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Table des matières



Conventions internationales (Procédure simplifiée)

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 35

Mme Éliane Assassi

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 36

ARTICLE 37

Mme Esther Benbassa

M. Maurice Antiste

Mme Éliane Assassi

Mme Catherine Conconne

M. Jacques Bigot

ARTICLE 38

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 39

Questions d'actualité

Remaniement (I)

M. Jean-Marc Boyer

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Rapport du GIEC (I)

M. Loïc Hervé

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Rapport du GIEC (II)

M. Thani Mohamed Soilihi

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Mineurs non accompagnés

M. Franck Menonville

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Avenir des retraites

Mme Michelle Gréaume

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Remaniement (II)

M. Patrick Kanner

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Violences sur les élus et les fonctionnaires territoriaux

M. Alain Marc

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Agriculture

Mme Christine Bonfanti-Dossat

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Plainte à l'ONU sur les essais nucléaires en Polynésie

Mme Lana Tetuanui

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer

Accueil des migrants en Loire-Atlantique

M. Ronan Dantec

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement

Rapport du GIEC (III)

Mme Angèle Préville

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Sécurité dans l'espace public

M. Pierre Charon

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Sécurité à Marseille

M. Bruno Gilles

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 40

ARTICLE 41

ARTICLE 42

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 42 BIS

ARTICLE 43

Annexes

Ordre du jour du mardi 16 octobre 2018




SÉANCE

du jeudi 11 octobre 2018

5e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

Secrétaires : Mme Catherine Deroche, M. Victorin Lurel.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Conventions internationales (Procédure simplifiée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de deux conventions internationales examinées selon la procédure simplifiée.

Le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine portant sur l'application de l'accord du 18 septembre 2007 entre la Communauté européenne et la Bosnie-Herzégovine concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier, est définitivement adopté.

Le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion au protocole contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, adopté à New York le 31 mai 2001, est définitivement adopté.

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et du projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 35

Mme Éliane Assassi .  - Cet article simplifie la procédure pénale avec l'ouverture des scellés même en l'absence du mis en examen et le recours à la visioconférence même sans accord de la personne mise en détention provisoire. Le texte de la commission des lois est revenu là-dessus, et c'est heureux, mais quel sort lui réservera la majorité En Marche à l'Assemblée nationale ?

Nous sommes dans la droite ligne du projet de loi Asile et immigration. Nous craignons que cette dernière mesure ne s'étende aux procédures de demandes d'asile. La détention provisoire est déjà largement dérogatoire et plus que discutable, puisque des personnes non jugées se retrouvent ainsi derrière les barreaux. La visioconférence, le jugement par écran interposé, la justice dématérialisée, c'est la fin du tribunal, de la présence de l'avocat auprès du juge et de son client; c'est une justice au rabais !

M. le président.  - Amendement n°152, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéas 9 à 12

Supprimer ces alinéas.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - L'assignation à résidence sous surveillance électronique est ordonnée pour une durée qui ne peut excéder six mois. Elle peut être prolongée pour une même durée après un débat contradictoire, sans que la durée totale du placement dépasse deux ans.

L'article 35 précise qu'il n'est pas nécessaire d'ordonner la prolongation tous les six mois de cette mesure.

Le maintien aussi long d'une personne présumée innocente sous un régime aussi contraignant, sans aucune intervention judiciaire, n'est pas acceptable. C'est une restriction très forte de la liberté d'aller et venir des personnes concernées.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.  - La personne assignée à résidence sous surveillance électronique a la possibilité d'obtenir la mainlevée de cette mesure à tout moment. Considérant en conséquence que cette simplification procédurale respecte les droits de la personne poursuivie, la commission a donné uvis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Cette clarification avait été appelée de leurs voeux par les praticiens lors de la concertation menée dans le cadre des chantiers de la justice. L'assignation à résidence est peu utilisée en pratique car ses règles sont peu lisibles. Seulement 292 personnes en bénéficiaient au 1er juillet 2017. Cette mesure ne revient pas sur la nécessité de prolonger l'assignation à résidence tous les six mois pendant la période de l'instruction, elle prévoit simplement que la prolongation ne sera pas nécessaire après la clôture de l'instruction. Dans tous les cas, l'intéressé pourra demander la mainlevée de la mesure. Avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Il est vrai que cette mesure est peu utilisée mais pour d'autres raisons que celles évoquées par la ministre, en particulier le manque de personnel.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Justement nous prévoyons dans le cadre de la présente programmation budgétaire de recruter 1 500 conseillers d'insertion et de probation supplémentaires !

L'amendement n°152 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°239, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 17

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° La dernière phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « Lorsqu'il s'agit d'un débat au cours duquel il doit être statué sur le placement en détention provisoire, il ne peut être recouru à un moyen de télécommunication audiovisuelle si la personne le refuse, sauf si son transport paraît devoir être évité en raison de risques graves de trouble à l'ordre public ou d'évasion. » ;

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement rétablit l'extension des possibilités de recours à la visio-conférence en supprimant l'exigence de l'accord de la personne en cas de débat portant sur la prolongation de la détention provisoire. 

Il remédie aux importantes difficultés rencontrées par les juridictions pour assurer les extractions de personnes détenues nécessaires pour qu'elles comparaissent devant le juge. En 2017, 12 000 des extractions judiciaires n'ont pu être réalisées, soit 15 % du total...

Le Gouvernement a tenu compte des avis émis par le Conseil national des barreaux et les syndicats de magistrats dans le cadre de la concertation. La visioconférence ne devra pas pouvoir être utilisée sans l'accord de la personne pour les débats contradictoires relatifs au placement initial en détention provisoire ; l'accord de la personne détenue ne sera en revanche pas obligatoire pour la prolongation de la détention provisoire. Nous avons fait évoluer notre texte en conséquence : tel est le sens de cet amendement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La commission des lois prend acte de l'évolution du Gouvernement mais reste défavorable. La détention provisoire, l'une des mesures du droit pénal les plus privatives de liberté, requiert un débat contradictoire. Un étranger placé en centre de rétention - pour une durée de douze ou treize jours - peut avoir accès physiquement au juge. Il doit en aller de même pour la détention provisoire, plus longue.

M. Jacques Bigot.  - Pour un avocat, être à côté de la personne, face au juge, ou à distance, en maison d'arrêt, ce n'est pas la même chose. Il doit pouvoir savoir qui est présent lors des échanges : seulement son client, ou son client et le juge... Et puis viendra le temps où l'on considérera que la procédure peut être écrite. Ce sera la dernière étape de la déshumanisation de la justice. Nous ne pouvons accepter cette extension de la visioconférence, même si la rédaction proposée à présent est un progrès par rapport à la version initiale.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Je salue l'examen minutieux des rapporteurs de la commission des lois mais il est vrai que les moyens mobilisés pour les extractions judiciaires sont considérables. Il ne paraît pas scandaleux de réfléchir à une meilleure allocation de ces moyens pour plus de sécurité. En outre, le Conseil constitutionnel a déjà écarté, dans les considérants que j'ai relus, les griefs tirés de la méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif, des droits de la défense et du droit au procès équitable. La préoccupation de la commission me paraît donc prise en compte par l'amendement gouvernemental.

M. Roger Karoutchi.  - Je suis un peu étonné du texte du Gouvernement. Lorsque j'étais rapporteur spécial du budget de l'asile et de l'immigration, j'étais plutôt favorable à la visioconférence pour limiter les extractions judiciaires. J'avais entendu les plaintes des forces de l'ordre sur la difficulté des extractions lors de visites en centres de rétention. En séance, on m'a affirmé que le face à face avec un juge était préférable. Je me suis laissé convaincre ; mais du coup, je ne comprends plus très bien : on ne pourrait pas prendre le risque de laisser un étranger dix ou quinze jours en centre de rétention mais on pourrait prendre le risque de laisser quelqu'un en détention provisoire beaucoup plus longtemps ! Peut-être faut-il en rester au dispositif actuel.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je rappelle que le texte prévoit la visioconférence uniquement pour le renouvellement de la détention provisoire, non pour la décision initiale qui sera toujours prononcée après une confrontation avec le juge. Enfin, monsieur Karoutchi, la loi Asile et immigration permet déjà de passer outre le refus de l'étranger de procéder par visioconférence. Donc, nous généralisons un mécanisme qui existe déjà. Nous mettrons les moyens nécessaires pour moderniser le parc de visioconférence, afin d'améliorer la qualité des communications.

Enfin, la visioconférence fonctionne déjà très bien outre-mer, en Guyane par exemple où elle est une nécessité en raison d'impossibilités physiques de se déplacer. Elle est utilisée en permanence et je n'ai pas le sentiment d'une violation des droits. (Mme Éliane Assassi s'exclame.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Le code pénal comporte sept motifs justifiant la détention préventive, parmi lesquels le risque d'éloignement, celui d'atteinte à la sécurité publique ou de pression sur d'autres personnes mêlées à l'affaire. La distinction entre la décision initiale de détention provisoire et son renouvellement est très discutable. La prolongation est plus grave que le placement initial : c'est une peine qui ne dit pas son nom... En fait, la procédure devrait être plus souple pour la décision initiale que pour sa prolongation ! D'où l'avis de la commission.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Permettez-moi de ne pas partager ce jugement. C'est loin de la décision initiale que le juge estime la pertinence des motifs justifiant une détention provisoire. Ensuite, le renouvellement n'est pas définitif mais revu périodiquement, à intervalles réguliers.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Il est vrai que c'est au moment du premier placement en détention que les vérifications les plus poussées sont faites.

Il n'en demeure pas moins que la non-présentation de la personne devant le juge limitera l'examen de son cas et réduira les droits de la défense. C'est un avocat qui vous le dit : c'est bien la présentation physique devant le juge qui constitue la réalité des droits de la défense.

L'amendement n°239 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°345, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Après l'alinéa 22

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article 884 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;

2° À la troisième phrase, les mots : « cinquième et septième » sont remplacés par les mots : « sixième et huitième ».

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Amendement de coordination.

L'amendement n°345, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°346, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

1° Alinéa 25, première phrase

Remplacer le mot :

accusé

par le mot :

avis

2° Alinéa 27, première phrase

Remplacer le mot :

accusé

par les mots :

demande d'avis

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Précision rédactionnelle.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°346 est adopté.

L'article 35, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°270 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme Costes, MM. Guérini, Guillaume et Gabouty, Mme Jouve, MM. Menonville, Requier, Roux et Vall et Mme Laborde.

Après l'article 35

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« N'est pas pénalement responsable la personne qui est réputée avoir été atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli ou gravement altéré son discernement ou empêché l'exercice de sa volonté sur le contrôle de ses actes. Des soins psychiatriques adaptés lui sont apportés. »

Mme Françoise Laborde.  - Les personnes atteintes de troubles ou maladies psychiques sont surreprésentées en prison. Cet amendement précise les circonstances dans lesquelles l'irresponsabilité pour troubles psychiques ou neuropsychiques peut être constatée.

L'article 122-1 du code pénal distingue l'abolition du discernement et du contrôle des actes d'une personne, et l'atténuation du discernement ou entrave au contrôle de ses actes. Seul le premier cas entraîne la reconnaissance d'une irresponsabilité pénale ; dans l'autre, la responsabilité pénale peut être engagée, avec une adaptation des peines prononcées le cas échéant.

Satisfaisante sur le plan théorique, cette distinction apparaît, en pratique, difficile à établir par les neuroscientifiques et les psychiatres. Il existe un consensus pour préciser qu'en cas de crise assortie d'hallucinations, de violentes angoisses, d'un sentiment de persécution, etc..., la capacité d'exercer sa pleine volonté dans le contrôle de ses actes est particulièrement affectée, en plus du discernement.

Une réflexion approfondie sur les failles du système actuel de prise en charge de ces personnes doit être conduite.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'irresponsabilité pénale n'est reconnue que si l'altération est totale. La difficulté que vous soulevez se pose dans les cas d'altération partielle. Depuis 2011, la responsabilité de ces personnes peut tout de même être recherchée. On ne peut donc pas exclure leur placement en détention.

Ce sujet important mérite en effet une réflexion approfondie. Peut-être faut-il réfléchir aux conditions de détention pour traiter ces troubles. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Cette loi est une loi de procédure pénale et ne modifie pas le fond. La totale irresponsabilité n'est justifiée qu'en cas d'abolition totale du discernement. Restons-en au dispositif actuel pour le moment.

Mme Françoise Laborde.  - Je le retire. Il y a le rapport sénatorial de M. Amiel. Nous reviendrons sur cette réflexion approfondie qui est en cours.

L'amendement n°270 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°271 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme Costes, MM. Gabouty, Guérini, Guillaume, Menonville, Requier, Roux et Vall et Mme Laborde.

Après l'article 35

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 132-41 du code pénal, il est inséré un article L. 132-41-... ainsi rédigé :

« Art. 132-41-...  -  Lorsque la santé mentale de la personne condamnée est reconnue comme sujette à des altérations identifiées, la juridiction peut décider que le sursis probatoire consiste en un suivi renforcé pluridisciplinaire et évolutif comprenant une obligation de soins psychiatriques faisant l'objet d'un suivi régulier par le service pénitentiaire d'insertion et de probation visant à fournir à la personne les meilleures chances d'améliorer sa santé et de pouvoir ainsi se réinsérer au sein de la société. »

M. Jean-Claude Requier.  - Les malades psychiatriques n'ont pas leur place en détention. Selon l'Observatoire international des prisons, près de 17 000 détenus en France présentent de tels troubles. Pourtant, en détention pénitentiaire, à l'exception des Unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), seuls des soins ambulatoires limités aux jours ouvrables et aux horaires de bureau sont dispensés, sur une base exclusivement volontaire de la part des malades.

C'est pourquoi, cet amendement développe le sursis probatoire incluant l'observance de soins psychiatriques adaptés.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'accompagnement socio-judiciaire de ces personnes souffrant de troubles psychiatriques est déjà prévu par le droit actuel. Votre demande est donc satisfaite. Retrait ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Les difficultés liées aux soins psychiatriques en détention sont réelles. Le Gouvernement attend la remise d'un rapport sur le sujet.

Nous manquons de personnel médical en prison et de places. Les ruptures de soins sont aussi problématiques, puisque les soins dispensés en milieu hospitalier peuvent être refusés par le malade, alors qu'il n'en va pas de même en milieu pénitentiaire. Retrait ou avis défavorable.

Mme Esther Benbassa.  - En juin, j'ai organisé ici une table ronde avec des psychiatres, des professionnels de santé et de l'administration pénitentiaire. Le problème est que l'on place en prison beaucoup de personnes qui devraient plutôt aller en hôpital psychiatrique. Or ils sont ingérables en prison. Telle est la conclusion de cette table ronde. Il faut faire quelque chose pour y répondre.

L'amendement n°271 rectifié est retiré.

ARTICLE 36

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - L'article 36 simplifie la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, dite « plaider coupable » à la française. Celle-ci implique en effet une reconnaissance des faits. Si elle est très peu utilisée, puisqu'elle ne représente que moins d'un pour cent des informations judiciaires correctionnelles, depuis qu'elle est entrée en vigueur il y a sept ans, c'est qu'elle ne correspond pas à un besoin véritable. C'est un mode de jugement dégradé et superficiel.

Or le texte supprime l'ordonnance de renvoi motivée du juge et étend cette procédure qui n'a pas fait ses preuves, en témoignant d'une foi aveugle et quelque peu naïve...

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à cet amendement de suppression de l'article 36. La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) est un outil juridique procédural parmi d'autres offert aux magistrats dans les cas, les plus simples, où les prévenus reconnaissent leur culpabilité. L'instruction concerne les dossiers plus complexes. Conservons cet outil dans l'arsenal juridique.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable sans surprise. Cet outil améliore la procédure. Le règlement contradictoire continuera à s'appliquer si le prévenu le souhaite. De plus, le délai de trois mois n'est pas systématisé, et le délai de quinze jours reste la règle. L'appel restera possible tandis que le texte crée une passerelle entre l'instruction et la CRPC.

L'amendement n°35 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°153, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 7

Remplacer les mots :

quinze jours

par les mots :

quarante-cinq jours

M. Éric Kerrouche.  - Si de nombreux praticiens se sont plaints de la longueur et de la rigidité des délais prévus lors de la clôture de l'instruction, il n'en demeure pas moins que le respect du contradictoire constitue une pièce maîtresse dans le déroulement du procès pénal car il est la condition de l'exercice effectif des droits de la défense.

Dans le droit en vigueur, le juge d'instruction doit communiquer le dossier au procureur de la République et en aviser en même temps les parties et leurs avocats, aussitôt que l'information lui paraît terminée. Le procureur de la République dispose alors d'un délai d'un mois si une personne mise en examen est détenue ou de trois mois dans les autres cas pour adresser ses réquisitions motivées au juge d'instruction ou copie de ce règlement définitif dans le même temps aux parties. Les parties disposent de ce même délai d'un mois ou de trois mois pour adresser des observations écrites au juge.

L'article 36 donne un délai de dix jours aux parties pour qu'elles annoncent si elles souhaitent recourir aux mécanismes de règlement contradictoire de l'instruction ou y renoncer.

En pratique, le mécanisme du règlement contradictoire, ne s'appliquera donc que si une partie l'a demandé. Cela oblige les parties à réagir dans des délais extrêmement contraints, ce qui retire au droit de la défense une réelle effectivité et porte atteinte à la protection du justiciable.

Nous proposons de laisser aux parties un délai plus raisonnable.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Après l'ordonnance de règlement de l'instruction du juge, la commission des lois a porté le délai à quinze jours pour les parties pour formuler des observations, contre dix jours dans le texte du Gouvernement. Il s'agit d'éviter les manoeuvres dilatoires réalisées au moyen de requêtes déposées au dernier moment. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le délai actuel est suffisant pour garantir les droits des parties. Un délai de quarante-cinq jours serait excessif. Nous voulons accélérer la procédure. Avis défavorable.

L'amendement n°153 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°347, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Après l'alinéa 17

Insérer trois paragraphes ainsi rédigés :

...  -  À la première phrase du dernier alinéa de l'article 173 du code de procédure pénale, les mots : « 175, quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « 175, quatrième à septième alinéas ».

...  -  Au huitième alinéa de l'article 116 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ».

...  -  À la seconde phrase du troisième alinéa de l'article 186-3 du code de procédure pénale, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « sixième ».

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Coordination.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°347 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°240, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 18

Rétablir les V à VII dans la rédaction suivante :

V.  -  Au deuxième alinéa des articles 41-4 et 778 du code de procédure pénale, les mots : « à la chambre de l'instruction » sont remplacés par les mots : « au président de la chambre de l'instruction ou à la chambre de l'instruction».

VI.  -  À l'article 41-6 et à la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 706-153 du même code, les mots : « la chambre de l'instruction » sont remplacés par les mots : « le président de la chambre de l'instruction ou la chambre de l'instruction».

VII. - Après l'article 170 du même code, il est inséré un article 170-1 ainsi rédigé :

« Art. 170-1. - Lorsque la solution d'une requête en annulation paraît s'imposer de façon manifeste, le président de la chambre de l'instruction statue sur cette demande, conformément aux dispositions de l'article 199, sans la présence des deux conseillers de la chambre.

« Si la décision qui s'impose consiste dans l'annulation des actes ou pièces de la procédure, elle peut, en cas d'accord du ministère public, être prise par ordonnance sans qu'il soit procédé à l'audience prévue par l'article 199.

« L'auteur de la requête en annulation peut cependant demander que celle-ci soit examinée par la chambre de l'instruction. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement rétablit les dispositions étendant la compétence du président de la chambre de l'instruction statuant à juge unique pour les contentieux en matière de saisie, de restitution et de rectification d'identité, tout en lui permettant de statuer à juge unique, le cas échéant sans audience, pour les requêtes en annulation dont la solution paraît s'imposer. 

Il s'agit de simplifications cohérentes. La rigidité des règles d'examen en formation collégiale des requêtes en annulation ne se justifie pas lorsque la nullité est évidente. Ces dispositions sont très attendues par les professionnels du droit. Cependant, pour tenir compte des inquiétudes de la commission des lois, il est proposé que si la personne auteur de la requête en restitution, en rectification ou en annulation le demande, celle-ci sera examinée par la chambre de l'instruction dans sa formation collégiale.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La commission des lois a fait sien un amendement du groupe socialiste maintenant la collégialité dans tous les cas. Avis défavorable.

L'amendement n°240 n'est pas adopté.

M. Éric Kerrouche.  - Nous avons des inquiétudes sur la nouvelle procédure du plaider coupable qui supprime parfois l'exigence d'une ordonnance de renvoi motivé. Celle-ci est pourtant utile. De même, la collégialité est une garantie utile. Nous regrettons que le Gouvernement souhaite revenir sur ces mesures. C'est pourquoi nous avons voté contre l'amendement du Gouvernement et voterons contre cet article.

L'article 36, modifié, est adopté.

ARTICLE 37

Mme Esther Benbassa .  - L'article 37 crée une amende forfaitaire délictuelle pour sanctionner l'usage de stupéfiants. Cette mesure, présentée il y a quelques mois par le Gouvernement comme un premier pas vers la décriminalisation, renforcera l'arsenal répressif, alors qu'il faut mener une politique de prévention et de santé publique en la matière. Plutôt que d'enfermer les consommateurs victimes d'addictions, accompagnons-les !

Depuis plusieurs années maintenant, je milite pour la légalisation contrôlée du cannabis ainsi que la décriminalisation des autres drogues comme l'héroïne, la cocaïne ou le crack, etc. Il est erroné de mettre le cannabis sur le même plan que les autres drogues. Le cannabis a déjà fait l'objet d'une légalisation contrôlée dans certains pays européens et états fédéraux américains, ainsi qu'au Canada aussi bien pour la consommation récréative et médicale. Malgré la répression accrue de la consommation du cannabis, elle augmente vertigineusement. On pourrait plus espérer une dépénalisation du cannabis comme dans d'autres pays. Plutôt que réprimer, il apparaît urgent d'accompagner les consommateurs.

Le candidat Macron avait promis la dépénalisation. Aujourd'hui, il rétropédale... Quel meilleur moyen de contrôler une consommation que de la rendre légale afin de la réguler et d'en prévenir les risques, tout en s'adonnant à la prévention en général et à l'accompagnement des addictés ?

Il est temps de poser avec courage et pragmatisme la question de la légalisation contrôlée du cannabis.

M. Maurice Antiste .  - L'amende forfaitaire délictuelle est une négation de l'individualisation de la peine. Or le texte l'étend à toute une série de nouvelles infractions, comme l'usage de stupéfiants.

Ensuite, cet article sème la confusion, alors que vous affichez un objectif de clarté. La hiérarchie des amendes forfaitaires nouvelles ne correspond pas à celle des peines délictuelles - par exemple entre la conduite sans assurance et la vente d'alcool à un mineur. Sur ce dernier délit, l'article L. 3353-5 du code de la santé publique dispense de peine le prévenu prouvant « qu'il a été induit en erreur sur l'âge du mineur, sur la qualité ou l'âge de la personne l'accompagnant ou encore sur l'état du malade » : comment cette restriction s'appliquera-t-elle avec la forfaitisation ?

Qui plus est, l'amende n'empêchera pas les poursuites devant le tribunal. Ce n'est donc pas une simplification mais bien plutôt une aggravation de la répression. Mieux vaudrait une contravention, et renforcer la prévention : je le proposerai par amendement.

Mme Éliane Assassi .  - Nombre d'associations - la Fédération addiction, le Syndicat de la magistrature, la Ligue des droits de l'homme, Médecins du monde, Aides - nous alertent que l'amende forfaitaire pénale contre l'usage de stupéfiants serait un net recul. Loin de vouloir renforcer les politiques de réduction des risques, le Gouvernement démontre là qu'il n'a d'autre finalité qu'une politique du chiffre, qu'il veut surtout rendre la procédure plus expéditive, plus répressive, sans considération aucune des pratiques, des diverses formes de vulnérabilités des personnes.

Un consensus se dégage pourtant en France pour limiter la politique répressive. Le CESE plaide pour l'ouverture d'un débat public sur les sanctions. La Commission nationale consultative des droits de l'homme préconise, dans son avis « Usages de drogues et droits de l'homme », de renforcer et de sécuriser les politiques de réduction des risques et de leur donner les moyens.

Ce texte, à l'inverse, place policiers et gendarmes en position d'évaluer la situation sociale et sanitaire du consommateur. Cette confusion est dangereuse, tant les consommations sont diverses et que la dangerosité s'explique moins par le caractère illicite ou licite des stupéfiants, que d'un ensemble de facteurs allant de l'environnement social, à la fréquence et au contexte de la consommation.

Avec ce projet de loi, la France resterait l'un des six pays européens qui sanctionnent l'usage du cannabis par une peine de prison ferme, au lieu de considérer ce sujet comme relevant de la santé publique.

Mme Catherine Conconne .  - Alors que la consommation de cannabis progresse sous des effets de mode, d'entrainement - elle fonctionne aussi comme un rite de passage pour des adolescents -, je crois qu'il faut ne céder ni à la candeur ni à l'angélisme. Une drogue reste une drogue. Certains proposent une légalisation ? Je les invite à se rapprocher de parents d'adolescents devenus dépendants, à visiter des hôpitaux psychiatriques qui regorgent de jeunes ayant sombré dans la schizophrénie après usage de cannabis. Ce n'est pas une substance neutre ou inoffensive, mais une drogue qui provoque des conséquences dramatiques, qui fait des dégâts dans le cerveau. L'État doit mettre en place toutes les mesures possibles pour dénoncer le danger de cette substance hautement toxique. (Applaudissements nourris sur les bancs des groupes Les Indépendants, RDSE, UC et Les Républicains)

M. Jacques Bigot .  - Nous parlons de santé publique, mais l'outil que nous propose ici le Gouvernement ne figure pas dans le code de la santé publique : le Gouvernement, constatant que les tribunaux surchargés ne poursuivent pas, propose une amende forfaitaire. Elle n'est pas forcément un mauvais outil, à condition qu'elle trouve sa place dans une stratégie d'ensemble, dont l'objectif serait de conduire les jeunes à ne pas consommer. Certains plaident pour la légalisation - personnellement je ne crois pas que c'est la solution. Maurice Antiste prône, lui, des stages plutôt que des amendes, qui pénaliseraient encore des familles déjà fragiles.

La consommation de cannabis n'est pas poursuivie, la solution réside dans une stratégie d'ensemble, plutôt que dans cette amende forfaitaire qui répond à une préoccupation surtout gestionnaire - plutôt que dans ce projet de loi d'équilibrage du budget de la justice.

M. le président.  - Amendement n°36 rectifié, présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

Mme Esther Benbassa.  - Le Gouvernement présente l'amende pénale forfaitaire comme une simplification, mais elle bafoue le principe d'individualisation de la peine et elle augmentera les inégalités. Le seul effet de l'amende sera d'aggraver par une sanction pécuniaire une situation souvent déjà précaire : nous savons que les comportements de consommation sont diversifiés et divergent entre les milieux paupérisés et les milieux mondains.

Cette amende pénale, en plus d'accroître le millefeuille législatif conte l'usage des stupéfiants, est inapplicable aux mineurs - ce qui lui enlève tout caractère dissuasif chez les populations les plus jeunes. Elle est rétrograde, ensuite, en mettant tous les stupéfiants dans le même sac ; ce qu'il faudrait, c'est revoir la liste des stupéfiants, arrêter de réprimer de la même façon le cannabis et l'héroïne, par exemple - mais c'est apparemment un tabou dans notre pays.

M. le président.  - Amendement n°81 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert, MM. Milon, Laménie, Cuypers, Dallier, H. Leroy et Lefèvre, Mme Lherbier et M. Revet.

Alinéas 3, 5 et 7, premières phrases

Supprimer les mots :

y compris en cas de récidive,

Mme Brigitte Micouleau.  - Cet article étend l'amende forfaitaire à de nouveaux délits, sur le modèle des amendes pour la conduite sans permis ou sans assurance, votées dans la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Nous proposons de supprimer cette procédure en cas de récidive, pour ne pas affaiblir la fermeté de la réponse pénale et de ne pas donner un sentiment d'impunité.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable aux deux amendements. La mise en place de l'amende forfaitaire répond à l'usage des stupéfiants. Elle tape là où ça fait mal en imposant de payer. La peine doit être dissuasive pour être efficace. L'action sur la capacité à acheter de stupéfiants est intéressante.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le président de la République, pendant la campagne présidentielle, ne s'est jamais prononcé pour une dépénalisation. En avril dernier, je me suis exprimée à l'Assemblée nationale. L'amende pénale forfaitaire est un outil supplémentaire de l'arsenal contre la drogue. Elle est efficace et n'empêche pas de mener une politique de santé publique ; et cette diversité d'outils permet l'individualisation.

Avec cette amende forfaitaire, nous voulons lutter contre la consommation de drogues dans l'espace public. Elle fera l'objet d'instructions générales auprès des procureurs, parmi les autres mesures de lutte contre l'usage des stupéfiants et pour prévenir les addictions. Actuellement, la consommation fait l'objet d'un rappel à la loi, ce n'est pas suffisant. Nous continuerons d'apporter des réponses pédagogiques et sanitaires, ainsi que des mesures de prévention et d'accompagnement.

Notre objectif est l'efficacité et la fermeté - plutôt que des économies, que je ne vois guère ici, puisque la justice sera toujours saisie.

Avis défavorable aux deux amendements.

L'amendement n°36 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°81 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement n°77, présenté par M. Antiste.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants prévu à l'article 131-35-1 du code pénal peut être proposé en lieu et place du paiement de l'amende forfaitaire minorée. »

M. Maurice Antiste.  - L'amende pénale forfaitaire ne change pas la méthode, ce qui est pourtant nécessaire, et risque de creuser encore les inégalités entre ceux qui auront les moyens de payer les amendes et qui ne le pourront pas.

Le maintien d'un stage de sensibilisation donnerait la possibilité de responsabiliser et sensibiliser les consommateurs de produits stupéfiants aux risques sanitaires et sociaux, en leur proposant une réponse éducative. La seule création de l'amende forfaitaire aboutit à un véritable permis de consommer sans amener à une réflexion de santé publique, alors que le stage de sensibilisation engage une réflexion sur les dangers de la consommation et crée des passerelles vers la démarche de soin. Cet amendement propose que l'amende peut être remplacée par un stage.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'article 43 vous donne satisfaction puisqu'il prévoit la possibilité de ces stages. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°77 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°83 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert, MM. Milon, Laménie, Cuypers, Bonhomme, Duplomb, Dallier, H. Leroy et Lefèvre, Mme Lherbier et M. Revet.

Après l'alinéa 7

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le délit prévu au premier alinéa, l'action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d'une amende forfaitaire d'un montant de 300 €. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l'amende forfaitaire majorée de 600 €. »

Mme Brigitte Micouleau.  - L'article 37 prévoit l'extension de la procédure de l'amende forfaitaire à de nouveaux délits. Il s'agit d'une des propositions du rapport Beaume et Natali qui évoque aussi les délits d'occupation des halls d'immeubles.

Je propose de fixer le montant de l'amende forfaitaire délictuelle pour l'occupation des halls d'immeubles selon le même barème : 300 euros, minoré à 250 euros et majoré à 600 euros.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Je comprends les motivations de cet amendement mais la commission des lois préfère l'utilisation de l'ordonnance pénale. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. La procédure de forfaitisation n'apparaît pas adaptée à ce type de situation, qui n'est pas évidente. En l'espèce, le trouble causé à autrui doit être établi. L'article 40 B du texte de la CMP sur la loi Elan porte précisément sur ce point.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Je précise que l'article 40 du projet de loi élargit le champ de l'ordonnance pénale, ce qui satisfait au fond les auteurs de l'amendement.

L'amendement n°83 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°84 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert et MM. Milon, Laménie, Cuypers, Bonhomme, Duplomb, Dallier, H. Leroy, Lefèvre et Revet.

Après l'alinéa 7

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  L'article 446-1 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le délit prévu au premier alinéa, l'action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d'une amende forfaitaire d'un montant de 300 €. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l'amende forfaitaire majorée de 600 €. »

Mme Brigitte Micouleau.  - Je le retire : c'est le même que l'amendement n°83 rectifié, mais sur la vente à la sauvette.

L'amendement n°84 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.

I.  -  Alinéas 9 à 13

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé : 

1° Au premier alinéa de l'article 495-17, après le mot : « délictuelle » sont insérés les mots : « fixée par la loi, qui ne peut excéder le montant prévu au premier alinéa de l'article 131-13 du code pénal, » ;

II.  - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article 446-1 du code pénal est complété? par un alinéa ainsi rédigé? :

« Pour le délit prévu au premier alinéa, y compris en cas de récidive, l'action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d'une amende forfaitaire d'un montant de 300 euros. Le montant de l'amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l'amende forfaitaire majorée de 600 euros. »

M. Alain Richard.  - La commission des lois a décidé d'aller toute de suite loin. L'amende forfaitaire est une bonne avancée lorsqu'il y a évidence. La commission des lois va trop vite en l'élargissant. Je retire le II de mon amendement qui n'est pas prioritaire. La répression nécessaire est plus efficace avec l'amende forfaitaire mais ne la généralisons pas trop vite.

M. le président.  - Amendement n°173, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 9 à 13

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

1° Au premier alinéa de l'article 495-17, après le mot : « délictuelle » sont insérés les mots : « fixée par la loi, qui ne peut excéder le montant prévu au premier alinéa de l'article 131-13 du code pénal, » ;

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je vous propose de revenir au texte initial, en supprimant l'extension souhaitée par votre commission des lois.

En effet, la catégorie des délits punis d'une peine d'amende recouvre des infractions très diverses pour lesquelles l'amende pénale forfaitaire n'est pas toujours souhaitable, lorsqu'elle n'est pas simple à appliquer.

À titre d'exemple, cette amende forfaitaire s'appliquerait à des faits d'outrage à une personne chargée d'une mission de service public ou encore au délit de dégradations légères par inscriptions sur les façades, véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain, ce qui ne semble pas opportun. Une telle extension va trop loin.

Attendons le retour d'expérience sur la forfaitisation de certains délits avant d'envisager toute généralisation aussi importante du dispositif.

M. le président.  - Amendement n°78, présenté par M. Antiste.

Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

M. Maurice Antiste.  - La création d'un recours systématique à l'amende forfaitaire minorée pour tout type d'infraction ne responsabilise pas l'auteur. Enfin, le paiement d'une amende ne permet en aucun cas de mettre en place un mécanisme de prévention de la récidive à travers la compréhension de la portée de l'acte commis.

M. le président.  - Amendement identique n°295 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux, Vall et Dantec.

Mme Josiane Costes.  - Nous ne souhaitons pas la généralisation de l'amende forfaitaire.

M. le président.  - La rectification de l'amendement n°244 rend l'amendement n°244 rectifié identique à l'amendement n°173 du Gouvernement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'amende forfaitaire est un outil supplémentaire pour traiter des situations peu réprimées parce que les poursuites paraissent trop lourdes à engager. Nous l'avons évoqué lors de notre débat sur l'efficacité des sanctions pénales. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable à l'amendement n°244 rectifié. Avis défavorable aux amendements identiques nos78 et 295 rectifié.

M. Jacques Bigot.  - Je voterai l'amendement du Gouvernement. L'amende pénale forfaitaire est une atteinte au principe de l'individualisation de la peine. Si l'expérimentation de stratégies en la matière est intéressante, la généralisation me paraît excessive Laissons d'abord l'expérimentation se tenir.

Les amendements identiques nos244 rectifié et 173 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nos78 et 295 rectifié.

L'article 37 est adopté.

ARTICLE 38

M. le président.  - Amendement n°154, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 6 

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Luc Fichet.  - Le Gouvernement souhaite favoriser le développement de la procédure de composition pénale. Dans ce but, le projet de loi prévoit de ne plus réserver le recours à cette procédure aux délits punis d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans. Une composition pénale pourrait ainsi être proposée pour tous les délits, quel que soit le quantum de la peine encourue.

La composition pénale était initialement conçue comme un mode alternatif simplifié destiné à répondre aux délits les moins graves.

La liste des infractions susceptibles d'être traitées par cette voie a été considérablement enrichie et simplifiée depuis 1999 par les lois de 2002 et 2004. La loi de 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a encore étendu son champ d'application, désormais très vaste.

Cette procédure peut s'appliquer aux délits punis d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans. En pratique, elle est surtout mise en oeuvre pour traiter des infractions simples en matière de délinquance urbaine de faible gravité telles que les atteintes aux biens.

Aussi, la préoccupation de notre commission d'éviter une audience devant le tribunal correctionnel est déjà satisfaite dans les faits.

En proposant la suppression de toute limite dans le seul but de faire du chiffre avec la réponse pénale, le projet de loi risque de dégrader ce dispositif.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Il existe pas moins de dix-huit mesures de composition pénale - dont l'amende, le stage, ou encore l'interdiction de paraître dans un lieu. La commission des lois est favorable à l'élargissement de l'usage de la composition pénale pour désengorger les tribunaux.

Je rappelle qu'il est impossible de placer quelqu'un en détention dans ce cadre. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Le parquet pourra recourir à la composition pénale pour tous les délits. Celle-ci ne peut avoir lieu que lorsque les faits sont de faible importance ; il s'agit de donner davantage de souplesse et d'appréciation au procureur de la République.

Le projet de loi améliore en outre le contenu de la composition pénale.

L'amendement n°154 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°155, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Luc Fichet.  - Cet article supprime l'exigence de validation de la composition pénale par le juge du siège lorsque, pour un délit puni d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à trois ans, elle porte sur une amende de composition pénale ou sur l'obligation de se dessaisir au profit de l'État de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit et dont le montant ne pourra pas excéder le plafond des amendes contraventionnelles, soit 3 000 euros. 

Cela est contradictoire avec la démarche de simplification et d'harmonisation et s'écarte des exigences constitutionnelles. La phase de l'homologation ne doit pas être minimisée. L'exigence d'un procès équitable garantissant l'équilibre des droits des parties, dont ceux des victimes, ne serait pas respectée sans elle.

En matière de délits et de crimes, la séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement concourt à la sauvegarde de la liberté individuelle. L'exécution de la composition pénale permet une inscription au casier judiciaire et une extinction de l'action publique à la seule discrétion du parquet et sans aucune intervention d'un magistrat du siège, y compris sur des faits très graves.

De telles mesures constituent des sanctions pénales. Leur exécution, même avec l'accord de la personne, requiert la décision d'une autorité de jugement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La personne qui comparaît est accompagnée d'un avocat qui est là pour rappeler les principes. Le texte du Gouvernement paraît acceptable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je comprends les intentions de cet amendement. Néanmoins, le projet de loi a été construit dans le respect des équilibres constitutionnels et procéduraux. Nous nous sommes appuyés sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

L'absence de validation par le juge concernera seulement les peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois ans. Nous visons les infractions de vol ou les contentieux routiers. Les juridictions l'ont beaucoup demandé lors des chantiers de la justice. Avis défavorable.

L'amendement n°155 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°348, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Alinéa 12

Remplacer le mot :

ces

par le mot :

ses

L'amendement rédactionnel n°348, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'amendement n°86 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°174, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 17

Rétablir le a dans la rédaction suivante :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « trois ans » ;

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le projet de loi supprimait, en matière de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), l'interdiction de proposer une peine de plus d'un an d'emprisonnement. La commission des lois a estimé excessive cette suppression, qui permettait de proposer une peine de cinq ans d'emprisonnement lorsque le maximum encouru est de dix ans.

Cet amendement propose de maintenir un assouplissement nécessaire et proportionné de la procédure de CRPC, très pratiquée et appréciée des professionnels, en prévoyant un seuil intermédiaire de trois ans.

Celui-ci paraît satisfaisant dès lors que la procédure de CRPC exige l'accord de la personne, l'assistance et la présence indispensable et obligatoire d'un avocat, ainsi qu'une homologation de la peine acceptée par un magistrat du siège. Par exemple, en cas de vol simple, le maximum de la peine sera de dix-huit mois.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cet amendement revient au texte initial du projet de loi. Avis favorable.

L'amendement n°174 est adopté.

L'article 38, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°296 rectifié, présenté par MM. Requier, Collin, Arnell et A. Bertrand, Mmes M. Carrère et Costes, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et M. Roux.

Après l'article 38

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article 459 du code de procédure pénale est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Il rend un jugement immédiat sur les exceptions d'incompétence juridictionnelle et sur les exceptions d'irrecevabilité de constitution de partie civile dont il est saisi, sauf s'il ne peut y être répondu qu'à la suite de l'examen au fond.

« Ces exceptions doivent être examinées avant toute autre exception, y compris les questions prioritaires de constitutionnalité.

« Le jugement immédiat n'est susceptible de recours qu'avec le jugement sur le fond. »

M. Jean-Claude Requier.  - L'article 459 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal correctionnel ne peut se prononcer qu'en fin d'audience sur les questions d'exception d'irrecevabilité et de constitution de partie civile. Ce report allonge inutilement les débats - on voit de vieux professeurs s'inviter à la barre pour commenter l'affaire, sans que le tribunal ne puisse soulever l'exception.

Pour rationaliser les débats devant les tribunaux correctionnels, nous proposons cette nouvelle rédaction s'inspirant de celle relative aux assises, et prévoyant également une articulation avec les questions prioritaires de constitutionnalité.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'amendement est vaste et technique. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. L'exigence de bonne administration de la justice est satisfaite puisque les manoeuvres dilatoires sont rendues impossibles actuellement - les exceptions d'incompétence étant d'ordre public, le tribunal peut les soulever à tout moment. Votre amendement oblige le tribunal à rendre un jugement sur les exceptions avant d'examiner le fond. C'est une complexité procédurale supplémentaire à laquelle je m'oppose. Avis défavorable.

M. Alain Richard.  - On pourrait laisser le choix à la juridiction, qui pourrait l'accepter afin de gagner du temps et de ne pas attendre la fin du litige.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le tribunal peut décider de s'organiser comme il le souhaite et d'examiner les exceptions d'incompétence dès le début.

M. Jean-Claude Requier.  - Soit, je le retire.

L'amendement n°296 rectifié est retiré.

ARTICLE 39

M. le président.  - Amendement n°55 rectifié bis, présenté par Mme Deromedi, MM. Allizard, Babary et Bazin, Mme Berthet, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, MM. J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mme Duranton, M. Émorine, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guené, Houpert, Hugonet, Huré et Husson, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin, Retailleau, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud.

Alinéa 1

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

dix

Mme Jacky Deromedi.  - L'article 388-5 du code de procédure pénale dispose que quand le prévenu ou la victime doivent être à nouveau entendus par le procureur de la République, ils ont le droit d'être assistés par leur avocat. L'article 39 précise le délai dans lequel l'avocat doit être convoqué et le délai avant l'accès au dossier. Cet amendement double les délais proposés par le projet de loi de cinq jours à dix jours pour ce qui concerne la convocation et de quatre jours à huit jours pour ce qui concerne l'accès au dossier.

Ce délai plus long apporte de nouvelles garanties au principe du contradictoire en laissant aux avocats des délais raisonnables pour l'exercice des droits de la défense.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Retrait ? La commission des lois est soucieuse d'assurer les droits de la défense, mais en l'espèce, les délais proposés par le texte sont parfaitement raisonnables.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage les observations du rapporteur. Les délais inscrits dans le texte reprennent ceux de l'information judiciaire. Rien ne justifie de les doubler. Retrait ?

L'amendement n°55 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°175, présenté par le Gouvernement.

A. Alinéa 2

Rétablir les II et III dans la rédaction suivante :

II.  -  Dans l'intitulé du paragraphe 3 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de procédure pénale, les mots : « et de la comparution immédiate » sont remplacés par les mots : « , de la comparution immédiate et de la comparution différée ».

III.  -  Au premier alinéa de l'article 393 du même code, les mots : « et 395 » sont remplacés par les mots : « , 395 et 397-1-1 ».

B. Alinéa 5

Rétablir le V dans la rédaction suivante :

V.  -  À l'avant dernier alinéa de l'article 393 et à l'article 393-1 du même code, après les mots : « à 396 » sont ajoutés les mots : « et à l'article 397-1-1 ».

C. Alinéa 10

Rétablir le VII dans la rédaction suivante :

VII.  -  Après l'article 397-1 du même code, il est inséré un article 397-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 397-1-1.  -  Dans les cas prévus par l'article 395, s'il existe contre la personne des charges suffisantes pour la faire comparaître devant le tribunal correctionnel, mais que l'affaire n'est pas en état d'être jugée selon la procédure de comparution immédiate parce que n'ont pas encore été obtenus les résultats de réquisitions, d'examens techniques ou médicaux déjà sollicités, le procureur de la République peut poursuivre le prévenu devant le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution à délai différé conformément aux dispositions du présent article.

« Le prévenu est présenté devant le juge des libertés et de la détention conformément aux dispositions de l'article 396, qui statue sur les réquisitions du ministère public aux fins de contrôle judiciaire, d'assignation à résidence avec surveillance électronique ou de détention provisoire, après avoir recueilli les observations éventuelles du prévenu ou de son avocat. Les réquisitions du procureur précisent les raisons justifiant le recours à la présente procédure, en indiquant s'il y a lieu les actes en cours dont les résultats sont attendus. La détention provisoire ne peut être ordonnée que si la peine d'emprisonnement encourue est égale ou supérieure à trois ans. L'ordonnance rendue est susceptible d'appel dans un délai de dix jours devant la chambre de l'instruction.

« L'ordonnance prescrivant le contrôle judiciaire, l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou la détention provisoire, rendue dans les conditions et selon les modalités prévues par l'article 396, énonce les faits retenus et saisit le tribunal ; elle est notifiée verbalement au prévenu et mentionnée au procès-verbal dont copie lui est remise sur-le-champ. Le prévenu doit comparaître devant le tribunal au plus tard dans un délai de deux mois, à défaut de quoi, il est mis fin d'office au contrôle judiciaire, à l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou à la détention provisoire.

« Si le prévenu placé sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique se soustrait aux obligations qui lui sont imposées, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 141-2 et de l'article 141-4 sont applicables ; les attributions confiées au juge d'instruction par ces articles sont alors exercées par le procureur de la République.

« Les procès-verbaux ou autres pièces résultant des réquisitions, examens techniques ou médicaux mentionnés à l'alinéa premier, sont versés au dossier de la procédure dès leur accomplissement et mis à la disposition des parties ou de leur avocat.

« Jusqu'à l'audience de jugement, le prévenu ou son avocat peuvent demander au président du tribunal la réalisation de tout acte qu'ils estiment nécessaire à la manifestation de la vérité, conformément aux dispositions de l'article 388-5, dont les alinéas deux à quatre sont applicables. Si le prévenu est détenu, la demande peut être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement.

« Pour la mise en oeuvre de la procédure de comparution à délai différée, la présentation de la personne devant le procureur de la République prévue par l'article 393, ainsi que sa présentation devant le juge des libertés et de la détention prévue par le deuxième alinéa du présent article peuvent intervenir dans un lieu autre que le tribunal si l'état de santé de celle-ci ne permet pas de l'y transporter ».

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - C'est original, cet amendement revient au texte du Gouvernement. Il restaure la procédure de comparution différée qui constitue une mesure de simplification absolument essentielle du projet de loi, souhaitée et attendue par les professionnels.

Comme l'indique le rapport de MM. Beaume et Natali, l'expérience des juridictions a montré que, très souvent, certaines enquêtes, dans lesquelles les gardes à vue se terminent par un déferrement, sont ouvertes à l'instruction pour la simple et bonne raison qu'une mesure de sûreté est opportune alors qu'il ne manque qu'un seul acte de pur complément à une enquête globalement achevée -  ce peut être la réponse à une réquisition ou encore le résultat d'une expertise médicale.

Dans ce cas, l'ouverture d'une information occupe du temps d'instruction sans bénéficier d'une quelconque plus-value de fond autre que celle d'attendre le versement de la pièce qui manque au dossier.

La procédure de comparution différée permettra le prononcé d'une mesure de sûreté avant le jugement, évitera l'ouverture d'informations judiciaires inutiles et des placements en détention provisoire de plusieurs mois.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis très défavorable. La comparution différée reviendrait, si l'enquête préliminaire n'est pas achevée, à renvoyer la personne devant le tribunal correctionnel en fixant, j'imagine, une date, qui serait plus ou moins lointaine, obligeant les parties à saisir le président du tribunal pour obtenir les éléments supplémentaires. Le risque potentiel est que l'affaire arrive à l'audience alors que le dossier est incomplet. Dans l'intervalle, la personne serait placée en détention provisoire.

De deux choses l'une : soit les éléments sont suffisants pour placer la personne en détention provisoire et il faut suivre la procédure classique, soit les conditions ne sont pas requises.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Ma présentation était incomplète. La procédure de comparution différée est limitée dans le temps, à deux mois. Elle évitera l'ouverture d'informations judiciaires et réduira la durée de la détention provisoire.

De plus, durant la comparution différée, les avocats pourront demander des actes nouveaux s'ils le souhaitent, ce qui garantit les droits des parties, tout en renforçant l'efficacité de la procédure.

M. Jacques Bigot.  - Cet amendement est la preuve que la réflexion du Gouvernement sur les rôles du procureur et du JLD demain et la disparition du juge d'instruction est inaboutie. L'idée sous-jacente est que l'instruction est trop lourde. La procédure d'enquête à la demande du parquet pourrait suffire à compléter un dossier qui ne l'est pas. On y viendra sans doute un jour...

Ce qui intéresse le Gouvernement en cette affaire est que le procureur pourra demander une détention préventive, une mesure de contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence. Or les prévenus représentent 40 % de la population carcérale et l'on sait combien les établissements pénitentiaires sont surchargés. Là où il faudrait régler ce problème, on l'amplifie avec ce mécanisme de la comparution différée. (Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, le réfute.)

Souvent, la détention provisoire est décidée pour répondre à la pression de la population qui estime que la personne doit être en quelque sorte pré-condamnée. C'est bien de renforcer les prérogatives du procureur de la République mais encore faut-il respecter le principe du contradictoire et revoir les pouvoirs des juges des libertés.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'objectif visé est précisément l'inverse ! La comparution différée limitera la détention provisoire.

Songez à une personne dangereuse. Aujourd'hui, soit le dossier est complet et elle passe en jugement, soit il faut ouvrir une information judiciaire et placer la personne en détention provisoire où elle restera six mois et plus en attendant le jugement. La comparution immédiate, ce sera un sas de deux mois durant lequel la personne pourra être placée en détention provisoire le temps que le dossier soit prêt à passer en jugement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Nous partageons le constat mais divergeons sur les solutions. Le débat est ouvert, peut-être trouverons-nous de quoi l'alimenter durant le trajet législatif de ce texte.

L'amendement n°175 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°156, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4, première phrase 

Après les mots : 

il peut décider, 

insérer les mots : 

sous réserve de l'accord du prévenu,

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le regroupement de plusieurs poursuites à l'occasion d'un seul jugement présente une utilité car le prévenu peut avoir intérêt à ce que sa situation soit examinée à l'occasion d'une audience unique.

Une telle proposition, approuvée largement au sein de l'institution judiciaire, est déjà souvent pratiquée sous la forme de comparution volontaire du prévenu.

Toutefois, en l'état du texte, les droits de la défense pourraient être amoindris car le regroupement pourrait être imposé dans le cadre d'une procédure de comparution inadaptée aux circonstances en raison de critères d'urgence et de complexité différenciés. Un délai de dix jours pour informer l'avocat et le prévenu, c'est bien court.

Conditionner le mécanisme du regroupement à l'accord du prévenu conciliera de manière plus satisfaisante l'efficacité des audiencements et les droits de la personne poursuivie.

Je ne doute pas que Mme la ministre fera preuve d'une attention bienveillante à l'égard de cette proposition renforçant quelque peu les droits des prévenus.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Le procureur a toute légitimité pour proposer de regrouper les affaires si cela est fondé. L'essentiel est de prévenir les avocats et de garantir les droits de la défense.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Monsieur Sueur, vous avez ma bienveillance mais l'avis est défavorable. Cet amendement crée une rigidité excessive. Les droits de la défense sont garantis car un délai d'information de dix jours est prévu, ce qui correspond au délai moyen de convocation avant une audience pénale. Cette mesure, très attendue par les praticiens, favorisera l'individualisation des jugements en ce que l'ensemble des éléments intéressant une personne sera pris en compte.

M. Jacques Bigot.  - Parmi les praticiens se trouvent les auxiliaires de justice qui assurent les droits de la défense...

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - En effet.

M. Jacques Bigot.  - Le procureur peut déjà décider de regrouper des affaires ; désormais, il pourra le faire dix jours avant les auditions pour lesquelles les citations n'ont pas encore été adressées. Il n'est pas sûr que, en un temps si court, les avocats puissent préparer leur argumentaire lorsque le cas est particulièrement complexe. Et l'on en verra certains venir à l'audience pour demander son renvoi.

L'amendement n°156 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°54 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, Allizard, Babary, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, MM. J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mmes L. Darcos et Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mme Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, M. Grand, Mme Gruny, MM. Houpert, Hugonet et Huré, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud.

Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :

...  -  À l'avant-dernière phrase du troisième alinéa de l'article 396 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

...  -  À la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 397-2 du code de procédure pénale, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

...  -  À l'avant-dernière phrase de l'article 397-7 du code de procédure pénale, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

Mme Muriel Jourda.  - Cet amendement reprend une disposition adoptée par le Sénat en janvier 2017, issue de la proposition de loi tendant à renforcer l'efficacité de la justice pénale, présentée par les sénateurs du groupe Les Républicains. Il s'agit d'allonger de trois à cinq jours la durée maximale de la détention provisoire à l'égard d'une personne déférée préalablement à une comparution immédiate si la réunion du tribunal est impossible le jour même.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement, déjà adopté par le Sénat en 2017.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Je comprends les problèmes qui se posent lorsque quelque chose se produit à la veille d'un week-end. En revanche, cette mesure fait courir un risque inflationniste en matière de détention provisoire.

L'amendement n°54 rectifié bis est adopté.

L'article 39, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 12 h 50.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 15 heures.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

J'appelle chacun à respecter son temps de parole.

Remaniement (I)

M. Jean-Marc Boyer .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Monsieur le Premier ministre, depuis dix jours, les Français sont dans une attente insoutenable. (Rires) Le remaniement paraît plus compliqué que prévu. N'en déplaise à votre porte-parole, les Français s'intéressent à la vie politique !

De mémoire de parlementaire, on n'a jamais vu une telle indécision, une telle confusion au sommet de l'État. Vous essuyez refus sur refus. La République en marche perdrait-elle son pouvoir d'attraction ? Ces difficultés traduisent-elles des dissensions entre vous-même et le président de la République ?

Vous avez suivi en spectateur le départ de deux ministres d'État, preuve que c'est bien votre politique qui est en cause. La démission du ministre de l'Intérieur n'est pas une « péripétie », surtout au regard de ses propos inquiétants sur les banlieues. Au-delà des jeux de chaises musicales, quelle ligne politique pour ce Gouvernement alors que la sécurité et le pouvoir d'achat sont au coeur des préoccupations des Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Je m'attendais à votre question, et ne suis pas déçu. (Rires) Il est vrai que les Français sont un peuple éminemment politique, qu'ils se passionnent pour la chose publique. Ils aiment dire, parfois vivement, quelles sont leurs attentes, leurs aspirations. Je ne suis pas sûr toutefois qu'ils se passionnent pour les petites choses de la politique... (Exclamations à droite)

M. Ladislas Poniatowski.  - Le ministère de l'Intérieur est une grande chose !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Ils se passionnent pour le fond, pour la façon dont nous envisageons l'avenir de la France, la libération des énergies, la transition énergétique, la réforme des retraites, dont Jean-Pierre Delevoye a exposé hier les grandes lignes.

M. Gérard Longuet.  - Mettez-le à l'Intérieur !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Selon la Constitution, le Premier ministre propose et le président de la République décide et nomme les membres du Gouvernement. Nous appliquons les dispositions constitutionnelles. Les ministres sont tout entiers à leur tâche. Lorsqu'on a l'honneur d'être ministre, on se doit de se consacrer à sa tâche sans état d'âme, diriger son administration, mettre en oeuvre les engagements du président de la République.

Les réseaux sociaux ne colportent que des rumeurs, que la presse reprend parfois : certaines m'amusent, d'autres me consternent, voire m'affligent. Les Français ne s'intéressent ni aux rumeurs, ni aux commentaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE ; M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)

M. Jean-Marc Boyer.  - Monsieur le Premier ministre, vous restez droit dans vos bottes, sourd aux attentes des Français. Ce remaniement devait donner un nouveau souffle ; il est coupé, voire asthmatique ! Il n'y a pas une feuille de papier à cigarette entre vous et le président de la République, avez-vous déclaré hier à l'Assemblée nationale. Voilà qui n'est pas rassurant. C'est exactement ce que François Mitterrand avait dit de sa relation avec Michel Rocard ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Rapport du GIEC (I)

M. Loïc Hervé .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (GIEC) vient de rendre un rapport très alarmant. Baisse du niveau des lacs alpins, recul des glaciers, évolution de la végétation : mon département de Haute-Savoie en est un exemple. Au-delà de la stratégie de moyen et long terme, quels moyens supplémentaires seront mobilisés par l'État dans le projet de loi de finances pour 2019 pour lutter contre le changement climatique et en assumer les conséquences ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE ; M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Entre les engagements sur le climat - et la France est à la pointe - et les engagements concrets, il faut être cohérent. Le budget de mon ministère, de 34 milliards d'euros, augmentera d'un milliard en 2019, pour l'investissement dans la transition énergétique et les transports.

Dans le cadre de la stratégie bas carbone, le développement des énergies renouvelables se fait en parallèle de la fermeture des centrales à charbon, avant 2022. Là aussi, c'est du concret. Les énergies renouvelables représentent 5,5 milliards d'euros dans le budget 2019. Citons aussi le crédit d'impôt transition énergétique, la TVA à 5,5 % pour les travaux d'isolation, les écoprêts à taux zéro, les moyens de l'Agence nationale de l'habitat qui bénéficient aux ménages modestes.

La prime à la conversion écologique des voitures, mise en oeuvre au 1er janvier 2018, est un énorme succès. Nous espérions 100 000 voitures, ce sera plus du double.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. François de Rugy, ministre d'État.  - Enfin, la ligne Genève-Annemasse ouvrira en 2019. Encore du concret ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Loïc Hervé.  - Le changement climatique comme la pollution de l'air procèdent des mêmes activités humaines. Il faut développer les transports propres, le fret, lutter contre le gaspillage énergétique, accompagner les entreprises industrielles pour réduire leur empreinte...

Mais l'État ne peut se contenter d'être l'ensemblier de politiques menées par d'autres.

M. Jean-François Husson.  - Très bien !

M. Loïc Hervé.  - L'État doit investir massivement, dans ses compétences strictes mais aussi dans les compétences partagées avec les collectivités locales. Il ne suffit pas de ne pas détourner le regard : il faut agir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains et sur quelques bancs du groupe Les Indépendants)

Rapport du GIEC (II)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Lundi dernier, le GIEC a remis son rapport sur les conséquences du réchauffement climatique. Le diagnostic est effrayant. Le réchauffement climatique progresse de 0,2 degré par décennie ; à ce rythme, nous pourrions atteindre 1,5 degré entre 2030 et 2052, avec des conséquences dramatiques : phénomènes météorologiques extrêmes, fonte des glaces, raréfaction de l'eau potable, risques sanitaires, pauvreté, perte de biodiversité...

La situation n'est pas désespérée mais implique une transition écologique au plus vite. Nous connaissons le volontarisme du Gouvernement dont témoigne, pour la deuxième année consécutive, la forte hausse du budget de la transition écologique et solidaire. Quelles mesures comptez-vous prendre en France et porter au niveau international pour convaincre les climatosceptiques et mobiliser les acteurs non étatiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Le rapport du GIEC vient nous rappeler que le dérèglement climatique n'est pas une hypothèse mais une réalité. Si l'on ne fait rien, la situation empirera. Notre avenir, celui des êtres humains sur la planète, est en jeu.

La France a pris la tête des pays ambitieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, lors du Conseil des ministres de l'environnement de l'Union européenne avant-hier, nous avons obtenu une position commune des 28 pour la prochaine COP24 à Katowice. Ce n'était pas gagné !

Sur les émissions de CO2 des automobiles, les positions divergeaient : les constructeurs prônaient une réduction de 20 %, la Commission européenne de 30 %, la France de 40 %. Nous avons trouvé un accord à moins 35 %, ambition qui sera renforcée dans le dialogue avec le Parlement européen. Voilà un exemple concret de notre politique. L'Europe est la bonne échelle pour peser sur l'évolution du monde en matière de dérèglement climatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mineurs non accompagnés

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Le nombre de mineurs non accompagnés pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance (ASE) des départements explose depuis 2015 : plus de 900 % d'augmentation pour les personnes se déclarant tels, plus de 74 % d'augmentation pour les mineurs confiés.

Dans la Meuse, on est passé de 14 en 2015 à 415 pour les neuf premiers mois de l'année. Ils représentent 15 % des mineurs pris en charge par l'ASE, pour un coût de 50 000 euros par an et par mineur - - soit 1,25 milliard pour les départements. La Meuse y a consacré 1,7 million d'euros en 2017, plus de 3 millions d'euros déjà cette année. Comment, dans ces conditions, respecter la contractualisation budgétaire ? La circulaire Taubira est obsolète et inadaptée. Quid du fichier central promis ? Les départements sont aux abois, leurs charges financières explosent. Allez-vous reconduire les financements exceptionnels de 2017 ? La solidarité nationale doit s'exercer au plus vite. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs des groupes Les Républicains, UC et LeIndépendants)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - En effet, le phénomène se fait sentir partout, même si certains départements sont en première ligne. La protection des mineurs non accompagnés est un impératif que nous partageons tous.

Néanmoins, il faut regarder la réalité en face. Le système actuel peine à faire face à l'afflux, mais il est aussi embolisé par des demandeurs qui se prévalent d'une minorité alors qu'ils sont majeurs. Il faut dissuader les départs depuis les pays d'origine, démanteler les réseaux de passeurs et accompagner les départements.

Nous sommes parvenus à un accord de qualité avec l'Assemblée des départements de France (ADF). La protection de l'enfance reste une compétence départementale ; politique migratoire et lutte contre la fraude sont du ressort de l'État, qui doit prendre ses responsabilités. Les fonds accordés aux départements pour le financement de l'accueil augmenteront en 2019.

Le fichier national des demandes sera mis en place en 2019 pour éviter les doubles ou triples demandes qui embolisent le système. Si la tendance se poursuivait, l'État aiderait les départements plus encore. Je pense aux Hautes-Alpes, confrontées à une situation particulière...

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Et le Nord !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - L'État prendra des dispositions spécifiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Avenir des retraites

Mme Michelle Gréaume .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE) Les lignes directrices de la future réforme des retraites ont enfin été dévoilées : fusion des 42 régimes actuels et mise en place d'une retraite par points qui va réduire les pensions et repousser, par un système de décote, l'âge de départ effectif à 63 ans.

Loin des mécanismes de redistribution et de solidarité, votre logique individualiste fait peser sur l'assuré tous les risques de sa future pension.

Vous accédez au rêve du grand patronat et des marchés en livrant le fabuleux magot des retraites aux intérêts du privé. Faute d'avoir les points nécessaires à une retraite digne, les salariés qui le peuvent devront recourir aux fonds de pensions et à l'épargne privée. Pour les autres, ce seront des pensions de misère. En Suède, le système par points a fait baisser de 30 % le niveau des pensions.

Alors que 1,5 million de seniors ne trouve pas d'emploi, reculer l'âge de départ à taux plein est une aberration.

Plutôt que de remettre en cause les principes de la sécurité sociale, pourquoi ne pas faire contribuer les revenus financiers des entreprises ? Créer des emplois et augmenter les salaires ? C'est cela, une politique progressiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Martine Filleul applaudit également.)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - La réunion d'hier avec Jean-Paul Delevoye et les organisations syndicales s'est déroulée dans un climat de confiance. Les propositions du Haut-Commissaire ont été particulièrement appréciées par les organisations syndicales car elles sont le reflet d'une concertation de six mois. Aucune organisation syndicale n'a osé tenir des propos tels que les vôtres. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Ladislas Poniatowski.  - Très bien !

Mme Éliane Assassi.  - Écoutez donc ceux qui sont descendus dans la rue !

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Toutes ont reconnu que le nouveau système apportera des garanties qui assurent de nouvelles solidarités. À aucun moment, il n'a été question de reporter l'âge de départ à la retraite. (Mme Éliane Assassi s'exclame.) La concertation avec les partenaires sociaux est fructueuse ; nous engageons une nouvelle phase, sur la gouvernance du futur système et les modalités de transition. Aucun retraité actuel, aucune personne partant dans les cinq ans suivant la promulgation de la loi ne sera touchée. La transition se fera sur le long terme. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs des groupes RDSE et UC)

Remaniement (II)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Un remaniement ne règle pas tous les problèmes - mais ce non-remaniement devient un problème pour l'image du pays. Plus que le casting, c'est la ligne politique qui préoccupe les Français. Les hésitations, les différences de vues qui vous sont prêtées avec le président de la République, l'absence de ministre de l'Intérieur, le départ forcé de certains - je note d'ailleurs que les bancs du Gouvernement sont bien clairsemés ! - cette confusion empêche de parler de l'essentiel.

Quelles sont vos intentions sur le pouvoir d'achat des retraités, sur la revalorisation de la prime d'activité au niveau SMIC, qui ne serait in fine que de 8 euros, sur le gel des salaires des fonctionnaires ? Je n'allongerai pas la liste mais ces questions auraient mérité un débat de politique générale.

Que va changer votre remaniement pour le quotidien des Français, de plus en plus nombreux à ne plus vous croire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Vous avez raison, aucun remaniement ne suffit à changer la donne politique. Votre propre expérience le confirme...

M. Xavier Iacovelli.  - Un peu d'humilité !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Les directives doivent être claires, la mise en oeuvre des politiques publiques ferme, nous sommes d'accord. C'est pourquoi les ministres sont à leur tâche.

M. Michel Boutant.  - À Lyon !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Il ne vous a pas échappé, monsieur Kanner, que le président de la République m'a confié l'intérim du ministère de l'Intérieur. Je l'exerce pleinement, avec toute l'attention requise, même si la situation n'a pas vocation à durer. Je rencontre tous les responsables de la sécurité publique, les acteurs du ministère de l'Intérieur, car je sais la sensibilité du sujet pour nos concitoyens et l'exigence d'une action très ferme.

Le président de la République a pris des engagements. Ils seront tenus en tout point, je suis là pour ça. C'est l'honneur de la politique.

Vous demandez ce qui change ? Depuis quelques jours, les Français reçoivent leur feuille d'impôt. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) Ils voient leur taxe d'habitation baisser, sauf quand les communes en ont augmenté le taux. (Mêmes mouvements.)

M. Michel Forissier.  - Et la CSG ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Dix-huit millions de Français sont désormais exemptés de taxe d'habitation. Voilà un acte concret. Je n'ai aucun état d'âme, et suis certain que vous non plus !

M. Patrick Kanner.  - Je ne suis pas convaincu par votre réponse, non plus que les Français, si l'on en croit les sondages. La théorie du ruissellement se transforme en goutte-à-goutte. Force est de constater que le président de la République n'est plus le maître des horloges, il n'a plus la clef et cela se voit ! C'est le temps des illusions et non plus des espoirs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Jean-Marc Todeschini.  - Très bien.

Violences sur les élus et les fonctionnaires territoriaux

M. Alain Marc .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Je reviens sur la tragédie du 27 septembre dernier à Rodez. Le directeur général adjoint des services de la ville de Rodez, Pascal Filoé, qui dirigeait la police municipale, a été lâchement assassiné par un individu qui avait auparavant plusieurs fois menacé des élus et des agents municipaux et avait été interpellé 42 fois.

Pascal Filoé est mort pour avoir accompli son devoir et pour avoir fait appliquer la loi... Vous étiez à ses obsèques, monsieur le Premier ministre.

Ce drame rappelle que les représentants de l'autorité, comme les élus, sont quotidiennement exposés à une insécurité grandissante. De telles exactions sont inacceptables dans un État de droit. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre face aux incivilités et à la violence, verbale ou physique, dont sont victimes ces agents qui sont les garants indispensables du bon fonctionnement de notre République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - J'exprime une pensée attristée et un hommage respectueux à la mémoire de Pascal Filoé, qui dirigeait les services de la police municipale, suscitant confiance et respect autour de lui. J'ai été bouleversé lors de ses obsèques et marqué par l'exceptionnelle dignité et l'exceptionnel courage de sa famille et de ses collègues.

Comment protéger ceux qui nous protègent ? S'ils sont soumis à tout instant à de l'irrespect, des incivilités, voire des violences, ou de l'agressivité, c'est le système entier qui se trouve fragilisé.

L'une des réponses est de ne rien laisser passer. Mme la garde des sceaux a envoyé à l'ensemble des procureurs une circulaire rappelant combien notre droit sanctionne durement ceux qui s'attaquent aux dépositaires de l'autorité publique. Il faut aussi des moyens. C'est un combat délicat car peut-être partons-nous d'un peu trop loin. Le budget 2019 traduit cet engagement avec le recrutement de 10 000 agents pour la sécurité, soit 2 000 par an en moyenne, compte tenu des effets de lissage.

Il ne faut pas laisser nos forces de l'ordre seules. Nos concitoyens doivent aussi protéger ceux qui nous protègent, dénoncer les incivilités, dire aux forces de police, aux gendarmes, aux sapeurs-pompiers qu'ils sont fiers d'eux. Peut-être est-ce optimiste, mais je crois que c'est au moins aussi important que les deux autres éléments clés que j'ai cités. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Alain Marc.  - Les élus du Sénat seront toujours aux côtés des forces de l'ordre pour les encourager. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe RDSE)

Agriculture

Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - Après la refonte ratée de la carte des zones défavorisées simples, après la baisse du budget de la PAC, l'humiliation des retraites agricoles, le rendez-vous manqué de la loi Agriculture et alimentation, vous voulez supprimer le dispositif d'exonération des charges patronales pour l'emploi de travailleurs occasionnels dans l'agriculture.

La perte est de 189 euros par mois pour un employeur. Au niveau national, ce sont de 144 à 178 millions d'euros alors que le travail saisonnier est plus de vingt fois plus cher qu'en Allemagne et en Espagne. En Lot-et-Garonne, cela concerne 27 000 emplois ! Tous les secteurs, notamment l'arboriculture, le maraîchage, l'horticulture et la viticulture seront pénalisés.

Nos agriculteurs seront-ils obligés de traverser la rue pour trouver du travail ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Vous étiez hier en commission des affaires sociales ; vous n'avez pas assez écouté Gérald Darmanin... (On s'en défend sur plusieurs bancs à droite.)

Nous sommes en train de trouver des solutions. Notre objectif, c'est d'améliorer la situation des agriculteurs. Vous avez refusé de discuter la loi agricole. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains) Nous défendons le revenu agricole, nous travaillons sur la dotation pour amortissement, la compétitivité agricole avec 3,5 milliards d'euros pour l'investissement agricole, notamment en amont, prévus dans le grand plan d'investissement. Le CICE a été transformé en exonération de charges, pour améliorer la compétitivité de nos exploitations agricoles.

Ces mesures seront proposées dans les prochains jours, et je ne doute pas, parce que vous avez le souci de la compétitivité des arboriculteurs, des pépiniéristes, des maraîchers et des viticulteurs, que vous les soutiendrez. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - J'ai bien écouté M. Darmanin hier. Mais, monsieur le ministre, vous oubliez qu'un agriculteur, ça sait compter ! L'allègement des charges ne sera pas à la hauteur du dispositif. Vous ne les écoutez pas mais vous augmentez leur désespérance. (Applaudissements nourris sur les bancs des groupeUC et Les Indépendants)

Plainte à l'ONU sur les essais nucléaires en Polynésie

Mme Lana Tetuanui .  - Monsieur le Premier ministre, je m'exprime au nom du président de la Polynésie française, Édouard Fritch, au moment où le parti indépendantiste vient de déposer plainte contre la France pour crime contre l'Humanité devant la Cour pénale internationale. Or ce parti indépendantiste ne représente que 20 % des voix aux dernières élections territoriales, non la Polynésie et les Polynésiens.

Malgré les tensions provoquées par certains propos politiciens de ce parti, je tiens à vous assurer de la détermination constante des autorités polynésiennes, et du président Fritch, de travailler main dans la main avec votre Gouvernement central, comme nous l'avons toujours fait, sur des sujets aussi graves que l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. J'étais à l'ONU il y a deux jours pour rappeler l'engagement de la France dans la mise en oeuvre des moyens dédiés à la réparation des essais nucléaires en Polynésie française et de leurs conséquences. Avec la commission extra-parlementaire, créée sur ce sujet par la loi EROM, et dont j'ai l'honneur d'assurer la présidence, nous poursuivons nos travaux. Nous venons justement de rentrer de mission sur la Polynésie et notamment l'atoll de Moruroa.

La Polynésie française tient à cette coopération avec la France. Pourriez-vous me confirmer l'attention de la France et son soutien à notre action sur les essais nucléaires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, Les Républicains et RDSE, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOCR ; Mme Catherine Conconne proteste.)

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer .  - (Protestations sur les bancs du groupe UC) Un grand merci pour les propos que vous avez tenus avec le président Fritch devant le comité spécial de décolonisation des Nations unies.

La France ne participe pas à ce comité. La Polynésie est autonome. Nous respectons son autonomie. Nous respectons de même les Polynésiens qui votent à chaque élection territoriale. M. Temaru a décidé de porter plainte. Nous nous défendrons et rappellerons les faits, tout en soulignant que le détournement à des fins politiques locales des juridictions internationales doit être dénoncé. La ministre des Armées investit massivement dans la dépollution et suit attentivement la situation des atolls concernés.

Nous travaillons très bien, à votre initiative, madame la sénatrice, à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires en veillant à ce qu'elle soit bien destinée aux victimes. Nous serons très attentifs à votre proposition.

Ce travail est important pour notre histoire passée et future, pour la Polynésie comme pour la France. (Applaudissements)

Accueil des migrants en Loire-Atlantique

M. Ronan Dantec .  - Tout l'été, Nantes a été confronté à un camp de migrants insalubre en pleine ville. Nous ne sommes pas toutefois face à une « invasion » : moins de 130 000 personnes pour 511 millions d'habitants en Union européenne ; à ce rythme, « l'invasion » durera 4 000 ans !

Pourtant ces situations indignes au coeur de nos villes sapent insidieusement nos valeurs humanistes. Heureusement, certains élus, comme c'est le cas en Loire-Atlantique, ne l'acceptent pas. Ainsi, Nantes a mobilisé jusqu'à cinq gymnases et dédié du personnel administratif pour faire face à la situation et des élus de toutes sensibilités du territoire ont proposé d'accueillir des réfugiés ayant obtenu leur statut.

La ville de Nantes seule assume le coût financier. Pourquoi l'État, qui ne respecte pas la directive européenne de 2013 sur les conditions d'accueil, pourtant transposée, ne l'aide-t-elle pas ?

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - À Nantes, le nombre de demandeurs d'asile a augmenté de 23 % en un an. Après des échanges avec la maire de Nantes, les 698 personnes du campement du square Daviais ont été évacuées. Le Gouvernement mène une politique d'asile et d'intégration équilibrée. Nous consacrons des moyens importants à l'accueil.

Les crédits à l'intégration ont augmenté de 26 %. Quelque 7 500 places d'hébergement seront créées d'ici 2019.

Nous oeuvrons avec humanité et fermeté vis-à-vis de personnes qui fuient souvent la mort. Cela dépasse les sensibilités politiques. Nous y oeuvrons dans le budget 2019.

Rapport du GIEC (III)

Mme Angèle Préville .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Le rapport du GIEC est terrifiant. C'est un dernier cri d'alarme avant le désastre. Nous créons chaque jour notre dette écologique. Tant que nous ne modifierons pas notre façon de produire et de consommer, tant que nos habitudes alimentaires resteront inchangées, tant que nous puiserons nos ressources dans la nature comme dans un réservoir sans fin, tant que les secteurs des transports, de l'énergie et de l'urbanisme ne seront pas repensés, les effets seront irréversibles, la gestion de crise demeurera permanente.

Le quinquennat précédent avait ouvert la voie à une véritable transition énergétique. Votre gouvernement manque à ses engagements en refusant l'interdiction du glyphosate ; la loi agricole manque d'ambition. Nicolas Hulot démissionne en dénonçant le poids des lobbies.

En 2019, les chiffres ne seront pas au rendez-vous. La balle est dans notre camp : repensez la pertinence des taxes. Le président de la République, « Champion de la terre », nous promettait une révolution ; elle est en panne sèche. Face à la course contre la montre qui s'impose, quel sursaut budgétaire prévoyez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Je pourrais dire que je partage votre constat. Mais je ne vois pas le rapport du GIEC comme un ultime cri d'alarme, d'où l'on déduirait qu'il n'y aurait plus rien à faire. Tout n'est pas « foutu ». Je vois ce rapport, bien au contraire, comme un appel à l'action. Sujet par sujet, nous devons agir, ensemble. Plus il y aura d'élus, de citoyens engagés, mieux ce sera.

Tout le monde s'accorde, en théorie, sur la fiscalité écologique...

M. Jean-François Husson.  - Non !

M. François de Rugy, ministre d'État.  - ... pour donner un prix au carbone ; mais lorsqu'on évoque une taxe, députés et sénateurs deviennent de plus en plus réticents, puis sont encore plus nombreux à refuser de voter le budget. J'espère que vous avez des discussions intenses avec vos collègues députés, car cela a été le cas du groupe socialiste à l'Assemblée nationale à l'automne dernier. (Vives protestations sur plusieurs bancs des groupes SOCR et Les Républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

M. Julien Bargeton.  - Bravo !

M. Jean-Marc Todeschini.  - C'est scandaleux !

Sécurité dans l'espace public

M. Pierre Charon .  - L'arrestation de Redoine Faïd a été un grand soulagement. La cavale de l'ennemi public n°1 a été rendue possible par le non-respect de nos lois : ce malfrat se promenait tranquillement sous une burka, en dépit de la loi de 2010 validée par le Conseil constitutionnel, interdisant de dissimuler son visage par un voile intégral dans l'espace public.

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Pourquoi cette loi n'est-elle pas appliquée ? Il en va aussi du respect de la dignité des femmes. Une peine d'amende de deuxième classe, jusqu'à 150 euros, est prévue en cas de dissimulation du visage. Non seulement la police est constamment narguée, mais les amendes, quand elles sont payées, le sont par des tiers ou des associations qui combattent les valeurs de la République.

Pourquoi ne pas la transformer en délit ? Rien ne l'empêche, sauf l'absence de courage politique et une certaine complaisance que nous ne connaissons que trop. Quand les pouvoirs publics décideront-ils enfin d'appliquer sans lâcheté les lois de la République ? (Vifs applaudissements sur la plupart des bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - L'évasion de Redoine Faïd a été suivie de mesures très rigoureuses pour assurer la sécurité de nos prisons, réorganiser l'administration pénitentiaire et faire en sorte que de tels incidents ne se reproduisent pas. Vous regrettez l'insuffisante application de la loi de 2010.

Nous devons tout mettre en oeuvre pour que nos lois soient appliquées au quotidien : nous devons assurer l'ordre public, vérifier les identités et lutter contre le communautarisme. C'est difficile bien sûr sur le terrain, je le sais, mais le Gouvernement met tout en oeuvre pour lutter contre les phénomènes communautaristes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE et UC)

M. Pierre Charon.  - La question portait sur la transformation de cette simple contravention en délit ; l'Europe nous soutient. D'autres pays l'ont fait, comme l'Autriche, le Danemark...Vous n'avez pas répondu à ma question. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Sécurité à Marseille

M. Bruno Gilles .  - Ma question s'adresse au ministre de l'Intérieur, donc à vous, monsieur le Premier ministre... « Aujourd'hui, nous vivons côte à côte ; demain, je crains que nous ne vivions face à face », a déclaré pathétiquement Gérard Collomb avant de quitter la place Beauvau. Quel aveu d'impuissance ! Même les gendarmes et les pompiers sont pris pour cible. Les causes de l'insécurité sont multiples. À Marseille, deuxième ville de France, les collectivités territoriales s'activent mais ne peuvent pas tout. L'État n'assume plus ses devoirs régaliens. Deux commissariats ont fermé à Marseille et cinq sont fermés le soir et le week-end. Les policiers sont en sous-effectifs et manquent cruellement de moyens, en dépit des promesses et des visites de ministres.

Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous résoudre les problèmes d'insécurité, notamment à Marseille, et restaurer l'autorité de l'État, à la hauteur de l'enjeu ?

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - Monsieur le sénateur... (Protestations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

M. Ladislas Poniatowski.  - Pourquoi le Premier ministre ne répond-il pas ? (On renchérit sur les mêmes bancs.)

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État.  - Marseille doit faire face au grand banditisme et à l'affrontement entre bandes. Quelque 7 500 personnes sont mobilisées au sein des forces de sécurité dans les Bouches-du-Rhône.

Les atteintes aux personnes ont baissé de 20 % en cinq ans. Les résultats sont probants. (On en doute à droite.) Le renseignement criminel a été réorganisé.

Depuis 2015, 9 tonnes de cannabis ont été saisies, 191 kilos de cocaïne, 73 kilos de drogues de synthèse, près de 6 millions d'euros ont été confisqués.

La police municipale, la police aux frontières et les douanes sont mobilisées. Depuis 2018, 29 réseaux ont ainsi été démantelés et 92 trafiquants arrêtés. On obtient des résultats, et on continuera... (Exclamations à droite)

M. Stéphane Ravier.  - C'est cela, continuez comme ça !

M. Bruno Gilles.  - C'est le Premier ministre qui devait répondre... (On approuve à droite.) Vous esquivez, vous vous dérobez. Vous n'êtes, comme l'ensemble de votre Gouvernement, plus en marche mais en attente, en pause ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 h 10.

présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 20.

Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et du projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 40

Mme la présidente.  - Amendement n°157, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéas 1 à 18

Supprimer ces alinéas.

M. Jacques Bigot.  - Cet article prouve, une fois de plus, qu'on essaie de réduire le temps de travail des juges. Le recours au juge unique existe depuis de nombreuses années, en matière civile notamment ; là, il s'agit de le généraliser en correctionnelle.

La disparition de la collégialité pose une véritable difficulté ; quand le délit est grave, le débat entre les trois magistrats sur la peine à prononcer est particulièrement utile. Si vous voulez, madame la garde des sceaux, recruter davantage, comme vous l'avez annoncé à l'article premier, pourquoi supprime la collégialité là où elle était déjà résiduelle ?

Mme la présidente.  - Amendement n°176, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par vingt-cinq alinéas ainsi rédigés :

« 1° Les délits ci-après mentionnés, prévus par les articles suivants du code pénal :

«  -  les violences prévues par les articles 222-11, 222-12 et 222-13 ;

«  -  les appels téléphoniques malveillants prévus par l'article 222-16 ;

«  -  les menaces prévues par les articles 222-17 à 222-18-3 ;

«  -  les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne prévues par les articles 222-19-1, 222-19-2, 222-20-1 et 222-20-2 ;

«  -  l'exhibition sexuelle prévue par l'article 222-32 ;

«  -  la cession ou l'offre illicite de stupéfiants à une personne en vue de sa consommation personnelle prévu par l'article 222-39 ;

«  -  le délit de risques causés à autrui prévu par l'article 223-1 ;

«  -  les atteintes à la vie privée et à la représentation de la personne prévues par les articles 226-1 à 226-2-1, 226-4 à 226-4-2 et 226-8 ;

«  -  les abandons de famille, les violations des ordonnances prises par le juge aux affaires familiales en cas de violences et les atteintes à l'exercice de l'autorité parentale prévus par les articles 227-3 à 227-11 ;

«  -  le vol, la filouterie, et le détournement de gage ou d'objet saisi prévus par les articles 311-3 et 311-4, 313-5, 314-5 et 314-6 ;

«  -  le recel prévu par l'article 321-1 ;

«  -  les destructions, dégradations et détériorations ne présentant pas de danger pour les personnes ainsi que les menaces de destruction, de dégradation ou de détérioration et les fausses alertes prévues par les articles prévus par les articles 322-1 à 322-4-1, 322-12 à 322-14 ;

«  -  l'intrusion dans un établissement d'enseignement scolaire prévu par les articles 431-22 à 431-25 ;

«  -  les menaces et actes d'intimidation commis contre les personnes exerçant une fonction publique prévus par l'article 433-3 ;

«  -  les outrages et rébellions prévus par les articles 433-5 à 433-10 ;

«  -  l'opposition à exécution de travaux publics prévue par l'article 433-11 ;

«  -  les usurpations de fonctions, de signes, de titres et le délit d'usage irrégulier de qualité prévus par les articles 433-12 à 433-18 ;

«  -  les atteintes à l'état civil des personnes prévues par les articles 433-18-1 à 433-21-1 ;

«  -  le délit de fuite prévu par l'article 434-10 ;

«  -  le délit de prise du nom d'un tiers prévu par l'article 434-23 ;

«  -  les atteintes au respect dû à la justice prévues par les articles 434-24 à 434-26, 434-35 à 434-35-1, 434-38 à 434-43-1 ;

«  -  les faux prévus par les articles 441-1 à 441-3, 441-5, 441-6 à 441-8 ;

«  -  la vente à la sauvette prévue par les articles 446-1 et 446-2 ;

«  -  les sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux prévus par les articles 521-1 et 521-2 ; »

II.  -  Alinéa 21

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II.  -  La procédure simplifiée de l'ordonnance pénale est applicable aux délits visés à l'article 398-1 du code de procédure pénale, à l'exception des délits d'atteintes volontaires et involontaires à l'intégrité des personnes. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement rétablit la liste des infractions relevant de la compétence du juge unique. Votre commission a étendu cette compétence à la totalité des délits punis de cinq ans d'emprisonnement autres que les agressions sexuelles, cela me semble excessif. Cela reviendrait à confier au juge unique certains délits dont la nature, la complexité ou la gravité exigent qu'ils soient jugés par une formation collégiale. Je pense aux homicides involontaires causés par un conducteur, ou à la suite d'un accident du travail ou d'un scandale sanitaire, des atteintes sexuelles sur mineur de 15-18 ans par personne ayant autorité, de la provocation au suicide, des détournements et escroqueries, y compris ceux présentant une particulière complexité et relevant de la compétence des pôles spécialisés, des séquestrations suivies d'une libération avant sept jours, de certaines atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, voire de l'apologie des actes de terrorisme. La solution retenue par le Sénat confierait à un juge unique le procès de la catastrophe de Furiani, celui du sang contaminé ou celui de l'amiante.

Sauf à prévoir une liste d'exceptions particulièrement longue, il est logique d'énumérer de façon précise les délits relevant de la compétence du juge unique.

Par cohérence, cet amendement rétablit le champ de l'ordonnance pénale par référence à la liste prévue pour le juge unique.

Contrairement à ce qu'a affirmé M. Bigot, nous procédons à une réécriture et une très faible extension du champ d'exercice du juge unique. Cela concerne 154 400 cas actuellement ; ce nombre s'élèverait à 158 000 avec notre texte et 181 000 avec le texte de la commission des lois.

Mme la présidente.  - Amendement n°158, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéas 19 à 22

Supprimer ces alinéas.

M. Jacques Bigot.  - Le recours à l'ordonnance pénale est étendu de manière exagérée à cet article. Rappelons que cette procédure permet de condamner une personne sans qu'elle ait été auditionnée, sans qu'elle ait pu s'expliquer.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Rejet de l'amendement n°157. La commission des lois est favorable, comme elle l'était lors de l'examen de la proposition de loi tendant à renforcer l'efficacité de la justice pénale en janvier 2017, à l'extension de la compétence du juge unique en première instance, mais non en appel, pour tous les délits passibles d'une peine inférieure ou égale à cinq ans, à l'exception des délits d'agression sexuelle.

Avis également défavorable à l'amendement n°176 : la commission, suivant la position qu'elle avait prise sur le texte de janvier 2017, souhaite une extension de l'ordonnance pénale à tous les délits passibles d'une peine inférieure à cinq ans, à l'exception des délits d'atteintes à la personne.

Même avis sur l'amendement n°158 pour les mêmes raisons.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. L'extension du recours à l'ordonnance pénale est directement liée à celle de la compétence du juge unique, l'objectif est d'offrir une plus grande diversité de réponses pénales.

L'amendement n°157 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos176 et 158.

Mme la présidente.  - Amendement n°159, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

M. Jacques Bigot.  - Je ne me fais pas d'illusion sur le sort qui sera fait à cet amendement... Il est défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Retrait. Les garanties apportées suffisent pour que les décisions soient rendues dans des conditions respectueuses des droits de la défense.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Retrait, sinon rejet.

M. Jacques Bigot.  - « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux ». Je maintiens mon amendement.

L'amendement n°159 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°349, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Alinéa 24

Après les mots :

également portée à

insérer le mot :

la

L'amendement rédactionnel n°349, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jacques Bigot.  - Le groupe socialiste ne votera pas l'article 40 qui n'assure pas suffisamment les droits de la défense. Là où il y avait de la collégialité, il y aura un juge unique ; là où il y avait débat, il y aura une ordonnance pénale. Une justice rapide peut se traduire par une justice expéditive ; ne renonçons pas à nos principes et à nos valeurs pour des raisons purement gestionnaires.

M. Marc Laménie.  - Je voterai naturellement cet article, compte tenu des explications qu'a apporté le rapporteur de la commission des lois, tout en insistant sur les moyens humains et financiers dont a besoin la justice pour fonctionner.

Le Gouvernement nous a proposé une liste des délits qu'il voulait soumettre à la compétence du juge unique. Dans cette liste, phénoménalement longue, un délit a attiré mon attention : celui des intrusions et des dégradations dans les établissements scolaires. Malheureusement, on en voit trop dans mon département des Ardennes. Les auteurs sont retrouvés, parfois. Et les peines, où sont les peines ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je suis très sensible à cette question. La question du juge unique ne se pose que pour les audiences « classiques ». S'il y a flagrance et comparution immédiate, ce qui peut être le cas dans les affaires d'intrusion dans les établissements scolaires, il y a collégialité. Nous avons établi cette longue liste pour plus de clarté, sur la recommandation du Conseil d'État.

Mme Sophie Joissains.  - Étendre le champ du juge unique, c'est aller vers une justice expéditive, sans garantie d'impartialité. À titre personnel, je voterai contre l'article 40.

L'article 40, modifié, est adopté.

ARTICLE 41

Mme la présidente.  - Amendement n°160, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les omissions ou inexactitudes constatées dans la déclaration mentionnée au deuxième alinéa ne peuvent constituer une cause de rejet du droit de former appel. »

M. Jacques Bigot.  - Avec cet article, la déclaration d'appel devra indiquer si l'appel porte sur la décision sur l'action publique, sur la décision sur l'action civile ou sur les deux décisions. Cela peut poser difficulté à un prévenu s'il n'est pas représenté par un avocat, d'autant que le délai pour former appel est seulement de dix jours. C'est pourquoi le non-respect des formalités ne doit pas entraîner le rejet de l'appel.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Le prévenu devra préciser la portée de son appel, pour dire s'il porte sur la décision de culpabilité ou sur la peine, afin de mieux anticiper l'organisation et le temps d'audience.

Le contenu de la déclaration sera systématiquement vérifié par le greffier ou le chef d'établissement pénitentiaire, votre amendement est donc satisfait.

M. Jacques Bigot.  - Il y a un sujet. Si la rédaction de mon amendement n'est pas pleinement satisfaisante, elle pourra être améliorée.

Mme Nathalie Goulet.  - On peut supposer que les modalités de l'appel figureront en annexe de la décision initiale. Nous avons néanmoins voté il y a peu de temps le droit à l'erreur, je suivrai donc le rapporteur.

L'amendement n°160 est adopté.

M. Jacques Bigot.  - Enfin, un de mes amendements adopté !

Mme la présidente.  - Amendement n°177, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Rétablir le III dans la rédaction suivante :

III.  -  Après le premier alinéa de l'article 510 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsque le jugement attaqué a été rendu selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article 398, la chambre des appels correctionnels est composée d'un seul de ces magistrats exerçant les pouvoirs confiés au président de chambre, sauf si le prévenu est en détention provisoire pour les faits qui lui sont reprochés ou si, dans l'acte d'appel, celui-ci demande que l'affaire soit examinée par une formation collégiale. Elle ne peut alors prononcer une peine d'emprisonnement ferme d'une durée supérieure à cinq ans. Elle peut toutefois, si ce renvoi lui paraît justifié en raison de la complexité des faits ou en raison de l'importance de la peine susceptible d'être prononcée, décider, d'office ou à la demande des parties ou du ministère public, de renvoyer l'affaire devant la chambre des appels correctionnels siégeant en formation collégiale. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le recours au juge unique en appel sur des décisions correctionnelles elles-mêmes rendues par un juge unique est une disposition essentielle de ce texte.

Cette mesure, qui s'appliquera à tous les faits relevant du juge unique à l'exception des prévenus en détention provisoire, concernera environ 12 000 affaires par an sur un total de 22 000. Elle allégera significativement la charge des juridictions.

Pour répondre aux observations de la commission des lois, je propose de moduler ce principe en prévoyant que le prévenu puisse solliciter, lorsqu'il interjette appel, le bénéfice de la collégialité. Cette solution est identique à celle que le Sénat avait retenue dans la loi du 15 juin 2000 en matière de référé-liberté. Elle marque un pas du Gouvernement vers la commission des lois qui, je n'en doute pas, appréciera l'équilibre de cette proposition.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La commission a donné un avis défavorable à cet amendement. Néanmoins, la proposition du Gouvernement est intéressante et constitue une avancée. Étudions comment faire progresser le texte dans la navette...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Encore faudrait-il qu'il y ait une navette ! (Rires sur les bancs du groupe SOCR)

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Il faut avoir un ticket...

Mme Nathalie Goulet.  - Le meilleur moyen d'améliorer un texte dans la navette quand il n'y a pas de navette est d'adopter un bon amendement quand l'occasion s'en présente. Je voterai pour.

M. Jacques Bigot.  - Il y a la loi et l'application de la loi. Dans la pratique, on expliquera au prévenu qui demande la collégialité que cela aura pour effet de repousser le procès. Cela s'est vu en matière civile, et je peux vous dire combien cette pression est efficace. Je n'en fais pas grief aux magistrats, ils essaient de travailler au plus vite en composant avec l'état de leurs effectifs mais peut-être seront-ils plus nombreux demain... Je voterai contre.

L'amendement n°177 n'est pas adopté.

L'article 41, modifié, est adopté.

ARTICLE 42

Mme la présidente.  - Amendement n°39, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Pierre Ouzoulias.  - À titre expérimental, et pour une durée de trois ans, serait créé un tribunal criminel départemental qui jugerait en premier ressort les personnes accusées de crimes punis de quinze ou vingt ans ; il serait composé uniquement de magistrats. Cette mesure, proposée sans concertation, annonce une évolution dangereuse : la cour d'assises, qui symbolise une justice rendue au nom du peuple et par des jurés populaires, verrait son empire réduit à l'examen des crimes encourant plus de trente ans de prison ou la réclusion à perpétuité. Défendre les cours d'assises n'est pas une position de Gaulois réfractaire attaché à une tradition parce que, pour reprendre les mots de Jean-Pierre Getti, président de cour d'assises, « la délibération à la cour d'assises est le lieu le plus démocratique qui soit dans notre vie de citoyen. »

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à cet amendement de suppression. La commission des lois accepte la mise en place expérimentale du tribunal départemental. Cela évitera la correctionnalisation de certaines infractions et les délais seront raccourcis.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Nous avons voulu cette solution innovante pour mettre un coup d'arrêt à l'engorgement des cours d'assises, qui entraîne un dysfonctionnement complet de la chaîne.

La correctionnalisation, notamment du viol, vient de ce que les victimes souhaitent ou ont besoin d'un jugement plus rapide. Je veux la vérité judiciaire : un crime doit être jugé comme un crime.

La procédure devant les tribunaux criminels départementaux ne se limitera pas à un examen du dossier, l'ensemble des témoins pourront être entendus.

Effet second et heureux de cette expérimentation, la détention provisoire sera limitée à un an dans ce cadre.

Enfin, nous parlons bien d'une expérimentation. Il est vrai que cela rompt avec une tradition très puissante que je ne considère pas seulement comme un élément de notre construction historique. À mon sens, le principal danger est que l'expérimentation remporte un tel succès que ces tribunaux soient engorgés.

Mme Catherine Conconne.  - Il faudra veiller à l'appellation du tribunal, puisque la Martinique, tout comme d'autres territoires d'outre-mer, n'a plus de département.

Mme Marie Mercier.  - Nous qui n'avions pas voulu d'un nouveau délit d'atteinte sexuelle avec pénétration dans la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, nous approuvons pleinement la création à titre expérimental de ce tribunal départemental criminel. Un viol est et reste un crime, il doit être jugé comme tel.

M. Jacques Bigot.  - À entendre tous les praticiens, la cour d'assises est le nec plus ultra de la justice. On prend son temps, tout est oral ; cela nécessite une organisation extrêmement lourde. Résultat, on correctionnalise des faits extrêmement graves.

La justice rendue par le peuple ? Un président de la République, dont vous n'étiez pas, monsieur Ouzoulias, le meilleur soutien, souhaitait des jurés dès la correctionnelle. Braquages et hold-up, objectivement, pourraient fort bien être jugés par des magistrats professionnels. Notez la difficulté à trouver des jurés disponibles, la peur que peuvent inspirer des jurés populaires dans les affaires qui préoccupent Mme Mercier. Cette expérimentation est bonne, pourquoi la limiter à la première instance ? Il est vrai que certains avocats préfèrent le prétoire et sa médiatisation... J'espère qu'on en viendra à un tribunal départemental criminel d'appel.

M. Pierre Ouzoulias.  - La garde des sceaux défend un point de vue technique, comptable ; nous, nous défendons des principes.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - J'ai parlé de vérité judiciaire, pas de comptabilité !

M. Pierre Ouzoulias.  - Puisqu'il est question du viol, une parole publique sur ces faits en cours d'assises aide à faire prendre conscience de la réalité des violences faites aux femmes.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Je m'abstiendrai. Je suis attachée aux assises où l'intégralité de l'instruction se fait à la barre - c'est d'ailleurs cela qui rend ce temps exceptionnel, et non la médiatisation - comme à l'existence des jurés populaires, cette expérience citoyenne de la justice. Cela étant, si le pari du désengorgement peut être tenu, il mérite d'être pris. La personne, présumée innocente, est neuf fois sur dix maintenue en détention provisoire en attendant le jugement. C'est une forme de déni de justice.

M. Marc Laménie.  - Ces sujets sont extrêmement sensibles. En 1995, j'ai été juré d'assises. Cette expérience m'a marqué, profondément ; on comprend la complexité qu'il y a à juger des affaires très dramatiques.

D'un côté, il n'est pas simple de composer des jurys ; de l'autre, on met en place un tribunal criminel départemental. Je m'abstiendrai.

Mme Éliane Assassi.  - Ce tribunal criminel départemental ressemble, si je ne me trompe, à une chambre spécialisée du tribunal correctionnel. Je suis personnellement très attachée aux jurés populaires. On entend qu'il faut aller vite et faire des économies.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Mais non !

Mme Éliane Assassi.  - En tant que parlementaire et citoyenne, cela me choque. J'ai une haute idée de ce que doit être la justice de mon pays.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Monsieur Ouzoulias, les audiences du tribunal criminel départemental seront publiques, la parole des femmes le sera également. Si le tribunal le souhaite, il pourra entendre l'ensemble des témoins.

Madame Assassi, ce sera, non pas un tribunal correctionnel spécialisé, mais une forme de cour d'assises allégée où siégeront cinq magistrats professionnels. Il n'y a aucun objectif d'économies de notre part. Si j'avais à craindre quelque chose, ce serait l'inverse : une dépense accrue. Nous voulons accélérer la justice pour que les victimes obtiennent le jugement auquel elles ont droit.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Et les accusés ?

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°85 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mme Imbert et MM. Milon, Laménie, Bonhomme, Dallier, H. Leroy et Revet.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase de l'article 305-1, après le mot : « être », sont insérés les mots : « déposée quarante-huit heures avant l'ouverture des débats et » ;

M. Marc Laménie.  - Texte même.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Cet amendement modifie le délai pour le dépôt des nullités devant la cour d'assises, il est moins protecteur des droits de la défense.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°85 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°350, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 24, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

dudit article 181

II.  -  Alinéa 29

Remplacer les mots :

Les articles 254 à 267, 282, 288 à 292

par les mots :

La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de procédure pénale, l'article 282, la section 1 du chapitre V du titre Ier du livre II

III.  -  Alinéa 35

Compléter cet alinéa par les mots :

, ministre de la justice

IV.  -  Alinéa 40

Remplacer les mots :

aux articles 211-1, 211-2

par les mots :

au chapitre Ier du sous-titre Ier du titre Ier du livre II et aux articles

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Amendement rédactionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°178, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 38 à 42

Supprimer ces alinéas.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Votre commission des lois a étendu la compétence universelle des juridictions françaises pour les crimes contre l'humanité. Cette réforme reprend une proposition de loi adoptée le 23 décembre 2013, alors que Mme Taubira était garde des sceaux. Sur la forme, elle pourrait constituer un cavalier législatif puisqu'elle ne présente aucun lien direct avec le texte. Surtout, elle pourrait conduire à une instrumentalisation politique des juridictions françaises.

La condition de « résidence habituelle » importe, sans quoi des associations pourraient demander aux magistrats de poursuivre des personnalités étrangères de passage en France. Ces demandes, difficiles à satisfaire, susciteraient des polémiques et affecteraient l'action diplomatique de la France.

La condition de subsidiarité est également essentielle. La Cour pénale internationale, la CPI, institution internationale dépourvue d'action diplomatique ou commerciale, est mieux placée que les juridictions nationales pour connaître des crimes contre l'humanité.

Enfin, l'expérience belge met en exergue la difficulté d'agir en matière de crimes internationaux, car l'État qui juge de hauts responsables mène en parallèle des relations diplomatiques et commerciales. C'est pourquoi la Belgique est revenue, en 2013, sur sa réforme de 1993.

J'ai conscience que mon amendement de suppression a peu de chances d'être adopté, puisque vous aviez déjà adopté de telles dispositions en 2013. Il faut approfondir la réflexion, rechercher une solution équilibrée, en associant le Quai d'Orsay et les magistrats du pôle spécialisé du tribunal de grande instance. Avis défavorable à l'amendement n°350, mais la porte est ouverte !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable, nous suivons la position unanime du Sénat qui avait adopté en 2013 la proposition de loi Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous avons adopté cette disposition le 23 décembre 2013, à l'unanimité du Sénat. Comment se peut-il qu'en cinq ans, le texte n'ait jamais été mis à l'ordre du jour de l'autre assemblée ? Il y a un problème démocratique.

Notre texte est strictement conforme au traité de Rome, qui stipule que la CPI est complémentaire des juridictions pénales nationales. Il traite aussi des crimes de guerre et des génocides, en plus des crimes contre l'humanité.

Ce combat a été mené par Robert Badinter, par Mme Delmas-Marty, par de nombreux juristes et associations qui n'acceptent pas que la France soit à la traîne.

Madame la ministre, votre exposé des motifs évoque un risque d'instrumentalisation politique des juridictions. Ne leur faites-vous pas confiance pour s'en prémunir ?

Mme la présidente.  - Votre temps de parole est écoulé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous avons résolu le problème de la résidence habituelle en France. Les auteurs de crimes contre l'humanité ne sont pas dans les communes de France, à arroser leurs géraniums - mais nous devons pouvoir les interpeler quand ils sont de passage sur le territoire.

Nous avons levé une autre réserve en confirmant que le parquet conserve le monopole de l'action publique.

Mme la présidente.  - Je suis obligée de vous interrompre...

Mme Nathalie Goulet.  - Une fois n'est pas coutume, je rejoins M. Sueur. Que fait-on des victimes ? Les génocides et autres crimes contre l'humanité, malheureusement, se multiplient. Les Yézidis, les victimes civiles en Irak, en Syrie ou en Afrique réclament justice. Notre pays, qui donne des leçons au monde entier en matière de droits de l'homme, se grandirait en leur offrant un havre de paix. Le Sénat est dans son rôle en soutenant sa position unanime de 2013. Combien de nouvelles victimes, depuis cette date ? Ce siècle n'est décidément pas celui de l'apaisement.

Reste maintenant à traverser le boulevard Saint-Germain !

L'amendement n°350 est adopté.

L'amendement n°178 n'a plus d'objet.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Heureusement ! Cinq ans d'efforts pour que l'Assemblée finisse, enfin, par en parler...

L'article 42, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°179, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 42

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article 421-2-6 du code pénal, après le mot : « procurer », sont insérés les mots : « , de tenter de se procurer ».

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement tire les conséquences d'une décision du Conseil constitutionnel du 7 avril 2017 relative au délit d'entreprise individuelle terroriste, qui permet d'arrêter et sanctionner une personne préparant seule un attentat avant son passage à l'acte.

Ce délit n'est constitué que s'il est démontré que la personne détient, se procure ou fabrique des armes. Le Conseil constitutionnel a jugé que la simple recherche d'armes ne suffisait pas à matérialiser l'intention de passer à l'acte. Néanmoins, il est inenvisageable de prendre le risque que la personne n'entre effectivement en possession d'une arme. L'interpellation rapide est alors l'unique solution. C'est pourquoi nous ajoutons le fait de « tenter de se procurer » une arme au titre des éléments matériels pouvant constituer un acte préparatoire. À la différence du mot « rechercher », la notion de tentative, bien connue du droit pénal, exige un commencement d'exécution et exclut toute ambiguïté quant à la volonté de l'auteur de la tentative. Nous répondons ainsi à l'exigence du Conseil constitutionnel.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien.

L'amendement n°179 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°181 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 42

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L'article 706-75 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, le tribunal de grande instance et la cour d'assises de Paris exercent une compétence concurrente sur l'ensemble du territoire national pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et délits mentionnés au premier alinéa du présent article, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une très grande complexité, en raison notamment du ressort géographique sur lequel elles s'étendent. » ;

2° Au premier alinéa de l'article 706-77, les mots : « autre que ceux visés à l'article 706-75 » sont supprimés ;

3° Au second alinéa de l'article 706-80, après le mot : « moyen, », sont insérés les mots : « au procureur de la République déjà saisi et », et les mots : « ou le cas échéant, au procureur de la République saisi en application des dispositions de l'article 706-76 » sont supprimés ;

4° La section 1 du chapitre II du titre XXV du livre IV est complétée par deux articles 706-80-1 et 706-80-2 ainsi rédigés :

« Art. 706-80-1.  -  Dans le cadre d'une opération de surveillance de personnes contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de les soupçonner d'avoir commis l'une des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction saisi des faits qui en avise préalablement le parquet, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à l'interpellation de ces personnes afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« Dans le cadre d'une opération de surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de l'une des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74 ou servant à les commettre, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction saisi des faits qui en avise préalablement le parquet, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à la saisie de ces objets, biens ou produits afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« L'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction, qui peut être donnée par tout moyen, est mentionnée ou versée au dossier de la procédure. Le procureur de la République informe sans délai le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de la délivrance de cette autorisation.

« Art. 706-80-2.  -  Dans le cadre d'une opération de surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de l'une des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74 ou servant à les commettre, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction saisi des faits qui en avise préalablement le parquet, livrer ou délivrer à la place des prestataires de services postaux et des opérateurs de fret ces objets, biens ou produits, sans être pénalement responsables.

« À peine de nullité, l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction est écrite ou motivée. Cette autorisation est versée au dossier de la procédure et les actes autorisés ne peuvent constituer une incitation à commettre une infraction. »

II.  -  Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Le I de l'article 67 bis est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « procèdent » est remplacé par les mots : « peuvent procéder » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « selon le cas, » et les mots : « ou au procureur de la République saisi en application des dispositions de l'article 706-76 du code de procédure pénale » sont supprimés ;

2° La section 7 du chapitre IV du titre II est complétée par deux articles 67 bis-3 et 67 bis A ainsi rédigés :

« Art. 67 bis-3.  -  Dans le cadre d'une opération de surveillance de personnes contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de les soupçonner d'avoir commis un délit douanier dont la peine d'emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans ou d'y avoir participé comme complice ou intéressée à la fraude au sens de l'article 399, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans les conditions fixées par décret peuvent, sur l'ensemble du territoire national, avec l'autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à l'interpellation de ces personnes afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« Dans le cadre d'une opération de surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d'un délit douanier dont la peine d'emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans ou servant à le commettre, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans les conditions fixées par décret peuvent, sur l'ensemble du territoire national, avec l'autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne pas procéder au contrôle et à la saisie de ces objets, biens ou produits afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations.

« L'autorisation du procureur de la République, qui peut être donnée par tout moyen, est mentionnée ou versée au dossier de la procédure. Le procureur de la République informe sans délai le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de la délivrance de cette autorisation.

« Art. 67 bis-4.  -  Dans le cadre d'une opération de surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d'un délit douanier dont la peine d'emprisonnement encourue est égale ou supérieure à deux ans ou servant à le commettre, et lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans les conditions fixées par décret peuvent, sur l'ensemble du territoire national, avec l'autorisation du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter, livrer ou délivrer à la place des prestataires de services postaux et des opérateurs de fret ces objets, biens ou produits, sans être pénalement responsables.

« À peine de nullité, l'autorisation du procureur de la République est écrite ou motivée. Cette autorisation est versée au dossier de la procédure et les actes autorisés ne peuvent constituer une incitation à commettre une infraction. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement d'actualité clarifie le cadre procédural applicable en matière de surveillance et de livraisons surveillées, actes d'enquête particulièrement efficaces dans la lutte contre la criminalité et la délinquance organisées.

Pour mettre fin à des pratiques divergentes sur le territoire, nous proposons de permettre aux enquêteurs, sur autorisation de l'autorité judiciaire, de demander à d'autres services de ne pas procéder au contrôle et à l'interpellation des suspects pour ne pas compromettre les investigations. Cela permettra au parquet de Paris de se saisir d'affaires complexes de criminalité organisées qui dépassent l'échelle régionale.

L'amendement mentionne expressément la possibilité pour les enquêteurs de livrer, à la place des services postaux, les produits du crime ainsi acheminés par voie postale aux fins de démanteler les réseaux criminels. Des dispositions équivalentes sont créées dans le code des douanes.

Cet amendement est une réponse à l'émoi suscité dans le monde policier et judiciaire par les pratiques de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis). Nous les encadrons.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable. Les rectifications demandées par la commission des lois ont été apportées, c'est à saluer.

Mme Nathalie Goulet.  - Je soutiendrai cet amendement. Nous sommes dans un État de droit, cet amendement prouve que nous le respectons scrupuleusement.

L'amendement n°181 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°184, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 42

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de l'organisation judiciaire est ainsi modifié : 

1° Au début du premier alinéa de l'article L. 122-3 sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions particulières du code de procédure pénale, » ;

2° La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre II est complétée par un article L. 213-12 ainsi rédigé : 

« Art. L. 213-12.  -  Au sein des tribunaux de grande instance dans le ressort desquels est susceptible de se trouver une forte concentration de personnes soutenant ou adhérant à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme, dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, un magistrat du ministère public, désigné par le procureur de la République, est chargé des missions suivantes :

« 1° L'information du procureur de la République antiterroriste de tous les faits en lien avec des affaires en cours susceptibles de faire l'objet d'investigations de sa part ; 

« 2° L'information du procureur de la République antiterroriste sur l'état de la menace terroriste dans son ressort ; 

« 3° La participation aux instances locales de prévention, de détection et de suivi du terrorisme et de la radicalisation ; 

« 4° Le suivi des personnes placées sous main de justice dans son ressort et qui sont identifiées comme étant radicalisées ; 

« 5° La diffusion auprès des magistrats du ressort des informations permettant d'aider à prévenir les actes de terrorisme. » ; 

3° L'article L. 217-1 est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « Est placé » sont remplacés par les mots : « Sont placés » ; 

b) Après les mots : « procureur de la République financier », sont insérés les mots : « et un procureur de la République antiterroriste » ; 

4° L'article L. 217-2 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « procureur de la République financier », sont insérés les mots : « et le procureur de la République antiterroriste » ;

b) Les deux occurrences du mot : « ses » sont remplacées par le mot : « leurs » ; 

c) Le mot : « exerce » est remplacé par les mots : « exercent respectivement » ; 

5° À l'article L. 217-3, les mots : « et ses substituts » sont remplacés par les mots : « et le procureur de la République antiterroriste, et leurs substituts, » ; 

6° À l'article L. 217-4, après les mots : « procureur de la République financier », sont insérés les mots : « ou au procureur de la République antiterroriste ». 

7° Le chapitre VII du titre Ier du livre II est complété par un article L. 217-5 ainsi rédigé : 

« Art. L. 217-5.  -  Lorsque le renforcement temporaire et immédiat du parquet antiterroriste près le tribunal de grande instance de Paris apparaît indispensable pour assurer le traitement des procédures, le procureur de la République antiterroriste peut requérir un ou plusieurs magistrats du parquet de Paris dont les noms figurent sur une liste arrêtée par le procureur général près la cour d'appel de Paris pour chaque année civile, après avis du procureur de la République et du procureur de la République antiterroriste. 

« Le procureur de la République antiterroriste informe le procureur général et le procureur de la République de Paris des réquisitions de magistrats auxquelles il procède. 

« Le procureur général veille à ce que ce dispositif soit utilisé le temps strictement nécessaire au traitement de l'accroissement temporaire d'activité du parquet antiterroriste. 

« Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d'État. »

II.  -  Le code de procédure pénale est ainsi modifié : 

1° L'article 41 est ainsi modifié : 

a) La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ; 

b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Lorsqu'il s'agit d'actes d'enquête devant être exécutés dans un autre ressort que celui du tribunal de grande instance, il peut demander au procureur de la République territorialement compétent d'y procéder ou d'y faire procéder par un officier de police judiciaire. Il peut toutefois également requérir directement tout officier de police judiciaire sur l'ensemble du territoire national de procéder à ces actes. » ;

2° Aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 628-1, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

3° À la fin du troisième alinéa de l'article 628-2, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste » ; 

4° L'article 628-3 est ainsi modifié : 

a) Au premier alinéa, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

b) Au troisième alinéa, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste » ; 

5° Le deuxième alinéa de l'article 702 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont également compétents sur toute l'étendue du territoire national le procureur de la République antiterroriste, le tribunal de grande instance et la cour d'assises de Paris selon les modalités déterminées aux articles 628-1 à 628-6 et 698-6. » ; 

6° Aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 706-17, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

7° L'article 706-17-1 devient l'article 706-17-2 ;

8° L'article 706-17-1 est ainsi rédigé : 

« Art. 706-17-1.  -  Sans préjudice des dispositions du troisième alinéa de l'article 41, lorsqu'il exerce sa compétence en application de la présente section, le procureur de la République antiterroriste peut requérir par délégation judiciaire tout procureur de la République de procéder ou faire procéder aux actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions dans les lieux où ce dernier est territorialement compétent. 

« La délégation judiciaire mentionne les actes d'enquête confiés au procureur de la République ainsi requis. Elle ne peut prescrire que des actes se rattachant directement à l'enquête pour laquelle elle a été délivrée. 

« Elle indique la nature de l'infraction, objet de l'enquête. Elle est datée et signée par le procureur de la République antiterroriste et revêtue de son sceau. 

« Le procureur de la République antiterroriste fixe le délai dans lequel la délégation doit lui être retournée accompagnée des procès-verbaux relatant son exécution. A défaut d'une telle fixation, la délégation judiciaire et les procès-verbaux doivent lui être transmis dans les huit jours de la fin des opérations exécutées en vertu de celle-ci. 

« Les magistrats commis pour son exécution exercent, dans les limites de la délégation judiciaire, tous les pouvoirs du procureur de la République antiterroriste. » ;

9° À la fin du troisième alinéa de l'article 706-18, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste » ; 

10° L'article 706-19 est ainsi modifié : 

a) À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

b) Au troisième alinéa, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste » ;

11° L'article 706-22-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé : 

« Le ministère public auprès des juridictions du premier degré de Paris compétentes en application du présent article est représenté par le procureur de la République antiterroriste en personne ou par ses substituts. » ;

12° L'article 706-25 est complété par un alinéa ainsi rédigé : 

« Par dérogation à l'article 34, le ministère public auprès de la cour d'assises statuant en première instance est représenté par le procureur de la République antiterroriste en personne ou par ses substituts. » ; 

13° Aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 706-168, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

14° Au troisième alinéa de l'article 706-169, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste » ; 

15° L'article 706-170 est ainsi modifié : 

a) À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « procureur de la République », il est inséré le mot : « antiterroriste » ; 

b) Au troisième alinéa, les mots : « de Paris » sont remplacés par le mot : « antiterroriste ». 

III.  -  Au premier alinéa des articles L. 225-2, L. 225-3, L. 228-2, L. 228-3, L. 228-4 et L. 228-5, au premier alinéa et aux première et seconde phrases du troisième alinéa de l'article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure, les mots : « procureur de la République de Paris » sont remplacés par les mots : « procureur de la République antiterroriste ».

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement, dont la presse s'est déjà fait l'écho, crée un parquet national antiterroriste. Il ne résulte pas d'un dysfonctionnement, le procureur de Paris remplissant parfaitement sa mission, mais nous souhaitons améliorer le dispositif.

Dirigé par un procureur de la République antiterroriste et positionné près le TGI de Paris, ce parquet national antiterroriste se substituera au parquet de Paris pour le traitement des infractions terroristes, des crimes contre l'humanité, des crimes et délits de guerre, des infractions relatives à la prolifération d'armes de destruction massive et des infractions portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation.

Nous créons un ministère public pleinement disponible pour se consacrer à ce contentieux très spécifique, le niveau de la menace endogène nécessitant une vigilance de tout instant. Il s'agit aussi de lui offrir une visibilité institutionnelle, sur le plan national et international.

Le procureur de la République de Paris pourra ainsi recentrer son activité sur les contentieux, lourds et nombreux, qui relèvent de sa compétence, criminalité organisée ou affaires de santé publique.

Afin de tenir compte des observations formulées par le Conseil d'État, j'ai retiré cette mesure du projet de loi initial pour la retravailler. Ce nouveau projet prévoit la création d'une réserve opérationnelle de magistrats du parquet de Paris à laquelle le procureur de la République antiterroriste pourra recourir afin d'adapter ses effectifs en cas de crise. Il pourra également requérir de tout procureur de la République sur le territoire national la réalisation des actes d'enquête nécessaires.

Ce nouveau parquet ne sera pas isolé. Il pourra compter sur des relais territoriaux avec la création, au sein des TGI les plus concernés, de magistrats du ministère public délégués à la lutte contre le terrorisme.

Nous proposons une architecture forte, centralisée, ayant des relais sur l'ensemble du territoire, visible au plan national et international, et surtout efficace.

Par conséquent, avis défavorable à l'amendement n°365.

Mme la présidente.  - Amendement n°365, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Après l'article 42

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  - Au début du premier alinéa de l'article L. 122-3 du code de l'organisation judiciaire, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions particulières du code de procédure pénale, ».

II.  -  Le code de procédure pénale est ainsi modifié : 

1° L'article 41 est ainsi modifié : 

a) La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ; 

b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Lorsqu'il s'agit d'actes d'enquête devant être exécutés dans un autre ressort que celui du tribunal de grande instance, il peut demander au procureur de la République territorialement compétent d'y procéder ou d'y faire procéder par un officier de police judiciaire. Il peut toutefois également requérir directement tout officier de police judiciaire sur l'ensemble du territoire national de procéder à ces actes. » ;

2° Le deuxième alinéa de l'article 702 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont également compétents sur toute l'étendue du territoire national le procureur de la République, le tribunal de grande instance et la cour d'assises de Paris selon les modalités déterminées aux articles 628-1 à 628-6 et 698-6. » ; 

3° L'article 706-17-1 devient l'article 706-17-2 ;

4° L'article 706-17-1 est ainsi rédigé : 

« Art. 706-17-1.  -  Sans préjudice des dispositions du troisième alinéa de l'article 41, lorsqu'il exerce sa compétence en application de la présente section, le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris peut requérir par délégation judiciaire tout procureur de la République de procéder ou faire procéder aux actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16 dans les lieux où ce dernier est territorialement compétent. 

« La délégation judiciaire mentionne les actes d'enquête confiés au procureur de la République ainsi requis. Elle ne peut prescrire que des actes se rattachant directement à l'enquête pour laquelle elle a été délivrée. 

« Elle indique la nature de l'infraction, objet de l'enquête. Elle est datée et signée par le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris et revêtue de son sceau. 

« Le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris fixe le délai dans lequel la délégation doit lui être retournée accompagnée des procès-verbaux relatant son exécution. A défaut d'une telle fixation, la délégation judiciaire et les procès-verbaux doivent lui être transmis dans les huit jours de la fin des opérations exécutées en vertu de celle-ci. 

« Les magistrats commis pour son exécution exercent, dans les limites de la délégation judiciaire, tous les pouvoirs du procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris prévus par la présente section. » ;

5° L'article 706-25 est complété par un alinéa ainsi rédigé : 

« Par dérogation à l'article 34, le ministère public auprès de la cour d'assises statuant en première instance est représenté par le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Paris en personne ou par ses substituts. »

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La commission des lois du Sénat n'est pas favorable à la création du parquet national antiterroriste. Notre organisation repose sur un parquet antiterroriste spécialisé, à compétence nationale, au sein du TGI de Paris ; son l'action, loin d'être critiquée, est unanimement saluée. On voudrait attribuer au parquet national antiterroriste une fonction de communication - mais le procureur de Paris n'est-il pas incontestablement reconnu ?

L'organisation existante, réactive et souple, a su s'adapter aux crises en mobilisant de manière exceptionnelle d'autres magistrats du parquet. L'argument des effectifs mobilisables ne tient pas, puisque le parquet national antiterroriste sera forcément moins doté que le parquet de Paris.

On peut craindre une perte d'efficacité liée au problème d'articulation hiérarchique avec les autres magistrats ; une perte de vision d'ensemble des parcours de délinquance conduisant au terrorisme ; une rigidité dans l'affectation des conduites des enquêtes.

Le Conseil d'État redoute un isolement des magistrats affectés à ce parquet, qui perdraient la perception des liens entre petite délinquance et terrorisme.

Hier, nous avons été favorables à la création du juge d'indemnisation des victimes d'attentats terroristes, qui fait progresser le dispositif judiciaire. Ici, nous ne voyons pas l'intérêt d'une réforme qui fragiliserait une organisation. Le contexte exige au contraire stabilisation et moyens. L'expérience récente du parquet national financier incite à la prudence.

Enfin, alors que l'on donne au parquet de Paris une compétence concurrente nationale en matière de criminalité organisée, il serait paradoxal de ne pas maintenir une section antiterroriste en son sein.

Reste que la commission des lois ne rejette pas tout, d'où son amendement n°365. Ainsi, nous reprenons l'instauration d'une compétence concurrente des juridictions parisiennes en matière de crimes et délits contre les intérêts fondamentaux de la Nation ; la possibilité pour le parquet de Paris, dans ses compétences antiterroristes, de requérir par délégation judiciaire, tout procureur de la République de faire procéder aux actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions terroristes ; la possibilité pour les magistrats de la section antiterroriste du parquet de Paris de représenter le ministère public auprès de la cour d'assises statuant en première instance, par dérogation et en lieu et place des avocats généraux de la cour d'appel de Paris.

Ne créant pas de structure autonome, cet amendement ne reprend pas les dispositions sur la réquisition de magistrats du parquet de Paris pour venir en renfort. Soyons simples, ne bousculons pas ce qui est efficace mais améliorons-le. Nos concitoyens nous sauront gré de ce dispositif efficace.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Très bien.

Mme Nathalie Goulet.  - En 2014, six mois avant Charlie, le Sénat, à la demande du groupe UC, déclenchait une commission d'enquête sur les réseaux djihadistes. Notre rapport de 2015 soulignait l'éparpillement des moyens judiciaires. Depuis lors, nous avons voté quantité de lois et amélioré certains dispositifs, même s'il reste des trous dans la raquette.

Je suis sensible à l'argument du rapporteur. Nous avons désormais une coordination du renseignement : stabilisons, augmentons les moyens, mais ne bouleversons pas le dispositif en divisant au lieu de rassembler. L'important est d'attribuer aux forces de sécurité et aux magistrats, en loi de finances, les moyens nécessaires.

Le Sénat a toujours été solidaire des gouvernements pour lutter contre le terrorisme. Solidifions l'édifice. Je suivrai la commission.

M. Marc Laménie.  - Choisir entre ces deux amendements, exposés l'un et l'autre avec compétence et pédagogie, est un dilemme. Ces dossiers sont extrêmement complexes. Nous avons en mémoire de nombreux drames qui mobilisent toutes les forces de sécurité, jusqu'aux douanes.

Le souci d'efficacité impose de ne pas complexifier la situation. Dans quelques semaines, nous examinerons le budget de la mission Justice. Je me rallierai à l'amendement du rapporteur de la commission des lois.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Quoique la création du parquet national antiterroriste ait été retirée de l'avant-projet de loi, nous avons beaucoup auditionné. Tous nos interlocuteurs ont émis des interrogations sur son utilité. Le débat a été dense en commission sur cet amendement déposé il y a quelques jours, car nous voulions arrêter un avis de fond, indépendamment des conditions de travail que vous nous imposiez...

Nous n'avons toujours pas compris l'utilité de cette juridiction spécialisée. La lutte antiterroriste fait déjà l'objet d'une centralisation au parquet de Paris ; François Molins est connu de tous les Français. Les substituts peuvent être mobilisés très rapidement. Le risque d'isolement est réel car le terrorisme est lié au crime organisé, au blanchiment. Nous sommes désemparés. Y-a-t-il une autre utilité que symbolique ? La commission des lois a fait des propositions pour améliorer le dispositif existant. Le groupe socialiste les soutiendra.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Pourquoi créer un tel parquet ? Parce que la menace terroriste est d'une ampleur singulière ; elle a évolué, est à la fois exogène, endogène, nationale et internationale...

Nous devons accompagner, anticiper. Le parquet de Paris aura des compétences accrues, en lien notamment avec la criminalité organisée. Cela nous conduit à dissocier ces deux tâches, qu'il n'est pas réaliste de prétendre mener de front.

Ne lions pas criminalité organisée et lutte contre le terrorisme : leurs liens sont très ténus et occasionnels, nous disent le procureur Molins et la DGSI. Cela justifie donc deux organisations différentes.

En cas de crise grave, le procureur national antiterroriste pourra prendre, sur une liste de magistrats établie avec l'accord du procureur général de Paris, les effectifs qu'il jugera nécessaires. C'est une réponse souple et adaptée. Il n'y a pas, et il n'y aura pas, de pouvoir hiérarchique sur les procureurs de province. Point d'isolement, mais au contraire des liens étroits entre le parquet antiterroriste à Paris et le niveau territorial. Les procureurs délégués ne sont pas créés, n'en déplaise au rapporteur, « pour assurer une certaine coordination entre parquets autonomes », mais pour répondre à la menace endogène que représentent les loups solitaires radicalisés. Ils feront remonter l'information, en lien avec les services de renseignements locaux et les groupes d'évaluation départementaux de la radicalisation (GED).

Ce mécanisme est puissant, souple et adapté à la menace terroriste.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Je ne suis pas d'accord avec vous. Le procureur de la République de Paris et les membres du parquet de Paris ont-ils failli dans leur mission ? Non.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je l'ai dit moi-même !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - L'aggravation de la menace justifierait une nouvelle organisation du ministère public, dites-vous. Est-elle plus forte fin 2018 qu'en 2015 et 2016, quand le terrorisme avait fait tant de victimes ? Vous n'avez pas démontré en quoi cela justifiait un changement profond d'organisation.

S'agit-il de consacrer des moyens supplémentaires à l'action du ministère public dans la lutte contre le terrorisme ? Si oui, où sont-ils ? Le parquet national antiterroriste aura-t-il les moyens de voler de ses propres ailes, sans recourir à des supplétifs ? Non puisque vous prévoyez que le procureur national « prendra » des effectifs au sein du parquet de Paris pour lui prêter main-forte. Le procureur de Paris ne pourra que déléguer ses magistrats sans pouvoir choisir lui-même ceux qui peuvent être distraits de leurs missions... La mutualisation est possible au sein d'un même parquet ; ce ne sera plus le cas. Ni moyens supplémentaires, ni souplesse, donc.

Sur les instruments juridiques nouveaux qui fortifient l'action du ministère public, là, nous sommes d'accord, d'où l'amendement n°365 de nos rapporteurs.

In fine, reste une mesure d'affichage qui permet d'affirmer à peu de frais que la lutte contre le terrorisme est une priorité du Gouvernement... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Marie-Pierre de la Gontrie applaudit également.)

Mme Marie Mercier.  - Bravo !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis absolument pas d'accord. Au nom de quoi dites-vous que les moyens n'y seront pas ? La loi ne mentionne pas les effectifs affectés à chaque parquet !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - C'est pourtant une loi de programmation.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Il n'y a pas non plus d'étude d'impact.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Évidemment, puisqu'il s'agit d'un amendement ! La section C1 antiterroriste du parquet de Paris travaille avec quatorze personnes ; le parquet national antiterroriste se verra affecter trente magistrats.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Au détriment de quels parquets ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Aucun. Nous créons chaque année cent postes de magistrats supplémentaires.

Le mécanisme souple que nous instituons est gage d'efficacité. Le procureur de Paris constituera une liste de magistrats dans laquelle le parquet national antiterroriste trouvera les ressources nécessaires pour faire face à des événements occasionnels de grande ampleur. Comme en 2015 ou après l'attentat de Nice, ils viendront apporter leur concours au parquet national antiterroriste. L'efficacité sera conjuguée à la souplesse.

M. Jacques Bigot.  - Plus nous avançons dans le débat, moins nous comprenons votre proposition, madame la ministre... En quoi le fonctionnement actuel est-il insatisfaisant ? Par définition, un procureur ne peut pas tout faire ; il délègue. Le procureur de Paris estimait lui-même inutile de créer une fonction particulière pour l'antiterrorisme. Vous ajoutez de la complexité puisque le procureur général près la cour d'appel arbitrera les réquisitions de personnel.

Je ne comprends pas votre organisation territoriale. Le procureur de Strasbourg, par exemple, organise son parquet, désigne ceux qui sont chargés de suivre les dossiers, noue des relations avec le procureur national...

Sans mettre en doute votre volontarisme en matière de lutte contre le terrorisme, je ne vois pas de raison de modifier une organisation qui fonctionne.

Je sais gré au rapporteur d'avoir intégré certaines de vos réflexions dans son amendement.

L'amendement n°184 n'est pas adopté.

L'amendement n°365 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 42 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°298 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin, Gabouty et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux, Vall et Dantec.

Supprimer cet article.

M. Guillaume Arnell.  - Nous manquons d'études sur le non-recours à la justice pour cause de découragement financier. En effet, pour les 70 % de salariés dont les revenus excèdent 1 510 euros par mois, il n'y a aucune prise en charge des frais de justice. En 2014, 56 % des mémoires personnels ont abouti à une décision de rejet, contre 9 % des pourvois soutenus par un avocat.

L'article 42 bis fragilise l'accès au droit des personnes ayant peu de moyens, ne recevant pas d'aide juridictionnelle ou peu, et devant passer par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de Cassation, alors qu'ils pouvaient auparavant déposer des mémoires personnels. Cela vaut particulièrement pour la chambre criminelle de la Cour de Cassation, dont les décisions mettent en jeu la liberté des personnes.

Quelle est la part des bénéficiaires de l'aide juridictionnelle déposant des mémoires personnels et quelle est la part de ces personnes recourant à un avocat ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Régulièrement, le Sénat a voté en faveur de la représentation obligatoire par avocat devant le Conseil d'État ou la Cour de Cassation. En pratique, le juge de cassation dit le droit. La technique juridique est en conséquence de plus en plus complexe. Ainsi, le taux de pourvois rejetés est beaucoup plus fort lorsqu'ils ne sont pas présentés par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de Cassation : 56 % contre 6 %. Cela montre une efficacité plus grande.

Ne laissons pas croire à nos concitoyens qu'accéder plus facilement à la chambre criminelle serait mieux pour eux, alors que ce n'est pas vrai, ce serait moins bien.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable. Le texte de la commission des lois, trop large, crée un risque d'entrave excessive à l'accès aux juges pour les personnes ne bénéficiant pas de l'aide juridictionnelle, qui devraient, en plus du coût de l'assistance de l'avocat devant les juges du fond, assumer celui de l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de Cassation. Il me semble préférable de n'exiger la représentation obligatoire que dans certains cas, par exemple en matière contraventionnelle, mais l'amendement de la commission est trop large.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Une fois n'est pas coutume, je partage l'avis de Mme la garde des Sceaux. Si l'on voulait être ironique, l'on soulignerait que le lobby des avocats aux conseils est toujours vivace... J'entends l'argument de la spécialisation, mais figurez-vous qu'il existe des avocats compétents, même s'ils ne sont aux conseils... (Quelques sourires)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

L'amendement n°298 rectifié n'est pas adopté.

L'article 42 bis est adopté.

ARTICLE 43

Mme la présidente.  - Amendement n°186, présenté par le Gouvernement.

A.  -  Alinéas 1 à 12

Remplacer ces alinéas par dix-sept alinéas ainsi rédigés :

I.  -  L'article 131-3 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le 1° est complété par les mots : « cet emprisonnement peut faire l'objet d'un sursis, d'un sursis probatoire ou d'un aménagement conformément aux dispositions du chapitre II du présent titre » ;

2° Le 2° est ainsi rédigé :

« 2° La détention à domicile sous surveillance électronique » ;

3° Le 6° devient le 3°  ;

4° Les 3° et 4° deviennent les 4° et 5°  ;

5° Le 6° est ainsi rédigé :

« 6° Les peines de stages ; »

6° Le 9° devient le 8°  ;

7° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces peines ne sont pas exclusives des peines complémentaires prévues à l'article 131-10. »

II.  -  L'article 131-4-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. 131-4-1.  -  Lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut, à la place de l'emprisonnement, prononcer la peine de détention à domicile sous surveillance électronique pendant une durée comprise entre quinze jours et un an, sans pouvoir excéder la durée de l'emprisonnement encouru.

« Cette peine emporte pour le condamné l'obligation de demeurer dans son domicile ou tout autre lieu désigné par la juridiction ou le juge de l'application des peines et au port d'un dispositif intégrant un émetteur permettant de vérifier le respect de cette obligation.

« Le condamné n'est autorisé à s'absenter de son domicile pendant des périodes déterminées par la juridiction ou le juge de l'application des peines que pour le temps strictement nécessaire à l'exercice d'une activité professionnelle, au suivi d'un enseignement, d'un stage, d'une formation ou d'un traitement médical, à la recherche d'un emploi, ou à la participation à la vie de famille ou à tout projet d'insertion ou de réinsertion.

« La juridiction peut décider que le condamné bénéficiera de mesures d'aide ayant pour objet de seconder ses efforts en vue de son reclassement social.

« En cas de non-respect par le condamné de ses obligations, le juge de l'application des peines peut, selon des modalités précisées par le code de procédure pénale, soit limiter ses autorisations d'absence, soit ordonner l'emprisonnement de la personne pour la durée de la peine restant à exécuter. »

B.  -  Alinéas 25 à 32

Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :

IV.  -  Les deuxième et troisième alinéas de l'article 131-8 du même code sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le prévenu est présent à l'audience, la peine de travail d'intérêt général ne peut être prononcée si celui-ci la refuse. Le président du tribunal, avant le prononcé du jugement, informe le prévenu de son droit de refuser l'accomplissement d'un travail d'intérêt général et reçoit sa réponse.

« Lorsque le prévenu n'est pas présent à l'audience mais y est représenté par son avocat, cette peine peut être prononcée s'il a fait connaître par écrit son accord.

« Lorsque le prévenu n'est pas présent à l'audience et n'a pas fait connaître son accord, cette peine ne peut être prononcée que si le tribunal fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 131-9. Dans ce cas, avant la mise à exécution de la peine de travail d'intérêt général, le juge de l'application des peines informe le condamné de son droit de refuser l'accomplissement d'un travail et reçoit sa réponse. En cas de refus, tout ou partie de l'emprisonnement ou de l'amende fixée par la juridiction peut être mis à exécution, dans les conditions prévues par l'article 706-6 du code de procédure pénale, sous réserve, s'il y a lieu, des possibilités d'aménagement ou de conversion. »

V.  -  Au premier alinéa de l'article 131-9 du même code, les mots : « la peine de contrainte pénale ou » sont supprimés.

C.  -  Alinéa 37

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Les 10°, 11° et 12° deviennent les 8°, 9° et 10°.

D.  - Alinéa 41

Rétablir le VIII dans la rédaction suivante :

VIII.  -  Après l'article 20-2 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, il est inséré un article 20-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 20-2-1.  -  La peine de détention à domicile sous surveillance électronique prévue par l'article 131-4-1 du code pénal est applicable aux mineurs de plus de treize ans.

« Sous réserve de l'application du deuxième alinéa de l'article 20-2, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer à leur encontre une peine de détention à domicile sous surveillance électronique supérieure à la moitié de la peine encourue.

« Cette peine ne peut être prononcée sans l'accord des titulaires de l'autorité parentale, sauf carence de ces derniers ou impossibilité de donner leur consentement.

« Cette peine doit être assortie d'une mesure éducative confiée à la protection judiciaire de la jeunesse.

« Les articles 132-25 et 132-26 du code pénal et 723-7 à 723-13 du code de procédure pénale relatives à la détention à domicile sous surveillance électronique sont applicables aux mineurs. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Nous abordons le titre consacré aux peines. Cet amendement détermine la nouvelle politique des peines du Gouvernement. Il s'agit de faire en sorte que les peines soient mieux adaptées à la situation des personnes, de responsabiliser davantage les tribunaux et de faire en sorte qu'une fois prononcées, les peines soient mieux exécutées. Cette nouvelle politique rend en conséquence plus lisible l'échelle des peines.

Je vous propose de proscrire les peines de prison inférieures à un mois. Pour les peines d'un à six mois, le principe général sera l'exécution des peines en dehors des établissements pénitentiaires, ce qui n'exclut pas en tant que de besoin le recours à l'emprisonnement. Entre six mois et un an, le tribunal définira les modalités d'exécution de la peine ; il décidera d'un éventuel aménagement. Au-delà d'un an, il n'y aura plus d'aménagement systématique ab initio de la peine. Tout cela requiert la création de peines autonomes qui permettront de mieux lutter contre la récidive.

Ainsi, cet amendement maintient la création de la peine autonome de détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE), qui est en effet de nature à diminuer le prononcé des peines d'emprisonnement ; ne supprime pas la peine de sanction-réparation, car cette peine constitue dans de nombreux cas une réponse pénale appropriée et garantissant les droits des victimes ; ne crée pas une peine autonome de probation, qui ne constituerait que la reprise sous un nom différent de la peine de contrainte pénale dont l'expérience démontre qu'elle n'a pas été acceptée par les tribunaux.

Je préfère améliorer le sursis avec mise à l'épreuve, qui sera dénommé sursis probatoire.

Inutile aussi de transformer le suivi socio-judiciaire en une peine principale applicable à tous les délits et crimes, ce qui revient sur la spécificité de cette mesure et aurait pour conséquence d'ajouter cette peine à la peine privative de liberté.

Cet amendement rétablit également les dispositions permettant de prononcer un travail d'intérêt général en l'absence du condamné, dont le consentement à l'exécution des travaux sera recueilli ensuite par le juge de l'application des peines qui pourra notamment, en cas de refus, convertir l'emprisonnement sanctionnant le refus d'exécution en peine de jour-amende.

L'amendement reprend cependant les coordinations ajoutées par la commission des lois et qui avaient été omises par le projet. Il prévoit également, comme l'avait fait la commission, que le tribunal ne pourra prononcer qu'un stage et non plusieurs.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°258, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe La République En Marche.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement, de bon sens, rétablit l'échelle des peines prévues par le texte initial du Gouvernement. La création d'une peine autonome de détention à domicile sous surveillance électronique est une bonne alternative à l'emprisonnement.

Le tour de passe-passe de la commission des lois sur la contrainte pénale ne la revalorise pas.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à ces amendements qui rétablissent le texte du Gouvernement et reviennent sur les apports de la commission des lois.

La peine -  cosmétique - de détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE) n'offre aucune souplesse au juge qui n'aura en cas d'entorse que le choix entre un emprisonnement ou la fin de la peine. Le placement sous surveillance électronique, peu contrôlé, ne permet guère de prévenir la récidive. Mieux vaut la semi-liberté ou le placement à l'extérieur.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - J'entends vos propositions. Je les respecte. Je crois que nos philosophies de la peine ne sont pas si éloignées au fond.

Si nous créons la DDSE comme peine autonome, nous conservons les aménagements pour les courtes peines et gardons trois solutions : le placement extérieur, le placement sous surveillance électronique et la semi-liberté.

M. Dominique Théophile.  - Le recours aux aménagements de peine ab initio reste limité. Les magistrats seront invités à recourir davantage à la DDSE, transformée en peine autonome. La DDSE est une alternative efficace à l'emprisonnement, permettant de lutter contre la surpopulation carcérale endémique, tandis que les magistrats de la juridiction de jugement pourront toujours prononcer en cours d'exécution les peines résultant des obligations et interdictions assortissant la libération conditionnelle.

M. Jacques Bigot.  - En effet, je crois, madame la ministre, que nos positions, à l'issue du travail effectué avec la commission des lois et son rapporteur, face à la surpopulation carcérale et à la récidive, ne sont pas si éloignées. Si la sanction est nécessaire, il faut aussi se préoccuper de la réinsertion. La détention à domicile reste une peine privative de liberté. La probation est un outil efficace. La contrainte pénale n'a pas eu le succès espéré car elle n'a pas été comprise par les magistrats.

Quelqu'un qui consulte des sites pédopornographiques doit-il aller en prison ? Sans doute pas. En revanche, il faut lui imposer un suivi socio-judiciaire. C'est pourquoi la commission des lois a repris notre travail pour articuler les peines et les modalités d'exécution des peines. Nous avons recherché un équilibre.

Les amendements identiques nos186 et 258 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°351, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Alinéas 17 à 24

Supprimer ces alinéas.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cet amendement prolonge la logique des amendements adoptés en commission concernant l'article 43 et la simplification des dispositions relatives au prononcé des peines. Il convient de parachever cette réforme en supprimant les restrictions aux stages et en permettant aux juridictions de définir les contenus des stages en les adaptant aux profils des délinquants de leur territoire. 

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Retrait, sinon avis défavorable. Vous supprimez la référence aux différents types de stages, laissant les juridictions libres de définir les stages. Cela constitue une entorse au principe de légalité des délits et des peines. Il appartient au législateur de définir précisément les peines encourues. C'est ce que fait notre texte.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Effectivement, en matière pénale, le stage doit figurer dans la loi comme peine - c'est le cas ; en revanche, les modalités du stage restent libres. Nous avons défini clairement son principe, son quantum et sa durée. Adoptons cet amendement, tout en sachant qu'il n'est pas question pour le Sénat de prendre un risque constitutionnel, et conservons-le pour l'instant, avant d'approfondir la réflexion. Nous verrons comment elle évoluera.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Dans ce cas, j'émets un avis défavorable.

L'amendement n°351 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°352, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Alinéa 43

I.  -  Remplacer les mots :

4° de l'article 224-9

par les mots :

4° du I de l'article 224-9

II.  -  Après la référence :

225-20,

insérer les mots :

le 7° de l'article 227-29,

III.  -  Remplacer les mots :

6° de l'article 322-15

par les mots :

6° du I de l'article 322-15

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Amendement de coordination.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°352 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°353, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Après l'alinéa 44

Insérer un alinéa et quatre paragraphes ainsi rédigés :

...° Le deuxième alinéa de l'article L. 3421-1 du code de la santé publique.

...  -  Au troisième alinéa de l'article L. 3353-3 du code de la santé publique, les mots : « , et celle de l'obligation d'accomplir un stage de responsabilité parentale, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1 du code pénal » sont supprimés.

...  -  À la première phrase de l'article 20-4-1 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, les mots : « de citoyenneté » sont supprimés.

...  -  Au second alinéa de l'article 3 de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public, les mots : « de citoyenneté mentionné au 8° » sont remplacés par les mots : « mentionné au 7° ».

...  -  À la première phrase du premier alinéa de l'article 709-1-1 et au premier alinéa de l'article 709-1-3 du code de procédure pénale, les mots : « deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « premier alinéa ».

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Amendement de coordination.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable.

L'amendement n°353 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°305 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux, Vall et Dantec.

Alinéas 45 à 48

Supprimer ces alinéas. 

M. Guillaume Arnell.  - Instaurée par la loi du 10 juin 1983, la peine de travail d'intérêt général permettait de préparer la réinsertion en rendant service à la collectivité. L'individu devait réparer les torts qu'il avait causés à la société. C'était la différence avec les travaux forcés, abolis en France par l'ordonnance du 4 juin 1960. L'accomplissement d'un travail d'intérêt général en entreprise de l'économie sociale et solidaire ne comporte aucune mention de la réinsertion, et la notion d'intérêt général est discutable, même dans la tête du condamné. Aucune mesure de sensibilisation ou de formation dans les entreprises chargées d'accueillir ces TIG n'est citée. Les efforts doivent porter sur l'amélioration de la mise en oeuvre des travaux d'intérêt général et les sanctions applicables en cas de manquements.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Retrait ? L'expérimentation permet de réaliser des travaux d'intérêt général auprès de personnes morales de droit privé, relevant de l'économie sociale et solidaire. Cela semble intéressant car il est difficile de trouver des places pour effectuer un travail d'intérêt général. Tous les intervenants nous ont alertés sur la très grande difficulté à trouver des solutions. Or tout l'enjeu de ce projet de loi est d'offrir aux magistrats un panel de peines suffisamment large pour que le juge puisse les adapter au grand nombre de personnes qui comparaissent.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux,  - Retrait. Le Gouvernement veut créer, dans quelques semaines, une agence du travail d'intérêt général pour impulser une vraie politique dans ce domaine. Une plateforme recueillera les lieux de stage habilités et les tuteurs.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Le développement des travaux d'intérêt général marque le pas depuis plusieurs années. Or nous ne cessons de nous inquiéter de la préférence donnée aux peines d'enfermement au moment où nous nous efforçons de développer les alternatives à l'incarcération. L'emprisonnement reste la règle, au risque d'exposer les jeunes délinquants à l'école de la récidive, qu'est parfois la prison. Ce n'est pas en prison que les détenus pourront faire l'apprentissage d'un métier ou préparer leur réinsertion. Le travail d'intérêt général reste une formule utile. (Mme Esther Benbassa approuve.)

En interdisant au secteur de l'économie sociale et solidaire d'accueillir des travaux d'intérêt général, on se prive d'une possibilité. Pourtant l'économie sociale et solidaire, ce n'est pas comparable, si vous me permettez de forcer un peu le trait, aux travaux forcés dans l'industrie capitaliste. Les entreprises de ce secteur sont inspirées par une démarche humaniste, qui n'est pas moins respectable que celle des collectivités publiques.

Pourquoi les exclure du champ des travaux d'intérêt général ? Mieux vaudrait au contraire desserrer les goulets d'étranglement vis-à-vis des travaux d'intérêt général. Je sais toutefois qu'avec la suppression des emplois aidés, certaines communes seront plus disposées à accueillir des personnes condamnées à des travaux d'intérêt général... Mais cela suppose un encadrement qui fait parfois défaut dans les petites communes, où c'est souvent le maire qui doit se charger de cet accueil. Ne faisons pas peser sur elles une charge excessive.

En retirant cet amendement, Monsieur Arnell, vous offririez une solution supplémentaire à de nombreux jeunes délinquants.

M. Guillaume Arnell.  - Cet amendement n'est cosigné que par la moitié des sénateurs RDSE. Nous voulions avoir la certitude que l'élargissement des travaux d'intérêt général aux entreprises de l'économie sociale et solidaire n'impliquait pas un changement de philosophie de ces travaux. Je retire l'amendement.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Merci de votre compréhension ! J'apprécie votre geste.

L'amendement n°305 rectifié est retiré.

Mme la présidente. - Nous avons examiné aujourd'hui 51 amendements. Il en reste 98. Or ces textes sont inscrits à l'ordre du jour de la semaine prochaine. Je vous propose de lever la séance après le vote sur cet article. (Assentiment)

M. Pierre Ouzoulias.  - Alors que, depuis des années, l'échelle des peines devient de plus en plus lourde, cette logique semble enfin s'inverser. Tant mieux ! Toutefois, malgré les bénéfices de ce consensus naissant, nous ne pouvons voter cet article car nous ne trouvons pas dans votre programmation les moyens supplémentaires nécessaires aux aménagements de peines et à la réinsertion.

M. Jérôme Bignon.  - Les collectivités ne sont pas les seules à être frappées par la réduction massive des emplois aidés, les associations le sont tout autant ! Président d'une banque alimentaire, je suis convaincu que donner l'opportunité à des jeunes qui se sont écartés du droit chemin d'aider leurs prochains dans la difficulté est une bonne chose. Je serai prêt, avec nos bénévoles, à m'y employer.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Merci pour votre offre. Les travaux d'intérêt général ne constituent que 6 % des peines prononcées. Pourtant, c'est un outil précieux.

Monsieur Ouzoulias, nous avons prévu des moyens supplémentaires à travers le recrutement de 1 500 conseillers d'insertion et de probation supplémentaires, qui nous aideront notamment à suivre les travaux d'intérêt général.

L'article 43, modifié, est adopté.

Prochaine séance, mardi 16 octobre 2018, à 14 h 30.

La séance est levée à 19 h 5.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mardi 16 octobre 2018

Séance publique

À 14 h 30

1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.

Texte de la commission (n°721, 2017-2018).

À 16 h 45

2. Questions d'actualité.

À 17 h 45 et le soir

3. Suite du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (procédure accélérée) (n°463, 2017-2018) et du projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions (procédure accélérée) (n°462, 2017-2018).

Rapport de MM. François-Noël Buffet et Yves Détraigne, fait au nom de la commission des lois (n°11, 2018-2019).

Textes de la commission (nos12 et 13, 2018-2019).