SÉANCE

du mercredi 24 juin 2020

96e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. David Assouline

Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, Mme Annie Guillemot.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Veuillez excuser l'absence du président du Sénat qui assiste en ce moment même à la séance plénière au cours de laquelle le Conseil économique social et environnemental, qu'il a consulté en application de l'article 70 de la Constitution, présente le projet d'avis intitulé « La prévention et la réduction du chômage de longue durée dans une perspective d'action territoriale ». (M. Albéric de Montgolfier s'exclame.)

J'invite chacun au respect des règles sanitaires et des distances, ainsi qu'au port du masque lorsqu'un siège ne peut être laissé vide entre deux occupés. Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J'appelle chacun de vous, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, des uns et des autres, comme du temps de parole.

Convention citoyenne

M. Jérôme Bignon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants) La boîte à outils de notre mécano démocratique s'est enrichie, le 25 avril 2019, de la Convention citoyenne sur le climat composée de 150 citoyens tirés au sort, qui a adopté 149 propositions pour « changer la société ».

Elle est confortée dans sa légitimité par une histoire ancienne qui remonte à Athènes, en passant par Montesquieu et Rousseau, puis elle s'est renforcée par le sérieux de son travail qui ne se substitue pas à celui des organes de notre démocratie parlementaire (M. François Bonhomme s'exclame.) mais contribue à nourrir leur réflexion et éventuellement leur action. (Quelques murmures à droite)

Certaines mesures intéressantes portent un espoir à traduire en actes, d'autres poursuivent des actions engagées.

Même pour les plus pertinentes, le chemin est long et parfois chaotique jusqu'à la concrétisation. Je songe notamment aux pesticides et à la transition énergétique, ou encore aux moyens alloués à l'innovation...

L'Europe doit être une partie intégrante de cette avancée, d'abord parce qu'elle peut être l'échelon le plus efficace, comme pour la taxe carbone aux frontières de l'Union ; ensuite, parce qu'elle s'est emparée du sujet climatique avec un paquet Vert ambitieux qu'il va falloir négocier et agrémenter.

Je suis convaincu que la croissance décarbonée, qui passe par l'innovation, les nouvelles énergies et la recherche-développement, est la solution d'avenir.

Comment le Gouvernement entend-il intégrer le travail de la Convention citoyenne pour le climat dans la stratégie et les engagements de la France pour 2030 et 2050, afin d'apporter une réponse durable à ce défi global ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants ; M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire .  - La Convention citoyenne pour le climat, lancée par le Président de la République à la suite du Grand débat national, m'a remis ses propositions dimanche dernier. Cent cinquante citoyens tirés au sort, hommes et femmes de 16 à 82 ans, venant de tous les territoires, ont travaillé pendant neuf mois et je tiens d'abord à leur rendre hommage.

C'est une bonne nouvelle pour la démocratie et l'écologie. Je partage la vision d'une transformation écologique globale. Beaucoup des propositions formulées sont convergentes avec les orientations du quinquennat, d'autres créeront du débat et c'est normal...

M. François Bonhomme.  - C'est sûr !

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Des représentants de la Convention citoyenne pour le climat seront reçus lundi prochain par le Président de la République, qui leur indiquera les suites données à leurs propositions. Certaines qui sont finalisées pourront être transmises sans filtre au Parlement, voire soumises à référendum, pour articuler la démocratie délibérative avec la démocratie représentative. D'autres devront être approfondies.

Le Président de la République l'a dit : nous devons penser une reconstruction économique, écologique et solidaire. La Convention citoyenne pour le climat est au coeur de ce projet.

Plan de relance (I)

M. Albéric de Montgolfier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Sénat a voté les deux premiers projets de lois de finances rectificatives (PLFR), avec ses mesures de soutien efficaces, immédiates. Il s'interroge en revanche sur le troisième, même si l'on peut regretter que des textes d'application n'aient pas été pris à temps, comme pour la TVA à 5,5 % sur les tenues de protection...mais un article dans un célèbre journal satirique paraissant ce jour devrait y inciter ! (Quelques sourires à droite)

Le prochain PLFR constitue une déception car il ne comprend aucune mesure de relance. L'Allemagne, quant à elle, en a adopté un doté de plus de 50 milliards d'euros pour l'investissement, dont 9 milliards pour l'hydrogène, représentant au total 5,5 % du PIB, alors que l'effort français n'est que de 2,5 % du PIB, sans mesure propre à relancer l'investissement des entreprises. Or celui-ci a chuté de 20 % à 25 %.

Il ne comporte aucune mesure pour relancer la consommation des ménages, hors automobile, ni pour inciter les collectivités territoriales à investir. Ainsi les contrats de plan État-régions (CPER) et les plans Très Haut Débit connaissent des retards. Aucune mesure non plus sur l'épargne des ménages, dont 100 milliards d'euros ont été confinés...qui pourraient servir à investir ou à consommer !

J'ai proposé, ainsi que de nombreuses autres voix au Sénat, des mesures fortes. Si nous attendons le budget pour 2021, ce sera trop tard et nous aurons perdu six mois, pendant lesquels nous connaîtrons des défaillances d'entreprises. Pourquoi attendre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Vous avez raison, la crise est inédite avec une baisse prévue du PIB de 11 %. Des mesures d'urgence sont venues très rapidement - plus que chez nos voisins : prêts garantis par l'État, disponibles quelques jours après le vote dans l'hémicycle, chômage partiel, report de cotisations fiscales et sociales, fonds de solidarité pour les indépendants.

Ces plans de secours sont complétés par des plans de soutien et d'urgence, pour 14 milliards d'euros, soit l'épaisseur du trait par rapport aux efforts déployés pour porter à 18 milliards d'euros le plan pour le tourisme, à 10 milliards d'euros le plan pour l'automobile, avec un soutien à l'électrification de notre flotte, à 15 milliards d'euros le plan aéronautique, pour investir dans l'avion décarboné ; 1 milliard d'euros sera inveti dans la Tech, et 400 millions d'euros seront dégagés pour la culture.

Nécessaires pour accompagner les entreprises, ces soutiens sont complétés par des mesures transversales, telles que le report de créances, ou la prime exceptionnelle pour l'embauche d'apprentis, très attendue par les entreprises et les jeunes.

Nous travaillons au plan de relance qui accompagnera la transformation de notre économie. Nous avons déjà des crédits disponibles. Le suramortissement fiscal en est un élément. Nous ne manquons pas de carburant pour avancer.

Mais il faut stabiliser l'économie et avoir une vision sur l'évolution de celle du monde : rendez-vous en septembre. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Soutien à l'apprentissage

Mme Patricia Schillinger .  - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM : « Allô ! » puis sourires à droite) La crise sanitaire et économique est aussi une crise sociale. Le fonds de garantie et le chômage partiel ont constitué un soutien essentiel pour les salariés et les indépendants.

Le Gouvernement a annoncé un vaste plan de soutien à l'apprentissage, afin que l'entrée dans la vie professionnelle des jeunes générations ne soit pas sacrifiée. Une prime exceptionnelle est prévue pour les entreprises qui recrutent des apprentis du 1er juillet 2020 au 28 février 2021, de 8 000 euros pour un majeur et de 5 000 euros pour un mineur.

Notre action en faveur des jeunes doit être forte, déterminée et innovante, notamment en favorisant, grâce à la loi de transformation publique, les apprentis dans la fonction publique. Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) peut participer aux frais de formation des apprentis mais il faut aller plus loin, particulièrement dans cette fonction publique, pour soutenir leur recrutement.

Les collectivités territoriales sont vos alliées dans votre stratégie en faveur de la jeunesse, qui ne doit pas être une génération perdue. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour soutenir cette stratégie ? (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - La loi de transformation de la fonction publique facilite le recours à l'apprentissage, formation d'excellence, dans le public comme dans le privé, et qui ouvre de nombreux débouchés. Nous l'avons développée pour les métiers hospitaliers, où elle n'existait pas.

Nous allons augmenter de 15 % le nombre d'apprentis dans la fonction publique d'État, le portant à 13 000 au total, avec des efforts significatifs dans les ministères qui ont les filières industrielles les plus professionnalisantes.

Les apprentis en situation de handicap pourront être titularisés à titre dérogatoire.

Le CNFPT finance désormais 50 % des frais de formation des apprentis ; ce matin même le conseil d'administration a examiné la convention de partenariat avec France compétences. Je viens de signer l'arrêté qui sécurisera la participation de cet organisme au financement de l'apprentissage. Nous travaillons en outre à un dispositif exceptionnel qui accompagnerait les employeurs territoriaux, comme dans le privé, pour soutenir le recrutement, dans la crise que nous connaissons. Les échanges sont en cours. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Plan de relance (II)

M. Philippe Bonnecarrère .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ma question complète celle de M. de Montgolfier. À partir de septembre, nous vivrons une grave crise économique et sociale. Un plan de relance s'impose, mais nous ne pouvons le faire seuls : il sera européen ou ne sera pas.

C'est pourquoi le sommet européen des 17 et 18 juillet, et l'éventuel sommet qui suivra, seront déterminants, avec une obligation de résultats. Le Président de la République en a conscience : en témoignent ses déplacements aux Pays-Bas et en Allemagne.

Le plan de relance européen, projet de grande ampleur, qui peut impliquer d'aller plus loin dans l'intégration, ne pourra aboutir sans ressources supplémentaires. Les deux solutions de financement les plus prometteuses sont la taxe Gafam et la taxe carbone aux frontières, assises sur deux marqueurs de notre temps : la révolution numérique et la crise environnementale. La première est essentielle pour faire participer les géants du numérique aux charges collectives ; la seconde pour répondre à l'urgence écologique en rétablissant une équité économique entre l'Union européenne et les pays extérieurs, la Chine au premier chef.

Madame la ministre, quelles sont les perspectives sur ces deux taxes ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Merci de mettre en lumière la proposition historique de la Commission européenne, car 500 milliards d'euros de levée de dette commune pour financer un plan de relance du même montant, c'est du jamais vu dans la construction européenne.

Oui, nous fondons beaucoup d'ambition pour le prochain Conseil européen et espérons qu'il adoptera rapidement le plan de relance.

Les deux taxes, au-delà de l'enjeu des financements, pourraient apporter la reprise de notre souveraineté, consistant à faire payer l'accès à notre marché unique, et à garantir une concurrence loyale entre l'ensemble des pays qui alimentent la production européenne ou plutôt le marché européen. Mme von der Leyen s'est engagée à nous faire des propositions avant la fin de l'année pour la taxe carbone, tandis que l'OCDE avance sur la taxe sur le numérique.

Notons que les États-Unis sont toujours à la table des négociations. Sans accord au sein de l'OCDE, c'est l'Union européenne qui le mettra en place, le commissaire Thierry Breton a été parfaitement clair. Nous envoyons un signal fort : nous sommes une économie ouverte, mais nous sommes sortis de l'ère de la naïveté. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Fracture numérique

Mme Josiane Costes .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Le numérique apparaît comme un facteur de résilience face à la crise sanitaire, qui a maintenu l'enseignement, l'économie et le lien social. Mais la crise a révélé l'ampleur des fractures sociale, territoriale et numérique : un Français sur six n'a pas accès à internet, un sur cinq ne sait pas communiquer sur internet, et un sur trois manque de compétences numériques de base.

Les personnes les plus fragiles sont aussi celles qui ont le plus de difficulté : ainsi, 80 % des personnes n'ayant pas internet ont plus de 60 ans. C'est l'objet de la mission d'information de Raymond Vall sur l'illectronisme.

Il faut y ajouter les disparités de déploiement du réseau sur le territoire et le manque d'équipements des familles précaires : un seul ordinateur pour toute une famille, un réseau accessible uniquement dans un coin du logement ou du jardin, cela pose problème. Ainsi, 5 % à 10 % des élèves étaient injoignables pendant le confinement. Des initiatives existent : maisons France service, plan France très haut débit, Pass numérique, par exemple. Mais il faut réduire encore plus les fractures, alors que les inégalités se multiplient. Le télétravail peut être une attente déçue, faute de réseau.

Monsieur le ministre, accélérez-vous la politique de l'État en la matière ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique .  - (« Ah ! » à droite) Vous évoquez une réalité qui préexistait au confinement : la séparation entre ceux qui sont connectés et ceux qui ne le sont pas. Et elle ne touche pas que les personnes âgées. De nombreux jeunes, très à l'aise sur les réseaux sociaux, ne savent pas actualiser leur fiche sur le site de Pôle emploi, faire un cv ou transférer un e-mail...

Des tâches basiques comme télécharger une attestation de sortie ou établir une visioconférence avec leurs proches ou petits-enfants, ne sont pas accessibles à certains. Cette fracture, cruelle pendant le confinement, est économique et sociale, et a éclaté lors du grand débat. Il faut faire un effort sur les équipements et les usages. Nous y travaillons avec Agnès Pannier-Runacher et Julien Denormandie. Ce que nous dit le confinement, c'est que la fracture est béante, qu'il faut accélérer et qu'il faut s'en saisir totalement, au bon niveau, dans le cadre du plan de relance en particulier. Nous y travaillons.

M. Didier Mandelli.  - Très bien !

Licenciements chez Nokia Alcatel-Lucent

Mme Christine Prunaud .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Martine Filleul applaudit aussi.) En 2015, le ministre Macron préconisait la sauvegarde des emplois lors du rachat d'Alcatel par Nokia.

Cinq ans et trois plans de licenciements plus tard, Nokia supprime 1 233 emplois en France, dont les salariés du centre de R et D, et 400 à Lannion, dans mon département.

Or ce groupe touche 65 à 80 millions d'euros par an au titre du crédit d'impôt recherche (CIR), soit 30 % de la masse salariale des 2 500 salariés du service de R et D. Seul objectif de cette trahison : augmenter la rémunération des actionnaires et hauts dirigeants ! Tel est le sens éternel des licenciements boursiers !

Les sites de Lannion et Nozay, dans l'Essonne, détiennent des compétences indispensables au groupe. Demander au groupe de revoir sa copie ne suffit pas : il faut interdire les licenciements boursiers.

Quand sauvegarderez-vous notre souveraineté industrielle ? (Applaudissements nourris sur les travées du groupe CRCE)

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Nokia réduit en effet fortement sa recherche et son développement en France. Le léger retard de notre pays dans le domaine de la 5G n'y est pas étranger et cela appelle notre vigilance. Nous avons demandé à Nokia de revoir son plan en minimisant les départs volontaires...

M. Fabien Gay.  - Ce n'est pas la question !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État.  - Nous sommes aux côtés des salariés depuis cinq ans (M. Fabien Gay le conteste vigoureusement.) ; la France est le seul pays protégé des restructurations de ce groupe. (Protestations sur les travées du groupe CRCE)

Souvenons-nous des difficultés d'Alcatel ; le rachat par Nokia était le seul moyen de sauver cet acteur européen qui doit affronter la concurrence d'Ericsson et de Huawei.

Nous avons reçu hier les syndicats ; nous pousserons Nokia dans ses retranchements dans l'intérêt de notre recherche et de notre souveraineté. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Écocide

M. Jérôme Durain .  - En 2017, Emmanuel Macron devait réussir à ringardiser les partis - le mien, ainsi que le vôtre, enfin, celui de l'époque, monsieur le Premier ministre - en brocardant leur incapacité systématique à accepter les propositions du camp d'en face.

Or Emmanuel Macron fait de même actuellement, sur le crime d'écocide : les sénateurs socialistes avaient déposé l'an dernier une proposition de loi, un texte équilibré pour mettre fin à l'impunité pour les crimes les plus graves. Vous avez dit : c'est une bonne idée, mais c'est non ! Puis les députés l'ont reprise dans une autre version : toujours non !

Cette fois, c'est la Convention citoyenne pour le climat qui la reprend sous une autre forme, peut-être plus audacieuse : qu'allez-vous en faire, monsieur le Premier ministre ? (M. François Bonhomme s'exclame.) Si l'on n'écoute pas la société, attention aux conséquences : elle peut ressentir un certain mépris, une frustration, auxquels les parlementaires d'opposition que nous sommes se sont accoutumés, mais elle pourrait en prendre ombrage...

Outre l'écocide, il y a eu le rétablissement de l'ISF, le référendum sur ADP, la commission d'enquête sur le Covid-19. C'est encore non, non et non ! Cela devient un réflexe pavlovien.

Allez-vous écouter la société, à défaut d'écouter les parlementaires ? Qu'allez-vous faire de la proposition de la Convention citoyenne pour le climat sur l'écocide ? (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Si cette Convention citoyenne pour le climat a été mise en place par le Président de la République, c'est justement pour écouter les 150 tirés au sort sur ce sujet. Nous l'avons fait : Mme Borne a reçu 149 propositions qui ont été étudiées dont celle qui a retenu votre attention.

Les deux difficultés principales que j'avais relevées au printemps 2019 devant le Sénat et en décembre dernier devant l'Assemblée nationale demeurent.

La première est procédurale : on ne peut soumettre au référendum une mesure de législation pénale, car elle n'entre pas dans le champ de l'article 11 de la Constitution. La seconde est davantage de fond : il s'agit de l'exigence de précision de la loi pénale. Or la Convention citoyenne pour le climat définit l'écocide en des termes - « dépassement des limites planétaires... »

M. François Bonhomme.  - Vaste programme !

M. Roger Karoutchi.  - Pourquoi pas « interplanétaires » ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - ... qui ne répondent sans doute pas à cette exigence.

Pour autant, la réponse aux atteintes à l'environnement est un vrai enjeu. Dans le texte sur le Parquet européen, nous avons institué une juridiction environnementale et une nouvelle procédure, la Convention judiciaire pour l'environnement. Nous sommes prêtes, avec Élisabeth Borne, à réfléchir à un délit plus général de pollution des eaux, des sols et de l'air, qui pourrait trouver sa place dans notre droit pénal de l'environnement

C'est sur la base des propositions de la Convention citoyenne pour le climat que nous pourrons y réfléchir ensemble...

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Bien sûr, nous les soumettrons au Parlement.

M. Jérôme Durain.  - Je vous parle d'exigence démocratique, vous me répondez précision de la loi pénale : Dominique Rousseau explique qu'il faut reconnaître politiquement la compétence des citoyens. Emmanuel Macron lui-même a appelé à prendre des options fortes, voire radicales...

Attention à ne pas trop filtrer, sinon on peut faire déborder. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

Relations avec la Turquie

M. Christian Cambon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, depuis des mois, la Turquie mène une politique de puissance en Méditerranée orientale en alternant démonstrations de force et interventions militaires. Après les forages gaziers dans les eaux territoriales chypriotes au mépris du droit international, l'offensive contre nos alliés kurdes, le chantage aux flux migratoires, les incursions en Syrie, en Irak et en Libye, la Turquie vient d'agresser la frégate française Courbet qui menait une mission de surveillance au large de la Libye pour le compte de l'OTAN. Ciblé trois fois par les radars de tirs de missiles turcs, notre bâtiment a dû se retirer.

Voilà où nous en sommes arrivés au sein même de l'OTAN, le secrétaire général Stoltenberg parlant de « désaccord entre alliés » et nos protestations ne recueillant que huit soutiens européens sur les trente membres.

Cet incident jette une lumière crue sur la faiblesse diplomatique et militaire d'une Europe incapable de se faire respecter. Il marque aussi, après bien d'autres, la perte d'influence de la France dans une région où elle fut autrefois si respectée et écoutée.

La France et l'Europe agiront-elles enfin avec fermeté pour contrer ce nouvel impérialisme turc ? Passerons-nous de la diplomatie des déclarations à la diplomatie de l'action ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, SOCR et CRCE)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Monsieur Cambon, lundi soir, à l'Élysée, alors que le Président de la République recevait le président Saïed, vous l'avez entendu dire que la Turquie jouait un jeu extrêmement dangereux. Il est urgent que l'Union européenne ouvre une discussion de fond sans tabou ni naïveté sur sa relation future avec Ankara. Elle doit défendre fermement ses intérêts, car elle en a les moyens.

L'affaire de la frégate Courbet est scandaleuse. Elle participait à un exercice de l'OTAN, alors que la frégate turque couvrait une opération illégale de violation de l'embargo sur les armes décidé par les Nations Unies.

La Turquie doit clarifier le rôle qu'elle entend jouer en Libye, pays en voie de « syrianisation », du fait de l'appel turc au soutien de supplétifs syriens. Il faut aussi que nous trouvions le moyen de pousser la Turquie vers la négociation dite « 5+5 », car si elle renforce sa présence en Libye, les Russes feront de même. Nous devons également faire respecter le droit maritime international et les territoires de nos alliés chypriotes et grecs. Enfin, nous ne pouvons pas accepter que la Turquie instrumentalise les réfugiés pour exercer des pressions à notre égard. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Indemnisation du chômage

M. Franck Montaugé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Votre réforme de l'assurance chômage a été très dure. Le contexte de la pandémie la rend inique et inadaptée à la nécessité de relance économique et à l'obligation de solidarité nationale. Comment allez-vous revenir sur les principes de cette réforme ? Il faut atténuer la crise sociale et relancer la demande intérieure. Or le chômage va exploser ; le pouvoir d'achat sera la clé de la relance. L'économie marche à la confiance, qui doit reposer sur l'accompagnement des chômeurs. Allez-vous restaurer leurs droits et les améliorer compte tenu de l'urgence économique et sociale ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - La crise épidémique se prolonge en crise économique et sociale. C'est pourquoi, dès le 14 avril, un décret prolongeait les droits au chômage jusqu'au 31 mai, et le Gouvernement prévoyait d'autres mesures pour protéger nos citoyens touchés de plein fouet par le confinement.

Notre réforme voulait associer protection et incitation à l'emploi, dans un contexte différent, il est vrai, puisque nous avions fait baisser le taux de chômage de 10 à 8 % et étions en voie d'atteindre les 7 %. Nous avons aussi restreint les contrats courts, et mis en place de nouveaux droits pour les démissionnaires qui voulaient créer leur entreprise.

Je ne pense pas que vous vouliez vous opposer à ces mesures. Les principes sont bons, nous allons les adapter à la situation. Nous continuons le dialogue social pour cela, dans un esprit pragmatique. Le Président de la République reçoit tout à l'heure les partenaires sociaux sur cinq sujets dont celui-là ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

M. Franck Montaugé.  - Vous ne m'avez pas convaincu. Vous n'avez pas non plus évoqué la formation professionnelle, or il aurait fallu profiter de la crise pour former aux métiers de demain, par exemple en accompagnant les chômeurs en formation dans les filières nouvelles.

N'oublions pas non plus les contrats très courts dans le tourisme, l'hôtellerie, l'événementiel ou le tourisme. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

Transport transmanche

M. Jean Bizet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'associe le sénateur Vaspart à ma question.

L'activité maritime transmanche est en situation difficile à cause du Covid et du Brexit dur qui s'annonce. Elle souffre aussi des distorsions de concurrence avec les pavillons étrangers.

Quelles mesures d'accompagnement pour ce secteur ? Le prêt garanti par l'État sera-t-il basé sur les trois meilleurs mois de chiffre d'affaires des entreprises ? L'exonération de charges patronales sera-t-elle assurée sur la durée de remboursement de ce prêt, soit cinq ans ? Enfin, peut-on envisager un plan de communication à l'adresse de la communauté britannique, indispensable à la veille du Brexit ? En 2019, l'Espagne y a déjà consacré plus 10 millions d'euros.

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Les ferries et navettes maritimes ont maintenu pendant le confinement 50 % de l'offre pour 10 % de fréquentation. Je les remercie de leur mobilisation.

Le Gouvernement est conscient des difficultés. L'ensemble des acteurs transmanche ont bénéficié des aides de droit commun aux entreprises. Nous avons prévu un dispositif pour compenser une partie des charges de personnels et des charges variables. Enfin, le secteur bénéficie des aides spécifiques contenues dans le plan Tourisme, dont le maintien du dispositif d'activité partielle à 100 %, jusqu'en septembre.

L'extension saisonnière du prêt garanti par l'État et des exonérations est à l'étude.

Le secteur transmanche bénéficiera de la stratégie maritime en cours de finalisation pour maintenir la compétitivité des armateurs européens.

M. Jean Bizet.  - Les réponses ne sont pas à la hauteur des enjeux. J'aurais souhaité que vous intégriez les propositions de l'Union européenne datant de 2004. Les Britanniques et les Danois ont mis en place l'exonération des charges patronales, pas la France. Les crises sont des amplificateurs de tendances et des révélateurs de fragilités. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Hydrogène

M. Alain Cazabonne .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La Convention citoyenne pour le climat a rendu ses conclusions qui n'ont rien de révolutionnaire en matière énergétique, alors que l'Allemagne a affiché son ambition de devenir le leader de l'hydrogène vert avec un plan de 9 milliards d'euros et que le Danemark développe d'énormes parcs d'éoliennes offshore pour la fabrication de cet hydrogène.

À condition d'être produit avec de l'électricité issue des énergies renouvelables, l'hydrogène est le carburant du futur, décarboné, illimité et stockable. La France ne peut pas rater le coche. Des véhicules existent, trains, bus ou voitures à hydrogène - j'espère qu'elles pourront continuer à rouler à 130 km/h. (Sourires) Des projets se font jour à Pau avec Phébus, à Belfort où se tiendra le salon de l'hydrogène, en Vendée ou en Gironde : j'ai proposé que l'usine Ford de Blanquefort soit reconvertie en site de production d'hydrogène. Mais il faut un plan national.

Miser sur le tout-batterie, ce n'est pas miser sur l'avenir. Les batteries ne sont ni écologiques ni durables. Comment la France se convertira-t-elle à l'hydrogène ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire .  - L'hydrogène décarboné est incontournable pour la mobilité, la production de chaleur ou l'introduction massive des renouvelables dans le mix énergétique. Depuis le début du quinquennat, le Gouvernement est très mobilisé. La France a présenté un plan pour l'hydrogène dès 2018.

En 2019, nous avons investi 90 millions d'euros pour soutenir de nombreux projets territoriaux tous prometteurs et révélateurs de l'engouement pour cette filière.

En 2020, elle continue sa montée en puissance. Près de 160 dossiers ont été déposés pour plus de 32 milliards d'euros d'investissements, en réponse à l'appel à manifestation d'intérêt lancé par le Gouvernement. L'enjeu est de créer un écosystème industriel autour de l'hydrogène. Notre stratégie hydrogène, que nous présenterons dans les semaines à venir, visera à renforcer le caractère industriel de l'offre française et à mutualiser l'offre et la demande à l'échelle des territoires.

M. Alain Cazabonne.  - Je vous en donne acte. Le président Kennedy a lancé le projet Apollo alors que les Russes étaient donnés gagnants : un pays porté par une ambition est capable d'atteindre l'objectif qu'il s'est fixé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Convention citoyenne pour le climat

M. Jean-Marc Boyer .  - Monsieur le Premier ministre, 150 citoyens, 149 propositions remises dimanche dernier pour nous dire comment se déplacer, travailler, se nourrir, produire. Neuf mois de travail en milieu fermé. Comment prendre en compte les avis de ceux qui n'ont pas la légitimité de l'élection ?

Le Président de la République a dit que le plan de relance ne passerait pas par les régions ni les départements si le calendrier électoral était maintenu. Quelle drôle de vision de la démocratie comme obstacle à la réforme...

Certaines propositions sont irréalistes et déconnectées du terrain. En limitant la vitesse à 110 kilomètres heure sur les autoroutes, êtes-vous prêt à renouveler l'expérience malheureuse des 80 kilomètres heure ? Un temps de travail de 28 heures payées 35 heures, cela aidera-t-il à relancer l'économie ?

Attention aux interdictions et aux contraintes supplémentaires que dénonçaient déjà nos Gaulois réfractaires.

Attention aussi à la promotion idéologique de fausses vérités : pourquoi supprimer les vols intérieurs - sous prétexte de lutter contre le changement climatique, alors que l'empreinte carbone de l'aviation ne représente que 4,7 % ?

Ces propositions liberticides ne sont pas l'émanation de la volonté du peuple. Vont-elles sauver la France et la planète ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; marques de protestation sur les travées des groupes LaREM et SOCR)

Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Quand 150 citoyens tirés au sort, à l'image de notre pays (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains), travaillent neuf mois avec sérieux et détermination, cela mérite le respect.

Certains d'entre eux étaient climatosceptiques - dans les premiers échanges. Ils ont pris une claque en réalisant l'ampleur du défi climatique au fil des discussions avec les scientifiques.

Ils ont auditionné des industriels et des élus pour se forger une vision globale de la situation d'où ont découlé de nombreuses propositions sur l'artificialisation des sols, les mobilités propres, le renforcement du ferroviaire par exemple.

Le respect devrait nous dissuader de mettre ainsi en exergue une mesure isolée. Le consensus doit se construire, le débat se poursuivre, soit au Parlement, soit par le biais d'un référendum. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Situation des travailleurs agricoles

M. Yvon Collin .  - Durant les deux mois et demi de confinement, le secteur agricole et agro-alimentaire est resté au front pour garantir un approvisionnement de qualité et diversifié. Chacun a pu le mesurer sur son territoire.

Malgré les mesures barrières, la pénurie de main-d'oeuvre et la difficulté de transport, les agriculteurs n'ont jamais cessé de produire et ils ont fait preuve, comme toujours, de résilience. Ce doit être salué.

Chaque année, le secteur reçoit le concours de 600 000 saisonniers dont 22,6 % sont étrangers, souvent nord-africains. La fermeture des frontières a mis leurs difficultés en évidence.

Faute de structures, ils vivent dans des logements précaires et parfois insalubres. Comment améliorer leurs conditions de vie ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Vous chantez un hymne d'amour à l'agriculture, (Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains ironisent sur la formule.) et vous avez raison, grâce à eux la chaîne alimentaire a tenu.

Le salariat agricole, c'est plus de 700 000 personnes par an et, en ce moment, 100 000 saisonniers étrangers en plus.

La commission interministérielle a mis en place des gestes barrières et des guides pratiques pour la poursuite des travaux agricoles. Il est vrai que les salariés saisonniers peinent à venir, faute de logement. Aussi, nous avons travaillé avec Action logement, sur une aide de 150 euros par mois pendant quatre mois pour l'hébergement, ainsi qu'une aide de la même valeur pour tous les salariés agricoles en difficulté.

Nous travaillons à d'autres mesures pour la suite, notamment en matière de rénovation énergétique.

M. Yvon Collin.  - Merci de cette réponse. (On la juge insuffisante sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous serons vigilants sur les suites que vous y donnerez.

Situation de Presstalis

Mme Annie Guillemot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Les marchands de journaux font partie de notre quotidien. En nous garantissant l'accès à plus de 1 000 titres, ils sont des vecteurs essentiels de la culture et de l'information. Les 23 000 points de vente répartis sur notre territoire assurent un véritable service public en veillant à la diffusion et à la pluralité d'une presse indispensable à notre vie démocratique.

Après 55 jours de confinement, ils doivent faire face à la faillite de Presstalis qui distribuait 75 % de la presse écrite sur l'ensemble du territoire national. Dans la métropole de Lyon et dans le Rhône, la filiale régionale de Presstalis a été placée en liquidation judiciaire depuis le 15 mai, de sorte que les marchands de journaux ne reçoivent plus les journaux nationaux depuis plus de cinq semaines alors qu'ils continuent à payer leur loyer. D'autres villes, Marseille, Toulon ou Nantes, connaissent aussi des difficultés. Le temps presse ! (Sourires)

Plus de 500 points de vente ont fermé l'an dernier ; fin avril, 740 ont déjà tiré le rideau. Que fera le Gouvernement pour que le pluralisme de la presse ne vire pas à l'hécatombe ? Quelles solutions pérennes proposez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Franck Riester, ministre de la culture .  - Le Gouvernement est très attentif à l'avenir des marchands de presse, dont le maillage est essentiel pour la culture et l'information sur le territoire. Il a assoupli leurs conditions de gestion et a veillé à ce que la crise de Presstalis ne les prive pas de leurs revenus. Il a investi 80 millions d'euros pour soutenir la reprise de Presstalis par la coopérative des quotidiens à Paris et à Bobigny. Il travaille avec les dépositaires indépendants, avec les Messageries lyonnaises de presse et avec les préfets de région pour trouver des solutions dans les 15 dépôts qui doivent être repris.

Un plan de secours est d'ores et déjà mis en oeuvre à Lyon et des solutions devraient être trouvées dans les prochains jours à Toulon et à Marseille. Le Gouvernement investit beaucoup d'argent pour garantir la distribution de la presse depuis des années.

Mme Annie Guillemot.  - La situation n'est pas résolue à Lyon : nous ne recevons plus Libération ni Le Monde. Les marchands de presse perdent des clients alors qu'ils ont joué le jeu pendant le confinement. C'est un drame humain. Pourquoi n'allez-vous pas plus vite ?

Mineurs délinquants étrangers

Mme Céline Boulay-Espéronnier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'Intérieur, la délinquance ne cesse de croître. L'année 2020 a mal commencé.

Un phénomène alarmant reste sans réponse : les mineurs isolés étrangers (MIE) - lorsqu'ils sont effectivement mineurs, ce qui reste difficile à établir - multiplient violences, cambriolages et agressions. Cela dépasse désormais Paris : à Bordeaux, un réseau de recel a été mis au jour.

Ces délinquants mineurs, parfois sans domicile fixe, empoisonnent la vie des habitants. Ils se rient de la France, sanctionnés par un simple rappel à la loi.

La garde des sceaux veut une « justice restaurative » pour « faire dialoguer victimes et auteurs des infractions ».

Cela ne rassure que les délinquants... Confirmez-vous que ces jeunes sont instrumentalisés par des adultes ?

Allez-vous restaurer l'autorité de l'État ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - (Les sénateurs Les Républicains manifestent leur satisfaction d'entendre la ministre.) J'ai reçu des maires, notamment de communes se situant en bout des lignes de RER, où il y a eu des intrusions violentes dans certains commerces. Il y a des mesures dans le code de justice pénale des mineurs, mais pas seulement.

Ce code inclut des dispositions spécifiques pour les mineurs isolés. Nous avons réécrit dans ce code l'ordonnance de 1945 en en sauvegardant les principes : justice spécialisée, primauté de l'éducatif et procédure adaptée aux exigences du moment.

Certains de ces mineurs isolés refusent de livrer leur identité ; le code permet de les assimiler à des récidivistes, ce qui facilite leur déferrement au Parquet par une audience unique dans un délai d'un à trois mois.

La justice restaurative est un complément de peines ; elle ne se substitue pas aux sanctions prononcées. Nous recherchons un équilibre entre la fermeté et l'éducation. (Applaudissements sur les travées du groupe LaRem)

La séance est suspendue à 16 h 10

La séance reprend à 16 h 30.