SÉANCE

du jeudi 11 octobre 2012

6e séance de la session ordinaire 2012-2013

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Secrétaires : M. Jacques Gillot, Mme Odette Herviaux.

La séance est ouverte à 9 h 45.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.

Discussion générale (Suite)

M. Philippe Bas .  - L'autorisation de ratifier ce traité est le seul moment où le Parlement a son mot à dire. Le peuple ne sera pas appelé à se prononcer directement, comme en 1992 et 2005. MM. Mitterrand et Chirac avaient alors fait preuve de courage. Depuis, au sujet de l'Europe, les gouvernements préfèrent la prudence... Il ne fait pourtant guère de doute que les Français auraient voulu décider eux-mêmes.

Si nous disons oui, il ne se passera rien qui ne soit déjà imposé par les réalités économiques et financières : il nous faut de toute façon lutter contre les déficits. Les nouveautés du traité, ce sont l'obligation d'atteindre l'équilibre structurel et le renforcement des sanctions, non la sévérité des contraintes budgétaires. Nous ne pouvons pas plus que vous admettre qu'un corset nous empêche de mener une politique de relance quand c'est nécessaire -ce que vous reprochez au gouvernement précédent tout en le revendiquant aujourd'hui.

Le traité, que vous avez diabolisé avant d'en réduire la portée, distingue le déficit conjoncturel du déficit structurel ; comme celui de Maastricht, il prévoit la prise en compte de circonstances exceptionnelles pour épargner des sanctions aux États déficitaires. En cela il n'est pas une révolution. La différence, que vous omettez de rappeler, est que l'appréciation de ces circonstances sera communautaire. Le Front de gauche a raison de le rappeler. La discipline budgétaire à long terme doit nous permettre de retrouver des marges de manoeuvre. Après quoi, les choix politiques s'exprimeront -et les vôtres ne sont pas les nôtres.

Si nous disions non à ce traité, il faudrait de toute façon maintenir le cap de la rigueur mais nous jetterions le doute sur notre détermination ; ce serait isoler la France et la rendre plus vulnérable. A notre « non » répondrait celui des investisseurs et des marchés financiers. Il nous faudrait alors redoubler d'austérité pour les convaincre. Pour excessives qu'elles soient, notre dette et celles de nos partenaires restent limitées par rapport à celle des USA et du Japon. Les marchés pourraient nous être favorables mais il n'en est rien. C'est injuste mais c'est qu'il n'existe pas une mais des multitudes de dettes européennes, d'inégal montant et contractées par des pays inégaux dans leurs capacités de remboursement. La cause des suspicions des marchés est avant tout politique, ils spéculent sur les inévitables divisions entre États jaloux de leurs prérogatives et peu enclins à la solidarité.

Certains États essaient de tirer leur épingle du jeu au détriment des autres ; la défiance se nourrit de celle des États entre eux. Les marchés se posent des questions : les États seront-ils capables de faire l'Union politique ? Les dettes européennes seront-elles remboursées dans toutes leurs composantes nationales ? En d'autres termes, ils nous disent : soyez forts et nous nous inclinerons. L'Union politique de l'Europe est la seule voie possible pour l'accomplissement des ambitions nationales. L'Europe unie serait une puissance redoutée. Mais vu l'extrême prudence du président de la République, ses réticences à exprimer une vision d'avenir fondée sur une telle union dans une fédération d'États nations, il semble avancer vers l'Europe à reculons. Cette impression a été confirmée hier par M. le ministre. Vous avez l'Europe frileuse, et même pusillanime. Votre difficulté à convaincre vos partenaires à gauche, et mêmes vos propres troupes, explique sans doute cette frilosité.

J'entends ici ou là des raisonnements étranges, qui laissent croire que notre salut est dans le repli derrière nos frontières, dans l'émancipation des exigences européennes, dans la négation des contraintes budgétaires. Utopies régressives ! La France ne peut faire cavalier seul.

Il ne suffit pas de graver dans le marbre de nouvelles règles budgétaires pour remédier aux défaillances et intermittences de la volonté politique européenne. Le nouveau pacte ne peut être qu'une étape : vous devez préparer les suivantes, nous dire qu'elle Europe vous voulez et avec qui. Si vous vous contentez d'ambitions limitées, vos résultats ne pourront être que médiocres. La rigueur sans la réforme, sans la compétitivité, sans le soutien aux entreprises, c'est le marasme, la récession, le déclin.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Situation que vous nous avez laissée !

M. Philippe Bas.  - Vous avez rétabli les 35 heures dans toute leur rigidité (exclamations à gauche), vous êtes revenus sur la réforme de la protection sociale, vous accablez les entreprises de charges nouvelles alors que leur taux de marge est à un plancher historique, vous multipliez les dépenses d'affichage dont les effets sur le pouvoir d'achat sont dérisoires...

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Et la TVA sociale, c'était mieux ?

M. Philippe Bas.  - Vous recrutez massivement mais inutilement des enseignants sans vous soucier de leur formation... (Protestations sur les bancs socialistes)

M. Jacques Chiron.  - Vous avez supprimé les IUFM ! C'est incroyable !

M. Philippe Bas.  - ...et voilà que ressurgit dans les pires conditions la question du financement de la protection sociale. La CSG ponctionnera à nouveau le pouvoir d'achat sans faire payer les importations... (Marques d'approbation à droite)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Et la TVA ?

M. Philippe Bas.  - Nous nous réjouissions de l'adoption du pacte de croissance mais il n'a fait que reprendre ce qui existait déjà. (Exclamations à gauche) Le montant des crédits mobilisés, 120 milliards, soit 1 % du PIB de l'Europe, n'est pas à la hauteur des enjeux. Et vous oubliez que le Conseil européen de juin a demandé des efforts de compétitivité auxquels vous tournez le dos.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Rappel utile !

M. Philippe Bas.  - Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance n'est pas un menu à la carte. Nous connaissons votre compétence, monsieur le ministre, mais nous attendons aussi de l'humilité au regard de la situation. Vous avez su ramener une partie de votre majorité à la raison mais beaucoup reste à faire ; le résultat du vote ici ne sera pas celui de l'Assemblée nationale...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Ce sera difficile !

M. Philippe Bas.  - Aves la ratification du TSCG, le président Hollande associera son nom à celui de M. Sarkozy. Un gouvernement que je ne soutiens pas aura fait aboutir l'oeuvre d'un gouvernement que vous ne souteniez pas. C'est un bel exemple de continuité, même si l'affaire a manqué de spontanéité et de franchise. Je regrette qu'il ne soit pas suivi de beaucoup d'autres. (Applaudissements à droite)

M. Alain Richard .  - Ce traité définit les objectifs recherchés en termes d'équilibre financier et organise les procédures qui garantissent que les États font loyalement ce qu'il faut pour les atteindre.

L'objectif d'équilibre budgétaire partagé est-il justifié, est-il contraire aux intérêts de la France, limite-t-il notre souveraineté ? Le durcissement des obligations est-il justifié ? La réalité de l'endettement cumulatif devient insupportable et réduit nos marges de manoeuvre. Nous avons choisi délibérément une monnaie commune ; il importe qu'elle soit crédible pour équilibrer l'influence du dollar et des monnaies émergentes. Sinon, l'euro se dévalorisera et la perte de confiance se généralisera.

Les déficits sont-ils un tremplin pour la croissance ? Tout démontre le contraire : leur creusement étouffe la croissance car les taux d'intérêts augmentent et les réflexes de précaution se généralisent. La notion de déficit structurel est saine ; il y a de la tactique lorsqu'on exagère la difficulté de sa définition...

La réduction des déficits est-elle contraire aux intérêts de notre pays ? Nous avons accumulé les déficits bien avant la crise ; ils n'ont apporté aucun supplément de croissance, bien au contraire. Notre compétitivité extérieure s'est dégradée.

La politique de la nouvelle majorité, c'est le redressement dans la justice. En d'autres termes, ne pas laisser s'accumuler les dettes pour retrouver des marges de manoeuvres pour l'innovation, les services publics, la solidarité. Ce serait impopulaire ? Certes non : les Français savent que la dérive de l'endettement est mauvaise pour eux, quel que soit leur niveau social ou de revenus. Nous payons les policiers, les enseignants, les hôpitaux à crédit à partir de la fin de l'été ! Dans ces conditions, nos intérêts fondamentaux sont menacés.

Cela dit, il n'y a pas de règle d'or. La majorité précédente a voulu, en toute fin de mandature et après avoir suivi une politique inverse, transformer en règle constitutionnelle un objectif de solde budgétaire auquel État, comptes sociaux et collectivités territoriales devaient se soumettre. Quelle notion infantilisante que cette règle d'or, comme s'il y avait quelque part un commandement surnaturel ! Il ne peut y avoir de règle juridique unique pour définir l'équilibre budgétaire. Le traité est un cadre, il laisse des marges d'appréciation. Il faut rappeler que l'article 34 de notre Constitution institue déjà des lois de finances pluriannuelles ayant pour objectif l'équilibre des finances publiques. Le traité ne prévoit rien d'autre.

Des limitations de souveraineté ? Il y a vingt ans, la France a voulu la création de l'euro. Si nous le détruisions, nous retrouverions les anciennes dévaluations dites « compétitives ». Ce serait extrêmement périlleux. Il est en conséquence logique que nous nous engagions dans une politique financière qui le rende viable. Le Conseil constitutionnel rappelle que le TSCG se situe dans la suite des traités précédents et que les limitations de la souveraineté ont déjà été acceptées à l'occasion de leur ratification.

Le durcissement des obligations ? Lubie de juristes hors-sol, de monétaristes monomaniaques ? Les États prennent des engagements en commun, il est légitime qu'ils veillent en commun à leur respect. Sanctions ou pas, nos engagements internationaux doivent être tenus. L'Union européenne n'est pas qu'une union intergouvernementale mais les relations entre États jouent un rôle essentiel. Comment la France est-elle vue et entendue par ses partenaires ? Tous connaissent nos débats intérieurs et ils voient que la lutte contre les déficits excessifs est parfois détournée, que l'inanité des engagements pris est souvent mise en avant... Nous manquons de crédibilité. Nous ne pouvons jouer un rôle moteur que si nous mettons nos actes en accord avec nos engagements. Nous avons choisi l'euro.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - A une majorité d'un point !

M. Alain Richard.  - Nous sommes en train de mettre en place un gouvernement économique européen (Mme Marie-Noëlle Lienemann le conteste), certes pas de la façon la plus agréable qui soit mais c'est ce que nous demandions depuis des années. Notre monnaie comportait des faiblesses sérieuses et nous avons manqué de clairvoyance. Il a fallu traiter le problème à chaud et à 27. Le Conseil de juin a marqué des avancées certaines, union bancaire, taxe sur les transactions financières, outils pour l'investissement et l'innovation. Le paquet « Croissance » est important, n'en déplaise à certains. Reste à définir une coordination fiscale européenne. Nous devons assumer notre place au sein de l'Union européenne, tenir nos engagements. Il y va de l'intérêt de la France. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Marie-Christine Blandin .  - Nos différences d'appréciation ne doivent pas masquer notre désir commun d'Europe. Nous voulons une Europe désirable, une Europe politique, fédérale, socialement juste, environnementalement responsable et démocratique.

Dans la crise, nous avons besoin de construire un continent éthique, riche de sa diversité, attentif aux besoins des citoyens. Les écologistes veulent faire entendre les appels des plus pauvres qui ne peuvent faire des efforts supplémentaires ni se priver de la présence des services publics. La diplomatie de la France va dans le bon sens mais ce qui est imposé à l'Europe du sud est inquiétant.

Fédéralistes, nous n'avons pas de problème avec le principe de règles édictées à Bruxelles ; encore faut-il que le Parlement européen trouve toute sa place. La souveraineté des États ne peut s'effacer que devant des institutions démocratiques.

Écologistes, nous ne sommes pas choqués des efforts à faire pour réduire nos déficits. Mais arrêtons de produire n'importe quoi, de construire des coquilles vides, de jeter l'argent par la fenêtre comme avec Notre-Dame-des-Landes ou l'EPR ! On ne peut continuer à détruire la planète. J'ai vu, dans ma région du Nord, le prix à payer pour de mauvais choix stratégiques ; j'ai vu les dégâts du productivisme. En Espagne, au Portugal, en Grèce, l'austérité frappe les plus modestes. Vous voulez rassurer, monsieur le ministre, avec le pacte de croissance. Mais nous sommes dubitatifs. Nous n'assimilons pas la croissance au bonheur. Il peut y avoir un redressement productif intelligent -qui ne passe pas par le soutien à la filière diesel... Nous disons oui à une sobriété heureuse mais non à des économies qui pèsent sur les services publics ou sur les plus pauvres. Or nous n'avons aucune garantie sur ce point.

Certes, nous voterons le budget en décembre, budget difficile s'il en est. Sur le TSCG, certains d'entre nous s'abstiendront car nous ne voulons pas de choix clivant. Nous n'entraverons pas la route européenne du Gouvernement mais nous ne lui donnons pas un chèque en blanc, au regard des incertitudes sur les cibles qui seront choisies pour réduire les déficits. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

La discussion générale est close.

Rappel au Règlement

M. Guy Fischer .  - Je regrette l'organisation de nos travaux. Je ne peux ainsi en cet instant participer à l'audition du ministre du budget sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Un site d'information bien connu révèle que la Commission européenne travaille sur un projet de directive qui soumettrait les organismes de sécurité sociale obligatoire, je dis bien obligatoire, à la procédure des appels d'offres. Il ne s'agit pas seulement des achats de matériels... La France devrait mettre fin au monopole légitime dont bénéficie la sécurité sociale, qui serait concurrencée par des entreprises privées à but lucratif. Les pouvoirs publics devront choisir les moins chers, les moins-disant sociaux. Ce projet de directive signerait la mort de la sécurité sociale telle qu'imaginée par le CNR.

Comment ne pas faire le lien avec le TSCG et la règle d'or ? Les régimes obligatoires de la sécurité sociale ne peuvent être assimilés à des entreprises marchandes, alors qu'elles sont le seul filet de protection des plus modestes de nos concitoyens. Quelle est la position du Gouvernement sur ce projet de directive ? (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Vous évoquez une directive de 2011 relative aux marchés publics. La Commission européenne estime que certains dispositifs de sécurité sociale n'ont pas le caractère public résultant, comme en France, de dispositions législatives et considère que la directive doit leur être appliquée.

Nous avons indiqué que nous ne souhaitons pas appliquer la directive à notre régime de sécurité sociale ; la Commission nous a donné toutes assurances. Nous avons malgré tout souhaité que le texte de la directive soit sans ambiguïté. Le Gouvernement n'acceptera jamais qu'il puisse y avoir le moindre doute sur un sujet qui touche à notre pacte républicain. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Exception d'irrecevabilité

Mme la présidente.  - Motion n°1, présentée par MM. Chevènement et Collombat.

En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.

M. Jean-Pierre Chevènement .  - Dans votre discours brillant, monsieur le ministre, vous nous avez invité à dépasser le traité, à le contextualiser ; et vous nous avez fait entrevoir des perspectives enchanteresses. Le Sénat, s'il vote ce traité, entérinera une dépossession sans précédent du Parlement dans ses prérogatives budgétaires. Ce sera un suicide dans une indifférence un peu molle que j'ai quelque scrupule à troubler... Il y a vingt ans, je voulais m'abstenir sur le traité de Maastricht ; puis je l'ai lu et j'ai voté contre, tout comme j'ai voté non au référendum de 1992.

L'objectif à moyen terme ! Ah, l'OMT ! Vous en entendez reparler ! Le déficit structurel est durci à 0,5 % du PIB. Le traité n'est pas seulement disciplinaire, il est correctionnel : il y aura des mécanismes de correction automatique ; n'importe quel État pourra demander à la CJUE d'imposer des amendes à ses voisins s'il estime que les objectifs ne sont pas atteints. Amendes qui pourraient atteindre pour la France 2 milliards. Ce n'est rien, nous sommes riches...

Le partenariat budgétaire et économique devra contenir les réformes structurelles à mettre en oeuvre, privatisations et dérégulations de toutes sortes. Cerise sur le gâteau, chaque État s'engage à soutenir la Commission européenne en cas de manquement d'un État à ses obligations, sauf décision à la majorité inversée... N'est-ce pas là une mise sous tutelle des États ? Certes, la règle d'or n'est pas inscrite dans la Constitution mais la loi organique sera contrôler par la CJUE. Une haute autorité nationale vérifiera les prévisions, les trajectoires, les planchers de recettes et plafonds de dépenses... Gardien de la règle d'airain, ce chien renifleur permettra de justifier l'ingérence de la Commission dans la procédure budgétaire -la comparaison me vient sans doute de mon expérience passée de ministre de l'intérieur... (Sourires) Nous allons tous être entraînés comme particules dans un anneau collisionneur...

La Gouvernement ne défend pas le texte, il le contextualise, il défend ce qu'il y a autour, ce qui viendra après... Les 120 milliards ? Une injection de crédits de 1 % du PIB européen sur trois ans dans les 27 pays de l'Union ne va pas compenser des ponctions de plusieurs points. Un cheval, une alouette ! Le compte n'y est pas !

La TTF ? Je m'en félicite. Pour le reste, le docteur Coué, pharmacien Lorrain, dont je défends la mémoire, avait inventé une méthode pour guérir ses malades. C?est ce que fait le Gouvernement. La BCE va superviser ? Autant parler d'un autocontrôle de la finance. La spéculation sera-t-elle enrayée ? Le FMI a rappelé que 296 milliards d'euros avaient quitté l'Espagne, 235 l'Italie ces derniers mois. Quelles règles prévaudront au sein de la BCE ? Éclairez-nous, monsieur le ministre ! Vous avez évoqué aussi l'harmonisation fiscale. En 2011, il n'était question que du renflouement de l'Irlande ; son taux d'impôt sur les sociétés est pourtant resté à 12 %...

Le président de la République a introduit la thématique de la croissance : c'est positif mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Certes, sa marge de manoeuvre est étroite. Pour l'aider, il faut garder les yeux ouverts. En vingt ans, l'abandon de la souveraineté monétaire a amené à abandonner la souveraineté budgétaire.

En parlementaire libre et solide sur ses convictions, je ne renie rien de mes propos : inacceptable au printemps, ce traité le reste à l'automne. S'il devait entrer en vigueur, les pouvoirs budgétaires passeraient sous la coupe de ces technocrates bruxellois et parisiens qui chérissent ces sigles qui résonnent comme un cliquetis de chaînes, six pack, two pack, que sais-je encore.

Le tribunal constitutionnel de Karlsruhe estime que les députés allemands doivent continuer à contrôler le budget. Mais rien de tel n'a été dit par le Conseil constitutionnel. Je demande donc à mes collègues de déclarer ce traité irrecevable.

Quant aux perspectives européennes, on nous entraîne dans une spirale récessionniste dont nous ne sortirons que par une crise politique et sociale de grande ampleur. Pas de logique cumulative ? Avec un solde budgétaire nul en 2017, il faudra sortir 1,5 point de PIB jusqu'en 2036, soit plus de 30 milliards par an. Voilà le traité ! C'est la dépression assurée, avec un coup terrible porté à notre protection sociale et à nos services publics. La Constitution définit la République comme une république sociale. Qu'en restera-t-il ?

On parle de souplesse en cas de circonstances exceptionnelles. Il serait temps de les invoquer et d'entrer dans la logique keynésienne dont le ministre nous parle avec beaucoup d'optimisme.

Le traité est la contrepartie du MES. Cela avait amené le groupe socialiste à s'abstenir en février.

M. Jean Bizet.  - Eh oui !

M. Jean-Claude Lenoir.  - On s'en souvient.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Je ne veux pas diminuer les mérites du président de la République qui a su trouver des appuis à Washington, Rome, Madrid. Mais ses convictions européennes de toujours l'ont sans doute amené à considérer qu'un mauvais accord valait mieux que pas d'accord du tout. Le sommet des 28 et 29 juin était pourtant l'occasion de faire bouger les Allemands.

Une non-ratification nous mettrait à la merci des spéculateurs ? Nicolas Sarkozy employait déjà cet argument. Il faut viser une configuration de force. Nous avons des alliés potentiels, la France n'est pas seule au monde à avoir intérêt à ce que l'Europe n'entre pas dans une logique récessionniste.

L'attitude des investisseurs étrangers dépend plus de notre propre rigueur que d'un traité qui se révèlera vite inapplicable. Le MRC s'est engagé à voter le budget 2013 dont nous savons qu'il sera sévère mais qui ne nous engage que pour un an, pas pour l'éternité. Nous comprenons que le Gouvernement ait besoin de temps mais on ne va pas réorienter l'Europe avec un pistolet sur la tempe.

La monnaie unique a été une erreur grave. On a méconnu la spécificité des nations et leur hétérogénéité. La crise de la zone euro n'est que superficiellement une crise de la dette. Ce qui la mine, ce sont les écarts de compétitivité qui n'ont cessé de se creuser, comme l'indiquent les déficits commerciaux abyssaux des uns et les excédents colossaux des autres. Les résorbera-t-on par la déflation ? C'est la logique de ce traité. L'économiste Hans-Werner Sinn appelle à procéder à des réajustements monétaires négociés entre pays partenaires, dans le cadre d'une monnaie commune, non unique. L'Europe doit se faire à partir de grands projets concrets, non à partir d'une construction monétaire abstraite qui ressemble de plus en plus à un tonneau des Danaïdes.

Mme la présidente.  - Il est temps de conclure.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Je m'achemine vers ma conclusion, madame la présidente. (Sourires)

Le MES est un pare-feu insuffisant eu égard aux encours de dettes des pays potentiellement en difficulté : plus de 3 000 milliards. Le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe a plafonné à 190 milliards l'engagement de l'Allemagne au titre du MES ; celui de la France atteint 142 milliards d'euros. Certes, le 6 septembre, le président Draghi a annoncé un engagement « illimité » de celle-ci pour soutenir les monnaies des pays en difficulté. On s'est arrêté au mot « illimité », sans voir que la BCE n'interviendrait que sur un créneau limité et selon une stricte conditionnalité. Elle veut avoir son mot dire sur la politique d'ajustement : stratégie habituelle, au service des créanciers et non des citoyens. L'euphorie qui a suivi l'annonce de la mesure Draghi est déjà retombée et l'Espagne emprunte à nouveau à 6 %.

Vous avez évoqué l'adossement du MES à la BCE mais Mme Merkel n'en veut pas. Pourtant cela ne ferait qu'aligner la BCE sur toutes les autres banques centrales. L'Allemagne est prise dans une contradiction : elle veut être présente dans les pays émergents mais elle réalise l'essentiel de ses exportations dans la zone euro. Rappelons-lui le mot de Thomas Mann : « Plutôt une Allemagne européenne qu'une Europe allemande ».

Mme Merkel et M. Schäuble ont évoqué l'élection du président de la Commission européenne au suffrage universel et l'institution d'un ministre des finances européen, qui aurait droit de veto sur les budgets nationaux. Ces deux propositions ne sont pas sérieuses. Comme l'a relevé le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe, il n'y a pas « un peuple européen » qui pourrait légitimer l'élection d'un président au suffrage universel. Quant à donner un droit de veto à un « ministre des finances européen », cette proposition a au moins le mérite de la franchise : la mise en tutelle des budgets nationaux ne s'embarrasserait pas de fioritures.

Il est temps de refonder l'Europe, sur la base des nations et d'un projet social avancé. La monnaie viendra à son heure. Une fédération ne pourra naître que d'un sentiment d'appartenance commun. Ce jour n'est pas venu. Il faut trancher le noeud gordien. Que le Gouvernement fasse enfin bouger les lignes. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Pierre-Yves Collombat et Mme Lienemann applaudissent aussi)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Je salue la force et la constance de vos convictions, monsieur Chevènement. Votre discours est intéressant. Un étudiant pourrait faire une thèse sur votre sémantique.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Vous n'êtes pas mal non plus.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Merci. Cela a commencé par la « dépossession ». Nous sommes nombreux à penser que l'Europe nous permet au contraire d'aller plus loin. Ce fut ensuite le « suicide », dans une « indifférence molle » -je ne vois d'ailleurs pas ce que serait une indifférence « dure »... Il y a l'Europe « disciplinaire » épaulée par des « chiens renifleurs », à quoi pense l'ancien ministre de l'intérieur, le « pistolet sur la tempe ». C'est le lexique de la maladie en attendant la suite, dramatique.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Il y a aussi la pharmacie !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le fait est que l'on peut toujours guérir.

Cette sémantique est épaulée par une phonétique. Maastrik, dites-vous, comme tous les opposants au traité.

Mme Éliane Assassi.  - Moi, je dis bien Maastricht !

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est que vous avez une position nuancée. (Sourires)

M. Chevènement a une manière inimitable de parler de six pack, qui sonne aussi comme la trique. Ce décor lexical vient de loin, comme la position de ceux qui soutiennent l'Europe dans les hauts et les bas. Il est vrai qu'en période de crise, les choses sont plus difficiles. Reste l'espérance.

Inconstitutionnalité ? Jean-Pierre Chevènement a expédié le sujet en une phrase et demie. Il me faut quand même répondre. J'ai cru saisir deux griefs.

Ce traité transférerait des compétences à Bruxelles et serait donc contraire à la souveraineté nationale. Le Conseil constitutionnel en a jugé autrement. La principale innovation du traité, c'est de définir l'équilibre comme une situation où le déficit structurel n'excède pas 0,5 % du PIB. Est-ce inconstitutionnel ? Ce n'est pas une nouveauté. La discipline budgétaire est déjà inscrite dans les traités de Maastricht et de Lisbonne. Les directives de 2005 et 2011 avaient déjà fixé un objectif de 1 %.

Ensuite, le renforcement du pouvoir de la Commission abaisserait le Parlement. Les États pourront pourtant s'écarter de l'objectif en cas de circonstances exceptionnelles. Ce traité impose d'adopter des règles constitutionnelles ou « garanties de quelque autre façon ». Le Conseil constitutionnel a considéré que cela ne portait pas atteinte à la souveraineté. Cela n'impose au Parlement aucune contrainte budgétaire, il ne s'agit que d'une procédure. Et c'est bien lui qui dictera la loi organique.

La CJUE ne contrôlera pas les budgets nationaux mais seulement la transcription du traité. Il nous revient de nourrir le débat sur le contrôle démocratique de la politique économique et budgétaire européenne : c'est le sens de l'article 13. La Commission européenne n'obtient aucun nouveau pouvoir, elle n'a pas obtenu celui de saisir la Cour de Luxembourg.

Le fond de l'affaire, c'est que, si la France refuse le paquet constitué par le traité et ce qui a été obtenu pour la croissance et avec la TTF, elle tournera le dos à ce mouvement auquel nous sommes très attachés. On peut minimiser ce qui a été obtenu par François Hollande : ce serait une erreur car, ce qui compte, c'est le fait que cela ait été ajouté, c'est la nouvelle orientation donnée à l'Europe.

L'Europe est notre avenir, elle ne nous dépossède pas. Nous y tenons comme à notre pays. « Un jour viendra où les armes nous tomberont des mains. Un jour viendra où il n'y aura d'autres champs de bataille que les marchés s'ouvrant au commerce et les esprits s'ouvrant aux idées ». Voilà ce que disait notre collègue Victor Hugo en 1849 : cette phrase est d'une brûlante actualité. Et il ajoutait : « Un jour viendra où vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez dans une unité supérieure et vous constituerez la fraternité européenne ». (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur la plupart des bancs du RDSE ; M. André Gattolin applaudit aussi)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances .  - Le Conseil constitutionnel a tranché : le traité n'a rien d'inconstitutionnel. Moins éloquent que ceux qui viennent de me précéder, je me limiterai à quelques considérations financières. Les lois de programmation n'auront pas de portée contraignante : c'est ce qui distingue le dispositif envisagé de la « règle d'or » voulue par l'ancienne majorité. Les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale comprendront un article liminaire rappelant les engagements, il pourra être amendé. « Cliquetis des chaînes » ? Non, responsabilité des parlementaires.

La CJUE ne se prononcera pas sur nos textes budgétaires. Les programmes ne seront pas non plus contraignants. Il n'y a là aucun abandon de souveraineté.

Un effort de 30 milliards d'euros pendant vingt ans ? Non : c'est le ratio dette/PIB qu'il faudra réduire. Cela autorise un déficit d'environ 1 % du PIB.

Je propose donc le rejet de la motion.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué .  - Si cette motion avait été présentée simplement pour offrir à M. Chevènement l'occasion de nous présenter ses perspectives, elle aurait été pleinement justifiée vu le talent, la sincérité et la constance de ses propos depuis vingt ans. J'ai beaucoup de respect pour cette constance, et aussi un profond désaccord.

Son argumentation juridique ne tient pas : le Conseil constitutionnel s'est prononcé, il a jugé que ce traité n'emportait aucun abandon de souveraineté. L'essentiel des dispositions sont déjà en vigueur, y compris le dialogue avec la Commission européenne. La CJUE ne jugera que de la transposition en droit interne du traité.

Il n'y a donc aucun risque de nous voir condamnés à une amende de 2 milliards : nous transposerons le traité.

M. André Gattolin.  - Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. C'est si nous n'adoptions pas le texte que nous nous exposerions.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Non, pas aussi longtemps qu'il n'est pas ratifié.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - La supervision bancaire sera exercée par le BCE, qui n'est certes soumise au contrôle d'aucune institution élue. Soyons pragmatiques : nous voulons une supervision qui concerne toutes les banques. Certes, il existe déjà une Autorité européenne des banques pour les 27, et cela posera un problème de fonctionnement : nous y travaillons.

Nous ne sommes pas face à l'Europe dans nos rêves mais face à celle qui nous est donnée. Soit nous acceptons des compromis pour peser par la suite, soit nous jouons la crise : c'est la stratégie tribunicienne.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous ne sommes pas forcés de ratifier. On nous a déjà fait le coup avec le traité constitutionnel !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Vous avez voté le traité de Maastricht ; cela entraîne quelques conséquences... Il faut être cohérent.

M. Jean-Vincent Placé.  - Quelle est la cohérence quand on a voté contre le traité constitutionnel ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - On peut vous laisser à vos contorsions mais vous aurez besoin de nous.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Nous pouvons avoir besoin de tout le monde pour faire oeuvre utile ; cela n'implique pas de laisser la mauvaise foi sans réplique.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Quelle suffisance !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je ne confonds pas humilité et faiblesse. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

En 1992, François Fillon a voté contre le traité de Maastricht, tout comme MM. Seguin et Chevènement. Il soutient à présent le TSCG. Je ne l'ai pas traité de contorsionniste : la variété des contextes peut justifier des positions différentes. Mme Lienemann n'a-t-elle pas voté le traité de Maastricht, tout comme M. Mélenchon ? Oui, j'ai voté contre le traité constitutionnel : je ne voulais pas d'une Europe libérale. On peut vouloir réussir au Gouvernement ce que l'on réclamait dans l'opposition. La cohérence, monsieur Placé, lorsqu'on appartient à une majorité, c'est d'aider le Gouvernement à atteindre ses objectifs ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - C'est parfois dur de manger son chapeau.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Grâce au pare-feu institué cette année, les États en détresse ne subiront plus des taux d'intérêts exorbitants : voilà la solidarité.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - N'oublions pas la conditionnalité.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Les 400 milliards de capital du MES auront un effet de levier, ils lui permettront d'emprunter. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Il faudra l'accord des États.

Mme la présidente.  - Dois-je déduire de vos propos que vous êtes contre la motion, monsieur le ministre ? (Sourires)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - En effet.

M. Pierre-Yves Collombat .  - « Il n'y a qu'une route vers le bonheur, c'est de renoncer aux choses qui ne dépendent pas de notre volonté », disait Épictète. Voilà le raisonnement que tient le Premier ministre. Pour notre part, en refusant ce traité, nous affirmons notre liberté. La servitude volontaire serait la seule liberté possible pour les Européens : c'est beau comme de l'antique...

Ni l'euro ni la règle d'or ne proviennent d'un décret divin : ce sont des constructions humaines. Voilà venue la post-démocratie, où le pouvoir est exercé par des autorités technocratiques. La démocratie, c'est le règlement des affaires publiques argument contre argument. La post-démocratie, c'est leur règlement par des experts.

Pourquoi 3 % du déficit nominal -chiffre qui fait penser à la Trinité ? Pourquoi 60 % de dette publique ? Pur arbitraire. Pourquoi 0,5 % du déficit structurel ? Pour la beauté du chiffre.

Pour régler une crise financière d'origine bancaire, les dirigeants européens ont pris des mesures qui ont précipité la crise économique. Vous pensez sauver l'Europe contre ses peuples ; c'est au résultat inverse que vous parviendrez. (M. Jean-Pierre Chevènement applaudit)

M. Jean-Claude Lenoir .  - Il est rare d'assister à des débats d'aussi haute tenue. Le groupe UMP votera contre la motion. Notre hémicycle comprend trois groupes. Il y a d'abord les sophistes, qui avancent des arguments réversibles -comparons les propos de MM. Marc et Rebsamen à ceux qu'ils tenaient en février. Il y a ceux qui cultivent le paralogisme, de bonne foi : M. Chevènement est de ceux-là. Pour combattre cette déviance, les philosophes d'Athènes ont jeté les bases de la logique. Nous, nous sommes logiques et voterons ce texte que nous avons toujours soutenu.

Les phrases de Victor Hugo citées par M. Sueur nous ont émus. Imaginant un grand ballon dirigeable où toute l'humanité sera réunie, notre ancien collègue écrivait dans La légende des siècles : « Nef magique et suprême !/ [...] Elle a cette divine et chaste fonction/De composer là-haut l'unique nation,/A la fois dernière et première,/De promener l'essor dans le rayonnement,/Et de faire planer, ivre de firmament,/La liberté dans la lumière. »

La motion n°1 n'est pas adoptée.

Question préalable

Mme la présidente.  - Motion n°2, présentée par M. Billout, Mmes Assassi et Beaufils, M. Bocquet, Mmes Cohen, Cukierman, David, Demessine et Didier, MM. Favier, Fischer et Foucaud, Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Le Scouarnec, Mmes Pasquet et Schurch et MM. Vergès, Watrin et P. Laurent.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.

M. Michel Billout .  - Après tant de poésie, je proposerai une lecture plus terre à terre mais plus fidèle de ce traité.

Bien loin de réorienter par l'Europe dans le sens du progrès social et écologique, il nous soumettrait encore davantage aux marchés. Le groupe UMP et le centre ont raison de le voter : ce traité est le leur. Mais comment la majorité de la gauche peut-elle lui trouver autant de qualités ?

J'ai entendu des arguments sérieux, mais aussi des éléments plus troublants. Dépassé, ce traité ? A quoi bon en débattre ? Ne pas le ratifier nous exposerait à des sanctions financières.

Nous pourrions faire une autre lecture de ce traité, nous a dit M. le ministre. Et Christian Bourquin regrette que la gauche ne l'ait pas écrit tant il est positif !

Voulons-nous manquer à la parole de la France, affaiblir la position du président de la République ? Sommes-nous irresponsables ? Non, bien sûr. Ce sont des arguments d'autorité, sans aucune base. C'est vouloir faire peur à l'opinion publique. Refuser ce traité, ce serait manquer à notre parole ! En début d'année, au plus fort de la crise, ce sont les Allemands qui ont réussi à faire adopter des règles draconiennes. Pourquoi avoir qualifié ce traité de mauvais en mars et le ratifier en octobre, alors qu'il reste animé par la logique libérale ?

Le pacte de croissance est le fruit d'un accord politique, d'un compromis qui n'est juridiquement pas lié au traité, qui ne le mentionne pas. Il faut donc relativiser ce que François Hollande a qualifié de concessions de la part de l'Allemagne.

Notre groupe ne partage pas l'optimisme du Gouvernement : les 120 milliards joueront un rôle dans la relance économique mais il ne s'agit que de 1 % du PIB européen et de la reprise de financements déjà existants. Les analystes économiques ont d'ailleurs jugé que son montant était insuffisant.

La victoire politique est symbolique. Sur le fond, François Hollande a bien accepté le TSCG écrit par Mme Merkel et M. Sarkozy : la politique d'austérité est donc en marche.

Ce n'est pas sur le pacte de croissance ni sur la taxe sur les transactions financières que nous sommes appelés à voter mais sur TSCG de M. Sarkozy et de Mme Merkel. Son application restera aussi néfaste pour les peuples européens.

Ne pas le ratifier ouvrirait une crise politique en Europe ? Il continuerait à s'appliquer. Le six pack a déjà durci le pacte de stabilité et renforcé la surveillance macro-économique. Si nous avons obtenu des concessions, ne faudrait-il pas élargir la brèche, rassembler les pays qui ne veulent pas de cette rigueur imposée, modifier les rapports de force au sein de l'Union européenne ?

Nous aurions des alliés pour refuser d'inscrire l'austérité dans le marbre du texte européen.

J'en viens aux aspects les plus négatifs du traité : la montée des déficits publics est la conséquence des cadeaux fiscaux faits aux plus riches et des aides aux banques. Ce traité est une aberration économique : en limitant la capacité des pays à relancer leur économie, la logique récessive est en marche. On retrouvera des budgets en équilibre ? Peut-être, mais alimentés avec quelles ressources et avec quelle activité économique ? La prétendue solidarité allemande est une supercherie. Les sociétés vont être étranglées.

Le traité bafoue la souveraineté nationale des pays de l'Union. La règle de l'équilibre budgétaire est considérablement durcie avec les 0,5 % de déficits structurels. La Commission européenne désormais surveillera et sanctionnera les États en déficit.

Chacun d'eux devra soutenir les mesures antisociales imposées par Bruxelles pour contraindre un État en difficulté. Ils pourront même les poursuivre en justice. C'est une forme de délation entre États souverains. Non, il ne s'agit pas de partenariat budgétaire et économique mais d'une simple mise au pas. En ratifiant ce traité, vous franchiriez un nouveau pas vers un fédéralisme européen autoritaire. Il est encore temps de l'éviter en adoptant cette motion. (Applaudissements sur les bancs CRC, MM. Jean-Pierre Chevènement et Pierre-Yves Collombat applaudissement aussi)

M. Jean-Yves Leconte .  - Rien ne serait pire que la remise en cause de la zone euro. Il ne peut y avoir de sortie d'un pays en douceur ; il y aurait un effet domino destructeur. Les spéculateurs n'attendent qu'un signe de faiblesse pour revenir à la charge. Les acteurs de l'économie réelle en Europe sont trop intégrés pour faire face. Nous risquerions de connaître une boucherie sociale sans précédent.

Mme Éliane Assassi.  - C'est déjà le cas.

M. Jean-Yves Leconte.  - Madame, en Grèce, au Portugal, en Espagne, nous n'en sommes pas là.

Mme Éliane Assassi.  - Et pourquoi y arrivons-nous ?

M. Jean-Yves Leconte.  - Ce serait le cas si un pays sortait de l'euro. (Mme Éliane Assassi s'exclame) C'est pourquoi il ne faut pas voter cette motion (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Nous aurons gagné lorsque l'idée d'une sortie de la Grèce de l'euro sera aussi incongrue que celle d'une sortie de la Californie du dollar !

Mme Éliane Assassi.  - Vous mélangez tout !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Aux États-Unis, la FED intervient !

M. Jean-Yves Leconte.  - Exprimer des réserves sans tenir compte de la réorientation obtenue par le président de la République, c'est céder au renoncement. Notre économie n'est plus stimulée par la dette publique : elle a augmenté de dix points en 2009, sans empêcher la récession.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet argent est passé dans les caisses des banques !

M. Jean-Yves Leconte.  - Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain ! Keynes n'est pas la solution miracle. Le Japon, la Grande-Bretagne et les États-Unis ne vont pas mieux que nous. Cette crise n'est pas conjoncturelle mais celle d'un modèle économique.

Il ne faut pas revenir sur les transferts de souveraineté, acceptés grâce au referendum sur Maastricht -et par Jean-Luc Mélenchon- que François Mitterrand avait organisé pour consulter directement les Français.

Nous devons ouvrir un nouveau chemin pour parvenir à des équilibres nouveaux tant en matière économique que sociale et environnementale. Nous soutenons ce traité car il a été complété par un pacte pour la croissance et l'emploi, par l'union bancaire.

Oui, il faut mettre fin à l'irresponsabilité de la BCE, qui a conduit à une supervision laxiste avec les conséquences que l'on sait !

L'Union bancaire devra se formaliser rapidement. Il faut éviter de faire peser dans les comptes des États les défaillances de certaines banques privées. Une coordination fiscale est inévitable pour parvenir aux euro-bonds que nous appelons de nos voeux.

Le fédéralisme ne doit plus être un tabou mais un impératif. Nous, socialistes, voulons modifier le cadre économique et social en Europe. C'est ainsi que nous pèserons sur le monde. Nous en reparlerons dès 2014, lors des élections européennes.

L'Europe, ce n'est pas le problème mais la solution. Les 120 milliards qui ont été mis sur la table peuvent relancer la croissance.

En 2011, deux symboles de l'Europe édifiée sur les cendres du XXe siècle ont vacillé : la monnaie unique, victime de la crise, et l'espace Schengen pris en otage par Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi au prétexte des printemps arabes.

N'opposons pas élargissement et approfondissement : les deux sont nécessaires et aucun des maux actuels ne vient des récents élargissements. N'opposons pas le nord et le sud, l'est et l'ouest de l'Europe. Rappelons-nous de la tragédie de l'ex-Yougoslavie quand l'Europe, la France et l'Allemagne n'ont pas trouvé d'accord sur une attitude commune : quelle honte pour notre continent !

Le combat démocratique ne s'arrête jamais. Montrons-nous digne de ce débat. Allons de l'avant. C'est ainsi que la France sera au coeur de la construction européenne.

Je finirai moi aussi par une citation, de Léon Blum : « On éprouve quelque stupeur quand on constate quels sont aujourd'hui les tenants acharnés du dogme de la souveraineté sans limite et sans appel. Le socialisme, lui, est international. Il reste fidèle à sa tradition quand il affirme : la souveraineté doit être réduite à la limite de l'indépendance. Elle doit être soumise à l'appel de la volonté collective, européenne aujourd'hui, internationale demain ». (Applaudissements sur les bancs socialistes ; M.Gattolin applaudit aussi)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances .  - Si cette motion était adoptée, la discussion prendrait immédiatement fin. Or il faut la poursuivre : le rejet de ce traité serait préjudiciable à la France et à la zone euro.

Les 18 et 19 octobre, un Conseil européen se tiendra et la France doit l'aborder en position de force. Le non français pèserait d'un grand poids, avez-vous dit monsieur Billout. Certes, mais le oui aussi. Si le texte bafouait notre droit interne, le Conseil constitutionnel l'aurait mentionné. Non, nous ne sommes pas mis sous tutelle mais je suis d'accord avec M. Billout lorsqu'il souhaite que les décisions que nous prenons soient connues de nos concitoyens. La transparence est indispensable. Sans doute des efforts en ce sens sont-ils nécessaires.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué .  - Les questions que se pose M. Billout sont aussi les préoccupations du Gouvernement, même si nous ne sommes pas d'accord avec les réponses qu'il y apporte.

Nous sommes préoccupés par la crise, le chômage, les difficultés de l'Union européenne à apporter des réponses adéquates à ces problèmes.

Nous divergeons sur la stratégie : pour épargner l'austérité aux peuples, il faut des initiatives pour la croissance, au-delà des 120 milliards d'investissements. Il faut un budget pour l'Union européenne pour la période 2014-2020. Nos prédécesseurs voulaient réduire le budget de 200 milliards, sur les 1 000 prévus, tout en prétendant maintenir la politique de cohésion sociale et la PAC ! Nous ne serons pas les plus pingres des « radins », nous n'aurons pas une approche comptable de ce débat. Si nous nous battons en faveur de la taxe sur les transactions financières, c'est qu'elle permettrait, à terme, de doter l'Europe de ressources propres. De même, la réciprocité doit être la règle pour garantir que les échanges commerciaux se fassent au bénéfice de tous les pays. Enfin, nous voulons une stratégie industrielle européenne ; mais cela ne suffira pas. Le redressement des comptes et la solidarité financière sont également indispensables.

Faut-il prendre le risque d'un blocage du fonctionnement de l'Union européenne, dont la facture serait présentée aux peuples, ou devons-nous ratifier ce traité pour aller plus loin dans la construction européenne ? Nous avons choisi la deuxième solution. Le TSCG a été imposé au précédent gouvernement, incapable de maintenir en équilibre les comptes et qui avait demandé à la Commission, en 2007, de ne pas respecter les traités. Nous ne l'aurions pas rédigé ainsi mais il est là et il a été complété. Nous ne voulons pas ouvrir de crise en Europe et c'est pourquoi il faut le ratifier. En cas de rejet, le FESF cesserait de racheter des obligations souveraines, le MES de recapitaliser les banques, les États devraient le faire eux-mêmes en empruntant à des taux d'intérêts élevés, et qui paierait ? Les peuples que vous voulez protéger. C'est pourquoi nous ne pouvons soutenir votre proposition. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; M. André Gattolin applaudit aussi)

M. André Gattolin .  - La question préalable revient à dire qu'il ne faut pas débattre de ce traité. Nous, écologistes, en avons beaucoup parlé entre nous. Les débats ont été souvent passionnés, et parfois passionnants.

Le Conseil constitutionnel a dit que ce traité n'entraînait pas de perte de souveraineté de la France. Transférer une part de souveraineté n'est pas un sujet tabou pour nous écologistes. Évidemment, il conviendrait que l'Europe soit réellement démocratique et dispose d'un budget propre.

Les inquiétudes sont légitimes, certes, mais nous ne pouvons pas voter cette motion inspirée par le rejet du projet européen fédéraliste. Nous voulons prolonger le débat devant les Français. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes)

La motion n'est pas adoptée.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je veux remercier l'ensemble des sénateurs et sénatrices qui ont participé à ce débat.

Leur contribution aura permis de présenter l'économie du TSCG. J'indique aux sénateurs du groupe CRC que dans les mois qui viennent, nous allons continuer à nous battre pour réorienter l'Europe. Le débat se poursuivra. Je remercie l'ensemble du groupe socialiste : comme l'a excellemment dit Alain Richard, nous n'avons pas vocation à laisser aux futures générations des déficits insupportables. Enfin, je veux répondre aux orateurs de l'opposition qui ont été précis : le Gouvernement n'est pas fermé à toute évolution institutionnelle, contrairement à ce qu'a dit M. Bas.

Mais, il serait dangereux et illusoire, alors que la crise s'aggrave, de dire aux peuples qui souffrent que la politique européenne de la France se réduit à une réflexion sur les institutions. Nous voulons sortir de la crise par des mesures concrètes. En allant au bout de l'union bancaire, nous sommes à l'avant-garde du combat pour l'Europe. La remise en ordre de la finance mettra l'Union européenne à l'abri de la spéculation, qui a ruiné la croissance.

Nous sommes désireux d'aller vers plus de solidarité monétaire et financière. Certains pays du nord de l'Europe, en particulier l'Allemagne, ne veulent pas être solidaires si d'autres ne jouent pas le jeu. Mais si la discipline budgétaire est acceptée, pourquoi s'opposer à plus de solidarité ? Oui, nous sommes à l'avant-garde. Nous sommes très audacieux, mais dans la responsabilité, et la discipline budgétaire doit primer. Vous nous faites des procès d'intention, monsieur Bas, en prétendant que nous ne faisons pas de propositions et que, de toute façon, nous ne les mettrons pas en oeuvre. Mais voyez l'héritage que vous nous avez légué ! Les déficits ne sont pas les résultats de nos quatre mois de gouvernement ! La dette a augmenté de façon considérable, depuis dix ans que vos amis gouvernaient. Ne nous demandez pas de comptes à ce sujet. Je ne dis pas que nous ferons mieux mais laissez nous le temps de faire.

Nous demandons un effort aux contribuables les plus aisés pour redresser les comptes publics : ce n'est que justice.

Bien entendu il faut des perspectives, une ambition. Ce qui compte, c'est la vision, le projet européen que nous portons, et pas seulement la discipline budgétaire. Nous prendrons d'autres initiatives, dans d'autres directions que celle que vous envisagiez, grâce à la parole forte de la France. Mais il ne s'agira pas du projet allemand, danois ou espagnol mais du projet pour l'Europe. Il s'agit d'une vraie différence entre vous et nous. Oui, l'axe franco-allemand est plus solide si nous ne nous contentons pas d'écouter ce que les Allemands attendent de nous sans leur dire ce que nous attendons d'eux. Nous voulons construire des compromis solides avec notre partenaire qui, comme dans le passé, doivent être fondés sur un échange franc. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Renvoi en commission

Mme la présidente.  - Motion n°3, présentée par M. Bocquet et les membres du groupe CRC.

En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des finances, le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire.

M. Thierry Foucaud .  - Je déplore les conditions du débat. M. le ministre vient de répondre aux orateurs et j'interviens alors que la séance va être suspendue, avant qu'on ne me réponde. Je ne veux pas recevoir de conseils de M. Leconte car nous avons une autre idée de l'Europe. Nous sommes loin d'une simple ratification fiscale. Ce texte porte des changements profonds.

Vous estimez à juste titre que vos prédécesseurs étaient mauvais ; mais il semble, à vous entendre, que Nicolas Sarkozy nous ait engagé à respecter sa signature... Que dire du volet croissance, qui justifierait que nous ratifiions bon gré mal gré le traité ? A lire celui-ci, il faudra libérer les potentiels nationaux de croissance grâce à l'introduction de la concurrence dans de nombreux secteurs, entreprises de réseaux et services notamment. C'est le retour des vieilles lunes libérales, dont les zones blanches de l'internet et les chemins de fer privatisés montrent l'inefficacité.

Ce projet de la loi est le premier des cinq actes d'une tragi-comédie dont les prochaines lois de finances rectificatives occasionnées par les effets récessifs du budget initial constitueront l'épilogue. Avant le TSCG, l'examen du budget était précédé de longues discussions et le Parlement exerçait toute l'année son rôle de contrôle et d'investigation. Il en allait de même dans les collectivités territoriales, au moins jusqu'à la naissance de l'enveloppe normée.

Ces fragiles équilibres démocratiques vont voler en éclat. Un aréopage d'experts pompeusement nommé « Haut conseil des finances publiques », non élu, va déterminer à l'avance le contenu de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale. Ce collège de docteurs es austérité relaiera les exigences de Bruxelles et dira : « L'État doit trouver 3 milliards ; la sécurité sociale, 1,5 milliard ; les collectivités territoriales, 500 millions ». Le Parlement, les collectivités territoriales ne pourront plus décider que de l'administration de la purge ! Toujours le même refrain : tout pour la réduction des dépenses publiques.

Notre motion de renvoi en commission est pleinement justifiée. Comment se dispenser de l'avis de la commission des lois alors que le principe de libre administration des collectivités territoriales est en cause ? De celui de la commission des affaires sociales quand la protection sociale est en jeu ? De celui des commissions des affaires économiques et du développement durable quand le redressement impliquera de grands investissements et la mise en oeuvre d'une politique environnementale ? On parle déjà de suspendre la construction du canal Seine-nord-Europe et de divers équipements culturels ; mais les économies budgétaires mettent en péril la croissance de demain. De même, au grand regret de Mme Schurch, la mise en gabarit de la N 145 sera peut-être reportée. Combien de morts faudra-t-il encore avant qu'elle ne soit mise en sécurité ? Plus globalement, il faudrait aussi développer le fret ferroviaire dans le coeur enclavé du pays.

Le traité aura des effets concrets sur nos territoires et nos concitoyens. Dans son architecture comme dans tous ses articles, la loi de finances pour 2013 transpire la même logique : gel ou réduction des dépenses, restriction des créations d'emplois, transferts de compétences vers les collectivités territoriales ou la sécurité sociale...

L'application du traité se heurtera au problème de définition du déficit structurel. Si elle existe, qu'on nous la fournisse ! Tous les pays ne sont pas dans la même situation : voyez l'aménagement du territoire, la situation économique ou démographique. Un ancien directeur de l'Agence France Trésor, membre du directoire de la BCE, mettait en doute, en 1998, la pertinence même de la notion de déficit structurel.

Quarante ans de dérégulation, de cadeaux fiscaux, de gaspillages, de prise en charge des désordres du marché par les deniers publics : voilà, pour une grande part, l'origine de la dégradation des comptes publics.

Ne ratifions pas ce traité avant d'en avoir mesuré tous les tenants et les aboutissants. (Applaudissements sur les bancs CRC)

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.