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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Candidatures à d'éventuelles CMP

Commission (Candidature)

Mise au point au sujet d'un vote

Renforcement du dialogue social (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

Nominations à d'éventuelles CMP

Commission (Nomination)

Avis sur une nomination

Renforcement du dialogue social (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3

Mme Évelyne Yonnet

M. Olivier Cadic

Mme Annie David

Mme Laurence Cohen

M. Dominique Watrin

Mme Élisabeth Lamure

Mme Dominique Gillot

Mme Gisèle Jourda

M. Yves Daudigny

Mme Catherine Génisson

M. Pierre Laurent

M. David Assouline

M. Martial Bourquin

Ordre du jour du jeudi 27 juillet 2017

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mercredi 26 juillet 2017

12e séance de la session extraordinaire 2016-2017

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

Secrétaires : Mme Valérie Létard, Mme Catherine Tasca.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Candidatures à d'éventuelles CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que, d'une part, la commission des affaires sociales a procédé à la désignation des candidats à l'éventuelle commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte commun sur le projet de loi actuellement en cours d'examen, et que, d'autre part, la commission des lois a procédé à la désignation des candidats aux éventuelles commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte commun sur le projet de loi et le projet de loi organique pour la régulation de la vie publique.

Ces listes ont été publiées conformément à l'article 12, alinéa 4, du Règlement et seront ratifiées si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

Commission (Candidature)

M. le président.  - J'informe le Sénat que le groupe La République en marche a fait connaître à la présidence le nom de la candidate qu'il propose pour siéger à la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean-Baptiste Lemoyne, dont le mandat a cessé.

Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

Mise au point au sujet d'un vote

M. Maurice Antiste.  - Un vote contre a été attribué à M. Jeanny Lorgeoux, sur le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité intérieure et à la lutte contre le terrorisme. Or il a voté pour.

M. le président.  - Acte vous en est donné. Il en sera tenu compte dans l'analyse politique du scrutin.

Renforcement du dialogue social (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié bis, présenté par Mmes Lienemann et Yonnet, MM. Duran et Mazuir, Mme Jourda, MM. Labazée, Godefroy, Courteau et Montaugé et Mme Monier.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'article 2 fusionne les instances représentatives du personnel, ce qui, avec le référendum d'initiative patronale, revient à contourner ce faisant les syndicats. Le CHSCT devrait rester une instance autonome. Moins d'élus, moins de parlementaires, moins de délégués dans l'entreprise... Étrange conception de notre démocratie !

Je regrette aussi qu'aucune formation des élus ne soit prévue ; de plus, la limitation du nombre de mandats dans le temps pour les représentants du personnel n'a à mes yeux pas d'objet.

M. le président.  - Amendement identique n°55, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Annie David.  - La mesure phare de l'article 2 est le regroupement des instances représentatives du personnel en une instance unique ; seul le Medef le demande ; c'est revenir sur le programme du Conseil national de la Résistance inclus dans le préambule de la Constitution de 1946, auquel fait référence la Constitution actuelle.

La mise en cause des CHSCT est une atteinte grave à ce qu'il reste de notre modèle social. Vous endossez, madame la ministre, une responsabilité historique. Les CHSCT ont le pouvoir d'ester en justice. C'est sans doute cela qui gêne le Medef. Plus de 500 personnes meurent chaque année au travail ; est-il digne de réduire la protection des travailleurs dans l'entreprise ? Songez au drame de l'amiante, qui a fait des milliers de victimes. Nous demandons la suppression de l'article 2.

M. le président.  - Amendement identique n°73 rectifié bis, présenté par M. Antiste.

M. Maurice Antiste.  - Alors que la loi Rebsamen date d'à peine deux ans et n'a fait l'objet d'aucun bilan, l'article 2 du projet de loi prévoit une complète refonte des règles de négociation dans l'entreprise.

En fusionnant au sein d'une instance unique les délégués du personnel, le comité d'entreprise, et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), le projet de loi réduit considérablement les prérogatives et les moyens dont disposent les représentants du personnel dans les entreprises. Il met aussi en cause le rôle des syndicats en permettant à la nouvelle instance unique de disposer des attributions normalement dévolues aux délégués syndicaux.

Cela affaiblit gravement les droits syndicaux et la représentation collective des intérêts des salariés, et accroît le déséquilibre des relations sociales au sein de l'entreprise.

M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Ces amendements s'opposent à l'ensemble de l'article 2 et sont évidemment contraires à la position de la commission. Avis défavorable aux amendements nos8 rectifié bis, 55 et 73 rectifié bis.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail.  - Avis défavorable, bien sûr. Voici le bilan de la concertation avec les partenaires sociaux sur le sujet. Pourquoi fusionner les instances représentatives du personnel ?

M. Jean Desessard.  - Eh oui !

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il convient d'avoir un lieu de débat stratégique et opérationnel. Le fait que les discussions soient divisées entre les instances limite le dialogue social. Un exemple : les risques psycho-sociaux. Dans l'enquête que j'ai menée en 2010, j'ai constaté qu'ils résultaient parfois de comportements individuels mais étaient surtout liés à des facteurs organisationnels : éloignement des centres de décision de l'entreprise, problèmes hiérarchiques, ou d'organisation matérielle, pouvant soumettre les salariés à des injonctions contradictoires. Pour résoudre ce problème, il peut être utile de fusionner comité d'entreprise, délégués du personnel et CHSCT sans perdre la substance de ce qui est fait aujourd'hui. (M. Jean Desessard le conteste.)

La nouvelle instance, peut-être le comité social et économique, pourra aborder l'intégralité de problèmes auparavant envisagés sous des aspects différents, aura la capacité d'ester en justice, dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, et sera dotée d'un budget de fonctionnement propre. Nous sommes convenus avec les partenaires sociaux qu'il conviendrait de former une sous-commission au sein de cette instance chargée des questions de santé. Mais l'instance unique aura une vision globale du dialogue social.

Dans certaines entreprises, si l'employeur et l'organisation syndicale sont prêts à aller plus loin, là où le dialogue social est bon, un conseil d'entreprise pourrait être constitué.

La reconnaissance des parcours syndicaux est une autre priorité. Elle pourra faire l'objet d'accords de branche - nous en avons parlé hier. J'ai demandé à cette fin une étude à Jean-Dominique Simonpoli, directeur de l'association Dialogues, qui devrait fournir dans quelques jours des propositions opérationnelles.

La discrimination syndicale existe ; il convient d'en renforcer la connaissance et par là, la prévention.

Voilà les premiers fruits du dialogue engagé avec les organisations syndicales.

Mme Annie David.  - Merci d'avoir précisé le périmètre de l'instance nouvelle. Mais tout cela reste très compliqué à mettre en oeuvre. Il existe trois instances, trois lieux de discussions différents en fonction des sujets, avec leurs spécificités et leurs compétences.

Pourquoi ne pas réunir les trois instances telles qu'elles fonctionnent et existent aujourd'hui, autour d'une même table, une fois par mois par exemple ? Cela permettrait de maintenir le même nombre d'élus. Votre projet va créer des professionnels de la représentation syndicale, je ne crois pas que vous la souhaitiez. Je ne suis pas convaincue par vos explications, je crains que les salariés, et leur représentation syndicale, n'y perdent.

Mme Gisèle Jourda.  - Vos propos, madame la ministre, n'emportent pas non plus ma conviction...

M. Jean Desessard.  - Ah !

Mme Gisèle Jourda.  - Les trois instances sont efficaces quand on sait les manager.

M. Jean Desessard.  - Très bien !

Mme Gisèle Jourda.  - J'en ai l'expérience, puisque j'ai eu sous ma responsabilité 3 500 employés, répartis dans 22 centres, dans le secteur associatif, sanitaire et médico-social, au sein d'une organisation analogue, dans son fonctionnement, à une entreprise. J'ai travaillé avec ces trois instances représentatives du personnel, à ma grande satisfaction et à celle du personnel.

J'ajoute que dans certaines entreprises, ce sont les mêmes interlocuteurs que l'on retrouve dans les différentes instances. Votre projet marque une véritable régression...

M. Jean Desessard.  - Très bien !

M. Martial Bourquin.  - Chaque instance a sa propre vocation, sa spécificité. Les salariés des entreprises font face aux exigences croissantes des clients, aux changements dans l'organisation du travail. Celui-ci devient plus dense, mais aussi plus précaire, avec pour corollaire une dégradation des conditions de travail, les risques psycho-sociaux (RPS), les troubles musculo-squelettiques (TMS). C'est pourquoi les CHSCT sont essentiels, avec leurs élus spécialisés et formés. Les supprimer serait une erreur catastrophique.

Les comités d'entreprise ont, eux, un rôle d'alerte, avec une spécialisation économique et budgétaire qui n'a rien à voir, parfois, avec celle des CHSCT.

Enfin, les délégués du personnel travaillent au quotidien sur le dialogue social.

En fusionnant ces instances, vous appauvrissez ce dialogue, vous risquez de le vider de sa substance.

Mme Nicole Bricq.  - Il serait déraisonnable et paradoxal de supprimer cet article. (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain) Hier, mes collègues à gauche ont récusé la méthode du Gouvernement qu'ils jugent précipitée. Or il faut à présent discuter en profondeur de l'article 2 ! Pourquoi le supprimer ? Les instances représentatives du personnel sont selon nous de véritables outils de gouvernance, auxquels participent les représentants des salariés. Leur évolution, leur fusion, vise à modifier la gouvernance de l'entreprise, pour donner toute sa place à cette participation, envisagée de manière globale.

Il est essentiel à cet égard de discuter des moyens d'action, à travers les fonds paritaires.

La ministre propose une nouvelle gouvernance groupée, au reste déjà pratiquée par des entreprises comme Solvay. La fusion, dans cette entreprise du secteur de la chimie, porte ses fruits, y compris en matière de sécurité et de santé, où ce sont des préoccupations importantes pour les salariés.

M. Olivier Cadic.  - Pourquoi s'inquiéter de la constitution d'une seule instance dont la ministre a rappelé le caractère stratégique et opérationnel ? Dans les entreprises, il importe de travailler et de réfléchir ensemble, et non plus selon une logique en silo, qui doit évoluer. Le cloisonnement, chacun dans son coin, c'est notre côté gaulois... Il faut entrer dans le nouveau monde !

Ce comité social et économique qui est annoncé contribuera à changer les pratiques et les mentalités. Je note, madame la ministre, qu'il n'y aura pas de perte de droits pour les salariés. Je suis favorable à la création de sous-commissions, mais laissez les entreprises libres de le faire elles-mêmes !

Peut-être y a-t-il derrière cette défense enflammée des diverses instances existantes, des intérêts financiers cachés... (On se récrie sur plusieurs bancs du groupe communiste républicain et citoyen et du groupe socialiste et républicain.)

M. Jean Desessard.  - En quoi la santé serait-elle mieux défendue par une instance unique ? Je n'ai pas entendu d'exemples dans votre propos, madame la ministre, je le regrette. Les membres du CHSCT ont de l'expérience, s'intéressent aux autres entreprises, consultent des revues.

Monsieur Cadic, vous dénoncez le travail en silo. Mais les comités d'entreprise, les délégués du personnel et les CHSCT ont connaissance de leurs travaux mutuels. En revanche, si la rentabilité est la seule préoccupation, ce débat est sans objet... (Marques d'approbation sur plusieurs bancs du groupe communiste républicain et citoyen et du groupe socialiste et républicain)

M. David Assouline.  - Les arguments de la ministre se retournent aisément. Ainsi, beaucoup de décisions économiques ont un effet immédiat sur la santé. Une instance spécifique est nécessaire pour les examiner.

Comme l'a dit Mme David, il serait très utile que les différentes instances se réunissent ensemble régulièrement. Ce n'est pas ce que propose la ministre. Pourquoi, dans un autre domaine, ne pas fusionner le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) ? Parce que dans ce cas c'est l'économie qui dicte les décisions ! C'est un organisme spécifique avec des membres spécifiquement formés qui s'occupe le mieux d'un sujet précis.

Au-delà des déclarations des uns et des autres, constatons que le groupe En Marche a voté une loi déséquilibrée par la droite, qui droitise naturellement le texte qui nous est proposé. D'où nos amendements de suppression et de repli...

M. le président. - Merci de respecter votre temps de parole...

Mme Évelyne Yonnet.  - L'employeur n'est rien sans ses salariés ; ceux-ci ne sont rien sans lui. Les instances représentatives du personnel assurent le lien social et introduisent de la démocratie dans un monde de rapports de force.

Le CHSCT, surtout, a un rôle bien distinct. Il assure la prévention en lien avec le médecin du travail, qui joue un rôle très important. Il ne saurait être regroupé avec le comité d'entreprise. La CFTC commence déjà à tiquer sur le sujet... L'entreprise n'évoluera pas en matière de santé et de prévention si le CHSCT est assimilé aux autres IRP.

Mme Odette Herviaux.  - Très bien !

M. Jérôme Durain.  - L'histoire du progrès social, c'est une suite d'amélioration, relatives au temps de travail, mais aussi à la qualité des conditions de travail. Le garant de celles-ci est le CHSCT. Monsieur Cadic, vous êtes naïf ou indifférent. Il faut universaliser le propos.

Il y a quelques mois, nous avons introduit dans la loi le devoir de vigilance des entreprises, y compris auprès de sous-traitants à l'autre bout du monde, au Bangladesh par exemple.

M. Jean Desessard.  - Bravo !

M. Jérôme Durain.  - Ne pas sanctuariser les questions de santé au travail, c'est les subordonner aux impératifs économiques. Quand les salariés travaillent dans de meilleures conditions, ils sont plus productifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Ronan Dantec.  - Le CHSCT, comme la santé, n'a pas de prix. Je ne comprends pas le système du Gouvernement. Au Sénat, l'ex-groupe écologiste a porté une loi sur les lanceurs d'alerte pour écarter des risques... que vous réintroduisez dans l'entreprise !

Vous mettez en place un système où les luttes sociales se radicaliseront. Je ne suis pas sûr que ce soit le but. Il est encore temps que la raison l'emporte. Maintenez et renforcez le CHSCT, qui est un lieu de sérénité - ce mot est important - dégagé des tensions de l'entreprise. (M. Jean Desessard applaudit.)

M. Dominique Watrin.  - Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Une instance unique avec des sous-commissions, ce n'est pas le plus opérationnel. Nous manquons de médecins du travail et d'inspecteurs, là est la source des frustrations.

Monsieur Cadic, la ficelle est un peu grosse ! Nous savons que vous êtes chef d'entreprise. Je conçois bien que le CHSCT embête les patrons. Mais l'instance unique ne contribue pas à la compétitivité. Ne pas s'attaquer spécifiquement au mal-être au travail c'est au contraire l'aggraver. Selon une étude récente dont les résultats, que j'ai sous les yeux, ont été publiés, le coût du mal-être au travail est de 12 600 euros par an, dont 2 500 incompressibles liés à des arrêts maladie et 10 100 euros qui seraient économisés par les entreprises si elles prenaient en compte le désengagement du salarié, lié à une fatigue ou une perte de sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard applaudit également.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Mme Bricq a cité l'entreprise Solvay, qui a réuni ses instances ensemble. C'est frappé au coin du bon sens. Mais le Conseil d'État lui-même s'étonne, dans son avis, que le Gouvernement rende la réunion obligatoire en supprimant les instances existantes ! En réalité, madame la ministre, vous voulez moins de représentants syndicaux dans les entreprises. C'est votre philosophie de concentration du pouvoir : moins de parlementaires, moins d'élus locaux, moins de syndicalistes...

Logique économique et vigilance en matière de santé et de sécurité sont clairement en conflit. Qu'en pense M. Hulot, qui se préoccupe de santé environnementale ? Eh bien, le CHSCT est le lieu de la vigilance collective dans ce domaine. (MmEvelyne Yonnet applaudit.)

Mme Catherine Tasca.  - Deux objectifs - la mise en commun du travail des représentants du personnel et la nécessité de maintenir un travail spécifique sur la question de la santé - sont ici évoqués. Vous avez ouvert une porte, madame la ministre, en évoquant une sous-commission. Pourquoi ne pas la rendre obligatoire ? Et pouvez-vous prendre l'engagement de maintenir le nombre de membres du CHSCT dans la nouvelle instance ? (M. Jean Desessard et Mme Dominique Gillot applaudissent.)

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Tous les jours, les salariés sollicitent leur délégué du personnel à propos d'un souci de santé ; le délégué du personnel transmet à l'employeur et cela s'arrête là. La fusion est l'occasion d'une réflexion collective et globale, pour aller plus loin dans la prévention. Le sujet est avant tout organisationnel.

Dans la plupart des pays européens, il n'y a qu'une instance et le dialogue social est meilleur.

Second exemple, personnel : voici dix ans, j'ai mis en place dans le groupe Danone dont j'étais DRH une protection sociale harmonisée pour tous nos salariés, dans le monde. Cent filiales étaient concernées. Nous avons associé, dans la méthode, l'économique et le social avec des indicateurs chiffrés pour prouver que la protection faisait baisser l'absentéisme et augmenter le taux d'engagement.

L'organisation internationale du travail s'en est saisie et le travail a servi de modèle à 300 entreprises dans le monde. Nous avons trouvé la bonne articulation. (Applaudissements sur les bancs des groupes La République en marche et Union centriste ; Mme Marie-Annick Duchêne et M. René Danesi applaudissent également.)

M. Jean-Louis Tourenne.  - On trouvera toujours un pays pour nous montrer le chemin. Aux Marquises, où j'ai enseigné, il n'y a pas beaucoup de cancers, ni de CHSCT... Y a-t-il un lien pour autant ? Ce genre de raisonnement m'irrite un peu. Le lit, où meurent 95 % des gens, n'est pas un endroit particulièrement dangereux... (Rires ; applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

Le groupe socialiste a souhaité discuter chaque mesure de l'article 2. Sur ces trois amendements, nous avons besoin de nous concerter. Monsieur le président, je vous demande par conséquent une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 15 h 25, reprend à 15 h 30.

À la demande du groupe communiste républicain et citoyen, les amendements identiques nos8 rectifié bis, 55 et 73 rectifié bis sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°130 :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 272
Pour l'adoption 43
Contre 229

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°137 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Au début de cet article

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 3121-27 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 3121-27.  -  La durée légale du travail des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile ou par toute autre période de sept jours consécutifs. Cette durée est fixée à trente-deux heures à compter du 1er janvier 2021. »

M. Dominique Watrin.  - Le débat sur la durée légale du travail est philosophique : quelle société voulons-nous ? Le droit au temps libre est inscrit dans l'ADN du mouvement d'émancipation qui est le nôtre. Si un ancien Premier ministre fustigeait la société du farniente, l'idée de la semaine de 32 heures a fait du chemin, y compris à droite puisqu'elle figurait dans la loi de Robien de 1996. Certaines sociétés, comme Fleury Michon ou Télérama, l'ont mise en place. À l'étranger, de grands patrons, comme Carlos Slim ou Larry Page, la défendent.

Soyons précis : la hausse du temps libre est une chance pour le développement de nouvelles activités économiques. Pour autant, la consommation et les besoins ne sont pas infinis. Et, la productivité par travailleur augmentant, il y aura, à terme, raréfaction de l'emploi. Dans ces conditions, une meilleure répartition du temps de travail est une solution. C'est le raisonnement que la Suède a suivi : ce pays a expérimenté la semaine de 32 heures chez Toyota en 2002 avant de la généraliser avec, pour effet, une augmentation de la consommation et une baisse de chômage. Dernier argument, régulièrement oublié par les détracteurs de la réduction du temps de travail, ses vertus pour la santé au travail et, donc, la santé financière de la sécurité sociale.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Même avis. Je rappelle que la durée légale du travail correspond au seuil à partir duquel se déclenchent les heures supplémentaires. Durant les 48 réunions que nous avons tenues avec les partenaires sociaux, personne n'a demandé sa révision à la hausse comme à la baisse.

À la demande de la commission des affaires sociales, l'amendement n°131 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°131 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l'adoption 21
Contre 315

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°9 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°199, présenté par MM. Vanlerenberghe et Cadic.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

salariés de droit privé

par les mots :

employeurs et aux salariés mentionnés à l'article L. 2211-1 du code du travail

M. Olivier Cadic.  - Amendement rédactionnel.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cet amendement n'est peut-être pas purement rédactionnel. Il vise les établissements publics industriels et commerciaux ainsi que les établissements publics à caractère administratif. Peut-être sont-ils déjà inclus dans la réforme des instances représentatives du personnel... Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Ils sont inclus, cet amendement le précise utilement. Avis favorable.

L'amendement n°199 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°160, présenté par M. Desessard et Mmes Benbassa et Bouchoux.

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

M. Jean Desessard.  - Puisque nous abordons un tunnel d'amendements en discussion commune, j'apporterai ma petite lumière. Madame la ministre, vous ne m'avez pas convaincu. Vous avez parlé de Danone où vous avez excellé : bravo ! Vous avez dit qu'il ne fallait pas opposer économique et social : très bien ! En revanche, on ne sait toujours pas pourquoi il faut fusionner les trois instances représentatives du personnel. Vous n'avez répondu ni à Mme Tasca ni à Mme David.

Il y a la lumière de M. Cadic. Pour lui, l'entreprise ne doit pas être citoyenne ; elle est là pour faire des bénéfices. Le reste regarde la société ; L'entreprise, faut que ça marche ; en marche !

Nous, au contraire, pensons que l'entreprise doit être citoyenne, qu'elle doit non seulement trouver des solutions quand il y a risque mais aussi prévenir. C'est pourquoi nous défendons le maintien du CHSCT.

M. le président.  - Amendement n°74 rectifié, présenté par M. Antiste et Mme Jourda.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

M. Maurice Antiste.  - La création d'une instance unique, sous l'apparence de la simplification, met en cause le droit fondamental des salariés à la représentation collective.

M. le président.  - Amendement identique n°101, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Laurence Cohen.  - Le comité social et économique, future instance unique, comptera moins de membres que les trois instances actuelles, a déclaré la ministre le 17 juillet dernier. Si le nombre de représentants du personnel n'est pas l'alpha et l'oméga, cela pose problème. L'alinéa 2, dont nous demandons la suppression, revient sur cent ans d'histoire du mouvement ouvrier.

Madame la ministre, vous pensez que nous répétons les mêmes choses en boucle mais je vous le dis à mon tour : je ne suis pas non plus convaincue. Vous nous demandez de faire confiance sans apporter aucune réponse à nos questions.

M. François Patriat.  - Vous ne voulez pas les entendre !

Mme Laurence Cohen.  - Vous ne démontrez rien et il faudrait signer un chèque en blanc ?

Vous gommez le lien de subordination et le rapport de classes dans l'entreprise. Chacune des instances du dialogue social a été créée, après de rudes conflits, pour répondre à un besoin spécifique.

M. le président.  - Amendement n°29 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

Fusionnant

par le mot :

Regroupant

M. Jean-Louis Tourenne.  - Dans les entreprises de plus de 300 salariés, il est possible de regrouper, par accord majoritaire, les instances représentatives du personnel. Dans les entreprises de moins de 300 salariés, en application de la loi du 17 août 2015, l'employeur peut mettre en place une délégation unique du personnel, en y intégrant le CHSCT. Le regroupement possible devient, avec votre texte, une fusion contrainte.

L'identité de chaque IRP doit être respectée, en particulier celle du CHSCT. En 2015, 40 millions de journées d'incapacité de travail ont été dénombrées ainsi que 545 décès, soit une hausse de 8 %. Conservons-lui son pouvoir d'ester en justice et de commander des expertises avec un financement propre.

M. Martial Bourquin.  - Excellent !

M. le président.  - Amendement n°210 rectifié bis, présenté par MM. Assouline et Durain, Mme Guillemot, M. Montaugé, Mme Lepage, M. Roger, Mme Blondin et M. Cabanel.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

Fusionnant

par les mots :

Expérimentant, par accord majoritaire, la fusion

M. David Assouline.  - Quand Mme Tasca a posé une question très concrète à la ministre, il n'y a même pas eu l'esquisse d'une réponse. La ministre a déclaré qu'en rien, le Gouvernement ne voulait mettre de côté la question de la santé. En réalité, on nous demande de réduire le nombre des délégués ; c'est ce que veulent Pierre Gattaz et le Medef. Je propose une fusion expérimentale. Si le Gouvernement s'y oppose, cela démontrerait que ses intentions ne sont pas celles qu'il affiche.

Mme la présidente.  - Amendement n°30 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Après la première occurrence du mot :

instance

insérer les mots :

, sauf accord déterminant les conditions dans lesquelles plusieurs institutions représentatives du personnel sont maintenues au sein de l'entreprise,

M. Jean-Louis Tourenne.  - Curieuse façon de débattre : nous voici contraints de présenter à la fois l'amendement souhaité et l'amendement de repli, comme celui-ci...

Obligation est faite à tous de fusionner les trois instances représentatives du personnel alors que vous prônez la liberté et la négociation par ailleurs ; laissez la possibilité à l'accord d'en décider.

L'amendement n°102 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°103, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Après le mot :

travail

insérer les mots :

, en préservant l'ensemble des commissions obligatoires existantes des comités d'entreprise,

Mme Christine Prunaud.  - En fusionnant les instances représentatives du personnel, vous supprimez de facto les commissions obligatoires du comité d'entreprise. Plus de commission de la formation professionnelle et de l'emploi à l'heure du bouleversement technologique ? Plus de commission de l'égalité professionnelle quand les écarts de rémunérations entre femmes et hommes n'ont jamais été aussi élevés ? Plus de commission d'information et d'aide au logement alors que les salaires stagnent, les loyers s'envolent et les logements sociaux de plus en plus rares ? Comment, madame la ministre, pouvez-vous le justifier ?

Ces commissions sont nécessaires à la transparence dans l'entreprise, transparence qui permet l'information des salariés et rend l'employeur insoupçonnable.

M. le président.  - Amendement n°207 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Allizard, Bas, Bonhomme, Buffet, Calvet, Cambon, Cantegrit, Chaize, Charon, Chatillon, Commeinhes, Cuypers, Dallier, Danesi, Darnaud, Dassault, Delattre et del Picchia, Mmes Deromedi et Di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Estrosi Sassone, MM. Fontaine, J.P. Fournier, Frassa, Genest, Grand, Gremillet, Huré, Joyandet, Kennel, Laménie, D. Laurent et Lefèvre, Mme Lopez, MM. Magras, de Legge, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mme Mélot, MM. Nougein, de Nicolaÿ, Panunzi, Pierre, Pintat, Pointereau, Poniatowski, Poyart, Rapin, Reichardt, Retailleau et Revet, Mme de Rose, M. Savin, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle et Vogel.

Alinéa 2

1° Après le mot :

travail

insérer les mots :

, en relevant les seuils d'effectifs à prendre en compte,

2° Supprimer les mots :

les seuils d'effectifs à prendre en compte,

Mme Élisabeth Lamure.  - Cet amendement relève les seuils d'effectifs à partir duquel l'organisation d'élections professionnelles est obligatoire.

Ces seuils constituent des freins psychologiques et administratifs au développement des entreprises et agissent, aux yeux des chefs d'entreprise, comme des freins à leur croissance. Ils sont d'ailleurs dans les faits peu respectés : seulement 38 % des entreprises de 50 à 99 salariés comptent un comité d'entreprise. Mettons le droit en cohérence avec la réalité.

M. le président.  - Amendement n°31 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

les seuils d'effectifs à prendre en compte,

M. Jean-Louis Tourenne.  - Nous nous inscrivons en faux contre l'amendement précédent qui ouvre la boîte de Pandore des seuils. Madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer l'utilité de la mention des seuils dans le projet de loi ?

M. le président.  - Amendement n°231, présenté par M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

les moyens,

par les mots :

ses moyens

M. Alain Milon, rapporteur.  - Amendement purement rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°32 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

et en fixant à trois

M. Jean-Louis Tourenne.  - La commission des affaires sociales limite à trois le nombre de mandats des délégués tout en demandant une formation des membres des instances représentatives du personnel. Or la formation est théorique mais elle se fait aussi sur le tas. Un délégué doit apprendre à ne pas être intimidé, lors des négociations, devant des personnes exerçant une autorité dans l'entreprise. Pourquoi limiter le nombre de mandats, sauf à imiter ce qui a été décidé pour les élus de la Nation ?

M. le président.  - Amendement identique n°105, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

et en fixant à trois

M. Dominique Watrin.  - Le Gouvernement prend le problème par le petit bout de la lorgnette. Si les salariés ne s'engagent pas dans de tels mandats, c'est par peur de la répression. Attaquons-nous plutôt à ce sujet. Selon le Conseil économique social et environnemental, 11 % des salariés seraient affectés par cette discrimination.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Après le mot :

trois

insérer les mots :

, sauf exceptions,

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Nous parlons, non des délégués syndicaux, mais des représentants du personnel élus. L'idée est d'éviter une professionnalisation, d'un mandat à vie qui décourage. La limitation va de pair avec une meilleure reconnaissance des expériences acquises durant le mandat. Pour éviter une pénurie de candidats dans les TPE, nous proposons une exception.

M. le président.  - Amendement n°204 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Allizard, G. Bailly, Bas, Bonhomme, Buffet, Calvet, Cantegrit, Cambon et César, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon, Cuypers, Dallier, Danesi, Darnaud, Dassault, Delattre et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi et Di Folco, MM. Doligé et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gremillet, Grosdidier, Guené, Huré, Husson, Karoutchi, Kennel, Laménie, D. Laurent, Lefèvre, de Legge, Leleux, P. Leroy, Longuet, Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mme Mélot, MM. Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Perrin, Pierre, Pillet, Pointereau, Poniatowski et Poyart, Mme Primas, MM. Raison, Rapin, Reichardt, Retailleau, Revet et Savin, Mmes de Rose et Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle et Vogel.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, le partage des frais entre l'entreprise et l'instance créée, et la fixation d'un barème pour ceux-ci

Mme Élisabeth Lamure.  - On ne compte plus les reproches faits sur le coût, la qualité et la probité des prestations des experts devant le comité d'entreprise ou le CHSCT, le tout dans le cadre d'un choix relevant uniquement des élus. Un amendement du rapporteur a permis une mise en concurrence des cabinets d'experts.

Mon amendement prévoit le partage de la charge financière des expertises entre l'entreprise et l'instance fusionnant les IRP ainsi que la création d'un barème pour ces frais.

M. le président.  - Amendement n°61 rectifié quater, présenté par Mmes Féret et Génisson, M. Daudigny, Mme Yonnet, M. Godefroy, Mme Jourda, M. Labazée, Mmes Tocqueville et S. Robert, MM. Marie, Lalande, F. Marc, Leconte, J.C. Leroy, Montaugé et Raoul, Mme Blondin, MM. Cabanel et Anziani, Mme Bonnefoy et M. Bérit-Débat.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par un membre de phrase ainsi rédigé :

au sein de cette instance, une commission spécifique traitant des questions d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut être créée ;

Mme Corinne Féret.  - La fusion des CHSCT avec les autres instances représentatives du personnel inquiète. Le CHSCT remplit des missions très spécifiques : mener des enquêtes lors d'accidents du travail graves, tenir à jour le registre des accidents du travail et le document d'évaluation des risques, donner des avis et interpeller l'employeur sur les risques dans l'entreprise, faire suspendre en justice les réorganisations du travail et restructurations qui portent atteinte à la santé physique et mentale des salariés, inciter les salariés à exercer leur droit de retrait face à un danger. Toutes ces missions risquent d'être noyées dans l'ensemble des autres missions de l'instance unique.

Cet amendement garantit, a minima, la possibilité de créer une commission spécifique au sein de l'instance unique qui traitera les sujets relevant autrefois du CHSCT.

L'amendement n°104 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°106, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Laurence Cohen.  - En reconnaissant à la nouvelle instance unique la faculté de négocier des accords d'entreprise, cet article met en cause le monopole syndical, ce qui n'est pas, notre rapporteur l'a souligné, mentionné dans l'étude d'impact.

Notre position n'est pas celle d'irrémédiables opposants puisque le rapporteur toujours observe dans son rapport qu'il faudrait définir l'articulation entre l'instance unique et les délégués syndicaux, dépossédés de leur principale prérogative. Le statut des délégués syndicaux, créé par la lutte en 1936, supprimé par Vichy, a été rétabli par le Conseil national de la Résistance. Y toucher, c'est organiser un coup d'État social.

M. le président.  - Amendement n°236, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

exerce, sauf accord majoritaire contraire,

par les mots :

peut également exercer

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il faut envisager les mécanismes selon lesquels l'instance unique pourra exercer certaines compétences en matière de négociation collective, en l'absence de représentants syndicaux ou lorsque les syndicats souhaiteront lui déléguer certaines missions. Le droit international rappelle le principe de la primauté des organisations syndicales ; pas d'inquiétude, donc. D'où cet amendement qui rétablit le texte du Gouvernement.

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l'emploi des personnes handicapées et l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise ;

Mme Dominique Gillot.  - L'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes n'est pas naturelle, elle résultera de pratiques itératives, des actions menées par le service public de l'éducation, par la construction de l'estime de soi, l'émancipation. L'expérience des salariés peut-elle améliorer le dialogue social ? J'en suis convaincue. D'où le rétablissement de cet alinéa, supprimé par la commission des affaires sociales. Les salariées et les handicapées souffrent toujours de discriminations insidieuses qui, pour être parfois involontaires, n'en sont pas moins fortes.

M. le président.  - Amendement n°34 rectifié, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur en vue de renforcer l'emploi des personnes handicapées au sein de l'entreprise ;

Mme Dominique Gillot.  - Cet amendement de repli satisfait de façon harmonieuse les obligations de la loi de 2005 sur le handicap.

Le dialogue social doit participer au progrès social, le président de la République lui-même prône une politique inclusive.

M. le président.  - Amendement n°107, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise, notamment en renforçant les prérogatives du comité d'entreprise, dont l'objet est d'assurer l'expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts, par sa participation aux décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production ;

Mme Laurence Cohen.  - La commission des affaires sociales a curieusement supprimé cet alinéa, fruit du travail des députés et, en particulier du groupe GDR, au nom du principe de non-discrimination. Nous devons faire preuve de volontarisme pour parvenir à l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, un long chemin reste à parcourir.

M. le président.  - Amendement n°108, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise, notamment en leur accordant un droit de veto sur des mesures relatives à la gestion et l'évolution économique et financière de l'entreprise, l'organisation du travail, la formation professionnelle et les techniques de production, en vue de conduire à une augmentation durable du niveau des salaires dans l'entreprise et en prenant en considération leurs avis, voeux et propositions après les avoir mis à l'étude et en débat, puis en motivant la suite qui leur est donnée ;

M. Dominique Watrin.  - Cet article entend mettre sur pied la « nouvelle organisation du dialogue social dans l'entreprise ». Nos entreprises restent organisées selon une division des tâches traditionnelles : aux dirigeants revient la prise des décisions, que les salariés appliquent. Or, parce que l'entreprise est aussi un bien commun, il n'y a aucune raison d'exclure le partage de la prise de décision. Dans bien des cas, cela aurait permis de sauver des entreprises qui ont fait les frais de choix unilatéraux coûteux de leurs dirigeants. Nous avons tous en tête des exemples, j'en connais dans le Pas-de-Calais ; la papeterie Stora Enso a fermé pour des raisons purement financières.

M. le président.  - Amendement n°192, présenté par M. Arnell, Mme Laborde, MM. Bertrand et Castelli, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve, M. Collombat, Mme Malherbe et M. Vall.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise ;

M. Guillaume Arnell.  - L'article autorisait le Gouvernement à préciser les conditions dans lesquelles les représentants des salariés élus ou désignés peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment pour renforcer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Nous souhaitons rétablir cet alinéa.

M. le président.  - Amendement n°235, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant, dans le cas mentionné au 2° , les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l'employeur dans certaines matières, notamment concernant la formation, et favorisant au sein des instances mentionnées au 1° , au 2° et au 4° la prise en compte de l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise ;

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Nous partageons les objectifs poursuivis par les précédents orateurs. Nous proposons de rétablir cet alinéa en précisant le sujet de la codécision et le sujet de l'égalité professionnelle. Je vous demanderai tout à l'heure de retirer vos amendements à son profit.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission des affaires sociales a apporté son soutien à la création d'une instance unique. Elle a été plus loin dans cette volonté réformatrice que le Gouvernement a en la dotant d'une compétence en matière d'accords d'entreprise. Elle a supprimé des habilitations qui auraient entraîné une instabilité juridique ou auraient été néfastes à la gouvernance des entreprises.

L'avis est favorable sur l'amendement n°244. Sagesse sur l'amendement n°61 rectifié quater.

Que pense le Gouvernement des amendements nos30 rectifié, 103 et 204 rectifié ?

La commission des affaires sociales demande le retrait de l'amendement n°207 rectifié, dès lors que le Gouvernement aura clarifié sa position sur les seuils.

Avis défavorable aux autres, qui entrent en contradiction avec la position de la commission. Le groupe communiste républicain et citoyen propose même, dans les amendements nos107 et 108, une cogestion des entreprises qui va à l'encontre de la liberté d'entreprendre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable aux amendements qui refusent la fusion : les amendements nos160, 74 rectifié, 101, 29 rectifié, 210 rectifié bis, 30 rectifié, 102 et 103.

Il ne faut pas prendre le sujet de tous les côtés, madame Lamure : avis défavorable à l'amendement n°207 rectifié, puisque nous avons plutôt choisi de vivifier le dialogue social, y compris dans les entreprises de 10 à 50 salariés. C'est surtout des seuils fiscaux et sociaux que se plaignent les petites entreprises.

Avis défavorable à l'amendement n°31 rectifié, favorable à l'amendement n°231.

Retrait des amendements nos32 rectifié et 105 au profit de l'amendement n°244 du Gouvernement, sinon avis défavorable.

En matière d'hygiène et de sécurité, l'expertise doit rester à la charge de l'entreprise, pour ne pas freiner les initiatives. Avis défavorable à l'amendement n°204 rectifié.

Sagesse sur l'amendement n°61 rectifié quater. Je suis d'accord sur le fond, peut-être faudrait-il même imposer l'obligation de créer au sein de l'instance fusionnée une commission spécifique chargée de l'hygiène et la sécurité, dans certains secteurs dangereux comme les usines Seveso ou les sites nucléaires.

Avis défavorable à l'amendement n° 106.

L'amendement n°235 du Gouvernement répond aux questions posées par les amendements nos33 rectifié, 34 rectifié et 107. Retrait ?

Avis défavorable à l'amendement n°108 : on ne change pas toute une culture en cinq minutes.

Retrait de l'amendement n°192 au profit également de l'amendement n°235.

Mme Esther Benbassa.  - La fusion des instances représentatives du personnel affaiblira les prérogatives des représentants du personnel et réduira leurs moyens. Écologiste de coeur et de conviction, je sais ce que cela fait peser comme menace sur la sécurité et la santé des travailleurs. Ces thématiques seront reléguées au second plan.

N'en déplaise au président de la République, le travail, c'est de moins en moins un accomplissement et de plus en plus un facteur d'épuisement physique et psychique. (Protestations à droite) Il faudrait au contraire étendre les prérogatives du CHSCT à la prévention sanitaire globale et à la protection de l'environnement.

Je m'opposerai à cet article.

M. René-Paul Savary.  - Au contraire, je pense que le travail est source d'épanouissement. Demandez à ceux qui en sont privés ! (On approuve à droite.)

Cet article introduit de la souplesse, de la liberté, de la simplicité. Certes, dans des entreprises de 100 à 150 salariés, cela fera perdre 49 heures de délégation.

M. Jean Desessard.  - Par semaine, par an ?

M. René-Paul Savary.  - Et alors, on ne doit plus rien faire ? On continue à avoir le taux de chômage que l'on sait ? (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mme Esther Benbassa proteste également.) Que le Gouvernement apporte plutôt des précisions pour rassurer, en s'inspirant des propositions de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste)

M. Martial Bourquin.  - En quoi cette fusion réduira-t-elle le chômage ? Expliquez-nous ! Un an après le décret qui l'autorise, quatorze entreprises de plus de 300 salariés seulement ont regroupé leurs instances représentatives du personnel. Si la demande était si forte, il y en aurait plus ! La CGC est très inquiète, entre autres syndicats : moins d'heures, de moyens, alors qu'il faudra négocier des accords y compris sur la pénibilité.

Les syndicats ne sont pas l'ennemi de l'entreprise. En Allemagne, ils sont bien plus forts qu'ici ! Il n'y a pas que le manager dans l'entreprise.

Ne nous dites pas que la fonction de délégué syndical est une profession ! Ils font vingt heures en un mois et ne pourraient plus renouveler leur mandat ?

Ces ordonnances vont à l'encontre de la liberté syndicale. (Mmes Esther Benbassa, Annie Guillemot, Gisèle Jourda et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent, ainsi que MM. Jean Desessard et Jean-Louis Tourenne.)

M. David Assouline.  - La ministre a accepté qu'il y ait des sous-commissions. Mme Tasca lui a demandé si cela ne devait pas être rendu obligatoire dans le texte. Pourrait-elle répondre à sa question concrète ?

Vous nous reprochez de vous faire des procès d'intention. On rentre dans votre jeu en vous proposant des amendements. Et vous ne répondez pas !

Dites-le, que l'ordonnance est déjà écrite et que nous discutons pour rien ! Le verrouillage de cette discussion est inadmissible et nie l'utilité des parlementaires. (Mmes Maryvonne Blondin, Gisèle Jourda et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent ainsi que M. Roland Courteau.)

L'amendement n°160 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos74 rectifié et 101.

Mme Catherine Génisson.  - Dans l'objet écrit de notre amendement, nous prouvons que la délégation unique du personnel est un succès. Ce regroupement a été préconisé par de nombreux rapports. Mais un regroupement n'est pas une fusion.

L'amendement n°29 rectifié n'est pas adopté.

M. David Assouline.  - Même notre amendement de repli n°210 rectifié bis n'a pas trouvé grâce à vos yeux. Supprimer la spécificité du CHSCT va à l'encontre des préoccupations actuelles de la société. Peut-être avons-nous cru un temps que ces problèmes étaient derrière nous, avec la disparition du travail à la chaîne ou dans les mines. Mais la violence de la révolution du travail fait émerger de nouvelles pathologies dont toutes ne sont pas encore répertoriées comme dues au travail...

M. Alain Milon, rapporteur.  - Lesquelles ?

M. David Assouline.  - L'emploi, la fiche de paie ne font pas tout. Bien des salariés réclament que l'on mette à l'ordre du jour la question de la qualité de l'emploi et du bien-être au travail.

M. Roland Courteau.  - Très bien.

L'amendement n°210 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements nos30 rectifié et 103.

M. Bruno Retailleau.  - Nous soutenons l'effort de simplification du Gouvernement. Personne ne peut me reprocher d'être sous hypnose du président de la République...

M. Antoine Lefèvre.  - Ça se saurait !

M. Bruno Retailleau.  - Mais en face du chômage de masse, on ne peut pas ne rien faire.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Avec El Khomri, on a bougé !

M. Bruno Retailleau.  - Sur les seuils, le groupe Les Républicains a une position constante. La commission Attali avait révélé que le passage de 49 à 50 salariés coûtait 4 % de sa masse salariale à l'entreprise et lui imposait 34 obligations nouvelles ! Je ne crois pas qu'il faille choisir entre le relèvement des seuils et le renforcement du dialogue social. Le problème des seuils en France est flagrant, il suffit de comparer avec d'autres pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Élisabeth Lamure.  - Cet amendement n'est peut-être pas en lien direct avec le texte. Mais il garde toute sa pertinence pour faire de l'économie française une économie moderne, débarrassée de ses archaïsmes. Nous y reviendrons. (Applaudissements à droite et au centre)

L'amendement n°207 rectifié est retiré.

Mme Annie David.  - Si pour M. Retailleau, la modernité c'est revenir avant 1936, priver les salariés du fruit de décennies de luttes et en refaire des tacherons, nous ne voulons pas de cette modernité ! Si c'est priver d'APL les plus modestes tandis que l'on allège l'ISF de 4 milliards, nous n'en voulons pas !

La modernité que nous défendons, c'est celle qui permettra à tous les travailleurs, cadres, ouvriers, demandeurs d'emploi, de vivre dignement de leur travail, de partir en vacances, d'ouvrir à leurs enfants la voie des études supérieures ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Annie Guillemot applaudissent également.)

L'amendement n°31 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°231 est adopté.

Les amendements identiques nos32 rectifié et 105 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°244 est adopté.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°204 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson.  - J'espère que l'amendement n°61 rectifié quater sera adopté : le CHSCT a toute son importance à l'heure où l'ergonomie des postes de travail, la qualité des relations managériales, la surveillance des maladies professionnelles sont au coeur des préoccupations. Il faudra d'ailleurs revenir sur les conditions d'exercice de la médecine du travail, qui est sacrifiée. La faculté de médecine devrait inciter les étudiants à s'y consacrer.

Madame la ministre, vous vous dites prête à imposer la création d'une commission dédiée à l'hygiène et aux conditions de travail dans certains secteurs d'activité. Votons donc l'amendement, dont la rédaction pourra être améliorée par la suite. (Mmes Corinne Féret et Évelyne Yonnet applaudissent, ainsi que M. Yves Daudigny.)

M. Alain Milon, rapporteur.  - La loi Rebsamen a déjà ouvert cette faculté de créer une commission dédiée en cas de regroupement des instances représentatives du personnel. La précision que vous proposez peut néanmoins être intéressante, si le choix revient aux partenaires sociaux. Je donnerai donc un avis favorable plutôt que de sagesse. Nous y reviendrons en CMP.

Mme Pascale Gruny.  - Je n'imagine pas que les questions de santé et de conditions de travail soient négligées. Une entreprise a besoin de salariés en bonne santé, y compris pour sa compétitivité. Et un chef d'entreprise peut être pénalement responsable en cas d'accident. Pour déterminer l'arbre des causes d'un accident de travail, il faut des personnes qualifiées qui connaissent ces questions : c'est le rôle du CHSCT. J'ajoute qu'un accident de travail coûte cher à l'entreprise, surtout si les choses vont jusqu'au licenciement pour inaptitude... Merci, madame la ministre, de votre préoccupation à cet égard. Il est inacceptable d'avoir éloigné le médecin du travail de l'entreprise, il doit être considéré comme un vrai partenaire. (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Marc Laménie.  - Je partage ce que viennent de dire Mmes Génisson et Gruny. On peut comprendre les inquiétudes, la santé au travail est essentielle et il y a de moins en moins de médecins du travail. Les accidents du travail restent trop nombreux. D'un autre côté, la réglementation n'est pas simple, le rapporteur a bien cerné cet enjeu.

Malgré l'amélioration des conditions de travail, il reste beaucoup de métiers pénibles, devant des écrans... Il faut faire confiance, je suivrai donc l'avis de la commission.

M. Martial Bourquin.  - La fusion des IRP, monsieur Retailleau, n'a rien à voir avec l'emploi ! À Sochaux, l'usine Peugeot embauche et les trois IRP sont toujours distinctes. L'usine Flex-N-Gate d'Audincourt est passée, elle, de 600 à 1 400 salariés, et pourquoi ? Parce que les carnets de commandes sont pleins ! Comment peut être accréditée l'idée que la fusion des instances créerait de l'emploi ? Ce qui est sûr, c'est que ce texte met à mal les libertés syndicales et fait courir de gros risques pour la santé des travailleurs.

Il faut cesser de confondre la question de l'emploi avec celle du travail. Celle-ci mérite que l'on s'y penche pour elle-même. Les entreprises, pour être productives, ont besoin de salariés en bonne santé. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen)

Mme Laurence Cohen.  - Je souscris à ce qu'a dit Mme Gruny.

Madame la ministre, vous abandonnez la prévention. (Mme la ministre le conteste vivement.) C'est grave. Ne nous dites pas que l'instance unique fera la même chose que les instances fusionnées, assumez votre choix de réduire les prérogatives des représentants du personnel ! Vous restez droite dans vos bottes...

M. Jean Desessard.  - Comme Juppé !

Mme Laurence Cohen.  - ... en nous demandant de vous faire confiance. Eh bien, non !

Mme Nicole Bricq.  - Nous voterons cet amendement. Halte aux contrevérités. Nos collègues, s'ils avaient bien écouté, sauraient qu'un volet relatif à la prévention de la pénibilité va être confié aux branches.

La fusion des instances rend la question des seuils caduque.

En Allemagne, il y a de nombreuses entreprises avec un conseil unique, parfois présidé par un salarié. Il faut voir les choses en dynamique !

M. Jean Desessard.  - Et l'amendement ?

Mme Nicole Bricq.  - On parle de Peugeot : les salariés ont accepté la modération salariale pendant trois ans dans le cadre d'un accord défensif. Lorsque Peugeot est allée mieux, elle s'est engagée à investir, à embaucher et à augmenter les salaires, cette fois à travers un accord offensif. Cette entreprise a montré l'exemple.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Quel est le rapport ?

Mme Nicole Bricq.  - Ne vous servez pas de cet exemple pour asséner des contrevérités ! (Protestations sur divers bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain)

M. Yves Daudigny.  - Je soutiens très fortement l'amendement n°61 rectifié quater, défendu par mes collègues avec des arguments solides, et me réjouis de votre appui, madame la ministre : c'est un élément de réponse à la crainte de voir disparaître la spécificité du CHSCT.

M. Olivier Cadic.  - Ce n'est pas parce que les instances fusionnent que les représentants abandonneront leurs responsabilités. M. Savary a mentionné les éléments financiers qui expliquent peut-être la virulence des réactions...

Si les syndicats d'Allemagne et d'Europe du Nord sont si populaires, c'est qu'ils proposent des services, telle qu'une indemnité chômage ; ils ne font pas de politique. (Protestations à gauche)

La médecine du travail n'est pas la même pour un poste de secrétaire ou de pilote de ligne. Le crash de Germanwings a permis de rectifier certains manques, de repérer les trous dans la raquette. Il ne peut pas y avoir un système uniforme, soyons pragmatiques !

M. David Assouline.  - En Allemagne, les syndicats ont un pouvoir de cogestion qui n'a rien à voir avec ce qui se pratique en France. Cela incite les salariés à adhérer. Le patronat n'a pas non plus la même attitude : lors des réformes de Gerhard Schröder, il s'est engagé à ne pas augmenter ses revenus. Vous imaginez Pierre Gattaz et consorts en faire autant ? Ils se sont même assis sur les contreparties au CICE !

Je veux plaider avec force en faveur de la prévention, qui permet aussi de faire des économies substantielles dans les dépenses sociales. Où, mieux que dans l'entreprise où les salariés vont tous les jours, peut-on faire de la prévention ? En cela, la loi El Khomri posait problème.

Supprimer un comité qui permet de suivre concrètement ces questions, d'alerter, avec des représentants du personnel formés, c'est une erreur qui risque d'avoir des conséquences catastrophiques.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Sur le vertueux syndicalisme allemand, il y aurait beaucoup à dire. La codétermination dont a parlé M. Assouline...

Mme Nicole Bricq.  - M. Assouline a parlé de cogestion.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Il s'agit de codétermination : certains sujets y sont soumis, mais l'entreprise n'est pas cogérée. Toujours est-il que le syndicalisme allemand n'est pas pluraliste. La diversité gauloise a parfois des avantages...

Le haut taux de syndicalisation des pays d'Europe du Nord s'explique par le fait que les accords collectifs ne s'appliquent qu'aux adhérents des organisations signataires. Vous imaginez cela en France ? Nous aimons la liberté, et nous voulons que les droits sociaux bénéficient à tous ! C'est un fondement républicain. Et c'est bien pourquoi nous combattons la remise en cause de l'ordre public.

M. Dominique Watrin.  - Le système allemand est aussi celui des mini-jobs : un quart des emplois sont rémunérés moins de 650 euros. Nous ne voulons pas de cette division entre insiders et outsiders, pour reprendre votre propre vocabulaire. L'amendement n°61 rectifié quater entre pour l'essentiel dans la philosophie du Gouvernement, avec des nuances pour la forme.

L'amendement n°61 rectifié quater est adopté.

L'amendement n°106 n'est pas adopté.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable à l'amendement n°236. La fusion des IRP brisera enfin la barrière entre information, consultation et négociation. La commission a souhaité que la nouvelle instance exerce de plein droit cette compétence de négociation. Le Gouvernement la conditionne à un scrutin majoritaire.

À la demande de la commission des affaires sociales, l'amendement n°236 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°132 :

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 217
Pour l'adoption 30
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Philippe Mouiller.  - La question des travailleurs handicapés est traitée au fil des textes successifs...Il faudrait un texte d'ensemble, spécifique pour la formation professionnelle, l'employabilité, l'accompagnement vers l'emploi, la propagation des bonnes pratiques comme l'initiative de l'entreprise Andros, qui permettent, outre leur finalité propre très importante, d'améliorer globalement la qualité du dialogue social dans l'entreprise et la productivité de celle-ci.

Mme Maryvonne Blondin.  - J'accorde un soutien total à l'auteure des amendements nos33 rectifié et 34 rectifié, de ma collègue Dominique Gillot. Vous connaissez mon engagement personnel en faveur de l'égalité professionnelle des hommes et des femmes et de l'emploi des personnes en situation de handicap. Le maître-mot de ce Gouvernement est la transversalité qui s'impose pour les droits des femmes comme pour les travailleurs handicapés. Soyez vigilants !

Mme Annie David.  - Je m'associe aux propos de M. Mouiller. Il y a beaucoup de dossiers de reconnaissance de qualité de travailleur handicapé en souffrance. Je vous alerte là-dessus.

Mme Catherine Génisson.  - J'apporte un soutien conditionnel à ces amendements : il faut dissocier la question du handicap et de l'égalité femmes-hommes. Les femmes représentent la moitié de l'humanité, les handicapés une catégorie spécifique...

M. Martial Bourquin.  - Très bien !

Mme Catherine Génisson.  - Défendons les deux, bien sûr, car ce sont deux objectifs essentiels, mais en deux alinéas séparés !

Mme Dominique Gillot.  - Oui, mais les acteurs concernés doivent avoir les deux objectifs en tête quand ils abordent le dialogue social. Les mettre ensemble dans le texte ne me choque pas. Je retire mon amendement n°33 rectifié qui est satisfait par la rédaction du Gouvernement mais je proposerai un sous-amendement à son amendement pour y intégrer la prise en compte de ces deux objectifs, ensemble. En ce cas je retire également mon deuxième amendement. (Mmes Odette Herviaux, Marie-Noëlle Lienemann et Évelyne Yonnet applaudissent, ainsi que M. Martial Bourquin.)

L'amendement n°33 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°34 rectifié.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Je suis favorable à votre proposition. Il reste du chemin à parcourir sur le sujet. Je travaille transversalement avec les ministres et secrétaires d'État concernés. Il faut s'assurer que les instances prennent en compte le handicap comme l'égalité femme-homme. Si cela va mieux en le disant, je serai, je le répète, favorable au sous-amendement que Mme Gillot va nous présenter. J'attends un rapport de l'IGAS sur la médecine du travail.

Les amendements nos107 et 108 ne sont pas adoptés.

M. Guillaume Arnell.  - Je retire l'amendement n°192 à regret.

L'amendement n°192 est retiré.

La séance, suspendue à 17 h 50, reprend à 18 h 5.

M. le président.  - Sous-amendement n°246 à l'amendement n°235 du Gouvernement, présenté par Mme D. Gillot.

Alinéa 3

Après les mots :

prise en compte

Rédiger ainsi la fin de cet alinéa

de l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de celui de renforcement de l'emploi des personnes handicapées au sein de l'entreprise ;

Mme Dominique Gillot.  - Le sous-amendement se justifie par son texte même.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Sagesse. Nous y reviendrons en CMP.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis favorable.

Le sous-amendement n°246 est adopté.

L'amendement n°235, sous-amendé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°234, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Rétablir le 4° dans la rédaction suivante :

4° Améliorant les conditions de représentation et de participation des salariés dans les organes d'administration et de surveillance des sociétés dans le cadre des seuils mentionnés aux articles L. 225-27 et L. 225-79-2 du code de commerce, notamment en matière de formation des représentants des salariés ;

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Cet amendement rétablit un alinéa supprimé par la commission des affaires sociales en en précisant la rédaction. Il s'agit de renforcer les moyens des instances, notamment ceux de la formation, non de modifier les seuils.

M. le président.  - Amendement n°35 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Rétablir le 4° dans la rédaction suivante :

4° Améliorant les conditions de représentation et de participation des salariés dans les organes d'administration et de surveillance des sociétés dont l'effectif dépasse certains seuils ;

M. Jean-Louis Tourenne.  - C'est un amendement moins complet que celui du Gouvernement. Je le retire.

L'amendement n°35 rectifié est retiré.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Les administrateurs salariés relèvent du code de commerce. Le Gouvernement souhaite, avec l'amendement n°234, renforcer la formation des salariés dans l'instance unique. C'est compréhensible mais, d'une part, il convient de se garder d'alimenter l'instabilité juridique dans ce domaine, où deux réformes législatives successives ont eu lieu, en 2013 et 2015. Certes la mesure ici proposée par le Gouvernement ne modifie pas le champ des entreprises concernées. Dont acte. Il eût été préférable de le faire plus tôt, par voie réglementaire, puisque c'est un décret du 3 juin 2015 qui a été intégré dans le code de commerce. Avis défavorable.

Mme Nicole Bricq.  - Je comprends votre position, selon laquelle les administrateurs salariés dans les conseils d'administration relèvent du code de commerce. Lors du débat sur les seuils, dans la loi Rebsamen, la ministre avait ouvert la codification dans le code de commerce. Le Gouvernement, dans cette habilitation, ne précise pas le code concerné. Votre argumentation ne nous convainc pas. Pour intégrer les administrateurs salariés dans le périmètre de la formation, puisque tel est l'objectif, il faut les inclure dans ce texte.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cela ne relève pas du code du travail, je le répète. De plus, on est dans un cadre réglementaire et non légal.

Mme Nicole Bricq.  - Si on le vote, ce sera légal !

À la demande de la commission des affaires sociales, l'amendement n°234 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°133 :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 322
Pour l'adoption 136
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 5

Supprimer les mots :

la possibilité pour le salarié d'apporter au syndicat de son choix des ressources financées en tout ou partie par l'employeur, par

M. Thierry Foucaud.  - Le Gouvernement instaure le chèque syndical qui serait abondé par l'employeur pour inciter les salariés à se syndiquer.

Expérimenté sans grand succès, ce dispositif impliquerait l'intervention d'un tiers, à savoir l'employeur, dans la relation entre le syndiqué et son syndicat. De plus, il n'existe aucun consensus sur cette mesure au sein des organisations syndicales et patronales.

C'est pourquoi nous proposons sa suppression.

M. Alain Milon, rapporteur.  - C'est un dispositif mis en oeuvre par Axa notamment depuis près de vingt ans, avec il est vrai des résultats mitigés. À une plus grande échelle, il pourrait toutefois encourager la syndicalisation, mais l'étude d'impact ne permet d'effectuer que des conjectures. Sagesse.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Nous n'avons pas pour l'instant la masse critique nécessaire à l'évaluation, mais l'expérience semble indiquer tout de même des résultats positifs ; nous pourrions y revenir plus tard, mais, à ce stade, pourquoi se priver de cette possibilité ? Avis défavorable.

M. Thierry Foucaud.  - Je n'ai jamais vu les salariés revendiquer un chèque syndical ; les augmentations de salaire, du pouvoir d'achat, des conditions de travail, en revanche, oui. L'enjeu est ailleurs - à moins que vous ne vouliez inciter l'employeur à s'immiscer dans la vie syndicale.

L'esprit de vos mesures ne nous convient pas. Laissons aux salariés leur liberté de penser.

Mme Nicole Bricq.  - Le chèque syndical a une vertu : les syndicats mènent campagne auprès de tous les salariés de l'entreprise. Cela crée un lien avec les salariés.

Le taux de retour est tout de même assez important : de 55 % à 60 % chez Axa. Il serait dommage de se priver de ce dispositif. Et n'oublions pas que le chèque finance les déplacements et la formation... Cela dit, vous avez une position de principe, monsieur Foucaud, fondée sur votre conception du syndicalisme, je la comprends. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Martial Bourquin.  - La meilleure façon de maintenir la représentation syndicale est de maintenir les organismes existants. En Allemagne, les entreprises de plus de cinq salariés ont un comité d'entreprise ; celles de plus de cent salariés, un comité économique, celles de plus de cinquante salariés, un comité de santé et de sécurité, dans toutes les entreprises ! Vous citez l'Allemagne à tort, madame Bricq. (Mme Annie Guillemot applaudit.)

L'amendement n°109 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°221, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Remplacer la deuxième occurrence du mot :

de

par les mots :

et la simplification des conditions d'accès à

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Le maintien de salaire du salarié en formation est assuré par un circuit complexe entre l'employeur, le syndicat et l'AGFPN (Fonds pour le financement du dialogue social). Cet amendement le simplifie.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Patricia Schillinger.  - Je suis favorable à cet amendement et j'encourage le Gouvernement à se pencher sur la formation au dialogue social, très négligé chez les managers et les cadres en particulier. Ni la formation initiale, ni la formation continue ne sont à la hauteur des besoins.

Le CESE, en mai 2016, a rappelé que cette formation était très limitée, même dans les masters spécialisés en ressources humaines. Explorez donc avec la ministre de l'enseignement supérieur, toutes les pistes, sans oublier de faire intervenir les partenaires sociaux dans les formations.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il est vrai que le dialogue social est très peu abordé dans les écoles d'ingénieurs et les masters RH. Il y a urgence. Je suis tout disposée à en parler avec ma collègue de l'enseignement supérieur.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Enseigner une culture générale du dialogue social, d'accord mais encore faut-il enseigner le droit du travail aux salariés ! Beaucoup de salariés n'en connaissent pas le b.a-ba. De ce point de vue, l'école est défaillante. (MmeAnne-Lise Dufour-Tonini Annie Guillemot, Michelle Meunier, Évelyne Yonnet ainsi que M. David Assouline applaudissent.)

Mme Corinne Bouchoux.  - Madame la ministre, je m'interroge : la simplification de l'accès à la formation n'aura-t-elle pas pour effet collatéral de mettre à l'écart les petites structures ?

M. Olivier Cadic.  - J'irai dans le sens de Mme Liennemann. (Marques d'étonnement) Oui, formons, informons sur le droit mais pas seulement sur le droit du travail. Une association d'avocats, Hémisphère Droit, dispense des cours bénévoles dans les écoles. Il faudrait sans doute développer cela.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Simplifier l'accès à la formation ne préjuge pas de l'offre de formation. priori, cela stimulera plutôt la demande.

L'amendement n°221 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°245, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 6

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

6° Définissant, s'agissant de la contribution au fonds paritaire prévue à l'article L. 2135-10 du code du travail :

a) une modulation du montant de cette contribution en fonction de l'effectif de l'entreprise ;

b) les conditions et modalités selon lesquelles les employeurs peuvent être exonérés pour tout ou partie de cette contribution, ou bénéficier d'une subvention forfaitaire au regard des modalités de représentation des salariés dans leur entreprise ;

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il s'agit de moduler la contribution de l'employeur à l'association de gestion du fonds paritaire national en fonction de la taille de l'entreprise. Il est paradoxal que les petites entreprises contribuent proportionnellement davantage que les grandes. Nous prévoyons aussi une subvention forfaitaire, qui sera plus simple, plus accessible. Cet amendement facilitera l'accès au fonds paritaire.

M. le président.  - Amendement n°36 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 6

Supprimer les mots :

tout ou

M. Jean-Louis Tourenne.  - Qu'un acteur ne puisse rien payer du tout n'est jamais bon, il ne se sentira pas partie prenante. Cet amendement d'appel vise à obtenir des précisions du Gouvernement sur la manière dont il compte mettre en oeuvre ce dispositif.

M. Alain Milon, rapporteur.  - L'avis est favorable à l'amendement n°245.

Il faut effectivement préserver les moyens du fonds paritaire. Puisque l'amendement n°36 rectifié est d'appel, retrait ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Rejet de l'amendement n°36 rectifié. La modulation de la contribution au fonds paritaire est un élément qui est sorti durant la concertation. L'exonération lorsqu'un délégué du personnel devient délégué syndical est un geste qui a du sens, cela favorisera le syndicalisme.

L'amendement n°36 rectifié est retiré.

M. Jean Desessard.  - Chère majorité sénatoriale, vous êtes pour la simplification. (On s'amuse à droite.) Je comprends qu'on module la contribution en fonction de la taille de l'entreprise, c'est facile à calculer. En revanche, en fonction de la représentation des salariés au sein de l'entreprise... bonjour la simplification ! Comment allez-vous la contrôler ? Je le vois d'ici : dans quelques années, vous viendrez dire qu'il y a des éléments inapplicables dans le code du travail...

L'amendement n°245 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°241, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Rétablir le 7° dans la rédaction suivante :

7° Redéfinissant le rôle des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, en modifiant les conditions de leur mise en place, leur composition, leurs attributions et leurs modalités de financement, notamment pour tenir compte le cas échéant de besoins identifiés en matière de dialogue social dans les très petites entreprises ou d'éventuelles difficultés de mise en place ;

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Les commissions paritaires régionales interprofessionnelles, les CPRI, sont opérationnelles depuis le 1er juillet 2017. Elles ont 25 jours d'existence... Notre intention n'est pas de les révolutionner mais de compléter, si cela se révèle nécessaire, le dispositif. C'est une mesure de précaution.

M. le président.  - Amendement n°37 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 7

Rétablir le 7° dans la rédaction suivante :

7° Renforçant le rôle des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, en modifiant les conditions de leur mise en place, leur composition, leurs attributions et leurs modalités de financement ;

M. Jean-Louis Tourenne.  - L'objectif est totalement identique, l'amendement du Gouvernement est plus complet.

L'amendement n°37 rectifié est retiré.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La loi Rebsamen a institué les CPRI pour instituer une représentation des salariés et des employeurs au sein des TPE. Elles n'existent que depuis trois semaines. Dans le projet de loi initial, le Gouvernement demandait une habilitation pour renforcer leur rôle.

La commission des affaires sociales estime qu'on ne peut pas encore savoir si les CPRI sont efficaces et a vu dans cette habilitation l'exemple d'une mauvaise pratique législative à la française. Pour autant, puisqu'il s'agit d'une mesure de précaution, avis favorable.

L'amendement n°241 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°131 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier est complété par une section V ainsi rédigée :

« Section 5

« Droit de préemption des salariés

« Art. L. 141-33.  -  Lorsque le propriétaire trouve un acquéreur de son fonds de commerce, il doit le notifier aux salariés.

« Cette notification doit mentionner, les conditions de la vente, son prix et la faculté ouverte aux salariés de consulter l'ensemble des documents comptables leur permettant de prendre connaissance de la situation économique de l'entreprise.

« Cette notification vaut offre de vente au profit des salariés. Elle est valable pendant la durée de deux mois à compter de sa réception.

« Si au moins deux salariés regroupés acceptent l'offre, directement ou par l'intermédiaire de leur mandataire, ils se substituent à l'acquéreur dans toutes les conditions de la vente.

« Les termes des quatre alinéas précédents sont reproduits dans chaque notification.

« Toute cession intervenue en méconnaissance du présent article peut être annulée à la demande de tout salarié. L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de l'avis de cession du fonds.

« Art. L. 141-34.  -  Un salarié peut agir devant le président du tribunal de grande instance sous la forme des référés, à tout moment, dès lors qu'il a connaissance de l'imminence de la vente du fonds de commerce qui l'emploie en méconnaissance de l'article L. 141-23, de l'article L. 141-28 ou de l'article L. 141-33.

« Le président du tribunal de grande instance peut prendre toute mesure visant à garantir l'application de ces textes. Il rend sa décision dans un délai de huit jours. » ;

2° Le chapitre X du titre III du livre II est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Droit de préemption des salariés

« Art. L. 23-10-13.  -  Lorsque le ou les propriétaires d'une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d'une société à responsabilité limitée ou d'actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d'une société par actions trouve un acquéreur pour ses parts, il doit le notifier aux salariés.

« Cette notification doit mentionner les conditions de la vente, son prix et la faculté ouverte aux salariés de consulter l'ensemble des documents comptables leur permettant de prendre connaissance de la situation économique de l'entreprise.

« Cette notification vaut offre de vente au profit des salariés. Elle est valable pendant la durée de deux mois à compter de sa réception.

« Si au moins deux salariés regroupés acceptent l'offre, directement ou par l'intermédiaire de leur mandataire, ils se substituent à l'acquéreur dans toutes les conditions de la vente.

« Les termes des quatre alinéas précédents sont reproduits dans chaque notification.

« Toute cession intervenue en méconnaissance du présent article peut être annulée à la demande de tout salarié. L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de l'avis de cession du fonds.

« Art. L. 23-10-14.  -  Un salarié peut agir devant le président du tribunal de grande instance sous la forme des référés, à tout moment, dès lors qu'il a connaissance de l'imminence d'une vente ou d'une cession de parts sociales en méconnaissance de l'article L. 23-10-1, de l'article L. 23-10-7 ou de l'article L. 23-10-13.

« Le président du tribunal de grande instance peut prendre toute mesure visant à garantir l'application de ces textes. Il rend sa décision dans un délai de huit jours. »

Mme Annie David.  - Cet amendement crée un droit nouveau pour les salariés : un droit de préemption dans les entreprises de moins de 250 salariés lorsque leurs propriétaires veulent les vendre. Dans le prolongement de la loi Hamon, cette mesure d'intérêt général servirait la lutte contre le chômage ! La modernité, le progrès, c'est cela et non la soumission des travailleurs à l'actionnariat. J'en profite pour saluer les Fralibs et leur combat ainsi que les salariés d'Ecopla même s'ils n'ont pas remporté le même succès. (Mme Éliane Assassi et M. Dominique Watrin applaudissent.)

M. Alain Milon, rapporteur.  - Aucune disposition du texte n'aborde cette question qui relève du code de commerce, et non du code du travail. Retrait, sinon défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable. J'entends l'intention mais c'est juridiquement impossible car contraire au droit de propriété consacré par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. La loi Hamon garantit un droit d'information préalable aux salariés qui peuvent déposer une offre de reprise sous la forme de Scop.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je voterai cet amendement quand bien même il porte effectivement sur le droit des sociétés. Ce serait inconstitutionnel ? Le Conseil constitutionnel n'a jamais délibéré sur cette question. Que je sache, on ne parle pas d'atteinte au droit de propriété quand un paysan bénéficie d'un droit de préemption sur un terrain qu'il cultive depuis des années. Je regrette que François Hollande n'ait pas été au bout de son engagement ; le Conseil constitutionnel aurait été saisi et nous aurions été fixés.

Le frein n'est pas constitutionnel, il est culturel. En France, on considère que l'entreprise n'appartient qu'au capital. On ne reconnaît pas les parties prenantes. Pendant ce temps-là, bien des entreprises meurent, faute de repreneurs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; MM. Martial Bourquin et Jean Desessard applaudissent également ainsi que M. Guillaume Arnell.)

M. Dominique Watrin.  - L'argument du Gouvernement sur la propriété est très discutable. Dans mon département du Pas-de-Calais un actionnaire finlandais, Sequana, bloque tous les projets de reprise : il veut que la production diminue en Europe pour que le prix du papier augmente. Je suis prêt à retirer mon amendement si le Gouvernement donne aux salariés les moyens de se défendre.

L'amendement n°131 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°154 rectifié ter, présenté par M. Labazée, Mmes Lienemann et Meunier, M. Durain, Mme Jourda, M. Duran, Mme Yonnet et MM. Mazuir, Montaugé, Cabanel et M. Bourquin.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le premier alinéa du I de l'article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Les mots : « au moins mille » sont remplacés par les mots : « au moins cinq cent » ;

2° Les mots : « dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, » sont supprimés.

M. Jérôme Durain.  - Nous proposons de garantir la présence des administrateurs salariés dans les grandes entreprises, c'est aller dans le sens de Mme la ministre.

M. le président.  - Amendement identique n°212 rectifié ter, présenté par MM. Assouline et Courteau, Mme Lepage, M. Roger, Mmes Blondin et Guillemot et M. Marie.

M. David Assouline.  - Cet amendement devrait susciter l'adhésion puisque Jean-Louis Beffa recommande la présence des administrateurs salariés au sein des grandes entreprises. Le Medef lui-même conseille qu'un administrateur salarié siège au comité des rémunérations.

Cet amendement ne dépasse pas le cadre des ordonnances, il contribue à renforcer la confiance au sein de l'entreprise.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Le seuil fixé en 2013 a été abaissé par la loi Rebsamen en 2015. Les entreprises ont jusqu'à courant 2018 pour se mettre en conformité. Par conséquent, cet amendement paraît prématuré. (On ironise sur les bancs du groupe socialiste et républicain.)

Les entreprises ont besoin d'un cadre juridique stable pour se concentrer sur le développement de leur activité. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales a supprimé cette habilitation en demandant une évaluation préalable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable. Modifier les seuils serait prématuré. Et puis, il faut toujours revenir aux réalités. La priorité est de renforcer le dialogue social dans les entreprises de moins de 1 000 salariés qui, pour beaucoup, sont familiales. L'évolution de la gouvernance se fera ensuite naturellement.

Mme Corinne Bouchoux.  - L'ex-groupe écologiste soutiendra cet amendement. Vous voulez tout changer, sauf quand cela vous dérange ! En Allemagne, et c'est une Franco-Allemande qui vous le dit, il n'y a pas cette méfiance dans les petites entreprises envers un représentant syndical qui serait forcément le casse-pieds, l'embêtant, le gênant. Peut-être parce que la moitié des chefs d'entreprise sont issus de l'apprentissage et qu'il n'y a pas le même système de castes issues des grandes écoles. Accordez une présomption d'intelligence aux salariés ! Il y a bien des représentants des salariés dans les petites structures agricoles et cela fonctionne. Je ne comprends pas votre discours à géométrie variable. (M. Jean Desessard applaudit ainsi que plusieurs membres du groupe socialiste et républicain.)

M. David Assouline.  - Affirmer qu'il ne faut pas changer les choses trop vite est un réquisitoire contre le principe des ordonnances. Nous, nous ne changeons pas le dispositif ; nous le prolongeons. Personne, même pas le patronat, ne s'opposerait à cet amendement.

Je ressens un certain malaise : même quand nos propositions sont dans la logique du Gouvernement, la ministre nous répond « non ». Évidemment, les ordonnances sont déjà écrites !

M. Jérôme Durain.  - Les arguments donnés contre ces amendements sont réversibles... Je conseillerai à tous d'éviter d'employer les mots « stabilité », « prématuré » et « évaluation »... (Sourires)

Les amendements identiques nos154 rectifié et 212 rectifié ter ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mme Lienemann, MM. Tourenne, Durain, Duran et Labazée, Mmes Jourda et Yonnet et MM. Mazuir et Montaugé.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le premier alinéa du II de l'article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, entre cinq cent et moins de mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes. Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal au tiers sans pouvoir être inférieur à deux. »

M. Franck Montaugé.  - Nous proposons qu'il y ait au moins 2 administrateurs salariés dans les entreprises de 500 à 1 000 salariés et que, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, ce nombre soit au moins égal au tiers sans pouvoir être inférieur à 2. Au conseil d'administration des entreprises suédoises, il y a représentation des salariés à partir de 25 salariés. (Mme Corinne Bouchoux et M. Jean Desessard applaudissent.)

M. le président.  - Amendement identique n°213 rectifié ter, présenté par MM. Assouline et Cabanel, Mme Guillemot, M. M. Bourquin, Mmes Blondin et Lepage et MM. Marie et Roger.

M. David Assouline.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°113, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le premier alinéa du II de l'article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Le nombre des administrateurs représentant les salariés ne peut être inférieur à deux, sauf dans l'hypothèse où le nombre des administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18 est de trois. »

Mme Annie David.  - Également défendu.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Ces amendements, qui modifient la logique actuelle, sont contraires à la position de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable pour les raisons que j'ai déjà développées tout à l'heure.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Ces refus du Gouvernement et de la commission des affaires sociales sont regrettables. Ah, quand vous voulez plus de flexibilité, de souplesse, vous invoquez les exemples allemand et suédois - la démocratie sociale, youpi ! Mais vous oubliez que la flexibilité a pour contrepartie la présence des salariés dans les instances de gouvernance des entreprises. Choisir de prendre un bout du modèle - ce qui fragilise - sans prendre ce qui sécurise, ce n'est pas la social-démocratie ; c'est le basculement libéral et le démantèlement de notre modèle ! Ne venez pas me parler ensuite de révolution et de nouveau monde !

Ce n'est pas la peine de dire qu'on fait la révolution, qu'on entre dans un nouveau monde ! Ce n'est pas en marche, c'est en marche arrière !

M. Jérôme Durain et Mme Anne-Lise Dufour-Tonini.  - Très bien !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Sans cette modification culturelle dans le rapport entre employeurs et salariés, pas de renforcement du dialogue social à moins que le dialogue social, ce ne soit pour vous : « cause toujours » ! (MM. David Assouline, Jean Desessard et Franck Montaugé applaudissent.)

M. Alain Richard.  - Je voudrais exprimer une opinion différente. Si nous regardons du côté des pays du Nord, commençons par reconnaître leur histoire syndicale, qui se compte en décennies.

Ces amendements créent une participation obligatoire des salariés aux organes de gouvernance...

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Vous l'avez votée dans la loi Rebsamen !

M. Alain Richard.  - Les organisations syndicales n'en font pas une revendication majeure. Rien n'empêche dans une entreprise, même de dix salariés, d'inclure un représentant des salariés au conseil d'administration. La question : faut-il imposer par la loi ou préférer l'accord ? (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Union centriste et Les Républicains)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Et le modèle allemand ?

M. David Assouline.  - Monsieur Richard, lors de l'examen de la loi Rebsamen, vous avez voté la présence d'un administrateur salarié dans les entreprises de plus de 1 000 salariés. Il est vrai que c'était un temps où nous siégions encore ensemble dans l'hémicycle et où nous défendions des positions semblables. Nous abaissons simplement le seuil pour prévoir deux administrateurs salariés dans les entreprises de 500 à 1 000 salariés. Ce sera un gage de pluralité sociale...

M. Jean Desessard.  - ... et de parité !

Mme Nicole Bricq.  - Lorsque nous avons débattu de la loi Rebsamen, nous avons adopté cette mesure en l'assortissant d'une période d'adaptation qui court jusqu'en 2018. Laissez vivre la loi Rebsamen ! Nous pourrons toujours y revenir après. L'instance unique sera un véritable organe de décision, peut-être de codécision, puisqu'il y sera question de la stratégie sociale et économique de l'entreprise car nous, nous ne dissocions pas le social de l'économique.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Il existe un large consensus pour faire évoluer le principe de la codécision. Le problème, et Alain Richard l'a dit, est : est-ce le moment ? Est-ce à l'agenda des organisations syndicales ? Est-ce le sujet de ces ordonnances ? Demandons plutôt à la ministre de soumettre cette question de la codécision aux organisations syndicales. Je la défends depuis que je suis syndicaliste, depuis plus longtemps que d'autres ici ; et je n'ai jamais cessé de le faire depuis que je suis parlementaire.

M. Martial Bourquin.  - Cela se passe toujours mieux quand les salariés sont associés aux décisions. Une grande entreprise d'armement qui a un représentant au Sénat a été condamnée à 1,2 million d'euros d'amende pour discrimination syndicale envers sept salariés. Ça se passe comme ça le dialogue social ! Un ingénieur de Nestlé a reçu 690 000 euros par le tribunal parce que sa carrière avait été brisée par son engagement syndical.

Qu'on ne me dise pas que ce projet de loi nous engage dans la voie de la social-démocratie à la scandinave, on va vers le néo-libéralisme total !

Les amendements identiques nos11 rectifié et 213 rectifié ter ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°113.

À la demande du groupe communiste républicain et citoyen, l'article 2, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°134 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 305
Pour l'adoption 200
Contre 105

Le Sénat a adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°110, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 225-27 du code de commerce, les mots : « supérieur à quatre ou, dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, cinq, ni excéder le » sont remplacés par les mots : « inférieur au ».

M. Thierry Foucaud.  - La représentation des salariés au sein des conseils d'administration est très insuffisante en France car limitée aux seules très grandes entreprises. Le dialogue social est nécessaire dans toutes les entreprises, pas seulement dans les grandes. Axa ou Sanofi, grâce à leur holding de tête de moins de 50 salariés, se dispensent d'une telle obligation.

En Allemagne, les salariés représentent un tiers du conseil d'administration dans les entreprises entre 500 et 2 000 salariés et la moitié des sièges dans les très grandes entreprises.

Cet amendement s'inspire du modèle allemand en transformant le plafond actuel en un plancher. Une telle disposition constituerait un saut qualitatif indéniable pour la représentation des salariés dans les organes de décision des entreprises.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Également.

M. Thierry Foucaud.  - Vous ne prenez que ce qui vous intéresse dans l'exemple allemand !

M. Jean Desessard.  - Madame la ministre, expliquez-moi ! Vous défendez les ordonnances au nom de l'efficacité, vous voulez plus de dialogue social dans les entreprises pour leur permettre de s'adapter plus rapidement aux marchés ; vous pensez que cela provoquera le décollage de notre économie et la création de millions d'emplois. Nous en doutons mais passons...

Le dialogue dans l'entreprise n'a pas lieu à la buvette ! (Sourires) Le dialogue social, ce n'est pas « Tiens, le DRH passe... Si on discutait ? ». C'est donner aux salariés la connaissance des enjeux, des difficultés, de la stratégie. Plus ils en sauront, plus ils pourront expliquer à leurs collègues pourquoi il faut faire des efforts qui seront, bien sûr, conjoncturels.

Je ne comprends pas que vous vous opposiez à cet amendement. Faites plutôt appel à l'intelligence des salariés pour défendre leur outil de travail ! (Applaudissements sur de nombreux bancs à gauche.)

M. Thierry Foucaud.  - N'étant pas surpris, je ne suis pas déçu. Le dialogue promis n'en est pas un. L'Allemagne n'est un modèle que lorsque cela vous arrange...

En 2012, Louis Gallois - qui n'est pas un communiste - estimait que le poids des actionnaires devait être équilibré en privilégiant ceux qui jouent à long terme et en donnant la parole aux autres parties prenantes de l'entreprise. Mais vous vous entêtez dans votre opposition à nos amendements progressistes. J'espère que cette attitude suscitera les mêmes réactions qu'il y a quelques mois.

M. Alain Milon, rapporteur.  - De toute l'après-midi, ni Mme la ministre, ni moi n'avons parlé de l'Allemagne.

Mme Catherine Deroche et M. Roger Karoutchi.  - Très juste !

M. Olivier Cadic.  - J'indique à M. Desessard qu'il n'y a pas de buvette dans les entreprises.

L'amendement n°110 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°112, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 6° de l'article 225-2 du code pénal, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« 7° À refuser une formation d'une personne ;

« 8° À refuser une promotion d'une personne ;

« 9° À refuser une classification d'une personne. »

M. Christian Favier.  - Le code pénal ne réprime qu'une partie des discriminations dans le monde du travail. Le Défenseur des droits, le CESE, l'Observatoire de la discrimination et de la répression syndicale l'ont souligné : les discriminations à l'égard de militants syndicalistes sont largement sous-estimées. Lorsque les juges les sanctionnent, ils ne peuvent s'appuyer sur une base légale solide, et l'absence de disposition légale claire favorise le non-recours. Songez pourtant aux cas de La Poste, de la SNCF, d'Ikea qui ont maltraité des salariés au motif de leurs engagements syndicaux.

Simone Veil le disait, lorsque l'écart entre les infractions commises et les infractions poursuivies est tel que la répression n'existe plus, c'est le respect de la loi et l'autorité de l'État qui sont mis en cause.

Le comité des droits économiques, sociaux et culturels de l'ONU a engagé la France à prendre des mesures efficaces en la matière. Si l'on ne peut que saluer l'arrêt de janvier 2015 de la Cour de cassation, il est nécessaire de sécuriser l'engagement syndical, que freine la crainte des représailles.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission considère que cet amendement sort du champ du projet de loi. Selon l'article L. 1132-1 du code du travail, tout refus d'une formation ou d'une promotion est déjà sanctionné s'il a pour motif les activités syndicales d'un salarié - je ne comprends pas très bien à quoi correspond le refus de classification mentionné par l'amendement.

Mme la ministre précisera, je l'espère, ses intentions en la matière.

Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Même avis car votre amendement n'ajoute rien au droit en vigueur. Cela dit, le problème des discriminations syndicales est réel : une personne sur deux considère qu'il en existe, selon le dixième baromètre de la perception des discriminations dans l'emploi. Le phénomène est donc avéré - nous pouvons tous en convenir.

Au cours de la concertation avec les partenaires sociaux, nous sommes tombés d'accord sur la nécessité de disposer d'instruments d'observation et d'analyse, afin de prendre ensuite des mesures de prévention. L'arsenal répressif existe - les articles 225-2 du code pénal, L. 132-1 et suivants du code du travail. Tout salarié peut demander réparation d'agissements discriminatoires, et nous n'entendons pas plafonner les indemnités de licenciement dans ce cas. Mais cet arsenal ne suffit pas. Nous mettrons donc en place un outil d'observation continue pour mieux connaître les cas de discriminations, le type d'entreprises où elles se produisent, etc. Il reste beaucoup à faire.

M. Dominique Watrin.  - Votre réponse étayée nous conduit à retirer cet amendement, madame la ministre. Étant donné votre intérêt sur le sujet, nous vous faisons confiance (M. Jean Desessard s'amuse) pour prendre des mesures efficaces et concrètes de prévention.

L'amendement n°112 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°115, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre III du livre Ier de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1132-... ainsi rédigé :

« Art. L. 1132-...  -  Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distributions d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, en raison de l'accomplissement d'une démarche d'information, de revendication ou de réclamation auprès de l'administration du travail, de l'inspection du travail, d'une organisation syndicale, pour avoir agi ou témoigné en justice. »

Mme Annie David.  - Cet amendement donne force de loi à une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui considère le droit d'ester en justice comme une liberté fondamentale qui doit s'exercer sans restriction. Le juge a toujours annulé les licenciements prononcés pour ce motif, ou à l'encontre de salariés ayant témoigné en justice en faveur d'anciens collègues. De même, sauf mauvaise foi de la part du salarié, il considère que le dépôt d'une plainte constitue l'exercice d'un droit et ne saurait constituer une faute justifiant un licenciement.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cet amendement, qui reprend le contenu d'une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale par André Chassaigne en octobre 2015, est satisfait par l'article L. 1132-1 du code du travail qui interdit tout type de discrimination, de même que par l'article L. 1132-3-3 introduit par la loi Sapin II pour protéger les lanceurs d'alerte.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Les salariés sont déjà protégés contre de telles discriminations, y compris les candidats, et le juge n'hésite pas à annuler un licenciement prononcé sans motif valable. Des garanties existent aussi pour les lanceurs d'alerte. La jurisprudence étant constante, nous ne voyons pas la nécessité de légiférer. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Annie David.  - Je suis d'accord avec vous : normalement, de telles situations ne devraient pas arriver. Et pourtant, nous en connaissons tous : rappelez-vous ce chauffeur licencié pour avoir dénoncé l'entreprise qui lui faisait transporter des matières toxiques. En Savoie, Tefal s'en est prise à une inspectrice du travail. Cela prouve que le droit existant n'est pas suffisant. (M. Jean Desessard applaudit.)

L'amendement n°115 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°114, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre IV du livre Ier de la deuxième partie est complétée par une section ... ainsi rédigée :

« Section...

« L'heure d'information syndicale

« Art. L. 2142-...  -  Les sections syndicales sont autorisées à tenir, pendant les heures de travail, des réunions mensuelles d'information. Ces réunions se tiennent dans les locaux syndicaux mis à la disposition des sections syndicales en application de l'article L. 2142-8, ou, avec l'accord du chef d'entreprise, dans d'autres locaux mis à leur disposition.

« Chacun des membres du personnel a le droit de participer à l'une de ces réunions, dans la limite d'une heure par mois. Ce temps peut être dépassé en cas de circonstances exceptionnelles. » ;

2° Le deuxième alinéa de l'article L. 2323-8 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« En cas d'offre de vente faite aux salariés, ces derniers ont accès à la base de données économiques et sociales. » ;

3° Le I de l'article L. 2325-35 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° En vue de l'étude d'un projet de reprise de l'entreprise par les salariés. »

M. Christian Favier.  - Le premier devoir d'un représentant des salariés est de rester en contact avec eux. L'heure mensuelle d'information syndicale, qui existe dans le public, devrait être étendue au privé, d'autant que la délégation unique du personnel réduira le nombre d'élus et d'heures de délégation.

À l'Assemblée nationale, le rapporteur a répondu que rien n'empêchait les salariés de se réunir en dehors du temps de travail, et que l'heure mensuelle pourrait désorganiser le travail de l'entreprise... Il est temps, selon nous, de donner aux salariés les moyens de s'informer.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cette disposition reprend une proposition de loi rejetée en 2015 concernant l'information des salariés. Notre assemblée peut se rallier à la sagesse de l'Assemblée nationale : n'imposons pas aux entreprises cette heure qu'elles sont libres de mettre en place si elles le souhaitent. Par ailleurs, la base de données économiques et sociales (BDES) doit être réservée à l'information des IRP en vue de la préparation de leurs avis. Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Même avis. Les syndicats peuvent distribuer des tracts, utiliser l'intranet, réunir les salariés dans un local mis à disposition par l'employeur. Faisons ici encore confiance aux partenaires sociaux pour définir les modalités de l'information des salariés sans entrer dans un tel niveau de détail : une heure mensuelle d'information ne correspond pas forcément aux besoins, il suffit de penser aux salariés qui travaillent à distance.

L'amendement n°114 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°83 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Vasselle, Guerriau, Pellevat, Nougein, Grand, Vaspart, Perrin, Raison et César, Mmes Duchêne, Di Folco et Gruny, MM. Pierre et de Nicolaÿ, Mme Mélot, MM. Longeot, D. Laurent, Mayet et Canevet et Mmes Keller et Loisier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour relever le seuil social de onze à vingt salariés, de vingt à cinquante salariés et de cinquante à cent salariés.

M. Daniel Chasseing.  - Élu d'un département rural dont le tissu économique est surtout constitué de petites entreprises, je me réjouis de ce projet de loi qui prend en compte leurs spécificités. J'avais souhaité y voir un aménagement des seuils sociaux qui constituent un frein à l'embauche. Nous devons tout faire pour mettre fin au chômage de masse. Nous devons tout faire pour créer des emplois. Parfois les entreprises n'embauchent pas uniquement pour ne pas avoir à franchir un seuil qui impliquerait de nombreuses contraintes administratives et un surcoût de cotisations sociales ! Pour les plus petites entreprises, à partir de onze salariés, il faut organiser l'élection des délégués du personnel, et ces entreprises voient leurs charges augmenter avec l'augmentation du taux de la participation à la formation continue, la perte d'une partie des exonérations de cotisations sociales sur la rémunération des apprentis, l'obligation de s'acquitter du versement transport...

C'est un amendement d'appel pour sensibiliser le Gouvernement à ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cet amendement est contraire à la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, qui censure les amendements parlementaires introduisant ou élargissant une habilitation au Gouvernement à légiférer par ordonnances. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Les freins à l'emploi sont nombreux. Pour ce qui est des seuils, il en existera toujours, et ce seuil de 50 salariés est un seuil européen - tout dépend de ce que l'on y met. Des lois précédentes ont lissé les effets de seuil, mais les barrières psychologiques subsistent.

Le Gouvernement, sans nier l'effet dissuasif des seuils, a plutôt choisi de se concentrer sur le renforcement du dialogue social, dont la faiblesse est aussi un frein à l'embauche. Sans compter que le relèvement des seuils aurait un coût significatif puisqu'il réduirait les recettes fiscales et sociales...

Avis défavorable, par conséquent.

M. Daniel Chasseing.  - C'était un amendement d'appel, pour attirer l'attention sur ce problème réel.

L'amendement n°83 rectifié est retiré.

Nominations à d'éventuelles CMP

M. le président.  - Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion des commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte commun sur le projet de loi actuellement en cours d'examen, d'une part, et sur le projet de loi et le projet de loi organique pour la régulation de la vie publique d'autre part, il va être procédé à la nomination des membres de ces commissions mixtes paritaires.

Les listes des candidats ont été publiées ; je n'ai reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du Règlement. En conséquence, ces listes sont ratifiées.

Je proclame représentants du Sénat à l'éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi actuellement en cours d'examen, en tant que titulaires : M. Alain Milon, Mme Patricia Morhet-Richaud, MM. Philippe Mouiller, Jean-Marc Gabouty, Yves Daudigny, Jean-Louis Tourenne et Mme Nicole Bricq ; en tant que suppléants : MM. Gilbert Barbier, Olivier Cadic, Mmes Laurence Cohen, Catherine Deroche, Catherine Génisson, MM. Albéric de Montgolfier et René-Paul Savary.

Je proclame représentants du Sénat aux éventuelles commissions mixtes paritaires sur le projet de loi et le projet de loi organique pour la régulation de la vie publique, en tant que titulaires : M. Philippe Bas, Mme Catherine Troendlé, MM. Albéric de Montgolfier, Michel Mercier, Jean-Pierre Sueur, Jean-Yves Leconte, Alain Richard ; en tant que suppléants : Mme Éliane Assassi, MM. François Bonhomme, François-Noël Buffet, Pierre-Yves Collombat, Yves Détraigne, Mme Catherine Di Folco et M. René Vandierendonck.

Ces nominations prendront effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de ces commissions mixtes paritaires et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

Commission (Nomination)

M. le président.  - Je rappelle au Sénat que le groupe La République en marche a présenté une candidature pour la commission des affaires sociales. Le délai prévu par l'article 8 du Règlement est expiré. La Présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame Mme Noëlle Rauscent membre de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean-Baptiste Lemoyne, dont le mandat a cessé.

La séance est suspendue à 20 h 5.

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

La séance reprend à 21 h 35.

Avis sur une nomination

M. le président.  - En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable (16 voix pour, 2 voix contre et 1 bulletin blanc) à la nomination de Mme Catherine Guillouard aux fonctions de président-directeur général de la RATP.

Renforcement du dialogue social (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3

Mme Évelyne Yonnet .  - Cet article fait reculer les droits des salariés. Les obligations de l'employeur en matière de licenciement seront considérablement réduites.

Cet article étend le contrat de chantier-projet aux secteurs autres que le bâtiment. Où se trouve la sécurisation des salariés ? En quoi cela renforce-t-il le dialogue social ? Je compte sur vos explications, madame la ministre.

M. Olivier Cadic .  - Je me réjouis de la barémisation. Les conditions de licenciement en France constituent un frein à l'embauche : ainsi 30 % des licenciements pour motif personnel font l'objet d'un recours. Or les indemnités décidées par les prud'hommes vont de 1 à 620 ! La barémisation est un début de solution qu'il ne faudrait pas annuler par d'autres mesures. Les organisations patronales ont regretté votre annonce d'une baisse des indemnités légales. Avez-vous prévu une piste de simplification ?

Quoi qu'il en soit, il faut aller plus loin sur les prud'hommes, notamment en réduisant leurs délais.

Mme Annie David .  - Cet article donne un blanc-seing aux employeurs pour licencier illégalement après avoir écarté les gêneurs que sont les délégués syndicaux, et avoir éloigné le juge judiciaire.

La dissociation des entreprises de leurs groupes est grave. Il y a trop d'exemples d'entreprises appartenant à des groupes florissants qui organisent la casse de l'outil industriel.

Les plus jeunes des salariés licenciés dans mon territoire seront sans doute réembauchés dans des contrats de projets à l'envi... Les jeunes, qui mettent six à huit ans à obtenir un CDI, se sont vus proposer par Emmanuel Macron des baux à durée limitée de trois à douze mois, comme par hasard adaptés à la durée de leurs futurs contrats de travail.

Comment pouvez-vous dire ensuite que la jeunesse est votre priorité ?

Mme Laurence Cohen .  - « Il est temps de dire à certains jeunes qu'il est impossible qu'ils réussissent » a déclaré Frédérique Vidal, secrétaire d'État à l'enseignement supérieur dans cet hémicycle. C'est choquant ! Sa mission est de mieux former les jeunes de notre pays, afin qu'ils puissent trouver un emploi conforme à leurs aspirations. Comment encourager les jeunes à étudier si l'avenir qu'on leur dessine n'est fait que de précarité ?

On nomme CDI ce qui a le goût du CDD. Comment accéder à un logement avec des contrats de mission ? Nous voterons contre l'article 3.

M. Dominique Watrin .  - La loi Macron a largement modifié la procédure prud'homale, en la rendant plus compliquée, partant plus difficile d'accès. Depuis le 1er août 2016, la saisine ne peut plus être orale ; la difficulté dissuade les salariés. Les prud'hommes de Paris ont constaté une baisse de 40 % des saisines. Même chose à Bobigny et à Lyon. L'accessibilité au droit est rendue plus difficile.

La disparition de 60 % des tribunaux de prud'hommes avec la loi Dati oblige les salariés à faire plus de 100 km pour se rendre dans un tribunal.

Mme Élisabeth Lamure .  - L'article 3 a pour objectif de sécuriser la relation de travail. Nous devons tout faire pour réduire la dualité du marché du travail, qui oppose les heureux détenteurs d'un CDI à ceux qui sont embauchés en CDD ou contrats temporaires, plus couteux pour l'entreprise, mais moins risqués en cas de contentieux. Dans une tribune publiée en mars 2016, plusieurs économistes, dont le prix Nobel Jean Tirole, dénonçaient l'impossibilité pour les jeunes et les moins qualifiés d'obtenir un CDI. Et ce, parce que ce contrat fait peur aux entreprises. Je regrette que ce projet de loi n'aille pas aussi loin qu'il était souhaitable et que l'usage des contrats de chantiers soit limité d'office.

Nombre d'entreprises sont confrontées à des projets similaires à des chantiers de construction. Or l'étude d'impact exclut la généralisation et limite le contrat de projet aux branches qui auront signé un accord dans ce sens. C'est dommage ! Il faut tout faire pour mettre en oeuvre la souplesse des contrats de travail.

Mme Dominique Gillot .  - L'article 27 de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées déclare notamment que celles-ci ont le droit de choisir un travail leur permettant de gagner leur vie comme les autres. Or le milieu du travail est encore loin de leur être suffisamment ouvert. Les personnes en situation de handicap sont souvent précarisées et vulnérables dans l'emploi. Leur trajectoire est loin d'être sécurisée. La mise en oeuvre de l'obligation de reclassement laisse à désirer. Souvent, l'issue est le licenciement.

Les proches aidants subissent aussi des difficultés.

Je proposerai des amendements précisant les droits des personnes handicapées.

Mme Gisèle Jourda .  - Une question me taraude : Comment, madame la ministre, un salarié peut-il s'épanouir au sein de l'inquiétant dispositif que vous proposez dans cet article ? Le carcan de ces mesures n'a qu'un objectif : conforter les droits de l'employeur et fragiliser ceux de l'employé. Le dialogue social ne peut en conséquence qu'être durci.

L'alinéa 22 banalise les formes de travail précaire et atypique.

Le travail de nuit est considéré par la loi et la jurisprudence comme ayant un caractère exceptionnel. Il n'est en aucun cas un mode normal d'organisation du travail. Dans le droit existant, il doit exister seulement quand il est indispensable. Or vous faites tout pour en étendre l'usage, faciliter le recours des employeurs à cette forme de travail. Je croyais que cette position était majoritaire dans cet hémicycle ; je me rends compte tristement qu'il n'en est rien. Votre conception de l'exceptionnel n'est pas la mienne. Le travail de nuit entraîne des effets délétères sur la santé mentale et la santé physique des salariés.

Vous allez plus loin que la loi El Khomri en déshumanisant le travail. C'est le modèle de l'ubérisation, des mini-jobs, des licenciements expéditifs, de la précarisation généralisée, comme si c'était « la » solution, « le » modèle...

Je voterai la suppression de l'article 3.

M. Yves Daudigny .  - Depuis le début de ce débat, je m'exprime avec ma liberté de parlementaire, avec un souci de la nuance et de la cohérence, en fonction de mes convictions profondes. J'ai soutenu la loi El Khomri. Cet article 3 prévoit notamment le plafonnement des dommages et intérêts des licenciements sans cause réelle et sérieuse, donc abusifs. Il ne fait rien d'autre que de permettre aux entreprises de budgéter des licenciements illégaux, conformément à la ligne dure des syndicats patronaux. Le Gouvernement opte pour la ligne dure des syndicats patronaux plutôt que celle des syndicats de salariés.

M. Martial Bourquin.  - Très bien !

M. Yves Daudigny.  - Pour 150 000 contentieux portés devant les prud'hommes chaque année, l'entreprise est paralysée par les condamnations pour vice de forme du licenciement, par les délais de jugement et par la variation du montant des dommages et intérêts pour une même ancienneté.

Je peux partager cette position pour les licenciements révoqués en raison d'un vice de forme. Mais c'est inacceptable pour les autres cas. Pourquoi, dans un conseil de prud'hommes, de deux cas apparemment similaires découlent parfois quatre fois plus d'indemnités pour des collègues qui étaient dans la même situation d'ancienneté ? Le préjudice ne s'estime pas en fonction de l'ancienneté, mais de l'âge de la personne, de la difficulté à retrouver un emploi, de sa qualification, de son patrimoine, de son environnement familial. Il y a donc des écarts. Au juge en effet d'apprécier au cas par cas le montant de la réparation d'un préjudice. J'y reviendrai lors de l'examen des amendements.

Mme Catherine Génisson .  - Je m'exprime en tant que praticienne du travail de nuit, ayant porté cette législation sur l'égalité professionnelle femmes-hommes, introduite par un amendement au Sénat, afin d'éviter à la France une condamnation par la justice européenne. Si une loi datant de la fin du XIXe siècle, lorsque le travail était majoritairement industriel et physique, interdisait le travail de nuit des femmes, dans les années 2 000, 800 000 femmes travaillaient de nuit, dont 55 000 dans le secteur industriel. Ce sont aussi beaucoup de femmes qui travaillent de nuit dans la fonction publique hospitalière. Or l'homme est assurément un animal diurne.

Le travail de nuit est très préjudiciable à la santé. L'horloge biologique est désynchronisée. Des addictions au café la nuit, aux somnifères pour récupérer le jour, accompagnent souvent le travail de nuit, qui s'étend alors qu'il doit rester exceptionnel. Des contreparties doivent être envisagées. (Mmes Dominique Gillot, Évelyne Yonnet et M. Jean-Louis Tourenne applaudissent.)

M. Pierre Laurent .  - Cet article synthétise l'esprit de votre projet de loi. « Facilitons les licenciements, les embauches suivront » : voici l'adage, souvent proclamé, jamais prouvé, jamais avéré, qui commande la logique de ce projet de loi. La majorité présidentielle nous accuse de dogmatisme mais c'est elle qui rabâche cette idée, d'une grande banalité intellectuelle, de l'aveu même du juriste Antoine Lyon-Caen. La loi El Khomri procédait de la même veine.

Oui, le pouvoir se gagne par les idées. Vous menez avec ces ordonnances une bataille culturelle visant à réduire les droits des salariés sous prétexte de renforcer la compétitivité des entreprises.

Le « CDI de projet », véritable tour de passe-passe sémantique, n'est qu'un CDD déguisé. On fait passer la souplesse pour une prochaine promesse d'embauche mais elle ne viendra jamais.

La sécurisation du travail doit devenir la pierre angulaire d'un projet de développement économique et de progrès social.

M. David Assouline .  - Oui, au fond, cet article n'est que de l'idéologie. La précarisation, habillée par le mot de flexibilité, libérerait le patron pour qu'il embauche. Aux Pays-Bas, on a dit qu'avec plus de flexibilité il y aurait plus d'embauches. Or après analyse - puisque là-bas on tire des bilans -, la flexibilité a seulement fragilisé les salariés à l'intérieur de l'entreprise, sans faire entrer de nouveaux salariés. Il n'y a pas eu d'embauche.

Vous misez à partir d'une idéologie. Certes, les patrons disent qu'ils vont embaucher. Je connais un cas de bénéficiaire du CICE qui promettait un million d'embauches. Il n'y en a pas eu une seule !

M. Martial Bourquin .  - Le capital humain est le bien le plus précieux. Or précariser, c'est maltraiter l'humain et cela nuit à la productivité. L'OCDE l'a montré dans des études précises, montrant que la pauvreté nuit à la productivité. Le FMI a averti l'Allemagne que les progrès de la pauvreté étaient préoccupants. La précarisation va entraîner une hausse de la pauvreté, face à une industrie surprotégée. Étendre les contrats de chantier à d'autres secteurs serait donner raison à la frange la plus réactionnaire du patronat. (Murmures à droite) Le plafonnement des indemnités est un appel aux licenciements abusifs. Les masques tombent. (Même mouvement) Sachez toutefois qu'une partie du patronat ne partage pas ces idées.

M. le président.  - Amendement n°56, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Cohen.  - Les réponses de la ministre ne nous convainquent guère. L'article 3 est un oxymore : « sécurisation des relations de travail », alors que l'on généralise le contrat de chantier et l'on étend le travail de nuit. Comment cela pourrait-il sécuriser les relations de travail ?

Cet article 3 est un tapis rouge pour les employeurs qui veulent licencier abusivement en payant moins d'indemnités. Or ces indemnités ne sont que la réparation d'un préjudice. Qui peut croire qu'elles constituent un frein à l'embauche ? Le travail est source de richesse, le problème réside plutôt dans le coût du capital. Il faut sans cesse baisser le coût du travail, « libérer » le travail, clame-t-on ! Avec quels résultats ? L'exonération des charges depuis des années ne donne aucun résultat contre le chômage.

M. le président.  - Amendement identique n°75 rectifié ter, présenté par M. Antiste.

M. Maurice Antiste.  - Toutes les mesures de l'article 3 sont autant de régressions : plafonnement des indemnités prud'homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, réduction des sanctions prononcées contre l'employeur en cas d'irrégularité dans la procédure de licenciement, diminution des délais de recours contentieux pour les salariés, réduction du périmètre d'appréciation des difficultés économiques, allègement de l'obligation de reclassement.

Parallèlement, cet article accroît la flexibilité des contrats de travail, en élargissant les possibilités de recourir au CDI de chantier et en dérégulant les contrats courts. Supprimons-le !

M. le président.  - Amendement identique n°155 rectifié quinquies, présenté par M. Labazée, Mme Lienemann, M. Assouline, Mme Meunier, MM. Durain et Godefroy, Mme Yonnet, MM. Mazuir, Montaugé, Cabanel et M. Bourquin et Mmes Jourda et Monier.

Mme Évelyne Yonnet.  - L'importance et la portée de cet article méritent mieux qu'un examen du Parlement contraint par la procédure accélérée et le recours aux ordonnances.

M. Alain Milon, rapporteur.  - L'article 3 habilite le Gouvernement à prendre des mesures sur lesquelles le Sénat s'est déjà exprimé à plusieurs reprises au cours de ces dernières années. En cohérence avec les votes exprimés par notre Assemblée lors de l'examen de la loi Croissance et activité en 2015 et de la loi Travail en 2016, la commission des affaires sociales est en effet favorable à un encadrement des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et à une révision du périmètre d'appréciation de la cause économique d'un licenciement.

Dès lors, avis défavorable aux amendements de suppression de cet article.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable.

Oui, l'article 3 sécurise les relations de travail. Le Gouvernement est attaché à agir au plus près de la réalité. Parmi les freins à la création d'emploi, les entreprises et les investisseurs identifient l'insécurité juridique comme un puissant facteur d'inhibition. Il est vrai qu'il ne peut y avoir embauche sans marché.

M. Martial Bourquin.  - Le carnet de commandes !

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il y a aussi la formation professionnelle, l'apprentissage, que nous traiterons l'an prochain.

La reprise de la croissance est réelle, mais les employeurs ont peur de ce qui va leur arriver s'ils embauchent. Les indemnités pour dommages et intérêts, qui ne concernent, je tiens à le préciser parce que tout le monde ne le sait pas, qu'un étage du contentieux prud'homal, sont particulièrement peu encadrées en France en comparaison avec les autres pays. Pour des situations comparables, la chancellerie reconnaît une différence de 1 à 4. Ce n'est pas équitable même pour les salariés. Or le droit doit l'être.

La durée de contentieux est de 21,5 mois en moyenne, 29 mois s'il y a appel. C'est, à l'évidence, très long. Or je rappelle qu'un licenciement individuel sur cinq donne lieu à contentieux, et 60 % vont en appel.

En outre, il est très difficile pour le salarié de se projeter dans l'avenir pendant ce temps. Les contentieux prud'homaux sont en baisse. Cela s'explique par l'essor des ruptures conventionnelles, qui furent 400 000 l'an dernier.

Aujourd'hui, selon le droit applicable, une lettre de licenciement mal rédigée justifie une annulation pour ce seul motif, de pure forme. Nombre de petits employeurs en font les frais, même si leurs motivations sont exactes sur le fond. Le droit doit être clair, précis, donner des repères. Il doit être lisible pour le justiciable.

Renforcer la conciliation va aussi dans le bon sens. Nous souhaitons réserver aujourd'hui les vrais contentieux aux préjudices de fond et résorber l'engorgement des prud'hommes.

À la demande des partenaires sociaux, nous avons ajouté dans les dispositions de branche la possibilité de définir les contrats courts, ainsi que la possibilité, dans certaines branches, d'autoriser le contrat de chantier. Dans la construction navale, par exemple, il y avait de fortes demandes pour trois à quatre ans, mais il n'était pas possible de faire se succéder des intérims ou des contrats courts pour une telle période dans le cadre du droit actuel. Pourquoi mettre cela dans les mains de la branche ? Parce que nous faisons confiance dans le dialogue social. Je ne connais pas un seul accord de branche qui soit déséquilibré. Le CDI de chantier a un sens dans certains secteurs : l'informatique, pas la boulangerie ! Et avec ce CDI, dont la mention « de projet » ou « de chantier » n'apparaît évidemment pas sur la feuille de paye, le salarié peut obtenir un prêt à la banque ou louer un appartement, ce qui n'est pas possible avec un CDD. Toutes les mesures allant vers le CDI sont souhaitables.

Le droit actuel est quasiment muet sur le télétravail. Or 14 % le pratiquent partiellement, et 61 % le souhaitent. La demande est particulièrement forte, notamment dans les zones rurales, ou en provenance de personnes handicapées, ou de personnes ayant des contraintes familiales. Ces verrous doivent être levés pour plus de confiance et de création d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche ; M. Olivier Cadic applaudit également.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je voterai ces amendements de suppression. La barémisation est un danger absolu, car elle met en cause un principe fondamental de notre droit, civil comme pénal : l'individualisation de l'appréciation du dommage, de sa réparation, ainsi que la peine. L'arbitrage du juge doit demeurer déterminant.

La réduction du droit de recours est une fragilité supplémentaire. Une étude de l'Insee montre que le droit du travail ne représente rien au regard de l'incertitude économique ou de la difficulté à trouver des salariés compétents. On peut comprendre que ces derniers soient rares si les emplois sont précaires, pénibles et mal rémunérés. On peut les taxer de fainéants. J'observe qu'à chaque fois que les contrats moins longs sont mis en place, cela fait exploser les CDD courts et les chiffres du chômage restent alarmants.

M. Olivier Cadic.  - La commission des affaires sociales a réécrit l'article 3 ; j'espère qu'un compromis sera trouvé. Le Gouvernement favorise l'adaptation des contrats et le recours aux CDI de chantier. Tout cela va dans le sens d'une plus grande flexibilité. Il faut avoir le sens de l'équilibre. La différence entre nous et nos collègues communistes et socialistes, c'est qu'ils n'ont pas passé leur temps à développer des entreprises. (Vives protestations à gauche ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit.)

Mme Annie Guillemot.  - Et les parachutes dorés ?

M. Guillaume Arnell.  - Le groupe RDSE, en principe, vote contre les suppressions d'article car nous voulons discuter du fond. Pour autant, à titre personnel, je prendrai une autre position ce soir.

J'ai eu la chance d'avoir deux vies : après avoir longtemps été salarié, j'ai été chef d'entreprise. Cela dit, intrinsèquement, je me sens d'abord salarié. Et, je le constate, à chaque fois que l'on discute du droit du travail, c'est toujours au détriment des salariés. (Mmes Eliane Assassi, Gisèle Jourda, Michelle Meunier et Évelyne Yonnet applaudissent ainsi que M. Franck Montaugé.)

Je veux bien que l'on simplifie le droit du travail. Mais de grâce, n'en rajoutons pas. Je parie que lorsque mon mandat s'achèvera dans deux ans, la courbe du chômage n'aura pas diminué. Que nous direz-vous alors ?  (Mmes Gisèle Jourda, Annie Guillemot, Marie-Noëlle Lienemann, Michelle Meunier et Évelyne Yonnet applaudissent ainsi que MMDavid Assouline, Franck Montaugé et Jean-Louis Tourenne ; on applaudit également sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen.)

M. Marc Laménie.  - Je me rallierai à la position du rapporteur. Merci, madame la ministre, pour vos propos pédagogiques. Il n'y a pas, d'un côté, les salariés et, de l'autre, les patrons. De nombreux chefs d'entreprise se sacrifient pour maintenir l'emploi. Si les patrons n'existaient pas, la situation serait bien plus grave.

M. Loïc Hervé.  - Il faut le dire !

M. Marc Laménie.  - Les CDD n'apportent pas une solution complète, on le sait, mais il faut bien trouver des solutions pour que l'économie puisse fonctionner.

Mme Nicole Bricq.  - A l'orée de la soirée, je croyais qu'on parviendrait à objectiver ce débat, mais non... (Mme Annie David se récrie.) La ministre a annoncé très tôt le relèvement des indemnités de licenciement, il le faut car la France en propose de bien plus basses que ses voisins européens. Ce dont nous parlons, ce sont des dommages et intérêts en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Nous en avons longuement débattu lors de l'examen de la loi Macron pour aboutir à un barème indicatif. Les chiffres ne sortaient pas de nulle part, ils constituaient une moyenne tirée de la jurisprudence. Avec cette loi, le barème devient prescriptif. Tout le problème est de savoir quels seront le plancher et le plafond. Le juge continuera d'exercer son pouvoir d'appréciation.

Quant à ce que l'on appelle par facilité les contrats de chantiers, ils ont été lancés, à titre expérimental, dans la loi de 2008 et pérennisé dans la loi de 2014. Ils sont utilisés à l'université sous la forme des contrats de recherche. Verrou utile, les branches détermineront les secteurs où ces contrats sont utiles. Bref, on ne demande à personne d'acheter un lapin dans un sac. (Marques d'ironie sur quelques bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen.)

Mme Dominique Gillot et M. François Patriat.  - Très bien !

M. Martial Bourquin.  - Un exemple : les banques, on y supprime beaucoup d'emplois. La Société générale détient 136 filiales dans des paradis fiscaux où elle investit 36 % de ses bénéfices, 1005 sociétés offshore. Son nom est cité à plusieurs reprises dans les Panama papers et il ne faudrait pas s'y attaquer ? Vous parlez des causes des suppressions d'emplois... sans mentionner les 60 à 80 milliards d'euros d'évasion fiscale qui coûte si cher à la France.

M. Martial Bourquin.  - Tout le monde se tait là-dessus ; nous, non ! Le verrou de Bercy a été maintenu...

M. Bruno Retailleau.  - Pas par le Sénat !

M. Martial Bourquin.  - Le petit artisan aura un redressement quand on discutera avec Google. On veut régler tous les problèmes de la France en s'attaquant à l'emploi salarié, en le maltraitant, en le martyrisant. Nous, nous pensons qu'une autre société est possible. Le problème numéro un, c'est le creusement des inégalités qui donne une croissance molle. Une croissance plus robuste et les entreprises embaucheraient ; elles le font à chaque fois qu'elles reçoivent des commandes. Et on continue de flexibiliser le travail alors que c'est ce que l'on fait depuis je ne sais plus combien d'années (Mmes Gisèle Jourda, Marie-Noëlle Lienemann, Michèle Meunier et M. Franck Montaugé applaudissent.)

M. Daniel Chasseing.  - Je ne voterai pas ces amendements. La barémisation est une demande très forte des PME, et encore plus des TPE. Aux prud'hommes, les dommages et intérêts peuvent aller du simple au quadruple.

M. Martial Bourquin.  - C'est le juge qui décide !

M. Daniel Chasseing.  - Fixer un plafond en fonction de l'ancienneté, c'est respecter le salarié, et pas le précariser.

Mme Évelyne Yonnet.  - Chaque président de la République a voulu marquer son territoire dans la lutte contre le chômage.

Mme Nicole Bricq.  - Le président de la République n'est pas un chat !

Mme Évelyne Yonnet.  - Réduction du temps de travail, CDD, contrat d'avenir, contrat de génération.... Les contrats de chantiers sont des CDD déguisés, dont on connaît la perversion. Ils se sont généralisés jusqu'à devenir majoritaires.

Mme Nicole Bricq.  - Pas du tout, il y a 85 % de CDI !

M. Bruno Retailleau.  - Et 10 % de CDD !

Mme Évelyne Yonnet.  - Cet article 3 ne contient aucune mesure de progrès social. Au bout du bout, ce n'est pas ainsi que l'on réglera le problème du chômage.

Mme Laurence Cohen.  - De quoi parle-t-on ? Nous parlons de femmes et d'hommes licenciés abusivement, de chefs d'entreprise qui utilisent le licenciement économique pour faire des profits. (On se récrie au centre et à droite.) On méprise les salariés licenciés, on nous fait pleurer sur les entreprises en difficulté. Quand parlerez-vous des humains ? Vous proposez de raboter les indemnités quand certains s'en mettent plein les poches avec leurs stock-options.

Les grands groupes engrangent des profits record. Ce sont toujours les mêmes qui trinquent. Et vous nous demandez de vous faire confiance ? On marche sur la tête ! Et la réalité du chômage, des difficultés des salariés et du pouvoir d'achat en berne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

À la demande du groupe communiste républicain et citoyen, les amendements nos56, 75 rectifié ter et 155 rectifié quinquies sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°135 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Pour l'adoption 103
Contre 232

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°134 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Au début de cet article

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 1233-2 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Est réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d'emplois sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l'entreprise a constitué des réserves ou réalisé un résultat net ou un résultat d'exploitation positif au cours des deux derniers exercices comptables.

« Est également dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d'emploi sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l'entreprise a, au cours des deux derniers exercices comptables, distribué des dividendes ou des stock-options ou des actions gratuites ou procédé à une opération de rachat d'actions. »

M. Dominique Watrin.  - Cet amendement interdit les licenciements économiques dits boursiers, ceux dont l'unique objectif est l'augmentation de la rentabilité financière de l'entreprise. Il est issu d'une proposition de loi de 2011 dont j'étais le rapporteur. On peut nous reconnaître une continuité et une cohérence dans la défense des valeurs de la gauche.

Chacun connaît des exemples de ces licenciements dans son département, nous pouvons voter des garde-fous pour les empêcher.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable.

M. Jean Desessard.  - Cet amendement n'interdit pas le licenciement, on le sent bien à la défense généreuse de Dominique Watrin. Il interdit d'utiliser le motif du licenciement économique quand cela n'est pas justifié. C'est logique, non ? (On renchérit sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen.) Mme la ministre aurait très bien pu proposer des « licenciements d'organisation » ou des « licenciements stratégiques » dans le cadre de ces ordonnances qui vont tout changer.

L'amendement n°134 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°135 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Au début de cet article

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 1233-3 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 1233-3.  -  Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives à une cessation d'activité ou à des difficultés économiques qui n'ont pu être surmontées par la réduction des coûts autres que salariaux ou, à des mutations technologiques indispensables à la pérennité de l'entreprise, et dès lors que l'entreprise n'a pas recours au travail intérimaire ou à la sous-traitance pour exécuter des travaux qui pourraient l'être par le ou les salariés dont le poste est supprimé.

« L'entreprise doit avoir cherché par tous moyens adaptés à sa situation d'éviter un licenciement pour motif économique, de sorte que le licenciement pour motif économique constitue le dernier recours pour assurer sa pérennité.

« L'appréciation des difficultés économiques ou des mutations technologiques s'effectue au niveau de l'entreprise si cette dernière n'appartient pas à un groupe.

« Lorsque l'entreprise appartient à un groupe, l'appréciation des difficultés économiques ou des mutations technologiques s'apprécie au niveau du secteur d'activité du groupe.

« Les situations visées au premier alinéa qui seraient artificiellement créées ainsi que celles résultant d'une attitude frauduleuse de la part de l'employeur ne peuvent constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

« Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivant, résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa. »

Mme Éliane Assassi.  - Cet amendement prend le contre-pied de l'évolution du droit du travail sur les licenciements économiques. Mme la ministre a, dit-elle, la volonté d'améliorer le dialogue social mais comment s'y prendra-t-elle alors que la réalité des salariés est la détérioration des conditions du licenciement ?

Ce projet va plus loin que la loi El Khomri. Nous ne voulons pas que les salariés soient une variable d'ajustement. (Mme Nicole Bricq s'exclame.) Madame Bricq, pouvez-vous nous épargner vos commentaires ? C'est lassant !

M. Loïc Hervé.  - Madame Assassi, on n'entend que vous !

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable. La loi Travail a déjà défini des critères. De plus, l'amendement représenterait une atteinte à la liberté d'entreprendre qui serait sans doute censurée par le Conseil constitutionnel.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il n'a jamais été question de modifier les critères définis par la loi El Khomri. Il vaut mieux prévenir que guérir ; les entreprises doivent pouvoir réagir à des changements de positionnement sur le marché. Cela évite des licenciements beaucoup plus importants.

Mme Nicole Bricq.  - L'habilitation ne porte pas du tout sur ces sujets. Vous proposez de réécrire l'article 67 de la loi El Khomri, ni plus ni moins.

Mme Annie David.  - La commission des affaires sociales n'a pas déclaré notre amendement irrecevable. Dans un débat parlementaire, on peut revenir sur un texte antérieur qu'on a combattu pendant des jours et des nuits.

Madame la ministre, vous acceptez que la création artificielle de difficultés économiques sur certains sites, alors que le groupe va bien, puisse être un vrai sujet. En revanche, vous soutenez que des réorganisations peuvent légitimement autoriser des licenciements. Mais certaines d'entre elles sont des prétextes pour faire remonter le cours de l'action et engranger les plus-values de juteuses stock-options. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)

L'amendement n°135 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°224, présenté par MM. Vanlerenberghe et Cadic.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

de droit privé

par les mots :

mentionnés à l'article L. 2211-1 du code du travail

M. Olivier Cadic.  - Amendement de précision.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Par coordination avec l'avis de la commission sur la même mention à l'article premier et à l'article 2, sagesse... Positive.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Mon avis demeure favorable.

L'amendement n°224 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°38 rectifié, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Après le mot :

accès

insérer les mots :

et garantir la compréhension, notamment par l'utilisation du français facile à lire et à comprendre,

Mme Dominique Gillot.  - La connaissance du droit est un marqueur fort entre ceux qui ont le temps de développer cette expertise, ceux qui ont les moyens financiers d'obtenir cette expertise et les autres, laissés dans l'ignorance. Pour l'améliorer, je propose de prendre en compte tous les troubles de la communication en utilisant le français facile à lire et à comprendre, le FALC, auquel certaines directions d'administration centrale recourent déjà avec succès.

M. Alain Milon, rapporteur.  - La commission partage l'objectif : le droit du travail est complexe, il est aussi un droit de proximité. Le site vie-publique.fr est un bon exemple de documentation pédagogique. Cependant, cette documentation est opposable, donc précise. On ne peut pas toujours éviter la complexité du monde. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Véritable défi ! La matière juridique doit embrasser la complexité du réel... ce qui la rend souvent difficile à comprendre. Vous voulez la rendre accessible à ceux qui ont des difficultés de compréhension, considérant que cela profiterait à tout le monde. Nous sommes prêts à y travailler avec des personnalités de la société civile. Votre amendement, en revanche, me pose un petit problème : le FALC n'a pas de définition juridique. D'où mon avis défavorable.

Mme Dominique Gillot.  - Je suis heureuse que nous ayons eu ce débat. Le Comité interministériel du handicap du 2 décembre 2016 avait proposé que les exposés des motifs des projets de loi soient rédigés en FALC - ce qui, entre parenthèses, éviterait parfois aux parlementaires de faire des contresens ! (Sourires)

L'amendement n°38 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°39 rectifié, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Après le mot :

personne

insérer les mots :

, y compris en situation de handicap,

Mme Dominique Gillot.  - Cet amendement garantit l'accessibilité des informations au plus grand nombre, en s'assurant que les outils numériques utilisés pour présenter les informations relatives au droit du travail et aux dispositions légales ou conventionnelles applicables aux personnes soient accessibles, y compris aux personnes en situation de handicap. Nous avions exigé l'accessibilité des sites aux malvoyants dans la loi République numérique. Le secrétaire d'État au numérique me dit que c'est en cours mais que les opérateurs de plateformes traînent des pieds. L'intelligence artificielle et les nouvelles applications ouvrent aujourd'hui des possibilités.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Cet amendement est satisfait par l'article 47 de la loi Handicap de 2015. Un décret du 14 mai 2009 a créé un référentiel de l'information en ligne sur le service public. Votre amendement rappelle utilement ces obligations (M. Loïc Hervé le confirme). Son oeuvre est faite, vous pouvez le retirer.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Le concept de mise à disposition nous a semblé complémentaire. Avis favorable.

M. Philippe Mouiller.  - La commission a toujours le souci de ne pas alourdir les textes mais Mme la ministre a raison.

Mme Laurence Cohen.  - Brigitte Gonthier-Maurin et Nicole Duranton ont rendu public aujourd'hui un bilan sur l'accès à la culture des personnes handicapées. Il en va du monde du travail comme de la culture, le groupe communiste républicain et citoyen est heureux de voter cet amendement de Mme Gillot.

Mme Dominique Gillot.  - Merci, madame la ministre, la loi de 2005 établit le droit à l'accès aux droits fondamentaux mais elle n'est malheureusement pas appliquée.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Si la ministre considère que cet amendement n'alourdit pas le texte, la commission n'y voit pas d'inconvénient. Espérons que cette mesure soit plus appliquée que celle de 2005...

Mme Dominique Gillot.  - Comptez sur nous !

M. Dominique Watrin.  - Il est juste que le droit soit accessible à tous, y compris à ceux qui n'ont pas de connaissances juridiques. Pour autant, parler de pédagogie, c'est parler de l'école. L'Education nationale a une responsabilité. Les jeunes qui partent en apprentissage, certains voudraient qu'ils y aillent dès 14 ans, doivent connaître leurs droits.

Une collaboratrice de Myriam El Khomri, responsable de la jeunesse ouvrière chrétienne, (M. Loïc Hervé se réjouit d'une telle référence.) avait bon espoir qu'on donne une initiation au code du travail dans les collèges. Ce projet doit encore être dans les tiroirs du ministère du travail. Il ne tient qu'à vous, madame la ministre, de l'en exhumer !

L'amendement n°39 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°76 rectifié, présenté par M. Antiste et Mmes Jourda et Monier.

Alinéas 4 à 6

Supprimer ces alinéas.

M. Maurice Antiste.  - Le plafonnement des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse accroîtra l'insécurité des travailleurs en facilitant les licenciements abusifs puisque l'employeur connaîtra à l'avance le prix maximum de son manquement. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°40 rectifié bis, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Cette disposition nous heurte sur le plan de la justice, sur le plan de l'humanité et sur le plan du droit. Le jugement en France est individualisé. Comment réparer une vie gâchée ? Le barème est une manière de signifier au juge qu'il n'est pas capable d'apprécier le préjudice.

Ce n'est pas acceptable. J'espère qu'on reviendra à la raison. La justice doit être sereine et non bridée.

M. le président.  - Amendement identique n°117, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Annie David.  - Vous voulez créer un permis de licencier abusivement. Madame la ministre, si vous voulez rénover les prud'hommes, rétablissez plutôt l'élection des conseillers au suffrage universel, imposez le principe d'oralité, la gratuité, la simplicité, la proximité alors que des dizaines de tribunaux prud'homaux ont été supprimés. Vous condamnez les salariés à l'arbitraire : comment se faire payer les heures supplémentaires qui leur sont dues, comment contester une directive dangereuse pour la santé des travailleurs ou même pour le bon fonctionnement de l'entreprise s'ils peuvent se faire mettre à la porte du jour au lendemain, sans juste indemnisation ? Les licenciements boursiers, eux, ne sont repérés qu'après coup.

Je partage les propos de M. Tourenne : vous méconnaissez le rôle du juge. Chaque cas est individuel.

M. le président.  - Amendement identique n°161, présenté par M. Desessard et Mmes Benbassa et Bouchoux.

M. Jean Desessard.  - Les employeurs de bonne foi se trompent et sont condamnés à foison, dit la ministre. À l'heure du numérique, on pourrait espérer que l'administration aide les employeurs à remplir leurs dossiers. Mais vous préférez tout changer. Le patronat se plaint des papiers à remplir. Bientôt il se plaindra de devoir éditer des bulletins de salaires !

On voit ici la persévérance du président de la République, qui avait introduit ce plafonnement pour la première fois dans la loi Macron, et qui n'était pas étranger à la première mouture de la loi El Khomri... Vous allez contre un principe cardinal du droit privé, celui de la réparation intégrale du préjudice. Faites plutôt confiance... aux juges prud'homaux !

M. le président.  - Amendement identique n°194 rectifié, présenté par Mme Jouve, MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Guérini et Collombat et Mme Malherbe.

M. Guillaume Arnell.  - Nous parlons bien du licenciement abusif. La ministre a déclaré que les dommages et intérêts allaient de 1 à 4 pour le même préjudice. Pourtant le juge prud'homal est relativement raisonnable. Le barème indicatif institué par la loi El Khomri, qui tient compte de l'ancienneté, de l'âge et de la difficulté à retrouver un emploi, est suffisant.

M. Jean Desessard.  - Très bien.

M. le président.  - Amendement n°119, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 4

Après la première occurrence du mot :

licenciement,

insérer les mots :

sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être alloués en considération de la situation de famille, de la situation personnelle, de la qualification professionnelle, de la situation du marché du travail ou de l'âge du salarié

M. Dominique Watrin.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°118, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 4

Après la première occurrence du mot :

licenciement

insérer les mots :

afin de permettre une juste réparation des préjudices subis

M. Dominique Watrin.  - Cet amendement de repli s'assure que les modifications envisagées se fixeront pour objectif de garantir une juste réparation des préjudices subis. Un licenciement abusif devrait donner lieu à réparation intégrale. Il n'y a pas deux cas identiques.

M. le président.  - Amendement n°169 rectifié ter, présenté par Mmes Gruny et Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Dallier et Rapin, Mme Imbert, MM. Pellevat et Vaspart, Mme Canayer, M. Mouiller, Mme Di Folco, MM. Lefèvre et Pierre, Mme Mélot et MM. Cornu, Chasseing, Commeinhes et Gremillet.

Alinéa 4

Après le mot :

obligatoire

insérer les mots :

et forfaitaire, déterminé sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Précisons que ce barème n'inclut pas l'indemnité de licenciement.

M. le président.  - Amendement n°167 rectifié ter, présenté par Mmes Gruny et Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Dallier et Rapin, Mmes Debré et Imbert, MM. Pellevat et Vaspart, Mmes Canayer et Di Folco, MM. Lefèvre et Pierre, Mme Mélot et MM. Cornu, Chasseing, Commeinhes et Gremillet.

Alinéa 4

Après le mot :

 sérieuse

insérer les mots :

et plafonnés à dix-huit mois de salaire brut

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Il incombe à la représentation nationale de fixer un plafond de dommages et intérêts, sauf à donner au Gouvernement et aux partenaires sociaux un chèque en blanc.

M. le président.  - Amendement n°228, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Après les mots :

entachés par

insérer les mots :

une faute de l'employeur d'une exceptionnelle gravité, notamment par

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Des cas d'une extrême gravité, où l'intégrité de la personne ou ses droits fondamentaux sont en cause, doivent rester hors barème. L'Assemblée nationale avait mentionné les cas de discrimination et de harcèlement. C'est un peu trop restrictif. Songeons aux femmes enceintes, aux représentants du personnel, aux lanceurs d'alerte ou aux salariés ayant exercé leur droit de grève.

M. Jean Desessard.  - Voilà, c'est ce que nous disons !

M. le président.  - Amendement n°168 rectifié quater, présenté par Mmes Gruny et Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Dallier et Rapin, Mme Imbert, MM. Pellevat et Vaspart, Mme Canayer, M. Mouiller, Mme Di Folco, MM. Lefèvre et Pierre, Mme Mélot et MM. Cornu, Chasseing, Commeinhes et Gremillet.

Alinéa 4

1° Remplacer la seconde occurrence du mot :

modifiant

par le mot :

supprimant

2° Remplacer les mots :

ainsi que

par les mots :

et en modifiant

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Le barème facultatif n'a plus d'utilité si l'on introduit un barème obligatoire.

M. le président.  - Amendement n°120, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

Mme Laurence Cohen.  - Le Gouvernement veut alléger les obligations de l'employeur en matière de motivation des licenciements et diminuer les sanctions en cas d'irrégularité de la procédure. La commission des affaires sociales y a ajouté la reconnaissance d'un droit à l'erreur pour l'employeur, qui serait autorisé à rectifier dans la lettre de licenciement les irrégularités de procédure et de motivation mineures qui sont sans incidence sur la cause réelle et sérieuse du licenciement.

Ces mesures, qui répondent à une demande récurrente des organisations patronales, remettraient en cause des protections fondamentales des salariés. La meilleure preuve, c'est que la commission veut diviser par deux le délai de recours sur le bien-fondé d'un licenciement économique.

M. le président.  - Amendement n°181 rectifié, présenté par Mme Meunier, M. Tourenne, Mme Lienemann, MM. Labazée et Durain, Mmes Jourda et Yonnet, MM. Mazuir, Montaugé, Assouline et Cabanel et Mme Monier.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Jérôme Durain.  - Cet alinéa assouplit les exigences de motivation nécessaires et suffisantes applicables aux décisions de licenciement. Ainsi, l'absence de mention de la suppression du poste dans une lettre de licenciement économique pourrait ne plus faire tomber directement la cause réelle et sérieuse.

Nous proposons donc la suppression de cet alinéa, d'ailleurs contraire à la convention 158 de l'Organisation internationale du Travail et aux règles de la CEDH sur l'accès au juge et à l'individualisation des peines.

M. le président.  - Amendement n°197, présenté par MM. Arnell, Bertrand, Castelli et Guérini et Mmes Jouve et Malherbe.

Alinéa 5

Après le mot :

contentieux

supprimer la fin de cet alinéa.

M. Guillaume Arnell.  - Si la rédaction d'une lettre de licenciement est un exercice délicat, le salarié a le droit de connaître le motif de son licenciement pour pouvoir se défendre. La commission a voulu instituer un droit à l'erreur au profit de l'employeur, mais l'insuffisance de motivation, si elle est souvent invoquée par les requérants, est rarement retenue par les juges. Selon l'étude d'impact, il est d'ailleurs prévu de diffuser un modèle type de lettre, sous forme de formulaire Cerfa. Revenons donc à la rédaction de l'Assemblée nationale.

M. le président.  - Amendement n°229, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

, en permettant notamment à l'employeur de rectifier dans la lettre de licenciement les irrégularités de motivation si elles sont sans incidence sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

par les mots :

et déterminant les conditions dans lesquelles le juge apprécie, en cas de pluralité de motifs, la réalité de la cause réelle et sérieuse du licenciement ainsi que celles dans lesquelles une irrégularité de procédure dans la conclusion du contrat à durée déterminée entraine la requalification de celui-ci en contrat à durée indéterminée

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - L'adaptation des règles de procédure et de motivation applicables aux licenciements a donné lieu à de nombreuses concertations. Nous souhaitons préciser les conditions dans lesquelles le juge apprécie l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsque plusieurs motifs sont invoqués. Selon un arrêt du 3 février 2016 de la Cour de Cassation, l'invalidité d'un seul motif peut entraîner la nullité du licenciement.

Nous préciserons aussi les modalités de requalification du CDD en CDI, à laquelle de petites entreprises se sont exposées pour avoir mal formulé les termes d'un CDD sans aucune conséquence de fond. Il en va de même si le contrat est signé plus de 48 heures après l'embauche. S'il faut des règles pour éviter les abus, nous devons prendre en compte le cas des irrégularités de bonne foi.

M. le président.  - Amendement n°41 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Comme si tout ce qui précède ne suffisait pas, on réduit le délai de recours de douze à six mois. Tous les salariés licenciés n'ont pourtant pas à leur disposition les services d'un cabinet juridique !

Pour eux, c'est la triple peine : licenciement, plafonnement des indemnités et délai raccourci.

M. Martial Bourquin.  - Très bien dit !

M. le président.  - Amendement n°193, présenté par M. Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Costes, MM. Arnell, Bertrand, Castelli et Collombat, Mme Malherbe et MM. Vall et Collin.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

d) Réduisant les délais de recours en cas de rupture du contrat de travail ;

Mme Françoise Laborde.  - Il est difficile d'expliquer que les délais différents s'appliquent aux licenciements économiques collectifs ou individuels. L'harmonisation est une très bonne chose, mais nous ne pouvons approuver la commission des affaires sociales qui a réduit de douze à six mois le délai de contestation d'un licenciement économique. Revenons à la rédaction de l'Assemblée nationale.

M. le président.  - Amendement identique n°238, présenté par le Gouvernement.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il faut harmoniser les délais, et le texte de la commission ne tient pas compte de la concertation en cours.

M. le président.  - Amendement n°171 rectifié ter, présenté par Mmes Gruny et Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Dallier, Rapin, Pellevat et Vaspart, Mme Canayer, M. Mouiller, Mme Di Folco, MM. Lefèvre et Pierre, Mme Mélot et MM. Cornu, Chasseing, Commeinhes et Gremillet.

Alinéa 6

Après le mot :

recours

insérer les mots :

concernant l'action en paiement ou en répétition du salaire prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail et

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - La baisse des délais de prescription doit être envisagée globalement dans un souci de sécurité juridique. Il serait ainsi judicieux de réduire de trois à deux ans le délai de prescription en matière de salaire.

M. le président.  - Amendement n°170 rectifié ter, présenté par Mmes Gruny et Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Dallier et Rapin, Mme Imbert, MM. Pellevat et Vaspart, Mmes Canayer et Di Folco, MM. Lefèvre et Pierre, Mme Mélot et MM. Cornu, Chasseing, Commeinhes et Gremillet.

Alinéa 6

Supprimer les mots :

pour motif économique

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - La prescription a pour objet de sécuriser les relations juridiques. La diminution du délai doit être envisagée pour tous les licenciements et non uniquement pour les licenciements économiques.

M. Alain Milon, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°76 rectifié qui supprime le référentiel obligatoire, très attendu par les employeurs, ainsi que les apports de la commission.

Avis défavorable aux amendements nos40 rectifié bis, 117, 161 et 194 rectifié. Le barème, je le répète, est très attendu pour mettre fin à l'incertitude provoquée par les pratiques très diverses des tribunaux. Le Conseil constitutionnel en a accepté le principe dans sa décision du 5 août 2015. Le juge restera libre d'individualiser les dommages et intérêts dans la limite du plafond. En outre, harcèlement et discrimination seront exclus du barème et la ministre a déposé un amendement qui élargit les exceptions.

Beaucoup de pays voisins ont adopté, de la même manière, encadrer les indemnités de licenciement, comme l'indique notre étude de législation comparée. En Belgique, l'indemnité doit être comprise entre trois et dix-sept semaines de rémunération, elle est de six mois en Suisse, douze mois en Allemagne, dix-huit mois si le salarié a plus de 55 ans et plus de 20 ans d'ancienneté.

Avis défavorable à l'amendement n°119 qui réduit la portée du référentiel. Celui-ci devra comporter au moins un critère, celui de l'ancienneté, et le Gouvernement pourra en ajouter.

Avis défavorable à l'amendement n°118, dépourvu de portée normative.

Avis favorable à l'amendement n°169 rectifié ter, cette clarification rassurera.

Sagesse sur l'amendement n°167 rectifié ter. Il existe aujourd'hui un référentiel indicatif en phase de jugement, fixé à 21 mois et demi de rémunération pour un salarié comptant plus de 43 ans d'ancienneté, un autre en phase de conciliation, fixé à 24 mois pour un salarié avec 30 ans d'ancienneté. Le référentiel obligatoire prévu par la loi Macron fixait un plafond de 27 mois pour les salariés comptant plus de 10 ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de 300 salariés. L'indemnité légale étant parmi les plus faibles d'Europe, il est envisagé de la relever, mais cela nécessite une approche globale avec le plafonnement des dommages et intérêts.

Avis favorable à l'amendement n°228, qui vise à augmenter le nombre de cas où le référentiel ne s'appliquera pas.

La commission des affaires sociales avait émis un avis défavorable à l'amendement n°168 rectifié ter mais celui-ci a été modifié conformément à ses demandes, devenant l'amendement n°168 rectifié quater. À titre personnel, avis favorable.

Avis défavorable à l'amendement n°120, qui supprime deux apports de la commission des affaires sociales.

Avis défavorable à l'amendement n°181 rectifié. L'article 4 de la convention n 168 de l'Organisation internationale du Travail stipule que le travailleur ne peut être licencié sans motif valable. L'habilitation demandée par le Gouvernement ne remet pas en cause ce principe. L'employeur pourra seulement rectifier des erreurs secondaires, sous le contrôle du juge. Le législateur a reconnu l'an dernier un droit à l'erreur à l'administration à propos des plans de sauvegarde de l'emploi (PSE), qui est passé inaperçu : en cas d'annulation par le juge administratif d'une décision de validation ou d'homologation du PSE pour insuffisance de motivation, l'autorité administrative est autorisée à prendre une nouvelle décision suffisamment motivée dans un délai de quinze jours. Pourquoi ne pas reconnaître le même droit à l'erreur aux employeurs ?

Avis défavorable à l'amendement n°197 qui supprime purement et simplement les apports de la commission des affaires sociales.

L'amendement n°229 supprime un apport de la commission mais élargit l'habilitation à deux sujets importants : celui des motifs contaminants, qui peuvent faire tomber toute une procédure de licenciement même si elle repose sur une cause réelle et sérieuse par ailleurs - le professeur Ray a souligné devant nous les graves conséquences que pourrait avoir la jurisprudence de la Cour de cassation - et celui de la requalification d'un CDD en CDI. Sagesse.

Les auteurs de l'amendement n°41 rectifié rappellent avec raison l'hétérogénéité des délais de contestation des licenciements, qui varient de deux mois à cinq ans. Une harmonisation est nécessaire. La commission s'est voulue cohérente avec ses positions passées : six mois suffisent pour savoir si l'on veut former un recours. Augmenter le délai de prescription ne protège pas nécessairement les salariés mais apporte toujours de l'incertitude, ce qui nuit à l'attractivité de notre pays. Avis défavorable.

Avis défavorable aux amendements identiques nos193 et 238. Six mois suffisent. La loi de sécurisation de l'emploi de 2013 a fixé à deux mois le délai de recours pour contester l'homologation ou la validation d'un PSE, ce qui n'a pas posé de difficulté particulière.

L'amendement n°171 rectifié ter, qui élargit le champ de l'habilitation, est en cela contraire à l'article 38 de la Constitution. Retrait ou avis défavorable.

Quant à l'amendement n°170 rectifié ter, retrait ou avis défavorable. Tenons-nous au texte de la commission, et espérons un accord entre le Gouvernement et les partenaires sociaux.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Le Conseil constitutionnel a admis le principe de la barémisation des dommages et intérêts, la sécurisation des licenciements obéissant à un motif d'intérêt général, favoriser l'emploi. Notre débat n'est donc pas juridique.

Je m'en tiendrai à émettre un avis favorable aux amendements nos76 rectifié, 40 rectifié bis, 117, 161, 194 rectifié, 119 et 118, pour les raisons déjà dites.

Avis favorable à l'amendement n°169 rectifié ter : il va de soi que l'indemnité de licenciement n'est pas comprise, mais cela va mieux en le disant !

Avis défavorable à l'amendement n° 167 rectifié ter, qui limite nos possibilités.

Avis favorable à l'amendement n°168 rectifié quater, une précision logique.

Avis défavorable aux amendements nos120 et 181 rectifié, comme aux amendements nos197 et 41 rectifié.

Retrait de l'amendement n°193, au profit de celui du Gouvernement ?

Avis défavorable à l'amendement n°171 rectifié ter qui est hors champ, ainsi qu'à l'amendement n°170 rectifié ter.

L'amendement n°76 rectifié n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos40 rectifié bis, 117, 161 et 194 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°118 n'est pas adopté.

L'amendement n°169 rectifié ter est adopté.

L'amendement n°167 rectifié ter n'est pas adopté.

M. Jean Desessard.  - L'amendement n°228 part d'un bon sentiment, mais introduire la notion de « faute d'une exceptionnelle gravité », on réintroduit l'appréciation subjective du juge. Autant en rester à la notion de cause réelle et sérieuse... Je m'abstiendrai.

M. Olivier Cadic.  - Vous ne m'avez pas répondu, madame la ministre, sur la volonté de relever le plancher des indemnités. Les organisations patronales rappellent qu'elles s'ajoutent à beaucoup d'autres dépenses liées au licenciement... Nous attendons des clarifications.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Nous déciderons à la fois du relèvement de l'indemnité légale et du plafonnement. Je rappelle que l'indemnité légale concerne tous les licenciements, tandis que des dommages et intérêts ne sont accordés qu'en cas de condamnation. On peut augmenter raisonnablement la première, tout en donnant plus de visibilité sur les seconds.

Mme Annie Guillemot.  - Mme la ministre a parlé d'équité. On plafonne les indemnités de licenciement mais pas les retraites chapeaux ni les parachutes dorés !

M. Alain Milon, rapporteur.  - C'est fait !

Mme Annie Guillemot.  - Ce sont toujours les salariés qui trinquent, pendant que le PDG de Dexia empoche 1,7 million d'euros à son départ. Mme Bricq veut objectiver : chiche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mmes Dominique Gillot, Gisèle Jourda, Marie-Noëlle Lienemann et M. Martial Bourquin applaudissent également.)

L'amendement n°228 est adopté, de même que l'amendement n°168 rectifié quater.

L'amendement n°120 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos181 rectifié et 197.

L'amendement n°229 est adopté.

L'amendement n°41 rectifié n'est pas adopté.

Mme Françoise Laborde.  - Le Gouvernement m'a demandé de retirer l'amendement n°193 au profit du sien qui est le même. Je veux bien lui faire plaisir...

L'amendement n°193 est retiré.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Je voterai l'amendement n°238 du Gouvernement, un moindre mal.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°238, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

Les amendements nos171 rectifié ter et 170 rectifié ter sont retirés.

M. le président.  - Nous avons examiné 77 amendements aujourd'hui, il en reste 86.

Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 27 juillet 2017, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit vingt-cinq.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du jeudi 27 juillet 2017

Séance publique

À 9 h 30, à 14 h 30 et le soir

Présidence : M. Claude Bérit-Débat, vice-président M. Jean-Pierre Caffet, vice-président M. Thierry Foucaud, vice-président

Secrétaire : M. Jackie Pierre

Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social (n° 637, 2016-2017).

Rapport de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°663, 2016-2017).

Texte de la commission (n°664, 2016-2017).

Avis de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n°642, 2016-2017).

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°130 sur l'amendement n°8 rectifié bis, présenté par Mme Marie-Noëlle Lienemann et plusieurs de ses collègues, sur l'amendement n°55, présenté par M. Dominique Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et l'amendement n°73 rectifié bis, présenté par M. Maurice Antiste, tendant à tendant à supprimer l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :338

Suffrages exprimés :272

Pour :43

Contre :229

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Pour : 19 - MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mme Maryvonne Blondin, MM. Martial Bourquin, Henri Cabanel, Roland Courteau, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, MM. Jérôme Durain, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Annie Guillemot, Gisèle Jourda, M. Georges Labazée, Mme Marie-Noëlle Lienemann, M. Rachel Mazuir, Mmes Michelle Meunier, Marie-Pierre Monier, M. Franck Montaugé, Mme Évelyne Yonnet

Abstentions : 65

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Claude Bérit-Débat, Président de séance, M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Contre : 42

Groupe La République En Marche (30)

Contre : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Pour : 18

Groupe du RDSE (16)

Pour : 2 - MM. Guillaume Arnell, Pierre-Yves Collombat

Contre : 13

Abstention : 1 - M. Robert Hue

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 4

Contre : 3 - MM. Philippe Adnot, Jean Louis Masson, Alex Türk

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mme Aline Archimbaud, MM. Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°131 sur l'amendement n°137 rectifié, présenté par M. Dominique Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à modifier l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :337

Suffrages exprimés :336

Pour :21

Contre :315

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Contre : 84

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Claude Bérit-Débat, Président de séance, M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Contre : 42

Groupe La République En Marche (30)

Contre : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Pour : 18

Groupe du RDSE (16)

Contre : 15

Abstention : 1 - M. Robert Hue

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 3 - Mmes Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, M. Jean Desessard

Contre : 3 - MM. Philippe Adnot, Jean Louis Masson, Alex Türk

N'ont pas pris part au vote : 6 - Mme Aline Archimbaud, MM. Ronan Dantec, Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°132 sur l'amendement n°236, présenté par le Gouvernement, à tendant à modifier l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :319

Suffrages exprimés :217

Pour :30

Contre :187

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Abstentions : 84

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Claude Bérit-Débat, Président de séance, M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Contre : 42

Groupe La République En Marche (30)

Pour : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

N'ont pas pris part au vote : 18 - Mmes Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Éric Bocquet, Mmes Laurence Cohen, Cécile Cukierman, Annie David, Michelle Demessine, Évelyne Didier, MM. Christian Favier, Thierry Foucaud, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Gélita Hoarau, MM. Pierre Laurent, Michel Le Scouarnec, Mmes Christine Prunaud, Évelyne Rivollier, M. Dominique Watrin

Groupe du RDSE (16)

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

Abstentions : 15

Sénateurs non inscrits (12)

Contre : 3 - MM. Philippe Adnot, Jean Louis Masson, Alex Türk

Abstentions : 3 - Mme Esther Benbassa, MM. Ronan Dantec, Jean Desessard

N'ont pas pris part au vote : 6 - Mmes Aline Archimbaud, Corinne Bouchoux, MM. Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°133 sur l'amendement n°234, présenté par le Gouvernement, à tendant à modifier l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :338

Suffrages exprimés :322

Pour :136

Contre :186

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Pour : 84

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Claude Bérit-Débat, Président de séance, M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Contre : 42

Groupe La République En Marche (30)

Pour : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Pour : 18

Groupe du RDSE (16)

Abstentions : 16

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 4

Contre : 3 - MM. Philippe Adnot, Jean Louis Masson, Alex Türk

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mme Aline Archimbaud, MM. Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°134 sur l'article 2 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 336

Suffrages exprimés : 305

Pour : 200

Contre : 105

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Pour : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Contre : 84

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Claude Bérit-Débat, Président de séance, M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Pour : 42

Groupe La République En Marche (30)

Abstentions : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Contre : 18

Groupe du RDSE (16)

Pour : 14

Abstention : 1 - M. Robert Hue

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Pierre-Yves Collombat

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 3 - MM. Philippe Adnot, Jean Louis Masson, Alex Türk

Contre : 3 - Mme Corinne Bouchoux, MM. Ronan Dantec, Jean Desessard

N'ont pas pris part au vote : 6 - Mmes Aline Archimbaud, Esther Benbassa, MM. Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°135 sur l'amendement n°56, présenté par M. Dominique Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, l'amendement n°75 rectifié ter, présenté par M. Maurice Antiste et l'amendement n°155 rectifié quinquies, présenté par M. Georges Labazée et plusieurs de ses collègues, tendant à supprimer l'article 3 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après en engagement de la procédure accélérée, d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social

Résultat du scrutin

Nombre de votants :337

Suffrages exprimés :335

Pour :103

Contre :232

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 140

Abstention : 1 - M. François Pillet

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (86)

Pour : 81

Contre : 4 - M. Yves Daudigny, Mmes Corinne Féret, Catherine Génisson, Dominique Gillot

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Luc Carvounas

Groupe Union Centriste (42)

Contre : 42

Groupe La République En Marche (30)

Contre : 30

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Pour : 18

Groupe du RDSE (16)

Pour : 2 - MM. Guillaume Arnell, Pierre-Yves Collombat

Contre : 13

Abstention : 1 - M. Robert Hue

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 2 - MM. Ronan Dantec, Jean Desessard

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 7 - Mmes Aline Archimbaud, Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, MM. Joël Labbé, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier