Projet de loi de finances pour 2015 (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale.

Direction de l'action du Gouvernement

M. le président.  - Nous allons examiner les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».

M. Michel Canevet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » s'élèvent à 1,2 milliard d'euros, en crédits de paiement, en légère hausse de 35 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2014 et ce, à périmètre inchangé. Ces crédits sont dévolus aux fonctions stratégiques et d'état-major du Gouvernement, aux moyens des administrations déconcentrées interministérielles, et aux autorités administratives indépendantes.

Cette augmentation s'explique principalement par la hausse des moyens dont bénéficie le Secrétariat général pour la défense et la sécurité nationale (SGDSN), en raison de la priorité donnée aux actions stratégiques relatives à la défense. Ainsi, 16 millions d'euros supplémentaires financeront la poursuite de la montée en puissance de l'Agence nationale pour la sécurité des systèmes d'information (Anssi), créée en 2009. L'Anssi bénéficiera de 65 créations d'emplois. Les contractuels représentent environ 70 % de ses effectifs : le SGDSN souhaite à la fois maîtriser sa masse salariale et diffuser les bonnes pratiques dans les entreprises, où ce personnel, généralement jeune, poursuivra sa carrière.

Il est aussi prévu une augmentation des crédits que le SGDSN transfère au ministère de la défense au titre de projets interministériels en matière de cryptologie et de chiffrage.

Le Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) dispose d'un budget modeste d'environ 33 millions d'euros ; il pilote le programme d'investissements d'avenir (PIA) intitulé « transition numérique et modernisation de l'action publique », et est doté de 126 millions d'euros. Ce programme concernait sept thématiques, dont l'une portait sur les « services publics en milieu rural » et notamment la « mise en place de points d'accès publics et d'espaces mutualisés d'accès aux services de l'administration ». Dorénavant, cette thématique relèverait du Commissariat général à l'égalité des territoires, mais je n'ai pu obtenir des informations sur sa réelle mise en oeuvre. Je sais que la Haute Assemblée est très sensible aux questions d'équilibre entre le milieu rural et les secteurs urbains, notamment concernant l'accès aux services publics. Il conviendra d'y veiller. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur ce point ?

La mission « Direction de l'action du Gouvernement » regroupe de nombreuses directions, commissions, autorités indépendantes, dont les dépenses de fonctionnement courant ne suivent pas toutes la trajectoire de réduction générale. Je proposerai à la commission des finances une mission de contrôle sur cette question, en 2015. Il me semble indispensable d'accélérer les regroupements pour une meilleure efficience et des économies de gestion, de supprimer les structures dont l'utilité n'est plus avérée...

M. Bruno Sido.  - Très bien !

M. Michel Canevet, rapporteur spécial.  - Je souhaite que soit menée la fusion de l'Institut des hautes études de la sécurité et de la justice et l'Institut des hautes études de défense nationale, que soit accélérée la diminution du nombre de commissions consultatives rattachées au Premier ministre, par exemple les nombreux hauts conseils du secteur social. Je regrette aussi que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et le Défenseur des droits soient en concurrence, alors qu'ils devraient travailler ensemble, voire fusionner. Il serait logique que les nominations au sein de l'organisation du Défenseur des droits dépendent de lui, plutôt que d'un décret.

Le programme « Protection des droits et libertés » regroupe des autorités indépendantes, celles citées, mais aussi la Commission nationale informatique et libertés (Cnil), le Conseil supérieur de l'audiovisuel ou la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique créée l'année dernière. Les hausses de crédits concernent des montants relativement faibles, mais qui peuvent s'avérer importantes en proportion. C'est par exemple le cas de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique : par rapport à 2014, ses crédits augmentent de 27 %, soit 790 000 euros.

L'augmentation des crédits découle souvent de missions nouvelles qui sont confiées à ces autorités.

Par exemple, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté voit ses moyens augmenter de 7,9 % (soit 360 000 euros) car la loi du 26 mai 2014 l'a chargé de contrôler l'exécution des mesures d'éloignement prononcées à l'encontre d'étrangers jusqu'à leur remise aux autorités de l'État de destination, d'où des frais de déplacement supplémentaires. On pourrait multiplier les exemples... Je réaffirme que ces autorités doivent participer, dans leurs dépenses de fonctionnement, à l'objectif général de réduction des dépenses publiques.

Ainsi, un hebdomadaire révélait très récemment qu'un président de haute autorité était doté d'un cabinet étoffé de plus de sept personnes et de deux chauffeurs dont l'un irait en province le réceptionner à sa descente d'avion... La rigueur ne semble pas avoir franchi le seuil de cette institution, ce qui, en ces temps budgétaires difficiles, me paraît inacceptable.

Mme Catherine Procaccia.  - Tout à fait !

M. Michel Canevet, rapporteur spécial.  - La baisse des moyens des administrations déconcentrées de 0,62 % sont le signe de mesures de rationalisation, que j'approuve, issues des mesures prises ces dernières années pour créer les Directions départementales interministérielles, plus lisibles pour le citoyen et sources d'économies pour le budget de l'État.

Enfin, en ce qui concerne le budget annexe « Publications officielles et information administrative », je me félicite de l'annonce officielle de l'arrêt de l'impression du Journal officiel en version papier.

La commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par son amendement, et des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. Jean-Marie Bockel, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Je m'attacherai à la cyberdéfense, qui a fait l'objet, dès 2008, du rapport précurseur de Roger Romani, puis de notre rapport d'information de 2012, qui a suscité une prise de conscience. La France dépense encore trop peu pour sa cyberdéfense, alors que les menaces s'accroissent. De l'aveu des hauts responsables américains, une cyberattaque chinoise serait capable de plonger les États-Unis dans le noir...

La cyberdéfense pourtant a été consacrée comme l'une des priorités par le Livre blanc et la loi de programmation militaire de 2013 qui ont programmé une augmentation régulière des moyens et des effectifs de l'Anssi (de l'ordre d'une cinquantaine de recrutements par an), des armées et de la DGA consacrés à ce sujet. Il y a évidemment des risques dans le domaine de la santé et pas que pour la protection du secret des données médicales ! Il suffit de dire - simple exemple - que les instruments de radiologie sont opérés via des applications Internet. Certains ministères progressent, trop lentement. Tous ne sont pas au niveau du ministère de la défense, dont l'état-major cyber est respecté sur le plan international.

La France est aussi le premier pays au monde à s'être dotée d'un cadre juridique contraignant pour les opérateurs d'importance vitale. De nouveaux pouvoirs ont été confiés à l'Anssi, avec une obligation de notifier les incidents informatiques importants ou l'obligation de réalisation d'audits réguliers. Il y va de la défense de nos intérêts économiques.

Comme l'a confirmé lors de son audition le directeur de l'Anssi, des arrêtés sectoriels préciseront les obligations des opérateurs. Les premiers groupes de travail dédiés à la préparation de ces règles de sécurité ont été lancés mi-octobre 2014 pour les secteurs de l'énergie et des communications électroniques. Pour ne pas nuire à la compétitivité de nos entreprises, les règles envisagées sont discutées avec les opérateurs, et elles seront, dans toute la mesure du possible, complémentaires et cohérentes avec les obligations préexistantes, notamment dans le code des communications électroniques. Je me félicite donc que nos préconisations aient été suivies d'effets, malgré un contexte budgétaire difficile et un vivier de recrutement assez limité en raison du manque d'ingénieurs formés. Je mentionne rapidement le « Plan 33 » qui vise à constituer une filière industrielle d'entreprises de confiance, groupes mais aussi PME et qui est soutenu par l'Anssi : nous avons déjà eu l'occasion de l'évoquer à la commission, il s'agit d'un acte de politique industrielle fort, dans un secteur où notre pays a beaucoup d'atouts et d'entreprises innovantes. Il faut former plus d'ingénieurs en sécurité informatique, en nouvelles technologies. C'est un potentiel d'emplois et de développement industriel. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.

M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Le SGDSN est, au coeur de l'État, le lieu de la préparation des arbitrages en matière de défense et de sécurité. Il a ainsi, par exemple, assuré depuis septembre le secrétariat de plus d'une dizaine de conseils restreints de défense, réunis pour décider des interventions de la France au Mali, en Syrie, en Centrafrique ou en Irak.

Le SGDSN dispose d'un budget pour 2015 de 243 millions d'euros de crédits de paiement, dont 94 millions seront transférés vers le ministère de la défense pour des actions aussi sensibles que la modernisation des produits de sécurité gouvernementaux, les « chiffreurs souverains », le programme de cryptophonie de nouvelle génération, ou les besoins en capacités techniques interministérielles. Après le plan Vigipirate, le plan Ebola, publié il y a quelques jours, définit une stratégie globale et graduée de prévention et de lutte, dans des domaines aussi divers que le domaine sanitaire, bien sûr, mais aussi la continuité de l'activité économique. Quant aux centrales nucléaires récemment survolées par les drones, le SGDSN coordonne la future réponse tant capacitaire que juridique pour leur protection.

L'IHEDN est le pôle de référence en matière de formation aux politiques publiques de sécurité et aux stratégies de défense ; il participe à la diffusion de la culture de défense. En 2013, l'IHEDN a formé et sensibilisé près de 2 000 personnes dont plus de 600 jeunes. Le projet d'établissement 2020, qui nous a été présenté par son directeur, nous convient : il donnera priorité à la formation des jeunes professionnels ainsi qu'au renforcement des actions en région.

L'INHESJ a lui, formé 1 200 personnes en 2013. Comme l'IHEDN, il est contraint par la baisse des subventions de dégager des ressources propres. La fusion n'est pas une bonne idée : je suis bien placé, comme ancien président du conseil d'administration de l'IHEDN, pour savoir que chacun a son identité propre. (M. Jean-Marie Bockel applaudit)

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable aux crédits de la mission.

M. Jean-Marie Bockel, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - La Mission interministérielle de lutte contre la drogue et les toxicomanies (Mildt) est devenue la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca). Ce changement de dénomination n'est pas anodin : les addictions ne sont pas forcément causées par un produit. Il y a aussi des addictions comportementales, comme le jeu pathologique.

Une telle clarification était nécessaire, tant la situation française en matière d'addictions est préoccupante. Certaines drogues se banalisent, d'autres évoluent. Ainsi, le cannabis, de plus en plus consommé, avec plus de 500 000 usagers quotidiens, est aussi de plus en plus concentré en THC. Une contraventionnalisation du premier usage serait utile. La cocaïne est plus accessible, son usage a triplé en un an.

Quant à l'héroïne, les mésusages sont particulièrement dangereux, en raison des risques de contamination par les hépatites B et C et le VIH : près de 60 % des injecteurs sont atteints du virus de l'hépatite C.

Les traitements de substitution comme le Subutex, consommé pour 20 % en injection intraveineuse, sont de plus en plus répandus. Les mésusages aussi. Des filières internationales s'en saisissent. Il serait nécessaire d'instituer des contrôles plus stricts sur leur prescription.

Les drogues illégales ne doivent pas masquer le fait que les produits licites sont la source de la majorité des addictions et de leurs conséquences sanitaires. Ainsi l'alcool cause 50 000 décès par an et le binge drinking, touche un jeune de 17 ans sur deux. Près de 13 millions de Français consomment encore quotidiennement du tabac, qui cause 73 000 décès par an. Les grandes lignes de cette politique font consensus. La Mildeca est-elle en mesure de répondre à ces défis, avec des crédits de 19,6 millions d'euros, en baisse de 5 % ? Si les grandes lignes du plan de lutte du Gouvernement dans ce domaine, pour la période 2013-2017, dont je ne partage pas toutes les orientations, font néanmoins consensus, il convient d'éviter un saupoudrage inefficace.

Je suis, en revanche, fondamentalement opposé à l'ouverture de salles de consommation à moindre risque, dont l'expérimentation pour six ans est autorisée par l'article 9 du projet de loi relatif à la santé publique dont nous débattrons l'an prochain. Je les ai vues fonctionner à Genève : elles ne me paraissent pas du tout correspondre à la situation française.

Cette légalisation de facto brouille et rend inaudible le message qui doit être celui de l'État, c'est-à-dire la prohibition. Qui plus est, quelles vont en être les conséquences pour les riverains ?

Quelle devra être la réaction de la police ? Et que penser de la responsabilité du personnel de cette structure en cas d'overdose ?

Sous la direction de la nouvelle présidente, la Mildeca a su engager la modernisation de la politique française de lutte contre les addictions, qui a pour spécificité de former un continuum, de la prévention à la répression sans négliger le soin et la réduction des risques.

La commission des affaires sociales estime qu'il ne faut pas, à ce stade, marquer de défiance vis-à-vis de ces orientations. C'est pourquoi je vous invite à adopter des crédits de la Mildeca. (Mme Catherine Procaccia et M. Jean-François Longeot applaudissent)

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - En premier lieu, je souhaite aborder la question des cabinets ministériels. Pour la troisième année consécutive, le projet de loi de finances comporte en effet une annexe particulièrement détaillée sur les effectifs et les rémunérations des cabinets ministériels. C'est une excellente chose : nous constatons ainsi la baisse de 30 % du nombre de conseillers de 2010 à 2014. Le cabinet du Premier ministre est, à certains égards, exemplaire. (« Très bien ! » sur les bancs socialistes)

Le Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique a pris le relais des structures en charge de la révision générale des politiques publiques, avec un objectif d'abord qualitatif.

Cette structure a notamment pour mission de superviser l'ensemble des systèmes d'information de l'État, sur lesquels on peut attendre des progrès. Je salue tous les efforts de simplification qui ont été entrepris, notamment la mise en place du « marché public simplifié », qui permet d'accélérer les procédures. C'était nécessaire.

Quant au Service d'information du gouvernement, j'exprime un satisfecit pour ses choix de mutualisation de certaines fonctions, dans un secteur où l'action interministérielle n'est pas facile. Je regrette la forte baisse des crédits destinés à l'information du Gouvernement. Ils ont été divisés par deux depuis 2010, les effectifs sont passés de 100 à 70 personnes, le nombre de campagne de trente à dix. Cela peut paraître paradoxal, mais je crois que nous avons atteint une limite. Des campagnes d'information à l'intention des citoyens sont nécessaires.

Depuis quelques mois, le SGAE est aussi conseiller du président de la République pour les affaires européennes. Cela rend les choses plus fluides.

Depuis 2011, la France fait figure de bon élève en matière de transposition des directives européennes. En novembre 2014, nous n'avons que sept directives de retard et la France se classe au cinquième rang européen en termes de performance dans la transposition des directives. Attention toutefois à la surtransposition du droit européen : nous n'avons pas besoin de normes supplémentaires.

Un mot enfin sur les publications officielles. La décision a été prise de supprimer le Journal officiel en version papier à compter du 1er janvier 2016, au profit d'un basculement complet vers le numérique. Les abonnés de la version papier, qui étaient de 70 000 en 2000, sont désormais 2 500 en 2014, alors que la version électronique compte actuellement 70 000 abonnés. Cette suppression permet d'économiser un million d'euros de matières premières.

La commission des lois a donné un avis favorable à ces crédits.

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Créé à l'occasion de la loi de finances pour 2009 dans un souci de lisibilité budgétaire, le programme « Protection des droits et des libertés » réunissait les onze autorités administratives indépendantes du programme « Coordination du travail gouvernemental ».

Plusieurs évolutions sont intervenues depuis : la création du Défenseur des droits par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui est entré en fonction à compter du 1er mai 2011, la transformation du Conseil supérieur de l'audiovisuel en autorité publique indépendante par la loi du 15 novembre 2013, la création de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique par les lois du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique. Pour 2015, les autorisations d'engagement s'élèvent à 98 410 885 euros (en baisse de 0,51 % par rapport à 2014), et les crédits de paiement de 98 850 093 euros (en hausse de 4,63 %).

Ces données globales doivent être nuancées par un examen détaillé des dotations de chaque autorité administrative : une forte hausse, pour la Cnil, des baisses importantes pour le Défenseur des droits et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique au titre de autorisations d'engagement, conséquence du renouvellement de baux ; des variations plus limitées en crédits de paiement, sauf pour la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dues principalement aux évolutions de plafond d'emplois.

Le CSA, quant à lui, bénéficiera d'une subvention de 38 035 396 euros, en hausse de 6,35 % par rapport aux crédits de 2014, relativisée par le fait qu'1,5 million d'euros lui est affecté pour couvrir la taxe sur les salaires à laquelle il est assujetti en raison de son changement de statut.

Certaines autorités ont été auditionnées, nous ont fait part de leurs difficultés. Elles jugent leur budget insuffisant et « biaisé » par l'application de la réserve de précaution.

La loi crée de nouveaux droits qui sont autant de nouvelles missions pour le Défenseur des droits. Lorsque l'administration fonctionne avec des budgets contraints, il devrait y avoir des fonds complémentaires pour que le Défenseur vérifie le respect des droits, qui par ses interventions, participe à une bonne justice en désengorgeant les tribunaux.

La Cnil, qui connaît chaque année une croissance à deux chiffres de son activité, recevra de nouvelles compétences par la loi sur le terrorisme adoptée tout récemment.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté veut maintenir le rythme de 150 visites par an mais ce sera difficile. De plus, les délais de réponse aux courriers ont été significativement rallongés.

La répartition des compétences entre Défenseur des droits et CGLPL mériterait d'être clarifiée.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie politique appartient à ce programme pas la Commission nationale des comptes de campagne (CNCC) : c'est paradoxal car toutes deux concourent à la transparence de la vie politique.

La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité ne chôme pas. Son rôle est essentiel. Elle a besoin de compétences techniques. La Cnil doit se concentrer davantage encore sur la protection des données personnelles. Une amende maximale de 300 000 euros, c'est insuffisant.

La réserve de précaution oblige à des négociations permanentes avec les tutelles. Y soumettre les autorités nuit à leur pleine indépendance.

La commission des lois, déplorant la hausse de 4,3 % des crédits qui ne résulte en fait que d'un jeu d'écritures, a donné un avis défavorable. Je salue quant à moi l'augmentation des moyens, même si l'application de la réserve de précaution m'inquiète. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Cécile Cukierman .  - Cette mission rassemble des programmes essentiels au bon fonctionnement de l'État. Face à la crise politique, nous ne pouvons qu'approuver les objectifs d'accélérer l'application des lois, la transparence des règles européennes, d'améliorer l'information des citoyens.

Nous partageons les remarques de M. Leconte. La hausse du budget des autorités ne saurait être critiquée.

Nous sommes sceptiques, en revanche, sur l'accumulation de termes tels que « modernisation «, « simplification » ou « optimisation »...

M. Bruno Sido.  - Ils vous font peur ?

Mme Cécile Cukierman.  - ... qui masquent le recul de l'État. La numérisation, par exemple, ne règle pas tout. Fallait-il dématérialiser entièrement le Journal officiel ? Informatiser ne veut pas dire supprimer le papier, mais transférer le coût aux citoyens. Des solutions doivent être trouvées pour les décisions individuelles d'état civil, et le personnel doit être associé.

Nous regrettons une fois encore la baisse des crédits de la lutte contre les addictions. Comment le nouveau plan d'action sera-t-il mis en oeuvre ? Le Gouvernement, encore une fois, tente de faire mieux avec moins. On se plie au dogme de l'austérité au lieu de rechercher des recettes nouvelles. L'Observatoire des toxicomanies connaît déjà des difficultés, alors que la consommation de drogues en France est préoccupante. L'arsenal répressif créé par la droite n'a servi à rien. La chasse aux consommateurs n'a pas fait baisser les chiffres de la consommation. (M. Bruno Sido proteste ; M. Claude Dilain confirme)

Nous voterons contre.

Mme Catherine Procaccia .  - Je me concentrerai sur deux des trois programmes. Le programme 129 pose le problème des cabinets ministériels. La consommation des crédits ne cesse d'augmenter : 3,9 millions d'euros en 2013, 3,8 millions en 2012, 3,7 millions en 2011. En 2014, 24,7 millions ont été consommés contre une prévision à 22 millions. L'écart entre la consommation et les dotations nous fait douter de la baisse effective des crédits. Et c'est sans compter les conseillers mis à disposition gratuitement, mal connus alors qu'ils sont généralement mieux rémunérés ! Des zones d'ombre persistent sur les disparités de rémunération entre cabinets ministériels.

Quant au programme 308, la question se pose de la répartition des fonds entre autorités. Quel intérêt de maintenir et même d'augmenter les crédits de la CNCDH, alors que la Cnil, la Cada et le Défenseur des droits pourraient assurer ses missions et que ce dernier, dont les crédits baissent de 0,8 %, est la seule autorité constitutionnellement reconnue ? (Applaudissements sur les bancs UMP ; M. Gilbert Barbier applaudit aussi)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Quatre remarques. Pour ce qui est des cabinets ministériels, les crédits diminuent et la transparence est totale. C'est remarquable.

S'agissant du SIG, il est vrai que le Gouvernement doit avoir les moyens de mener des campagnes d'information. Mais les documents de communication des ministères sont trop nombreux : impossible d'en lire le quart, même le dixième ! (M. Bruno Sido le confirme) Un peu de concision et de mutualisation ne nuiraient pas.

Sur les sondages, la situation, désormais marquée par une grande clarté, a changé depuis une certaine époque...

M. Claude Dilain.  - Oui !

M. Bruno Sido.  - Allons !

M. Jean-Pierre Sueur.  - En revanche, notre législation est obsolète. Je vous invite à faire inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le projet de loi, adopté à l'unanimité par le Sénat, il y a déjà quatre ans, monsieur le ministre.

Quant aux normes, une loi, née ici, et qui devrait aussi être mise à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, crée un conseil, présidé par M. Alain Lambert, doté de larges pouvoirs pour examiner en amont les textes créant de nouvelles normes applicables aux collectivités territoriales. On pourrait s'en inspirer pour les normes applicables aux services de l'État. Une deuxième proposition de loi, également adoptée par le Sénat, et cosignée par Mme Jacqueline Gourault et M. Éric Doligé, préconisait que les avis dudit conseil fussent adjoints aux projets de loi. Elle n'a pu encore être examinée par l'Assemblée nationale, d'où ma deuxième suggestion, monsieur le ministre... Il serait bon, en effet, qu'elle parvienne à son ordre du jour.

Un mot enfin sur les multiples hautes autorités administratives, parfois un peu confuses, par rapport au principe, cher à Montesquieu, de séparation des pouvoirs. Le doyen Gélard avait proposé, au moyen de deux propositions de loi, de leur donner un statut clair. Encore une fois, il serait néfaste que ces propositions de loi, que j'ai cosignées à la demande de leur auteur, restent dans un tiroir.

Le groupe socialiste votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Beaucoup a été dit. Je me félicite que tous nos rapporteurs aient conclu à l'adoption des crédits : c'est le signe que cette mission participe pleinement à l'effort de bonne gestion.

Je reviendrai sur la modernisation des réseaux.

La hausse des crédits de l'Anssi témoigne de nos efforts pour renforcer notre cybersécurité. L'Anssi veillera aussi à diffuser ses innovations dans la société civile.

Trois commissions consultatives ont été supprimées en 2014. Le nombre d'organismes rattachés au Premier ministre est en diminution. Sur 28, 8 ont des coûts de fonctionnement nuls. Près de 130 commissions consultatives ont déjà été supprimées en 2013-2014. D'autres le seront en 2015.

Le Gouvernement n'est pas favorable à la fusion de l'IHEDN et de l'INHES, qui ont des cultures et s'adressent à des publics différents. Vos collègues Bockel et Masseret ont appelé à conserver l'ADN de chaque institut. En revanche, des synergies sont indispensables. L'informatique, l'immobilier, la logistique, la commande publique ont déjà été mutualisés. Trente postes seront encore économisés grâce à la mutualisation des commandes et de la gestion des déplacements.

S'agissant de la communication du Gouvernement, nos efforts ont porté leurs fruits : malgré la baisse des crédits, la consultation des sites gouvernementaux a augmenté de 23 % en 2013.

Pour ce qui est de la lutte contre les drogues et les conduites addictives, monsieur Barbier, chaque projet fera désormais l'objet d'une évaluation ex ante et ex post. Les salles de consommation à moindre risque feront l'objet d'un encadrement précis et les acteurs locaux seront associés.

En matière de protection des droits et des libertés, la plupart des Autorités administratives indépendantes voient leurs moyens augmenter : trois postes de plus pour le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, sept pour la Cnil, dix pour la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Une seule exception, le Défenseur des droits perd un poste - sur 227.

Quel est le degré d'indépendance des autorités indépendantes, a demandé le rapporteur de la commission des lois. Vaste question. Elles exercent librement les missions que la loi leur confère. Le Gouvernement n'intervient pas dans celles-ci, même indirectement. Les moyens du Contrôleur général des prisons sont renforcés alors qu'il est souvent critique vis-à-vis de la puissance publique. Les crédits de paiement augmentent et l'autonomie de ces autorités est préservée. Le législateur a voulu conserver une spécificité pour les questions pénitentiaires, mais il y a des recoupements qui existent depuis l'adoption de la loi de mai 2014 qui a étendu les prérogatives du Contrôleur général. Il appartient aux instances concernées de définir leur champ de compétence mutuel. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

ARTICLE 32 (ÉTAT B)

M. le président.  - Amendement n°II-45, présenté par M. Canevet, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Coordination du travail gouvernemental

Dont titre 2 

6 000 000

6 000 000

Protection des droits et libertés

Dont titre 2 

Moyens mutualisés des administrations déconcentrées

Dont titre 2 

TOTAL

6 000 000

6 000 000

SOLDE

- 6 000 000

- 6 000 000

M. Michel Canevet, rapporteur spécial.  - Cet amendement diminue de 6 millions d'euros les crédits supplémentaires octroyés à la Direction interministérielle de la sécurité des systèmes d'information (Disic) par un amendement présenté à l'initiative du Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale. Quelle est en effet sa pertinence ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Je comprends qu'il s'agit d'un amendement d'appel : les crédits en question permettront de financer les études et travaux de cadrage préalables à la mutualisation de certains systèmes d'information.

De plus, le décret du 1er août 2014 a chargé la Disic du contrôle, de l'appui, et de l'expertise des travaux informatiques des ministères. Les crédits supplémentaires financent les nouvelles missions. Cet effort d'investissement est nécessaire ; nous avons du retard à rattraper par rapport à nos voisins européens et devons la plus grande sécurité à nos concitoyens.

M. Michel Canevet, rapporteur spécial.  - D'accord, je le retire.

L'amendement n°II-45 est retiré.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Un mot de réponse sur les crédits des PIA en faveur de l'investissement dans les services publics en milieu rural. Nous allons accroître les efforts. Mille places d'espaces mutualisés seront créées pour couvrir tout le territoire.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Les crédits du budget annexe sont adoptés.

La séance, suspendue à 15 h 40, reprend à 15 h 45.