Logement social : sur quels territoires, comment et pour qui demain ?

M. le président.  - (Applaudissements chaleureux) L'ordre du jour appelle le débat : « Logement social : sur quels territoires, comment et pour qui demain ? » (Demande du groupe UC).

Nous allons procéder au débat sous la forme d'une série de questions réponses dont les modalités ont été fixées par la Conférence des présidents. Je vous rappelle que l'auteur du débat disposera d'un temps de parole de dix minutes (y compris la réplique), puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.

M. Daniel Dubois, pour le groupe UC .  - (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UC) Depuis plusieurs semaines, le mouvement HLM, les professionnels du bâtiment et les associations de locataires tirent la sonnette d'alarme. La demande faite aux bailleurs sociaux de compenser la baisse des APL par la baisse des loyers les prive de 1,7 milliard d'euros de recettes.

Dès 2018, le pronostic vital de deux cents organismes sera engagé. Dans cinq ans, tous les bailleurs sociaux seront en grande difficulté. L'augmentation de 100 millions d'euros de cotisations au Fonds national d'aide à la pierre (FNAP) et le gel des loyers en 2018 provoquera un manque à gagner de 150 millions d'euros. Au total, 2 milliards d'euros manqueront.

À cela s'ajoute, dans le projet de loi de finances, l'augmentation de 100 millions des cotisations au FNAP, ainsi que le gel des loyers en 2018, pour un manque à gagner d'environ 150 millions d'euros. Ce sont donc 2 milliards d'euros de ressources qui vont manquer au logement social.

Si le projet de loi de finances pour 2018 est adopté en l'état, la construction neuve ralentira brutalement, y compris dans le secteur privé, tout comme les réhabilitations énergétiques et les crédits d'entretien.

Le Gouvernement ose parler d'un choc de l'offre. C'est plutôt un choc dans le mur ! Enfermé dans une logique purement comptable, il a besoin de 1,5 milliard d'euros pour équilibrer le budget. Or la mesure sur l'APL peut lui rapporter près de 2 milliards. Ce n'est pas l'amélioration des conditions d'emprunt, l'augmentation inapplicable des surloyers ou encore la vente de logements à des locataires impécunieux qui compenseront une telle perte.

Les arguments du Gouvernement sont connus : il y aurait un trop grand nombre d'opérateurs, et le capital circulerait mal, avec des organismes qui auraient des « trésors » sans construire. Donc le Gouvernement appauvrit les bailleurs et livre les plus fragiles à l'appétit des plus sordides... Ainsi, les capitaux circulent : circulez, il n'y a rien à voir ! Mais est-il bien conscient des conséquences de sa politique ? De son impact sur l'emploi ? Les HLM sont la source de 17 milliards d'euros de travaux par an, de 170 000 emplois non délocalisables, et souvent de manière contracyclique. Quid de la fiscalité ? Chaque année, les organismes HLM acquittent un milliard d'euros de TVA.

Faute de bailleurs, l'article 55 de la loi SRU va devenir inopérant. Le Gouvernement a-t-il conscience qu'il ne pourra plus y avoir de rénovation urbaine ? Le Gouvernement a-t-il conscience du risque encouru par les collectivités locales ? A-t-il conscience que ces organismes ne pourront plus participer à la rénovation urbaine alors qu'ils avaient financé 45 % du PLR 1, soit 45 milliards d'euros sur leurs propres fonds ? Le Gouvernement a-t-il conscience d'exacerber la fracture sociale et territoriale ? Baisser drastiquement l'APL déstructure tout le secteur HLM.

C'est un incroyable rendez-vous manqué. Est-ce ainsi que l'on réforme, sans concertation, à marche forcée, sans stratégie ?

Je déplore une immense méconnaissance du logement aidé, au coeur de notre pacte social. S'il doit être réformé, ce ne peut être au détour d'un article du projet de loi de finances.

Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Nelly Tocqueville.  - Tout à fait !

M. Daniel Dubois.  - Quel est le rôle du logement social ? N'est-ce pas d'organiser la mixité sociale ? (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOCR)

Réfléchissons à la manière de drainer l'argent privé vers le logement social. Ayons une stratégie sur la production massive de logements dans les zones tendues et aménageons le territoire, par exemple les centres-bourgs délaissés.

Réfléchissons à l'amélioration du traitement des demandes de logement, au bâti, marqué par la dé-densification depuis la loi de 2005 sur l'accessibilité, au foncier dont le prix est un enjeu majeur, alors que les deux tiers des nouveaux immeubles ne dépassent pas trois niveaux ; réfléchissons aussi à des logements plus accessibles et évolutifs ! Sachez que nous serons toujours disponibles pour penser et mettre en oeuvre une telle réforme globale !

Des solutions existent. Monsieur le ministre, nous vous demandons de réécrire l'article 52 du projet de loi de finances en lien avec tous les partenaires.

Le Sénat est très sensible à la problématique du logement qui affecte tous les territoires. Nous sommes disposés à débattre.

Ne déstabilisons pas un secteur dont l'enjeu social et économique est si important. Ne passons pas à côté d'une vraie réforme pour faire des économies à court terme. (Applaudissements nourris sur la plupart des bancs sauf sur les bancs du groupe LaREM)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires .  - Le Gouvernement ne cherche en rien à déstabiliser le secteur HLM. (Marques de désapprobation sur les bancs des groupes SOCR et CRCE) Je le dis avec d'autant plus de fermeté que nous ne cessons de discuter depuis le premier jour avec les organismes, parce que nous avons toujours eu à coeur de résorber le manque actuel de logements sociaux en France.

On a entendu sur le sujet tout et son contraire ! On a accusé le Gouvernement de vouloir détruire la loi SRU, d'en modifier les critères, de revoir le revenu d'éligibilité. C'est faux !

Oui, le Gouvernement a pleinement conscience des enjeux du logement social et de la rénovation urbaine, laquelle n'est pas financée uniquement par l'État, mais par les bailleurs eux-mêmes, par de la dette supplémentaire. Son engagement est de consacrer un milliard d'euros supplémentaire à l'ANRU, ce fameux milliard dont on entend parler depuis des années et qui n'avait jamais été budgété. Oui, le Gouvernement a conscience que le système n'est pas optimal.

Oui, il a conscience de l'immense diversité des bailleurs comme des bénéficiaires. Certains ont 15 % de locataires éligibles aux APL ; d'autres, 75 % à 80 % qui sont souvent en situation difficile. Oui, le Gouvernement est attaché à une méthode de discussion et de concertation. Dès le premier jour avec M. Mézard, nous avons rencontré les bailleurs sociaux. Je les vois tous les jours ou tous les deux jours. (M. Pascal Savoldelli s'exclame.) Je veux vous parler avec franchise.

La première piste de travail est d'améliorer le financement des logements sociaux. Aujourd'hui, c'est par du capital et de la dette venant des collectivités territoriales et de l'État, de la Caisse des dépôts notamment. (Murmures de protestation sur les bancs des groupes CRCE et SOCR) Nous proposons ainsi 2 milliards d'euros de capital. Nous leur proposons pour la première fois des prêts à taux fixe, avec remboursement in fine. Pour la rénovation énergétique, c'est 3 milliards d'euros. L'allongement des prêts, c'est 30 milliards d'euros, grâce à l'État et à la Caisse des dépôts.

Ce gain supplémentaire doit être mis au profit des locataires. Le système des APL est inflationniste et non pérenne. Dans les années soixante-dix, cette idée, consistant à passer d'une aide à la construction à une aide au logement était peut-être bonne. Ce n'est plus le cas. Elle a freiné le développement des logements sociaux. Et cela représente la moitié du budget de la défense nationale.

Un bailleur social est financé par de la dette. Il y a 4,5 millions de logements sociaux. Nous avons réfléchi à l'accession sociale, à l'acquisition par les locataires. Aujourd'hui, l'actif, le logement, est valorisé à zéro dans les comptes de tous les offices et de toutes les sociétés. Certains économistes disent que la valeur est de 230 milliards d'euros. Je ne pense pas que l'on puisse raisonner ainsi.

Environ 900 000 sont en catégorie PLS. Parmi les locataires, certains voudraient se porter acquéreurs. Chaque année, il y a 8 000 acquisitions. Si l'on portait ce nombre à 20 000, à raison de 100 000 euros le logement, cela ferait 2 milliards d'euros, soit 10 % des 20 milliards d'euros de loyers perçus annuellement par les bailleurs sociaux. (Mme Victoire Jasmin et M. Victorin Lurel protestent.) In fine, cela permet de réduire les loyers des locataires. C'est une piste que beaucoup de bailleurs sont prêts à explorer. Dans le projet de loi Logement, nous travaillerons à faciliter l'acquisition sociale.

Le regroupement que M. Dubois dénonce est appelé de leurs voeux par les bailleurs. Beaucoup sont organisés en GIE ou en groupes. Il faut rassembler afin que tous aient la capacité d'accueillir les publics plus sensibles. Cela leur donnera aussi in fine plus de capacités financières pour mieux construire.

J'en viens à l'article 52 du projet de loi de finances pour 2018 sur lequel nous négocions avec l'ensemble des bailleurs sociaux. Nous sommes en négociation avec eux. Au début, ils ont répondu que nos propositions ne leur convenaient pas. Le Premier ministre leur a écrit. Malgré des avancées, elles ne leur conviennent toujours pas. Mais de vraies pistes de travail se dégagent. Ils nous demandent d'évoluer sur la TVA. Nous y réfléchissons.

M. Dubois a évoqué plusieurs pistes. Nous en suivons déjà certaines, notamment la rénovation des centre-bourgs. Nous avons lancé un grand plan qu'Action Logement financera à hauteur de 1,5 milliard d'euros sur cinq ans.

M. Dubois a évoqué le prix du bâti. En effet, le prix du foncier est aujourd'hui de 30 % à 50 % des opérations. Nous allons prévoir un abattement fiscal massif pour que tout propriétaire soit incité, d'ici 2020, à vendre : 100 % pour le logement social, 95 % pour le logement intermédiaire, 60 % pour le logement privé...

M. le président. - Veuillez conclure

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Nous avons travaillé avec l'Association des paralysés de France sur le logement évolutif. Le vrai sujet de l'accessibilité des logements aux handicapés ne concerne pas seulement le neuf, mais tous les logements, y compris anciens. Mais les ministères, y compris le mien, sont loin d'être exemplaires sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

M. le président. - Dans la suite du débat, l'auteur de chaque question dispose de deux minutes maximum et le ministre de la même durée, pour sa réponse.

M. Abdallah Hassani .  - Je suis inquiet : il y a un déficit de logements sociaux à l'échelon national. Que dire de la situation en Outre-mer et particulièrement à Mayotte ? Le parc des logements sociaux est de 300 pour 300 000 habitants, alors que nous avons 10 000 naissances par an. Nous devons améliorer l'acquisition du foncier et lever les freins qui pèsent sur le développement de l'immobilier.

L'établissement foncier n'est doté que de 3 millions d'euros par an pour cinq ans alors qu'il nous faut construire 8 881 logements locatifs sociaux d'ici 2019. À Mayotte, cela ne couvre pas les besoins de la seule intercommunalité de Mamoudzou.

Comment le Gouvernement prendra-t-il sa part au développement du logement social à Mayotte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - La situation du logement social, compliquée en métropole, l'est plus encore à Mayotte. Trop souvent, les débats ont porté sur les structures institutionnelles et non sur les actions à mener.

Un travail est en cours pour évaluer la répartition des besoins. Nous réfléchissons à l'optimisation du déploiement. Un acteur massif est l'ANRU dans le cadre du nouveau projet de loi de finances. Là où l'on veut construire des logements, c'est aussi par cette agence qu'il faut passer et non par la seule ligne budgétaire unique, dotée par le ministère des outre-mer.

Mme Éliane Assassi .  - Merci au groupe UC d'avoir pris l'initiative de ce débat. À l'évidence, le projet de loi sur le logement précarisera encore les droits des locataires. Votre Gouvernement a annoncé une baisse brutale des subventions aux collectivités et aux aides à la pierre. Ajoutons le gel du taux du livret A qui finance la construction. Ces mesures concrétisent le désengagement de l'État.

Pourtant, 4 millions de nos concitoyens sont mal logés, 79 % des franciliens sont éligibles au logement social. Défendre le logement social, c'est une exigence républicaine. Diminuer le nombre de logements sociaux, est-ce votre réponse à la crise du logement ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Corrigeons les contre-vérités. La commission d'attribution des logements fera une simple proposition : elle proposera aux locataires de changer ou non de logement tous les six ans.

Mme Éliane Assassi. - Elle le fait déjà !

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Non. Jamais nous n'avons prévu de diminuer le montant d'éligibilité au logement social.

Nous augmentons les crédits sur le logement, nous construirons du logement très social, des pensions de famille. Les acteurs saluent le programme du logement du Gouvernement au bénéfice des mal-logés.

M. Pascal Savoldelli.  - Nous vérifierons !

Mme Valérie Létard .  - L'État veut maîtriser sa dépense publique, soit. Mais l'on s'y prend mal, car les effets collatéraux seront manifestes sur la fracture sociale. Je ne reviens pas sur les chiffres. Le PLRU en cours est à un milliard d'euros, ou 150 millions par an. Les fonds propres des organismes bailleurs seront diminués. Ils devront faire des choix.

Vous ne partez pas de zéro. Des sites ANRU ont été créés pour la gestion des copropriétés dégradées et la vente du patrimoine. Profitez du travail parlementaire ! Si l'on veut éviter que les cinq milliards d'euros annoncés ne soient que de l'affichage - parce que la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) ne sera pas en mesure d'assumer ses missions - il nous faut agir et reconstruire un article 52 qui trouve des solutions. Mieux vaut une vraie réforme de fond qu'un simple coup de rabot dans le budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE, SOCR, RDSE et UC)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Notre objectif n'est pas de casser les bailleurs sociaux. (Murmures sur les bancs du groupe CRCE et sur plusieurs bancs du groupe SOCR)

M. Philippe Dallier.  - C'est bien parti !

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - La modification du cadre financier, la participation à la diminution des APL : ce sont des efforts que nous demandons aux bailleurs sociaux, certes. Ils sont nécessaires et nous les prenons en compte.

Je le redis : l'article 52 est une base de discussion et de négociation. Je reste ouvert au débat, notamment sur l'ANRU qui ne peut pas être financée que par l'État.

Mme Annie Guillemot .  - Nous n'entendons pas les mêmes échos des bailleurs sociaux. La moitié des ménages du parc HLM vit en-dessous du seuil de pauvreté. Les organismes HLM gèrent des grands ensembles qui cumulent les handicaps. Sans les organismes HLM, où en seraient ces quartiers ?

Le logement n'est ni un luxe ni une marchandise. Le projet de loi de finances prétend que les HLM disposent de 11 milliards d'euros de trésorerie. En réalité, c'est 8 milliards. Le résultat d'exploitation, soit 2,2 milliards, est intégralement réinvesti, notamment dans la rénovation du parc. Parler de matelas ou de rente est un contresens.

L'article 52 du projet de loi serait mortifère pour les organismes HLM qui ne pourront plus investir. Cette ponction de 75 % sur leur capacité d'investissement se soldera par une division par quatre des rénovations et constructions ! Le Gouvernement propose aussi en guise de contrepartie le gel du livret A pour deux ans...

M. le président. - Votre question ?

Mme Annie Guillemot.  - J'y viens. Ce sont généralement les villes qui garantissent la dette des organismes. Les acteurs estiment cette dette à 10 milliards d'euros. Il serait plus raisonnable, n'est-ce pas, de surseoir à l'application de l'article 2 du projet de loi de finances pour 2018 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Avez-vous entendu dire précisément que l'article 52 aura des impacts néfastes pour les bailleurs ? Nous ne devons pas voir les mêmes...Dans le département du Rhône, trois organismes, qui ont une capacité d'autofinancement de 15 %, ont constaté qu'avec le package financier que nous proposons, ils pourraient passer à 14 % voire, pour l'un d'entre eux, progresser jusqu'à 17 % d'autofinancement. Cette réforme peut donc avoir des effets bénéfiques ! (Mme Annie Guillemot le conteste.)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - L'État et la Caisse des dépôts et consignations ont financé le logement social depuis quarante ans. Nous cherchons juste à faire preuve d'intelligence. (Expressions dubitatives sur les bancs des groupes Les Républicains et CRCE.)

Il faut aussi prendre en compte les conséquences de l'amélioration du financement.

M. Joël Guerriau .  - Je tiens à saluer à mon tour l'initiative de ce débat. Nous manquons de logements sociaux pour des ménages qui peinent à se loger. Pour atteindre l'objectif de 25 % de logements sociaux, certaines intercommunalités ont choisi de mutualiser, à horizon de 2025. Or la loi Égalité et Citoyenneté a fait supprimer cette démarche incitative et vertueuse.

La mutualisation intercommunale des objectifs prend en compte la diversité des territoires. Pourquoi ne pas la généraliser ? Cela enclencherait une dynamique autrement plus positive que des amendes pénalisantes.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Toucher à l'article 55 de la loi SRU ? Nous avons eu ce débat avec Jacques Mézard. Il peut y avoir un effet démoralisant à maintenir coûte que coûte les objectifs de la loi SRU. Inversement, si l'on ouvre la loi SRU, personne ne sait comment les collectivités réagiront : on peut craindre une reculade, compte tenu du manque de motivation de certains... Pour le moment, donc, nous n'y touchons pas mais ce débat est légitime.

M. Stéphane Ravier .  - Une tranche de vie : dans le village de Sainte-Marthe, 150 000 habitants, et 50 % de logements sociaux, au coeur du 14e arrondissement de Marseille, le préfet délégué à l'égalité des chances, la police nationale, les bailleurs, l'adjointe au maire de Marseille en charge de la politique de la ville, Arlette, et le maire de secteur - votre serviteur - sont là. Un seul pouvoir est absent, la presse.

Le préfet nous annonce tout de go et sans tabou que notre programme de restauration de la mixité sociale, le plus coûteux, 180 000 euros par logement, va droit à l'échec. La cité est régie par une organisation clanique ; les gitans ont chassé les Maghrébins. Le chef des gitans veut bien accueillir de nouvelles familles... gitanes ! L'adjointe du maire de Marseille s'émeut : « Stéphane, on ne va pas laisser les gens dans cette situation ! ». Je réponds : « humainement, non ». Mais sur place, en abandonnant pour une fois les versets de la religion laïque et obligatoire du « vivre-ensemble », le constat est clair : nous ne changerons rien. L'idéologie s'effondre devant la réalité. Concentration des programmes sur les mêmes territoires, communautarisme, démission des pouvoirs publics qui déversent en vain des sommes considérables...

M. le président. - Votre question ?

M. Stéphane Ravier.  - Comptez-vous enfin abandonner l'idéologie pour prendre en compte la situation de nos concitoyens dans les HLM ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Je ne partage absolument pas votre vision. Comment faire pour introduire de la mixité sociale ? Nous connaissons la situation de la politique de la ville, pratiquée depuis quarante ans...

M. Stéphane Ravier.  - Quel aveu !

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Cela passe par des opérations de terrain comme le dédoublement des classes de CP dans les zones REP+.

Je ne peux pas répondre sur des critères d'attribution des logements sociaux. C'est un vecteur de fracture supplémentaire plus qu'autre chose. Je vous laisse la responsabilité de vos propos.

M. Stéphane Ravier.  - Ce sont ceux du préfet !

Mme Maryse Carrère .  - Le département des Hautes-Pyrénées n'échappe pas aux difficultés en matière de logement social. L'article 52, qui a suscité tant de vives réactions de la part des bailleurs sociaux, est une vraie fausse bonne nouvelle pour les locataires, car il permet surtout à l'État de réaliser une économie substantielle grâce à la diminution des APL. Il n'en fait pas moins porter le poids sur les bailleurs sociaux.

À Tarbes, l'OPH évalue la perte à 4 millions d'euros, d'où une diminution de 90 % de son autofinancement. Il devra faire appel à son garant pour son encours.

Les programmes de rénovation devront être arrêtés, notamment ceux de rénovation thermique, ce qui engendrera des dépenses supplémentaires pour les locataires. S'il faut baisser les loyers pour une majorité de locataires, la commission d'attribution continuera-t-elle à privilégier les ménages les plus modestes ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - La difficulté est de porter cette réforme sans qu'elle impacte ni les plus faibles ni les plus forts. La TVA est une piste intéressante car elle résulte directement de l'activité. La diminution des APL, indispensable pour la pérennité du système, participe d'une réforme globale.

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Je regrette que la politique du logement social du Gouvernement s'inscrive dans une logique interventionniste et centralisatrice, qui resserre toujours plus l'étau sur les collectivités locales.

Dans les Alpes-Maritimes, comme en Île-de-France, nos collectivités se voient assigner des objectifs de production totalement irréalistes, inatteignables et décourageants, même pour les plus volontaires des élus, qui réalisent des efforts considérables. C'est contreproductif.

Les collectivités ne sont pas au coeur du dispositif alors que la politique de l'habitat est au coeur de leurs missions. Le maire est le premier sollicité par ceux qui demandent des logements sociaux. Donner plus de souplesse à l'application de la loi servirait à une meilleure adaptation à la diversité des territoires, à une meilleure adéquation entre l'offre et la demande...

M. le président. - Votre question ?

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Il faudrait définir une contractualisation entre les communes et le préfet avec des objectifs atteignables. Pourquoi ne pas prévoir une adaptation aux réalités locales, plus à même de créer un nouveau champ de l'offre ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Avec Jacques Mézard, nous avons choisi d'arrêter la surenchère. Le débat est compliqué sur la loi SRU. Le rouvrir quand il manque 1,5 million de logements sociaux en France serait contre-productif.

M. Philippe Dallier.  - La solution est de contractualiser.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Territorialiser la politique du logement nécessite des aménagements et une redéfinition des zones. Mais il faut le faire ; dans un village de l'Oise, il n'y a plus de centre-bourg mais que des pavillons ; dans un village du Bas-Rhin, j'ai vu l'inverse ; ils sont pourtant tous les deux en zone B2.

M. André Gattolin .  - Sur les 17,5 milliards d'euros consacrés au logement social, 9,5 milliards se rapportent à la construction à travers divers dispositifs incitatifs. S'il faut se réjouir de la hausse du rythme de construction, nous devons relever deux écueils de cette politique du logement social centré sur la construction. D'une part, les constructions ne sont pas assez ciblées ; elles ne tiennent compte ni des zones de tension ni de la taille des foyers - entre autres, l'augmentation des familles monoparentales. D'autre part, seule une entrée sur six dans le parc social s'effectue dans du neuf. La rotation reste trop faible dans le parc social. Ne convient-il pas de fluidifier les entrées et sorties ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Vous avez rappelé les chiffres : 4,5 millions de logements sociaux, 1,5 million de personnes en attente. La mobilité ne se décrète pas, elle ne passe pas par une loi ; elle se règle au plus près du terrain. D'où notre choix de passer par les commissions d'attribution des logements. Tous les six ans, s'il y a eu un changement de situation familiale, une solution sera proposée, qui pourra être dans le parc social si le locataire continue d'en relever. Il faut faire vite. L'évolution des loyers est telle qu'un ménage dont les enfants ont quitté le foyer n'a pas intérêt à changer de logement si on ne lui propose que vingt-cinq ans après son entrée dans le logement social : son T3 lui coûtera plus cher que son T5.

M. Fabien Gay .  - Cinq euros d'APL en moins, c'est, pour certaines familles, un mois de goûter pour les enfants. Cette mesure rapportera 390 millions d'euros au budget de l'État. Dans le même temps, M. Le Maire annonce qu'il rend 400 millions aux 1 000 premiers contributeurs de l'ISF. Font-ils partie des 3 250 familles qui détiennent 150 milliards dans les paradis fiscaux selon Le Figaro ?

Votre mesure crée une inégalité insupportable car les bailleurs seront plus réticents à loger les bénéficiaires d'APL. Quand allez-vous retirer ce décret insupportable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - C'est un décret d'exécution budgétaire pour 2017 - un budget que nous n'avons pas décidé.

Mme Éliane Assassi.  - Nous non plus !

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Cette baisse était déjà programmée. (On se récrie sur les bancs du groupe SOCR.) La réforme que nous portons est plus vaste. Par exemple, est-il juste que l'établissement des APL se fonde sur les revenus de l'année « n-2 » ? Prévoir une vraie réactivité - pour en faire bénéficier les personnes qui se retrouvent au chômage, voilà une réforme intelligente.

M. Claude Kern .  - Un projet de territoire en matière de logement, pour être opérationnel, doit être élaboré en partenariat avec les collectivités locales. Montée de l'intercommunalité et contraintes sur les finances publiques ont un impact important sur la politique structurante du logement. Le rezonage restrictif en matière de PTZ et de Pinel se soldera par moins d'attractivité pour les territoires ruraux.

Que comptez-vous faire pour participer activement à la réduction de la fracture sociale et territoriale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Oui, les collectivités locales jouent un rôle important. D'ailleurs, le permis de construire demeure aux mains des maires.

Le PTZ et le dispositif Pinel, dont la fin était prévue pour le 31 décembre 2017, ont été reconduits pour donner de la visibilité aux acteurs en zone dense comme en zone détendue. Reste que nous devons changer d'instruments. Dans le village de l'Oise que j'évoquais tout à l'heure, les dispositifs fiscaux n'ont pas fonctionné : ils ont abouti au dépeuplement du centre du village.

M. Joël Labbé .  - Le Gouvernement a recentré les dispositifs Pinel et PTZ sur les zones tendues. Beaucoup d'intercommunalités ne pourront pas mettre en oeuvre leurs politiques locales d'habitat et respecter leurs obligations SRU. Comment concilierez-vous la demande des zones tendues et l'accompagnement des zones non-tendues ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UC)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - À terme, toute la politique du logement devra être territorialisée. Dans les zones tendues, il faut construire plus vite, moins cher et plus dense. Construire des pavillons autour des gares du Grand Paris serait un non-sens urbanistique. Dans les zones détendues, l'accent doit être mis sur la rénovation plutôt que sur la construction. D'où la prolongation du PTZ sur l'ancien. Cela dit, ce sont des généralisations ; chaque territoire a ses spécificités.

Pour avoir passé de longues années à travailler sur l'attractivité économique des territoires, je sais qu'elle repose, pas seulement sur le logement, mais sur le triptyque emploi-logement-transport.

Mme Viviane Artigalas .  - La baisse injuste des APL touchera 6 millions de ménages et fera perdre des recettes aux offices HLM, compromettant leurs efforts de rénovation. Dix-neuf organismes de logements sociaux ont suspendu provisoirement leurs investissements en Midi-Pyrénées. Le secteur du bâtiment est lui aussi fragilisé, la transition écologique également avec des travaux de rénovation thermique compromis. La politique du logement social est économique mais aussi culturelle. Nous, nous voulons une société solidaire. La décision du Gouvernement, couplée à la baisse des aides à la pierre, aura un impact sur l'économie locale. Comment en maîtriserez-vous les effets ? Comment comptez-vous répondre à l'exigence de logements de qualité ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - La réforme est ambitieuse, compliquée ; elle nécessitera beaucoup de discussions. Nous prendrons en compte toutes les inquiétudes ; en revanche, ce que nous proposons n'est absolument pas de ponctionner les offices de 1,7 milliard d'euros.

Un exemple : nous proposons 3 milliards de prêts avantageux pour la rénovation énergétique, plus 600 millions d'euros de prêts encore plus avantageux dont la bonification est à la charge de l'État. En rénovant, on réduit le coût des charges et on dégage des ressources pour construire et rénover ; il est juste que si les charges des offices baissent, les organismes contribuent à l'amélioration du système global qui comprend les APL.

M. Daniel Laurent .  - Je suis surpris par l'unanimité qui se dégage dans l'hémicycle contre cette réforme. À mon tour d'enfoncer le clou. Votre politique aura pour résultat moins d'investissement et moins d'emploi. Les garanties d'emprunts représenteront un risque supplémentaire pour les collectivités. Les pertes financières seront énormes. Si vous ne voulez pas ruiner les bailleurs sociaux, retirez cette réforme.

Les obligations de la loi SRU sont manifestement difficiles à remplir en Charente-Maritime : certaines communes n'ont plus le droit de préemption, elles se situent hors des zones d'aide et le coût du foncier s'est envolé. Une adaptation des objectifs aux territoires ne serait-elle pas plus efficace ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - L'impact de l'article 52 doit être évalué dans le cadre global de notre réforme et, notamment, des regroupements. Si l'État finance l'efficacité énergétique, il est logique que les bailleurs sociaux redistribuent le gain qui en résulte.

La vente en accession sociale à la propriété peut représenter une source de financement très intéressante : en vendant 20 000 logements à 100 000 euros, on toucherait à peu près 10 % de l'ensemble des loyers perçus.

En Charente-Maritime, on dénombre 25 000 logements sociaux, 10 000 demandeurs et 2 500 attributions par an. Pour un logement vendu, vous en construiriez deux ou trois. Regardez la réforme dans son ensemble.

M. Jacques Le Nay .  - Samedi dernier, les maires du Morbihan, lors de leur assemblée générale, ont rappelé les difficultés que nous posent les règles d'urbanisme de la loi ALUR, elles rendent la construction impossible dans les hameaux. Ne nous cachons pas derrière l'argument de la protection des terres agricoles. Les « dents creuses » sont des bouts de jardin ou de terrain tout à fait inadaptés à l'activité agricole ; ils sont déjà raccordés aux réseaux financés par les communes.

Le mode de calcul pour le nombre de logements sociaux, parce qu'il prend en compte l'ensemble des résidences principales de la commune, pénalise les communes étendues. Les maires souhaitent une évolution en urgence de la loi ALUR pour atteindre les objectifs fixés dans la loi SRU. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Philippe Pemezec applaudit aussi.)

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Ingénieur agronome, je sais que lutter contre l'artificialisation des terres agricoles ne se mène pas en centre-bourg. Nous n'avions pas identifié le problème posé par la loi ALUR et les dents creuses, nous pourrons y travailler dans le projet de loi Logement. Engageons une discussion en amont de sa présentation en conseil des ministres mi-décembre et de son examen par le Parlement au premier trimestre 2018.

M. Franck Montaugé .  - Le modèle financier du logement social français est un tout qui repose sur un équilibre fragile. Il est remis en question par la baisse des APL et des aides à la pierre, les conséquences de la nouvelle fiscalité de l'épargne sur le livret A, l'augmentation du coût de production des logements et la diminution de la capacité d'intervention des collectivités. Par quel nouveau modèle le Gouvernement compte-t-il le remplacer ? Personnellement, je ne souhaite pas changer de modèle mais le renforcer. Quelle péréquation envisagez-vous ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Je ne crois pas au big bang ; je déteste les équilibres instables. Le livret A est une bonne source de financement. Néanmoins, son taux est variable et, surtout, quand il est très bas, il coûte très cher aux bailleurs sociaux qui empruntent 1 à 1,2 % de plus que ce taux. D'où sa stabilisation.

Nous continuerons à alimenter le FNAP mais l'important n'est pas là. Avec des ventes en accession sociale à la propriété, 20 000 à 30 000 ventes par an, on pourrait l'abonder de manière stable.

M. Guillaume Chevrollier .  - Avec le projet de loi de finances pour 2018, la baisse imposée des loyers représente une baisse de 50 à 130 euros par locataire éligible aux APL, soit pour les bailleurs sociaux de mon département, la Mayenne, une baisse de 7 millions d'euros des recettes. Cela aura un impact sur l'entretien des bâtiments, les entreprises de construction, l'État via la TVA, et, surtout, les locataires, la rénovation de leurs logements et de leur cadre de vie.

Monsieur le ministre, les bailleurs sociaux dans les territoires ruraux sont ceux qui permettent le lancement d'opérations privées, notamment la rénovation des centre-bourgs.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Les contreparties aux bailleurs sociaux, ce sont 3 milliards d'euros de prêts pour l'efficacité énergétique, la stabilisation du livret A, 2 milliards de prêts de haut de bilan bonifié, 4 milliards de prêts à taux fixe in fine, 40 milliards de rallongements de dettes ou encore 600 millions d'éco-PTZ.

M. Philippe Dallier.  - Formidable ! On se demande pourquoi ça ne leur convient pas !

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Dans votre département, un office est en difficulté ; pour lui, les outils ne sont pas adaptés. Nous le savons. C'est la raison pour laquelle il faut de la mutualisation et de la péréquation. Nous en discuterons pour régler les problèmes au cas par cas.

M. Jean-Claude Tissot .  - Le 6 octobre dernier, le président de la République a annoncé le maintien du PTZ en zone rurale, mais un plafonnement à 20 % du budget total contre 40 % aujourd'hui. Cela éloignera les familles les plus modestes de l'accession à la propriété. Les bailleurs sociaux ne veulent plus investir dans les territoires ruraux. Nombre de logements sociaux sont des passoires énergétiques. Pourrait-on envisager l'acquisition de ces bâtiments pour les communes ? L'accession sociale à la propriété passerait par des structures spécialisées ? Pouvez-vous préciser le dispositif ?

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Pour faciliter l'accession sociale, on peut simplifier les mécanismes dans le projet de loi Logement mais il faudra aussi traiter un autre sujet, la copropriété. Ils ne sont pas fanatiques de la copropriété -  ce n'est pas leur métier.

M. Philippe Pemezec.  - Ils savent faire.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - L'idée est de créer une structure qui aurait pour objet de gérer la copropriété.

Pour encourager la rénovation dans les zones rurales, nous avons choisi de ne pas toucher au PTZ dans l'ancien, contrairement au PTZ sur le neuf dont la quotité a diminué.

M. Antoine Lefèvre .  - Le rôle des bailleurs locaux est déterminant. Je connais bien l'office HLM de l'Aisne et de Laon : 200 réhabilitations thermiques par an, 50 millions d'investissements annuels, plus de 500 emplois non délocalisables. Les gros bailleurs ne s'intéressent qu'aux métropoles. Seuls les petits peuvent agir, attention aux regroupements... Les compensations sont très floues pour ces territoires fragiles. Comment pouvez-vous proposer une loi sans mesurer l'impact sur les territoires ? Vos mesures rendent déficitaires des offices, mettent en difficulté les collectivités qui en sont les garantes. Testez-les avant de les imposer ou renoncez-y.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Dans l'Aisne, il y a 40 000 logements sociaux, 5 000 demandes et 3 000 attributions chaque année, soit la fourchette la plus haute. Nous ne voulons pas casser une dynamique là où ça fonctionne bien. La TVA est une piste intéressante pour des offices qui, comme le vôtre, sont en perpétuelle activité.

Les financements que j'ai évoqués sont peut-être difficiles à appréhender mais ils ne sont pas flous ; et encore moins, pour les offices HLM à qui je les ai détaillés. Ils encourageront l'activité.

M. Jean-Raymond Hugonet .  - La loi SRU, avec son article le plus notoire, le 55, a modifié en profondeur le droit de l'urbanisme et du logement en France. Son application est comptable et dogmatique. La question du logement social doit s'apprécier de manière globale. Certaines communes possèdent peu de terrains constructibles. Elles peuvent avoir sur leurs territoires des espaces naturels protégés ou des zones d'intérêt patrimonial remarquable.

Quelles sont les mesures du Gouvernement pour parvenir à une analyse objective des capacités des communes ? On ne peut pas, sur le même espace, chercher à préserver l'environnement et le paysage dans un texte et imposer la construction dans un autre.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - Dans votre territoire, il y a 110 000 logements sociaux, 6 000 attributions et 32 000 demandeurs : le manque est énorme. Ingénieur agronome, je connais par coeur le sujet de l'artificialisation des sols - je l'ai dit. Dans les zones tendues, nous devons densifier ; construire des pavillons autour des gares du Grand Paris, c'est absurde. Si nous relâchons la pression sur les zones détendues, on risque de mettre bien des gens sur la touche. Je suis pour la territorialisation. En revanche, à ce stade, et compte tenu du déficit, nous n'avons pas touché à la loi SRU. Nous en reparlerons lors des débats sur le projet de loi Logement.

M. Philippe Pemezec .  - Si je ne suis pas « constructif », je veux être positif. Je ne comprends toujours pas votre politique : vous voulez construire, rénover, mais vous baissez les moyens. C'est démagogique et cela mettra les communes en difficulté. Où est la cohérence ? Vous assassinez les offices publics, croyant peut-être à un trésor caché...

Si vous voulez que les offices vendent, il faudra qu'ils reconstituent leur patrimoine. Dans ma commune, il y a 40 % de logements sociaux. Qui mieux que le maire peut attribuer le logement ? C'est maintenant le rôle du préfet, qui ne connaît pas le terrain. Il faut faire confiance aux élus locaux.

M. Julien Denormandie, secrétaire d'État.  - J'ai essayé d'expliquer le sens de cette réforme de façon didactique. Un Français sur six se dit en déficience de logement. Si je dois résumer mon propos en une phrase : un système qui repose sur les aides aux locataires n'est pas tenable : 18 milliards d'euros cette année - c'était 14, il y a peu, bientôt 24 ! - Cela ne peut pas tenir. La logique n'est pas purement budgétaire. Notre politique doit être moins dépendante des APL pour atteindre un système où l'on construit davantage.

M. le président.  - Merci, monsieur le ministre. Le débat est terminé.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président