Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat et sur notre site internet.

Au nom du Bureau, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres. M. le Premier ministre parlait très bien ce matin, à Reims, de la tonalité des questions d'actualité au Gouvernement ici, au Sénat.

Pour des raisons d'ordre pratique que chacun peut comprendre et conformément à la décision de la Conférence des présidents, les auteurs de question pourront utiliser leur droit de réplique s'il leur reste plus de cinq secondes.

Société générale

M. André Gattolin .  - Monsieur le ministre Eckert, voulez-vous gagner des millions ? (Rires) Car ceci est une question à 2 200 millions d'euros...

La semaine dernière, la cour d'appel de Versailles a condamné Jérôme Kerviel à verser 1 million d'euros de dommages et intérêts à la Société générale, soit un montant considérablement réduit par rapport aux 4,9 milliards d'euros du premier jugement le 5 octobre 2010. Si la banque s'en réjouit, sa responsabilité est explicitement reconnue. D'où l'allègement de la condamnation.

Ce jugement met un terme à un conflit qui n'a que trop duré mais il ouvre un autre dossier non moins important : celui du crédit d'impôt accordé par l'État à la Société générale en 2008 pour un montant de 2,2 milliards d'euros. Il est désormais dénué de fondement.

Vos services vont-ils engager une procédure de recouvrement ? Si tel est le cas, vos services entendent-ils porter l'affaire devant les tribunaux ou préfèreront-ils, pour des raisons de diligence, trouver une transaction avec la banque ? (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, communiste républicain et citoyen ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - L'affaire est grave. Le rôle d'un Gouvernement est de faire appliquer la loi, rien que la loi, toute la loi, que le contribuable soit puissant ou misérable. (Exclamations ironiques à droite)

La Société générale a enregistré en 2008 une perte reconnue et quantifiée qu'elle a comptabilisée comme charge. L'administration a appliqué le droit et, jusque-là, aucun jugement n'avait mis en cause la responsabilité de la banque. Le dernier arrêt en reconnait une sur le plan civil, la responsabilité de Jérôme Kerviel étant pleine et entière sur le plan pénal selon la Cour de cassation.

Notre administration, au vu de la jurisprudence de 2016 sur des affaires similaires et des attendus du jugement que vous citez, a considéré qu'un réexamen s'imposait. Un redressement pourra être prononcé, il sera probablement contesté. Aucune transaction n'aura lieu. Le droit sera appliqué, il n'y a pas de prescription en la matière. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste et sur quelques bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. André Gattolin.  - Merci pour votre réponse précise et engagée. (M. Pierre-Yves Collombat s'esclaffe) Il y va aussi du respect du droit européen. Bruxelles pourrait contester le crédit d'impôt accordé à la Société générale, considérant qu'il s'apparente à une aide d'État déguisée. Votre réponse est de salubrité publique dans un temps où les Français s'interrogent sur le rôle que jouent les banques dans l'économie française. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)

Alstom (I)

M. Jean-Pierre Bosino .  - Chaque mois sont annoncées des fermetures d'entreprises et des suppressions d'emplois. Les causes de ces désastres humains et sociaux sont l'abandon de toute politique industrielle, l'accroissement des profits des actionnaires et des dirigeants sans scrupules.

Alstom, Areva, Petroplus, Vallourec, Florange... Toujours les mêmes cellules de crises, les mêmes promesses et les mêmes réponses ponctuelles. Encore une fois, l'État actionnaire ne joue pas son rôle et veut faire croire qu'il ne savait rien de la situation d'Alstom quand il a accepté le dépeçage de l'entreprise par General Electric. Au mépris de toute politique de long terme, il doit négocier dans l'urgence avec la SNCF et la RATP de nouveaux carnets de commandes. Alstom, bénéficiaire, a distribué 3 milliards d'euros de dividendes et largement bénéficié de subsides publics. Qu'allez-vous faire pour les salariés et les familles victimes de l'inaction de l'État ?

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Je vous réponds avec plaisir. Il est une réalité qu'on ne peut ignorer, il est aussi un État actionnaire qui joue pleinement son rôle. Vous n'avez pas évoqué son action dans les dossiers Renault, PSA et STX ou encore, et bien qu'il ne soit pas actionnaire de cette entreprise, Michelin.

Mais parlons d'Alstom. Je ne partage pas votre analyse sur le dossier General Electric. La direction de l'entreprise a annoncé le 7 septembre le transfert du site de Belfort, mettant en cause 400 emplois. Avec Christophe Sirugue, nous avons dit qu'il était inacceptable d'annoncer une telle décision sans concertation préalable avec les représentants des salariés, les élus et l'État.

Dans un monde ouvert, avec une situation de surproduction, il faut évoluer : la prochaine vague de renouvellement du matériel roulant n'interviendra pas avant la fin de la décennie. Cela suppose de maintenir les compétences et le savoir-faire pour être prêt quand les commandes reprendront. Il revient d'abord à Alstom de proposer une stratégie industrielle ambitieuse. À l'État de faire émerger une logique de filière en soutenant les investissements d'avenir.

Une partie de la réponse doit venir du secteur ferroviaire lui-même. Nous présenterons des solutions dans les prochains jours. Il faut que les choses avancent, nous tiendrons au courant élus locaux et représentation nationale. C'est effectivement l'avenir de notre industrie ferroviaire qui est en jeu. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

M. Jean-Pierre Bosino.  - Les salariés d'Alstom jugeront. Ces cinq dernières années, 900 entreprises industrielles ont fermé, 160 000 emplois ont disparu. Une véritable politique industrielle ne consiste pas à augmenter le CICE à 7 % l'État doit mener une véritable politique d'investissements publics et privés. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Accueil des réfugiés

Mme Stéphanie Riocreux .  - Monsieur le Premier ministre, le président de la République est venu à Calais. Comme il s'y était engagé au début de l'été, il y a présenté une solution à la situation dramatique qu'y connaissent les réfugiés, les habitants, les acteurs économiques mais aussi les personnels des services de l'État et les membres des associations.

Ne commettons pas l'erreur consistant à amalgamer toutes les informations dramatiques : à Calais, il n'y a pas des millions d'immigrés économiques ou de djihadistes fanatiques ! À Calais, il y a quelque 7 000 réfugiés, dont près d'un millier de mineurs isolés, qui fuient le fanatisme.

Je me souviens d'un slogan de campagne : « La France forte ». La France forte, c'est celle qui ne tremble pas, oublie ses engagements et se cache des réalités mais celle qui, fraternelle et responsable, sait se mobiliser. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Didier Guillaume.  - Bravo !

Mme Stéphanie Riocreux.  - Le président de la République a apporté la seule solution possible : le démantèlement rapide du camp. (Marques d'ironie à droite) Il ne s'agit pas de déplacer le problème, comme cela fut le cas avec Sangatte en des temps moins difficiles d'ailleurs. Il y a un rapport de cinq communes pour un migrant, pour être solidaire avec Calais, ne doutons pas de la bonne volonté des élus et des Français.

Mais monsieur le Premier ministre, chacun se le demande : comment allez-vous procéder ? Quelle sera la participation de l'État ? Quelles sont les perspectives de long terme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Le règlement de ce dossier requiert maîtrise, responsabilité et sang-froid. Le campement de Calais sera démantelé d'ici la fin de l'année. Il est intolérable de laisser perdurer la jungle. C'est une nécessité sanitaire et humaine, c'est notre responsabilité par rapport aux habitants et entreprises de Calais et sa région. Rien ne serait pire, toutefois, que de disperser les migrants en laissant le hasard décider de leur sort, ce serait laisser la main aux réseaux de passeurs.

Les migrants qui ne relèvent pas de l'asile seront placés en centre de rétention pour être reconduits à la frontière, comme l'ont été 40 000 personnes depuis le rétablissement de nos frontières. La réalité est que 80 % des personnes à Calais relèvent de l'asile, elles se verront proposer une place dans l'un des 170 centres d'accueil, comme à Épernay, et entreront dans un processus d'intégration et d'apprentissage du français.

Avec une politique différente de l'Allemagne, nous mettons en oeuvre le droit d'asile qui fait l'honneur de notre pays. Que ceux qui ne sont pas d'accord le disent ! C'est une grande émotion pour moi de voir ces familles intégrées dans notre pays, comme d'autres le furent par le passé. (Brouhaha à droite)

Une attention particulière doit être portée aux mineurs isolés qui sont entre 900 et 1 000 dans notre pays. Bernard Cazeneuve l'a dit à son homologue britannique, le Royaume-Uni doit assumer pleinement ses responsabilités. Je sais pouvoir compter sur l'esprit de solidarité et de responsabilité des maires. Ceux qui s'engagent ne seront pas concernés par les arrivées supplémentaires. Nous les accueillerons dans des centres de taille humaine.

Ainsi nous serons à la hauteur de la tradition de la France. Quand l'Allemagne reçoit 1,5 million de demandes d'asile, contre 100 000 chez nous, nous devons être capables de faire face à ce défi avec humanité et intelligence sans céder au populisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur quelques bancs du groupe RDSE)

Fichés « S »

M. Hervé Maurey .  - Monsieur le Premier ministre, les auteurs des attentats commis depuis janvier 2015 avaient tous deux points communs : radicalisation et inscription au fichier « S ».

De nombreux maires, pour assurer la sécurité de nos concitoyens, souhaitent avoir accès à ce fichier. Dans mon département, celui d'Évreux en a fait la demande début septembre ; il a essuyé un refus. Certes, le décret du 8 mai 2010 l'interdit. Pour autant, quand la sécurité est la mission première des maires, n'est-il pas légitime de leur communiquer ces informations ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - M. Cazeneuve, en déplacement aux Antilles, m'a chargé de vous répondre.

Mme Sophie Primas.  - La question s'adressait au Premier ministre !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Nous comprenons parfaitement que les élus locaux veuillent participer à la prévention de la radicalisation, cela a d'ailleurs fait l'objet de rencontres place Beauvau avec l'AMF, l'ADF et l'ARF. Des conventions ont été signées afin que les dispositifs préfectoraux de prévention de la radicalisation soient nourris de l'expérience irremplaçable des maires. (Exclamations ironiques à droite) Bernard Cazeneuve a créé un groupe de travail. (Même mouvement) Les préfets ont reçu instruction le 14 septembre de prendre langue avec tous les chefs d'exécutifs locaux à ce sujet par une circulaire. (M. Philippe Bas ironise)

Cependant, le partage des informations doit s'inscrire dans notre cadre juridique et le respect des libertés individuelles. Juridiquement, la transmission des fiches « S » est impossible. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE ainsi que socialiste et républicain)

M. Hervé Maurey.  - M. le Premier ministre ne juge sans doute pas ma question suffisamment importante pour y répondre lui-même... Une circulaire ? Un groupe de travail ? Vous ne répondez ni à ma question ni à l'attente légitime des maires. On leur demande toujours plus sans leur donner les moyens de remplir leur mission. (Applaudissements au centre et à droite)

Alstom (II)

M. Cédric Perrin .  - Monsieur le Premier ministre, M. Henri Poupart-Lafarge, PDG d'Alstom, a dit mardi ne pas voir d'issue structurelle pour le site de Belfort. Cela m'inquiète beaucoup à quelques jours de votre présentation du plan de sauvetage.

Quelques commandes nationales ne suffiront pas, c'est d'adaptations structurelles dont a besoin le site de Belfort. Alstom doit diversifier son activité et se positionner sur des marchés de faible dimension. Ses sites français doivent prioritairement assurer la production des commandes passées à l'international. Alstom doit faire preuve de patriotisme industriel quand elle a perçu des dizaines de millions de CICE. Dans CICE, il y a le mot emploi ! Si ce crédit d'impôt donne des droits, il confère aussi des devoirs.

Alstom n'est pas le seul coupable, l'Etat a sa responsabilité. À lui de siffler la fin de la récréation entre Alstom et la SNCF et cesser de laisser la SNCF mener la politique ferroviaire de la France. Sommes-nous condamnés à être le pays le plus bête du monde où la SNCF favorise les entreprises étrangères dans ses appels d'offre ? Sauver le site de Belfort, c'est sauver 1 200 emplois, sauver la capacité de la France à produire le TGV du futur. (« La question ! », à gauche) Qu'allez-vous faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Ce Gouvernement croit à l'avenir industriel de la France. (Exclamations ironiques sur les bancs du groupe Les Républicains) Un avenir placé sous le signe de la transition que nous devons accompagner. Belfort est la cité du lion et le lion sait rugir ! Depuis le XIXe siècle, c'est de là que sortent les locomotives. (Exclamations ironiques sur les bancs du groupe Les Républicains)

Les journalistes cyniques qui disent : « Pourquoi tout ce foin ? », n'ont pas entendu la réponse du président de la République. Il y va de l'avenir de 400 femmes et hommes qui ont dédié leur vie professionnelle à Alstom et de la capacité de notre industrie à répondre aux défis du XXIe siècle. (Même mouvement)

Nationaliser ne servirait à rien : il faut faire face à une baisse conjoncturelle des commandes avant le développement du TGV 4.0.

Christophe Sirugue, avec le Conseil national de l'industrie, travaille à une feuille de route stratégique : c'est l'avenir du pays que nous dessinons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; on s'esclaffe à droite)

Crise agricole

M. Jean-Claude Requier .  - Monsieur le ministre de l'agriculture, nos agriculteurs sont dans une situation catastrophique, en urgence absolue, du fait des crises en cascade dues aux problèmes de marché, climatiques, sanitaires : crises du lait, de la viande, des céréales, des fruits et légumes, rares sont les filières épargnées. Dans la majorité des exploitations, le chiffre d'affaires ne couvre pas les charges, les agriculteurs retardent les investissements, ne se rémunèrent plus... La dette explose, passant de 50 000 euros en 1980 à 170 000 euros en 2012 ! En quinze ans, la moitié des exploitations a disparu. Autre fait tragique : les suicides augmentent fortement.

Les industriels, pendant ce temps, augmentent leur marge : dans la grande distribution, 18 euros sur 100 euros seulement vont au producteur... Comment enrayer cette spirale infernale ? Le cours du lait ne cesse de chuter. La Fédération nationale bovine (FNB) estime qu'avec l'embargo russe et la fin des quotas laitiers, 25 000 exploitants éleveurs pourraient disparaître. Les moissons sont catastrophiques et les rendements très bas chez les céréaliers, sans parler des récoltes de fruits et légumes en baisse après un printemps frais et pluvieux...

Comment le Gouvernement traitera-t-il cette situation d'urgence ? Ne faut-il pas repenser notre modèle agricole ? Quand les agriculteurs pourront-ils enfin dire, eux aussi : « Ça va mieux ! » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur plusieurs bancs au centre et à droite)

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Votre question recense les difficultés auxquelles le monde agricole est confronté. Crise de l'élevage certes... mais le secteur porcin va mieux, à 1,53 euros le kilo, reconnaissez-le ! La production de lait a dépassé la demande, d'où la crise laitière. Nous avons mobilisé une majorité de pays en Europe pour utiliser un article des traités. Ainsi, 13 000 exploitations en profiteront.

Depuis 2008, lorsque la fin des quotas laitiers a été décidée, aucune mesure de maîtrise de la production n'avait été prise - elle l'a été à l'initiative de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

La France doit faire face à des situations climatiques catastrophiques. Le Premier ministre l'a annoncé, le Gouvernement présentera un plan pour remédier aux dommages sur l'agriculture.

M. Alain Vasselle.  - Il y a urgence !

M. Stéphane Le Foll, ministre.  - Oui, et j'y travaille tous les jours. C'est en renouvelant l'agriculture que nous serons durables et compétitifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Comptes publics

M. Bernard Lalande .  - Monsieur le ministre Eckert, le dernier budget du quinquennat a déjà fait l'objet d'une pluie de critiques : prélèvement à la source, réduction du déficit à 2,7%...

M. Jacques Grosperrin.  - Démenti par M. Migaud  et la Cour des comptes !

M. Bernard Lalande.  - On oublie aussi la simplification que représente pour les citoyens, et notamment ceux qui perdent leur emploi ou partent à la retraite, le prélèvement à la source, pratiqué par tous les pays européens sauf la Suisse. On ne peut ignorer non plus que ce Gouvernement a obtenu des résultats budgétaires meilleurs que son prédécesseur, et meilleurs que ses propres prévisions. Le déficit était de 5,1 % en 2011...

Pouvez-vous détailler le contenu de ce budget en termes de mesures pour l'emploi et d'allègements d'impôts ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur les bancs du groupe écologiste)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Ce budget financera des priorités avec trois milliards d'euros pour l'éducation, deux milliards de plus que la sécurité.

Jamais au cours des précédentes mandatures les lois de programmation militaire n'avaient été respectées. Pour répondre aux Cassandre...

M. Philippe Dallier.  - La Cour des comptes !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - ..., les Français ont réalisé 1,3 % de croissance en 2015, quand nous ne prévoyions que 1 % - ce qui paraissait déjà excessif à quelques-uns.

Personne, pas même le Haut Conseil des finances publiques ne remet en cause notre objectif de revenir à un déficit de 2,7 % du PIB en 2017.

Notre objectif de déficit a été respecté en 2014 et 2015, il le sera en 2017. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain).

Alstom (III)

M. Jean-François Longeot .  - Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Je veux dire ma colère à la suite de la fermeture annoncée du site belfortain d'Alstom - même si quelques aménagements sont envisagés. Claude Kern nous avait alertés le 31 mars ; le 13 février 2015, je vous signalais que le Conseil supérieur de la filière ferroviaire était alarmiste : la situation allait forcément engendrer un énorme problème d'emploi. Mme Lemaire me répondait alors : « Le train français regarde vers l'avenir, il a de beaux jours devant lui car il se modernise... » Drôle de conception des beaux jours ! Allez-vous vous engager derrière le groupe ou vous réfugier derrière des commandes à venir illusoires et laisser Belfort mourir comme les hauts fourneaux de Florange ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Je ne veux pas polémiquer sur ce dossier complexe. Nous sommes dans une économie ouverte, la concurrence bat son plein. Alstom conquiert des marchés en Inde, aux États-Unis, souvent grâce à l'action du Gouvernement. J'aurais pu parler d'Airbus, du Rafale... Le problème de surcapacité et la baisse -  transitoire - des commandes sont une réalité.

Emmanuel Macron vous avait répondu sur ce sujet... (Vives exclamations à droite) Nous sommes aujourd'hui gênés, surpris, en colère devant cette annonce...

Mme Fabienne Keller.  - Vous saviez !

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Ne remettez pas en cause ma parole ; madame, à Strasbourg, votre attitude était tout autre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Michel Billout applaudit également) Nous respectons les règles de la commande publique et engageons Alstom à faire les investissements nécessaires, car elle a bénéficié, en effet, des aides publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Agence française de la biodiversité

M. Jean-Noël Cardoux .  - Mme Ségolène Royal n'est pas là... (On s'en désole à droite)

Malgré la communication de ses services durant l'été, le budget et les contours de l'Agence française de la biodiversité restent flous.

Ont été nommés à la tête des opposants notoires, militants, à la chasse, anciens président et directeur du rassemblement des opposants à la chasse, association qui ne rassemble guère plus de 2000 personnes. (Indignation à droite) Ces nominations, qui se passent de commentaires, sinon qu'elles sont évidemment contraires aux engagements pris ici même par Mme Royal, lors de la discussion du projet de loi relatif à la biodiversité, sont-elles de nature à établir le dialogue constructif que nous appelions tous de nos voeux?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - Veuillez excuser l'absence de Ségolène Royal. (Mouvements à droite, où l'on déplore cette absence répétée)

L'AFB a été créée par la loi promulguée cet été pour lutter contre la perte de biodiversité. Ce sera l'opérateur de référence au service de la gestion, de la préservation et de la restauration de la biodiversité.

L'AFB est issue de la réunion de quatre organismes : l'Agence des aires marines protégées, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema), l'Établissement public des parcs nationaux de France et l'Atelier technique des espaces naturels...

M. Cédric Perrin.  - Vous ne répondez pas à la question !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État.  - Peut-être, mais seriez-vous capables, si on vous interrogeait, de donner ces éléments ? (Vives protestations à droite ; applaudissements nourris sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Ségolène Royal et Barbara Pompili ont réuni, le 7 septembre, un conseil d'administration transitoire pour débattre de la gouvernance. Le conseil d'administration définitif sera constitué de plusieurs collèges.

L'Office national de la chasse et de la faune sauvage n'a pas été inclus dans cette agence à la demande des chasseurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Noël Cardoux.  - Merci de vos renseignements... que nous connaissions... Je déplore les choix de Mme Royal - je pense à l'estuaire de la Loire - en contradiction avec tous les acteurs de terrain, y compris au sein de la majorité... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Redressement des comptes sociaux

M. Jean-Louis Tourenne .  - Madame la ministre des affaires sociales, le déficit du régime général de la sécurité sociale, de 17,5 milliards d'euros en 2011, creusait d'année en année une dette qui mettait en cause la pérennité même de notre protection sociale. Malgré la hausse de la population, une conjoncture peu favorable, l'extension de la couverture intégrale, le déficit est ramené cette année à 3,4 milliards d'euros, et la dette commence à être remboursée.

MM. Francis Delattre et Jean-Baptiste Lemoyne.  - Ce n'est pas ce que dit la Cour des comptes !

M. Jean-Louis Tourenne.  - Les familles ont ainsi gagné 1,7 milliard d'euros de pouvoir d'achat, (M. Bruno Sido proteste) sans qu'il y ait eu ni baisse des taux de remboursement, ni nouvelles franchises. Quelles perspectives pour 2016 et 2017, et à quand l'équilibre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé .  - Deux chiffres éloquents : en 2011, 17,5 milliards d'euros déficit du régime général ; en 2016, moins de 3,5 milliards de déficit. 2017, une prévision de 400 millions sur 500 milliards d'euros de budget, soit l'équilibre. Chacun devrait s'en réjouir, car c'est le moyen de garantir à tous la sécurité sociale. Cet objectif a été atteint grâce à des réformes de fond, des retraites, des allocations familiales, de la médecine ambulatoire.

L'opposition a beau chipoter, ratiociner, ergoter, nous rééquilibrons les comptes en créant des droits en plus pour tous, à rebours de ce que vous avez fait, à grands renforts de franchises et de forfaits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Chiffres du chômage

Mme Corinne Imbert .  - Ma question s'adresse au Premier ministre. « Ça va mieux » ? Sauf pour les chômeurs, les entrepreneurs, la ruralité... Bref, sauf pour les Français ! « Pas de bol », disait le président de la République... Les résultats du chômage du mois d'août, d'ordinaire, portés par les saisonniers, constituent un triste record depuis la crise de 2008 avec 50 200 chômeurs de plus de catégorie A, malgré les tours de passe-passe, les escadrons d'emplois aidés... Pire, le nombre des chômeurs de catégorie D et E s'envole, de 90 800 personnes sont passées des catégories A B et C aux autres. Derrière, ce sont des gens qui souffrent. Le navire sombre. Il vous reste sept mois. Que comptez-vous faire pour éviter la noyade ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Derrière la froideur des statistiques, il y a des hommes et des femmes, des familles, des enfants : nous en sommes tous conscients. Aucune dérobade, j'ai toujours assumé les choses. Oui, les chiffres d'août sont mauvais, mais ne remettent pas en cause la trajectoire : il faut regarder les choses sur au moins trois mois, je le dis, que les chiffres soient bons ou mauvais. Selon l'Insee, le chiffre du chômage au sens du BIT a baissé de 10,5 % à 9,9 % en France l'an dernier ! Donner toutes leurs chances aux demandeurs d'emplois les moins qualifiés en lançant un plan de formations, ce n'est pas du trucage mais une exigence morale et sociale !

Nous le faisons à Saint-Nazaire, avec le président Retailleau. Et que dire du contrat d'embauche dans les PME, pour répondre aux 720 000 demandes ? Le plan 500 000 formations, 140 000 emplois créés depuis un an, voilà aussi la réalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Corinne Imbert.  - Bravo pour ces 140 000 emplois créés en 24 heures ! Les chômeurs en formation n'ont pas de contrat de travail, enfin ! Vous avez accusé le Gouvernement précédent pendant quatre ans, prenez enfin vos responsabilités ! Le problème, ce ne sont pas les chômeurs, mais le chômage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Présence du loup

M. Michel Savin .  - Monsieur le Ministre de l'agriculture, nos bergers et élus locaux sont amers : 10 000 victimes du loup en 2015 - combien cette année ? Désormais, on ne peut plus parler d'une espèce en voie de disparition, quand les attaques ont lieu en plein jour ! Le loup est en train de gagner la bataille géographique, la bataille économique, la bataille politique. (On s'en émeut)

L'État paie des sommes en compensation et les chiens dressés attaquent les randonneurs, les habitants des zones de montagnes, pénalisant notre économie touristique. Êtes-vous prêts à renégocier la convention de Berne, à confier à un organisme neutre le soin d'opérer un comptage plus précis du nombre de loups sur le territoire, à autoriser les associations de chasseurs, responsables et formés, à assumer la régulation en continu des prédateurs ? (Applaudissements à droite)

M. Alain Vasselle.  - Bravo !

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Vous sous-entendez que l'État n'aurait rien fait... Allons ! Vous oubliez un plan de régulation inédit ; oui, nous versons des aides : ne fallait-il pas le faire ? Oui, il y a aujourd'hui une indemnisation à hauteur de 22 millions d'euros. Qui a signé la convention de Berne ? C'était il y a longtemps. Il faudrait la renégocier ? Sans doute, mais il faudra trouver une majorité. Il faudra aussi renégocier la directive européenne concernée. J'en parlais avec les ministres finlandais et espagnols ; nous traiterons le problème des chiens Patou qui attaquent aujourd'hui les enfants et les promeneurs...

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Il y en a un à Matignon ! Pas de flou, pas de loup !

M. Michel Savin.  - Les éleveurs, les bergers qui ont entendu votre réponse moqueuse, scandaleuse face à leur situation, sauront qu'en penser ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 h 10.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 20.