climatique, l'agriculture doit augmenter sa production de 70 % à 100 %...

L'agriculture française doit rester dynamique, avec une PAC dans la réforme de laquelle nous comptons, monsieur le ministre, sur votre fermeté.

Le métier d'agriculteur n'est pas simple. Il est essentiel de continuer à lutter contre la déprise agricole, à former les jeunes, à offrir à tous des débouchés rémunérateurs. Mais vos crédits baissent : notre agriculture n'est pas soutenue à la hauteur des enjeux.

Prenons garde à ce qu'elle ne rate pas le train de la mondialisation comme l'ont fait de larges pans de notre industrie... L'exonération des charges sociales est particulièrement pertinente pour un secteur riche en main-d'oeuvre -le rapport Guillaume l'avait noté.

La gestion des crises est sous-dotée. Est-ce raisonnable ? Je suis d'autant plus inquiet que le dispositif d'assurance-récolte n'est toujours pas suffisamment incitatif.

Les retraites agricoles sont faibles pour des personnes qui ont dédié leur vie au difficile métier agricole ; nous sommes nombreux ici à attendre un geste en leur faveur.

La majorité du groupe RDSE ne votera pas ce budget. (Applaudissements à gauche)

M. Ambroise Dupont.  - La situation des producteurs de viande bovine reste difficile. Ils sont précarisés -la crise mondiale a encore aggravé les choses- et leurs trésoreries sont éprouvées. Certains professionnels s'interrogent sur la poursuite de leur activité, dans le Calvados par exemple.

À l'autre bout de la chaîne, les consommateurs changent leurs habitudes et sont séduits par les produits venant de loin, mondialisation oblige !

Le Gouvernement n'est pas resté sans rien faire, il a soutenu la filière, indemnisé les producteurs, versé des avances sur les aides PAC. Les cycles de l'élevage sont longs, aussi faudra-t-il attendre avant d'évaluer l'effet de la récente remontée des prix. Il reste un long chemin pour moderniser le secteur de la viande bovine. La France dispose pourtant de nombreux atouts.

La filière équine me préoccupe aussi. Elle génère 75 000 emplois. Je me félicite de constater que l'excellence de l'équitation française a été reconnue au sein du patrimoine mondial de l'humanité.

Le groupe « cheval » du Sénat comme les professionnels s'alarment d'une éventuelle condamnation de la France par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), à l'instar des Pays-Bas, de l'Allemagne et de l'Autriche, en raison de l'application du taux réduit de TVA à la filière ; Bruxelles conteste son assimilation aux activités agricoles. M. Bizet, alors président de la commission des affaires européennes et moi-même avons fait adopter par le Sénat une résolution considérant que le taux réduit de TVA devait « continuer à s'appliquer à l'ensemble de la filière équine ».

Bruxelles semble cependant admettre qu'une partie de la filière en bénéficie au titre des activités sportives. Si je me réjouis de l'adoption par le Sénat, après l'Assemblée nationale, et avec le soutien du Gouvernement, de l'article 5 sexies qui va dans ce sens, il semble qu'il soulève quelques difficultés : les courses hippiques, la vente de chevaux ou encore les opérations de saillie n'entrent pas dans son champ d'application. Il y a là une rupture dans l'approche de la filière et la mise à mal de la solidarité à l'intérieur de celle-ci. Quelles dispositions entendez-vous prendre pour les autres secteurs de la filière, en particulier les courses ?

Un mot enfin des associations de races françaises de chevaux de trait. Leurs moyens baissent encore, ce qui ne manquera pas de leur poser de sérieux problèmes de fonctionnement.

La France agricole s'interroge sur son avenir dans la mondialisation, une mondialisation qu'il faut voir comme une chance et plus seulement comme une contrainte. Nous savons votre engagement dans les enceintes internationales pour défendre les intérêts de l'agriculture française. Nous comptons sur vous. (Applaudissements à droite)

M. Joël Labbé.  - Notre groupe ne fait pas partie des sectaires qui opposent agriculture et environnement. Je ne suis ni intégriste, ni passéiste, mais utopiste par nécessité, responsabilité et lucidité. Je ne crois plus au modèle de développement agricole dominant, comme beaucoup de jeunes : vivons, pensons, produisons autrement ! Il est heureux que cette voix nouvelle puisse être entendue ici. Comme le disait Léo Ferré, j'userai de ces armes pacifiques qui savent mettre de la poésie dans le discours.

Augmenter la productivité de l'agriculture française de 70 % à 100 %, comme je l'ai entendu ici, est une perspective inadmissible ! Voyez le Brésil et ses 12 millions de paysans dans les favelas ! Nous avons des conceptions différentes de l'agriculture et de sa place dans la société.

En 2010, le revenu moyen de la profession s'établissait à 24 200 euros par an, mais le chiffre cache de grandes disparités entre filières et entre régions ; 25 % des paysans ont un revenu inférieur au Smic et 40 % des agriculteurs disposent de moins d'un Smic pour vivre. Le système qui est encore le nôtre est à bout de souffle et nos agriculteurs en sont les premières victimes. Ce processus est inquiétant. Au contraire de la monoculture, la polyculture assure la biodiversité agricole, destinée à nourrir les gens là où ils vivent. Soutenons cette agriculture d'avenir, moderne, mécanisée mais pas surmécanisée. Il faut développer davantage les circuits courts, interdire la spéculation sur les aliments, mettre en place des réserves alimentaires physiques et diversifiées pour faire face aux crises en cas d'urgence.

Le texte que le Parlement a adopté sur les certificats d'obtention végétale légalise le brevetage du vivant ; il est une atteinte grave aux droits fondamentaux des agriculteurs. J'espère que cette loi scélérate sera bientôt abrogée.

Vous baissez le coût du travail mais coupez dans les crédits de modernisation des exploitations ou de gestion des crises. J'espère qu'on ne reviendra pas sur la hausse de TVA sur les produits phytosanitaires. Vous persistez à subventionner les agrocarburants, malgré les effets néfastes de ces vastes monocultures qui menacent l'alimentation des populations, par exemple en Sierra Leone. Cessons ce véritable pillage.

Le sort réservé à l'agriculture biologique dans ce budget est lui aussi révélateur. Si on veut s'en donner les moyens, il est possible de consacrer 20 % de la surface agricole utile à l'agriculture biologique en 2020. Elle est à même de nourrir la planète !

La gestion des pêches et l'aquaculture ne représente que 3 % des crédits de la mission. Le budget de l'agence FranceAgriMer a été amputé par les lois de finances successives. Les quotas par navire sont supérieurs aux capacités de capture... Cela encourage la surpêche. Les droits de pêcher doivent être conditionnés au respect de critères environnementaux et sociaux.

Nous ne voterons pas ce budget. Nous ne nous résignons pas à la mort programmée d'une certaine agriculture. La terre nourricière doit être de nouveau considérée comme un bien commun et le métier de paysan comme un métier d'utilité publique.

Mme Évelyne Didier.  - L'année internationale de la forêt a été marquée par la difficile négociation du contrat de plan entre l'État et l'ONF. La forêt est d'abord un écosystème et un lieu d'accueil du public, un espace de convivialité où s'exercent les droits acquis à la Révolution. Incarnant le développement durable, elle exige le respect de la conservation du savoir-faire des forestiers, une vision à long terme que seul l'État peut garantir avec une exigence de continuité et d'égalité du service.

Le président de la République a annoncé un engagement fort en faveur de la forêt. Mais l'augmentation des frais de garderie aura des conséquences pour toutes les communes forestières, en particulier pour celles qui disposent de forêts peu productrices dans le midi de la France. L'État se désengage.

Par ailleurs, je salue l'effort de nouveaux moyens, mais seront-ils pérennisés ? Et sont-ils suffisants ? Vous voulez supprimer 693 équivalents temps plein, mais 80 personnes seront embauchées sur des contrats de droit privé. La gestion des ressources humaines est un peu erratique.

On demande toujours plus à la forêt publique, quand l'essentiel du gisement se trouve dans la forêt privée. Les crédits de fonctionnement du Centre national de la propriété forestière ont été réduits de 22 % en 2011 ; ils ne vont augmenter que de 18 % l'an prochain. Malgré toutes vos assurances lors du débat de mai dernier sur l'avenir de la filière bois, je crains pour l'avenir de l'ONF et du régime forestier. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Bertrand.  - Comme la grande majorité du RDSE, je ne voterai pas ce budget. Je partage l'avis de mes collègues Vall et Collin. Mais, curieusement, pas celui du ministre qui conseille le chef de l'État pour son programme.

Vous présentez un budget qui manque d'ambition, ou plutôt d'âme ! Il manque de signaux donnés à la profession. Après avoir assisté à de nombreux congrès professionnels, je vous le dis : avec ce budget, vous devriez parler davantage aux agriculteurs !

Les agriculteurs ont des difficultés financières, mais la grande distribution fait d'énormes bénéfices. On mangerait plus de viande, de fromages, de fruits, s'ils étaient moins chers ! Sur la retraite, il faudrait tenir les promesses qui ont été faites !

La sécheresse a été terrible pour l'élevage. Vous entendez privilégier des solutions structurelles, mais les trésoreries sont exsangues. Dans le Massif central, nous craignons des catastrophes humaines. La place de l'élevage et de l'aménagement du territoire est insuffisante dans votre budget. L'agriculteur est le premier aménageur de l'espace. La plus grande ville de France, ce n'est pas Paris, c'est l'ensemble de nos villages !

Je ne comprends pas qu'un ministre comme vous ne prenne pas la responsabilité de modifier la répartition si inégale des aides : 10 % des exploitations perçoivent la moitié au total ; 38 % doivent se satisfaire de 2,5 %. Songez aussi aux producteurs de pêches et d'abricots qui sont en train de crever !

Un mot de l'hydraulique : presque rien dans ce budget...

Il faut certes nourrir les gens, mais dans certains territoires, il faut substituer la notion de compétitivité territoriale à celle de compétitivité économique -je pense en particulier à la montagne.

La loi par laquelle les semenciers privent les agriculteurs du réemploi de leurs semences est un scandale ! Les vieux agriculteurs se retournent dans leur tombe ! Faites quelque chose, monsieur le ministre ! Et revoyez aussi votre copie sur le fioul !

Une mission sur la ruralité a été constituée. Mais, monsieur le ministre, faites en sorte que l'égalité entre les territoires -qui n'existe pas- cesse de nous être opposée, pour se muer en discrimination positive en faveur des territoires ruraux ! (Applaudissements à gauche)

M. Gérard Bailly.  - Je serai plus positif. Vous réussissez à maintenir vos crédits au niveau de 2010, ce n'est pas mal ! Positive aussi, la baisse du coût du travail. J'ai cru entendre le contraire dans cet hémicycle, j'en suis surpris ! Préserver notre compétitivité est un vrai défi pour nourrir 7 milliards d'hommes. Après avoir poussé les agriculteurs à produire intensivement, l'enjeu aujourd'hui est de conjuguer compétitivité économique et écologique.

Les exigences environnementales envisagées par la PAC à l'horizon 2013 me semblent exagérées. Le verdissement de la PAC ne doit pas devenir la quadrature du cercle pour les agriculteurs.

Sur l'élevage, sujet que je suis de près, je note avec satisfaction l'augmentation des prix du lait et de la viande bovine après des années 2009 et 2010 très difficiles. L'observatoire des prix et des marges fait-il son travail ? La grande distribution respecte-t-elle les accords qu'elle a signés ?

Aujourd'hui, les gens ne dépensent plus que 12 % de leur budget pour l'alimentation et 4 % seulement du produit vont aux agriculteurs, ce qui me fait regretter certains propos tenus ici-même !

L'excellence de notre filière viande bovine est reconnue : je souscris à votre vision des conquêtes de parts de marché à l'exportation. Je vous demande de veiller, monsieur le ministre, aux aides aux bâtiments d'élevage et aux parcelles d'herbe qui sont transformées pour accueillir des céréales.

Un mot sur la filière bois, insuffisamment exploitée, souvent faute de dessertes et en raison du morcellement des parcelles. Lors de l'examen de la LMA, j'ai fait voter un amendement imposant l'information des voisins en cas de vente d'une parcelle de moins de 4 hectares ; sa mutation en droit de préemption a soulevé des interrogations parmi les notaires. Il faut revoir ce dispositif. Les deux euros à l'hectare ne me choquent pas.

Les retraites agricoles sont particulièrement modestes, celles des femmes d'exploitants encore plus. Malgré les efforts, la retraite moyenne en Franche-Comté d'un chef d'exploitation est de 735 euros -après une carrière complète ! À quand un alignement sur le régime général ? Le président de la République avait promis 85 % du Smic.

M. Carle m'a demandé de parler de l'enseignement supérieur agricole. Ses sept écoles restent sous-dotées malgré les promesses du Gouvernement.

Je redis toute ma confiance au ministre et je voterai ce budget. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Étienne Antoinette.  - Le plan de rigueur compromet l'avenir de l'agriculture, surtout outre-mer.

La restructuration est imposée souvent en dépit du bon sens.

La Guyane est immense, mais ses terres sont peu accessibles ; l'autosuffisance alimentaire n'est pas assurée. Il faut donc renforcer d'abord l'action de l'établissement public d'aménagement foncier.

Comment développer l'agriculture quand les prix de revient locaux sont supérieurs à ceux des importations ? L'approvisionnement en matières premières est crucial et le monopole des transports aériens induit des coûts insupportables.

Les avantages fiscaux sur les bénéfices n'ont guère de pertinence. Les mesures attendues sont précisément celles sur lesquelles s'exercent les restrictions. Mieux vaut aider à l'installation. En revanche, la coopération régionale ouvrirait des perspectives considérables.

L'aménagement du territoire suppose une réforme de la gouvernance. Vous avez évoqué la nécessité de celle des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural. Où en est l'Epag ?

La pêche outre-mer est artisanale ; les pêcheurs, peu formés, sont mal armés face à la concurrence et la filière insuffisamment structurée en Guyane. Il semble impossible à la France de conduire une réflexion stratégique sur l'usage des 11 millions de kilomètres carrés de zone exclusive outre-mer. L'organisation professionnelle est un objectif premier : la Guyane manque toujours d'un centre de formation aux métiers de la mer.

Enfin, les plus fortes inquiétudes demeurent quant au régime forestier : la gestion de ce patrimoine a perdu 20 % de ces agents, alors que la contribution de la forêt au bilan carbone renforce la place de la France dans les négociations climatiques. On met sous cloche toute valorisation de notre biodiversité sans fixer aucune dotation compensatoire.

Le budget n'est adapté ni aux enjeux mondiaux, ni aux outre-mer. Inéluctablement, le budget de l'État ne réussit pas à faciliter le développement endogène de l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Bravo, monsieur le ministre, pour votre action. Nous avons un excellent ministre de l'agriculture.

M. Gérard Bailly.  - Nous voulons le garder !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je voterai donc ce budget.

En majorité, les producteurs de lait sont engagés dans des contrats avec les laiteries. En 2015, le système de quotas laitiers aura vécu. Le Gouvernement a anticipé et nous avons soutenu la contractualisation entre producteurs et transformateurs. La loi de modernisation de l'agriculture avait prévu un calendrier précis. Les transformateurs devaient faire des propositions pour le 1er avril, mais vous avez proposé de discuter encore.

Il reste néanmoins à donner des bases juridiques à ce dialogue et à organiser les producteurs pour qu'ils pèsent dans les négociations. Je sais qu'une directive européenne est en préparation, de même qu'un décret, qui permettra d'instituer des groupements de producteurs. Mais certains d'entre eux ont dû céder car une laiterie a lancé un ultimatum subordonnant le versement de la prime qualité à la signature d'un contrat avant le 1er décembre.

Les zones défavorisées simples font l'objet de discussions pour en réduire le périmètre : les critères doivent évoluer vers ceux des zones de montagne. Or, le département de l'Orne restera en plaine !

Sur le plan environnemental, les mesures européennes ont un prolongement franco-français. Ainsi, la contribution des prairies au revenu agricole est limitée. Mais un propriétaire voulant élever des volailles sur une partie de sa prairie a été contraint de mettre fin à une production céréalière... destinée à nourrir les volailles. Quelle absurdité ! De même, est-il nécessaire de maintenir une couverture hivernale sur la prairie alors que l'herbe ne pousse guère à cette saison ?

Lorsqu'un dossier « calamité sécheresse » est présenté au ministère, on nous répond que ce n'est pas le moment, qu'on est au coeur de la procédure d'évaluation. On m'a opposé cette réponse deux fois : quand vos services appliqueront-ils la procédure des calamités agricoles ?

Je ne saurais conclure sans évoquer à mon tour les retraités agricoles qui peinent à vivre avec des maigres pensions récompensant des vies de travail consacrées à nourrir la France. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Odette Herviaux.  - Nous avons rencontré il y a quelques semaines Mme Damanaki, la commissaire européenne à la pêche, pour nous opposer à la politique libérale conduite sous prétexte environnemental. La dérégulation entraînera la financiarisation de la filière puis la fin de la diversité de nos modes de pêche. La Commission semble ignorer le coût social des restructurations envisagées. Drôle de conception du développement durable !

Mme Damanaki nous a reprochés de défendre les pêcheurs, au lieu de la pêche. Mais que serait une pêche sans pêcheurs ? Une pêche minotière destinée à l'élevage ?

La gestion collective de la ressource halieutique a montré son efficacité avec une baisse de 25 % des stocks surexploités le long des côtes atlantiques. À plus de 80 %, les Français ont une bonne image des pêcheurs, dont ils apprécient à 68 % l'action pour l'environnement. Le « zéro déchet » n'est pas réaliste.

Nous refusons le zéro rejet, qui risque de ruiner les efforts de nos marins-pêcheurs. Le slogan « Trier sur le pont pour ne pas trier au fond » n'est pas un vain mot. Pourquoi précipiter le rendement maximum durable ? Nous avons besoin d'un calendrier raisonnable, établi en concertation.

L'Association des régions de France, la Conférence des régions périphériques et maritimes ainsi que les professionnels acceptent l'éco-conditionnalité mais demandent une mise en oeuvre progressive prenant en compte la spécificité du secteur.

Je salue tous ceux qui ont développé les pratiques éco-responsables. Le développement durable est environnemental, mais aussi social.

Je regrette que les plans de sortie de pêche dissuadent des installations, pourtant vitales, alors que le soutien à la modernisation des navires est faible.

Le projet annuel de performances reconnaît -timidement- l'action des collectivités territoriales, qui se battent pour préserver le dynamisme des métiers de la mer. (Applaudissements à gauche)

Mme Renée Nicoux.  - Quel est l'avenir de notre modèle agricole ? Nous ne l'appréhendons pas dans un esprit serein, car la crise agricole exige une réponse durable, qui doit être aussi européenne. Or, les décisions prises sont décevantes.

La mondialisation a bouleversé la donne, mais ne peut se poursuivre sans garde-fous. La réflexion sur la nouvelle PAC est cruciale. J'espère qu'elle reposera sur un nouveau modèle agricole.

Il faut d'abord redéfinir la compétitivité, qui doit avoir une dimension qualitative. Encore faut-il rémunérer les pratiques environnementales.

Comme l'an dernier, le Gouvernement se borne à peser sur le coût de la main-d'oeuvre, alors que vous trouverez toujours moins cher dans le monde.

Le contexte est assurément difficile, mais il ne faut pas se limiter à des mesures conjoncturelles. Bien sûr, certaines cultures sont particulièrement denses en main-d'oeuvre, et la concurrence espagnole est rude. Mais la taxe additionnelle sur le gazole fait financer la mesure par... les agriculteurs !

Enfin, rien ne garantit que le gain d'un euro par heure sera répercuté sur les prix. Et vous incitez au maintien des bas salaires car les exploitants auront tendance à ne pas dépasser 1,1 Smic.

L'on doit lutter contre tout dumping social et s'attaquer à la construction des prix agricoles. Or le bilan de la loi de modernisation est mitigé, avec des contrats individuels consacrant l'asymétrie entre acheteurs et producteurs ; l'Observatoire des prix et des marges observe les déséquilibres, sans y remédier.

Je ne peux me résoudre à voter des crédits qui manquent d'ambition.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.  - (Applaudissements à droite) À entendre certains d'entre vous, l'agriculture va mal et les agriculteurs sont plongés dans une dépression. Un peu moins de misérabilisme, un peu plus d'optimisme et de réalisme !

Je vais dans les exploitations deux fois par semaine ; les retraités manquent de pouvoir d'achat, mais l'agriculture française est la seule qui ait augmenté de 20 % ses excédents extérieurs. La filière bovine vient de bénéficier de la plus forte hausse des prix en huit ans.

Vous ne convaincrez pas les paysans que tout va mal, alors qu'ils sont à la tête de l'agriculture européenne !

Le budget est maintenu à 5,5 milliards, comme l'a reconnu M. Botrel, pour que l'agriculture bénéficie des moyens dont elle a besoin. On ne peut répéter chaque année le même discours misérabiliste, car il ne rend pas justice à nos agriculteurs qui se sont adaptés comme aucun autre secteur ne l'a fait.

Défendre les paysans français, c'est leur dire qu'ils réussissent et réussiront encore mieux demain.

Oui, les éleveurs français ont souffert ces dernières années, mais nous avons enfin trouvé la bonne stratégie : remplacer les subventions par l'organisation de filières, l'ouverture des marchés turc, russe et nord-africain. Les agriculteurs veulent des prix, pas des primes. Cette évolution proviendra de la consommation en Russie, au Kazakhstan, au Japon ! Le prix de la viande bovine a augmenté de 30 centimes par kilo ! Voilà la réalité !

Oui, des producteurs de lait rencontrent des difficultés. Mais ils peuvent saisir le médiateur s'ils sont confrontés à un inacceptable ultimatum de certains industriels. Grâce à notre action sur le paquet lait et grâce à l'appel de Paris, il y a deux ans, le Conseil européen des ministres de l'agriculture va, le 15 décembre, modifier pour la première fois le droit de la concurrence pour autoriser de vastes réunions de producteurs dans les négociations avec les industriels. Quand ils pourront se regrouper à 3 000 ou 4 000, les premiers seront plus puissants face aux seconds qu'à 300 ou 400.

Oui, l'organisation de certaines filières reste insuffisante, en particulier des producteurs de fruits et légumes, où les difficultés sont structurelles. Et, qu'on le veuille ou non, il faut diminuer leur coût du travail : on ne peut produire en Alsace des asperges à 12 ou 13 euros par heure, alors que les productions identiques, de l'autre côté de la frontière allemande, sont réalisées avec un coût horaire de 7 ou 8 euros !

Non, il ne s'agit pas de céder au dumping social en Europe ! Je refuse que 90 % de la main-d'oeuvre dans les abattoirs allemands soit composée de Polonais payés 6 euros de l'heure pour un travail si dur. J'en ai parlé avec la CDU, qui a inscrit pour la première fois dans son programme un salaire minimum dans certaines branches, dont celle-ci. Je suis cohérent avec mes convictions, en refusant l'alignement sur les plus mauvaises pratiques.

J'en viens aux questions environnementales.

Monsieur Labbé, le crédit d'impôt bio a été relevé ; nous sommes les premiers à avoir introduit la règle de 20 % de produits bio dans la restauration collective. Pour que l'environnement soit un atout, les choix en ce sens doivent être supportables pour les exploitations.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Accroître les exigences quand le revenu des paysans diminue de 54 % est intenable !

M. Aymeri de Montesquiou.  - Enfin...

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ensuite, les règles doivent être les mêmes dans toute l'Union européenne. L'harmonisation est une condition de l'acceptabilité.

Enfin, l'on ne peut imposer de reconstruire un élevage pour que les truies allaitantes s'épanouissent dans les 2,5 mètres carrés règlementaires tout en signant un accord avec le Mercosur : la réciprocité commerciale s'impose !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre. - Madame Herviaux, je vais vous embaucher pour les négociations de la PAC !

M. Michel Delebarre.  - Excellente idée !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous en avons besoin au Sénat !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Les propositions de la commissaire européenne pour la pêche sont inacceptables !

M. Michel Delebarre.  - Très bien.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je n'accepterai pas que les quotas transférables signent la mort de la pêche artisanale. Comment pourrais-je les expliquer aux pêcheurs de Saint-Jean-de-Luz ou de Fécamp ?

De même, le « zéro rejet » est un objectif irréaliste. Pourquoi imposer une telle contrainte dès 2015 en Europe ? Je m'opposerai à une décision idéologique condamnant les pêcheurs européens cinq ans plus tôt.

Nous avons obtenu le maintien de la PAC à l'euro près. S'il convient d'encourager les meilleures pratiques, il est indispensable que la PAC soit lisible. Enfin, quelles que soient les filières, nous avons besoin de régulation.

Mme Odette Herviaux.  - Nous avons appris hier que l'amendement n°II-188 ne serait pas examiné avec les crédits de la mission « Agriculture ». Adoptée à la quasi-unanimité de la commission de l'économie, notre proposition de taxer les plus-values foncières préservait le foncier agricole tout en aidant à l'installation. Je regrette que ce renvoi aux articles non rattachés fasse perdre de sa cohérence à notre débat.

M. Yannick Botrel, rapporteur spécial.  - Le report est motivé par le fait que l'amendement a une nature fiscale. Je ne doute pas que vous le défendiez avec la compétence et la détermination que le ministre a soulignées.

Monsieur le ministre, comme chacun ici, je me réjouis de l'amélioration intervenue, notamment dans les filières bovine et porcine. Mais les raisons en sont largement conjoncturelles.

Votre budget comporte des lacunes, malgré la rallonge de 144 millions introduite à l'Assemblée nationale : à périmètre inchangé, les crédits régressent, les moyens humains aussi. C'est pourquoi la commission des finances a rejeté les crédits de la mission.

La contractualisation était un point majeur de la loi de modernisation. Les choses se passent souvent bien, mais Lactalys se comporte de façon inacceptable.

Les crédits ne sont pas adoptés.

Les crédits du compte spécial « Développement agricole et rural », approuvés par la commission, sont adoptés.

Article 48

M. le président.  - J'appelle les articles rattachés.

Mme Évelyne Didier.  - Quoique la Fédération nationale des communes forestières ait accepté de signer le contrat de plan État-ONF, je m'interroge sur l'opportunité de cet article. Le Gouvernement veut inciter les communes à exploiter davantage leurs forêts, mais s'est-il interrogé sur les causes de l'écart entre exploitations dans le nord-est et dans le sud ? Elles peuvent être d'ordre climatique, pédologique ou historique.

Peut-être parviendrez-vous à une convergence dans l'exploitation des forêts françaises, mais je ne suis pas convaincue. Où est l'étude d'impact ?

Alors que l''État devrait assurer la solidarité entre communes forestières, je crains qu'à Bercy, on n'ait pas abandonné les idées saugrenues de privatisation des activités rentables de l'ONF.

M. le président.  - Amendement n°II-389, présenté par M. Piras et les membres du groupe Soc-EELVr.

I. - Alinéa 7, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

à l'exception de ceux provenant d'une installation relevant d'une activité de service public.

II. -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  - Les pertes de recettes résultant, pour l'office national des forêts, du I sont compensées à due concurrence par la création et l'affectation d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts

Mme Bernadette Bourzai.  - L'article 48 précise que sont inclus dans cette assiette les produits des forêts issus de la chasse, de la pêche et des conventions ou concessions de toute nature liées à l'utilisation ou à l'occupation de ces forêts, ainsi que tous les produits physiques ou financiers tirés du sol ou de l'exploitation du sous-sol, ce qui inquiète les élus locaux.

Notre collègue Piras a été saisi du cas de communes accueillant des centres d'enfouissement des ordures ménagères et engagées dans des contentieux parce que l'ONF n'avait jamais demandé de frais de garderie avant l'extension de ces centres. Il faudrait exclure explicitement de l'assiette des frais de garderie les installations relevant d'une activité de service public.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial.  - Cet amendement répond à des cas particuliers qui ont pu entraîner des difficultés d'interprétation. Il doit y en avoir d'autres. À combien le ministre estime-t-il l'impact de cet amendement ? Sagesse en tout cas.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Défavorable. Cela risquerait de compliquer le dispositif qui assure des ressources pérennes à l'ONF, à hauteur de 5,6 millions d'euros. J'en profite pour vous redire mon opposition totale à toute privatisation de l'ONF.

L'amendement n°II-389 est adopté.

L'article 48, modifié, est adopté.

Article 48 bis

M. le président.  - Amendement n°II-223, présenté par Mme Schurch et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Mireille Schurch.  - Cet article instaure de nouvelles exonérations de charges sociales sur le travail des salariés permanents dans le secteur agricole, qui risquent d'avoir des effets pervers sur les salaires.

Cette exonération, qui ne profitera pas aux exploitations employant plus de 20 salariés rémunérés au-delà du Smic, est, comme l'a dit la présidente des producteurs de légumes, par sa dégressivité, « une machine à perdre », c'est-à-dire une incitation à la baisse des salaires. Nous demandons une harmonisation par le haut du statut des travailleurs agricoles. Nous nous opposons au dumping social européen.

M. Yannick Botrel, rapporteur spécial.  - Cet amendement rejoint les préoccupations exprimées en commission, mais cette dernière a souhaité adopter cet article en raison des attentes fortes de la profession agricole. Je vous demande de retirer l'amendement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - C'est formidable !

Le groupe communiste défend les grands exploitants en refusant une mesure qui améliore la situation des petites exploitations. Je regarderai qui vote cet amendement et le dirai aux petits exploitants qui se tuent à la tâche et réclament à cor et à cri une baisse du coût du travail !

L'amendement n°II-223 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-387 rectifié bis n'est pas défendu.

L'article 48 bis est adopté.

Article 48 ter

Mme Renée Nicoux, rapporteure pour avis.  - Notre groupe va voter cet article, mais nous regrettons que l'État se désengage de la politique d'installation.

Nous sommes dans l'obligation d'augmenter la taxe sur le foncier non bâti qui pèse sur les exploitants agricoles pour financer l'extension des missions des chambres d'agriculture. Au final l'État transfère la charge sur les professionnels.

L'article 48 ter est adopté.

La séance est suspendue à 20 h 55.

*

*          *

présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président

La séance reprend à 22 h 55.

Conseil et contrôle de l'État

M. le président.  - Nous allons examiner maintenant les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».

M. Charles Guené, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Cette mission se compose de trois programmes ayant trait respectivement pour 58 % au Conseil d'État et aux autres juridictions administratives, pour 36 % à la Cour des comptes et aux autres juridictions financières, pour 6 % au Conseil économique social et environnemental (Cese). En raison de leur spécificité, ils échappent au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Les crédits du programme « Conseil d'État  et autres juridictions administratives » progressent de 3,4 %, signe de l'intérêt de l'État pour la justice administrative.

Afin de poursuivre le raccourcissement des délais de jugement, 62 équivalents temps plein travaillé (ETPT) seront créés en 2012 pour la justice administrative ainsi que 15 ETPT pour la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), dont les délais de jugement devraient passer de neuf mois aujourd'hui à six en 2012. Le retour sur investissement est notable, chaque mois en moins économisant 15 millions pour l'État en raison des effets induits.

Le budget du Cese diminue de 0,3 %, soit une stabilité. Les nouvelles missions du Conseil après la réforme constitutionnelle de 2008 seront mises en oeuvre par redéploiement. Le président du Conseil, M. Delevoye, a su régler le problème de la caisse de retraite du Conseil par des initiatives innovantes, comme la location du Palais.

Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » progresse d'à peine 0,2 %. Les dépenses d'investissement chutent de 80 %. La Cour des comptes poursuit son programme de recrutement d'experts extérieurs, pour étoffer sa capacité de certification et de contrôle.

La commission propose d'adopter les crédits de la mission.

M. Jean-Pierre Sueur, en remplacement de M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Le programme consacré à la justice administrative bénéficie de conditions favorables.

Les crédits de paiement ont augmenté conformément à la programmation pluriannuelle. En outre, les juridictions administratives bénéficient de conditions préférentielles en exécution. Pourquoi ne pas faire de même pour les juridictions judiciaires, à la situation tout aussi difficile ?

Le contentieux des étrangers, le plus lourd, représente un quart du contentieux en première instance et la moitié en appel. Cette charge est sans cesse croissante ; monsieur le ministre, quelles solutions envisagez-vous ?

Le levier budgétaire semble bloqué, de même que le levier humain. Reste le levier procédural. Cependant, la procédure garantit le droit ; il faut donc apprécier l'incidence de toute simplification sur le respect du droit, avant même d'en examiner les conséquences sur les délais de jugement.

La moitié des contentieux administratifs sont déjà jugés par un magistrat unique. La commission des lois sera donc vigilante : les modifications législatives ne devront pas porter préjudice aux justiciables, souvent fragiles dans le cas présent.

Sous réserve de ces observations, la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits.

M. Jean-Pierre Sueur, en remplacement de M. André Reichardt, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Pour la première fois, la commission des lois a souhaité présenter son avis sur le budget des juridictions financières. Sa stabilité est conforme à la programmation triennale.

Contrairement à d'autres, ces juridictions maîtrisent entièrement leur contentieux.

Neuf dixièmes des crédits sont affectés au versement des rémunérations, surtout d'agents de catégorie A+. Le corps vieillit.

Ce budget, s'il reste transitoire, donne semble-t-il satisfaction d'après les enquêtes menées par notre rapporteur pour avis dans les chambres régionales des comptes. M. Reichardt l'a souligné, mais la commission n'a pas partagé son avis positif sur l'adoption des crédits.

M. Alain Anziani.  - Des crédits de paiement en hausse de 3,4 % pour la justice administrative ! En ces temps difficiles, c'est tout à fait appréciable, d'autant que les délais de jugement devraient se réduire. La moyenne serait aujourd'hui -je parle au conditionnel- de moins d'un an. Les praticiens évoquent plutôt deux ans.

Quel est le prix de l'accélération ? Sans aucun doute, une justice plus expéditive recourant plus au juge unique. « Juge unique, juge inique », disait jadis le professeur Odent. Dans son discours, M. Détraigne s'en inquiète, comme tous les praticiens du droit. Voulons-nous que la justice soit rapide ou qu'elle examine tous les aspects de façon très attentive ?

La rapidité de la justice serait meilleure si les crédits étaient répartis autrement.

Quid de l'aide juridictionnelle ? La suppression du droit de timbre de 35 euros est une bonne chose, mais à quand une véritable réforme ?

Pour ces raisons, le groupe socialiste s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous rejetons la réforme des juridictions financières menée à la va-vite à l'Assemblée nationale. Il est impossible dans ces conditions d'analyser les crédits du programme « Cour des comptes et juridictions financières ».

Le budget de la justice administrative affiche une hausse des emplois de 0,45 % en 2012 et en 2013, alors que l'activité des cours administratives d'appel a progressé de 112 % en dix ans, celle des tribunaux administratifs de 55 %. Le contentieux de police et le contentieux des étrangers ne cessent d'augmenter depuis la dernière loi sur l'immigration qui impose le recours au juge. Quid du contentieux du droit au logement opposable (Dalo) ? Rien d'étonnant à l'explosion des recours, particulièrement en Île-de-France, puisque le Gouvernement délaisse le logement social.

Jugements par ordonnance et juge unique : je suis totalement opposée à cette évolution, tout comme à la délocalisation des audiences. Au lieu du rapport prévu à l'article 49 quater, donnons à la justice les moyens dont elle a besoin ! (Applaudissements à gauche)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'augmentation des crédits de la mission de 3,4 % s'explique par la seule CNDA. Pour 2012, la création de 72 ETPT doit mettre fin à l'engorgement du contentieux des étrangers. Les délais de jugement restent trop longs  devant les tribunaux administratifs, les cours administratives d'appel et le Conseil d'État.

Malgré ses nouvelles missions, le Cese voit son budget stagner. Sa caisse de retraite est en situation difficile.

La réforme des juridictions financières induite par la loi de juillet 2008 sur la modernisation des institutions de la Ve République fait craindre une baisse du contrôle des collectivités territoriales par les chambres régionales des comptes. Je fais confiance aux collectivités territoriales, mais je crois à la régularité budgétaire. Je me suis, d'ailleurs, associée à un recours déposé par certains sénateurs auprès du Conseil constitutionnel.

La majeure partie de mon groupe s'abstiendra.

M. Michel Magras.  - La logique de performance s'est progressivement imposée avec la Lolf : je m'en réjouis. À 83 %, les crédits de la mission sont des frais de personnel, lequel est au service de tous les Français, pour un fonctionnement optimal des institutions.

Les crédits affectés à la justice administrative progressent de manière significative, ce qui est fondamental. La création de quinze ETPT au profit de la CNDA permettra, je l'espère, de rétablir un niveau de performance très dégradé et de réduire à six mois les délais de jugement.

Outre l'aide précieuse apportée au législateur, le Conseil d'État a une activité structurante pour l'État. Nous devons le soutenir.

Le groupe UMP note que les magistrats des cours régionales des comptes sont satisfaits des moyens mis à leur disposition. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la réforme en cours ?

Permettant un dialogue entre toutes les strates de la société, le Cese a prouvé son utilité. Il mène sa réforme à budget constant et continuera d'apporter sa valeur ajoutée.

Monsieur le ministre, vous pouvez compter sur notre soutien ! (Applaudissements à droite)

M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Monsieur Anziani, je n'engagerai pas un débat sur l'aide juridictionnelle qui dépend d'une autre mission : le garde des sceaux sera un meilleur interlocuteur.

Merci d'avoir souligné la hausse des crédits malgré la contrainte budgétaire.

Depuis 2009, la justice administrative s'est engagée dans une réforme ambitieuse ; la programmation triennale sera respectée. Il reste que l'effort est fragilisé par l'augmentation du contentieux du droit des étrangers, de celui lié au Dalo ou encore au revenu de solidarité active (RSA). Cela crée des interrogations, des fragilités, auxquelles nous saurons répondre.

M. Sueur a mis, au nom de M. Détraigne, l'accent sur les mesures d'éloignement. L'on estime que le contentieux des étrangers donnera lieu à 10 000 requêtes supplémentaires, donc à une charge supplémentaire pour le juge administratif. D'où les 30 emplois de magistrats qui auront été créés d'ici 2013, dont 20 en 2011, auxquels il faut ajouter les nominations intervenues sur une vingtaine de postes vacants. Cela suffira-t-il ? Nous déciderons, après évaluation, s'il ya lieu de créer davantage de postes.

Rattachée au programme depuis le 1er juillet 2009, la CNDA voit son activité progresser à un rythme soutenu : plus 15 % en 2009 et plus 10 % en 2010. Les délais de jugement, de quinze mois en 2009, devraient être réduits à six mois. À cette fin, 50 emplois supplémentaires étaient programmés entre 2011 et 2013 ; nous avons prévu d'en créer 65.

Juge unique, juge inique ? Une bonne justice passerait par davantage de temps consacré au dossier ? Pour avoir eu à connaître ce genre de problèmes, j'en doute... La novation procédurale aboutit à une liste des matières jugées selon les cas par un juge unique. La réflexion en cours porte non sur l'extension du juge unique mais sur la dissociation de cette liste et celle des cas d'appel. Le vice-président du Conseil d'État a missionné un groupe de travail qui formulera des propositions en janvier. L'objectif est non pas de réduire la collégialité mais de rationaliser.

L'augmentation du délai moyen des affaires résulte de la résorption du stock, qui conduit à traiter des affaires anciennes.

Madame Escoffier, ce n'est pas parce que l'on passera de 27 à 20 chambres régionales, que les collectivités territoriales seront moins contrôlées. Il n'y a aucun lien de cause à effet.

Monsieur Magras, le budget ne traduit pas le projet de loi sur la répartition du contentieux, voté il y a seulement quinze jours. En outre, il a fait l'objet d'un recours auprès du Conseil constitutionnel. Nous en tirerons les conséquences l'an prochain.

Madame Borvo Cohen-Seat aurait souhaité une réforme globale des juridictions financières. Votre ordre du jour était trop chargé et, avec la crise, le Gouvernement avait d'autres priorités. Cela dit, ce texte apporte de nombreuses améliorations ; je regrette donc l'avis défavorable de la commission des lois, une décision aux dépens de la Cour des comptes.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - M. Anziani a parlé d'une abstention.

M. Patrick Ollier, ministre.  - Puisse-t-elle être positive !

Monsieur Magras, la gestion du Cese par le président Delevoye est exemplaire, de même que la solution apportée à la caisse de retraite du Conseil. La réforme constitutionnelle de juillet 2008 est parfaitement mise en oeuvre, avec de surcroît, un budget stabilisé.

Les mesures entrées en vigueur le 1er octobre 2011 permettent de financer les pensions jusqu'en 2017. Ce dossier est suivi avec attention, madame Escoffier.

Je vous invite à adopter la mission.

M. Charles Guené, rapporteur spécial.  - Favorable.

Les crédits de la mission sont adoptés.

L'article 49 quater est adopté.

Pouvoirs publics

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le chemin de la continuité est simple, la voie de l'exemplarité est courageuse !

La dotation initiale de la mission progresse de 0,8 %, avec une stabilisation de la dotation à la Cour de justice de la République et de l'Assemblée nationale en euros courants et de celle du Sénat en euros constants, une réduction de 0,5 % de celle de la présidence de la République et de 0,65 % pour le Conseil constitutionnel, les dotations des deux chaînes parlementaires étant, elles, majorées de 9,07 %.

La présidence de la République et l'Assemblée nationale ont pris l'initiative de réduire encore leur dotation de 3 % par rapport à 2011. Le Sénat en fera de même, ce qui représente un effort réel de maîtrise de la dépense.

La présidence de la République a réalisé ces trois dernières années des efforts d'économie salués par la Cour des comptes. Sa dotation représente 11 % des crédits de la mission.

Le Conseil constitutionnel représente, lui, à peine 1 % des crédits de la mission. Sa dotation diminuera de 0,65 % malgré l'augmentation de ses charges liées, d'une part aux questions prioritaires de constitutionnalité et, d'autre part, aux élections de l'an prochain.

La Cour de justice de la République : je prends note des loyers élevés, en attendant son déménagement dans le palais de justice de Paris dès l'achèvement de la cité judiciaire des Batignolles. Avec 820 000 euros, la dotation est modeste.

Quelque 512 millions seront consacrés à l'Assemblée nationale, contre 333 millions pour le Sénat. La Haute assemblée a dû faire face à la création de nouveaux sièges de sénateurs. Les efforts de rationalisation se poursuivront en 2012. Faut-il aller plus loin ? M. Larcher l'avait envisagé. Je salue donc la volonté du président Bel et des questeurs de réduire les crédits de 3 %.

La progression des crédits des chaînes parlementaires s'explique principalement par l'effort accru de diffusion. En revanche, l'incidence de la taxe sur les services de télévision (TST) pèse lourdement sur Public Sénat.

La commission vous propose d'adopter ces crédits.

M. Michel Delebarre, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Pour la première fois, la commission des lois présentera un avis sur la mission « Pouvoirs publics » concernant des institutions bénéficiant de l'autonomie financière.

Les dotations diminuent, alors que les charges s'accroissent : je salue cet effort de rigueur, notamment ceux réalisés par l'Assemblée nationale et le Sénat -où le président Bel l'avait annoncé dès son élection.

S'agissant du Conseil constitutionnel, la question prioritaire de constitutionnalité s'est installée dans le paysage judiciaire, sans avoir engorgé nos juridictions : le filtre institué par le Conseil d'État et la Cour de cassation fonctionne bien. La question prioritaire de constitutionnalité a ainsi conforté l'État de droit. Son coût est estimé à 4,4 millions d'euros en 2011-2012, compensés par des économies de dépenses de fonctionnement.

Certes, le loyer acquitté par la Cour de justice de la république est élevé, mais un déménagement temporaire ne serait-il pas pire ?

Incontestablement, les comptes de la présidence de la République sont plus transparents -il y avait de quoi !-, mais certaines subventions versées aux collectivités territoriales sont-elles conformes à la vocation de la présidence ?

La commission est favorable à l'adoption des crédits, dans un contexte de grande abstention. (Applaudissements à gauche)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - L'an dernier, j'avais dit à propos de cette mission que le budget devait être équilibré, la dette publique réduite et l'arrogance de l'administration combattue. Je reprenais ainsi les propos de... Cicéron en 55 avant Jésus-Christ !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Un sénateur déjà !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - À propos des dépenses de la présidence de la République, la Cour des comptes a salué une transparence accrue, tout en s'interrogeant sur le versement de certaines subventions par le ministère de l'intérieur ou de la défense.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Qui posent des problèmes de principe !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Les dotations des chaines parlementaires correspondent à l'accroissement de leur diffusion. Le Conseil constitutionnel, malgré l'augmentation de sa charge de travail, voit son budget réduit.

Enfin, le loyer acquitté par la Cour de justice de la République reste excessif.

Sous ces réserves, tout en soulignant l'intérêt de l'évaluation pour les pouvoirs publics, le groupe RDSE est favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Richard.  - Je ne commenterai pas le budget de la présidence de la République. Le débat sur les déplacements nombreux du président de la République se développera ailleurs.

Mais je veux saluer la décision prise par le président Bel de réduire le budget de notre institution, après un travail collégial. Il ne s'agit pas de répondre à quelque chasse aux scandales -souvent dérisoires- ni de céder à l'antiparlementarisme.

Cette nouvelle approche connaîtra sans doute d'autres développements, que nous attendons avec confiance.

Je constate avec satisfaction que le défi de la question prioritaire de constitutionnalité a été relevé par le Conseil constitutionnel. Cette innovation était souhaitée depuis longtemps. Les décisions claires et approfondies ont conforté l'État de droit, en appelant le législateur à une vigilance accrue. La réforme de 1974 allait déjà dans ce sens, mais supposait l'intervention des parlementaires, qui restaient inactifs ; le contrôle est désormais effectif.

La régulation par le Conseil d'État et la Cour de cassation donne aujourd'hui satisfaction. Cette réforme va-t-elle modifier le rôle du Conseil constitutionnel ? C'est un autre débat. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Magras.  - Les dotations aux pouvoirs publics sont globalement stables.

L'enveloppe demandée par la présidence de la République diminue de 0,5 %, grâce aux efforts de gestion, voulus par la Cour des comptes. Dois-je rappeler que, jusqu'en 2007, l'Élysée n'avait pas de budget !

M. Michel Delebarre, rapporteur pour avis.  - Quelle époque ! (Sourires)

M. Michel Magras.  - Même les sondages, si controversés, ont été réalisés dans d'excellentes conditions a jugé la Cour des comptes, qui a salué l'effort de rationalisation et d'économie.

Les déplacements du président de la République ? Il faut distinguer les motifs diplomatiques et les autres.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Les motifs électoraux ?

M. Michel Magras.  - Malgré la progression globale de 16 % au 1er septembre 2011, la dépense globale a diminué. Désormais le nombre de participants est limité, le tarif des hébergements et locations de véhicules négocié, le remboursement demandé aux journalistes et chefs d'entreprise.

Les budgets des assemblées parlementaires sont stabilisés, malgré la création de 25 sièges de sénateurs en dix ans, dont 5 récemment.

Le Conseil constitutionnel subit une charge de travail considérablement alourdie depuis l'entrée en vigueur des questions prioritaires de constitutionnalité.

Le groupe UMP soutient l'effort de maîtrise conduit par la présidence de la République. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Tous les orateurs ont donné un satisfacit au Conseil constitutionnel, dont le budget diminue alors que son activité s'accroît avec la question prioritaire de constitutionnalité, une réforme voulue par le président de la République en 2008, et qui représente un progrès pour les libertés publiques...

Depuis le 1er mars 2010, le Conseil constitutionnel a traité 158 questions prioritaires de constitutionnalité sur les 184 renvoyées. D'où la création de quatre postes en 2012. Les économies sur les dépenses de fonctionnement permettent au Conseil constitutionnel de présenter un budget équilibré.

Messieurs Emorine et Delebarre, je partage votre avis sur la Cour de justice de la République (CJR). L'intérêt général est de diminuer la dépense publique. Il faut donc mettre en balance le surloyer et les travaux induits par un éventuel déménagement temporaire. Je suis heureux que nous pensions la même chose. J'invite les rapporteurs à m'appuyer auprès de mes collègues ministres du budget et de la justice.

La présidence de la République est la seule institution contrôlée chaque année par la Cour des comptes. Comment pourrait-il subsister des zones d'ombre ?

M. Michel Delebarre, rapporteur pour avis.  - Il y en a !

M. Patrick Ollier, ministre.  - La présidence de la République se borne à donner un avis sur les 25 millions de crédits destinés aux collectivités territoriales dont dispose le ministre de l'intérieur.

M. Michel Delebarre, rapporteur pour avis.  - En les dépensant !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Ce montant est à comparer aux 119 millions de crédits gérés par le Parlement. En ce domaine, la pratique actuelle est conforme à celle des autres présidents de la République, et transparente.

La Cour des comptes a jugé que la gestion de l'Élysée était rigoureuse.

M. Michel Delebarre, rapporteur pour avis.  - Cela semble vous surprendre !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Cela me satisfait. Je souligne les efforts d'économies réalisés, qui se poursuivront en 2012 après l'annulation de 2 % des crédits votés pour 2011, soit une diminution totale de 5 %.

Madame Escoffier, je vous remercie pour votre analyse.

J'espère un vote positif, quelle que soit l'abstention... (Applaudissements sur les bancs UMP)

Article 32 (État B)

M. le président.  - Amendement n°II-149, présenté par MM. Bel, Todeschini, Dériot et Anziani.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Présidence de la République

Assemblée nationale

Sénat

10 008 000

10 008 000

La chaîne parlementaire

Indemnités des représentants français au Parlement européen

Conseil constitutionnel

Haute Cour

Cour de justice de la République

TOTAL

10 008 000

10 008 000

SOLDE

-10 008 000

-10 008 000

M. Jean-Marc Todeschini.  - Le budget étant particulièrement contraint, le président du Sénat et les questeurs proposent de réduire de 3 % la dotation de l'État versée à la Haute assemblée.

Cet amendement ramène la dotation à un niveau inférieur à celui de 2008. Les économies porteront sur les dépenses d'investissement, mais aussi sur le fonctionnement : communication, déplacements et missions, ainsi que sur l'exercice du mandat. Un groupe de travail fera bientôt des propositions.

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur spécial.  - La commission des finances est naturellement favorable.

M. Patrick Ollier, ministre.  - Le Gouvernement ne peut donner d'avis. La séparation des pouvoirs s'y oppose... mais cet effort d'économies va dans le bon sens.

L'amendement n°II-149 est adopté.

Les crédits de la mission, modifiés, sont adoptés, le groupe CRC s'abstenant.

Direction de l'action du Gouvernement

M. le président.  - Nous allons examiner maintenant la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances.  - S'il fallait caractériser la mission, j'évoquerais un couteau suisse à propos de la coordination et de l'optimisation de la gestion des services du Premier ministre, d'administrations décentralisées et de 9 autorités administratives indépendantes. Le total des crédits initiaux progressait de 2,8 % pour atteindre 1,2 milliard.

Mais l'évolution est contrainte : la coordination du travail gouvernemental est stable. Le budget des administrations déconcentrées progresse en raison d'une sous-dotation en 2011.

Quant au programme relatif à la protection des droits, il regroupe les crédits de huit autorités administratives indépendantes et de la nouvelle autorité constitutionnelle indépendante : le Défenseur des droits. La progression de ce programme bénéfice à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), qui doit contrôler la vidéoprotection.

L'Assemblée nationale a réduit de 1,3 % les crédits de la coordination gouvernementale. Peut-on faire mieux ?

La coordination relève en partie de la RGPP, avec une multiplication d'organismes susceptibles de diluer l'action du Gouvernement.

L'optimisation de la gestion relève de la solidarité nationale. Il demeure des interrogations récurrentes sur la gestion des crédits de communication.

Enfin, la mutualisation des moyens doit être au coeur du travail gouvernemental.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer de la poursuite des travaux dans les trois directions que je viens d'évoquer ?

Il faut encore diminuer les dépenses locatives dédiées des administrations déconcentrées.

J'en viens au budget annexe « Publications officielles et information administrative », qui, fait original, ne perçoit aucune dotation.

La nouvelle direction de l'information légale et administrative doit améliorer l'information du public, tout en se procurant des recettes nouvelles. Les investissements marquent une pause en 2012.

Les crédits diminuent de 6 %, ils seront équilibrés par les recettes de la direction de l'information légale et administrative (Dila).

La commission a proposé de rejeter des crédits, que je voterai néanmoins à titre personnel. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Laurence Cohen, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales.  - La lutte contre la toxicomanie est insuffisante, malgré le fonds de concours alimentant la Mildt grâce à la vente des biens saisis.

Je déplore l'accent mis sur la répression, qui néglige la prévention. La polytoxicomanie et les troubles psychiatriques que connaissent les consommateurs exigent d'accroître le suivi sanitaire et la prévention des risques. L'hépatite C infecte 60 % de toxicomanes.

La situation dans les prisons est révoltante. Il faudrait au moins organiser un échange de seringues et assurer la continuité des soins.

La simple consommation d'une drogue est toujours un délit, quel que soit le produit. La Cour des comptes a souligné les inconvénients de cette approche purement répressive.

Hélas, le débat sur l'ouverture des lieux de consommation surveillée, réclamée par les associations dont je salue le travail, n'a pas abouti. Comme le suggère l'Inserm, il faut faire une évaluation rigoureuse des besoins et si nécessaire lancer une expérimentation.

En 2010, l'Inserm a consacré une étude aux risques sanitaires des toxicomanes, mais ses recommandations sont restées lettre morte.

Bien d'autres addictions, comme celle aux jeux d'argent, devraient entrer dans la compétence de la Mildt. Je souhaite qu'une nouvelle impulsion à la prévention soit donnée dans le cadre du plan 2012/2015.

En attendant, la commission des affaires sociales est défavorable à l'adoption des crédits de la Mildt. (Applaudissements sur les bancs socialistes).

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - J'interviens sur la coordination du travail gouvernemental.

Nous constatons encore l'excès de lois, parfois inutiles, mal préparées et insuffisamment appliquées.

Globalement, 80 % des lois sont mises en oeuvre dans les six mois suivant la promulgation, mais le niveau d'exécution tombe à 50 % pour les ministères de l'économie, de la solidarité et de la ville, et à 0 % pour les ministères de la culture et du sport.

En matière de communication gouvernementale, qu'en est-il de la mutualisation ? Les dépenses ont augmenté de 50 % entre 2006 et 2009, avant de baisser un peu en 2010. On a multiplié par quatre les crédits du SIG entre 2007 et 2012. Mais l'objectif de la mutualisation reste lointain, puisque l'essentiel repose sur la bonne volonté des ministres.

Le coaching du ministre ou les sondages de popularité sont-ils justifiés par l'intérêt général ?

En 2007 et après, le SIG a réglé les sondages de l'Élysée sans aucun fondement juridique. Cela a été corrigé en 2011. La Cour des comptes a relevé de nombreuses inégalités dans le recours aux sociétés de conseils. Il n'y a pas eu d'appel à la concurrence aux ministères de l'écologie ni de l'éducation nationale par exemple. Puisque le budget augmente, il faudra faire preuve de vigilance.

La commission est défavorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Virginie Klès, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Je remercie M. Peyronnet, qui présentait autrefois le programme « Protection des droits et libertés ».

Les crédits et moyens humains de la Cnil augmenteront. C'est une bonne nouvelle, mais que représente le contrôle lié à la téléphonie et à la télésurveillance ? Le nombre de caméras sera multiplié par 20 : elles passeront de 30 000 à 600 000.

En 2011, 150 contrôles ont été réalisés ; en 2012, la plupart des 600 000 caméras de vidéosurveillance ne seront pas contrôlées.

Le Défenseur des droits a été mis en place par une loi organique de 2011. Son démarrage a subi quelques difficultés de nomination. Mon groupe était très réservé envers cette réforme, mais M. Baudis semble avoir entendu nos craintes. Toutefois, la stabilité des ressources humaines et des crédits du Défenseur des droits m'inquiète, vu l'objectif officiel d'augmenter les saisines. Le nouveau pouvoir d'injonction est satisfaisant, mais il exige des moyens supplémentaires.

En outre, il faudrait prévoir un budget accru de communication pendant les premières années. Le défenseur des droits souhaite se déplacer. Avec quels crédits ? Les autorités administratives indépendantes, dont la fusion aboutit à la création du Défenseur des droits, doivent être réunies sur un même lieu -le site de Ségur ? Ce ne sera pas possible d'ici 2017 et il sera bien difficile de renégocier dans ces conditions les baux arrivant à échéance en 2014. De surcroît il faudra harmoniser, et pas par le bas, les statuts, salaires et indemnités de ceux qui y travaillent.

Enfin, parce que le Gouvernement se refuse à créer une mission unique pour les autorités administratives indépendantes, la commission des lois votera contre.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Au lieu d'un couteau suisse, Monsieur Dominati, j'aurais préféré un Laguiole, sans doute parce que je suis aveyronnaise...

Je préfère croire que la baisse des crédits de la Mildt ne traduit pas votre désintérêt pour la lutte contre les drogues. On aurait aimé un signe plus fort et plus d'interministérialité. Cela étant, la mission est également financée par un fonds de concours sur les saisies de drogue.

Si la création du Défenseur des droits visait à réaliser des économies, le pari semble gagné : 26 millions de crédits contre 45 millions pour les quatre anciennes autorités administratives indépendantes. Dans ces conditions, comment l'institution pourra-t-elle remplir ses missions ?

Les dépenses du SIG ont augmenté de 324 %, sans diminution corrélative des dépenses de communication ministérielles. Bien au contraire ! Celles-ci augmentent de 50 %. Le recours à des prestataires se justifient-il et quel est le rôle du SIG si les ministères ont des politiques divergentes ?

La dotation de la Cnil, dont nous avions obtenu qu'elle ne soit pas trop minorée l'an dernier, ne suffira pas pour exercer les contrôles prévus.

Malgré le progrès que constitue le jaune, nous aimerions plus de transparence sur les rémunérations des collaborateurs des ministres. Enfin, nous apprécierions une réponse aux questions de M. Anziani. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Richard.  - Je reviens sur la qualité du droit, évoquée par M. Anziani : si le SGG, qui joue un rôle essentiel, est d'une qualité exceptionnelle, le niveau des services juridiques au sein des départements ministériels reste très inégal. Je peux vous le dire d'expérience, sans aller jusqu'à distribuer des étoiles comme les guides gastronomiques, combler ce déficit serait un bon investissement.

À juste titre, le Gouvernement poursuit une politique de codification. Encore faut-il que le ministère support soit en état de l'assurer. Or l'on constate une sérieuse diversité en la matière.

J'ajoute que Matignon est constitutionnellement chargé de coordonner le travail gouvernemental. L'Élysée n'a pas cette mission, même si l'impulsion vient du chef de l'État.

La création de l'Agence de sécurité informatique était absolument nécessaire. Ne faut-il pas maintenant associer sinon le Parlement, du moins des parlementaires à ce sujet qui touche à la sécurité nationale, dès lors que l'agence a trouvé sa vitesse de croisière ?

Sur les autorités administratives indépendantes, les décrets établissant le niveau de rémunération des présidents des autorités administratives indépendants affichent une surprenante tendance à s'aligner sur les niveaux les plus élevés. Le bon ordre dans la haute administration ne peut que gagner à ce qu'on regarde cela ! (Applaudissements à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le groupe CRC s'est opposé à la création du Défenseur des droits en raison de son mode de nomination et de ses compétences. Il est encore trop tôt pour juger la réalité. Cela étant, ses adjoints ne sont pas visibles. Le défenseur des enfants fait l'impasse sur les enfants placés en centre de rétention, alors que le tribunal de Melun vient d'en rappeler l'interdiction. Le regroupement géographique des anciennes autorités administratives indépendantes étant repoussé, les économies ne sont pas au rendez-vous.

Le Gouvernement oublie souvent de consulter la CCDH. Quand il le fait, il ne suit pas ses avis.

Quant à la Cnil, elle n'a pas les moyens de remplir ses nouvelles missions.

L'industrialisation de la captivité impose un surcroît de travail au contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Toutes ces évolutions attestent le peu d'intérêt du Gouvernement pour la protection des droits.

Après le tournant sécuritaire opéré ces dernières années, seulement 10 % des crédits de la Mildt sont consacrés à la prévention. C'est grave au vu de la transformation des produits consommés comme du développement des hépatites, dont le risque de contamination est décuplé en prison ! Que dire de la lutte contre la propagation du VIH ?

Grandes ou petites, les associations qui viennent en aide aux femmes, mériteraient le soutien de l'État.

Je partage la position de nos collègues sur les salles de consommation : nous avons besoin d'un débat serein, et dénué de polémiques.

Le groupe CRC ne votera pas ces crédits. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Magras.  - Depuis 2009, la maquette de cette mission n'a cessé d'évoluer. Elle inclut désormais les crédits consacrés aux services déconcentrés de l'État. À ce propos, nous nous réjouissons des effets positifs de la RGPP et de la diminution des cabinets ministériels budgétairement rattachés au Premier ministre. Cette année, l'architecture est stabilisée.

Je me réjouis que la Mildt améliore la coordination interministérielle et salue le Défenseur des droits, autorité constitutionnelle créée à budget constant. Il a rendu un premier rapport excellent, preuve que la réforme était gage d'efficacité.

Ce budget traduit la nouvelle mission de contrôle que la Cnil exercera sur la vidéoprotection, un outil indispensable à la sécurité de nos concitoyens.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur le calendrier des regroupements sur le site Ségur ? (Applaudissements à droite)

M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Merci à M. Dominati de son soutien...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - ...qu'on sait sans faille !

M. Patrick Ollier, ministre.  - La hausse de 2,84 % des crédits s'explique par l'accroissement du périmètre de la mission, le renforcement des missions de la Cnil, la montée en puissance de l'Ansi décidée le 25 mai 2011, après que la cyber attaque contre Bercy a souligné l'importance de l'enjeu. Je laisse le Premier ministre répondre à M. Richard sur l'association du Parlement, mais je ne pense pas qu'il s'y oppose.

M. Dominati a légitimement salué l'économie de 12,2 millions votée par l'Assemblée nationale. La rationalisation des organismes placés auprès du Premier ministre se poursuit sans cesse. Ainsi la commission des archives de la Ve République disparaîtra-t-elle en décembre. Cependant, la rationalisation rencontre ses limites avec les organismes formés de spécialistes d'une thématique.

Monsieur Anziani, l'exécution des lois est aussi l'affaire du Parlement. À l'Assemblée nationale, c'est moi qui ai lancé le premier rapport avec un rapporteur de l'opposition, car je pense que la transparence doit être totale. À mon arrivée au ministère, j'ai créé un comité de suivi de l'application des lois. J'espère que nous aurons un débat à ce sujet en janvier. Entre 2007 et 2010, le taux de publication des décrets dépasse 90 %, voilà la réalité ! Le ministère des sports, que vous avez mis en cause, affiche un ratio de 100 %, s'agissant des décrets d'application publiés dans les six mois suivant la promulgation des lois.

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis. - Nos chiffres ne portent pas sur la même période !

M. Patrick Ollier, ministre. - Merci, monsieur Richard, d'avoir souligné le travail de qualité du secrétariat général du gouvernement. Je rencontrerai bientôt le vice-président du Conseil d'État pour accélérer la publication des décrets. Le Gouvernement est dans l'action, pas dans la contemplation !

La hausse de 15 % dont a bénéficié le SIG s'explique mécaniquement par la centralisation des dépenses de communication des ministères en 2009. En 2011, il devrait poursuivre la minoration intervenue en 2010. L'évolution n'a pas été immédiatement constatée dans les ministères, mais leurs dépenses de communication ont diminué de 5 millions entre 2009 et 2010. Les dépenses de communication restent raisonnables, la Cour des comptes l'a souligné, au vu des compétences indispensables à recruter.

Nous luttons contre l'éparpillement des actions de communication. Monsieur Anziani, la mutualisation des moyens reste un chantier prioritaire et se poursuivra en 2012, par exemple pour les revues de presse.

Lancées dans l'urgence, les dépenses de communication, d'après le rapport de la Cour des comptes, page 65, donnent lieu à quelques « entorses ».

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis.  - Relisez la page 115 de mon rapport !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Je ne peux tout lire ! (Sourires)

Mesdames Escoffier et Klès, la Cnil se voit attribuer dix postes supplémentaires pour contrôler 570 000 installations de vidéoprotection. Nous poursuivrons l'effort les années suivantes ; je m'y engage.

Mme Virginie Klès, rapporteur pour avis.  - C'est noté !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Madame Borvo, en quatre mois, les contours du Défenseur des droits ne sont pas encore fixés ; il faut laisser le temps au dialogue social. En poursuivant l'effort de mutualisation en 2012 et 2013, la nouvelle institution pourrait économiser 1 milliard d'euros par an.

Le regroupement des AAI aura lieu fin 2015 rue de Ségur.

Mme Virginie Klès, rapporteur pour avis.  - Ce n'est pas faisable !

M. Patrick Ollier, ministre.  - Je vous donne rendez-vous début 2016... La solution intermédiaire d'une installation rue de Richelieu pourrait recevoir l'approbation de France Domaine. Le calendrier ? Les arbitrages interviendraient en février 2012, le choix des concepteurs en septembre, les travaux débuteraient début 2013 sur le site Ségur pour une durée de deux ans et demi. Les délais seront tenus. J'ai toute confiance en Dominique Baudis pour assurer la visibilité de l'institution.

Madame Cohen, en 2011, la Miltd a consacré 18,8 millions à des actions de prévention, contre 2,1 millions à la répression. La prétendue priorité absolue donnée à la répression n'existe donc pas ! Avec le fonds de concours et les 350 millions du PLFSS, 1,4 milliard sont consacrés à la lutte contre la drogue, ce qui est loin d'être négligeable. Enfin, la Mildt a déjà commencé à s'intéresser aux addictions comportementales, comme les jeux d'argent et les jeux vidéo.

Madame Escoffier, bien que le jaune ne récapitule pas la totalité des rémunérations de l'ensemble des agents, l'information sur les rémunérations des collaborateurs de cabinet est parfaitement publique, y compris la fameuse indemnité de sujétion particulière. En revanche, il faut, effectivement, les collationner. Le Gouvernement n'a pas eu le temps d'accomplir ce travail, je m'en excuse.

J'espère que ces réponses vous conduiront à voter les crédits de la mission. (Applaudissements à droite)

Article 32 (État B)

M. le président.  - Amendement n°II-436, présenté par le Gouvernement.

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Coordination du travail gouvernemental Dont Titre 2 

Protection des droits et libertés Dont Titre 2

Moyens mutualisés des administrations déconcentrées

283 841

283 841

TOTAUX

283 841

283 841

SOLDES

- 283 841

- 283 841

M. Patrick Ollier, ministre.  - Cet amendement, purement technique, tire les conséquences sur les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » de l'ajustement des transferts des parcs de l'équipement aux collectivités territoriales. Nous n'avons pu déposer cet amendement avant l'examen au Sénat qui, je l'espère le votera.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial.  - L'amendement est nécessaire ; il correspond à l'obligation légale de compenser les transferts de charges.

Néanmoins, la commission des finances étant défavorable à l'adoption des crédits de la mission, elle repousse l'amendement.

L'amendement n°II-436 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission ne sont pas adoptés, non plus que ceux du budget annexe.

Prochaine séance aujourd'hui, samedi 3 décembre 2011, à 14 h 30.

La séance est levée à 1 h 45.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du samedi 3 décembre 2011

Séance publique

À 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l'Assemblée nationale (n° 106 2011-2012).

Examen de la mission :

- Sport, jeunesse et vie associative

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 29)

MM. Jean-Jacques Lozach et Pierre Martin, rapporteurs pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (avis n° 110, tome VII)

- Suite de l'examen des articles rattachés à la mission Relations avec les collectivités territoriales

- Discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits.