Loi de finances rectificative pour 2012

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012.

Je salue la première intervention au Sénat de M. Cahuzac.

Discussion générale

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.  - (Applaudissements à gauche) C'est effectivement la première fois que je m'adresse à la Haute assemblée. J'espère votre indulgence.

M. Albéric de Montgolfier.  - N'y comptez pas trop ! (Sourires)

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Fort de ces signes de sympathie (sourires), je vais présenter devant vous ce collectif qui, à la suite des élections présidentielle et législatives, est plus qu'une tradition : une obligation politique. Tout nouveau gouvernement présente un projet de loi de finances rectificative pour amplifier ou infléchir sa politique, s'il est réélu, ou, dans le cas contraire, pour proposer des modifications tout en assurant une certaine continuité de l'État, par respect pour la parole de la France.

Cette tradition rejoint la réalité budgétaire, établie dans la loi de règlement. Le bilan de 2011 peut être objet de satisfaction pour ceux qui en portent la responsabilité car jamais, dans l'histoire de notre pays, ne fut réduit de 1,9 point et de 59 milliards le déficit public. Cette réduction est de dimension historique après, il est vrai, un déficit de 2010 de dimension non moins historique. Une ampleur a répondu à une autre. Mais comme la Cour des comptes l'a confirmé, le déficit a été réduit surtout pour des raisons conjoncturelles ou exceptionnelles. Sur 1,9 point, la part de réduction du déficit due à des politiques structurelles n'est que de 0,8, et celles-ci, appelons un chat un chat, ont consisté en hausses de prélèvements obligatoires pour un montant de 30 milliards entre 2007 et 2012. En 2007, l'alors nouveau président de la République avait pourtant annoncé 80 milliards de réduction des impôts. Cela fait un écart de 110 milliards.

M. Albéric de Montgolfier.  - Et la crise ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Cette promesse ne fut pas tenue : l'effort a été porté en fin de mandature, ce qui laisse perplexe car il semble plus simple d'agir dès le début. Quant à la dépense publique, elle n'a pas contribué favorablement à l'amélioration du solde. Au contraire, elle a contribué négativement à la baisse du déficit, pour 0,2 point de PIB selon la Cour des comptes. Contrairement à ce que voulaient d'aucuns, la dépense publique n'a pas été maîtrisée.

Pour les années suivantes, nous ne profiterons pas de ces mesures exceptionnelles comme la fin du plan de relance, des investissements militaires ou de la réforme de la taxe professionnelle. Idem pour le déficit budgétaire : une baisse de 10 milliards seulement due à des raisons contractuelles. La France a donné sa parole pour atteindre l'objectif de 4,5 % du PIB de déficit. Tout fut fait pour remplir cet objectif, je le crois. Cela dit, la Cour des comptes a montré qu'en restant sur la trajectoire actuelle, nous n'y parviendrions pas. Cela tient à une moindre croissance et à une prévision audacieuse, voire imprudente.

M. Albéric de Montgolfier.  - C'est toujours le cas ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Certaines recettes ont été surestimées. Je pense à l'impôt sur les sociétés, surévalué pour des raisons de commodité en partie. La progression de l'assiette a été de 2 % au lieu des 5,2 % prévus. Les avertissements lancés à l'Assemblée nationale et au Sénat n'avaient pas été entendus. Aujourd'hui, manquent 3 milliards. Même remarque pour la TVA : 1,4 milliard de moins-value, dont seulement 400 millions en raison de la crise, 1 milliard en moins pour les collectivités territoriales également ainsi que pour les cotisations sociales.

La Cour des comptes évalue le manque à gagner entre 7 et 10 milliards ; pour le Gouvernement, il faut trouver 7,1 milliards pour respecter la parole donnée par l'ancienne majorité au nom de la France. Quand un grand pays comme la France prend des engagements, il doit les remplir. A cet égard, il y a rupture par rapport à 2007. M. Sarkozy s'était invité à l'Eurogroupe -une première qui ne s'est jamais renouvelée- pour dire qu'il remplirait le programme pour lequel il avait été élu en revenant sur la parole de M. Chirac. Cette attitude avait nui à notre réputation en Europe.

D'où ce plan surtout axé sur les recettes car agir sur la dépense publique est délicat en milieu d'année. D'ailleurs, l'an dernier, le gouvernement précédent a présenté des plans qualifiés de Fillon I et Fillon II -c'est la loi du genre- qui portaient exclusivement sur les recettes par l'argumentation des prélèvements obligatoires et seulement une économie de 1 milliard sur les dépenses. Preuve qu'il est très difficile de proposer des économies importantes en cours d'année.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Dommage que vous n'ayez pas voté le plan Fillon !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Cela dit, le Gouvernement maintient le gel de 5,4 milliards d'euros en dépit de la chaleur estivale. (On apprécie diversement à droite) Nous proposons un surgel de 1,5 milliard, décision qui ne fut pas prise l'an dernier par le gouvernement précédent.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Quelle prétention !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Tous les ministères seront concernés. Peut-on en espérer ainsi des économies ? Nous ne le saurons vraiment qu'en fin d'année. Les années précédentes ont montré que le résultat est parfois décevant : en 2009 et en 2010, malgré le gel de 5 à 7 milliards de crédits, les économies furent nulles en fin d'année. L'an dernier, les économies sèches réalisées en fin d'année s'élevaient à 200 millions. Je compte donc sur la compréhension de ceux qui s'apprêtent à demander 2 ou 3 milliards d'économies dès juillet...

Cet effort ne sera accepté par les Français que s'ils ont la certitude que chaque euro dépensé l'est à bon escient. L'année 2012 sera dure pour tous. Le plan prévoit 7,2 milliards de recettes supplémentaires en plus des hausses prévues par le plan Fillon. J'entends d'avance les reproches. Cela dit, 15 milliards d'impôts avaient déjà été votés par la précédente majorité. Nous n'en ajoutons que la moitié. La République doit retrouver la bonne voie, celle de la bonne foi. La droite, je suppose, critiquera cette politique (applaudissements à gauche) mais ces chiffres sont incontestables, ce sont ceux de la Cour des comptes.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Si vous faites les questions et les réponses, le débat est inutile !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Nous nous inscrivons dans la continuité. La taxe sur les transactions financières gardera la même assiette. Nous doublons son taux pour atteindre le rendement prévu. La droite nous soutiendra donc. (M. Francis Delattre s'exclame) A défaut, chacun conviendra que cette opposition est purement politique.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Parlez-nous de vos projets et laissez l'opposition s'exprimer !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Idem pour la surtaxe ajoutée à l'impôt sur les sociétés, votée par la droite et dont nous ne faisons qu'anticiper le versement.

Cela dit, nous avons été élus pour conduire le changement. (Applaudissements à gauche) Nous supprimons l'exonération des heures supplémentaires, que nous avons combattue durant cinq ans. Non pas sur le principe mais pour des raisons conjoncturelles : une telle mesure ne se justifie qu'en période de plein emploi et de croissance forte. Chacun sait que c'est l'entreprise, non le salarié, qui décide de faire des heures supplémentaires. D'ailleurs, l'Allemagne a mené une politique inverse de travail réduit : on dit là-bas Kurzarbeit et non « 35 heures »... (Exclamations à droite) Résultat, le chômage a augmenté de un million en France, il a baissé en Allemagne. Les faits sont têtus. C'est la preuve que cette politique était inefficace.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ne soyez pas trop fier ; on verra dans six mois.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Il en est de même de l'augmentation de la TVA, « TVA sociale », « TVA compétitivité », « TVA anti-délocalisation », « TVA je ne sais quoi »...

M. Francis Delattre.  - L'Allemagne l'a fait !

M. Charles Revet.  - Que proposez-vous ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Comment imaginer que cette mesure en elle-même améliore la compétitivité ? Diminuer les charges sur le travail de 2 % quand le coût du travail ne représente que de 20 à 40 % du prix du produit fini, c'est réduire celui-ci de 0,4 ou 0,8 %. Autant dire à peu près rien comparé à ce qu'apportent les progrès de compétitivité. En revanche, une telle augmentation aurait conduit à une baisse du pouvoir d'achat alors que c'est la consommation qui tire la croissance en France.

M. Francis Delattre et Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Et la CSG ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Ce collectif ne résume évidemment pas l'ambition de notre politique. Nous sommes élus pour cinq ans, comme le veulent nos institutions ; le président de la République est dans la forteresse inexpugnable de l'Élysée. Cela ne signifie pas que l'opposition devrait faire preuve de retenue ou de modestie... (Sourires)

M. Roger Karoutchi.  - A qui le dites-vous !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Certaines mesures s'inscrivent dans la continuité, d'autres dans une franche rupture. J'imagine que certains s'opposeront à notre politique concernant l'ISF. Nous, nous voulons épargner la consommation en taxant l'épargne.

L'examen de ce texte, j'espère, éclairera le débat public. Encore une fois, il s'agit de tenir la parole de la France auprès de ses amis européens. Elle pourra ainsi défendre des propositions audacieuses, conformément à sa tradition depuis la Révolution française, renouer avec la prospérité et assurer le destin de ses enfants. (Vifs applaudissements à gauche)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Ce collectif répond à une double nécessité : conforter la place de la France en Europe et tenir les engagements pris lors de la campagne pour l'élection présidentielle.

Rappelez-vous les mois qui ont précédé la campagne présidentielle : la France ne faisait plus que relayer la parole de l'Allemagne. (Exclamations à droite) L'Europe courait le risque d'être coupée en deux. La question était de savoir si notre pays basculerait du côté sud ou du côté nord. Les temps ont changé ! (Mêmes mouvements) La France emprunte à des taux négatifs tandis que l'Espagne et l'Italie sont confrontées à des taux insoutenables, preuve que les investisseurs ne considèrent plus la zone euro comme un tout.

Cela dit, nous devons assurer notre crédibilité pour continuer de convaincre et donner une perspective à la zone euro : union bancaire, licence bancaire au FESF et au MES, augmentation de la taille des dispositifs de stabilité.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Tout à fait.

M. François Marc, rapporteur général. - Ce collectif est la première étape sur ce chemin ; lucidité, cohérence, transparence, en voilà les maîtres mots. Contrairement à l'ancien gouvernement, nous avons voulu dire la vérité et tirer les conséquences de toutes les informations à notre disposition. La moins-value de recettes est estimée à 7,1 milliards, à quoi il faut ajouter le contentieux sur le régime fiscal des organismes de placements collectifs en valeurs mobilières (OPCVM), qui coûtera 5 milliards dont 1,5 dès cette année. Quant aux dépenses, elles dérapent de 2 milliards. Pour compenser ce manque, le Gouvernement propose de maintenir le gel en valeur des dépenses hors charges de la dette et pensions et d'augmenter la réserve de précaution de 1,5 milliard. Souvenez-vous : il y a quatre mois, la ministre des finances réduisait cette réserve d'1 milliard. Nous rectifions donc le tir.

Pour 2012, les nouvelles mesures rapporteront 5,7 milliards à l'État et 1,6 à la sécurité sociale. Cela permettra de réduire le déficit maastrichtien de 500 millions et le déficit budgétaire de 3,7 milliards. Lors du premier collectif budgétaire, le déficit avait dérapé.

Nous commençons à ressentir les effets des dispositifs de stabilité européens : 2,4 % sur une dette de 89,4 % du PIB. En outre, il faut noter une minoration de 300 millions en raison de la baisse des taux d'intérêt des prêts bilatéraux à la Grèce.

En résumé, ce texte remplit notre premier objectif, le redressement. Le fait-il, comme nous y sommes engagés lors des élections, dans la justice ? La réponse est oui. Il y a une vraie satisfaction pour les sénateurs des groupes CRC, écologiste, RDSE et socialiste à voir les quatre premiers articles de cette loi : suppression de l'exonération des heures supplémentaires, retour sur la réforme de la TVA, celle de l'ISF et celle des droits de mutation. Le message est clair : une page est tournée. En outre, le Gouvernement annonce deux réformes importantes pour l'automne : meilleure progressivité de l'impôt sur le revenu et réforme de l'impôt sur les sociétés. Je le salue ; d'autres auraient pu repousser cette exigence en arguant des conditions difficiles. Ce texte amorce ce mouvement avec la contribution additionnelle de l'impôt sur les sociétés sur les bénéfices distribués et le doublement de la taxe sur les transactions financières. De plus, les dépenses nouvelles sont gagées : il en va ainsi de la création de postes dans l'Éducation nationale.

Autre domaine, la fiscalité locale. Je proposerai des amendements, entre autres sur la réforme des valeurs locatives professionnelles, nécessaire pour garantir l'autonomie financière des collectivités territoriales et une péréquation juste. Le processus lancé en 2010 est en panne. Les acteurs avaient joué leur rôle, il faut leur donner un signal dès cet été.

Ce projet de loi est le premier texte budgétaire fort de cette législature. Par comparaison avec 2002 et 2007 ; il représente une rupture. Il n'est plus question de baisser les impôts pour provoquer un choc de croissance qui n'est jamais venu. Le paquet fiscal était présenté comme un cocktail gagnant...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous nous en présentez un autre !

M. François Marc, rapporteur général.  - Il faut donc mettre en oeuvre une autre politique : le redressement dans la justice. Monsieur le ministre, vous avez tout notre soutien ! (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis.  - Ce texte enraye la détérioration des comptes publics pour tenir nos objectifs budgétaires, il met en oeuvre une juste répartition de l'effort.

Avec une croissance à l'arrêt, le déficit de la sécurité sociale s'alourdirait de 2 milliards, sans mesures correctrices, atteignant pour la quatrième année consécutive un total de 20 milliards. Les prévisions de la Cour des comptes divergent très nettement des courbes présentées par l'ancien gouvernement. Il faut rapidement infléchir cette tendance.

Cela dit, ce collectif poursuit aussi l'objectif d'une plus grande équité. Son article premier revient sur la TVA dite sociale. Son adoption, il y a quatre mois, était largement improvisée, à quelques semaines des élections, sans étude d'impact. D'où l'idée de saisir le Haut conseil de financement de la protection sociale pour réfléchir à des pistes pour notre sécurité sociale. En outre, cette hausse de la TVA aurait pénalisé les ménages les plus modestes et freiné la consommation. Nous approuvons donc l'article premier ainsi que le prélèvement de deux points supplémentaires sur les revenus du capital.

Quant au régime des heures supplémentaires, l'exonération de cotisations sociales de la loi Tepa coûte cher, décourage les embauches et crée un effet d'aubaine, comme l'a établi un rapport bipartisan de l'Assemblée nationale en 2011. Il fallait donc y revenir, sauf pour les PME de moins de 20 salariés --l'exonération de cotisations patronales de 1,50 euro par heure est maintenue à leur bénéfice. L'opération sera neutre pour la sécurité sociale. Le Gouvernement s'est engagé à proposer une nouvelle compensation pour l'exonération des petites entreprises dans les textes financiers pour 2013. La commission des affaires sociales se félicite en outre de l'apurement de la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale au titre des compensations 2010 et 2011.

Le projet de loi réduit les niches sociales sur les stock-options et les attributions gratuites d'actions ; les avantages accessoires au salaire entreront dans le champ du forfait social. Depuis plusieurs années, l'assiette de celui-ci évolue plus rapidement que la masse salariale ; l'écart de prélèvement entre les formes de rémunération favorise la substitution des unes aux autres. L'article 27 fixe le taux du forfait social à 20 % afin de rendre le système plus juste, même si ce taux reste très favorable. La commission des affaires sociales proposera un amendement pour assujettir les indemnités de rupture -les parachutes dorés- les plus élevées.

Au total, avec les mesures nouvelles, la sécurité sociale y gagnera 1,5 milliard en 2012, 5,5 milliards à partir de 2013 ; la branche vieillesse, 4,5 milliards par an, la branche famille, 500 milliards -ce qui couvrira la majoration de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire. C'est le début d'un redressement de nos finances sociales, qui fait contribuer davantage ceux qui ont été trop peu sollicités ces dernières années -je veux dire, les revenus du capital.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Très bien !

M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.   - J'en viens à l'aide médicale d'État (AME). Le Sénat s'était opposé aux mesures proposées par le précédent gouvernement et avait adopté un amendement de sa commission des affaires sociales à l'initiative de M. Milon. Ces dispositions retardent des soins indispensables ; leur adoption témoignait d'une suspicion injuste à l'égard des bénéficiaires et des médecins. Un rapport de l'Assemblée nationale de juin 2011 a pourtant relativisé l'augmentation des dépenses d'AME.

La commission des affaires sociales a donc émis un avis favorable à ce texte, sous réserve des deux amendements qu'elle présentera. (Applaudissements à gauche)

Mme Françoise Cartron, rapporteur pour avis de la commission de la culture  - Plusieurs mesures de ce projet de loi de finances rectificative concernent la commission de la culture, qui se réjouit du rétablissement des crédits dédiés au spectacle vivant : 23,5 millions d'euros seront débloqués. Cette bouffée d'oxygène était très attendue par des établissements et compagnies fragilisés.

La commission est également favorable aux mesures d'urgence proposées notamment à l'article 23 qui augmente le plafond des autorisations d'emploi de la mission « Enseignement scolaire » afin de renforcer ses moyens humains : 1 507 ETPT, dont 1 000 professeurs des écoles, 100 CPE, 1 500 AVS, 2 000 assistants d'éducation, 500 agents de prévention et de sécurité scolaire.

M. Claude Domeizel.  - Très bien !

Mme Françoise Cartron, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - L'enseignement agricole n'a pas été oublié. C'est un message de confiance et d'espoir à l'égard des équipes éducatives, si malmenées ces dernières années. Le Gouvernement concilie ainsi responsabilité budgétaire et ambition éducative. Les enseignants stagiaires auront droit à une décharge de service afin de poursuivre leur formation. La rentrée scolaire, préparée par le Gouvernement précédent, se déroulera ainsi le moins mal possible. Nous éviterons à des classes de fermer à la campagne ; des élèves de moins de trois ans seront scolarisés, particulièrement dans les zones sensibles.

Certains commissaires se sont inquiétés de la suppression de l'exonération des heures supplémentaires des enseignants mais celles-ci ne concernent pas le primaire ni la maternelle, déclarés prioritaires. En outre, il vaut mieux recruter des enseignants : l'exonération des heures supplémentaires coûtait autant que tout l'enseignement agricole ! Il fallait rectifier le tir. (Applaudissements à gauche)

La baisse de la TVA sur les livres et le spectacle vivant est bienvenue et conforme à la position antérieure du Sénat.

L'article 30 supprime la prise en charge des frais de scolarité des enfants français dans les lycées à l'étranger ; celle-ci coûte fort cher et crée des inégalités entre élèves français, ressortissants de l'Union européenne, et étrangers. Elle a aussi réduit l'accueil d'enfants étrangers et la contribution des entreprises qui auparavant prenaient en charge les frais d'écolage des enfants de leurs cadres. Des bourses continueront à être attribuées sous condition de ressources ; les ménages modestes ne seront donc pas pénalisés.

Le projet de loi reporte aussi de quelques mois l'application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) aux universités d'Antilles- Guyane et de la Réunion. C'était nécessaire pour sécuriser la rémunération des personnels concernés.

La commission de la culture donnera un avis favorable aux articles dont elle est saisie et soutiendra les choix du Gouvernement. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Pendant que nous délibérons sur ce nouveau paquet fiscal, les marchés s'emballent à nouveau.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il faut donc changer de politique !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - L'Italie emprunte aujourd'hui à dix ans à 6,44 %, l'Espagne à 7,59 %.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Qui y gagne ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Pour la France, le spread avec l'Allemagne est de l'ordre de un point. Si je commence ainsi, c'est que figure dans ce collectif une économie de constatation de 700 millions sur la charge de la dette... C'est dire si la situation est fragile, qui impose le plus grand sérieux dans la gestion budgétaire du pays sur le chemin de la convergence. Nos engagements européens se traduiront bientôt par la ratification du traité sur la gouvernance, le fameux TSCG, qu'il était encore question il y a peu de renégocier... (On ironise à droite)

M. Roger Karoutchi et Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Vous avez certainement mal entendu !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Le nouveau gouvernement veut redresser nos comptes. Le Sénat vous accueille avec plaisir, monsieur le ministre, mais votre gouvernement ne fait que s'inspirer de la politique du précédent : le premier collectif de 2012 avait déjà procédé à une correction de 2 milliards d'euros, annulation de crédits pour 1,2 milliard et 800 millions de mesures sur recettes : l'effort était équilibré. L'hypothèse initiale de croissance de 0,7 % était conforme aux prévisions des conjoncturistes ; le nouveau gouvernement, avec ses 0,3 % aujourd'hui, ne fait pas autre chose.

L'audit de la Cour des comptes est une arme à double tranchant. La Cour estime entre 1,2 et 2 milliards les risques de dépassement sur les dépenses, sur un total, hors charge de la dette et pensions, de 275 milliards. Niveaux de risques qui ne sont pas très différents de ceux couramment constatés : satisfecit est ainsi donné au gouvernement Fillon. Enfin, vous augmentez la réserve de précaution que vos amis critiquaient hier.

Mettons donc un terme aux procès d'intention : le gouvernement Fillon a fait son devoir et son possible. Comme le rapporteur général l'écrivait, le précédent gouvernement a réduit le déficit d'1,5 point de PIB environ.

On aimerait être certain de la sincérité budgétaire du nouveau gouvernement et de l'absence, dans la présentation qu'il fait, d'approximations et de tours de passe-passe...

M. David Assouline.  - Vous étiez maître en la matière.

M. Marc Daunis.  - Quelle parole d'expert !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Voici quelques exemples de window dressing...

M. Roger Karoutchi.  - Oui, attaquez ! (MM. Jean Bizet et Albéric de Montgolfier renchérissent)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ce paquet fiscal de 7,2 milliards compense des moins-values de 7,1 milliards mais ce dernier chiffre -vous ne le dites pas- inclut la baisse des recettes de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les collectivités territoriales. Il y a aussi quelques dépenses nouvelles, dont l'augmentation de l'allocation de rentrée scolaire.

Ce projet de loi réduirait les recettes de l'État d'1,4 milliard. L'amélioration du solde apparaît significative, mais si l'on tient compte du prêt bilatéral à la Grèce -remplacé par une opération du FESF garantie par l'État-, elle n'est plus de 3,7 milliards d'euros mais de 500 millions. Voilà le seul chiffre susceptible d'être retenu par Eurostat.

Un point sera omniprésent dans nos débats à venir : l'évolution de la masse salariale et des effectifs de la fonction publique. Comment stabiliser à la fois les effectifs, la masse salariale et le pouvoir d'achat des fonctionnaires ? L'équation est insoluble. Le Gouvernement montre toutefois le bout de son nez : il prévoit de créer 1 524 ETP dans l'Éducation nationale et plusieurs milliers de postes de contractuels, mais ils sont financés en bonne partie par les crédits d'intervention du titre VI...

M. David Assouline.  - C'est normal : il ne s'agit pas de fonctionnaires.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est dire que la totalité de l'effort n'est pas dans les dépenses de personnel : le subterfuge est préoccupant. (Applaudissements à droite)

Vous préparez le pays à subir un quadruple choc anti-compétitivité, dans le cadre non d'une réforme fiscale mais d'un règlement de comptes idéologique, d'une revanche fiscale. (Vives exclamations à gauche)

M. David Assouline.  - Procureur et non président !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Le président de la République a ramené de Bruxelles le pacte de croissance comme un trophée ; pourtant, peu d'argent sera investi dans notre pays. Dans le même temps, vous mettez un coup d'arrêt brutal aux efforts d'allégement du coût du travail. Vous avez tort de mettre fin à la petite expérimentation relative à la TVA.

M. Michel Vergoz.  - Elle coûte 11 milliards !

M. David Assouline.  - ...supportés par les classes moyennes !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Et le pouvoir d'achat ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - L'empirisme en l'espèce aurait été bienvenu. Vous allez fragiliser le financement de l'économie. Certes, il faut lutter contre les abus, mais face aux difficultés des entreprises, peut-on les pénaliser fiscalement davantage ? (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame)

M. Michel Vergoz.  - Quel cynisme !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - La charge fiscale des entreprises s'accroît de 3 milliards d'euros, alors que la conjoncture est atone et que les normes comptables internationales se durcissent. Est-ce ainsi que vous améliorez leur compétitivité ? A quoi s'ajoute la taxation des banques et de l'épargne salariale. Les plans d'épargne retraite comportent pourtant surtout des actions françaises !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Que pense la commission des finances ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Laissez l'opposition s'exprimer, malgré vos réminiscences staliniennes. (Marques d'indignation à gauche ; applaudissements à droite)

M. Christian Bourquin.  - Où sont les tours de passe-passe que vous annonciez ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous m'avez mal écouté, cher collègue...

Le Gouvernement ampute le pouvoir d'achat des ménages en supprimant brutalement l'exonération fiscale et les déductions de charges sociales au titre des heures supplémentaires. Neuf millions de personnes gagnaient ainsi en moyenne 400 euros depuis 2007.

M. Jean-Vincent Placé.  - On était loin du treizième mois annoncé !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Seront ainsi pénalisés le BTP, l'hôtellerie-restauration ou encore les enseignants du secondaire... (Exclamations à gauche)

Pénaliser l'épargne retraite est une très mauvaise mesure pour le financement de l'économie. La fiscalité sur le patrimoine atteint des proportions que certains pourraient qualifier de confiscatoires...

En revanche, je suis favorable à l'assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus du patrimoine des non-résidents. Je n'ai pas changé d'avis depuis le 6 mai, contrairement à d'autres !

La contribution exceptionnelle sur la fortune, voilà bien un tour de passe-passe puisqu'on présente comme provisoire une mesure appelée à être pérennisée. Cette présentation fallacieuse -le Gouvernement a semble-t-il bien l'intention d'en rester au taux du barème existant avant la réforme de 201- sert à éviter le rétablissement d'un plafonnement pourtant introduit par le gouvernement Rocard -ou du bouclier fiscal tant décrié. C'est pourtant une question de droits : on ne saurait demander à des sujets fiscaux de payer plus que leurs revenus disponibles !

Espérons que le débat nous permettra d'approfondir nos convictions ! (Applaudissements à droite)

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Mme la présidente.  - Chers collègues, je vous invite au respect de votre temps de parole.

M. Jean-Vincent Placé.  - Je ne regrette nullement que la commission des finances soit présidée par un membre éminent de l'opposition. M. Marini, avec toute son intelligence et son talent, a exposé un point de vue qui n'est pas celui de la majorité de la commission des finances, soit. En revanche, qualifier Mme Borvo Cohen-Seat de stalinienne est scandaleux. (Mouvements divers) « Stalinien », cela veut dire quelque chose ! Vous êtes à droite, vous traitè-je pour autant de vichystes ? Il faut faire attention aux mots que l'on emploie...

Durant la mandature précédente, la dette de la France s'est accrue de moitié et les inégalités se sont creusées. Le temps est venu du redressement dans la justice. Des mesures coûteuses et inefficaces sont abrogées, les contribuables les mieux lotis sont davantage imposés : les écologistes les approuvent.

Cela ne suffira pas à nous sortir de la crise. Notre modèle de développement se heurte à l'épuisement des ressources. Or la fiscalité peut favoriser la transition écologique. Il faut commencer par supprimer les niches qui favorisent la destruction de l'environnement et coûtent plusieurs dizaines de milliards d'euros. Cette suppression n'a que des avantages : endiguer la pollution et la dégradation du climat, préserver la santé -les pathologies liées à la pollution de l'air coûtent 20 à 30 milliards-, éloigner l'impasse énergétique.

La transition écologique créerait en outre en France 1 million d'emplois nets, beaucoup plus qu'une relance keynésienne. En mobilisant moins la nature et le capital, on réduit la productivité apparente, c'est-à-dire qu'on a besoin de plus d'emplois. L'agriculture biologique demande 20 % d'emplois en plus que l'agriculture intensive. Isoler un logement crée, pour la même valeur ajoutée, près de quatre fois plus d'emplois, non délocalisables qui plus est, que l'importation de gaz... L'écologie n'est pas l'ennemie de l'emploi !

Cela dit, il faut du doigté et de la progressivité. Mais ne rien faire ou soutenir des filières condamnées ne sont pas des solutions d'avenir. J'espère un dialogue fructueux afin que la transition écologique vienne... maintenant ! (Applaudissements sur les bancs Verts et sur quelques bancs socialistes)

M. Jean Louis Masson.  - Trois points méritent réflexion. L'abrogation de la TVA sociale n'est pas une bonne chose. J'ai toujours défendu cette mesure, même quand le gouvernement Fillon, erreur profonde, n'en voulait pas. (M. Jean Arthuis applaudit) Elle assure la compétitivité de nos produits, contrairement à la CSG. Le gouvernement Fillon avait fini par comprendre. La supprimer est une nouvelle erreur et un mauvais coup porté à la France.

La défiscalisation des heures supplémentaires a servi à faire payer par l'État les conséquences des 35 heures, alors qu'il aurait fallu en finir avec celles-ci : M. Fillon est aussi responsable que Mme Aubry ! Le problème de compétitivité tient avant tout aux 35 heures (M. Francis Delattre approuve) Il aurait mieux valu réparer les deux erreurs à la fois ! Mais il est déjà utile de revenir sur l'exonération qui coûte un argent fou.

Enfin, l'AME, créée par la loi CMU de 1999, bénéficie à 220 000 personnes, et son coût ne cesse d'augmenter : 580 millions d'euros en 2011. Ses bénéficiaires abusent d'un système sans équivalent. L'Allemagne, l'Italie et la Grande-Bretagne ont limité la couverture aux soins les plus urgents. Est-il légitime de soigner gratuitement les clandestins, quand les Français et les étrangers en situation régulière payent une franchise de 50 euros dans le cadre de la CMU ? Cela va créer un appel d'air pour l'immigration illégale. (M. Philippe Marini, président de la commission des finances, approuve) Il faudrait la porter à 50 euros. (Marques d'approbation à droite)

Mme Éliane Assassi.  - Réactionnaire !

M. Christian Bourquin.  - Ce sont des êtres humains !

M. Jean Louis Masson.  - Ne puis-je m'exprimer ? Cette situation est aberrante.

M. Jean Arthuis.  - (Applaudissements sur les bancs UCR) La loi de finances rectificative qui vient au parlement de l'alternance est un événement attendu. Elle exprime la vision que le nouveau gouvernement entend mettre en oeuvre.

Votre texte, convenons-en, est assez classique. Bien sûr, il faut respecter la parole de la France : 4,5 % du PIB en 2012. Mais au fond, vous confirmez les hausses d'impôts décidées par le précédent gouvernement et vous supprimez les baisses. Vous détricotez l'ouvrage de vos prédécesseurs.

Grande absente de ce texte, la compétitivité. Rien pour la restaurer. Au contraire, vous supprimez ce que l'ancienne majorité avait fait, si tard et si peu : la TVA anti-compétitivité.

La France consomme 70 milliards de plus qu'elle ne produit.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - La balance commerciale était équilibrée en 2003 !

M. Jean Arthuis.  - Cette dégradation résulte de notre manque de compétitivité. Qu'attendrez-vous ? La fermeture de l'usine PSA d'Aulnay constitue pourtant un électrochoc. En dix ans, nous avons détruit 600 000 emplois industriels, la part de l'industrie est passée de 24 à 14 % dans le PIB.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - C'est l'échec de la droite !

M. Jean Arthuis.  - Bonne nouvelle : lors de la conférence sociale, le président de la République a commencé à reconnaître que le coût du travail pose problème et a dit l'importance de trouver de nouveaux modes de financement de la protection sociale. Toute la question est : dans quelle proportion réduire la part patronale et par quoi la remplacer ? Pour ma part, je l'évalue de 40 à 50 milliards. Les partenaires sociaux, a dit avec habileté M. Sapin, évoquent une hausse de la CSG pour financer ces allégements. C'est une illusion !

Déjà le ministre évoque une augmentation de cette contribution pour la dépendance. Cessons les procès en sorcellerie de la TVA anti-compétitivité. La TVA sociale est injuste ? N'y a-t-il pas pire injustice que de se voir refuser l'accès à l'emploi ? Le vrai pouvoir d'achat ne provient pas des subsides dont l'État dispose en empruntant, il découle du travail.

Puisse ce débat alimenter la réflexion sur ce sujet. Il faut en finir avec le déni de réalité et oser mettre en oeuvre cette réforme. Dans tous les pays dont le déficit public est supérieur à 55 % du PIB, la TVA s'élève à 25 %, sauf en France !

Cela nécessite de la pédagogie. L'emploi, dit M. Cahuzac, représente seulement des charges d'exploitation. Pour les entreprises qui transforment des approvisionnements, ce sont bien des charges.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Parlons plutôt des salaires !

M. Jean Arthuis.  - Pour notre compétitivité il faut baisser les charges sociales : en compensant avec la TVA, les consommateurs paieront un peu plus mais on créera de l'activité et de l'emploi en France. Si vous majorez la CSG, le joueur Zlatan Ibrahimovic ne paiera rien puisque ce sera pris en charge par son employeur !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Assimiler la situation de ce joueur à celle de nos concitoyens, c'est honteux !

M. Jean Arthuis.  - Cessons de croire que l'attentisme nous sortira de ce déclin inexorable ! La conjoncture risque de rendre l'été meurtrier.

L'Europe est en crise parce qu'elle n'assume pas sa gouvernance, parce qu'elle n'accepte pas le partage de sa souveraineté qui va avec la monnaie unique. Voilà les raisons pour lesquelles l'UCR ne votera pas ce pacte de renoncement ! (Applaudissements sur plusieurs bancs UCR et sur les bancs UMP)

M. Thierry Foucaud.  - J'ai écouté attentivement MM. Marini et Arthuis. Par les dernières élections, les Français ont manifesté leur rejet clair et net d'une politique qui ne profitait qu'aux riches et aux grands groupes.

Le bouclier fiscal et le dispositif très coûteux ISF-PME représentaient plus de 2,3 milliards pour 600 000 contribuables. Qui dit mieux ?

La fiscalité du patrimoine fut allégée par la trop bien nommée loi pour le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat. Vous avez réduit les droits sur les successions, favorisant ainsi les héritiers. M. Marini a bien peu parlé des salariés.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je me suis inquiété de la masse salariale de la fonction publique !

M. Thierry Foucaud.  - A quoi sert le crédit impôt-recherche (CIR) quand PSA licencie et commande à l'étranger les pièces que lui fournissait l'entreprise vosgienne TRW ? A quoi sert la réforme de la taxe professionnelle quand elle a fragilisé les ressources des collectivités territoriales sans stimuler l'emploi ? Le chômage a dépassé le seuil des 3 millions de chômeurs de catégorie A.

Autres hérésies fiscales et sociales, l'exonération des heures supplémentaires, la TVA dite sociale, le gel du barème de l'impôt sur les revenus. La défiscalisation des heures supplémentaires a servi à accentuer la flexibilité et à éviter les négociations salariales.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Une aubaine !

M. Thierry Foucaud.  - Elle aurait entraîné la destruction de 80 000 emplois. La TVA sociale est la réforme la plus emblématique du quinquennat Sarkozy : toujours moins à payer pour les entreprises, toujours plus pour les salariés !

Il est temps de tourner la page : la dette s'est aggravée de 600 milliards en cinq ans ! Le groupe CRC entend apporter son concours au changement. Dès l'automne, la majorité sénatoriale avait dégagé 30 milliards de ressources nouvelles. Dans toutes ces propositions, il y a du grain à moudre. Nous pouvons faire mieux que les 7,3 milliards de mesures nouvelles prévues par ce collectif. Nos amendements porteront sur l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les sociétés, l'ISF. Nous entendons libérer la loi de finances pour 2013 de quelques contraintes. L'évasion fiscale, d'après la commission d'enquête du Sénat, s'élèverait à 40, voire 50 milliards. Nous disposons, grâce à la Cour des comptes, des données nécessaires sur les heures supplémentaires et le CIR.

Le changement, oui, c'est maintenant et ici, par le débat.

Si nous souhaitons redresser les finances publiques, c'est parce que l'argent public ne doit plus soutenir seul l'activité. C'est parce que les inégalités sont de plus en plus criantes. Dans notre pays, il y a des inquiétudes, des attentes sociales qu'il faut entendre. Chômeurs, mal logés, parents inquiets, élus locaux courageux mais à la tâche difficile attendent de voir leurs aspirations traduites dans ce texte ! (Applaudissements sur les bancs CRC et sur plusieurs bancs socialistes)

M. Yvon Collin.  - Je me réjouis des grandes orientations de ce texte qui veut, par la justice fiscale, engager le redressement économique. Cela dit, la situation économique et budgétaire est toujours aussi difficile qu'il y a quelques mois. L'emballement de la dette nous oblige à réduire le déficit, à moins de mettre en péril notre souveraineté nationale.

L'article premier abroge la TVA sociale, dont l'impact aurait été, n'en déplaise à certains, quasiment nul. C'est la compétitivité hors prix qui nous fait surtout défaut. A nous de la développer pour jouer à armes égales avec l'Allemagne, dont les exportations ne cessent de progresser. Notre balance commerciale, faut-il le rappeler, accusait en 2011 un déficit de 70 milliards. La baisse du coût du travail ? Les entreprises auraient pu en profiter pour augmenter leurs marges plutôt que de baisser leurs prix. La baisse estimée était d'ailleurs trop réduite pour avoir un impact : 0,4 à 0,8 %. Enfin, les produits français ne peuvent pas remplacer tous les produits importés dans le panier de la ménagère. Le pouvoir d'achat, après une baisse de 0,1 % en 2011, reculera cette année, selon l'Insee, de 1,2 %, la plus forte chute depuis 1994. Il était donc urgent d'abroger cette TVA sociale. L'opposition crie au matraquage fiscal sur les classes moyennes, mais la définition de celles-ci fluctue selon les groupes...

J'ai toujours défendu la taxe sur les transactions financières, avant que le gouvernement Fillon en adopte une version affadie. Mme Bricq, notre excellente collègue devenue ministre, l'avait souligné. Il faut une assiette large et un taux faible, je présenterai des amendements.

Quelques mots des articles 11 à 15. Il nous appartient de renforcer la lutte contre l'optimisation fiscale en reprenant les propositions de la commission d'enquête du Sénat, qui vient de rendre son rapport.

Ce texte est un bon début ; le RDSE, dans sa grande majorité, le salue. (Applaudissements sur les bancs RDSE socialistes)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - (Applaudissements à droite) Je regrette que M. Cahuzac s'absente quand l'opposition prend la parole.

Ce texte donne le « la » de la nouvelle majorité. Ce « la » est dissonant. Le chef d'orchestre Ayrault peine à mettre en musique la partition du compositeur Hollande. Ce ne sont pas ceux que vous appelez les riches qui vont payer, ce sont les classes moyennes, et même populaires ! Pour vous, M. Sarkozy était le président des riches. M. Hollande est, lui, le président des impôts !

M. David Assouline.  - 25 taxes créées sous Sarkozy !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Vous faites tout l'effort sur les recettes, rien sur les dépenses. Comment ferez-vous en 2013 ?

La fiscalité sur les plus aisés sera confiscatoire, au-delà des 100 % des revenus. Cela pose d'ailleurs un problème de constitutionnalité. Notre taux de prélèvements obligatoires sera supérieur de dix points à celui de l'Allemagne. Où en est la convergence fiscale ?

Vous annoncez un effort sur les dépenses en 2014 : pourquoi attendre ? Vous me faites penser à La cigale et la fourmi de La Fontaine : les Français s'en trouveront fort dépourvus. Recrutements dans l'Éducation nationale, à la Justice et à l'Intérieur, augmentation de l'allocation de rentrée scolaire, extension incompréhensible d'une niche fiscale avec la baisse de la TVA sur le livre et le spectacle vivant....

M. David Assouline.  - L'exception culturelle, pour vous, c'est une niche ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - ...recrutements à Pôle emploi, emplois d'avenir... Quant aux fonctionnaires, le Premier président de la Cour des comptes, le socialiste Migaud, l'a dit : soit on augmente le point d'indice et on réduit les effectifs, soit on maintient les effectifs et on met en cause l'avancement.

Vous réduisez la TVA sur le livre, vous l'augmenterez bientôt sur la restauration. Ce secteur est-il moins utile au plan économique ?

En fait, vous cherchez à satisfaire votre électorat : fonctionnaires, enseignants, artistes, intellectuels de gauche.

On se croirait revenu au temps de 1981 : vous raisonnez par pure idéologie. Il a fallu deux ans alors avant le tournant de la rigueur. Aujourd'hui, ça va plus vite.

François Hollande parle beaucoup de la croissance à l'étranger mais ne fait rien en France pour la soutenir. Les premières semaines du Gouvernement ressemblent à une course automobile : vous laissez derrière vous la voiture grecque, dans le fossé, et les voitures italienne et espagnole. La voiture allemande, plus légère, est en tête quand la voiture française traîne. La ligne d'arrivée est connue : le redressement des finances publiques. Or la voiture française zigzague au gré des ordres contradictoires du président de la République.

Rien n'y fait, vous ne tenez pas la route. Les agences de notation pourraient rappeler à l'ordre le pilote Ayrault.

Le président de la République ne tient pas ses promesses : le traité de stabilité ne sera pas renégocié. On s'est contenté d'un traité pour la croissance de 55 milliards, dont rien ne reviendra à la France. La comparaison est parlante : le plan de relance du gouvernement Fillon, avec un total équivalent à 2 % du PIB, représentait le double de toutes les mesures de l'Union en faveur de la croissance. Je pourrais multiplier les exemples.

Vous avez appelé au changement en proférant des mensonges ! (Exclamations à gauche) Ce collectif présente la première facture.

M. David Assouline.  - Vous nous laissez une facture de 7 milliards !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Il n'apporte rien sur les conditions nécessaires à l'équilibre budgétaire. L'étude d'impact, c'est zéro !

Au mécanisme vertueux vous avez préféré le matraquage fiscal. C'est un signal désastreux adressé à tous ceux qui veulent investir en France. En vérité, vous sacrifiez quatre ans d'efforts sur l'autel de l'idéologie ! (Applaudissements à droite)

M. François Rebsamen.  - (Applaudissements à gauche) Ce débat est surprenant... Voilà quelques semaines que le président de la République est élu, l'Assemblée nationale installée et ceux qui ont été au pouvoir durant dix ans font pleuvoir les critiques. Un peu de modestie !

M. Alain Gournac.  - Ça commence mal !

M. François Rebsamen.  - M. Marini avait bien commencé mais la fin de son intervention était sentencieuse, et même désobligeante pour notre collègue, Mme Borvo.

Madame Des Esgaulx, vous oubliez tout de même le bilan que vous laissez ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et CRC) Quelle est la situation après dix ans de droite, cinq ans de sarkozysme : 1 million de chômeurs en plus, une croissance en berne, des déficits abyssaux ! (Applaudissements à gauche)

Nous, nous ne prenons pas des décisions à la légère. Vous avez découvert la compétitivité quelques semaines avant l'élection présidentielle en votant la TVA sociale ! (M. Jean-Pierre Sueur renchérit) Nous, on est pour le pouvoir d'achat ! Vous nous laissez une facture de plus de 7 milliards.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est le résultat de la moindre croissance, il s'impose à vous comme à nous !

M. François Rebsamen.  - Cette manière de se comporter après deux mois d'exercice n'est pas correcte. Un peu de modestie !

M. Francis Delattre.  - Nous sommes d'accord sur la modestie !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous plastronnerez moins dans six mois !

M. François Rebsamen.  - Nous allons rectifier, réparer, redresser. Et d'abord, dans la justice. Pendant cinq ans, certains ont beaucoup contribué pendant qu'aucun effort n'était demandé aux autres.

M. Francis Delattre.  - Et les heures supplémentaires ?

M. François Rebsamen.  - D'où la contribution exceptionnelle sur le patrimoine pour 2012...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - ...qui va durer !

M. François Rebsamen.  - ...le doublement de la taxe sur les transactions financières, la taxation du secteur pétrolier. Finalement, nos propositions lors de l'examen de la loi de finances initiale ont gain de cause.

Nous, nous voulons le pouvoir d'achat. Votre TVA sociale aurait coûté quelque 11 milliards aux Français ! Nous majorons l'allocation de rentrée scolaire de 25 %, nous donnons un léger coup de pouce au Smic. Un décret encadre les loyers, il profitera à 40 % des Français. Autre mesure, la baisse de la TVA sur le livre.

M. Francis Delattre.  - C'est le grand bleu !

M. François Rebsamen.  - Le redressement dans la justice, c'est aussi mettre fin aux effets d'aubaine. Ainsi la prise en charge, pour 35 millions par an, des frais de scolarité de tous les lycéens français à l'étranger, quels que soient les revenus de la famille. Une mesure purement électoraliste ! Nous mettons cette prise en charge sous condition de ressources.

Le redressement, c'est enfin l'exemplarité : la baisse de 30 % des indemnités du président de la République et du Premier ministre contraste avec la hausse de 180 % de 2007 ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Gournac.  - C'est faux !

Mme Fabienne Keller.  - Après le temps des douces promesses de campagne, le Gouvernement doit affronter la réalité. Vous prétendez vouloir faire des économies mais ne prévoyez que des hausses d'impôts. M. Hollande disait ne vouloir s'attaquer qu'aux plus riches, il n'en est rien.

La TVA compétitivité devait créer 100 000 emplois en trois ans, en basculant d'une fiscalité sur l'emploi à une autre pesant aussi sur les produits importés. Elle ne pesait pas sur les plus modestes puisque les produits alimentaires et quotidiens en étaient exclus. M. Cahuzac fait rire sur les bancs socialistes en parlant d'un gain de 0,4 % à 0,8 %, comme si ce n'était pas significatif pour les entreprises !

Que dire de la fin de l'exonération des heures supplémentaires ? En fait de la finance, des grands patrons ou des héritiers, c'est 9 millions de Français qui sont concernés. Catherine, aide-soignante à Strasbourg, a perçu 103 euros d'heures supplémentaires en juin pour deux astreintes du dimanche. Thierry est chef d'équipe paysagiste ; vu le regain d'activité saisonnier, il a perçu 570 euros en heures supplémentaires. Ils ne font pas partie des privilégiés, mais la loi réduit leur pouvoir d'achat ! On ne peut remplacer si facilement Thierry en embauchant car il a des compétences spécifiques.

Mme Christiane Demontès.  - Et les 3 millions de chômeurs ?

Mme Fabienne Keller.  - Votre gouvernement s'emploie à contrer toutes les mesures de justice sociales du précédent. Les salariés sont victimes de cette vengeance fiscale.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Vous n'êtes pas crédible !

Mme Fabienne Keller.  - L'intéressement accorde les intérêts des entreprises et des salariés, dans une logique gagnant-gagnant. Si l'entreprise réussit, les salariés en bénéficient pour 420 euros.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - C'est le pays des Bisounours !

Mme Fabienne Keller.  - Plus de 12 millions de Français en bénéficient. L'augmentation du forfait social instaure un système perdant-perdant.

On nous propose 7,2 milliards de prélèvements supplémentaires, sur les salariés surtout. Au Bourget, l'adversaire était la finance. Nous savons désormais quel est l'adversaire du président de la République et du Gouvernement : le monde des travailleurs. (Applaudissements à droite)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Ce n'est pas crédible !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Cette condescendance est scandaleuse !

Mme Aline Archimbaud.  - Des années durant, nous avons attendu un rétablissement de la justice fiscale et des finances publiques. Les mesures prévues par ce projet de loi de finances rectificative amorcent une réforme bienvenue. Je me réjouis de l'abrogation de la réforme de l'AME.

Les écologistes présenteront cependant quelques amendements. En ce qui concerne la protection sociale, il faut certes colmater l'urgence mais aussi penser au long terme. Le trou de la sécurité sociale résulte des maladies chroniques liées à notre mode de vie. Or beaucoup de niches fiscales nuisent à la santé publique. Est-il admissible que le gazole soit moins taxé que l'essence, ce qui crée un manque à gagner de 12 milliards ? L'OMS a confirmé que les particules fines émises par les moteurs diesel étaient cancérigènes. Il faut donc compter aussi le traitement des maladies respiratoires et les journées de travail perdues.

Tout ne peut être fait dans le collectif. Nous voterons ce texte, tout en étant déterminés à ce que cette mandature soit celle du bon sens. (Applaudissements sur les bancs écologistes et quelques bancs socialistes)

M. Aymeri de Montesquiou.  - Le Gouvernement a trouvé une situation très difficile dont il n'est pas responsable mais les solutions qu'il propose sont de sa responsabilité. Je n'exclus pas la possibilité que majorité et opposition s'accordent sur des mesures techniques. La Cour des comptes invite à réduire le déficit des comptes publics et aussi celui de compétitivité. Il s'agit de changer de cap. Pierre Mendès-France disait : « La seule question est de savoir si vous ferez prévaloir [ces vérités] aujourd'hui dans un esprit de patriotisme désintéressé ou bien si elles s'improviseront plus tard, après des souffrances nouvelles que nous pouvons éviter, que nous devons éviter ». Mes professeurs de sciences économiques Piètre et Marchai, l'un pro et l'autre antikeynésien, s'accordaient néanmoins sur une chose : il fallait une répartition équilibrée du PIB entre l'État, les entreprises et les ménages. Or notre État obèse phagocyte les deux autres acteurs et ce collectif aggrave encore les choses. Il faut faire des économies. Dans quel ministère supprimerez-vous des fonctionnaires ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Bonne question !

M. Aymeri de Montesquiou.  - En un temps où la croissance était plus forte qu'aujourd'hui, François Mitterrand le reconnaissait : trop d'impôt tue l'impôt. Or notre taux de prélèvement obligatoire approche des records mondiaux, avec 45 % du PIB. Il est juste de taxer les plus aisés, les conservateurs britanniques l'ont fait, mais votre contribution exceptionnelle frise l'impôt confiscatoire et enrichira les avocats fiscalistes - ceux-ci devraient avoir voté socialiste car ils ne sauraient mordre la main de qui va les nourrir... Les socialistes suédois ont supprimé leur ISF et leur impôt sur les successions, considérant que tout leur pays avait à profiter de la présence de créateurs, d'entrepreneurs, d'investisseurs, de citoyens riches. Et leur pays a retrouvé l'équilibre budgétaire.

Vous taxez la participation et l'intéressement, facteurs de cohésion sociale. En supprimant l'exonération des heures supplémentaires, seule amodiation à l'absurdité des 35 heures, comment voulez-vous favoriser la création de richesses ?

Pour diminuer les dépenses fiscales, il y aurait une solution douce : s'attaquer aux niches fiscales, dont l'existence même suffit à montrer que notre fiscalité est trop lourde. Il faut agir fort et vite, soit en suivant la Cour des comptes, soit en les baissant de façon uniforme afin d'éviter que ne se lèvent les lobbies pour défendre une à une chaque niche.

En accusant le groupe Peugeot de « mensonge », le président de la République crée un climat anxiogène qui inquiète et blesse les entrepreneurs, qu'ont aussi meurtris le ton et les mots utilisés par le ministre Montebourg. On crée ainsi, sur des bases erronées, un climat de suspicion qui nous ramène au temps de Jules Guesde. Les syndicats sont plus prudents ; ils comprennent la complexité de la situation et la bonne volonté de M. Varin. Si la famille Peugeot a touché 78 millions de dividendes, elle en a, par le biais d'une augmentation du capital, investi 133.

Les 35 heures, le retour à la retraite à 60 ans, l'illisibilité du code général des impôts sans cesse modifié, l'instabilité juridique... Que pensent nos partenaires de ces spécificités françaises qui sont autant de handicaps à notre attractivité, à notre compétitivité, à notre crédibilité ?

Selon le rapport Sartorius, l'écart de compétitivité entre la France et l'Allemagne atteint 38 %. Croyez-vous vraiment que le coût du travail n'y est pour rien ? Sous le gouvernement Fabius, la holding de Renault avait dû être délocalisée aux Pays-Bas...

Votre politique fiscale va à l'encontre de l'impératif de convergence européenne. Affranchissez-vous du dogmatisme, vous y gagnerez l'estime de cette partie de l'opposition dont l'unique souci est l'intérêt supérieur du pays. Le monde est un marché de plus en plus ouvert. Ce qu'offre la France aujourd'hui incite les Français à l'exil et décourage l'installation des étrangers. Rassurez tous ceux qui sont tentés par l'exode fiscal : supprimez cette taxation de 75 % au dessus du million de revenus.

Le Point titrait récemment : «Fini de rire ! ». Il s'adressait aussi à l'opposition, qui ne doit pas s'en tenir à la liturgie de s'opposer pour s'opposer mais devrait n'avoir d'autre préoccupation que l'intérêt du pays.

Gagner le pouvoir est une chose, l'exercer en est une autre. N'écoutez pas ceux qui voudront vous rappeler des promesses étrangères à la réalité.

Le radical que je suis conclura avec saint Augustin dans une tentative d'oecuménisme (sourires) : « Il vaut mieux suivre le bon chemin en boitant que le mauvais d'un pas ferme ». (Applaudissements au centre et à droite)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Quelle belle chute !

M. Henri de Raincourt.  - Il va se convertir !

Mme Michèle André.  - La situation de l'Espagne et l'annonce de la dégradation de la note de l'Allemagne et des Pays-Bas montrent que la réduction de la dette est un problème européen. La France doit respecter ses engagements -même si M. Sarkozy avait annoncé le contraire, autorisant toutes les dérives. La France ne peut agir seule et elle est responsable, peut-être plus que les autres, du bonheur des peuples européens. Malgré la stagnation de l'activité, 18 300 postes ont été créés dans le secteur marchand ce premier semestre 2012. Cette bonne nouvelle en cache peut-être une mauvaise : les entreprises pourraient réduire leurs effectifs pour rétablir leurs marges. Des plans sociaux ont été retardés jusqu'aux élections. Pour preuve, PSA. Déjà, Pôle emploi compte 4,9 millions d'inscrits.

Le rétablissement du service public de l'emploi est indispensable mais ne suffira pas. En revanche, la fin de l'exonération des heures supplémentaires n'a rien d'anecdotique : en période de chômage massif, la France était le seul pays à subventionner la destruction d'emplois.

Durant les Trente glorieuses, on n'avait pas besoin de subventionner les heures supplémentaires ; celles-ci étaient décidées par les entreprises parce qu'il fallait rapidement ajuster la quantité de travail à la demande de production. Dans la situation présente, alors que les destructions d'emplois se multiplient et que les capacités de production sont excédentaires au regard de la demande, la France s'était singularisée en finançant par des fonds publics un système de destruction d'emplois. Les entreprises allemandes, elles, ont réduit le temps de travail pendant que passait l'orage, pour l'augmenter une fois l'éclaircie venue. Certains pays ont supprimé les cotisations sur le supplément de salaire de l'heure supplémentaire, au motif de l'égalité en termes de droits sociaux entre une heure normale de travail et une heure supplémentaire. Le précédent gouvernement a créé, au contraire, une profonde inégalité entre l'heure de travail normale et l'heure supplémentaire. Intérimaires et employés en CDD ont fait les frais de cette exonération.

En termes de pouvoir d'achat, le gain de cette mesure était très inégalement réparti, concernant moins de 40 % des salariés, sachant que les salariés n'ont aucune prise sur la décision de faire ou non des heures supplémentaires. Au total, le pouvoir d'achat par unité de consommation n'a augmenté que de 0,1 % par an en moyenne entre 2007 et 2010, et a même reculé en 2011 et au premier trimestre 2012.

Je suis sûre que les Français comprendront le choix du Gouvernement. Qui parle de suppression des heures supplémentaires ? L'aide-soignante évoquée par Mme Keller pourra toujours en faire.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Mais elle touchera moins d'argent.

Mme Michèle André.  - Quand on touche un revenu, il est normal de payer un impôt dessus.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Que l'on ne paie que si l'on atteint un niveau de revenus qui rend imposable...

Mme Michèle André.  - Les Français qui ont élu François Hollande l'ont fait en connaissance de cause. Ils ont accepté de participer à l'effort collectif.

Les 4 milliards dépensés chaque année pour subventionner ces heures supplémentaires permettraient de financer entièrement 200 000 emplois de plus au Smic. Avec les 150 000 emplois détruits dans la fonction publique d'État, la RGPP a pesé de manière non négligeable sur le marché du travail, en particulier des jeunes diplômés. L'État pourrait subventionner des emplois aidés destinés à certaines catégories de population : les jeunes, les séniors, les chômeurs de longue durée. Ce n'est pas une panacée mais ce pourrait être utile dans la conjoncture actuelle. De nouveaux types de contrats aidés devraient être discutés, à destination des associations et aux publics sensibles.

C'est de l'énergie et de la confiance des travailleurs que dépendra le redressement de la France. (Applaudissements à gauche)

M. Dominique Watrin.  - Le précédent gouvernement ne pensait qu'à augmenter les avantages fiscaux des plus riches, pour faire ruisseler la richesse dans toute la société, pensait-il. Voilà qui a justifié une suite de mesures antisociales, qui ont favorisé le chômage et creusé les déficits. Les responsables de cette politique peuvent-ils se présenter aujourd'hui comme des défenseurs des travailleurs ?

L'exonération des heures supplémentaires créa un effet d'aubaine, qui a coûté 100 000 emplois et 3 milliards chaque année à l'État et à la sécurité sociale. Cette niche a été une trappe à bas salaires. Ce n'est pas ainsi que l'on répondra à la question, qui reste posée au nouveau gouvernement, du pouvoir d'achat. En vingt cinq ans, les actionnaires ont accru de 10 % la part de la richesse créée dans les entreprises qu'ils accaparent.

La suppression de la TVA antisociale, hold up contre les ménages, est bienvenue. Nous nous réjouissons que des mesures votées par le Sénat aient été reprises, par exemple, sur les parachutes dorés. Nous proposons d'autres mesures. Il faut, conformément à l'esprit du Conseil national de la Résistance, élargir l'assiette de financement de la sécurité sociale à toute la richesse produite par les entreprises.

Pour l'heure, il s'agit de corriger les excès du précédent gouvernement et de dégager des ressources. Nous répondons présents. (Applaudissements sur les bancs CRC et socialistes)

M. Christian Bourquin.  - Lors de l'examen de la loi de règlement, un diagnostic sombre a été établi : la dette publique s'approche du seuil de 90 %, au-delà duquel la croissance est menacée.

Pour 2012, le Gouvernement doit faire face à des recettes moindres que prévu et à des dépenses non financées. L'état du malade requiert une opération lourde, suivie d'une période de rééducation que nous souhaitons tous la plus brève possible.

Ce projet de loi de finances rectificative témoigne d'un changement de méthode : prudence et souci du dialogue social. La TVA sociale aurait dû rester dans les cartons de la fondation pour l'innovation politique. Un rapport commandé par Mme Lagarde alertait sur ses effets inflationnistes et le faible nombre d'emplois ainsi créés.

Le précédent quinquennat fut placé sous le signe de la frénésie législative. Je salue le temps de réflexion que prend ce gouvernement avant d'agir. Les plus fortunés ont bénéficié du bouclier fiscal et de la consolidation des niches fiscales. Le Conseil des prélèvements obligatoires a relevé que le produit de l'impôt sur la fortune baissait régulièrement depuis 2007 tandis que le patrimoine de ceux qui y étaient assujettis augmentait. Le gouvernement Fillon s'était résolu, certes tardivement mais c'était salutaire, à supprimer le bouclier fiscal -mais seulement en 2013 et, en contrepartie, il allégeait dès 2012 l'ISF. Toutes ces réformes et contre-réformes ont fini par rendre dégressif l'impôt sur la fortune.

Nous sommes soulagés que le président de la République se soit engagé à stabiliser les règles budgétaires. Ce gouvernement a le souci de la justice fiscale ; la justice, les Français y sont viscéralement attachés.

Je salue la suppression du ticket d'accès aux soins imposé aux bénéficiaires de l'aide médicale d'État. Le rapport commun de l'Igas et de l'IGF était clair : ce droit d'entrée faisait renoncer certains aux soins, ce qui coûterait in fine plus cher à la sécurité sociale. La décision de ce gouvernement revient à la loi éclairée de 24 vendémiaire de l'An II: « Tout malade, de droit ou non, qui sera sans ressources sera secouru ». Secourir des humains, quoi de plus normal !

La notion de service public était étrangère à l'ancienne majorité. Le rétablissement du 1 % versé par les collectivités territoriales au CNFPT est judicieux : faire appel à des prestataires privés pour former leurs fonctionnaires aurait couté plus cher. Le Gouvernement a su répondre rapidement à une demande émise lors de la conférence sociale.

Comme tous ici, je sais que la situation difficile. Mais je crois aux effets de cette nouvelle gouvernance et j'apporte le soutien du RDSE à ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Dominati.  - Je déplore que le rapporteur général se soit absenté et qu'aucun ministre de Bercy ne daigne occuper le banc du Gouvernement.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est l'époque des arbitrages budgétaires...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - C'est mépriser le Sénat !

M. Philippe Dominati.  - La session extraordinaire de 2007 avait permis d'aborder des sujets de fond : autonomie des universités, service minimum, loi Tepa... Ce gouvernement est-il déjà en vacances ? (Protestions à gauche, applaudissement à droite)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Ça vole haut !

M. Philippe Dominati.  - M. Cahuzac a semblé s'excuser tout à l'heure : le contexte international imposerait ce projet de loi. Le vrai inspirateur de ce texte, c'est l'ancien président de la République, de qui vous prenez systématiquement le contrepied !

M. David Assouline.  - Le changement !

M. Philippe Dominati.  - Vous prévoyez 7 milliards d'impôts nouveaux, aucune économie. Et vous parlez d'effort partagé entre recettes et dépenses ?

M. François Marc, rapporteur général.  - Caricature !

M. Philippe Dominati.  - Vous faites fi des recommandations de la Cour des comptes. Vous faites fi des observations de la Commission européenne. Votre cible ? L'économie réelle : l'effort sera supporté à 42 % par les entreprises, dans lesquelles vous tapez à tous les étages.

M. François Marc, rapporteur général.  - C'est votre déficit !

M. Philippe Dominati.  - On eût attendu une modernisation libérale de la gauche française, qui reste en fait fidèle au colbertisme : ainsi pour PSA et les emplois publics nouveaux. La rémunération du président de la République et du Premier ministre baissera mais il y a cinq ministres de plus.

La France est le pays d'Europe où les prélèvements obligatoires sont les plus élevés. Vous pourriez rendre le travail plus flexible : voilà le chemin de la compétitivité.

Je vous suivrai sur un point, et pas des moindres : l'article premier. Cela étonnera sans doute la majorité... mais la TVA sociale, je ne l'ai pas votée ! Baisser les prélèvements obligatoires va dans le bon sens, celui du libéralisme. Je m'en réjouis ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Corinne Bouchoux.  - (Applaudissements sur les bancs écologistes) J'interviendrai sur la mission « Culture ». La règle du un sur deux n'a pas pris en compte la spécificité du service public de l'Éducation nationale : former les citoyens de demain, forger le vivre ensemble. Depuis 2008, 70 600 postes y ont été supprimés, des classes et des écoles fermées dans les zones rurales et dans les quartiers. En Maine-et-Loire, 44 classes auraient été supprimées si nous n'étions pas intervenus. L'école ne peut être une variable d'ajustement budgétaire.

Les Verts se réjouissent que le président Hollande et son Gouvernement aient fait de la jeunesse leur priorité. Les générations futures sont un sujet de préoccupation constant de notre parti.

La prise en charge des frais de scolarité des lycéens à l'étranger était financée sur le budget de l'Ofpra. Raison de plus pour supprimer cette mesure inégalitaire.

Heureuse initiative de réduire la TVA sur le livre ! C'est un meilleur choix que la multiplication des niches ou le bouclier fiscal... Nous espérons que cela dégagera des ressources afin de bâtir une culture pour tous et par tous ! (Applaudissements sur les bancs écologistes et socialistes)

Mme Christiane Demontès.  - Ce collectif est l'occasion de dresser le bilan de dix ans de gouvernement de droite et de cinq ans de sarkozysme.

M. Henri de Raincourt.  -   Ça commence mal !

Mme Christiane Demontès.  - Nos comptes sociaux sont dans le rouge : 20,8 milliards en 2011, après le record historique de 28 milliards en 2010. Toutes les branches sont déficitaires, en particulier la vieillesse. En élisant François Mitterrand...

M. Albéric de Montgolfier.  - Vous n'êtes plus en 1981 !

Mme Christiane Demontès.  - ...François Hollande, les Français ont choisi le changement. Le redressement est une impérieuse nécessité. Ce collectif, qui en est la première étape, comporte des ressources supplémentaires de plus de 5 milliards en année pleine, de 1,5 milliard dès cette année, pour le régime général de la sécurité sociale. Premier acte emblématique, la suppression de la TVA dite sociale, qui aurait pesé sur ceux dont les fins de mois sont difficiles, sur ceux qui peinent à joindre les deux bouts. Mais peu vous importe...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Au contraire !

Mme Christiane Demontès.  - Nous risquions une contraction de la consommation et, donc, de la croissance sans gain de compétitivité. D'autant que M. Arthuis expliquait devant la commission des affaires sociales il y a quelques mois qu'une hausse de 1,6 % n'améliorerait pas la situation des entreprises.

M. Jean Arthuis.  - En effet.

Mme Christiane Demontès.  - La hausse de deux points des prélèvements sociaux sur les revenus du capital financera la majoration de l'allocation de rentrée scolaire et la branche vieillesse pour 400 millions en 2012 et 2,2 en année pleine -cette branche est la plus déficitaire. Au total, les ressources nouvelles atteindront 5,5 milliards d'euros en année pleine à partir de 2013, dont 4,5 pour la branche vieillesse. Ce qui ne suffira pas, néanmoins, à résorber son déficit structurel. En 2010, nous avions dénoncé une réforme injuste parce qu'elle était financée à 90 % par les revenus du travail, injuste pour les femmes dont les carrières sont interrompues, injuste pour les personnes qui ont commencé à travailler jeunes, injuste pour les travailleurs qui exercent des métiers pénibles. Sans changement, la branche vieillesse accusera un déficit cumulé de 90 milliards à l'horizon 2020. Tel est le bilan de la précédente majorité.

Ce texte constitue une première étape. En visant les revenus peu ou pas sollicités, il renoue avec l'équité. Sans justice ni solidarité, il n'y pas de réussite collective. Nous oeuvrons pour l'intérêt général ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Serge Dassault.  - (Applaudissements à droite) Le ton va changer... Je vous donnerai, si vous le permettez, quelques conseils. C'est l'avenir de tous les Français qui est en jeu, nous devons tous être solidaires. La catastrophe financière menace si vous continuez d'augmenter les dépenses et les impôts.

Le risque est réel de voir notre note dégradée, notre capacité à l'emprunt réduite. Nous sommes sous haute surveillance. Le moindre faux pas est fatal et vous en faites beaucoup...

Pourquoi persister dans l'erreur en augmentant l'ISF et l'impôt sur le revenu ? Votre projet de tranche à 75 % revient, si l'on ajoute la CSG à 15%, à une spoliation pure et simple de tous ceux qui créent des richesses et font vivre notre économie ; avec l'ISF, c'est même 120% ! Ils s'en iront.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très juste !

M. Serge Dassault.  - Au fond, vous allez tuer la poule aux oeufs d'or.

M. François Marc, rapporteur général.  - Ça fait dix ans que la droite est au pouvoir !

M. Serge Dassault.  - C'est vrai, mais vous continuez à augmenter la dette ! Nous empruntons et ne pourrons jamais rembourser. Les allégements de charges pour compenser les 35 heures coûtent 21 milliards ; revenir aux 39 heures rapporterait autant. Il faudrait également abroger la TVA réduite pour la restauration ou la rénovation de l'habitat, supprimer les emplois aidés qui sont peu efficaces. Les impôts qui rapportent le plus sont ceux qui ont une assiette large, comme la TVA. En porter le taux à 23 % rapporterait 24 milliards à l'État. Abandonnez ces impôts destructeurs, supprimez les 35 heures, relevez la TVA et vous gagnerez 45 milliards ! L'équilibre sera atteint bien avant 2017...

M. David Assouline.  - Temps dépassé ! Qu'il poursuive dans Le Figaro !

M. Serge Dassault.  - Empêcher de licencier ? C'est absurde ! Aucun chef d'entreprise n'a l'idée saugrenue d'abandonner son personnel pour faire remonter les cours de la bourse.

M. David Assouline.  - Le temps aussi, c'est de l'argent !

M. Serge Dassault.  - Il faut choisir entre égalitarisme, morale et efficacité : lorsqu'on est en faillite, c'est celle-ci qui importe. Nous sommes plus socialistes que vous, en fait !

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

M. Serge Dassault.  - Et puis vous allez tuer la participation...

La France est menacée. Travaillons ensemble, majorité et opposition, pour le bien de notre pays ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très bien !

M. Georges Patient.  - Ce collectif, s'il répond à l'urgence, envoie un signal positif aux outremers. En rupture avec l'attitude et les actes de l'ancien gouvernement, il ne réduit plus l'effort en faveur des ultramarins. La droite n'a eu de cesse de réduire les niches fiscales.

M. Henri de Raincourt.  - Attendez le budget pour 2013 !

M. Georges Patient.  - A cause de cette politique, l'activité a chuté et le chômage a explosé. Je me réjouis donc de l'engagement du président de la République pour nos territoires et du maintien des mesures de défiscalisation outre-mer.

De manière générale, nous approuvons l'effort de redressement dans la justice. La majoration de l'allocation de rentrée scolaire, alors qu'un quart de la population ultramarine vit sous le seuil de pauvreté, est bienvenue. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Les outremers bénéficieront de 50 postes sur ceux créés dans l'Éducation nationale.

La suppression du droit d'entrée de l'AME est très critiquée par la droite. Mais avec un taux d'immigration illégale de 20 % en Guyane, je sais combien l'AME est une question de santé publique. A mes collègues de droite, je signale que l'outre-mer ne se limite pas à l'hexagone. Il faudra aussi songer à réduire la taxe perçue lors de la délivrance ou du renouvellement des titres de séjour, qui a fortement augmenté sous le précédent gouvernement.

Je salue la suppression de la TVA sociale. Mais l'outre-mer l'a connue... Elle avait été instaurée en 1994 à la Réunion, en Guadeloupe et en Martinique. Les effets avaient été négatifs sur le pouvoir d'achat, inflationnistes. Certaines entreprises avaient profité de l'effet d'aubaine.

Monsieur le ministre, ce collectif ne traite pas de la lutte contre la vie chère, du logement, de la sécurité, des finances des collectivités territoriales. Ces questions seront traitées dans le budget pour 2013. Je serai vigilant : les collectivités territoriales de Guyane sont pénalisées par le plafonnement de leur dotation surperficiaire et le prélèvement sur l'octroi de mer. Une mission a d'ailleurs été diligentée sur ce sujet.

Pour conclure, je me réjouis des engagements de François Hollande pour l'outre-mer ! Je veillerai à ce qu'ils soient tenus. (Applaudissements à gauche)

M. Louis Nègre.  - Ce projet de loi de finances rectificative s'inscrit dans un environnement alarmant : la notation de la France a été dégradée, les pays du sud sont en soins palliatifs, la maison Europe est en feu. Gardons-nous d'une attitude manichéenne, nous sommes tous dans la même barque. Vous ne rencontrerez donc pas d'opposition particulière de notre part quand vous appelez les compagnies pétrolières et les banques à contribuer à la réduction du déficit de l'État. Mais dans d'autres domaines, vos partis-pris idéologiques vous font faire fausse route. La Cour des comptes, présidée par le socialiste Didier Migaud...

M. François Marc, rapporteur général.  - Je signale qu'il a prêté serment.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il est de moins en moins socialiste !

M. Louis Nègre.  - ...donne un satisfecit au précédent gouvernement (M. François Marc, rapporteur général, le conteste) qui a amélioré le solde budgétaire. Il invite à maîtriser les dépenses. Hélas, votre politique n'est pas la même que la nôtre.

M. Alain Néri.  - C'est clair !

M. Louis Nègre.  - Au lieu de réduire la dépense, vous augmentez l'impôt. C'est une attaque en règle contre les classes moyennes ! La suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires touchera 9 millions de Français, qui gagnent en moyenne 1 500 euros par mois.

M. Alain Néri.  - Si vous aviez augmenté le Smic, nous n'en serions pas là !

M. Louis Nègre.  - Mais je suis mauvaise langue. Vous êtes cohérents. Pour le président de la République, la richesse commence à 4 000 euros par mois... Après plus de 7 milliards d'impôts nouveaux cette année, vous en prévoyez 30 l'an prochain. Vous avez aimé 2012 ? Vous adorerez 2013 ! Nous combattons résolument cette entreprise de démantèlement, ces attaques contre la France qui travaille, ce matraquage des classes moyennes.

Pour conclure, je reprendrai le titre de Libération du 3 juillet dernier : « Budget 2013, bonjour les dégâts ! ». (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Pierre Caffet.  - Chômage massif, déficit abyssal, balance commerciale gravement déficitaire, voilà la situation. La crise n'explique pas tout, loin de là. Depuis 2007, le déficit structurel n'a jamais été inférieur à 3,3 % du PIB : voilà qui en dit long sur l'efficacité économique des précédents Gouvernements de droite...

Il était temps de commencer le redressement du pays. Non, ce collectif ne sert pas à rien, madame Des Esgaulx, il sert à respecter les engagements de la France avec pour boussole la justice et le soutien à la croissance.

L'article 19 supprime la TVA sociale : voilà 11 milliards rendus aux ménages. Cet impôt est l'un des plus injustes puisqu'il touche davantage les plus modestes. Le transfert des entreprises vers les ménages était le meilleur moyen de rendre la croissance plus atone encore. D'éminents membres de l'ancienne majorité le reconnaissaient d'ailleurs...

L'article 2 revient sur la défiscalisation des heures supplémentaires, une mesure totalement inepte en temps de chômage de masse. L'Allemagne finançait la réduction du temps de travail et le chômage partiel quand la France consacrait, en s'endettant, 5 milliards d'euros à un dispositif qui détruisait des emplois : 40 000 selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

De plus, les gains des bénéficiaires des heures supplémentaires sont annulés par les pertes de ceux qui se retrouvent au chômage ou ne peuvent accéder au marché du travail. La fiscalisation est largement compensée par l'abrogation de la TVA sociale, l'encadrement des loyers, la hausse de l'allocation de rentrée scolaire et la baisse de la TVA sur le livre.

Ce collectif reprend des mesures que la majorité sénatoriale avait défendues en février. Nous les soutiendrons avec conviction pour un redressement dans la justice ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Pierre Charon.  - J'ai abordé la lecture de ce texte sans idée préconçue. J'espérais un budget normal, soucieux des conséquences pour les générations futures. Or je n'y ai trouvé que non-sens, effets de manche et aberrations économiques. Vous y détricotez avec acharnement tout ce que nous avons fait pour la croissance, l'emploi et la compétitivité. Le président Sarkozy s'inspirait de l'Allemagne et non de vos amis socialistes espagnols et grecs -battus depuis.

M. David Assouline.  - Il faut savoir. Vous les citez en exemple !

M. Pierre Charon.  - L'idéologie vous aveugle, vous emmenez la France sur le chemin de la banqueroute. Là où il faut être rigoureux dans la dépense et vigilant avec l'impôt, vous faites l'inverse. Les riches paieront, dites-vous en bons élèves socialistes. Votre obsession les fera fuir.

M. Alain Néri.  - Ils sont déjà partis !

M. Pierre Charon.  - Ce que vous proposez, en définitive, c'est de travailler plus pour gagner moins. Votre mépris pour l'argent gagné est d'un autre âge, ce collectif en est l'expression la plus archaïque.

Votre Gouvernement souffle le chaud et le froid. Le lundi, on rase gratis ; le mardi, c'est la fessée fiscale ! Il me rappelle ce poulpe mou et tentaculaire que l'on voit dans les documentaires du commandant Cousteau, qui envoie de l'encre pour mieux se dérober...

M. Jean-Vincent Placé.  - Quel poète !

M. Pierre Charon.  - Arrêtez de vous égarez dans vos dogmes ! Le président Mao a dit : « la bouse de vache est plus utile que les dogmes, elle peut servir d'engrais ! » (Applaudissements amusés sur les bancs UMP)

M. Claude Haut.  - En tant que co-rapporteur de la mission « Enseignement scolaire », j'apprécie que le Gouvernement ait fait de l'éducation une de ses priorités, avec la jeunesse. Le premier acte budgétaire de la nouvelle majorité qu'est ce collectif traduit l'engagement de créer 60 000 postes dans l'éducation nationale. La situation dont nous héritons est particulièrement grave. Il faut parer au plus pressé pour assurer la rentrée 2012 dans des conditions à peu près normales.

Victor Hugo disait : « l'égalité a un organe, c'est l'instruction gratuite et obligatoire ».

M. François Marc, rapporteur général.  - Très bien !

M. Claude Haut.  - L'effort de financement global en faveur de l'éducation a été réduit d'un point de PIB en dix ans -avec une diminution des effectifs à contre-courant des besoins, qui a durement pénalisé les zones les plus défavorisées. A la rentrée 2012, il y aura davantage de professeurs des écoles, de CPE, d'AVS. L'égalité des chances, voilà le but que nous nous sommes fixé pour répondre à l'impératif de fraternité. Le Gouvernement tient en outre sa promesse de rétablir la formation initiale des enseignants. Ces dépenses nouvelles, qui représentent un peu plus d'un millième du déficit, seront financées par des redéploiements de crédits. Cette politique est soutenable.

Je me réjouis de la revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire et du rétablissement de la formation initiale des enseignants. Comme tout métier, enseigner s'apprend. L'heure est à la réforme et à la justice. Trop de jeunes ont été abandonnés sur la route. Je suis fier d'appartenir à cette majorité qui entend lutter contre la fracture scolaire et les inégalités sociales ! (Applaudissements à gauche)

M. Robert del Picchia.  - Je suis le premier sénateur des Français de l'étranger à intervenir. Vous ne serez donc pas surpris que j'évoque la prise en charge des frais de scolarité des lycéens français à l'étranger et les contributions supplémentaires demandées aux non-résidents.

Je suis l'un des pères de cette mesure tant décriée. A l'époque, le sénateur Jean-Pierre Bayle, homonyme de notre président, acceptait d'en discuter... Rappelons qu'un élève en France coûte trois fois plus cher qu'un élève à l'étranger. Le coût de la gratuité totale, de la maternelle au lycée, est moins élevé que la seule augmentation de l'allocation de rentrée scolaire. Certes, la nouvelle majorité n'a jamais caché son intention de supprimer le dispositif.

M. David Assouline.  - Les bourses ne sont pas supprimées.

M. Robert del Picchia.  - Elle fait preuve de cohérence. Mais je suis surpris de la brutalité de la mesure, en période de vacances, juste avant la rentrée. Les familles aux revenus intermédiaires seront mises en difficulté. On risque de ne plus voir dans nos lycées que les enfants boursiers, ceux des familles françaises étrangères aisées. En tant que ministre de la République, il vous appartient d'assurer la continuité de l'État en repoussant la mesure à la rentrée 2013 ou, au moins, à janvier prochain. En outre, l'Assemblée des Français de l'étranger n'a pas été consultée.

Concernant l'article 25, je rappelle que les Français de l'étranger ne sont pas tous des exilés fiscaux. S'il s'agit d'un nouvel impôt, dites-le ! Si c'est une charge sociale, pourquoi ne bénéficieraient-ils pas eux aussi de la carte Vitale ?

Une pétition circule à l'étranger au sujet de la prise en charge. M. Charon a cité Victor Hugo...

M. David Assouline.  - Un exilé politique !

M. Robert del Picchia.  - Il aurait défendu mieux que moi cette mesure... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. David Assouline.  - Je me réjouis que dans un contexte difficile, le Gouvernement n'ait pas sacrifié la culture, trop souvent considérée comme un supplément d'âme, et qu'il propose de ramener la TVA sur le livre à 5,5 %. J'ai été ébahi par le manque d'humilité du président Marini, qui a passé cinq ans à défendre une politique qui a produit un déficit commercial de 70 milliards, une augmentation de 600 milliards du déficit !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Relisez, c'est plus compliqué que ça !

M. David Assouline.  - La culture est là pour qu'en période difficile, il y ait des moments de communion, de réflexion et de connaissance, pour que l'on tienne le coup. Je défendrai un amendement sur les cessions gratuites de fréquence car là, il y a de l'argent à trouver.

La culture est un facteur de développement économique dans des villes en difficulté : voyez Berlin, Bilbao, Lille, Nantes !

M. Michel Berson.  - Et Lyon !

M. Christian Cambon.  - Pour 1,5 point de TVA, ça fait beaucoup !

M. David Assouline.  - Le prochain budget devra lui aussi préserver la culture. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ah ! La discussion budgétaire a commencé !

Mme Élisabeth Lamure.  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je me concentrerai sur le problème des heures supplémentaires. Votre choix est idéologique. Entreprises, salariés, agents des collectivités sont inquiets.

La France est confrontée au problème du coût du travail et du manque de compétitivité. Croyez-vous que le travail se partage en morceaux ? La demande des entreprises est soumise à des facteurs divers et elles ont besoin d'avoir recours aux heures supplémentaires.

J'ai visité une PME de ma circonscription. Son dirigeant propose à ses ouvriers qui demandent un acompte, ou qui font l'objet d'une saisie sur salaires, de faire des heures supplémentaires pour éviter de perdre pied. Ce ne sera plus possible. Plus de 8 millions de salariés seront touchés, notamment les plus modestes : 30 % des ménages font leurs courses en calculant à l'euro près. Votre mesure est une erreur économique et sociale. Vous portez un coup dur à la France qui travaille ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Claudine Lepage.  - Les Français de l'étranger ont désormais onze députés, une ministre déléguée et plusieurs dispositions de ce projet de loi de finances rectificative les concernent.

François Hollande s'était engagé à remplacer la prise en charge des frais de scolarité par des bourses sur critères sociaux : cette promesse est tenue. L'article 30 abroge cette prise en charge mais les crédits sont réorientés vers les bourses.

Beaucoup de familles n'avaient pas envisagé un changement aussi rapide mais un accompagnement exceptionnel est prévu. Il faudra revoir les critères d'attribution des bourses, augmenter leur financement et subventionner suffisamment l'AEPE.

Je me félicite de l'assujettissement des revenus immobiliers des non-résidents aux prélèvements sociaux car il faut taxer les revenus du capital comme ceux du travail. Mais veillons au cas de ceux qui ont gardé une résidence en France, par fidélité à leurs racines : ils ont droit non à un traitement particulier mais à l'égalité dans tous les domaines : déductibilité des charges, imposition des plus-values : d'où notre amendement que je proposerai avec MM. Yung et Leconte. La non-rétroactivité est primordiale. Les Français de l'étranger ne sont pas tous des nantis. Donnons-leur le temps de budgétiser cette nouvelle charge. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Christophe-André Frassa.  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Les Français de l'étranger sont gâtés par le PLFR : extension des prélèvements sociaux aux non-résidents, suppression de la prise en charge des frais de scolarité. Les instances européennes sont vigilantes. Pourquoi quelqu'un qui ne bénéficie en rien du système français de protection sociale paierait-il pour elle ? Quant à l'imposition des plus values, elle touchera les propriétaires immobiliers, par exemple britanniques, qui seront plus imposés en France que dans leur pays : belle incitation à s'installer chez nous...

Quant à la suppression de la prise en charge des frais de scolarité, vous avez agi brutalement, sans concertation. Vous avez assez reproché au président Sarkozy sa prétendue précipitation ! Au milieu de l'été, vous supprimez cette mesure et mettez les familles en difficulté. M. Marc Villard, candidat socialiste aux élections législatives, a lui-même fait part de son mécontentement, et Mme Narassiguin a réussi à se faire élire en promettant que la mesure ne s'appliquerait qu'en 2013...

Il faut reporter cette mesure. Les 12 milliards d'euros récupérés doivent être reversés à l'AEPE et non au programme 151. Pourrez-vous, monsieur le ministre, en prendre l'engagement devant le Sénat ?

Vous évincez les classes moyennes, trop riches pour bénéficier des bourses et trop pauvres pour payer les frais de scolarité. De grâce, ne parlez pas d'égalité et de justice ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jacques-Bernard Magner.  - Pendant cinq ans, l'école a servi de variable d'ajustement budgétaire : suppression de postes, de la formation initiale des enseignants, des Rased.... Le taux d'encadrement en primaire est le plus mauvais de l'OCDE.

François Hollande a promis que l'école serait une priorité de son quinquennat. Il faut donc dès maintenant revenir sur les suppressions prévues par le précédent gouvernement pour la prochaine rentrée. Priorité est donnée au premier degré, avec 1 000 postes d'enseignants, 100 conseillers d'éducation, 1 500 auxiliaires de vie scolaire, etc. L'enseignement agricole n'a pas été oublié : il est doté de 50 postes supplémentaires.

Dans l'attente de la réforme de la formation des enseignants, une décharge sera accordée aux stagiaires.

La répartition des nouveaux postes est fonction du taux d'encadrement et des difficultés éducatives des territoires.

De grands chantiers vont s'ouvrir -formation, carte scolaire...- et une concertation aura lieu avec enseignants et associations.

Dorénavant, le Gouvernement est aux côtés des enseignants et de tous ceux qui tiennent aux valeurs laïques de l'école de la République. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Je vous prie d'excuser mon absence durant une partie de l'après-midi : j'ai dû assister aux derniers arbitrages budgétaires.

M. le rapporteur général a souligné la nécessité de rétablir notre crédibilité budgétaire. Le Gouvernement est déterminé à maîtriser la dépense : le projet de loi respecte le plafond fixé par l'ancienne majorité, y compris le plafond diminué de 1,2 milliard du premier collectif budgétaire. Il tient donc la dépense aussi bien que l'ancienne majorité l'avait prévu.

Le Gouvernement est favorable aux mesures que vous proposez sur la révision des valeurs locatives professionnelles.

M. Daudigny a évoqué la nécessité de redresser les comptes sociaux. Le transfert de la dette sociale à la Cades et la prolongation de cette dernière revenaient à reporter la charge sur les générations futures.

Mme Cartron a souligné que nous ne créons pas seulement des postes d'enseignements dans l'Éducation nationale. Merci à M. Assouline d'avoir rappelé nos choix culturels.

Monsieur le président Marini, vous savez bien que les postes créés dans l'Éducation nationale en 2012 sont financés par redéploiement.

Je vous assure que la contribution supplémentaire sur la fortune sera exceptionnelle : il faudra réformer l'ISF. Alléger de 2 milliards l'ISF pour ensuite augmenter la CSG sur les salariés, la taxe sur les mutuelles, etc. : ce fut bien audacieux.

M. de Raincourt, audacieusement encore, affirme que cette mesure était gagée mais le rendement de l'exit tax et la taxation des trusts étaient bien aléatoires. D'autant que, lors de mon arrivée à Bercy, les instructions fiscales n'étaient pas prises.

La réforme de l'ISF fut en partie financée par le relèvement des droits de partage, qui pèsent sur tous les couples qui divorcent et tous ceux qui sortent d'une indivision.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous ne proposez pas de revenir sur cette hausse !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Attendez les prochaines discussions budgétaires.

Le spread avec l'Allemagne est de 100 points de base : nous avons connu bien pire. Peut-on rendre le nouveau gouvernement responsable de l'état du pays ?

M. Placé a justement insisté sur l'apport que représenterait la suppression des niches nuisibles à l'environnement.

M. Arthuis plaide pour le basculement du financement de la protection sociale sur la consommation des ménages. Je salue son honnêteté intellectuelle. Encore faudrait-il que la croissance française dépende moins de la consommation ! Comparer la France et l'Allemagne, en la matière, est illusoire.

M. Foucaud a justement lié l'explosion de la dette aux faveurs accordées aux privilégiés. Certes, la crise a joué son rôle. Mais, prétendre que la politique fiscale du précédent gouvernement n'est nullement responsable du creusement des déficits n'est pas raisonnable. Le paquet fiscal de 2007 a coûté entre 10 et 12 milliards d'euros, un peu moins qu'attendu, mais il était financé exclusivement par l'emprunt, c'est-à-dire par la dette. C'est là son péché originel.

Les mesures que nous proposons sont au contraire financées intégralement, du premier au dernier euro. La bonne foi commande de le reconnaître.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Ne mettez pas en cause ma bonne foi. Les contraintes n'étaient pas les mêmes !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Monsieur Dassault, n'opposons pas égalité morale et efficacité. Une TVA à 23 % ? Ce serait rude. Les allégements de charges sur les bas salaires, qui donnent lieu à un consensus, sont nécessaires pour lutter contre le chômage.

Monsieur Patient, merci d'avoir souligné notre effort de justice vis-à-vis de l'outre-mer. M. Collin appelle à une taxe sur les transactions financières plus ambitieuse : il a raison. La précédente majorité s'est contentée de rétablir l'impôt de bourse, ou peu s'en faut. Nous proposons d'en doubler le taux, pour atteindre le rendement précédemment escompté.

Mme Des Esgaulx a exprimé sa défiance : j'espère la rassurer. Je suggère, pour ce débat, de reprendre la devise de la maison d'Orange : « Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour espérer ».

J'ai apprécié la courtoisie de M. de Montesquiou, et sa citation de Saint Augustin : je le reprends ainsi à mon compte en disant qu'il faut emprunter le bon chemin d'un pas ferme. Je comprends l'intervention de M. Watrin et je serais enclin à accepter son amendement.

Monsieur Bourquin, merci de votre soutien à notre méthode. Oui, elle est nouvelle. L'hypothèse de croissance peut faire consensus, me semble-t-il. Mme André a décrit le contexte difficile de ce débat. Oui, la France doit respecter sa parole.

Madame Keller, les heures supplémentaires resteront payées au-delà du tarif normal. En revanche, l'exonération a échoué à endiguer le chômage : plus 1 million de chômeurs ! Elle n'a pas augmenté le nombre d'heures supplémentaires.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Peut-être aurait-il diminué sans elle ! Ne refaites pas l'histoire quand ça vous arrange.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Est-ce d'ailleurs à la puissance publique de rémunérer le travail ? Certes, c'était l'objet de la prime pour l'emploi. Mais on ne saurait financer de telles mesures par l'emprunt et les faire payer aux générations futures.

Mme Archimbaud partage notre souci de justice fiscale et de rétablissement budgétaire. Elle appelle à revoir les niches fiscales « grises » : le Gouvernement en débattra sincèrement.

M. Nègre a prétendu que la Cour des comptes avait adressé un satisfecit au précédent gouvernement. J'ai dit en quoi consistait réellement la baisse du déficit affichée par le gouvernement Fillon... La Cour écrit que la seule mesure structurelle fut une hausse d'impôts ! C'est ainsi que ses rapports nourrissent la réflexion...

M. Rebsamen a rappelé le bilan qu'il a qualifié de catastrophique de l'ancienne majorité. Je le remercie de son soutien.

Ce collectif est sincère...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous ne m'avez pas répondu sur la présentation des chiffres !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Je suis désolé de vous avoir déçu. J'essaierai d'être plus clair. Il est aussi responsable : les mesures nouvelles d'ampleur limitée sont financées.

Quant à la prise en charge des frais de scolarité, elle consommait plus de 25 % de crédits de la mission. Ceux-ci ne seront pas réduits, comme le président de la République en a pris l'engagement.

L'assujettissement à la CSG et à la CRDS des revenus des non-résidents repose sur le principe de territorialité, au nom duquel les Français de l'étranger ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. Veut-on inverser la règle ?

M. Charon s'est singularisé par son courage lors des élections sénatoriales... J'ai été déçu par la chute de son intervention. Il oublie que la droite a voté 15 milliards d'impôts supplémentaires pour 2012 ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - N'y revenez pas !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Je suppose donc que les mêmes ont critiqué le gouvernement Fillon... Le gel du barème de l'impôt sur le revenu pèse sur beaucoup de ménages. Le pouvoir d'achat n'était pas la principale préoccupation de la précédente majorité !

Je reviendrai sur tous ces points au cours de la discussion des articles. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous avons tout notre temps pour aborder le fond et nous le prendrons. Si l'on veut un débat serein, il faut peut-être l'aborder avec un ton moins agressif, sur un rythme moins intense... Je donne rendez-vous aux membres de la commission des finances pour examiner les amendements : nous n'aurons probablement pas le temps d'en venir à bout.

La discussion générale est close.