Égalité réelle outre-mer (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

Discussion des articles (Suite)

L'article 20 est adopté.

ARTICLE 21

M. le président.  - Amendement n°206, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Rétablir les 1° et 2° dans la rédaction suivante :

1° La cinquième phrase du deuxième alinéa de l'article 43-11 est complétée par les mots : « , par la valorisation des différentes cultures hexagonales et ultramarines » ;

2° Au cinquième alinéa du I de l'article 44, après le mot : « française », sont insérés les mots : « , en France hexagonale comme dans les outre-mer, ».

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Cet amendement rétablit deux dispositions avec une modification devant satisfaire nos éminents constitutionnalistes, qui s'étaient émus en commission des lois : les sociétés du secteur public de diffusion audiovisuelle devront mettre en valeur « les différentes cultures hexagonales et ultramarines » ; l'insertion des mots « en France hexagonale comme dans les outre-mer » n'est pas redondant avec l'article 44 A de la loi Égalité et citoyenneté qui ne comporte aucun élément sur l'outre-mer et se borne à préciser que les programmes doivent être exempts de préjugés.

Mme Vivette Lopez, rapporteur pour avis.  - La première disposition fait doublon avec l'article 185 de la loi Égalité et citoyenneté. La deuxième est ambiguë et redondante avec les obligations qui s'imposent à l'ensemble du secteur public. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Il est important d'avoir une représentation non stéréotypée de la télévision : changeons le regard pour que la France soit vue comme elle est, océanique et diverse. Avis favorable.

L'amendement n°206 n'est pas adopté.

L'article 21 est adopté.

ARTICLE 21 BIS

Mme Marie-Christine Blandin .  - Le Conseil coutumier est une bonne chose pour la démocratie. Il aurait été utile de prévoir un tel dispositif pour Mayotte, Wallis et Futuna, la Polynésie, la Nouvelle-Calédonie, où des peuples autochtones existent, même si elles ne sont pas minoritaires.

Il aurait été préférable de ne pas l'inscrire dans le titre relatif à la culture. Son rôle est bien plus large. Je pense par exemple à l'usage pharmaceutique ou cosmétique de végétaux connus et utilisés de longue date par les populations locales : celles-ci doivent pouvoir être indemnisées dans le cadre du protocole de Nagoya.

Nous avons découvert avec satisfaction un amendement tardif du Gouvernement qui rend possible ce partage des avantages.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

 I.  -  Alinéa 7

Remplacer les mots :

et de promouvoir

par les mots :

et de défendre

et les mots :

socio-culturels

par les mots :

sociaux, culturels, éducatifs

II.  -  Alinéa 15

Remplacer le mot :

quatre

par le mot :

deux

III.  -  Alinéa 25

Remplacer les mots :

les activités culturelles

par les mots :

l'identité

IV.  -  Alinéa 37

Après le mot :

coutumier

insérer les mots :

organise et

V.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« La délibération de l'assemblée de Guyane fixant le montant des indemnités versées aux autorités coutumières et traditionnelles et les modalités d'attribution, est soumise à la consultation du grand conseil coutumier. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet amendement complète et précise les compétences du Grand Conseil coutumier des populations autochtones de Guyane. Il étend sa compétence aux questions qui concernent l'identité de ces populations et pas seulement leurs activités culturelles.

Nous proposons de faire passer de quatre à deux le nombre de personnalités qualifiées afin de laisser plus de place à la représentativité. Nous rendons plus transparente la fixation par l'assemblée de Guyane du montant des indemnités des autorités coutumières et traditionnelles en demandant que la délibération la concernant soit soumise à consultation du Grand Conseil.

La somme de 50 000 euros promise en mars 2016 par la ministre Pau-Langevin, lors de sa visite en Guyane, pour faciliter le déplacement de ses membres n'a toujours pas été versée. Mme la ministre pourrait nous en dire plus. Huit heures de taxi, cela coûte cher ; huit heures en pirogue aussi : il faut payer le gazole.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Ces éléments sont intéressants. Sagesse plutôt favorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Madame la sénatrice, pourriez-vous vous rallier à notre amendement n°89, qui reprend les mêmes éléments ?

La moitié de la somme promise a déjà été versée. La totalité le sera dès que le Grand Conseil aura la personnalité morale.

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'amendement du Gouvernement qui nous est parvenu très tard reprend-il bien toutes les dispositions du mien, monsieur le rapporteur ? Je n'en suis pas sûre... Le mien n'est pas incompatible avec celui du Gouvernement. Je le maintiens par prudence.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - L'amendement n°89 marque une évolution sur le statut et le financement ; mais il ne comprend rien sur la partie éducative.

L'amendement n°83 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°207, présenté par M. Karam et les membres du groupe socialiste et républicain.

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

...) Il est ajouté un article L. 7124-... ainsi rédigé :

« Art. L. 7124-... -  S'il apparaît au grand conseil coutumier que les questions dont il est saisi intéressent directement une ou plusieurs zones du territoire, son président peut saisir les autorités coutumières et traditionnelles intéressées qui disposent d'un délai d'un mois pour rendre leur avis. L'avis est réputé donné à l'expiration de ce délai. Dans les cas où le grand conseil coutumier doit lui-même rendre son avis dans le délai d'un mois, ce délai est porté à deux mois. »

M. Antoine Karam.  - Le Grand Conseil répond à la préconisation du rapport parlementaire consacré aux « Suicides des jeunes Amérindiens en Guyane ». Il devrait devenir en Guyane la personne morale chargée de consulter les populations sur l'utilisation de ressources naturelles que nous leur devons. Cet amendement prévoit d'autres consultations des autorités coutumières sur toute question d'intérêt local.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Rien n'empêche de le faire déjà. Sagesse favorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Avis défavorable : l'amendement du Gouvernement me semble préférable.

M. Antoine Karam.  - Je vais faire preuve de sagesse... (Sourires)

L'amendement n°207 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°89, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Compléter cet article par douze alinéas ainsi rédigés :

« ...) Sont ajoutés des articles L. 7124-19 à L. 7124-22 ainsi rédigés :

« Art. L. 7124-19.  -    À la demande du grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenge, la collectivité territoriale de Guyane peut créer un établissement public de coopération culturelle et environnementale, établissement public à caractère administratif soumis aux règles définies aux articles L. 1431-1 et suivants, sous réserve des adaptations prévues aux articles L. 7124-20 et suivants. Cet établissement public est chargé de mettre en oeuvre l'article L. 412-10 du code de l'environnement.

« Art. L. 7124-20.  -  L'établissement public prévu à l'article L. 7124-19 est créé par arrêté du représentant de l'État en Guyane.

« Art. L. 7124-21.  -  Le conseil d'administration de l'établissement public prévu à l'article L. 7124-19 est composé, outre son président, de :

« a) Un tiers de représentants du grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenge, désignés en son sein ;

« b) Un tiers de représentants de la collectivité de Guyane, des autres collectivités territoriales ou de leurs groupements ou d'autres établissements publics locaux ;

« c) de représentants de l'État ou de ses établissements publics ;

« d) de représentants de fondations ou d'associations concernées ou d'autres personnalités qualifiées.

« Le président du conseil d'administration est désigné par arrêté du représentant de l'État en Guyane, sur proposition du grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenge.

« La durée du mandat du président et des membres du conseil d'administration est de trois ans, renouvelable une fois.

« Art. L. 7124-22.  -  Les ressources de l'établissement public de coopération culturelle et environnementale prévu au dernier alinéa de l'article L. 1431-1 comprennent les ressources issues des contrats conclus en vertu des dispositions de l'article L. 412-10 du code de l'environnement.

« Art. L. 7124-23.  -  Un décret en Conseil d'État précise les autres règles statutaires particulières applicables à cet établissement public. »

II.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  À la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 412-10 du code de l'environnement, les mots : « le conseil consultatif mentionné à l'article L. 71-121-1 du même code » sont remplacés par les mots : « l'établissement public prévu à l'article L. 7124-19 du code général des collectivités territoriales ».

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - En l'état des dispositions du code de l'environnement, l'organisme chargé d'organiser cette consultation doit être doté de la personnalité morale et relever du droit public. Or le Grand Conseil coutumier est une commission administrative consultative et ne dispose pas de la personnalité morale de droit public.

Cet amendement crée un établissement public, composé de représentants du Grand Conseil coutumier désignés au sein de ce dernier, de représentants des collectivités et de représentants des services de l'État. Le président du conseil d'administration de l'établissement public devra être désigné parmi ses pairs, parmi les représentants.

L'initiative de la création de cet établissement public reviendra au Grand Conseil coutumier, par une demande formulée auprès de la collectivité territoriale de Guyane.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les écologistes soutiendront ce bel amendement.

On voit la complexité juridique que crée l'utilisation pharmaceutique ou cosmétique d'une feuille ou d'une graine, dès lors qu'il s'agit d'en partager les avantages. Les Guyanais auront ce Grand Conseil mais les autres territoires n'auront que leurs collectivités locales - qui devront bien équiper leurs services !

L'amendement n°89 est adopté.

L'article 21 bis, modifié, est adopté.

L'article 21 ter demeure supprimé.

L'article 22 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°103, présenté par Mme Tetuanui.

Après l'article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le cadre des objectifs de la politique de la ville et du renouvellement urbain en outre-mer, les moyens d'intervention de l'agence nationale de la rénovation urbaine en faveur de la collectivité de Polynésie française portent sur des crédits d'ingénierie, d'expertise et d'appui de l'agence au réseau des acteurs de la rénovation urbaine.

Mme Lana Tetuanui.  - L'objet de cet amendement permet explicitement l'intervention de l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) en Polynésie française, en ingénierie de projets, expertise et appui au réseau des acteurs de la rénovation urbaine, actuellement exclue par l'article 24 de la loi du 21 février 2014.

M. Michel Magras, rapporteur pour avis.  - Les collectivités du Pacifique peuvent disposer de l'expertise de l'Anru, comme on le voit à Nouméa et à Papeete.

Cet amendement n'est pas rattaché à un texte en vigueur... Il faut respecter les statuts spécifiques de nos collectivités du Pacifique.

Sagesse.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Certes l'indemnisation de l'Anru n'est pas identique en Polynésie française et ailleurs. Je vous propose de signer une convention de collaboration entre l'Anru et votre territoire lorsque je m'y rendrai, courant mars.

Mme Lana Tetuanui.  - J'en prends acte. Merci.

L'amendement n°103 est retiré.

L'article 22 bis demeure supprimé, de même que l'article 24 bis.

M. le président.  - Amendement n°143 rectifié bis, présenté par MM. Karam, Patient, Desplan et S. Larcher, Mme Claireaux et MM. Cornano, Antiste et J. Gillot.

Après l'article 24 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 68-19 du code minier est ainsi modifie? :

1° Au premier alinéa, les mots : « département d'outre-mer » sont remplacés par les mots : « collectivité territoriale régie par l'article 73 de la Constitution » ;

2° Après le 4°, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« 5° De représentants des secteurs économiques concernés ;

« 6° De représentants des organismes représentatifs des communautés locales concernées.

« Les membres mentionnés aux 5° et 6° n'ont droit à aucun remboursement de leurs frais de déplacement. »

M. Antoine Karam.  - La Commission départementale des mines est composée de représentants élus des collectivités territoriales, de représentants des administrations publiques concernées, de représentants des exploitants de mines et de représentants des associations de protection de l'environnement et d'une personnalité qualifiée. Je propose d'élargir cette composition afin d'y intégrer les représentants des secteurs économiques concernés, a? l'instar des pêcheurs ou des agriculteurs, et les représentants légitimes des organismes représentatifs des communautés locales.

Pour ne pas tomber sous le coup de l'article 40, nous prévoyons que les nouveaux membres ne bénéficient pas de remboursement de leurs frais.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Il s'agirait en effet d'acteurs directement concernés : cela semble souhaitable. Mais vous référencez l'article 68 de l'ancien code minier, qui doit être refondu par ordonnance.

Avis du Gouvernement sur cette échéance ?

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Je suis réservée sur cet amendement qui relève du champ réglementaire. Une proposition de loi en cours d'examen à l'Assemblée nationale porte sur cette question. La majorité des acteurs semblent satisfaits. Si des demandes d'élargissement ont pu être formulées, il faut conserver une taille raisonnable. Sagesse.

L'amendement n°143 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°144 rectifié bis, présenté par MM. Karam, Patient, S. Larcher, Desplan, Cornano, Antiste et J. Gillot.

Après l'article 24 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 621-4 du code minier, il est inséré un article L. 621-... ainsi rédigé :

« Art. L. 621-... Six mois après la délivrance d'une autorisation d'ouverture de travaux ou d'une autorisation d'exploitation portant sur une substance aurifère, un prélèvement représentatif de deux échantillons minimum de minerai aurifère sera réalisé par l'exploitant sous la responsabilité et le contrôle de la police des mines. Ces échantillons devront être mis sous scellé. Ces prélèvements ne donnent pas lieu à dédommagement. »

M. Antoine Karam.  - En décembre 2016, il y avait 300 000 sites illégaux d'orpaillage contre 215 000 en 2015...

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - On peut adhérer à votre objectif qui renforce la traçabilité et donc la lutte contre l'orpaillage illégal. Avis du Gouvernement ?

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Avis très favorable.

L'amendement n°144 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°133 rectifié bis, présenté par MM. Karam et J. Gillot.

Après l'article 24 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le titre II du livre IV du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° À l'article L. 420-4, après la référence : « L. 421-1 », sont insérés les références : « , des articles L. 423-1, L. 423-1-1, L. 423-2, L. 423-4, L. 423-5, L. 423-6, L. 423-7, L. 423-8-1, L. 423-9, L. 423-11, L. 423-12, L. 423-15, L. 423- 16, L. 423-17, L. 423-18, L. 423-21, L. 423-22 , L. 423-23, L. 423-25, L. 428-2, L. 428-3, L. 428-14 et L. 428-20 » ;

2° Le chapitre 3 est ainsi modifié :

a) Après l'article L. 423-1, il est inséré un article L. 423-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 423-1-....  -  Nul ne peut pratiquer la chasse en Guyane s'il n'est titulaire et porteur d'un permis de chasser valable.

« Le caractère valable en Guyane du permis de chasser résulte :

« 1° De la réussite à l'examen mentionné à l'article L. 423-5 dont les épreuves sont adaptées aux spécificités du département de la Guyane en ce qui concerne la chasse, la forêt, les espèces présentes et les règles de sécurité ;

« 2° De l'accomplissement de l'une des formalités mentionnées à l'article L. 423-23. » ;

b) Après l'article L. 423-8, il est inséré un article L. 423-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 423-8-....  -  En Guyane, le préfet :

« 1° Désigne les organismes dispensant les formations mentionnées par les articles L. 423-2 et L. 423-8 ;

« 2° Désigne deux chasseurs siégeant à la place des représentants de la fédération des chasseurs dans le jury mentionné à l'article L. 423-5 ;

« 3° Peut dispenser les candidats résidents dans les zones mal desservies du certificat médical mentionné à l'article L. 423-6 sous réserve qu'ils produisent une déclaration sur l'honneur qu'ils ne sont pas atteints d'une affection mentionnée au 6° de l'article L. 423-15. Les deux derniers alinéas de l'article L. 423-11 sont applicables en cas de fausse déclaration. En cas de doute sur la déclaration relative aux affections mentionnées au 6° de l'article L. 423-15 précité, le préfet peut demander un certificat médical. » ;

c) Après la sous-section 4 de la section 2, est insérée une sous-section 5 ainsi rédigée :

« Sous-section 5

« Dispositions propres à la Guyane

« Art. L. 423-22.  - La validation pour la Guyane du permis de chasser délivré en France ou des documents mentionnés à l'article L. 423-21 n'est possible ou n'est valable que si le détenteur justifie de sa connaissance de la forêt et de la faune sauvage guyanaises et des règles de sécurité et de gestion afférentes.

« Cette justification résulte :

« 1° Soit de l'obtention en Guyane du permis de chasser au titre de la reconnaissance de l'expérience cynégétique des résidents en vertu du II de l'article ... de la loi n°   du   de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique ;

« 2° Soit de l'admission à l'examen mentionné à l'article L. 423-5 passé en Guyane ;

« 3° Soit de l'admission à un examen de ces connaissances spécifiques organisé suivant les mêmes règles que celles des articles L. 423-5 à L. 423-8.

« Art. L. 423-23.  -  Outre les cas prévus à l'article L. 423-12, le permis des résidents à titre principal en Guyane peut-être validé pour, au plus, deux communes limitrophes du territoire.

« Les articles L. 423-16 a? L. 423-18 ne sont pas applicables a? cette validation communale.

« La validation résulte du visa annuel du permis par le maire de la commune de cette résidence ou d'une des communes du lieu de chasse. La validation ne donne lieu qu'à la perception, par la commune du lieu de visa, d'une taxe qu'elle délibère mais dont le montant ne peut excéder la moitié de celui de la redevance départementale annuelle.

« Le préfet peut accorder un visa irrégulièrement refusé ou annuler un visa irrégulièrement accordé. »

II.  -  Est dispensée de l'examen prévu à l'article L. 423-5 du code de l'environnement, toute personne majeure qui, à la date de promulgation de la présente loi, chasse en Guyane et y réside à titre principal en conformité avec la législation sur le séjour dans ce territoire, selon une attestation du maire de la commune de cette résidence ou du lieu de cette chasse. Sa demande de délivrance du permis doit être déposée à peine de nullité avant le 1er janvier 2020 auprès du préfet.

La délivrance consécutive du permis est gratuite.

Le préfet peut accorder une attestation irrégulièrement refusée ou annuler une attestation irrégulièrement accordée.

III.  -  Les décrets d'application du présent article sont pris après avis de la collectivité territoriale de Guyane.

M. Antoine Karam.  - En 1946, lors de la départementalisation, la Guyane comptait moins de 30 000 habitants. Aujourd'hui, elle en compte plus de 250 000, or elle demeure le seul territoire sans aucune réglementation sur la chasse : chacun peut acheter une arme sur simple présentation d'une carte d'identité. Une mission a permis de faire émerger un consensus sur l'établissement d'un permis de chasse, qui réduira les violences, alors que le taux de violences sur personnes est le plus élevé de France.

L'objectif essentiel étant de freiner la vente et la circulation des armes à feu en Guyane, les contrôles seraient focalisés sur les points de vente d'armes. Il s'agit d'un élément important dans la lutte des autorités contre l'insécurité en Guyane. L'opportunité d'une réglementation plus aboutie serait discutée avec les associations de chasseurs.

M. Michel Magras, rapporteur pour avis.  - Cet amendement est souple et tient compte des intérêts locaux. Avis favorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Sagesse sur ce sujet d'une grande sensibilité locale.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - La question est sérieuse. L'objectif de cet amendement est pertinent. Le Gouvernement, avec son avis de sagesse, a pris conscience de la gravité du sujet. Adoptons cet amendement, pour que ces dispositions puissent être discutées à la CMP.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet amendement donnera un peu de traçabilité.

Un permis de chasse requiert me semble-t-il - pardonnez l'ignorance de l'écologiste - de savoir tirer au fusil et de le casser à l'approche des habitations. N'oublions pas que dans le sud du département, la chasse se fait avec un arc et des flèches.

M. Antoine Karam.  - Rassurez-vous, ils sont désormais tous munis de fusils !

M. Georges Patient.  - Il est indiqué que le détenteur connaît la forêt guyanaise. Pour beaucoup de Guyanais, la chasse peut être un produit touristique : les touristes pourront-ils chasser ?

L'amendement n°133 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

L'article 25 A est adopté.

ARTICLE 25

Mme Gélita Hoarau .  - La Réunion est le département où le taux de chômage, à 30 %, est le plus élevé. Toute offre d'emploi devrait être présentée à Pôle Emploi, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Des concours de recrutement pourraient être réservés par un moratoire aux résidents réunionnais, comme cela avait été fait par M. Rocard pour la Nouvelle-Calédonie. Cela pourrait être fait dans le cadre de la loi d'expérimentation. À situation exceptionnelle, solution exceptionnelle.

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par MM. Laufoaulu et Magras.

I.  -  Alinéa 2

Après les mots :

matériels et moraux

insérer les mots

ou ayant eu une précédente expérience considérée comme réussie par leur hiérarchie,

II.  -  Alinéa 3

Après les mots :

matériels et moraux

insérer les mots :

ou ayant eu une précédente expérience considérée comme réussie par leur hiérarchie,

M. Michel Magras.  - M. Laufoaulu nous propose cet amendement fondé sur son vécu. Le choc culturel est souvent grand pour les fonctionnaires d'État mutés dans les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution. Il faut souvent plusieurs mois pour qu'ils comprennent leur environnement, certains n'y parvenant pas. Une première expérience réussie constituerait un critère de choix intéressant pour les mutations, en démontrant la capacité d'adaptation du fonctionnaire, gage d'efficacité et de réussite.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Je serais personnellement tenté de donner un avis favorable. Mais il semble difficile de fixer un critère aussi peu objectif. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Je comprends tout à fait sa démarche. J'ai demandé à mes services de travailler sur des pistes pour y répondre, en lien avec le ministère de la fonction publique. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Michel Magras.  - Cet amendement d'appel aura permis de porter la sensibilité de M  Laufoaulu. Je comprends les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre.

L'amendement n°110 rectifié est retiré.

L'article 25 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mme Tetuanui.

Après l'article 25

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'ordonnance n°2005-10 du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs est ainsi modifiée :

1° À la première phrase du 2° de l'article 40, les mots : « régis par le présent statut général », sont remplacés par les mots : « ainsi qu'aux agents non titulaires de droit public » ;

2° L'article 44 est ainsi rédigé :

« Art. 44.  -  En vue de favoriser la promotion interne, les statuts des cadres d'emplois fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés aux agents de droit public suivant l'une ou l'autre des modalités ci-après :

« 1° Inscription par voie de concours sur une liste d'aptitude en application du 2° de l'article 40 ;

« 2° Au personnel appartenant déjà à la fonction publique des communes de Polynésie française :

« - par inscription sur une liste d'aptitude après examen professionnel ;

« - par inscription sur une liste d'aptitude après avis de la commission administrative paritaire compétente par appréciation de la valeur et des acquis de l'expérience professionnelle des agents.

« Les listes d'aptitude sont valables sur l'ensemble du territoire de la Polynésie française. Leur validité cesse automatiquement au terme d'un délai de deux ans à compter soit de la proclamation des résultats du concours mentionné au 1° ou de l'examen mentionné au 2°, soit de la publication de la liste mentionnée au 2°. »

Mme Lana Tetuanui.  - Selon les dispositions applicables de l'article 40 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 consolidée par la loi du 15 juin 2011, publiée le 16 juin 2011, seuls les fonctionnaires titulaires des communes polynésiennes peuvent prétendre aux concours interne, conformément au principe d'une promotion interne, réservée généralement aux seuls fonctionnaires issus d'une même fonction publique.

Cet amendement propose d'ouvrir ces concours aux fonctionnaires et aux agents non titulaires de la fonction publique ayant les conditions d'ancienneté requises, notamment à l'ensemble des contractuels qui exercent dans les communes polynésiennes en CDI, soit 2 352 agents qui n'ont pas encore opté pour l'intégration dans la fonction publique communale.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Bien que l'on puisse exprimer des réserves sur certains des motifs exposés, au regard de la spécificité de la fonction publique communale de la Polynésie française, avis favorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°8 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°113, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 25

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les collectivités et établissements qui emploient des fonctionnaires originaires des départements de Guyane, Guadeloupe, Martinique,  Mayotte, de La Réunion et de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, sont remboursés des charges salariales de toute nature correspondant à l'exercice du droit à congé prévu par l'article 57 de la loi 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives  à la fonction publique territoriale par une dotation particulière prélevée sur les ressources affectées à la dotation globale de fonctionnement par la loi de finances de l'année. Le montant de ce concours particulier est fixé chaque année par le comité des finances locales compte tenu des charges effectives résultant pour les collectivités territoriales de l'application des dispositions de cet article.

Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Éliane Assassi.  - Les congés bonifiés permettent aux agents de la fonction publique, originaires des outre-mer exerçant en France hexagonale, d'effectuer périodiquement un séjour dans leur département d'origine. Pour mémoire, les fonctionnaires d'État travaillant outre-mer ont des avantages nettement plus conséquents. Or le financement des congés bonifiés des 4 600 agents ultramarins par les collectivités territoriales est de plus en plus difficile, à cause des baisses de dotations.

Notre amendement crée une dotation particulière aux collectivités et établissements qui emploient des fonctionnaires originaires de Guyane, Guadeloupe, Martinique, Mayotte, La Réunion et Saint-Pierre-et-Miquelon, afin de les rembourser des charges salariales de toute nature correspondant à l'exercice du droit à congé. Cette dotation serait prélevée sur les ressources affectées à la dotation globale de fonctionnement par la loi de finances de l'année.

M. Michel Canevet, rapporteur pour avis.  - Il semble difficile, dans le contexte de baisse des dotations, de faire peser sur les autres collectivités une telle charge. Avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Également.

L'amendement n°113 n'est pas adopté.

L'article 26 est adopté, ainsi que l'article 27.

L'article 28 demeure supprimé.

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par MM. Patient, Karam, S. Larcher, Desplan, Cornano et J. Gillot et Mme Claireaux.

Après l'article 28

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5216-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À titre expérimental et pendant une durée maximale de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi n°      du      de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, l'État peut autoriser la constitution d'une communauté d'agglomération, au sens du premier alinéa, lorsque celle-ci forme un ensemble d'au moins 25 000 habitants autour d'une commune centre de plus de 15 000 habitants et que la majorité des communes membres, dont la commune centre, sont des communes littorales au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement. »

M. Georges Patient.  - Par le passé, la loi a ouvert une expérimentation permettant aux communautés de communes littorales de se transformer en communauté d'agglomérations quand bien même elles ne remplissaient pas l'ensemble des conditions. Cette expérimentation a bénéficié à Fécamp. Notre amendement ouvre à nouveau cette expérimentation aux intercommunalités ultramarines de qui le souhaitent.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Cet amendement soulève des réserves. Nous n'avons pas de bilan de ces expérimentations, dont la dernière a été ouverte par la loi dite « Maptam », relative aux métropoles. La notion même de communauté d'agglomérations pourrait être affaiblie. La pertinence de cette expérimentation dépend grandement de la démographie. Avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Même avis.

M. Georges Patient.  - J'insiste ; la Guyane est une très grande région de 83 000 km2, 22 communes et seulement quatre communautés de communes sur parfois 30 000 km2. Si elles doivent fusionner entre elles, alors qu'elles sont très éloignées, les effets d'économies d'échelle été de zone homogène ne pourront pas exister.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°27 rectifié, mis aux voix par assis et levé, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°208, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 29 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 562-6 du code de l'organisation judiciaire, il est inséré un article L. 562-6-... ainsi rédigé :

« Art. L. 562-6-...  -  Sans préjudice de l'article L. 121-4, en cas de surcharge d'activité et d'impossibilité manifeste pour la juridiction d'y faire face dans les délais prescrits par la loi ou le règlement, et à la demande du premier président de la cour d'appel de Nouméa, un ou plusieurs magistrats du siège désignés par le premier président de la cour d'appel de Paris sur une liste arrêtée par lui pour chaque année civile peuvent compléter les effectifs de la juridiction pendant une période ne pouvant excéder trois mois.

« Lorsque la venue du ou des magistrats ainsi désignés n'est pas matériellement possible, soit dans les délais prescrits par la loi ou le règlement, soit dans les délais exigés par la nature de l'affaire, ils participent à l'audience et au délibéré du tribunal depuis un point du territoire de la République relié, en direct, à la salle d'audience, par un moyen de communication audiovisuelle.

« Les modalités d'application du deuxième alinéa sont fixées par décret en Conseil d'État. »

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Cet amendement permet d'adapter le fonctionnement judiciaire aux difficultés particulières du tribunal de première instance de Nouméa, victime de surcharge, notamment à cause du contentieux des listes électorales. C'est indispensable pour garantir l'organisation harmonieuse de la consultation. Je souligne que ce dispositif est temporaire.

J'apprécie le changement d'avis de la commission des lois à ce sujet.

M. le président.  - Amendement identique n°215, présenté par le Gouvernement.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Je le retire au profit du précédent.

L'amendement n°215 est retiré.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Si nous avons, à un moment, supprimé cette mesure, ce n'était pas pour la freiner. Ses motivations sont totalement justifiées. Avis favorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Même avis évidemment.

L'amendement n°208 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par M. Mohamed Soilihi et Mme Jourda.

Avant l'article 29 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le paragraphe 3 de la section 1 du chapitre III du titre Ier bis du livre Ier du code civil est ainsi modifié :

1° L'article 21-7 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour un enfant né à Mayotte, le premier alinéa n'est applicable que si l'un des parents au moins réside en France de manière régulière et ininterrompue depuis plus de trois mois. » ;

b) À la première phrase du second alinéa, les mots : « s'applique le premier alinéa » sont remplacés par les mots : « s'appliquent les deux premiers alinéas » ;

2° L'article 21-11 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour un enfant né à Mayotte, les deux premiers alinéas ne sont applicables que si l'un des parents au moins réside en France de manière régulière et ininterrompue depuis plus de trois mois. »

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Cet amendement est justifié par la situation migratoire exclusive, inédite de Mayotte. Par avance, je m'insurge contre celles et ceux qui l'utiliseraient pour remettre en cause ailleurs le droit du sol. En 2012, 40 % de la population était en situation irrégulière. En recoupant des données, notamment de consommation de denrées alimentaires de première nécessité, on estime aujourd'hui cette population à 50 %.

Chaque jour à Mayotte, sur 374 km², nait une salle de classe ! 65 % des femmes qui accouchent à Mayotte sont en situation irrégulière, et n'y viennent que pour mettre au monde un enfant dans l'espoir qu'il devienne Français.

C'est aussi le seul territoire de la République française revendiqué par un pays étranger. On assiste en effet à une colonisation de fait par les habitants des Comores, encouragés par leur Gouvernement, qui a rejeté la France en 1974, alors que l'immense majorité des Mahorais l'avait choisie.

Avant 1993, le droit du sol était plus strictement interprété, à tel point que son application était plus dure que ce que je propose ici : l'ancien article 161 du code de la nationalité disposait qu'un des parents devait disposer de la nationalité française pour qu'un enfant bénéficie du droit du sol. Une décision du Conseil constitutionnel, concernant une question prioritaire de constitutionnalité, a jugé qu'une telle particularité était conforme à la Constitution.

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié bis, présenté par MM. Soilihi, Mayet, D. Laurent, Huré et Legendre.

Avant l'article 29 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles 21-7 et 21-11 du code civil sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le département de Mayotte, ces dispositions sont applicables lorsque l'un au moins des parents se trouve en situation régulière au moment de la naissance de l'enfant. »

M. Abdourahamane Soilihi.  - Les deux sénateurs de Mayotte parlent d'une même voix. Les événements qui ont secoué Mayotte en 2016 doivent nous encourager à agir. Les efforts pour l'éducation et la santé sont annihilés par l'arrivée de ressortissants des Comores, de Madagascar et de pays d'Afrique. Trop petite Mayotte, avec ses 374 km2 ! Sa situation est grave. Pensez aussi au péril que courent sur l'océan ces femmes qui viennent à Mayotte seulement pour accoucher.

Cet amendement, je l'espère, trouvera sa juste place dans ce projet de loi.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Il n'est nullement question d'instrumentaliser ni de stigmatiser la situation de Mayotte, au contraire. Personne ne peut contester les propos de M. Mohamed Soilihi qui doit être assuré avec son collègue de notre entier soutien moral, face à une situation dont personne ici ne conteste le constat. Il est nécessaire de prendre toute la dimension du problème aujourd'hui. Pour autant, n'excluons pas la réalité constitutionnelle : est-il conforme à notre loi fondamentale d'établir des conditions différentes d'accès à la nationalité selon les territoires de la République ? Au-delà de la question tout à fait légitime de la lutte contre l'immigration irrégulière, il y va de notre conception commune de la Nation. C'est pourquoi, tout en comprenant parfaitement les arguments que vous avez exprimés, j'en demande le retrait ou donnerai un avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - La situation de Mayotte, vous la connaissez ; mieux, vous la vivez. Je la connais aussi un peu parce que La Réunion la vit également, dans une moindre mesure. Situation vécue, difficile, douloureuse, de part et d'autre ; celle de la population de ce département français ; celle de tous ceux qui traversent, au péril de leur vie, un bras de mer parce qu'ils pensent qu'ils pourraient vivre dignement ailleurs.

C'est un sujet qui nous touche et le Gouvernement agit par des mesures renforcées, conformément à la volonté du président de la République, tout au long de ce quinquennat, en allouant des moyens de sécurité, pour la population, en investissant dans l'éducation.

Le Gouvernement a remboursé 42 millions d'euros de dettes de l'État, datant de 2009, pour l'aide sociale à l'enfance. Il entreprend également des actions diplomatiques importantes envers les Comores.

La République est une et indivisible sur les lois de souveraineté et donc de nationalité. Ces valeurs nous unissent.

En outre, ces amendements ne sont pas conformes à la Convention internationale des droits de l'enfant à laquelle nous sommes très attachés. Retrait ou avis défavorable.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Je suis très touché par les motivations de nos collègues mahorais auteurs de ces deux amendements. Si je ne peux y souscrire, je ne peux me contenter de discours compassionnels en réponse. (M. Jean Desessard approuve) L'État doit agir, face à une situation qui tient en échec ses initiatives jusqu'à présent.

Je ne peux que comprendre les intentions des auteurs de ces deux amendements. Derrière leur proposition se trouve une attente très forte de la population, aujourd'hui submergée par une immigration irrégulière que rien ne réussit à contenir. Le refus d'adopter ces amendements ne doit pas être perçu comme une fin de non-recevoir pour solde de tout compte.

Au-delà du véritable cri d'alarme que vous lancez, à supposer que ces amendements soient adoptés par notre Assemblée et qu'ils trompent la vigilance du Conseil constitutionnel, ils ne régleraient pas la situation. Ce ne sont pas, dans notre système juridique, les règles d'acquisition de la nationalité française en elles-mêmes qui pourraient y parvenir, en l'état actuel des règles d'exécution des obligations de quitter le territoire national.

Aussi dois-je joindre ma voix à celles du rapporteur de la commission des lois et de la ministre pour vous demander le retrait de ces amendements, en dépit des attentes légitimes des Mahorais, auxquels ils tentent de répondre.

Enfin, madame la ministre, si les mesures du Gouvernement ces dernières années avaient été suffisantes et efficaces, nous ne discuterions pas aujourd'hui de modifier les règles d'acquisition de la nationalité sur une partie du territoire de la République.

M. Daniel Raoul.  - Voici un problème humain avant tout. Ne nous y trompons pas ! Si la loi de notre République ne s'adapte pas à Mayotte - comme d'ailleurs à la Guyane -, c'est la question du rattachement même de ces territoires à la République française qui sera posée. Ces amendements sont des appels d'urgence qu'il faut entendre car la situation est ingérable.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Merci, madame la ministre, messieurs le rapporteur et le président de la commission des lois. Il n'est pas facile pour moi de proposer un tel amendement. Je me suis fait violence. Localement, quand on tient des explications juridiques, telles que celles que vous venez d'exposer, on passe pour un lâche. Le droit du sol représente aux yeux des Mahorais un appel d'air... Je le rapporterai à Mayotte : la Représentation nationale n'est pas prête à franchir ce pas.

Ne disons pas cependant qu'il n'y a pas de solution. La solution existe : elle est diplomatique. Il est extraordinaire que la cinquième puissance mondiale ne puisse mettre fin à la fabrication de ces bateaux de la mort que sont les kwassa kwassa alors que nous savons bien d'où ils viennent.

Il faut enfin se garder d'en faire un aliment de polémique politique. Aucun Gouvernement n'a été à la hauteur des enjeux.

M. Abdourahamane Soilihi.  - Nous avons pris acte de vos explications, madame la ministre, messieurs le rapporteur et le président de la commission des lois. Ces amendements s'appuient sur la réalité. Chaque territoire d'outre-mer a ses spécificités. La question de la diplomatie à l'égard des Comores a été posée. Aujourd'hui, les Mahorais attendent beaucoup du Gouvernement.

On dit qu'on a beaucoup fait pour Mayotte. C'est vrai. Peut-être est-ce pour cela que tous veulent y aller. Les 374 km2 de Mayotte peuvent-ils accueillir toute la région ? Non. Autrefois, le droit du sol n'y était pas applicable parce que nous avions pris la mesure du risque. Mais il lui a été étendu. Je terminerai d'un mot, d'un appel : écoutez les Mahorais !

M. Jean Desessard.  - Tout le monde convient que la situation est intenable. On ne peut donc pas ne rien faire. Madame la ministre, ne pouvez-vous mettre en place une mission de parlementaires et de juristes qui propose, en trois mois, des solutions à cette situation ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Très bien !

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Le sujet est difficile. On ne peut pas dire que rien n'a été fait. C'est plus complexe. Il y a une situation historique. Les Comores sont un archipel, dont Mayotte fit partie. Tous vivaient ensemble auparavant. Il y a des familles qui se répartissaient de part et d'autre du bras de mer qui les sépare désormais.

Outre l'histoire de ce territoire, il y a son cheminement vers la départementalisation. Des droits nouveaux, à la santé, à l'éducation, ont été ouverts en conséquence. Mayotte est un territoire de richesse - Eh, oui, tout est relatif - dans un océan de pauvreté.

L'approche diplomatique est essentielle. Mais son temps est plus long que deux ou trois mois. C'est aussi en ce sens que nous agissons, celui de la coopération régionale.

La Réunion est engagée dans un tel processus : elle coopère avec les Comores. La diplomatie ne peut aboutir qu'avec une volonté des différentes parties.

Le Gouvernement ne laisse pas ce dossier en jachère, alors que le territoire de Mayotte est de plus en plus attractif, et que les difficultés sont de plus en plus grandes, de plus en plus douloureuses.

La mission Darcos-Queyranne est en cours de travail et je réfléchis à votre proposition, monsieur le sénateur Desessard, qui est intéressante.

L'amendement n°1 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°12 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement n°71 rectifié, présenté par Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Avant l'article 29 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 5911-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le congrès des élus départementaux et régionaux de La Réunion est composé des membres du conseil départemental de La Réunion et du conseil régional de La Réunion. »

Mme Gélita Hoarau.  - Cet amendement de cohérence met en conformité la loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer, dite LOOM, avec la révision constitutionnelle de 2003, qui a ouvert la possibilité de créer par la loi une collectivité se substituant à un département et une région d'outre-mer ou d'instaurer une assemblée délibérante unique, après avoir obligatoirement obtenu le consentement des électeurs.

Il s'agit donc de donner la possibilité à La Réunion de convoquer son congrès, instance spécifique aux régions d'outre-mer comportant un seul département, prévue par l'article 62 de la LOOM, en modifiant à cette fin le code général des collectivités territoriales.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Cet amendement a été déposé à de nombreuses reprises par notre regretté collègue Paul Vergès. Rien n'empêche les élus départementaux et régionaux, en l'état actuel de la loi, de tenir une réunion informelle de leurs assemblées délibérantes. Avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Même avis.

M. Jacques Gillot.  - Il n'est pas question d'évoluer tout de suite, mais d'autoriser une réforme. Je défends cet amendement, compte tenu de l'expérience de la Guadeloupe.

M. Félix Desplan.  - Très bien !

L'amendement n°71 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°128 rectifié bis, présenté par MM. J. Gillot, Cornano, Desplan, S. Larcher et Patient.

Avant l'article 29 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article L. 5915-1 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « délibère », est inséré le mot : « annuellement ».

M. Jacques Gillot.  - La persistance statutaire de la coexistence sur un seul et même territoire d'une région et d'un département ne peut être une réponse politique probante et satisfaisante, appelée à perdurer indéfiniment.

Le statu quo institutionnel de la Guadeloupe est contraire à l'esprit progressiste de ce projet de loi, antinomique avec la notion d'égalité qu'il porte.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Le débat institutionnel n'est nullement interdit par le code des collectivités territoriales.

Faisons confiance à l'intelligence territoriale. Avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Retrait ou avis défavorable. Des possibilités existent aujourd'hui. Ainsi, les assemblées locales ont tout loisir de réunir leur congrès.

M. Jacques Gillot.  - Lorsque les deux collectivités territoriales n'ont pas la même couleur politique, il n'y a jamais de congrès. Je le sais, j'ai été président du conseil général de la Guadeloupe jusqu'en 2015. D'où mon amendement qui offre cette possibilité de débat. Comment comprendre qu'il y ait un département et une région sur le même territoire, qui ne cessent de tirer chacun la couverture à soi ? Ne soyons pas hypocrites.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Vous mélangez un problème politique et un problème institutionnel. De nombreux territoires dans l'Hexagone se sont rapprochés...

M. Jacques Gillot.  - La loi NOTRe l'a permis.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - L'Alsace, la Haute-Savoie (M. Loïc Hervé le confirme) n'ont pas attendu la loi NOTRe, ni la constitution d'assemblées communes, pour se rapprocher. La loi ne doit pas imposer le débat. (M. Loïc Hervé applaudit)

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Ces amendements n'engagent que leurs signataires et non leur groupe.

L'amendement n°128 rectifié bis n'est pas adopté.

ARTICLE 29 BIS (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°81, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante : 

Au début de l'article L. 511-1 du code minier, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : 

« Les officiers de police judiciaire agissant conformément au code de procédure pénale sont habilités à constater les infractions aux dispositions législatives du présent code ainsi qu'aux dispositions prévues par les textes pris pour leur application. Ils peuvent également procéder aux confiscations et aux destructions prévues respectivement aux articles L. 512-4 et L. 512-9. Cette habilitation et ces dispositions sont étendues aux agents de police judiciaire agissant en Guyane dans le cadre du dispositif "Harpie" pour la lutte contre l'orpaillage illégal. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - En Guyane, l'orpaillage est une plaie - pour les Amérindiens, pour la forêt, pour l'eau, pour la sécurité. On a obtenu quelques résultats par la force, peu par la diplomatie. Mais les 25 000 orpailleurs clandestins continuent de faire régner leur loi dans la forêt ; de leurs marmites d'amalgame s'échappe du mercure qui contamine l'eau, donc les poissons : le taux de mercure dans les cheveux des enfants est trois fois celui autorisé par l'OMS.

Imaginez, dans la forêt de Brocéliande ou de Fontainebleau, 25 000 personnes, plus ou moins esclavagisées, qui creuseraient le sous-sol, pollueraient tout et menaceraient de passer les promeneurs par les armes !

Cet amendement apporte un morceau de solution, en renforçant les moyens des officiers de police judiciaire. (M. Jean Desessard applaudit)

M. le président.  - Amendement n°111, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La section 2 du chapitre Ier du titre II du livre VI du code minier est complétée par un article L. 621-8-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 621-8-2.- En Guyane, dans le cadre exclusif du dispositif de lutte contre l'orpaillage illégal, outre les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire sont habilités, sous la responsabilité de ceux-là, à saisir dans le cadre de leurs opérations tout bien, matériel ou installation ayant servi, directement ou indirectement, à la commission de l'infraction, ainsi que de tout produit provenant de celle-ci, et à procéder à la destruction de matériel dans les conditions prévues à l'article L. 512-9. »

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Cet amendement réécrit l'article 29 bis, qui habilite les officiers et agents de police judiciaire à procéder à la confiscation et à la destruction prévues au code minier, pour tenir compte des exigences juridiques propres à la procédure pénale.

S'ils ne peuvent procéder de leur propre volonté à des confiscations, dans la mesure où il s'agit d'une peine prononcée par le juge, les OPJ peuvent saisir des objets matériels dans le cadre d'une opération judiciaire. Cette faculté pourrait être utilement étendue aux agents de police judiciaire, dans la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane. De même, l'extension des compétences de destruction aux agents de police judiciaire de la compétence ne soulève pas de difficulté.

M. le président.  - Sous-amendement n°233 à l'amendement n°111 du Gouvernement, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission des lois.

Amendement n° 111, alinéa 3

1° Remplacer les mots :

sous la responsabilité de ceux-là

par les mots :

sous le contrôle desdits officiers de police judiciaire

2° Remplacer les mots :

de l'infraction, ainsi que de tout produit provenant de celle-ci

par les mots:

des infractions mentionnées aux articles L. 512-1, L. 512-2 et L. 512-5, ainsi que de tout produit provenant de celles-ci

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Ce sous-amendement précise le dispositif proposé, sans rien changer sur le fond. L'infraction d'orpaillage n'existant pas en tant que telle, il convient de viser spécifiquement les dispositions du code minier relatives aux infractions pénales.

L'amendement n°81 pose un problème de constitutionnalité, que résout l'amendement n°111. Avis défavorable au premier et favorable au second, sous réserve de l'adoption du sous-amendement.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Avis favorable au sous-amendement et défavorable à l'amendement n°81

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le but est atteint, je le retire.

L'amendement n°81 est retiré.

Le sous-amendement n°233 est adopté.

L'amendement n°111, ainsi sous-amendé, est adopté.

L'article 29 bis est ainsi rétabli.

ARTICLE 29 TER

M. Antoine Karam .  - Fin 2016, 302 chantiers aurifères illégaux sont recensés, contre 235 un an auparavant. Le nombre d'interventions militaires est passé de 1 300 à 1 700. L'orpaillage illégal se structure autour de véritable filières d'immigration clandestine, de réseaux de prostitution, de trafics d'armes et de drogue. Dans ce parc pourtant protégé, l'insécurité est réelle.

Malgré les succès de l'opération Harpie, l'État devra prendre de nouvelles mesures face à l'afflux massif d'orpailleurs illégaux. C'est le sens de ces articles visant à renforcer notre arsenal juridique. Derrière ces mesures techniques, il y des femmes et des hommes, victimes quotidiennes de ce fléau.

M. le président.  - Amendement n°209, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rédiger ainsi cet article :

Le premier alinéa de l'article L. 511-1 du code minier est complété par les mots : « ainsi que les inspecteurs de l'environnement sur le seul territoire du Parc amazonien de Guyane, après habilitation expresse du procureur de la République de Cayenne ».

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Cet amendement rétablit l'article 29 ter dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, que nous considérons plus cohérente que la proposition de notre rapporteur. L'extension des pouvoirs de constatation ne soulève pas de difficulté particulière, les inspecteurs de l'environnement disposant déjà de pouvoirs de police judiciaire limitativement énumérés.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Face à la criminalité organisée, vous proposez d'étendre ces pouvoirs de police judiciaire à l'ensemble des inspecteurs de l'environnement, catégorie très large. La commission des lois les avait réservés aux seuls agents du parc amazonien. Conscient des difficultés rencontrées sur le terrain, je veux bien m'en remettre à la sagesse - mais la rédaction de l'amendement n°132 rectifié bis, identique sur le fond, me semble préférable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Avis favorable à l'amendement n°209. J'en profite pour saluer le travail de la députée Chantal Berthelot, qui a défendu ce dossier à l'Assemblée nationale.

M. Jean Desessard.  - L'amendement n°209 ajoute, alors que l'amendement n°132 rectifié bis remplace. Il me semble plus large, et donc plus intéressant.

L'amendement n°209 est adopté.

L'amendement n°132 rectifié bis devient sans objet.

L'article 29 ter est ainsi rédigé.

ARTICLE 30 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°82, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  L'article L. 621-12 du code minier est ainsi rédigé :

« Art. L. 621-12.  -  La présente section est applicable à l'ensemble du territoire guyanais. »

II.  -  Le I entre en vigueur trois mois après la promulgation de la présente loi.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Encore un article qui a disparu dans la navette... Cet amendement rend applicable à toute la Guyane un article du code minier selon lequel la détention de mercure, de concasseur et de corps de pompe est soumise à autorisation. Les habitants de la forêt ne comprennent pas qu'on laisse circuler les orpailleurs avec ces instruments !

M. le président.  - Amendement identique n°131 rectifié bis, présenté par M. Karam et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Antoine Karam.  - Il faut mieux lutter contre les filières d'approvisionnement des sites d'orpaillage illégal. Toute personne peut vendre, acheter, détenir et transporter en forêt guyanaise du mercure, des concasseurs et des corps de pompe sans être inquiétée, alors que ce matériel n'est destiné à aucun autre usage que l'orpaillage illégal.

Cela décrédibilise l'action des forces de l'ordre, qui ne peuvent sanctionner les pirogues transportant ce matériel faute de preuve de leur destination illégale et favorise le développement de filières d'approvisionnement en matériel, les magasins de ravitaillement étant installés sur la rive brésilienne de l'Oyapock.

Le périmètre du régime dérogatoire doit donc être étendu. Notre rapporteur s'inquiète des libertés individuelles ; mais les forces de l'ordre savent bien reconnaître les instruments des orpailleurs clandestins, les entreprises minières légales utilisant un matériel très différent.

Le mercure utilisé pour amalgamer les paillettes et poussières d'or pollue les rivières et empoisonne les populations. Son usage est interdit - mais pas son transport !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Ne passionnons pas le débat. Je regrette le communiqué de presse de Mme Chantal Berthelot, qui s'est permis de dire que la commission des lois du Sénat et le groupe Les Républicains soutenaient l'orpaillage illégal... Admirez le sens de la nuance !

La restriction à ces contrôles a été introduite dans la loi du 25 novembre 2013 par... Mme Berthelot elle-même, au motif qu'il fallait protéger les libertés individuelles. La zone littorale, moins sujette à l'orpaillage et concentrant l'essentiel de la population guyanaise, a ainsi été exclue de l'obligation de déclaration préalable. L'extension à tout le territoire du régime dérogatoire occasionnerait des charges administratives considérables pour les particuliers et les entreprises qui utilisent ce type d'équipement. Enfin, la peine encourue - 30 000 euros d'amende et deux ans de prison - méconnaît le principe constitutionnel de nécessité des peines. Avis défavorable.

Mme Ericka Bareigts, ministre.  - Avis favorable à ces amendements qui poursuivent notre combat, vital pour la forêt amazonienne, contre l'orpaillage clandestin.

M. Jean Desessard.  - L'orpaillage illégal est un mal social, économique, culturel, avec le saccage des conditions de vie.

Vous n'êtes pas satisfait du communiqué de presse de Mme Berthelot, monsieur le rapporteur ; soit. Elle était sur votre position en 2013 ; vous devriez considérer que si elle a évolué, c'est qu'elle a constaté les insuffisances de la mesure proposée... et devriez suivre son évolution.

Mme Éliane Assassi.  - On reconnaît bien l'avocat !

M. Jean Desessard.  - Mais peut-être anticipez-vous en réalité la réduction prochaine du nombre de fonctionnaires en cas d'alternance, et pensez-vous qu'ils ne seront dès lors plus assez nombreux pour mener à bien cette lutte ?

Mme Marie-Christine Blandin.  - C'est tout à l'honneur de M. le rapporteur de se préoccuper des libertés individuelles. Mais la situation est exceptionnelle. J'ai visité des hôpitaux, des collectivités, des PME du littoral guyanais dont les agents disaient, en riant : « demain, j'ai RTT-orpaillage ». Avec leur remorque, leur bonbonne de mercure, ils partent de Saint-Laurent pour se rendre dans la forêt ! Cet amendement obligera certes quelques chefs d'entreprises à faire une déclaration administrative, mais chassera ceux qui ont de mauvaises intentions.

M. Antoine Karam.  - Nous avons tous été touchés par les propos de nos collègues mahorais, qui ont décrit la réalité qu'ils vivent. Monsieur le rapporteur, je vous invite à venir en Guyane. Nous remonterons le Maroni et l'Oyapock : vous verrez de quelles destructions nous parlons. Malgré les efforts menés depuis 2007, les garimpeiros sont en état de guérilla permanente. De l'autre côté de la frontière, des convois récupèrent l'or. Pour les chasser, il faut y mettre les moyens, quitte, je le dis, à porter atteinte aux libertés... Les garimpeiros préfèrent venir dans le pays des Droits de l'homme parce qu'au Brésil, ça ne rigole pas !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - J'entends votre plaidoyer. Nous voulons faire preuve de pragmatisme et avancer. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste ; M. Guillaume Arnell applaudit également)

Les amendements identiques nos82 et 131 rectifié bis sont adoptés.

L'article 30 est ainsi rétabli.

M. le président.  - Nous avons examiné 80 amendements aujourd'hui, il en reste 69.

Prochaine séance, jeudi 19 janvier 2017, à 10 h 30.

La séance est levée à minuit.

Marc Lebiez

Direction des comptes rendus