Projet de loi de finances pour 2012 (Nouvelle lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances pour 2012.

Discussion générale

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.  - Depuis 2010, la France avance sur le chemin du désendettement, grâce en tout premier lieu à la maîtrise des dépenses publiques. Nous avons même pris un an d'avance sur l'objectif. Nous avons beaucoup travaillé avec les députés pour répartir les économies et sécuriser notre trajectoire. Le solde est ramené à moins 78,8 milliards. Ce projet de budget illustre la volonté partagée du Gouvernement et de la majorité présidentielle de poursuivre le redressement des finances publiques : la réduction des déficits était une priorité absolue. Le Gouvernement regrette que le Sénat soit resté à l'écart d'une mobilisation d'intérêt national ; ce budget pouvait être l'occasion de nous rassembler face à la crise.

M. Alain Dufaut.  - Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Ce sont bien deux conceptions irréconciliables de la politique budgétaire qui se sont exprimées. Vous avez préféré défaire plutôt que faire...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Pas tous les sénateurs !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - ... et ce choix s'est révélé être une impasse. Le Sénat a voulu une hausse brutale et généralisée des impôts, un choc fiscal de 32 milliards, avec 42 taxes créées ou modifiées, s'ajoutant aux dix-sept créées ou modifiées à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. C'est un contresens radical sur les plans économique et budgétaire. Ces 42 taxes, qui sont loin de former un ensemble cohérent, alourdissent comme jamais les charges sur les entreprises, 20 milliards d'euros en une seule année ! La hausse brutale de l'impôt sur les sociétés rendrait plus difficile l'accès au crédit et freinerait l'investissement, qu'à gauche on dit vouloir favoriser. Allez comprendre ! Tous les Français paieraient le prix de ce choc fiscal. La croissance ne s'en remettrait pas.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Avec vos moins 0,2 %, nous sommes servis !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Les premières victimes de votre mesure « anti heures supplémentaires » seront les 9 millions de Français qui perçoivent 450 euros parce qu'ils travaillent plus pour gagner plus. Les 35 heures ont montré que le partage du travail, ça ne marche pas ; ce n'est pas en partageant la pénurie qu'on crée de la richesse. Tous ceux qui refusent de faire peser les efforts d'abord sur les dépenses condamnent notre pays à une cure d'austérité sans précédent. Dans un des pays les plus imposés au monde, la hausse généralisée des impôts n'a pas d'avenir : elle est insoutenable et illusoire. La France ne le supporterait pas. Un jour ou l'autre vous serez confrontés à cette évidence : le redressement des finances publiques passe par des économies sur les dépenses.

Au lieu de faire des choix en procédant à des redéploiements, vous avez rejeté les crédits de deux missions sur trois. Et dans le même temps vous avez augmenté les dépenses au seul bénéfice des collectivités territoriales. Votre budget est factice, baroque, décalé par rapport aux enjeux du moment. Le Gouvernement et l'Assemblée nationale ne peuvent partager ces choix ! Les collectivités ne peuvent s'exonérer des efforts accomplis par tous. C'est pourquoi une contribution de 200 millions leur a été demandée, soit un millième de la dépense publique locale ; le Sénat l'a jugée insoutenable, et a même créé 450 millions d'euros de dépenses supplémentaires à leur bénéfice exclusif ! Rien ne justifie une inégalité aussi flagrante entre acteurs publics. Pendant que l'État diminue le nombre de ses fonctionnaires, les collectivités territoriales augmentent le leur de 37 000 par an, hors effet de la décentralisation. Je suis prête à examiner la question des normes, qui sont effectivement trop nombreuses ; c'était le sens de la proposition de loi Doligé qui ne figure plus à votre ordre du jour...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Vous l'avez retirée !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Inscrivez-la à l'ordre du jour !

L'Assemblée nationale a fait preuve d'une détermination et d'un courage exemplaires. S'agissant des opérateurs publics, nous avons remis de l'ordre dans les taxes affectées. Notre stratégie porte le beau nom de réforme, elle a permis une baisse historique des dépenses de l'État et garanti le respect de notre trajectoire de retour à l'équilibre. C'est pourquoi, nous allons poursuivre la réforme de l'État avec la RGPP.

M. François Marc.  - Demandez à l'éducation nationale !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - J'ai demandé à l'IGF de dégager des pistes pour 2013-2016 et aux deux inspections générales compétentes, afin de respecter sur la durée un Ondam à 2,5 %, d'identifier de nouvelles sources d'économies en matière sociale.

La hausse des dépenses publiques n'est pas une fatalité. Encore faut-il engager des réformes profondes. Personne ne peut prétendre recruter de nouveaux fonctionnaires et faire baisser les déficits. Dire l'inverse, c'est mentir aux Français. La priorité, je l'ai dit, ce sont les économies.

Par souci d'équité, nous avons demandé des efforts supplémentaires aux Français les plus aisés ; ils acquitteront une contribution exceptionnelle sur les plus-values, les revenus du patrimoine et du travail. Les niches fiscales sont également revues à la baisse, outre le plafonnement global des niches sur l'impôt sur le revenu. Nous avons porté un coup d'arrêt historique à l'« optimisation fiscale ». Sous Lionel Jospin, un couple ayant un revenu de un million pouvait ne pas payer d'impôt ; désormais, il paiera au minimum 340 000 euros. Nous avons redonné de la progressivité à l'impôt sur le revenu. Les plus hauts revenus sont plus taxés en France qu'en Allemagne ; les classes moyennes le sont moins.

Après l'équité, la compétitivité...

M. Pierre-Yves Collombat.  - On voit les résultats pour notre commerce extérieur !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Nous avons conservé tous les dispositifs qui permettent de maintenir et de créer de l'emploi. C'est pourquoi nous avons allégé les charges pesant sur l'agriculture. Nos actes parlent d'eux-mêmes : nous avons supprimé la taxe professionnelle, cet « impôt imbécile », comme disait Mitterrand.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Le président Mitterrand ! Je ne dis jamais « Sarkozy » !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Nous avons rénové le CIR. Nos actes parlent d'eux-mêmes. La convergence budgétaire et fiscale avec l'Allemagne est notre meilleure arme face à la crise.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est ça, oui ! On va dans le mur ! Nous coulerons tous ensemble !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Si la France s'engageait dans la voie voulue par le Sénat, elle serait isolée. C'est pourquoi l'Assemblée nationale a choisi d'en revenir à son texte. Certes, les débats du Sénat ont permis d'améliorer certains points comme sur la péréquation.

Les désaccords entre les deux assemblées sont trop profonds pour être surmontés. Le Gouvernement en prend acte et le regrette ; la France aurait été plus forte si nous avions pu avancer ensemble. La seule stratégie crédible est celle que porte ce projet de loi de finances, marqué du sceau de la justice. (Applaudissement à droite)

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Vous avez choisi comme à l'ordinaire le ton d'un meeting électoral pour nous asséner vos vérités. Nous avons débattu 130 heures depuis le débat sur les prélèvements obligatoires ; elles furent l'occasion d'échanger nos visions en matière budgétaire, économique et fiscale, qui sont en effet divergentes.

La CMP a échoué le 12 décembre, ce qui n'est pas surprenant. Nos divergences sont résumées dans le texte de la question préalable.

Le Gouvernement a construit une trajectoire sur des hypothèses de croissance surestimées : d'après l'Insee et l'OFCE, l'acquis de croissance sera négatif, ce qui laisse augurer de très mauvais résultats en 2012. Or, le Gouvernement maintient ses chiffres : la crédibilité de notre pays en souffre.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il faut augmenter les dépenses ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - J'ai toujours dit que sur une législature il faudrait à parts égales agir sur les recettes et sur les dépenses.

La politique fiscale du Gouvernement est une succession de mauvais choix, qui ont fragilisé les recettes dès le début du quinquennat. La réforme de la taxe professionnelle coûte 5 milliards ! Et il taxe maintenant à tout va avec des mesures de rendement sans cohérence, tout en continuant à affirmer qu'il est opposé à toute augmentation généralisée des impôts. Le Gouvernement a d'ailleurs l'intention de se passer du Parlement pour réaliser de nouvelles économies, en détournant la réserve de précaution, mais qui ne suffiront pas au nouveau plan de rigueur qu'on nous cache.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous le souhaitez ? Il vous arrangerait ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Enfin, vous ruinez la confiance entre l'État et les collectivités territoriales.

Dans le domaine de la fiscalité du patrimoine, nous avons cependant permis deux avancées. A l'article 3 bis E, notre proposition de déplafonnement des droits d'enregistrements en cas de cessions de parts de sociétés, avec baisse des taux, devait rapporter 930 millions d'euros de cette mesure ; l'Assemblée nationale, en choisissant un barème dégressif, a ramené cette somme entre 150 et 200 millions d'euros. Nous avions également proposé que le taux du droit de partage reste à 1,1 % ; si l'Assemblée nationale ne nous a pas suivis, elle a permis que les personnes en instance de divorce à la date de promulgation de la loi de finances rectificative de juillet se voient appliquer ce taux, quelle que soit la date effective de leur divorce.

Dans le domaine de la fiscalité des entreprises, l'initiative du Sénat relative au régime des jeunes entreprises innovantes a été reprise par les députés, dans une version atténuée, dans le collectif budgétaire ; la proposition de M. Assouline et de la commission de la culture de créer à l'article 5 bis G une taxe sur les cessions de titres d'un éditeur de service de communication audiovisuelle a aussi été reprise, mais dans une version profondément modifiée par le Gouvernement.

Plusieurs initiatives du Sénat en faveur de l'outre-mer figurent dans le texte définitif, notamment à l'initiative de MM. Patient, Vergès ou Serge Larcher, aux articles 5 quinquies, 26 bis, 52 octies et 52 quinquies.

En matière de fiscalité immobilière et de logement, un compromis a été trouvé à l'article 41 : le rabot du dispositif « Censi-Bouvard » sera assoupli ; à l'article 41, à l'initiative de M. Repentin, a été décidée la prolongation de deux ans de l'application d'un droit fixe de 125 euros au titre de la taxe de publicité foncière en faveur des organismes HLM et des sociétés anonymes de crédit immobilier pour leurs acquisitions de logements conventionnés ; à l'article 46 bis, relatif au prêt à taux zéro « plus », le montant de l'enveloppe « générationnelle » a été porté à 840 millions, et non à 1,2 milliard d'euros comme le souhaitait le Sénat, et le bénéfice du PTZ+ a été étendu aux acquisitions de logements appartenant à un organisme d'HLM.

Nous avions eu un large débat sur la péréquation, à la suite des travaux de MM. Marc, Jarlier et Guené. L'Assemblée nationale a conservé certains des apports du Sénat à la définition du fonctionnement du fonds de péréquation intercommunal, le Fpic : elle a supprimé les strates au profit du système de prélèvement logarithmique qui gomme les effets de seuil, introduit par la commission des finances ; elle a exclu les 150 premières communes éligibles à la DSU-cible de tout prélèvement et réduit de 50 % le prélèvement des 100 communes DSU-cible suivantes ; elle a repris la modification de la pondération des critères de reversement adoptée par le Sénat à la suite d'un amendement de M. Jarlier ; elle a déplafonné l'effort fiscal pris en compte dans les reversements ; elle a conservé la disposition introduite par un amendement du président Marini excluant de tout reversement les collectivités dont l'effort fiscal est inférieur à 0,5 ; elle a retenu, comme le Sénat, la répartition des prélèvements en fonction des potentiels et non des produits fiscaux ; elle a adopté la clause de revoyure en reportant toutefois au 1er octobre 2012 la date de remise du rapport du Gouvernement.

Deux autres modifications adoptées par le Sénat ont été rejetées : le plafonnement des prélèvements au titre du Fpic et du Fsrif a été rabaissé à 10 % du potentiel fiscal et le revenu par habitant ne sera pas pondéré par le coût du loyer dans chaque région. Enfin, à l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a réduit le montant 2012 du Fpic.

Au vu de ces éléments, le Sénat réfute l'idée que son travail a été purement virtuel. La navette a été utile puisqu'elle a fait évoluer l'Assemblée nationale sur certains points, trop rares cependant. Une nouvelle lecture n'aurait pas permis de faire bouger le texte ; ce qui explique le dépôt d'une question préalable.

Ce budget est le dernier de la majorité sortante. Nous avons au cours des débats dressé le bilan de sa politique : c'est un constat d'échec ! (Applaudissements à gauche)

M. Éric Bocquet.  - La CMP n'est pas parvenu à un accord. Cela confirme que la majorité du Sénat a changé. C'est rassurant.

Les appels répétés à l'union nationale face à la crise sont un leurre : la politique est l'expression de choix partisans. Votre logique n'est pas la nôtre. Vos orientations budgétaires prolongent la baisse des dépenses publiques, ce qui est rendu d'autant plus aisé par la non-reconduction de dépenses des années 2010-2011. Le déficit initialement prévu atteignait 80 milliards, mais la récession guette, avec sa cohorte de chômeurs, de baisse des recettes fiscales et de déficits.

Cette récession constitue le point d'orgue du quinquennat, au cours duquel le Gouvernement n'a cessé de courir après la croissance. La crise ne s'est pas déclarée en 2008, contrairement à ce qui est dit. La surchauffe de 2008, c'est la queue de la comète ! La financiarisation de l'économie remonte à plus loin, à la dérégulation des marchés financiers, à la loi bancaire de 1984 et avant cela à la décision de Nixon de suspendre la parité or-dollar ou au fameux 7,5 % Giscard de 1973...

Ce qui creuse les déficits publics, c'est la baisse des recettes fiscales. La nouvelle majorité sénatoriale a démontré que la mobilisation de recettes nouvelles permettait de mener une autre politique économique et sociale. L'ISF doit retrouver toute son efficacité, l'impôt sur les sociétés être débarrassé de toutes les exonérations qui le polluent.

Il est bon que deux conceptions des finances publiques se soient exprimées. Notre groupe votera la question préalable, dans l'attente du jugement citoyen en mai et juin 2012. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - Ce dernier projet de loi de finances de Nicolas Sarkozy est le symbole de l'incohérence de la politique fiscale menée depuis cinq ans. En première lecture, il fallait à tout prix sauver le triple A... Notre note est aujourd'hui en bien mauvaise posture...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous vous en réjouissez ?

M. François Fortassin.  - Nous sommes financièrement morts, physiquement vivants ; politiquement, nous ne savons pas où nous allons. L'agence Standard & Poor's a rendue publique, le 5 décembre, la mise sous surveillance de notre note, dont l'agence Fitch a précisé une perspective négative. Il conviendrait de s'interroger sur les agences de notation. On nous annonce la prochaine dégradation, mais de combien de crans ? Le Gouvernement a changé de discours pour minimiser une dégradation aux conséquences pourtant extrêmement lourdes, comme le dit le directeur de France Trésor. Une dégradation d'un cran aurait des conséquences financières importantes pour tous les secteurs d'activité. Vendredi, on nous a dit que la France était entrée en récession. Le déficit de l'Italie plongerait la zone euro dans une phase de dépression. C'est inquiétant. Le couple franco-allemand, quant à lui, n'a rien sauvé.

Ce budget renforce le manque de crédibilité de ce gouvernement. La croissance était estimée à 1,75 %, puis à 1 % alors que l'OCDE pense quelle sera nulle ; que d'incertitudes ! L'OFCE estime que les plans de rigueur français vont peser sur la croissance. Il faut éviter toute mesure qui entrave celle-ci.

La réforme de la taxe professionnelle a remis en cause l'autonomie financière des collectivités territoriales.

M. Jean-Michel Baylet.  - C'est exact !

M. François Fortassin.  - Si elles réduisent leurs investissements, l'emploi en paiera le prix.

Jusqu'à présent, les redevances sur les ouvrages hydroélectriques étaient partiellement reversées aux communes. L'Assemblée nationale les avait supprimées, le Sénat, dans sa sagesse, les a rétablies avant que l'autre chambre ne les supprime à nouveau -en faisant une exception partielle pour les plus petites installations. Je le déplore.

La France a besoin d'une réforme fiscale globale et courageuse pour retrouver le chemin de la croissance. Le texte voté par le Sénat avait le mérite de la clarté et de la justice sociale et fiscale. Comme nous n'avons pas pu nous mettre d'accord avec l'Assemblée nationale, la majorité de mon groupe votera la question préalable. (Applaudissements à gauche)

M. Dominique de Legge.  - Après l'échec de la CMP, le budget sera peu ou prou celui voté par l'Assemblée nationale. Peu de modifications du Sénat ont été retenues sauf sur la péréquation horizontale. Nous regrettons que les députés n'aient pas retenu comme critère de répartition le revenu moyen pondéré, permettant de prendre en compte le coût du logement, que M. Dallier avait proposé. Nous nous félicitons en revanche de la clause de revoyure qui a été conservée. Je ne souhaitais pas que nous différions la mise en place de la péréquation. Pourtant, elle ne portera que sur 150 millions.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est plus productif !

M. Dominique de Legge.  - Nous nous félicitons du maintien de la pondération du potentiel financier agrégé à hauteur de 20 %, du revenu moyen à 60 % et de l'effort fiscal à 20 % ; il fallait mieux prendre en compte les charges sociales pesant sur les communes. Les députés ont également accepté l'exclusion du bénéfice du Fpic des ensembles intercommunaux ou des communes isolées dont l'effort fiscal est inférieur à 0,5.

D'autre part, les 150 premières communes éligibles à la DSU seront exonérées du prélèvement. Pour éviter les effets de seuil, une modération logarithmique a été introduite.

En revanche, les députés ont repoussé les autres mesures votées au Sénat, qu'il s'agisse de suppression pure et simples d'articles, de nouveaux impôts ou de nouvelles niches fiscales.

Le choc fiscal de 32 milliards, dont 20 sur les entreprises était irresponsable, mais il s'agissait d'un pur affichage.

M. Jean Bizet.  - C'est vrai !

M. Dominique de Legge.  - Dommage que la majorité sénatoriale ait privilégié une opposition de principe.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - C'est vraiment dommage !

M. Dominique de Legge.  - Le manque d'unité nationale n'est pas sans influence sur les agences de notation.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très juste !

M. Dominique de Legge.  - Les Français en auront besoin, quel que soit le résultat des urnes. Le refus obstiné de voter la règle d'or manifeste le refus de l'unité.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est vrai !

M. Dominique de Legge.  - Les progrès accomplis dans la zone euro sous l'égide du président de la République sont exceptionnels. (Exclamations à gauche) Si la France perd son AAA, c'est la gouvernance de l'Europe qui en paiera le prix fort. Pendant que le président de la République s'évertuait à éteindre l'incendie (on ironise à gauche), la gauche multipliait les déclarations insignifiantes à force d'être excessives. Dégrader les notes de la zone euro aggraverait la situation, même si les agences ont montré leur incapacité à voir venir la crise des subprimes.

Le groupe UMP a décidé de voter ce projet de loi de finances dans la rédaction issue de l'Assemblée nationale. (Applaudissements à droite)

M. François Marc.  - C'est la première fois que nous devons examiner un budget dont les paramètres ont à ce point évolué depuis sa présentation en septembre. Le déficit prévisionnel atteint 80 milliards sur 262 milliards de dépenses à financer, ce qui signifie qu'en 2012 la France devra emprunter 180 milliards pour équilibrer ses dépenses courantes et assumer le service de la dette.

Depuis l'annonce de ce projet de budget, les dégradations ont été considérables, tant de nos conditions financières et économiques, que de la croissance ou du commerce extérieur, dont le déficit est passé de 51 milliards à près de 75, soit 50 % de plus. La conjoncture se dégrade ; plusieurs économies occidentales entrent en récession, alors que les sommets européens échouent à rétablir la confiance. L'économie d'endettement et de spéculation est au bout du rouleau.

Mme Pécresse répète qu'il n'y avait pas d'autre solution que ce que propose le Gouvernement. Si existe encore un Parlement, permettez que nous présentions nos propositions. Comment dire que nous ne voudrions que défaire ? Nos amendements apportaient 11 milliards de recettes supplémentaires, réduisaient les niches fiscales, renforçaient la progressivité de l'impôt sur le revenu. Nous avons proposé de revaloriser la prime pour l'emploi et renforcé la justice fiscale en faveur des PME. Nous avons favorisé l'outre-mer et adopté des amendements sur le logement, outre les propositions applicables aux collectivités territoriales -dont je regrette que le Gouvernement refuse de faire des partenaires actifs dans le rétablissement du pays.

L'appel du Gouvernement à l'union sacrée n'en est pas un : nos propositions constructives sont systématiquement repoussées, tout ce qui vient de nous est tenu pour irrecevable.

Nous aurions un quinquennat de retard ? Celui qui s'achève est caractérisé par un chiffre : 500 milliards de dette supplémentaire ! Nous aurions préféré ne pas avoir ce quinquennat, qui lègue un lourd fardeau.

Incontestablement, la Lolf a montré ses limites.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est vrai !

M. François Marc.  - En outre, le Parlement n'a pu travailler dans de bonnes conditions, faute de disposer des services d'une agence indépendante de chiffrage et d'évaluation. Notre travail constructif n'a pas porté ses fruits puisqu'il n'a pas eu l'heur de plaire au Gouvernement. Deux logiques s'opposent, ce qui justifie la question préalable que nous allons voter. Dans les mois qui viennent, nos propositions apparaitront dans le projet pour la France que nous soumettrons au pays. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ces quelque 130 heures de débat débouchent sur une certaine lassitude imputable à la répétition des arguments. Même si le Sénat s'est opposé aux principales options du budget, il a fait correctement son travail sur nombre d'aspects qui n'avaient rien de mineur, grâce à quoi quatorze articles importants de cette loi de finances résultent de nos délibérations. Je remercie les députés, et au premier chef M. Carrez, d'avoir pris en compte très correctement le travail du Sénat. Je pense en particulier à la question de la péréquation horizontale, que nous avons pu étudier assez à fond pour pouvoir mettre le doigt sur ce qui faisait mal.

Puisque c'est là ma dernière intervention de l'année 2011, je formulerai quelques voeux. Les premiers sont pour le Gouvernement, qui a la charge de l'exécutif sous l'autorité du président de la République. Qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, on doit comprendre que l'intérêt des Français est que notre pays fasse au mieux le chemin des premiers mois de l'année 2012. La pire des politiques est la politique du pire, le dénigrement de soi-même. Nul n'est à l'abri de la faiblesse, de la maladresse.

M. Jean-Louis Carrère.  - Vous vous dénigrez entre vous ? (Sourires)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je souhaite qu'on laisse agir ce Gouvernement dans cette période très difficile. La perspective d'élections à venir n'autorise pas toutes les promesses.

M. Jean-Michel Baylet.  - Ni toutes les erreurs.

M. Jean-Louis Carrère.  - Supprimez les élections ! (Sourires)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Quel qu'il soit, le gouvernement en place le 1er juillet devra prendre en charge une France dont la situation ne sera pas meilleure qu'aujourd'hui.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est vrai !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il faudra donc agir sans tractations politiciennes, dont la vie de notre assemblée montre combien il est difficile de les éviter. Sachons ne pas dénigrer notre pays ; ayons le sens de l'intérêt général.

Personne n'a le secret d'économies indolores, ni de stratégies fiscales propres à la fois à stimuler la croissance, améliorer l'équité et satisfaire toutes les corporations. Dans le monde imprévisible qui est le nôtre, nul n'est à l'abri d'erreurs. Sachons nous accorder mutuellement la bonne foi que nous méritons, au détriment de promesses sans lendemain, rendant encore plus redoutables les écueils qui sont devant nous. (Applaudissements sur les bancs UMP)

La discussion générale est close

Question préalable

M. le président.  - Motion n°I-1, présentée par Mme Bricq, au nom de la commission.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat,

Considérant que le projet de loi de finances pour 2012 s'inscrit dans une programmation pluriannuelle privée de signification, puisque reposant sur une hypothèse de croissance des dépenses publiques peu crédible et non étayée ;

Considérant que l'empilement des mesures de rendement qui a caractérisé les dernières lois financières trahit l'absence de stratégie gouvernementale en matière de prélèvements obligatoires et confirme la nocivité des principales réformes fiscales conduites depuis 2007 ;

Considérant que les habituelles ouvertures de crédits sollicitées par le Gouvernement en fin d'exercice manifestent l'insincérité de ses prévisions budgétaires et contrastent fâcheusement avec ses engagements de maîtrise de la dépense ;

Considérant que le Gouvernement, en prétendant réaliser des économies grâce à la réserve de précaution, détourne de sa vocation une procédure destinée à respecter l'autorisation parlementaire, et non à s'en dispenser ;

Considérant que la baisse injustifiée des concours de l'État aux collectivités territoriales, ajoutée aux conséquences de la réforme de la taxe professionnelle sur l'équilibre des finances locales, mine la confiance qui prévalait entre l'État et les territoires ;

Considérant que le projet de loi de finances pour 2012 est dépourvu de substance, la plupart des mesures dites « de redressement » étant soumises au Parlement à la faveur de projets de loi de finances rectificative examinés dans la précipitation ;

Considérant que l'Assemblée nationale est revenue en nouvelle lecture sur la plupart des votes du Sénat ;

Le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2012, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 203, 2011-2012).

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - J'appelle à voter cette question préalable, que j'ai déjà présentée.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Avis défavorable. Je remercie les sénateurs pour leur contribution au débat, notamment en ce qui concerne la péréquation horizontale.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Joseph Stiglitz résume ainsi la politique des gouvernements européens depuis quelques années : déplacer les fauteuils sur le pont du Titanic. Mme Pécresse a jugé que le Sénat plaçait les fauteuils trop à gauche mais elle ne s'est pas inquiétée de la trajectoire du navire. Nos votes seraient décalés par rapport aux nécessités du moment ? Quelles sont-elles ? Réduire l'endettement ou le chômage ? Faut-il, comme disait Keynes, privilégier les rentiers ou les travailleurs ? Cela fait au moins deux politiques.

Les collectivités territoriales doivent participer à l'effort ?

M. Pierre-Yves Collombat.  - Quand leur a-t-on demandé leur avis ? Elles ont embauché 37 000 personnes ? Eussiez-vous préféré qu'elles en missent 700 000 au chômage ?

Le RDSE votera la question préalable mais je suis frustré que notre travail sur la péréquation ne soit repris que partiellement et que l'Assemblée nationale soit revenue à 150 millions d'euros au lieu de 250. La nuit du 20 décembre ne sera pas celle du 4 août !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Si vous voulez en discuter, ne votez pas la motion !

M. Pierre-Yves Collombat.  - On a pensé à la DSU, pas à la DSR, qui aurait dû être complétée. Une fois de plus, nous sommes frustrés car les difficultés de notre économie entrant en déflation ne sont pas traitées.

M. Marc Massion.  - Le Gouvernement veut nous présenter comme de mauvais Français. Entre 1997 et 2002, M. Marini était rapporteur général de la commission des finances.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - À partir de 1998.

M. Marc Massion.  - Il se souvient qu'à deux reprises la droite a voté des contre-budgets sans chercher à améliorer le nôtre. Il y a deux logiques ; nous avons exposé la nôtre et fait loyalement notre travail ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La motion n°I-1 est mise aux voix par scrutin public de droit.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 173
Contre 170

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à gauche ; exclamations de surprise à droite)

La séance, suspendue à 16 h 10, reprend à 16 h 20.