Listes électorales (Conclusions des CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions des commissions mixtes paritaires sur la proposition de loi rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, la proposition de loi organique rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne autre que la France pour les élections municipales et la proposition de loi organique rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France.

Discussion générale commune

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires .  - La CMP réunie pour harmoniser les positions de l'Assemblée nationale et du Sénat sur les propositions de loi de nos collègues Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, qui révisent profondément les modalités d'inscription sur les listes électorales, s'est conclue sur un bon accord. Celui-ci confirme la philosophie générale de cette réforme, que nous avions faite nôtre dès la première lecture, et il retient les modalités que nous avions voulues.

Un répertoire électoral unique sera créé, géré par l'Insee, dont les listes communales seront des extractions. L'inscription ou la radiation des listes rendue possible toute l'année en continu, jusqu'à trente jours avant l'élection la plus proche ; la possibilité de double inscription des Français établis hors de France supprimée.

Le Sénat souhaitait le report d'un an de la « mise en oeuvre possible » de la réforme, cette formule marquant le fait que le 31 décembre 2019 n'est qu'une date limite qu'un décret en conseil d'État pourra avancer si l'harmonisation de la liste de l'Insee et des listes communales a bien progressé - ce dont je doute fort.

Les commissions communales seront modifiées comme nous le voulions. Elles statuent sur les recours, obligatoirement avant la saisine du juge, leur composition reflètera la majorité municipale. C'est le bon sens, contre toute manipulation politique et pour garantir le recours aux citoyens. Qui plus est, le maire sera à l'abri d'erreurs possibles d'interprétation des textes sur l'inscription. Enfin, la date limite fixée initialement à un mois est portée au sixième vendredi précédant le scrutin : cela garantira contre un afflux excessif de demandeurs au dernier moment tout en étant proche de l'échéance électorale.

Je vous invite donc à voter l'ultime mouture de ce texte. (Applaudissements)

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - L'engagement du président de la République à améliorer l'accès au scrutin, avec une inscription sur les listes jusqu'à un mois avant le scrutin, puis le rapport Pochon-Warsmann, ont précédé ces mesures destinées à résoudre le problème posé par les 3 millions de non-inscrits et les 6,5 millions de mal inscrits sur les listes électorales.

Nous avons tenu compte des contraintes pesant sur les maires pour mettre à jour les listes. Merci aux rapporteurs en CMP d'être parvenus à un accord, à partir de positions initialement éloignées.

Nos concitoyens pourront s'inscrire jusqu'à 30 jours ouvrés avant le scrutin, soit le sixième vendredi ; c'est bien plus large qu'aujourd'hui. Ceux qui accèdent à la nationalité et à la majorité bénéficieront d'un accès plus large à la citoyenneté : trop de nos concitoyens sont empêchés de voter pour des raisons administratives.

Les nouvelles technologies rendent possibles ces progrès grâce à la dématérialisation des échanges entre l'Insee et les communes, aussi bien que pour cibler les doubles inscriptions. Les délais de modification de la liste, comme des recours, sont modifiés. La commission se prononcera dans les deux jours sur le recours administratif préalable dont elle serait saisie et elle pourra s'autosaisir. L'électeur, la liste publiée, aura sept jours pour saisir le tribunal d'instance qui se prononcera dans les huit jours.

Le doublon est supprimé entre liste communale et liste consulaire pour les Français établis hors de France ; cependant cette réforme n'entrera en vigueur qu'après les prochaines échéances et nos concitoyens établis hors de France pourront toujours changer la liste où ils décident de s'inscrire.

Je veux rassurer M. Collombat sur sa mise en oeuvre : l'Insee a mis en place l'équipe dédiée, le ministère de l'intérieur aussi bien que l'AMF ont avancé sur le système d'information.

Je vous remercie de votre soutien, au service de notre démocratie. (Applaudissements)

Mme Esther Benbassa .  - Le Sénat a rendu hommage aux victimes de l'attentat de Nice, j'associe mon groupe à cet hommage -  aux victimes de Nice comme à celles de Bagdad et d'ailleurs.

L'enjeu de ces textes n'est rien de moins que la participation aux élections : le groupe écologiste se réjouit de l'accord de la CMP. En 2014, le rapport « Mieux établir les listes électorales pour revitaliser notre démocratie » estimait que 9,5 millions d'électeurs étaient « mal » ou « non-inscrits », soit 20 % d'un corps électoral comptant 45 millions d'électeurs ; c'est considérable.

Il fallait rénover, moderniser notre système : les mesures que nous voterons aujourd'hui y participeront assurément. Cependant, il faudra une refondation profonde de nos institutions, pour aller plus loin, avec, permettez-moi cette digression, l'ouverture du droit de vote aux étrangers. Beaucoup a été dit sur ce sujet, tout a même été promis mais trop peu a été fait dans ce sens, alors que ce serait « revitaliser notre démocratie ». L'exécutif y a renoncé, il lui préfère la déchéance de nationalité... J'y insiste : le droit de vote des étrangers est un outil d'intégration dont nous ne pourrons nous passer bien longtemps ! (Applaudissements)

M. Christophe-André Frassa .  - « Le Sénat à l'écoute des élus et des électeurs », ainsi pourrait-on résumer la contribution de la Haute Assemblée à ce texte. Nous avions quelques divergences rédactionnelles avec l'Assemblée nationale, le groupe Les Républicains se félicite de l'accord obtenu en CMP - sur les délais d'inscription, sur la composition de la commission locale de contrôle, sur le recours administratif devant cette commission, sur les sanctions contre le maire et sur le délai au 31 décembre 2019 : les élus en seront rassurés même si l'on ne peut jamais être certain qu'une année ne sera pas électorale.

Cependant, la CMP a transposé ce principe aux Français établis hors de France, avec la suppression de la double inscription. Je vous appelle à y réfléchir. Les Français de l'étranger n'ont pas de collectivité territoriale de rattachement. Ainsi, s'ils votent à l'étranger pour les scrutins nationaux et les élections, consulaires, ils votent en France, pour les scrutins locaux. Faudra-t-il qu'ils changent d'inscription à chaque élection ? Quid, ensuite, des 443 élus consulaires qui se livreraient à ce tourisme électoral ?

Quoi qu'il en soit, le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements)

M. Michel Canevet .  - Je me réjouis de voir bientôt adoptés ces trois textes d'initiative parlementaire. L'enjeu en est crucial, puisqu'il s'agit de lutter contre la désaffection électorale, en tenant compte des conditions réelles de la vie sociale.

Les règles doivent être claires pour l'ensemble des scrutins, c'est le cas ici. Le recul de la mise en oeuvre au 31 décembre 2019, cependant, risque d'être mal compris par nos concitoyens, l'administration pourrait s'organiser plus rapidement. Nous apprécions que deux amendements de notre groupe, respectivement de M. Delahaye et Mme Tetuanui, aient été pris en compte. Le groupe UDI-UC votera pour, en espérant que nos concitoyens retrouveront le chemin des urnes : notre démocratie en a besoin ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Christian Favier .  - Le constat est accablant : lors des trois derniers scrutins, près d'un Français sur deux ne s'est pas déplacé - les plus jeunes, en particulier, ne se reconnaissent pas dans les institutions. Les promesses non tenues n'y sont pas pour rien ; et pour commencer, vous auriez pu faire davantage pour le vote des étrangers, promis par le candidat Hollande et que nous avions adopté au Sénat. (Mme Eliane Assassi renchérit)

Nous soutenons la réduction du délai d'inscription, la révision des listes en continu : ce sont des avancées. Cependant, pourquoi ne pas les mettre en place dès l'an prochain ? Nous avons su nous adapter pour les régionales, il aurait été possible de faire mieux que de renvoyer à 2020.

Sur les listes, ensuite, le problème ne tient pas qu'aux doubles inscriptions ; n'allons pas priver de droit de vote certains de nos concitoyens ! Les nouvelles missions de contrôle vont dans le bon sens.

Ces mesures ne régleront pas les problèmes d'une Ve République à bout de souffle, mais elles amélioreront le traitement des mal et pas inscrits : nous les voterons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Jean-Yves Leconte .  - Nous travaillons depuis plusieurs années à une modernisation de nos listes électorales, en particulier pour une révision plus fréquente, ce que les nouvelles technologies rendent possibles. De même, nous avons été très attentifs au passage de la commission administrative à la commission de contrôle : il fallait se garder d'une inflation des recours judiciaires.

Affirmer le principe d'un recours administratif préalable obligatoire imposait de modifier les délais ; nous sommes heureusement arrivés à un compromis avec l'Assemblée nationale, sur le sixième vendredi avant l'élection - dans la mesure où celle-ci est prévisible. L'article 9 sera ainsi effectif pour toutes les élections.

La CMP est revenue sur l'auto-saisine de la commission de contrôle prévue par l'Assemblée nationale. Un bon compromis a été trouvé sur le rôle du maire, il pourra formuler des observations à la commission de contrôle.

La CMP a retenu comme date ultime d'entrée en vigueur de la loi le 31 décembre 2019. Compte tenu des élections européennes, espérons que nous aboutirons auparavant.

Ce texte marque la fin de la double inscription pour les Français établis hors de France. Ce sera douloureux pour ceux qui en avaient pris l'habitude. L'ouverture du droit à sépulture là où l'on a droit à s'inscrire sur les listes électorales adoucira les choses.

Nous devons tendre au vote électronique pour toutes les élections.

Bref, tout le monde en est d'accord, ce texte ne révolutionnera pas notre démocratie mais il démontre notre capacité à moderniser et à simplifier dans le consensus. Merci encore au rapporteur Collombat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, M. Yves Détraigne applaudit également.)

M. Jean-Claude Requier .  - Le compromis trouvé en commission mixte paritaire satisfait tous les membres du groupe RDSE, qui le voteront.

Deux points ont concentré les débats : à savoir les délais de clôture des listes électorales et la composition et le rôle des commissions de contrôle électoral.

La simplification de la procédure d'inscription sur les listes électorales n'a de sens que si elle est mise en oeuvre uniformément sur l'ensemble du territoire. Nous nous félicitons donc du report de l'entrée en vigueur de cette loi au 31 décembre 2019. Ce délai, qui est maximal, n'empêchera pas la création anticipée du répertoire électoral unique et permanent.

Sur la date de clôture des listes, la commission mixte paritaire a considéré que le délai de 30 jours symbolique, laissait peu de temps aux administrations et aux citoyens. La formule du « sixième vendredi avant le scrutin », qui paraît obscure à certains, lèvera des incertitudes, notamment sur le décompte des jours ouvrés.

Le répertoire électoral est une avancée indéniable, à condition que les communes et, surtout, les petites bénéficient des moyens nécessaires.

Nous soutenons la rédaction de la CMP sur la composition et le rôle de la commission de contrôle. Outre le pouvoir de radiation reconnu à la commission, elle pourra recevoir les observations du maire, qui sera associé à ces travaux.

Ce texte contribuera à lutter contre les problèmes d'abstention liés à la non ou à la mal inscription. Sachons-en gré au rapporteur, qui a tiré parti de sa longue expérience d'élu local. (Applaudissements)

La discussion générale commune est close.

Modalités d'inscription sur les listes électorales

Mme la présidente.  - En vertu de l'article 42, alinéa 12, de notre Règlement, le Sénat examinant les conclusions de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononcera par un vote unique sur l'ensemble de la proposition de loi en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 26

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Si, lors de la réunion prévue au II de l'article L. 19, la commission de contrôle n'a pas statué sur les recours administratifs préalables formés devant elle, elle est réputée les avoir rejetés.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État.  - Si la commission de contrôle ne statue pas sur les recours formés à la date de ses réunions prévues, elle est réputée les avoir rejetés.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Cette précision est utile, on n'est jamais assez prudent.

Mme la présidente.  - Je vais mettre aux voix la proposition de loi modifiée par l'amendement n°1.

M. Alain Richard.  - Le groupe socialiste votera unanimement ce texte comme le groupe RDSE, ce qui est plus rare et, semble-t-il, plus facile lorsque le rapporteur est issu de ses rangs...

Un rappel : cette proposition de loi est assortie d'un gage. Nous serons donc attentifs au mécanisme de soutien aux communes.

Une réserve : espérons que le texte sera mis en oeuvre avant la fin 2019, un afflux de demandes d'inscriptions est à craindre à l'approche des élections municipales de mars 2020.

La proposition de loi, modifiée par l'amendement n°1, est définitivement adoptée.

Listes électorales des ressortissants de l'Union européenne

La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°440 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 342
Contre 0

Le Sénat a définitivement adopté la proposition de loi organique.

Français établis hors de France

Mme la présidente.  - En vertu de l'article 42, alinéa 12, de notre Règlement, le Sénat examinant les conclusions de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononcera par un vote unique sur l'ensemble de la proposition de loi organique en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

ARTICLE PREMIER

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 23

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Si, lors de la réunion prévue au II de l'article 8, la commission de contrôle n'a pas statué sur les recours administratifs préalables formés devant elle, elle est réputée les avoir rejetés.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État.  - Amendement de coordination.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur.  - Avis favorable.

La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°441 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 342
Contre 0

Le Sénat a définitivement adopté la proposition de loi organique, modifiée par l'amendement n°1 du Gouvernement.

Prochaine séance, demain, mercredi 20 juillet à 17 heures.

La séance est levée à 17 h 55.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus