Représentation des Français hors de France (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger (procédure accélérée) et du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France (procédure accélérée). La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes feraient l'objet d'une discussion générale commune.

Discussion générale commune

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger .  - Ce projet de loi vise à réformer la représentation politique des Français de l'étranger. Elle s'inscrit dans le sillage de Victor Hugo qui disait, en 1868, « la France n'est pas un empire, pas une armée, par une circonscription géographique ; la France est une âme. Où est-elle ? Partout. Il arrive parfois à une patrie d'être exilée, une nation comme la France est un principe ».

Cette universalité implique en retour des devoirs. La gauche depuis 30 ans a voulu des règles parfaitement démocratiques pour porter la voix des Français. La loi du 7 juin 1982, que nous devons à Claude Cheysson, visait à donner aux Français de l'étranger une représentation à la hauteur de la richesse qu'ils nous apportent. Ce projet de loi achève de satisfaire ce voeu.

Je me réjouis que ce texte vienne en premier lieu en examen au Sénat, qui représente les collectivités territoriales et a toujours joué un rôle particulier vis-à-vis des communautés à l'étranger, qu'il a longtemps été seul à représenter.

Ce texte est le résultat d'un constat : il fallait moderniser la représentation des Français de l'étranger, désireux d'exercer leur citoyenneté malgré leur éloignement. Cette réforme est depuis longtemps souhaitée : plus de dix propositions de loi ont été déposées ces dernières années. Ce projet vient satisfaire ces voeux. Le Gouvernement a examiné sans parti pris les projets émis au sein de l'AFE, après évaluation. Un soin particulier a été apporté à l'examen de deux propositions. L'une, créant une collectivité d'outre-frontière, mais qui ne pouvait aboutir sans une lourde réforme de la Constitution. L'autre créant un établissement public semblable aux régions d'avant 1972, aboutissant à l'inverse de ce que recherchent ses promoteurs, c'est-à-dire à plus d'autonomie pour les Français de l'étranger.

Les avis sollicités se sont rejoints. Les deux propositions ont été rejetées. La commission des lois de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) avait défini trois principes, retenus comme base de départ : satisfaire à un double principe de proximité et de représentativité et élargir le corps électoral.

Merci à l'engagement de M. Leconte. Sous l'autorité du président Sueur et avec l'appui de Mme Tasca, votre commission a procédé à des ajustements. Le Gouvernement est fier de porter cette réforme, qui se faisait attendre, tant le décalage était patent. Les Français de l'étranger ne sont ni des exilés fiscaux, ni des traîtres comme le proclamait Vergniaud en 1791, les accusant de rompre le pacte social, ni de riches retraités. Le président de la République a rappelé que la France est redevable aux Français de l'étranger de son rayonnement dans le monde, en en donnant l'image d'un pays curieux, dynamique et ouvert.

Si 1,6 million de Français de l'étranger étaient inscrits dans les consulats en 2012, mais ils sont plus vraisemblablement 2,5 millions, l'inscription étant facultative. M. Ayrault, à Ottawa récemment, avait sans doute devant lui des descendants des émigrants du XVIIIe qu'avait encore pu rencontrer Tocqueville. Mais leur nombre et leurs profils ne sont pas comparables. Avec le Royaume-Uni et la Belgique, la Suisse concentre le quart des ressortissants à l'étranger. Mais la croissance est forte aux États-Unis, en Asie et en Océanie. La population d'expatriés, qui a doublé en quinze ans, croît de plus de 4 % par an depuis cinq ans ; 60 % d'entre eux ont entre 18 et 25 ans : les études les guidant, sans objectif d'installation définitive. Quarante pour cent de nos expatriés sont des binationaux, dont beaucoup ont fondé une famille.

Par sa vitalité, cette communauté est plurielle, c'est ce qui en fait la richesse, comme le constatait le président de la République à Malte, en octobre. La diplomatie économique trouve avec les Français de l'étranger ses premiers ambassadeurs.

Notre pays a accompli un effort considérable pour faire représenter son émigration au Parlement. Car les expatriés veulent pouvoir exercer leur citoyenneté. La distance, disait Jean-Marc Ayrault, donne la conscience aiguë que l'on représente des valeurs et, faisant écho à Alexis de Tocqueville, constatait que ces expatriés avaient le même désir de rester liés à la France. Les sénateurs Jozeau-Marigné, Pillet, Hyest, l'ont aussi souligné dans leurs rapports. Des députés de la Nation de Colbert jusqu'au Conseil des Français de l'étranger de Robert Schumann et Vincent Auriol en 1948, il s'agissait d'instituer une représentation locale, graduellement devenue politique. La réforme profonde, en 1982, par François Mitterrand, du Conseil supérieur des Français de l'étranger n'a guère été contestée, tant prévalait la cooptation. La loi de 2004 a contribué à améliorer encore la représentation des expatriés, comme la loi de 2012 ouvrant l'entrée des représentants des Français de l'étranger à l'Assemblée nationale. Mais le taux de participation aux scrutins concernés reste insatisfaisant : pas plus de 20 % en 2009 pour l'élection des conseillers à l'AFE, 42 % au deuxième tour des présidentielles en 2012 contre 81 % en métropole, 20,6 % au deuxième tour des élections législatives contre 57 % en métropole.

Désintérêt de la chose publique ou décalage entre la réalité de ces communautés et le dispositif électoral ? Le découpage des circonscriptions semble bien artificiel. Il faut 3 000 résidents en Andorre contre 19 000 à Bruxelles pour avoir un représentant.

L'élection des députés des Français de l'étranger a précipité la nécessité de donner une articulation entre les conseillers de l'AFE et les élus, comme les sénateurs ont su le faire avec les élus de leurs départements. Se pose également le problème du quotient électoral, trop faible : il faudra y remédier.

Sans anticiper sur les débats, je veux vous présenter les éléments essentiels de ce texte. En premier lieu, à l'instar des conseils municipaux, l'examen de la citoyenneté passe par la démocratie de proximité. D'où la création de 444 conseillers consulaires élus au suffrage universel direct, dans des circonscriptions où la France possède une représentation consulaire. Cent trente deux conseils consulaires remplaceront les comités qui assistent aujourd'hui les chefs de postes : ils participeront à la mise en place des politiques publiques en matière économique, éducative et culturelle intéressant les Français de l'étranger. Tirant leur force de leur légitimité électorale, les conseils pourront donner leur avis sur toute question concernant les Français de l'étranger. Leur seront associées des personnalités qualifiées et des experts. Représentants d'entreprises, parents d'élèves, présidents d'association : tous seront invités à participer.

Pour que l'expertise de ces conseillers ne soit pas perdue dans l'Hexagone, 80 d'entre eux siégeront à l'AFE. Il n'est pas d'élection sans loi électorale adaptée à son objet. Dans un souci de simplicité, nous avons choisi la proportionnelle à la plus forte moyenne, dans le respect de la parité. De un à neuf conseillers seront élus. Dans 22 circonscriptions, il n'y aura qu'un seul conseiller. Les représentations les plus nombreuses seront où nos communautés sont les plus larges, comme à Genève, Bruxelles et Londres.

Le pouvoir réglementaire doit avoir faculté de modifier ces circonscriptions, pour tenir compte des évolutions démographiques. Pour reprendre une expression d'Alain Richard, défenseur à l'Assemblée nationale du projet de loi de 1982, ce système a le mérite d'être juste.

La création des conseils consulaires élargira mécaniquement le collège électoral sénatorial. C'est aller vers plus de normalité, et votre commission des lois s'en est félicitée.

Afin de permettre l'élection de l'ensemble des conseillers avant 2014, il est proposé de proroger le mandat de la série B d'un an.

Je forme le voeu que tous les groupes de la Haute assemblée se rejoignent sur ce texte. Les consultations préparatoires ont montré que tous étaient favorables à cette réforme. Pour avoir siégé à l'AFE, je sais que vous connaissez le dévouement des Français de l'étranger. Ils ont besoin de notre soutien. Nous le leur devons. Certains se plaisent à invoquer, sinon à provoquer, la division de la société française. Tel n'est pas le cas à l'étranger, où les Français, unis, nous apportent le vent du large. En souvenir du vote unanime qui a porté l'adoption de la loi de 1983, je vous invite à leur manifester votre soutien. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur de la commission des lois .  - Je me réjouis de la présence, dans l'hémicycle, des représentants des Français de l'étranger.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Et des autres ! Car ce débat concerne la République.

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur.  - Absolument. Vous avez évoqué la réforme Mauroy de 1982, mise en place par Claude Cheysson. Je rappelle que le Conseil supérieur des Français de l'étranger avait été créé par décret, en 1949, par Robert Schuman. C'était rendre hommage à la mobilisation des Français de l'étranger pour sortir le pays du désastre où l'avait conduit la guerre ; dès le 18 juin le général de Gaulle avait évoqué le renouveau de la France grâce aux Français établis hors du territoire. À chaque période de la vie d'une nation, il faut conserver des liens attentifs avec ceux qui, à l'étranger, lui sont attachés.

Si les questions institutionnelles ne font pas partie des préoccupations premières des Français de l'étranger, elles sont pourtant essentielles, pour qu'ils aient une représentation complète, au Sénat et à l'Assemblée nationale. À partir de quoi, la place de l'AFE ne peut plus être la même : il faut la revoir. Je rends hommage à Guy Penne et à Robert Del Picchia qui ont bien travaillé. Une commission de la réforme s'est réunie entre 2000 et 2003. La fusion des listes électorales a montré le poids politique des Français de l'étranger : il était essentiel que les 1,3 million d'inscrits - 2,5 millions estimés - aient une représentation adéquate. Il est aujourd'hui logique de réformer l'AFE. Pour éviter tout problème, il faut proroger, tout d'abord, les mandats actuels, pour que la réforme se mette en place dans de bonnes conditions. Cette réforme parie sur la proximité et la légitimité que donne l'élection. Même si elle n'est pas aussi ambitieuse que certains l'auraient voulu, elle donnera le moyen aux Français de l'étranger de peser sur l'orientation des politiques qui les concernent.

L'AFE, qui a 60 ans, est paritaire à 36 %. Elle a aidé à la création des députés représentant les Français de l'étranger, défendu les bourses et l'action sociale. Au-delà, certains se demandent pourquoi une telle représentation dans l'Union européenne, où existe une citoyenneté européenne. Mais force est de constater que nos consulats jouent encore un rôle majeur, en particulier dans les pays en crise, que l'école française, elle aussi, joue un rôle crucial. Il est donc indispensable de conserver cette représentation des Français de l'étranger, y compris dans l'Union européenne. Qui sont ces Français de l'étranger ? Des compatriotes qui veulent découvrir le monde et d'autres horizons, mais aussi des hommes et des femmes qui ont le sentiment de se heurter à un plafond de verre, de subir ici la dictature du diplôme ou qui recherchent un emploi. Nous devons faire en sorte qu'ils conservent un lien avec notre pays.

Être Français, ce n'est ni le droit du sol, ni le droit du sang, mais l'appartenance à la communauté nationale. Il faut donner des outils pour préserver ce sentiment d'appartenance à l'étranger, en y ayant des écoles, en aidant les personnes âgées.

Il faut avoir des institutions qui aident à mieux mobiliser les compétences des Français de l'étranger, en ces temps de crise, pour aider au redressement de notre pays.

Les conseils consulaires assureront une représentation de proximité et, via l'AFE, feront remonter les observations à Paris.

Le collège électoral des sénateurs s'en trouve multiplié par trois ; 155 grands électeurs, c'était totalement décalé. Cet élargissement fait l'unanimité parmi nous.

L'AFE élira son président, ainsi qu'elle le demandait. Nous avons conduit de nombreuses auditions et nous sommes efforcés de trouver un système d'élection pour les représentants de l'AFE via le suffrage universel, qui assure une meilleure participation. Les élections peuvent, pour les Français de l'étranger, être assimilées à des élections municipales. Il est donc important, par parallélisme des formes, de montrer que ces deux élections ont même vocation. Soulignons, enfin, que la question des compétences mérite d'être améliorée : difficile de contrôler les politiques qui concernent les Français de l'étranger par la voie législative, car la plupart des mesures sont réglementaires. Il faudra une compétence partagée sur les orientations des politiques publiques, je pense aux aides sociales, aux bourses. Nous devons travailler à une meilleure participation électorale. Le phasage avec les municipales devrait y pourvoir - même si nous ne l'avons pas retenu pour la première élection.

Il faudra aussi veiller que personne ne soit mis de côté dans le débat public - je pense à la fracture numérique. Réussir cette réforme à moyens constants est une gageure. Nous savons quel est le contexte, mais il faudra y revenir lors du débat.

D'autres questions ont été posées, qui reviendront dans le débat. Je pense à la participation des membres du conseil consulaire dans les conseils d'administration des établissements, à l'orientation de la politique de la Caisse des Français de l'étranger, dont les membres du conseil d'administration sont élus par l'AFE : ne faudrait-il pas rendre universelle son action ?

Une représentation proche des Français de l'étranger dans leur diversité : tel sera le moyen d'associer nos compatriotes, à l'heure où, avec l'importance que prennent les questions migratoires, il devient essentiel d'assurer la cohésion entre tous les citoyens.

Nous sommes donc favorables à ce texte, sous réserve de l'adoption des amendements que nous proposerons. (Applaudissements à gauche)

Mme Éliane Assassi .  - Nos compatriotes expatriés bénéficient de longue date d'une représentation politique pour faire valoir leurs droits. Le projet de loi de prorogation du mandat des membres de l'AFE ne soulève pas de problème majeur. La représentation des Français de l'étranger est une spécificité démocratique mal connue, y compris des intéressés. Une modernisation était nécessaire. C'était une revendication ancienne des deux associations représentant les expatriés, et qui faisait partie des promesses des candidats à l'élection présidentielle.

La réforme de 2008 a renforcé encore cette nécessité, puisqu'elle a superposé différents niveaux de représentation.

Il fallait remédier à un abstentionnisme très élevé. Certes, tout cela n'est pas chose aisée. Les réponses techniques sont complexes. J'en veux pour preuve ce long texte de 37 articles.

Je reviens aux débats de 2008. Pourquoi onze députés ? Leur élection a-t-elle fait avancer l'égalité républicaine ? Mon groupe s'y était opposé. Au nom de quel principe républicain offrir une représentation supplémentaire à une catégorie spécifique de citoyens ? Comme tout citoyen français, celui qui réside hors de France dispose du droit de voter aux législatives. Sans compter qu'autant de circonscriptions ont été supprimées sur le territoire national. Je ne suis pas persuadée que la démocratie y ait gagné.

Cela étant, la loi a été votée, il fallait adapter notre droit. Ce projet de loi y répond de façon souvent pertinente. Les deux principales associations représentatives contestaient le mode d'élection actuel. Je reconnais que votre tâche est difficile, madame la ministre. Un gouvernement, quel qu'il soit, est toujours suspecté lorsqu'il procède à de nouvelles délimitations électorales. La commission pour le renouveau et la déontologie de la vie publique, dans son rapport Pour un renouveau démocratique, vous a adressé un satisfecit. Le découpage actuel provoquait d'importants écarts auxquels il fallait bien remédier, avec une proportion homogène de quelque 20 000 électeurs pour un élu à l'AFE. La création des conseils consulaires élus au suffrage universel direct est un gage de rapprochement des électeurs avec leurs élus. Ce seront des élus de terrain, légitimes, appelés à devenir des interlocuteurs de poids de nos consuls et ambassadeurs.

J'apprécie que l'égalité entre les hommes et les femmes soit assurée. La réforme de l'AFE dans un sens plus démocratique est bienvenue. Elle élira son président ou sa présidente et se dégagera ainsi de la tutelle du ministère des affaires étrangères. L'élargissement du collège électoral des sénateurs - il passera de 155 à 520 grands électeurs - était impératif pour mettre fin à une curiosité française. Le vote par remise en main propre, la dématérialisation de la propagande électorale, le vote par anticipation méritent cependant d'être mieux encadrés ; sans doute le décret en Conseil d'État y veillera-t-il.

Au total, votre texte comprend de nombreuses mesures qui améliorent la représentation démocratique. Un léger reproche néanmoins : vous êtes parfois restée au milieu du gué. Notre commission des lois - je salue le travail du rapporteur - a prévu quelques améliorations substantielles, la plus substantielle étant la modification du mode de scrutin des conseillers de l'AFE. Vous savez notre attachement au pluralisme d'expression des diverses sensibilités politiques.

D'autres améliorations ont été apportées. Le droit à la formation pour les élus manquait, il est nécessaire. La concomitance avec les élections municipales est bienvenue. Je regrette que le Gouvernement n'ait pas été plus ambitieux. Je persiste à déplorer que le collège électoral sénatorial demeure limité, on reste dans un entre-soi de bon aloi. C'est une véritable maladie sénatoriale : songez à nos récents débats sur le lien entre la représentation des territoires et leur population ! Certains sénateurs seront élus par à peine 28 grands électeurs ! La représentation démocratique gagnerait à un doublement voire à un triplement du nombre des grands électeurs.

Le groupe CRC votera votre texte. (Applaudissements à gauche)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Pour ce texte plutôt complexe pour un non-initié, faisons simple et rapide : le projet de loi, amendé par notre commission des lois, ne peut que recevoir le soutien du RDSE, le mien en particulier...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Même si j'estime qu'il aurait pu aller plus loin, même s'il met fin à une situation très particulière en triplant le nombre des grands électeurs, qu'il demeure possible qu'un sénateur soit élu par 28 grands électeurs est sans doute un gage de proximité, mais reconnaissons qu'il reste des marges de progrès... La création des conseils consulaires est incontestablement une avancée.

Tous ceux qui se déplacent dans le monde savent ce que le rayonnement de notre pays doit à nos communautés d'expatriés. Mais qu'un conseil puisse ne comporter qu'un seul membre n'est ni suffisant ni démocratique. Faudra-t-il qu'il se vice-préside lui-même ? (Sourires)

Je suis moins enthousiaste sur la réforme de l'AFE. J'ai un peu de mal à saisir son articulation avec les conseils consulaires. Je vois bien que la matière est complexe, mais le décalage entre les deux institutions paraît problématique. Notre commission des lois a eu raison de proposer le suffrage universel direct.

Cette réforme doit se faire à moyens constants - il paraît que c'est une obligation obligatoire.... Je le regrette. Une modeste dotation supplémentaire aurait sans doute permis de dynamiser la participation de nos concitoyens établis à l'étranger. L'élection des onze députés n'a guère mobilisé : 20 %, soit la moitié de la participation aux élections présidentielles. Tout ce qui renforcera le sentiment d'être nécessaire à la communauté internationale, où qu'on réside, sera bienvenu ; ce qui passe par une amélioration des moyens d'expression et de vote.

À ces micro-bémols près, ce texte mérite d'être soutenu, y compris pour la modification du calendrier. Bonne chance à cette réforme, qui crée une dynamique, à laquelle, que nous vivions ou non à l'étranger, nous sommes tous attachés ! (Applaudissements à gauche)

Mme Kalliopi Ango Ela .  - La représentation des deux millions de Français établis hors de France est un sujet important, même s'il mobilise peu en dehors des sénateurs qui les représentent. Je suis très attentive à cette réforme, dont la nécessité est incontestable et remercie mon groupe de m'avoir désignée chef de file sur ces deux textes.

L'étroitesse du corps électoral des sénateurs constituait une anomalie. Ce projet de loi l'élargit à juste titre. L'AFE a fait savoir que l'expression « délégués électoraux » lui semblait plus opportune que celle de « délégués consulaires ». Le dispositif du projet de loi reste peu clair ; d'où l'amendement déposé par le groupe écologiste. J'espère qu'il sera adopté. L'AFE souhaite son adoption, je le rappelle.

Cette réforme s'inscrit dans le souhait du Gouvernement de développer la démocratie de proximité, à l'étranger comme en France. Je propose qu'un droit de pétition permette à nos concitoyens de proposer d'inscrire à l'ordre du jour des conseils consulaires toute question relevant de leur compétence...

M. André Ferrand.  - Très bien !

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Madame la ministre, vous avez entendu nos demandes légitimes. Le Gouvernement s'est dit ouvert aux propositions sénatoriales tendant à rétablir le suffrage universel direct ; c'est ce que fait le rapporteur. Les écologistes regrettent toutefois la liste unique, qui restreint la liberté de candidature et de vote. Je m'interroge sur la constitutionnalité d'un vote à un seul bulletin et sur les conséquences budgétaires d'une éventuelle annulation. Il me paraît préférable que les conseillers consulaires et les conseillers de l'AFE soient élus sur des listes distinctes.

La lutte contre le cumul des mandats est un autre de nos combats. Je déposerai deux amendements, destinés à rouvrir ce débat, l'un sur le non cumul dans le temps du mandat de conseiller consulaire, l'autre sur l'incompatibilité avec un mandat de parlementaire. Il s'agit de renouveler les conseillers consulaires en y élisant des femmes, des jeunes, des représentants conformes à la nouvelle sociologie des Français établis hors de France. Je salue la règle de parité posée par ce texte. Je m'interroge néanmoins sur la parité effective qui en découlera - il n'est rien dit des têtes de liste.

La question des compétences des conseillers, consulaires ou à l'AFE, est cruciale. L'avis de la commission des lois de l'AFE sur ce point, voté à l'unanimité en plénière, est éloquent. Je regrette que n'aient été ajoutées, à l'article 20, que les conventions internationales fiscales et sociales. On aurait pu aller plus loin, d'autant que les contours du régime fiscal sont flous et renforcent les préjugés qui circulent déjà sur nos compatriotes expatriés. Les Français de l'étranger sont très attentifs aux politiques publiques menées par notre pays dans le monde et en particulier à son rayonnement culturel.

Je suis ravie, madame la ministre, que vous ayez opté pour la présidence dévolue à l'élu plutôt qu'au ministre des affaires étrangères. Encore faudra-t-il abroger le décret du 6 avril 1984, qui dispose que l'assemblée est convoquée par le ministre. Pourriez-vous, monsieur le rapporteur, nous éclairer sur le maintien de cette disposition ? Quel motif, autre que budgétaire, le justifie ?

Je milite pour plus de transparence dans le financement des campagnes électorales, mais pas au détriment des deux associations qui structurent les liens de nos communautés établies à l'étranger avec notre pays. Je voterai donc contre l'amendement de M. Gorce à l'article 29 duodecies, qui entend revenir sur ce qu'a prévu notre commission des lois.

Le « hors de France » n'est pas un bloc homogène. Plus ils sont éloignés de notre territoire, plus les Français ont besoin que leurs liens avec la France soient confortés - voilà qui peut entrer en contradiction avec les exigences du Conseil constitutionnel... La fracture numérique sévit dans les pays du sud. Je ne souhaite pas que certains Français subissent une rupture d'égalité. Ayant résidé 25 ans au Cameroun, j'y suis particulièrement sensible. Les Français établis hors de France sont soumis à deux réalités distinctes, celles de l'Europe et celle du reste du monde. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Très bien !

M. Christophe-André Frassa .  - Hasard du calendrier, nous débattons de ce texte le jour même où le Gouvernement aurait dû convoquer les électeurs pour renouveler l'AFE.

M. Richard Yung.  - Hasard, en effet...

M. Christophe-André Frassa.  - Voire... Un point commun a marqué jusqu'ici toutes les réformes portant sur la représentation des Français de l'étranger : la concertation. Celle-ci déroge à cette règle, madame la ministre, il vous appartiendra dans le débat de me démentir...

Nous souscrivons tous à la nécessité de réformer, mais pas à n'importe quel prix ni n'importe comment. La commission des lois a permis d'établir un texte plus clair, bien qu'il soit encore loin de nous satisfaire.

La vice-présidence du conseil consulaire doit être effective. Les conseillers devraient pouvoir bénéficier des formations dispensées aux agents des affaires étrangères. L'AFE doit pouvoir continuer à se réunir deux fois par an. Il est très important que les parlementaires soient membres de droit de l'AFE, toutefois sans voix délibérative. Les conseillers à l'AFE doivent participer aux conseils consulaires de leur circonscription.

Le découpage est trop restrictif pour garantir la proximité. Nous souhaitons améliorer la représentativité et proposerons un nombre de 102 conseillers dans un nombre plus grand de circonscriptions. Nous ne pouvons accepter un vote par anticipation qui ne soit plus étroitement encadré par la loi.

On a du mal à suivre votre logique. Vous supprimez le vote par correspondance, mais le rétablissez pour les sénatoriales : la procédure que vous proposez en a toutes les caractéristiques, si elle n'en a le nom - comme le Canada dry. Certes, faire venir tous les grands électeurs à Paris a un coût, mais quid du vote par voie électronique ? Nul besoin ici d'un protocole aussi complexe et lourd que celui mis en place pour les législatives ! Les 520 grands électeurs sénatoriaux pourraient très bien voter par les voies sécurisées existantes entre le ministère des affaires étrangères et les postes consulaires. Je doute fort que le dispositif proposé soit validé en l'état par le Conseil constitutionnel. Nous devrons trouver un accord.

Au Sénat, contrairement à l'Assemblée nationale, l'ensemble des parlementaires représentant les Français de l'étranger sont issus de l'AFE. Nous défendrons, article par article, l'idée que nous nous faisons de la démocratie représentative de proximité. Nous le ferons avec gravité et détermination, mais aussi avec espoir et optimisme, car nous croyons en l'avenir. (Applaudissements à droite)

Mme Catherine Tasca .  - Je salue le travail accompli par notre rapporteur. Ce projet de loi est bienvenu et rencontre un large accord sur la nécessité absolue d'une réforme de la représentation des Français de l'étranger, plus de 30 ans après la loi de 1982, qui a permis l'élection du Conseil supérieur des Français de l'étranger, rebaptisé en 2004 AFE. Le décalage était patent entre cette représentation et la population renouvelée, rajeunie, en grande partie binationale, de nos compatriotes de par le monde. 

Le manque de représentativité et de lisibilité de l'actuelle AFE, comme l'élection de onze députés représentant les Français établis hors de France, rendait nécessaire cette réforme. Il n'était en outre plus conforme à notre conception de la représentation démocratique que les douze sénateurs soient élus par seulement 155 grands électeurs.

Ce projet de loi propose une vision nouvelle de la représentation des Français de l'étranger, progressiste, tournée vers l'avenir. J'espère qu'il fera son chemin rapidement, afin de permettre la tenue des élections au plus tard en juin 2014.

Les conseils consulaires placés auprès de chaque ambassade et poste consulaire participeront aux décisions locales, au plus près des territoires de vie de nos concitoyens et, faisant remonter l'expression de leurs points de vue à l'AFE, constitueront un maillage plus serré de la représentation locale des Français de l'étranger. Le Gouvernement a veillé à la bonne articulation entre les différents échelons.

L'AFE verra son rôle de conseil renforcé et ses compétences élargies. Le Gouvernement lui présentera annuellement un bilan de son action sur les matières intéressant directement les Français de l'étranger. Elle sera saisie dès le dépôt du projet de loi de finances des dispositions concernant les Français de l'étranger. Elle pourra procéder de sa propre initiative à des études, émettre des voeux, adopter des avis et des motions. Ce texte ouvre de nombreuses facultés aux conseillers de l'AFE, à eux de s'en saisir.

Le coeur de la réforme tient à la création des conseils consulaires, qui se substitueront aux différents comités existants. La création de conseils ne comportant qu'un élu, siégeant seul avec l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire, a fait l'objet de longs débats ; elle était nécessaire dans des circonscriptions qui n'étaient rattachables à aucune autre.

Enfin, le nouveau système sera le support d'un nouveau mode d'élection des sénateurs représentant les Français de l'étranger plus conforme à notre idéal démocratique ; le nombre de grands électeurs sera plus que triplé.

La commission des lois a amélioré un texte déjà très complet et cohérent. Le projet de loi a ainsi évolué sur plusieurs points renforçant votre objectif de démocratisation de la représentation, madame la ministre. La principale modification est l'élection au suffrage universel direct des conseillers de l'AFE telle que prévue à l'article 29 undecies, répondant au voeu unanime de cette assemblée et des associations représentatives. Une amélioration de la situation matérielle des conseillers a été apportée à l'article 19. Le contenu du rapport annuel du Gouvernement a été enrichi. Un amendement du groupe socialiste consacre à l'article 29 le droit à la formation des conseillers à l'AFE ; un autre en prévoit l'extension aux conseillers consulaires.

Le redécoupage des circonscriptions est réaliste et objectif : 20 circonscriptions et non plus 16, 102 conseillers à l'AFE. Cette évolution devrait recueillir l'assentiment sur tous les bancs.

Enfin, cette loi fait progresser la parité grâce au scrutin de liste proportionnelle.

Sur un sujet trop souvent considéré comme l'apanage des sénateurs représentant les Français de l'étranger, il importe d'engager ici l'ensemble de la représentation parlementaire sur cette réforme bienvenue. Elle sera soutenue par le groupe socialiste.

L'intérêt du Sénat pour les préoccupations des Français de l'étranger est constant, comme nous l'avons montré en 2010 à propos du texte sur le rayonnement culturel international de notre pays. Avec ce texte nous poursuivons le même objectif : renforcer le rayonnement de la France et les liens de la communauté expatriée avec la nation. (Applaudissements)

Mme Claudine Lepage .  - Nous appelions un tel texte de nos voeux depuis de nombreuses années. Les Français de l'étranger représentent l'équivalent du dix-huitième département français, si l'on s'en tient aux inscriptions sur les listes électorales. Leur éloignement ne s'accompagne pas d'un désintérêt pour la vie politique et culturelle française. Ils demeurent très attachés à la France et peuvent suivre aujourd'hui plus facilement son actualité politique, culturelle et sociale.

Le CSFE est créé en 1948. Ses membres sont désignés par l'ambassadeur. En 1958, le Sénat compte six sénateurs élus par le Sénat sur présentation d'une liste du CSFE. Il fallut attendre 1982 et la gauche au pouvoir pour instaurer des élections au suffrage universel. En 2004, l'AFE remplace le CSFE. Ses compétences demeurent consultatives, mais son fonctionnement se rapproche de celui des assemblées parlementaires. Enfin est venue la réforme constitutionnelle de 2008 et l'élection de onze députés représentant les Français établis hors de France.

Nous nous félicitons de ces deux projets de loi. Les Français de l'étranger sont des Français à part entière. La réforme que nous appelons de nos voeux depuis tant d'années est enfin là. Notre rêve, comme celui de l'AFE, c'était la création d'une collectivité « d'outre-frontières ». Les sénateurs des Français de l'étranger de tous bords, dont M. Leconte, ont déposé plusieurs propositions de loi reprenant ce schéma, qui n'a pas été retenu par le Gouvernement. Je n'y reviens pas, Mme la ministre s'en est expliquée.

Le projet de loi veut favoriser le développement de la démocratie de proximité : nous souscrivons à l'objectif. La création de conseils consulaires élus au suffrage universel direct renforcera le maillage local et rapprochera les élus des Français. La commission des lois a utilement renforcé les compétences du conseil. Il était aussi bon de prévoir l'élection d'un vice-président en son sein.

Il importera, cependant, d'encourager la participation électorale, au vu du faible enjeu qu'elle portera, puisque les débats seront limités aux questions concernant directement les Français de l'étranger.

Un mot sur le rôle, reconnu, que se partagent deux associations dans l'animation de la vie publique à l'étranger. Il faut prendre acte de leur existence dans le processus. Attention, aussi, à éviter des discriminations liées à la dématérialisation : d'où notre amendement sur les listes papier.

Je salue la volonté du Gouvernement d'accroître le capital démocratique de l'AFE qui élira, de surcroît, son président.

L'AFE aura compétence budgétaire. Cela est bienvenu. Comme l'est la proposition de votre commission des lois sur l'élection concomitante au suffrage universel direct des représentants à l'AFE. Je salue votre attitude constructive, madame la ministre. La question, cependant, de la compétence purement consultative de l'Assemblée mérite d'être posée.

La prorogation du mandat des représentants à l'AFE est nécessaire pour mettre en place cette réforme, qui doit apporter plus de justice et de pertinence dans la représentation de nos compatriotes expatriés. Je ne doute pas que notre Haute Assemblée votera ce texte. (Applaudissements à gauche)

M. Robert del Picchia .  - Je ne vais pas refaire l'historique de la représentation des Français de l'étranger : le rapport de Jean-Yves Leconte y pourvoit.

Passons, donc, sur le passé, mais qu'en est-il de l'avenir ? Où veut-on en venir et comment ? Cela répond-il aux attentes des Français de l'étranger ? Cette transformation est-elle réalisable ?

L'objectif de la loi est d'assurer une meilleure représentativité, par la proximité. Sans territoire, sans maire élu, reste le consul. Le projet de loi prévoit de créer des conseils consulaires faits de membres élus. Cela convient-il aux Français de l'étranger ? On verra à l'usage. Le principe vaut, sans doute : on sait que la circonscription des conseillers à l'AFE est souvent trop grande. L'AFE a voulu une collectivité outre-frontière. On nous propose, en lieu et place, une démocratie de proximité. Il faudra qu'elle soit reconnue comme telle sur le terrain.

Bien des amendements ont été déposés. L'intérêt général est ce qui nous guide. L'électeur devra bien avoir conscience qu'il participe à une élection locale, pour élire des élus locaux. N'allons pas le détourner vers d'autres buts, en faire un tremplin vers l'élection à l'Assemblée de Français de l'étranger, les législatives, voire les sénatoriales. Si nos concitoyens voient des arrière-pensées politiques...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La politique n'est pas une maladie honteuse. Elle est aussi dans les élections locales.

M. Robert del Picchia.  - Ne faisons pas en sorte que les conseillers consulaires soient de potentiels candidats à l'AFE.

Il faudra aussi que tous les services diplomatiques se saisissent de la réforme. Or ils ne reconnaissent pas toujours le travail des élus et leur statut.

Y aura-t-il des candidats ? Je pense que oui. Il est déjà bien des bénévoles, que l'on appelle les grenouilles de consulat. Ces élus ne devront pas être traités comme de simples aides ponctuelles. Si la réforme du CSFE a bien fonctionné, c'est grâce à la concertation. Il faudra poursuivre avec l'AFE.

Un mot sur les circonscriptions qui comptent de nombreux jeunes expatriés - je pense en particulier au Québec ou à l'Australie. Une compétence spécifique devrait leur être dévolue.

L'AFE va être profondément remaniée. Elle fonctionnera bien si on lui donne les compétences et les moyens voulus. Le nouveau collège électoral des sénateurs, avec 520 grands électeurs, répond au voeu de tous, mais la procédure retenue pour le scrutin ne nous sied pas. On nous dit que le vote électronique coûterait cher. Nous aurions aimé avoir des appels d'offres sur les trois élections à venir. On aurait pu retenir un tel système en reportant son application après la prochaine élection.

Ce texte est un pari sur l'avenir mais gardons-nous des risques de dysfonctionnements qui ralentiraient l'AFE. Les élus devront être autonomes dans leurs travaux, faute de quoi, gare à la descente, toujours plus rapide que la montée. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Richard Yung .  - Je salue l'engagement de notre ministre sur cette réforme : ce fut son premier chantier, et elle a eu raison de procéder ainsi, car pour ce type de réforme, c'est tout de suite ou jamais.

Cette réforme poursuit un double objectif. Asseoir, tout d'abord, la représentation des Français de l'étranger, qui souffre d'un manque de notoriété, aggravé par la réforme de 2008. En France, c'est la vie de la commune qui assure l'exercice de la citoyenneté. Les choses sont plus complexes à l'étranger. Élargir, ensuite, le collège électoral pour l'élection des sénateurs qui, en l'absence de réforme, pourraient être élus par seulement 28 grands électeurs...

Mme Bariza Khiari.  - Cela fait rêver !

Mme Éliane Assassi.  - Oh non !

Robert del Picchia.  - Et Saint-Pierre-et-Miquelon ?

MM. Christophe-André Frassa.  - Et Saint-Barthélemy ?

M. Richard Yung.  - Cela nous fragilise. Le collège qui élit les sénateurs de Paris compte plus de 2 000 membres, pour une population comparable à celle des Français de l'étranger. L'excellente proposition de loi de Mme Cerisier-ben Guiga, Mme Lepage et moi-même proposait de reprendre le dispositif qui prévaut pour les villes de plus de 30 000 habitants.

Ce texte relève plusieurs défis. Il renforce la démocratie de proximité, avec la création des conseillers consulaires, qui s'inspire de dispositifs étrangers - voir l'excellente étude de législation comparée du Sénat.

Le Gouvernement entend constituer un maillage en phase avec les évolutions de notre population à l'étranger et notre réseau consulaire, pour faire participer les Français de l'étranger à notre vie démocratique. Qu'un conseiller consulaire, monsieur del Picchia, puisse aspirer à être représentant à l'AFE, voire sénateur, je n'y vois rien à redire. Ces élus seront tout à la fois un relais et un moyen d'action locale.

Je me félicite qu'il soit mis fin au vote par correspondance, qui avait donné lieu à bien des dérives. Les modifications au fonctionnement de l'AFE vont dans le bon sens. Ses compétences ? Un débat annuel complet, un débat sur les dispositions de la loi de finances intéressant les Français de l'étranger, avant, j'espère le débat budgétaire au Parlement, qui pourra le relayer, autant de dispositions bienvenues.

Je salue le travail remarquable de notre rapporteur, qui a su tenir compte des remarques de l'AFE et s'accorder avec le Gouvernement. L'élargissement de la liste des thèmes est une bonne chose, comme le vote anticipé, indispensable pour les électeurs éloignés.

Autre innovation, la modification du mode de scrutin des conseillers à l'AFE. La concomitance avec le scrutin pour les conseillers consulaires est une bonne mesure. (M. Robert del Picchia s'exclame) C'est d'ailleurs le dispositif en vigueur en Guyane et en Martinique.

Mme Claudine Lepage.  - Tout à fait !

M. Richard Yung.  - Je soutiendrai l'amendement relatif à la formation des conseillers consulaires.

Les associations représentant les Français à l'étranger doivent pouvoir participer à la campagne. Les comptes de campagne sont contrôlés par le ministère des affaires étrangères. Je comprends les arguments de M. Gorce, qui souhaite que l'on y revienne mais, depuis 1981, la vie de nos communautés s'est structurée autour de ces deux grandes associations. Faut-il s'en séparer ? Choix cornélien. Sur la date des élections, je suis favorable au couplage avec les municipales mais, pour 2014, il faudra une élection en juin au plus tard. Passée la trêve estivale, il ne restera aux candidats au Sénat que trois brèves semaines pour se faire connaître de leurs électeurs et les connaître.

Quelques ajustements sont proposés : Mme Tasca défendra l'amendement pour augmenter le nombre de conseillers à l'AFE. Nous pourrions aussi être pionniers en interdisant le cumul des mandats dans le temps. Sur l'élection aux différents collèges de l'AFE, il faudra passer par la concertation. Je prends acte du refus du Gouvernement d'attribuer une compétence régionale aux conseillers de l'AFE, qui pourront participer à toutes les réunions régionales. Ils doivent, de fait, avoir une expérience générale et pas seulement de leur propre clocher.

Le groupe socialiste, vous l'aurez compris, apportera son soutien à ce texte.

La séance, suspendue à 18 h 35, reprend à 18 h 40.

M. Jean-Pierre Cantegrit .  - Il y a quelques mois, les Français ont élu un nouveau président de la République et se sont dotés d'une nouvelle majorité. Il est bien normal que le Gouvernement qui en est issu veuille modifier certaines institutions représentatives de leurs élections. Ainsi en est-il pour les Français de l'étranger. Ce texte aura d'importantes conséquences. Je m'étonne de votre raccourci historique. Alors que vous citez, à juste titre, les textes fondateurs de 1948 et la réforme de 1982, vous ne dites rien de l'importante réforme de 1990, sur un texte dont j'étais signataire avec M. Xavier de Villepin et dont M. Hoeffel fut le rapporteur. C'était sous le gouvernement Rocard, dont le ministre des affaires étrangères était Roland Dumas. Ce texte portait le mandat des conseillers de trois à six ans et créait des zones : il a guidé toutes les élections depuis lors, et je m'étonne, madame la ministre, que vous n'en fassiez pas état dans votre exposé des motifs, à la différence de Jean-Yves Leconte dans son rapport, ce dont je le remercie.

Vous créez quelque 450 conseillers consulaires : cela est positif. Ces conseillers pourront aborder utilement les questions locales, mais je m'inquiète de leurs moyens.

Élus au suffrage universel, ils auront naturellement de grandes aspirations ; nos ambassadeurs auront fort à faire pour y répondre et déployer tous leurs talents diplomatiques pour éviter d'éventuelles surenchères. Idem pour les conseillers à l'AFE, dont vous réduisez le nombre d'un tiers, pas moins : ils se heurteront vite à des problèmes de moyens.

Je m'inquiète que les députés et sénateurs n'aient pas de voix délibérative à l'AFE. Quel antiparlementarisme primaire ! (Exclamations ironiques sur les bancs socialistes) Des amendements doivent corriger cet oubli et s'ils n'étaient pas adoptés, les juridictions compétentes devraient être saisies, ne serait-ce que pour des raisons d'équité dans l'élection. Comment admettre que les parlementaires candidats à un renouvellement de leur mandat ne puissent paraître devant l'Assemblée de Français de l'étranger, tandis que les nouveaux candidats le pourraient ? Quid des grandes associations enfin, y compris l'Association des anciens combattants du monde, relais important de nos compatriotes ? Et des chambres de commerce françaises à l'étranger ? Elles auraient pu rester membres, sans voix délibérative.

Votre choix est clair : c'est une assemblée consultative et non délibérative qui vous sied. Sans moyens indépendants, elle n'aura à émettre que des avis. Vous vouliez la supprimer ; vous la maintenez, en la scindant. (M. Richard Yung le conteste)

Il vous faudra, si vous voulez un consensus sur ce texte, accepter nos amendements, et les laisser vivre à l'Assemblée nationale. Faute de quoi, vous n'aurez pas fait le grand texte de réforme qui était attendu, mais une simple réforme de circonstance. (Applaudissements sur quelques bancs à droite)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam .  - Cette réforme, sous une apparence séduisante, n'apporte que des réponses hâtives. Oui, il faut renforcer la démocratie de proximité, élargir le collège des grands électeurs, lutter contre l'abstention. Mais loin d'apporter des réponses, vous vous attachez à imposer, à la va-vite, vos objectifs électoraux. Votre principal objectif est de remodeler le collège des grands électeurs avant 2014, avec le vain espoir que les électeurs ne comprendront pas que leur vote a été trahi.

Améliorer la représentativité locale ? Avec quels moyens ? La multiplication par trois du nombre des conseillers, à moyens identiques, n'augure rien de bon. Silence assourdissant, aussi, sur les missions des conseillers : ils n'ont, de fait, aucun pouvoir décisionnel réel et seront cantonnés au face-à-face avec leur consul, ce dernier pouvant s'appuyer sur son administration.

Le collège électoral des sénateurs devait certes être réformé. Mais vous réformez a minima, loin des préconisations de la commission des lois de l'AFE. Vous signez même un recul démocratique : l'antiquité grecque inventa les urnes, la gauche socialiste le vote de la main à la main. (Mme Catherine Tasca désapprouve)

M. Marc Daunis.  - C'est toujours mieux que la chaussette !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Vous voulez même revenir, un comble, sur l'élection au suffrage universel des conseillers de l'AFE. Des avis sur saisine ? Mais l'AFE ne se réunira qu'une semaine par an, et son budget plafonnera à 235 000 euros, à comparer aux 38 millions du Conseil économique, social et environnemental, que le Gouvernement saisit trois fois par an ! Votre objectif est sans nul doute de faire la preuve de l'inutilité de l'institution, avant de la supprimer.

M. Richard Yung.  - Procès d'intention !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Il eût fallu accroître les compétences des élus, et clarifier le dispositif institutionnel pour mobiliser les électeurs. Et vous ne faites rien pour le statut des élus de l'étranger, après avoir écarté nos propositions d'un revers de main, au motif qu'il y faudrait une révision constitutionnelle. Vous travaillez à détruire ce qui fonctionne.

M. Christophe-André Frassa.  - Très bien !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Pour avoir travaillé auprès du Conseil de l'Europe, je peux vous dire que notre système de représentation provoquait l'admiration. Il ne demandait qu'à être réformé et conforté. Vous vous employez à le déstabiliser, en vous donnant pour modèle les Italiens, pour lesquels nous étions un exemple ! Je regrette que vous n'ayez pas évalué les faiblesses du système que vous prétendez instaurer.

Vous repoussez de vraies avancées institutionnelles comme celle de création d'une collectivité d'outre-frontières proposée par Christian Cointat. (Exclamations sur divers bancs)

M. Christian Cointat.  - Très bien ! (Sourires)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Au lieu de quoi, vous faites des conseillers de simples assistants. Vous ne tromperez personne, et surtout pas les électeurs. (Applaudissements sur certains bancs UMP)

M. André Ferrand .  - Gauche et droite confondues, les élus de l'AFE ont dit leur déception devant cette architecture complexe et peu efficiente. Il fallait un système simple, facilement compréhensible par les 1,6 million de Français inscrits sur les listes consulaires.

Certes, la création des conseillers consulaires et l'élargissement du collège des grands électeurs sont positifs, mais le rabougrissement de l'AFE et le rôle très flou que vous lui réservez ne sont guère faits pour mobiliser les électeurs. Vous justifiez la réduction drastique des effectifs de l'AFE en lui ôtant son rôle d'interface entre le terrain et Paris. Est-ce là une étape vers une fin annoncée ?

Je n'ai nulle arrière-pensée politique. Améliorer la représentation des Français de l'étranger est l'affaire de tous. La convergence des intérêts de ses membres devrait, en ce temps de crise, nous inspirer.

Nous regrettons d'autant plus d'être tentés d'imaginer quelque sombre intention politique se dessiner derrière un tel projet de loi. Madame la ministre, le Gouvernement veut-il sincèrement nous faire progresser ? Nous vous proposons plusieurs pistes consensuelles. Acceptez nos amendements, afin qu'après nos travaux, vous puissiez partager avec le Sénat la conviction et la satisfaction d'avoir, ensemble, réellement amélioré ce texte. Notre réussite dans le monde dépend de plus en plus de nos compatriotes à l'étranger. Surtout ne leur donnez pas le sentiment qu'à Paris, nous nous livrons à des jeux secondaires et partisans.

Le bilan réel de l'AFE est beaucoup plus positif qu'il n'y paraît. Faisons tout notre possible pour progresser ensemble. Nous vous en serions reconnaissants, la France aussi. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée .  - Merci pour vos contributions. Je me réjouis du consensus qui s'est dégagé sur la nécessité de cette réforme et son esprit, à l'exception des bémols émis par les derniers orateurs, qui prêtent au Gouvernement des intentions qu'il n'a pas.

Nous l'avons dit, il a fallu attendre 1982, puis 1990, il est vrai, comme vous l'avez justement rappelé, et 2012, pour voir des gouvernements de gauche réformer notre représentation des Français de l'étranger. Il ne s'agit pas d'une réforme de l'AFE. Ne créez pas des craintes et des peurs. Nous avons veillé à respecter les domaines respectifs du législatif et du réglementaire. Ce qui n'a pas raison d'être dans le projet de loi sera dans le décret. Le Gouvernement propose de faire des conseillers consulaires le corps électoral des sénateurs. Un mécanisme de correction démographique a été introduit pour les circonscriptions dépassant 20 000 inscrits. En élargissant le collège électoral, nous ramenons l'écart de représentation électorale de un à dix-neuf à un à huit, ce qui le rapproche de celui qui prévaut en métropole - de un à quatre.

La discussion générale commune est close.

Exception d'irrecevabilité sur le projet de loi prorogation du mandat des membres AFE

M. le président.  - Motion n°1, présentée par Mme Garriaud-Maylam.

En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger (n° 425, 2012-2013).

Mme Joëlle Garriaud-Maylam .  - L'article unique de ce projet de loi bafoue des articles fondamentaux de notre Constitution. Le texte proroge le mandat des conseillers de l'AFE de la série B d'une année supplémentaire.

Il porte atteinte aux droits des électeurs garantis à l'article 3 de la Constitution. Il remet en effet en cause leur capacité à exercer leur droit de suffrage selon une « périodicité raisonnable », ainsi que le principe de sincérité du suffrage, qui suppose que les électeurs soient informés, au moment de leur vote, des caractéristiques des mandats sur lesquels ils se prononcent, notamment leur durée. Or, le mandat des conseillers à l'AFE de la série B, élus en 2006 pour six ans, a déjà été prorogé d'un an par la loi du 15 juin 2011. Le présent projet propose une nouvelle prorogation qui porterait la durée de leur mandat à huit ans, ce qui va bien au-delà de ce qu'accepte le Conseil constitutionnel. La prorogation a un caractère discriminatoire : elle viole l'égalité des élus devant la loi. Les deux projets créent une différence de traitement abusive et arbitraire entre les élus des séries A et B. Cette combinaison de mesures de prorogations et d'amputation, pour des durées importantes, constitue une violation du principe d'égalité entre les élus.

Le calendrier électoral n'est pas respecté. En la matière, la prorogation des mandats des élus de la série B conduirait à une violation de la législation en vigueur. La loi du 7 juin 1982 prévoit, en effet, le commencement dans quelques semaines du processus normal de renouvellement de la série B de l'Assemblée des Français de l'étranger. L'excellent rapporteur de la commission des lois souligne ce risque : « L'adoption définitive de cette prorogation pourrait [...] intervenir au cours du délai de 90 jours précédant le jour du scrutin. Or, en application de l'article 31-1 du décret du 6 avril 1984, un arrêté du ministre des affaires étrangères aurait déjà dû, à cette date, convoquer les électeurs. ». La loi de prorogation validerait une illégalité commise sciemment par le pouvoir exécutif, qui a pourtant l'obligation d'appliquer le code juridique en vigueur.

Or, le Conseil constitutionnel a précisé, dans la question prioritaire de constitutionnalité du 23 septembre 2011, qu'une validation ne pouvait être décidée qu'à la condition qu'aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle ne soit méconnu, « sauf à ce que le but d'intérêt général visé soit lui-même de valeur constitutionnelle. Enfin, la portée de la validation doit être strictement définie ». Ces conditions ne sont ici nullement remplies : le projet de loi irait à l'encontre de l'intérêt général en portant atteinte à un principe constitutionnel majeur - les droits du suffrage universel et des électeurs - ; la prorogation a un caractère arbitraire et abusif puisque la réforme de l'AFE aurait pu être menée sans que l'on joue aux apprentis sorciers de la démocratie.

M. Christian Cointat.  - Très bien !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Le Gouvernement ne souhaite pas laisser perdurer une assemblée dont la majorité vote encore à droite.

Cette réforme n'est pas à la hauteur des enjeux. Elle eût pu respecter le suffrage universel.

Je suis convaincue que le Conseil constitutionnel ne la validera pas. (Bravos et applaudissements à droite)

Mme Catherine Tasca.  - Cette dramatisation n'a d'égale que la passion, réelle, que vous mettez dans l'exercice de votre mandat. Cette motion n'est nullement fondée. Droit des électeurs, dites-vous ? La prorogation est clairement encadrée par la réforme d'ensemble de la représentation des Français de l'étranger. Rien ne justifie de la juger contraire à la Constitution.

Discrimination ? Cette prorogation répond à l'intérêt général ; cette réforme est nécessaire et urgente, ainsi que chacun en convient. Votre motion est dilatoire. Les élus de l'assemblée actuelle sont élus en deux séries, tous les trois ans. Il fallait bien sortir de la situation actuelle.

Avec votre troisième argument, sur les délais, vous nous incitez, en fait, à légiférer dans les meilleurs délais. Nous, qui pensons que la réforme est nécessaire et urgente, nous passons aux actes ! Le maintien pur et simple des mandats en cours la différerait sine die. Débattons au fond ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur.  - Je vous remercie de nous donner l'occasion de mettre les points sur les i, du point de vue du droit. La commission des lois est défavorable à votre motion. La prorogation des mandats électifs, comme leur abrègement, est soumise à des règles constitutionnelles : elle doit être exceptionnelle, transitoire et limitée pour respecter l'article 3 de la Constitution. Aussi doit-elle être fondée sur un motif d'intérêt général, qui est constitué. Nos débats à l'AFE sur la nécessité de cette réforme en attestent. Souvenez-vous du débat sur le découplage avec les élections législatives. Votre majorité n'a pas choisi. Il fallait se donner le temps de réformer. Il est vrai que les élus de la série A voient leur mandat abrégé, mais en fait seulement d'un an, ce dont le Conseil constitutionnel a déjà convenu pour la Polynésie.

La prorogation des mandats qui vous est proposée doit être adoptée au plus vite, pour éviter une situation illisible pour les électeurs, incompréhensible pour les candidats, lourde pour l'administration. C'est pourquoi nous appelons à voter contre votre motion. (Applaudissements à gauche)

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée.  - La réforme répond pleinement aux exigences du Conseil constitutionnel, qui dans sa décision du 6 décembre 1990 a admis la prolongation d'un mandat en cours, la modification du calendrier électoral répondant à l'intention du législateur d'assurer une participation accrue aux élections et poursuivant donc un but d'intérêt général. Elle n'est pas contraire à l'article 3 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel l'a confirmé à propos de la loi du 6 juillet 2010. La réforme proposée par le Gouvernement s'appuie sur une jurisprudence constante. Elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de suffrage.

Vous contestez, enfin, l'amputation des mandats des conseillers de la série A ; mais ces mandats tomberont quand seront élus les conseillers consulaires ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et de la commission des lois)

Mme Éliane Assassi.  - L'opposition veut empêcher la mise en oeuvre de cette réforme, certes insuffisante, mais qui a le mérite d'exister. Les arguments que vous invoquez sont bien disproportionnés, alors que la jurisprudence constitutionnelle admet une prorogation de mandat lorsqu'elle est justifiée par l'intérêt général.

Notre commission des lois ayant adopté un amendement limitant de façon explicite le mandat des conseillers de la série B, il n'y a plus lieu de se fonder sur de telles arguties juridiques. Notre groupe ne votera pas la motion.

M. Christophe-André Frassa.  - Je voterai cette motion, ce texte méconnaissant trois exigences constitutionnelles fondamentales. Tout s'est fait, et de tout temps, peut-être, en matière électorale, mais nos concitoyens résidant à l'étranger sont inquiets. Le Conseil constitutionnel ne s'est jamais prononcé sur la situation inédite créée par ce projet de loi : une succession de prorogations, qui remet en cause le principe de sincérité du suffrage et celui de l'égalité des élus devant la loi. Nous dénonçons une telle différence de traitement. Il ne reste plus à M. Fabius que quelques heures, pour convoquer les électeurs !

Cette loi de prorogation validerait une illégalité commise sciemment par le Gouvernement. Comment accepter une situation aussi ubuesque ? L'AFE a adopté en septembre 2012 un avis unanime souhaitant l'évolution de son statut. Cette motion doit être adoptée, pour permettre au Gouvernement de s'y conformer. (Applaudissements à droite)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Si vous avez des doutes, posez la question au Conseil constitutionnel, après l'examen du projet de loi. (Mme Kalliopi Ango Ela applaudit)

A la demande du groupe socialiste, la motion n°1 est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages exprimés 159
Pour l'adoption 140
Contre 176

Le Sénat n'a pas adopté.

La séance est suspendue à 19 h 40.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 h 55.