Loi de finances rectificative pour 2012 (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012.

Discussion générale

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - La commission mixte paritaire, sans surprise, est parvenue à un accord. Les deux assemblées ont examiné ce texte dans le même état d'esprit, en une quarantaine d'heures de débat chacune.

L'objectif était de nous donner les moyens d'atteindre notre objectif de solde public pour 2012, tout en engageant une nouvelle politique fiscale, inspirée par les orientations qui ont été tranchées par les élections.

La commission mixte paritaire a validé dans la rédaction issue du Sénat les quatre articles qui reviennent sur les symboles de l'ancienne politique fiscale : les heures supplémentaires, la TVA sociale, les droits de mutation à titre gratuit, l'impôt sur la fortune.

Comme dans toute commission mixte paritaire qui réussit, nous avons fait des compromis. Nous avons accepté de ne pas supprimer dès aujourd'hui les ambassadeurs itinérants mais d'attendre le rapport qui nous sera remis dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.

Mme Nathalie Goulet.  - Ce n'est que partie remise !

M. François Marc, rapporteur général.  - Nous avons préservé l'extension de l'assiette de la taxe sur les transactions financières, adoptée à l'initiative du groupe CRC, ainsi que l'augmentation des taux des prélèvements sur les retraites chapeau, issue également du groupe CRC. La commission mixte paritaire a également retenu l'augmentation des taux de la taxe sur les logements souhaitée par le RDSE, de même que la création d'une taxe sur les cessions de fréquences voulue par le groupe socialiste, tout comme l'exonération de hausse du taux du forfait social accordée aux sociétés coopératives ouvrières de production. L'abaissement, suggéré par la commission des affaires sociales, du seuil de déclenchement de l'assujettissement aux prélèvements sociaux des parachutes dorés, est acquis. L'amendement Fortassin a été conservé et une fraction du produit de la redevance sur les nouvelles concessions hydroélectriques sera désormais affectée aux communes.

La commission des finances a apporté sa contribution au texte définitif sur la situation de la zone euro : avant le dépôt du prochain projet de loi de finances, nous obtiendrons un état global des objectifs de stabilité mis en place depuis 2010. Nous obtiendrons aussi un rapport sur une éventuelle extension de la taxe sur les risques systémiques, taxe instituée à la suite du rapport Lepetit demandé par la commission des finances du Sénat.

Les initiatives que j'ai proposées à la commission, complétées par celles de M. Jarlier, contribueront à la solution des difficultés concrètes auxquelles sont confrontées des intercommunalités, et sera enfin engagée la révision des valeurs locatives professionnelles

M. Jean-Claude Frécon.  - Très bien !

M. Philippe Dallier.  - C'est bien lent.

M. Didier Boulaud.  - Mais c'est le changement.

M. François Marc, rapporteur général.  - Nous nous retrouverons cet automne pour un programme financier fourni, avec une loi de programmation des finances publiques et les deux lois financières pour 2013 avec lesquelles nous devrons engager une très forte réduction du déficit public, avec 1,5 point de PIB, ce qui est considérable.

Nous serons à vos côtés, monsieur le ministre, dans cette entreprise. Pour l'heure, j'appelle nos collègues à voter les conclusions de la CMP. (Applaudissements à gauche)

M. Richard Yung.  - Avec plaisir !

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - Le texte élaboré par la commission mixte paritaire satisfait pleinement le Gouvernement, moyennant quelques amendements rédactionnels. Ainsi terminons-nous la toute première étape du redressement de nos finances publiques. Vous avez rappelé nos prochains rendez-vous : la loi de programmation des finances publiques et le projet de loi de finances pour 2013.

Votre travail aura enrichi le projet de loi du Gouvernement sans en modifier l'équilibre. L'article 8, adopté sur la proposition du président Marini, prend en compte la situation des raffineries en difficulté. Plusieurs articles additionnels, notamment sur les retraites chapeau et les parachutes dorés, la révision des valeurs locatives, sont dus au Sénat. Je me réjouis de l'article 27 sur les Scop, dont la rédaction a été proposée par Mme Espagnac.

Je vous remercie pour vos contributions, en particulier le président de la commission et le rapporteur général, ainsi que tous les sénateurs, y compris ceux de l'opposition dont la vigueur contribue à la vitalité du débat démocratique. C'est grâce à votre travail à tous que ce projet de loi est satisfaisant. Merci aux parlementaires de la majorité pour leur soutien à ce collectif, qui nous permet de tenir les engagements du président de la République, en particulier la suppression de la TVA dite sociale.

Je conclus en vous souhaitant d'excellentes vacances. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin .  - Ce deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2012 répond à l'urgence d'assurer l'équilibre de nos comptes publics. Ce sont 7,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires, conformément aux suggestions de la Cour des comptes, qui viendront les abonder. Son Premier président a insisté sur l'urgence qu'il y avait à agir, pour notre pays. Ne remettons pas à demain ce que nous pouvons faire dès aujourd'hui.

M. François Marc, rapporteur général.  - Très bien !

M. François Fortassin.  - Trouver des recettes supplémentaires n'est pas une tâche facile Il faut répartir équitablement l'effort entre les Français, le précédent gouvernement y a échoué. Le vôtre doit réussir. Ce projet de loi y pourvoit.

M. Roger Karoutchi.  - Voyons !

M. François Fortassin.  - Il faut rétablir nos comptes publics. Après les errements du passé, il faut restaurer la confiance des Français.

M. Philippe Dallier.  - Tout en finesse !

M. Roger Karoutchi.  - Un homme de qualité comme vous !

M. François Fortassin.  - La justice fiscale prévaut, après les cadeaux fiscaux aux privilégiés.

J'attire votre attention, monsieur le ministre, sur l'inquiétude de nos concitoyens, que certains ici s'emploient à alimenter. (M. Roger Karoutchi s'exclame). Selon d'aucuns, le Gouvernement pénaliserait non les plus aisés mais les classes moyennes. Bien sûr, celles-ci sont préservées.

M. Philippe Dallier.  - Et les 9 millions de salariés qui bénéficiaient des heures supplémentaires ?

M. François Fortassin.  - Mais il faudra rester vigilant.

M. Philippe Dallier.  - Ô combien ! (Rires à droite)

M. François Fortassin.  - C'est toute la différence entre la majorité et l'opposition. Y a-t-il une justification à ce que les heures supplémentaires soient défiscalisées et pas les heures normales ? Non, il n'y en a aucune. (Applaudissements à gauche)

M. André Reichardt.  - Si : les 35 heures.

M. François Fortassin.  - Une plus grande transparence et une plus grande humilité, qui ont tant fait défaut par le passé, ont vu le jour. En des temps difficiles comme les nôtres, il convient d'éviter les pertes de recettes. Le Gouvernement devra établir les responsabilités éludées par son prédécesseur.

Certes l'amendement que nous avons défendu à l'article 6 n'a pu être adopté. Cependant le rapporteur général a dit en partager l'esprit. Nous appelons de nos voeux une taxe sur les transactions financières plus ambitieuse. Nous sommes favorables aux coopérations renforcées européennes, mais la France devra rester vigilante, afin que la taxe soit à la hauteur des enjeux.

Des amendements du RDSE ont été adoptés. Nous nous en félicitons et en remercions le rapporteur général, notamment pour la taxe sur les logements vacants.

Comme la Cour des comptes, notre groupe souhaite que l'on donne la priorité à la lutte contre les niches fiscales et sociales inefficaces. La création de tranches d'imposition supplémentaires met en évidence les faiblesses de notre système d'imposition du revenu. Nous souhaitons la fusion de l'impôt sur le revenu, de la CSG et d'une large part des cotisations sociales salariales, avec un élargissement de son assiette plutôt qu'une hausse des taux.

Ce collectif constitue un premier acte encourageant. La majorité des membres du groupe RDSE le soutient. Je souligne la qualité des arguments du rapporteur général, du ministre...

M. Roger Karoutchi.  - Quel flatteur !

M. Philippe Dallier.  - Encore !

M. François Fortassin.  - ...ainsi que l'excellent climat qui a présidé à la commission mixte paritaire, majorité et opposition confondues. (Applaudissements sur les bancs RDSE et les bancs socialistes)

Mme Marie-France Beaufils .  - Premier acte politique majeur de la nouvelle majorité et du nouveau Gouvernement, ce collectif budgétaire a été dominé par un climat économique incertain. La croissance économique est loin d'être au rendez-vous. Les décisions économiques et budgétaires de ces dix dernières années n'ont pas évité la recrudescence des plans sociaux et le marasme économique. Certains gaspillages perdurent. Nos finances publiques supportent le poids de la crise. Comme le rappelait Mme Borvo, présidente de notre groupe, cela fait trente ans que notre pays subit la course au moins-disant fiscal et social.

Vous recherchez, monsieur le ministre, des économies pour le budget 2013 ? Regardez du côté de toutes ces niches fiscales non pertinentes qui polluent le code général des impôts. Il y a là des sources de diminution de la dépense fiscale. Est-il juste de dépenser 730 millions avec le dispositif ISF-PME alors qu'un doublement du plafond du livret de développement durable aurait un coût moindre pour un effet de levier plus puissant ?

Avant de créer une banque publique d'investissement est-il juste de dépenser tant d'argent au service des fondations, ou des entreprises avec les LBO ? Les entreprises sont-elles tenues de respecter la loi ou la loi doit-elle se conformer aux attentes des entreprises ?

Il faut engager dès maintenant des réflexions associant l'ensemble de la majorité parlementaire sur les questions de justice fiscale, de limitation des niches fiscales, de politiques publiques efficaces. Plutôt des postes supplémentaires dans l'Éducation nationale que des heures supplémentaires ! Le principal gisement de redressement budgétaire n'est pas dans le gel du point d'indice des fonctionnaires mais dans la recherche systématique de la justice fiscale.

Les bases d'imposition sont détournées de leur objet. Pourquoi ne pas s'attaquer à l'évasion et à la fraude fiscale, à l'« optimisation » au détriment de l'intérêt général ?

Le collectif comporte des mesures fortes, comme la suppression de la TVA dite sociale ou l'imposition accrue des patrimoines. Nous partageons les intentions du Gouvernement en général mais l'objet de ces nouvelle recettes ne doit pas être seulement de réduire le déficit.

La mise en cause du dispositif concernant les heures supplémentaires doit être prolongée. Nous ne sortirons pas la France de l'ornière dans laquelle elle végète depuis dix ans tant que le salaire médian stagnera autour de 1 600 euros. La France est malade de ses trop bas salaires. Le débat doit s'engager. Le coût du travail n'est pas la seule variable d'ajustement ! C'est un débat de société. À qui doit profiter la richesse produite ? Il faut une juste rémunération du travail, une désincitation aux délocalisations.

Il reviendra au projet de loi de finances 2013 de profiler le nouvel ISF dont nous avons besoin. Nous devons nous interroger sur l'évolution du tarif de l'impôt. Nous sommes partisans d'une déconnexion de l'ISF et de l'impôt sur le revenu.

Certains de nos amendements ont été adoptés et nous nous en félicitons, mais les questions posées par le gel du barème de l'impôt sur le revenu et le plafonnement de la taxe d'habitation restent en suspens. Un signal clair doit être adressé aux plus modestes. La négociation collective sur les salaires et les qualifications est l'affaire des partenaires sociaux. Le gel du barème est d'abord un problème pour les salaries, traitements et pensions, qui composent la plus large part de l'impôt sur le revenu. Le redressement des comptes publics peut-il passer par une ponction sans cesse majorée sur les revenus du travail ? La question devra être posée lors de la loi de finances initiale pour 2013.

Les valeurs locatives cadastrales représentent une question à 220 millions d'euros. C'est beaucoup pour les contribuables concernés, peu au regard des cadeaux fiscaux accordés à bien des contribuables ces dernières années...

Nous souhaitons que rapidement viennent des transformations d'une autre ampleur, tout en soutenant de manière constructive ce texte. (Applaudissements sur les bancs CRC et sur certains bancs socialistes)

M. Jean Arthuis .  - Ce rendez-vous était attendu. Nous nous réjouissons de l'aboutissement de la commission mixte paritaire. Je salue notre rapporteur général pour la qualité de l'exercice auquel il s'est livré, au nom de la commission des finances. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Je me réjouis que la proposition de notre collègue Jarlier ait emporté l'adhésion du Sénat et de l'Assemblée nationale. Rendez-vous est pris pour la loi de finances initiale 2013.

L'heure est grave la France est en crise. Nous avons deux grands enjeux : le rééquilibrage de nos finances publiques et le retour de la compétitivité. Pour tenir nos engagements de ramener notre déficit à 4,5 % du PIB, vous utilisez l'outil de la fiscalité, et vous n'y allez pas de main morte : 4 milliards d'euros pour les ménages, 3 milliards d'euros pour les entreprises.

M. François Rebsamen.  - Il faut tout de même prendre aussi en compte la suppression de la « TVA sociale » !

M. Jean Arthuis.  - Les ménages subiront les conséquences des prélèvements imposés aux entreprises qui se traduiront dans le prix des produits. Vous avez, en revanche, été bien timides pour ce qui est de réduire les dépenses publiques.

Au Sénat, nous avions suivi le rapport de la Cour des comptes en ramenant à 0,9 % la contribution au CNFPT, dont la trésorerie était déjà fort abondante. Vous la portez à nouveau à 1 %. Les collectivités territoriales apprécieront, alors que le CNFPT n'a pas le monopole de la formation des agents publics territoriaux.

Vous vous en êtes tenus au plus facile : alourdir la fiscalité et détricoter ce que la législature précédente avait conçu.

M. Yves Daudigny.  - Il fallait commencer par là.

M. Jean Arthuis.  - Pour la compétitivité, le taux retenu pour la TVA antidélocalisation était infime mais c'était une amorce. Début juillet, lors de la conférence sociale, les partenaires sociaux sont convenus d'alléger les charges sociales. Mais comment financer cet allégement ?

La CSG était une piste, pas la meilleure à mon sens, mais M. Cahuzac vient de déclarer qu'il n'est pas question de l'augmenter pour le moment. Il faudra, messieurs les ministres, que vous reconnaissiez la nécessité d'alléger les charges sociales. La seule solution qui restera à votre portée sera une sensible augmentation de la TVA.

Les salariés de Peugeot et les concitoyens qui subissent les plans sociaux attendent d'autres réponses que ce projet de loi de finances rectificative. Pourquoi sanctionner une entreprise qui persiste à produire en France ? M. Montebourg veut relocaliser les centres d'appels téléphoniques, M. Sapin veut simplifier le code des marchés publics, qu'il connaît bien. Tout cela est du raccommodage. Pensez d'abord à alléger les charges sociales ! Nos concitoyens consommateurs ne participent pas au financement de la protection sociale, sauf s'ils achètent des produits français.

Je regrette, avec nos collègues de l'UCR, de ne pouvoir voter ce collectif. (Applaudissements au centre et à droite)

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Mme Fabienne Keller .  - Voici le premier grand texte budgétaire du quinquennat de François Hollande. Permettez-moi de saluer le travail des commissions et de tous ceux qui nous ont permis d'examiner ce texte.

La commission mixte paritaire a réussi, naturellement puisque la majorité gouvernementale est majoritaire dans les deux assemblées. Le groupe UMP s'est opposé à de nombreuses dispositions de ce texte qui illustre l'absence de cohérence des choix politiques de ce Gouvernement.

Vous augmentez les effectifs de la fonction publique dans les secteurs prioritaires. Mais quels secteurs allez-vous sacrifier ? La culture ? L'aide au développement ? Le social ? Comment tenir l'équation impossible que vous nous avez présentée : maintien des effectifs et de la masse salariale des fonctionnaires ? Par quel miracle ?

Vous doublez le montant de la taxe sur les transactions financières -mise en place courageusement par le gouvernement précédent.

Vous vous targuez d'augmenter le Smic de 6,50 euros par mois mais n'hésitez pas à retirer 40 euros par mois en moyenne à 9 millions de salariés avec la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires et l'augmentation de la fiscalité sur la participation et l'intéressement.

Philippe Dallier vous a proposé de faire un sort aux indemnités de résidence du Premier ministre et du président de la République qui sont logés. Pourquoi l'avoir refusé ?

M. François Rebsamen.  - Quelle petitesse !

Mme Fabienne Keller.  - Vous reprochez aux heures supplémentaires d'être financées par la dette ? N'est-ce pas la dette qui finance vos nouvelles mesures, comme les recrutements supplémentaires ou la retraite à 60 ans pour les carrières longues ?

M. François Marc, rapporteur général.  - Mais non !

Mme Fabienne Keller.  - Le pouvoir d'achat qu'apportent les heures supplémentaires, c'est de la consommation en plus, de la croissance en plus, qui créent de la richesse, des recettes, qui réduisent la dette.

M. François Rebsamen.  - On ne les a pas vues.

M. Roger Karoutchi.  - Vous regardez mal.

Mme Fabienne Keller.  - Vous rompez ce cercle vertueux pour nous faire entrer dans un cercle infernal : baisse de confiance des entreprises, baisse des recettes fiscales, absence complète d'économies, à la différence du projet de loi de finances 2012, caractérisé par un effort historique remarqué par la Cour des comptes.

François Hollande est désormais le président des impôts des Français. (Protestations sur les bancs socialistes ; M. Roger Karoutchi approuve)

Pour toutes ses raisons et toutes celles que nos collègues ont exprimées au long des débats, le groupe UMP ne pourra voter ce projet. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Vincent Placé .  - Ce collectif est dicté par l'urgence, financière, d'abord : dans les cinq ans précédents, la dette de la France a augmenté de 50 % ; sociale, ensuite : l'exonération des heures supplémentaires est coûteuse et inefficace. La diminution des abattements sur les droits de succession est juste et bien loin de toucher les classes moyennes dont l'opposition se présente en défenseur : 88 % des successions demeurent exonérées. Les grandes entreprises qui pratiquent massivement l'évasion fiscale sont sollicitées par ce projet, à hauteur d'1 milliard d'euros.

Plusieurs mesures vont dans le sens que nous avons préconisé. Les écologistes approuvent ce projet, avec lequel la France tourne définitivement la page de l'ère Sarkozy. (M. Roger Karoutchi s'esclaffe)

Le plus dur est devant nous pour redresser le pays et lutter contre les ferments d'extrême-droite semés par l'ancienne majorité lors de la campagne présidentielle. (M. Roger Karoutchi soupire) J'en veux pour preuve les propos tenus ce matin même par un député UMP qui, dans un journal bien connu d'un collègue de l'Essonne, compare ce collectif à une « épuration » ! Les mots ont une histoire ! Les prédicateurs populistes du Front national s'en frottent les mains. Est-ce normal et convenable ?

M. Roger Karoutchi.  - Je n'ai pas lu de tels propos.

M. Jean-Vincent Placé.  - Cela nous donne la mesure de nos responsabilités.

Nous voulons relever nos finances publiques et rétablir l'égalité sociale. Il faut inscrire notre société dans le grand mouvement de la transition écologiste qui s'imposera à nous, quoiqu'il arrive. Nous espérions quelques signaux en ce sens, que nous n'avons pas perçus. Nous avons noté l'ouverture du Gouvernement, avec une dextérité qui vous honore, monsieur le ministre, mais qui vous donne aussi des devoirs. Ainsi, la fiscalité du gazole est une aberration comme l'a reconnu le Gouvernement, rejoignant une position ancienne des écologistes. Nous attendons la conférence environnementale de septembre.

Les écologistes sont en confiance. Le sénateur que je suis s''honore du travail solide et sérieux de ces dernières semaines qui démontre l'intérêt du bicamérisme. J'en rends hommage particulièrement au rapporteur général, à M. Daudigny et au ministre. Le texte de la CMP l'illustre. Avec sérénité et confiance, j'apporte le soutien des écologistes. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Mme Michèle André .  - La nouvelle majorité a pour mandat de mettre en application le programme de François Hollande, dans la justice et l'équilibre. Cet équilibre repose sur la participation de tous à l'effort, équitablement réparti entre recettes et économies sur les dépenses.

L'action sur les dépenses est nécessaire : elle sera menée dans le projet de loi de finances pour 2013 ; nous ne voulions pas affaiblir, par une action précipitée, nos services publics malmenés par le précédent gouvernement.

L'accroissement des cotisations pesant sur les retraites chapeau et les parachutes dorés vise à réduire les inégalités les plus flagrantes. C'est une question de justice. Les cessions de fréquences audiovisuelles -la rédaction du Sénat avait été censurée par le Conseil constitutionnel- seront désormais mieux encadrées et subiront une juste taxation. La taxe sur les logements vacants a été augmentée. Idem pour le forfait social -mais l'amendement de Mme Espagnac a pris en compte la spécificité des Scop.

Le projet de loi de finances rectificative n'avait pas vocation à tout régler mais à préparer l'avenir. Notre excellent rapporteur général a lancé le travail sur la révision des valeurs locatives, enjeu essentiel pour les collectivités locales. Reste à traiter la fiscalité environnementale et l'imposition du revenu. Nous le ferons dans le projet de loi de finances pour 2013. Le Sénat y prendra toute sa part. Nous restons fidèles à notre projet, et nous nous félicitons de ce premier pas. Sans surprise, le groupe socialiste votera le projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements à gauche)

M. Yves Daudigny .  - Le rapporteur général de la commission des affaires sociales que je suis est satisfait et confiant. Les premières mesures de ce projet de loi de finances rectificative apportent à la sécurité sociale 1,5 milliard d'euros de recettes supplémentaires en 2012, et 5,5 milliards d'euros par an à compter de 2013. Cet effort n'est pas financé par l'endettement, comme c'était devenu l'habitude, mais par une fiscalisation plus juste des revenus jusque-là les moins sollicités et la fin d'exonérations non pertinentes, voire exorbitantes en cette période de crise. Enfin, nous sortons de la spirale d'endettement dans laquelle le précédent gouvernement nous avait enfermés.

Un amendement de la commission des affaires sociales a clarifié la compensation de l'exonération des heures supplémentaires due par l'État à la sécurité sociale, la dette 2010-2011 de celui-là étant apurée au bénéfice de celle-ci. Un deuxième de nos amendements a abaissé le seuil d'assujettissement des parachutes dorés d'1 milliard d'euros à 360 000 euros. Il est normal que ces revenus participent au financement de la protection sociale. Notre troisième amendement abrogeait toute restriction d'accès à l'Aide médicale d'État (AME). La lutte contre la fraude s'avère hors de propos en la matière. Quel réel motif a donc inspiré Thierry Mariani, auteur de cette mesure ? Ni le souci de la santé publique, ni celle de l'efficacité économique !

Ce projet de loi de finances rectificative engage le retour à l'équilibre et à la justice. Nous avons eu un débat sur l'éventuelle soumission de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) à récupération sur succession. Cette proposition ne tient pas : la nature participative de la récupération sur succession contredit la logique même de la solidarité. C'est un choix de société. Les premières mesures du projet de loi de finances rectificative ne préjugent pas de la réforme de la dépendance : au Haut conseil de sécurité sociale de proposer des solutions.

La confiance, c'est celle que l'on vous doit, monsieur le ministre, car la raison, l'efficacité et la justice sont au rendez-vous de ce premier texte. (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-Christine Blandin .  - Les écologistes se félicitent des arbitrages en faveur de l'école et de la culture, en dépit de la tentation, qui aurait pu être grande, d'y renoncer.

N'en déplaise à ceux qui préfèrent le béton à la conservation, il est des conservations enrichissantes, celles de la transmission du savoir et du vivre-ensemble, qui seront permises par les créations de postes accordées à l'Éducation nationale. Les ressources humaines sont un investissement pour les générations futures.

Autres conversations, celles que facilite le spectacle vivant -préservé par ce projet de loi de finances rectificative, ou encore le livre. L'amendement de M. Assouline a vécu dans la CMP : la vente du droit d'émission attribuée gratuitement sera désormais taxée. Nous nous en réjouissons.

Notre commission de la culture s'était étonnée que le précédent gouvernement n'ait budgété aucune prime pour les médailles d'or aux jeux Olympiques. Nous avons raison d'avoir confiance en nos sportifs, qui ont d'ores et déjà obtenu cinq médailles d'or à Londres ! Il faudra y veiller, monsieur le ministre !

Les écologistes demandent au Gouvernement de militer auprès de la Cour européenne pour faire valoir la légitimité de tout ce qui concourt au développement social et culturel, de tout ce qui participe à l'intérêt général et doit être préservé des règles du marché et de la concurrence. C'est ainsi que l'économie sociale et solidaire l'emportera sur les règles impitoyables et destructrices d'emploi de l'hyper-concurrence.

Nous soutenons bien entendu ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements à gauche)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Mme la présidente.  - Je rappelle qu'en vertu de l'article 42-12 du Règlement, lorsque le Sénat est appelé à se prononcer après l'Assemblée nationale, il procède à un vote unique sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements ayant reçu l'accord du Gouvernement.

Le vote des articles premier bis à 20 est réservé.

Article 24

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 6

Remplacer les mots :

, spectacles de variétés,

par les mots :

; spectacles de variétés

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.  - Amendement rédactionnel.

Mme Fabienne Keller.  - Un point virgule, quelle précision !

M. François Marc, rapporteur général.  - La commission n'a pas pu se réunir. On ne peut qu'être favorable à cet amendement -qui revient à une formulation proche de celle du Sénat.

Le vote des articles 24 à 27 bis B est réservé.

Article 27 bis C

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Amendement de suppression de gage.

Le vote des articles 27 bis C à 30 est réservé.

Article 30 bis

Mme la présidente.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Idem.

Le vote est réservé.

Article 33

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Idem.

M. François Marc, rapporteur général.  - Avis favorable.

Le vote est réservé.

Interventions sur l'ensemble

Mme la présidente.  - Je mets aux voix l'ensemble des conclusions de la CMP.

M. Roger Karoutchi .  - Sincèrement, ce projet de loi de finances rectificative -en session extraordinaire- ne fait que détricoter, supprimer des mesures du gouvernement précédent. Quelle est la grande mesure que vous apportez ?

Mme Françoise Cartron.  - La justice !

M. Roger Karoutchi.  - Ce n'est pas tout de démolir -TVA sociale, droits de succession, même l'intéressement y passe. Vous mettez en avant l'ISF, les parachutes dorés -on prend aux riches, très bien !

M. Michel Berson.  - Ce n'est pas négligeable !

M. Roger Karoutchi.  - Mais la fin de l'exonération des heures supplémentaires, le forfait social, l'alourdissement des droits de succession, cela frappe aussi les classes moyennes ! Tout le monde va payer -sans que l'État ne fasse le moindre effort ! On verra à l'automne, dites-vous. Nous sommes prêts, nous agirons dès l'été, disiez-vous pendant la campagne. En réalité, vous ne proposez que matraquage fiscal et détricotage idéologique. Si la crise financière s'aggrave, vous nous direz à la rentrée que vous ne pouvez rien faire de positif -parce que vous avez refusé de mettre en place un programme d'économies sur les dépenses publiques. Il faut marcher sur ses deux jambes ! On sait que les collectivités locales verront leurs dotations réduites...

Mais ce soir, vous ne nous proposez que des augmentations d'impôts, sans autre perspective. Nous ne savons rien de la politique fiscale et financière du Gouvernement. Le groupe UMP votera évidemment contre. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Vincent Delahaye .  - Il est vrai que nous avons hâte d'être à l'automne... (Exclamations et mouvements divers) J'espérais davantage de débats de fond, dès cet été, sur la compétitivité ou l'emploi. Seule la TVA sociale a fait l'objet d'une vraie discussion, qui aura sans doute fait évoluer les esprits. Je regrette que la CMP soit revenue sur l'amendement concernant les ambassadeurs thématiques : il faut réduire les dépenses.

Ce projet de loi de finances rectificative ne taxe pas que les riches, mais les classes moyennes. La réduction du traitement du président de la République et du Premier ministre est avant tout symbolique et démagogique. Je regrette que la contribution de l'État au CNFPT ne soit pas maintenue à 0,9 %...

M. Jean Arthuis.  - Eh oui !

M. Vincent Delahaye.  - Avec la très grande majorité du groupe UCR, je voterai contre ce texte. (Applaudissements au centre et à droite)

M. François Marc, rapporteur général .  - Merci à nos collaborateurs. Je salue le travail du Gouvernement et surtout le vôtre, monsieur Cahuzac. Vous avez hérité d'une situation fort difficile. Elle l'était déjà il y a cinq ans, mais le gouvernement avait commencé par diminuer les recettes ! On voit où on en est aujourd'hui. Au-delà de la conjoncture, les décisions prises par le passé nous laissent avec un déficit structurel et de difficiles arbitrages à rendre.

Nous allons vite nous retrouver autour de la maquette budgétaire : je suis sûr que nous saurons ensemble relever le défi de la justice et de l'équilibre. Je prodigue à M. le ministre du budget tous nos encouragements. De difficiles mais nécessaires décisions l'attendent. (Applaudissements à gauche)

Les conclusions de la CMP, modifiées, sont mises aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 177
Contre 166

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à gauche)