Régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire.

Rappel au Règlement

M. Patrick Kanner .  - Mon rappel au Règlement concerne la place de notre Parlement, et de la Haute Assemblée en particulier, dans le débat qui nous intéresse. Alors que nous allons travailler sur des mesures de prorogation de l'état d'urgence sanitaire, nous pouvons nous interroger légitimement sur l'existence de fait d'un article 16 à caractère sanitaire.

Aujourd'hui, nous attendons tous les grandes mesures qui seront annoncées demain par le président de la République : couvre-feu à Lille, à Paris, mesures privatives de libertés individuelles ?

À quoi servons-nous ? Ne devrions-nous pas arrêter de siéger et laisser le Président de la République décider seul ?

Le respect du Parlement, quelle que soit l'urgence, doit constituer une priorité. L'urgence ne peut tout justifier alors que les Français sont extrêmement inquiets pour leur avenir.

Mme la présidente.  - Acte est donné de ce rappel au Règlement.

Nominations à une éventuelle CMP

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi ont été publiées. Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans les délais d'une heure prévus par notre Règlement.

Discussion générale

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé .  - Dans nos territoires, la situation sanitaire nous préoccupe. La dernière fois, nous avions débattu de la durée et du contenu du texte portant dispositions transitoires de la sortie de l'état d'urgence sanitaire. Le Parlement avait considérablement enrichi ce texte. Me voici à nouveau devant vous ce soir pour demander de poursuivre la lutte contre le virus par le maintien d'un certain nombre de mesures transitoires.

Monsieur Kanner, vous faites état de mesures importantes qui seraient annoncées par le Président de la République. Je ne suis pas là pour les anticiper ni pour les commenter. En revanche, il ne vous a pas échappé que la situation sanitaire demeure extrêmement instable. Ce qui est sûr et stable, c'est que le virus n'est pas mort et qu'il circule vite. À Lille, l'incidence est de 480 cas pour 100 000 habitants et de 382 cas pour 100 000 habitants chez les personnes âgées.

Quand on compare à la semaine dernière, on mesure la vitesse de circulation du virus dans certaines métropoles, dont Lille qui est, pour cause, en zone d'alerte maximale. Il en va de même d'autres métropoles, que je n'égrènerai pas ici.

En commission, vous avez modifié la durée du dispositif transitoire et c'est de cela dont nous allons débattre. C'est sur l'inspiration des sénateurs que nous avions pris l'engagement d'inscrire dans le marbre de la loi non pas des dispositions transitoires sur lesquelles il nous faudrait revenir au gré des variations de ce virus, mais des mesures de nature à stabiliser le droit. C'est dans cet esprit qu'un projet de loi en bonne et due forme sera déposé par le Gouvernement dans le courant du mois de janvier. Le temps de conduire un débat parlementaire de qualité, de le promulguer, puis de prendre les décrets d'application, nous mènera bien au-delà du 31 janvier, date que vous proposez pour la fin des mesures sanitaires. Nous faudrait-il vous proposer alors un autre texte de prolongation des mesures transitoires dont vous ne voulez plus ?

Dès lors, je ne cesserai de plaider, au cours de nos débats de ce soir, pour que nous nous donnions davantage de temps, d'autant que les chances pour que nous n'ayons plus à vivre avec le virus au 31 janvier sont, convenez-en, nulles.

Si nous voulons être efficaces pour accomplir ce travail de fond nécessaire, que vous souhaitez tout autant que nous, il faut nous laisser jusqu'au 1er avril, comme le Gouvernement le demande, pour prolonger les mesures transitoires, afin que nous soyons en mesure d'intégrer et d'exploiter les données, à des fins de recherche et de lutte contre l'épidémie, notamment celles du service intégré de dépistage et de prévention (Sidep) en tenant compte de celles des tests antigéniques.

C'est pourquoi je vous remercie de l'amendement donnant un nouveau statut à ces tests, qui seront très utiles, dans les aéroports, comme pour les dépistages de populations asymptomatiques.

Veuillez excuser le dépôt tardif de certains amendements du Gouvernement.

Nous pouvons travailler pour en améliorer la rédaction sur les garanties légitimes que vous exigez, mais diverses ordonnances devront également être prolongées, sauf à mettre à mal certains aspects de notre droit, et je renvoie au débat que nous avons eu sur les MDPH (maisons départementales des personnes handicapées).

Sans préjuger des annonces du Président de la République demain et de la nécessité d'adapter notre arsenal sanitaire à cette épidémie qui nous joue bien des tours et cause bien des ravages sanitaires, et dans la sérénité qu'offre cette enceinte, tels sont les principaux points dont nous devons discuter.

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois .  - C'est la quatrième fois que nous légiférons sur les pouvoirs consentis au Gouvernement pour faire face à la crise sanitaire.

Il y a eu successivement deux régimes : l'état d'urgence sanitaire et la sortie, qui n'en finit pas, de l'état d'urgence sanitaire.

Il faudrait désormais prolonger les pouvoirs exceptionnels du Gouvernement jusqu'au 1er avril. La différence entre les deux régimes est que dans le second cas, le Gouvernement n'a pas le droit de prononcer le confinement généralisé de la population tel que nous l'avons connu de mars à mai.

Mais il faut se souvenir que la loi de mars dernier reste en vigueur et que le Gouvernement peut à tout moment déclencher le régime du confinement généralisé par décret. Il ne pourrait être cependant accepté que dans une situation de crise extrêmement grave. Notre espoir est de pouvoir lutter contre l'épidémie sans suspendre l'activité économique et sociale de notre pays.

En effet, nous avons eu recours au confinement généralisé faute de mieux et à défaut d'avoir été préparés à lutter contre une telle épidémie : nous n'avions en effet ni gel hydroalcoolique, ni masques, ni tests, ni système d'information pour remonter les filières de contamination.

La sortie de l'état d'urgence sanitaire se ramène à un enjeu : substituer de multiples confinements limités et temporaires au confinement généralisé. Quelque 650 000 personnes ont pu être diagnostiquées par le système de traçage mis en place depuis le déconfinement.

La situation sanitaire qui s'aggrave inquiète les Français. Elle n'est cependant, heureusement, pas de même niveau qu'au mois de mars. Pour autant, elle nécessite le prolongement des mesures transitoires qui restreignent les libertés individuelles et publiques. La commission des lois en a conscience.

Nous attendons les annonces du Président de la République, espérant qu'elles n'aient pas d'incidence sur nos travaux parlementaires déjà très bousculés.

Pour autant, nous ne souhaitons pas que ces mesures s'appliquent plus de trois mois, ni vous donner un blanc-seing pendant une très longue durée. Nous serons très fermes sur cette exigence du contrôle parlementaire sur des sujets essentiels pour la vie des Français. Cette responsabilité doit être exercée par le Parlement dans sa plénitude.

Nous souhaitons également apporter notre contribution à votre volonté de réformer les régimes de lutte contre les épidémies, en mettant à jour le fameux article L. 3131-1 du code de la santé publique, dont la constitutionnalité est incertaine.

La CNIL nous a également inspiré plusieurs mesures s'agissant des fichiers permettant de lutter contre les risques de contamination.

Nous avons souhaité aussi que soient prises des dispositions relatives à la tenue des scrutins de mars 2021. La démocratie est une chose trop sérieuse pour la suspendre aux risques sanitaires. Si la présidentielle avait lieu en 2021, faudrait-il que les Français ne se prononcent pas ? Comment éviter les risques de contamination sans modifier le régime de procuration, ce à quoi le Gouvernement consent, ni remettre à l'ordre du jour le vote par correspondance en le sécurisant ? Nous avons encore le temps de nous y préparer. La commission des lois, unanime, a souhaité que nous versions au débat des propositions en ce sens. Nous avons encore le temps pour que le scrutin de mars 2021 se déroule dans de bonnes conditions.

L'heure est manifestement grave. Le Sénat est au rendez-vous mais ne consentira pas des pouvoirs dérogatoires au Gouvernement sans avoir de sérieuses garanties. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Esther Benbassa .  - La France compte 32 683 décès dus au Covid-19 : sinistre comptabilité... Davantage aurait pu être fait par l'exécutif, bien en amont. Le sous-investissement dans le système hospitalier français n'est hélas pas nouveau, mais les gouvernements successifs refusent de reconnaître leur faute morale en matière sanitaire et sociale.

L'an passé, 3 400 lits d'hôpitaux ont été fermés. N'auraient-ils pas pu servir pendant la crise ? Dans mon département, les lits de réanimation manquent depuis plusieurs années, et les patients sont réorientés vers Chartres ou Orléans.

Les médecins, découragés, finissent par abandonner l'hôpital au profit de la recherche ou du privé. Le modeste Ségur n'est pas de nature à nous rassurer.

En mars, le Gouvernement a répondu par l'urgence sanitaire face à la pandémie. Le confinement a été salutaire pour lutter contre le virus. En juillet, un régime transitoire a été instauré. La majorité présidentielle en souhaite désormais la prolongation. Ces mesures transitoires, qui font fi des libertés publiques individuelles, concernent les transports, les lieux accueillant du public et le traçage des malades. Elles ne sauraient être pérennisées. Entre l'état d'urgence sanitaire et le droit commun, il faut choisir.

Nous saluons le travail de la commission des lois et de son rapporteur (M. Philippe Bas, rapporteur, remercie l'oratrice.) qui a réduit le délai de la prorogation, mais nous en rejetons le principe. Si le risque est trop grave pour le droit commun, que l'exécutif déclenche l'état d'urgence sanitaire à l'article L. 3131-13 du code de la santé publique.

Le groupe écologiste, solidarité et territoires votera contre ce texte.

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Nous examinons le quatrième texte visant à répondre à la crise sanitaire. Le régime transitoire instauré par la loi du 9 juillet 2020 arrive à échéance le 31 octobre et le retour au droit commun n'est hélas pas de nature à endiguer la reprise de l'épidémie. En témoignent les 1 500 patients atteints de Covid en réanimation et les 40 % des lits de réanimation d'Île-de-France qui sont occupés par des patients atteints de Covid. Il n'est pas possible de différer à nouveau les soins hors Covid.

Je n'ai aucun doute sur la nécessité des mesures transitoires. Notre rapporteur n'a pas remis en cause la prorogation du régime transitoire ni ses contours. Les prérogatives conférées au Premier ministre et aux préfets ont permis de lutter contre l'épidémie et de soutenir l'économie. Le Conseil constitutionnel les a jugées conformes.

La commission des lois a utilement confirmé le principe de prorogation des systèmes d'information de lutte contre le Covid et de la conservation des données pseudonymisées pour le suivi épidémiologique et la recherche sur le virus, nécessaire au triptyque tester-tracer-isoler. Notre rapporteur a apporté des garanties juridiques supplémentaires en tirant les conséquences de la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel.

Ce régime transitoire peut être comparé à la figure de Janus, non pour son caractère double comme certains aimeraient le croire mais parce que, symbolisant la transition entre deux temps, elle est orientée vers l'avenir sans oublier le passé.

C'est bien sur la question de la temporalité que les positions divergent.

La commission des lois a ramené l'échéance de la prorogation du 1er avril au 31 janvier. Or la date du 1er avril apparaît plus opportune et raisonnable. Ce n'est pas une position doctrinale, mais, comme l'a souligné le Conseil d'État, il s'agit de laisser le temps au Gouvernement de s'adapter à cette crise sanitaire pour mieux rédiger son futur projet de loi.

La révision de l'article L.3131-1 du code de la santé publique doit aussi être décalée d'autant. Nous allons débattre de nombreux sujets importants ce soir.

Aussi, le groupe RDPI réserve sa position.

Mme Maryse Carrère .  - Nous sommes réunis ce soir car la situation de notre pays nous contraint de prolonger un état de fait. À la veille de l'allocution du Président de la République, nous craignons un état d'urgence qui ne dit pas son nom.

J'ai une pensée pour tous les Français qui souffrent soit du Covid soit des mesures contre l'épidémie, pourtant nécessaires. Vie économique, notamment dans les secteurs de l'artisanat, du commerce, du tourisme et de l'aéronautique, vie sociale, sportive et culturelle sont lourdement touchées, comme les relations familiales. Nous sommes confrontés à l'éloignement brutal de ceux qu'on aime.

Nombre de Français respectent les gestes barrière bien qu'ils génèrent des frustrations. L'incompréhension, toutefois, mène à la défiance, en raison de trop nombreux volte-face du Gouvernement, de mesures incompréhensibles, de spots publicitaires anxiogènes et d'une communication frénétique.

Si les chiffres sont globalement mauvais, le virus ne circule pas de façon uniforme sur le territoire.

Je salue le travail de la commission des lois et de son rapporteur Philippe Bas. Le raccourcissement du délai à trois mois est une bonne chose. Nous ne sommes plus réellement dans l'état d'urgence mais pas non plus dans le droit commun.

Avec mon groupe, nous nous retrouvons dans les propositions de la commission des lois aux articles 2 et suivants.

Je me félicite de la pseudonymisation des données et que la commission se soit rangée à la décision du Conseil constitutionnel de mai dernier. J'approuve aussi la volonté de mettre fin aux retards systématiques du Gouvernement concernant la publication des avis du comité scientifique.

Seulement 2,5 millions de Français ont téléchargé StopCovid et la moitié l'a désinstallée. La protection des données personnelles était jugée trop faible : jusqu'au 3 septembre, l'application ne respectait pas le RGPD. Enfin, nous nous félicitons des mesures sur les exécutifs locaux.

Les restrictions sont de plus en plus pénibles à vivre. Nous ne votons pas ces mesures de gaieté de coeur mais la rapidité de propagation du virus ne nous laisse pas le choix.

Notre groupe votera ce projet de loi.

Mme Éliane Assassi .  - Pour faire face à l'épidémie, le Gouvernement nous demandait de proroger le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er avril 2021. La commission des lois l'a ramené au 31 janvier. C'est rassurant même si nous convenons que le virus circule vite, trop vite. Notre commission a également amélioré le texte pour assurer le bon fonctionnement de la démocratie locale, mais aucune amélioration n'est suffisante face au nouveau blanc-seing qui nous est demandé pour attribuer de nouveaux pouvoirs au Gouvernement et aux préfets.

Au CRCE, nous sommes tous préoccupés par l'urgence sanitaire et appelons au respect des gestes barrière. Mais les mesures adaptées ne sont-elles pas déjà à la portée du Gouvernement dans le cadre du droit commun ? Bien sûr que si ! Cet état d'urgence sanitaire est donc aussi dangereux qu'inutile. Le ministre de la Santé peut prendre des mesures préventives en cas de danger sanitaire et la loi du 23 mars 2020 a prévu le cas de la sortie de l'état d'urgence sanitaire à l'article L. 3131-1 du code de la santé publique. Ensuite, en cas de nouveau pic de contamination, rien n'empêcherait le Gouvernement de recourir, une nouvelle fois, à l'état d'urgence sanitaire, par décret en conseil des ministres sur le rapport du ministre chargé de la Santé, grâce à l'article L.3131-13 du code de la santé publique.

Les autorités locales de police administratives sont déjà habilitées à prendre les mesures nécessaires.

Au printemps déjà, nous alertions sur l'entrée dans le droit commun des mesures d'urgence dérogatoires. Le Gouvernement prépare un projet de loi pour le mois de janvier, pour éviter « les rendez-vous intermédiaires de prorogation des mesures transitoires ».

Dans le régime transitoire, le Premier ministre conserve des pouvoirs exorbitants en matière de circulation des personnes, des manifestations sur la voie publique et d'ouverture des établissements recevant du public (ERP).

Comme le relève la professeure de droit Stéphanie Henriette-Vauchez, « ce sont bien des pouvoirs exceptionnels de restriction des libertés fondamentales qui demeurent à la main du Gouvernement ».

Comme le relèvent les membres du réseau de veille sur l'état d'urgence sanitaire, « un état d'urgence sanitaire ne se décline pas, il se lève dans sa totalité. Le brouillage des frontières est inacceptable. L'exception doit demeurer l'exception et le droit commun la règle ».

Alors que le Gouvernement reconnait que les conditions d'un état d'urgence sanitaire ne sont plus réunies, il estime en même temps nécessaire de maintenir des pouvoirs exorbitants aux autorités administratives. Quelle contradiction ! Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel, indique que l'état d'urgence « ne trouve de justification que dans la facilité pour le Gouvernement de réprimer les manifestations, de limiter les libertés de réunion et les libertés de manifestation ». À l'heure où les plans sociaux se multiplient, la possibilité accordée au Premier ministre d'interdire les manifestations ne peut que susciter une réelle inquiétude.

Nous nous opposons donc à ce texte d'exception. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

Mme Dominique Vérien .  - La situation sanitaire est grave et s'aggrave. Pour la quatrième fois en huit mois, nous étudions un texte d'exception ayant pour but de s'adapter à la crise sanitaire.

Ce projet de loi pourrait être très grave pour nos libertés sans les garde-fous nécessaires. Le droit d'exception ne doit pas devenir le droit commun.

Il y a toujours un risque à vivre libre. C'est à la représentation nationale d'en mesurer le prix et de définir les éventuelles restrictions. Ce choix ne peut se faire par ordonnance ni par décret.

La durée de la prorogation proposée, par sa longueur, est inappropriée. Elle prive le Parlement d'un débat nécessaire au sein d'une démocratie.

Nous approuvons donc la décision de notre rapporteur de raccourcir ce délai à trois mois, d'autant que le ministre nous annonce un texte en janvier pour sortir du droit d'exception, ce qui apparaît souhaitable. Dans le pire des cas, nous prolongerons à nouveau ce délai en connaissance de cause.

Je salue aussi l'initiative du rapporteur sur la réécriture de l'article L. 3131-1 du code de la santé publique qui était à la limite de la constitutionnalité, s'agissant du champ d'intervention du ministre de la Santé en état d'urgence sanitaire.

Je salue les apports de l'Assemblée nationale : les exécutifs locaux pourront se réunir en dehors du lieu habituel, l'accès du public pourra être limité et des visioconférences organisées ; autant d'outils utiles pour garantir les gestes barrière et la continuité de la démocratie locale.

Des conseils municipaux n'ont pas pu se tenir dans de bonnes conditions en septembre faute d'accord du préfet sur le lieu de réunion.

Notre commission a également clarifié certains points : elle a ainsi prévu la pseudonymisation des coordonnées des cas contacts et précisé une liste limitative de données, ainsi que le recommandait la CNIL.

Je voudrais parler des plans d'occupation des sols (POS) qui n'ont hélas pas été abordés dans ce texte. Prolongés jusqu'au 31 décembre 2020, 520 POS n'auront pas fait la bascule vers les PLUi dans les délais impartis. Je remercie Françoise Gatel de sa proposition de loi à ce sujet et j'espère qu'elle sera votée à temps. Certains délais de la loi mobilité doivent également être repensés.

Dans sa majorité, le groupe UC votera le texte issu des travaux de la commission des lois.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Que faisons-nous ici ce soir ? Pour la quatrième fois, nous nous réunissons. On nous demande de débattre et de délibérer sur la prorogation de l'organisation de la sortie de l'urgence sanitaire, et pour autant on ne sait pas de quoi on parle. Un amendement a été déposé il y a quelques minutes par le Gouvernement pour prolonger des ordonnances, et le ministre n'en a même pas fait mention dans son intervention liminaire (M. le ministre se récrie.). Nous ne savons pas très bien quel rôle vous voulez nous faire jouer. Demain, le Président de la République s'exprime, les grandes chaînes de télévision sont mobilisées (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains). Les rumeurs les plus rudes circulent. On parle de couvre-feu ou d'interdiction de circuler alors qu'un autre ministre nous demande de réserver nos vacances de la Toussaint et de Noël (Marques d'ironie sur les travées du groupe SER).

Nous devrions pourtant parler de ce dont nous sommes saisis : les mesures privatives de liberté que le Président de la République entend nous annoncer demain (Applaudissements sur les mêmes travées). Monsieur le ministre, le code de la santé publique vous donne déjà toute possibilité, par les articles L. 3131-1 et L. 3131-13. La preuve lorsque vous avez décidé le 17 mars le confinement généralisé : la loi du 23 mars n'existait pas alors !

Le régime présenté comme de sortie de l'état d'urgence sanitaire en maintient toutes les règles, sauf le confinement général qui est déjà rendu possible par le code de la santé publique.

Il y a quelques jours, le secrétaire d'État a présenté devant la commission d'enquête tous les avantages de l'application StopCovid avant que nous apprenions par le Premier ministre qu'elle serait remplacée par une autre application le 22 octobre. Nous en a-t-on parlé ? Que nenni ! Le Parlement est rendu invisible par le Gouvernement. Alors que nous sommes très attentifs aux libertés publiques et au débat parlementaire, nous ne voulons pas d'une prolongation aussi longue que celle souhaitée par le Gouvernement. Je ne peux croire que cette durée est, par malice, pour but d'enjamber les élections à venir...

Mon groupe est favorable à la décision du rapporteur de la ramener à trois mois.

Une chose curieuse : le masque est obligatoire partout sauf en prison. Un tribunal administratif a estimé que l'administration pénitentiaire devait fournir des masques aux prisonniers. Le Conseil d'État a annulé cette décision. Ironie cruelle, la prison concernée est décrétée depuis hier par l'ARS comme cluster probable. Entendez-vous mettre un terme à cette situation qui n'a aucun sens ?

Le rapporteur, le président Bas, n'a pas rappelé, par modestie sans doute, que les dispositions sur le vote par correspondance étaient à l'initiative du groupe socialiste, écologiste et républicain (M. Philippe Bas, rapporteur, s'amuse.). Nous nous réjouissons qu'elles aient été intégrées au texte de la commission des lois.

À ce stade, le groupe socialiste, écologiste et républicain, a décidé de s'abstenir sur le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Stéphane Ravier .  - L'état d'urgence sanitaire a entraîné une restriction sans précédent des libertés publiques et individuelles : les Français ont accepté la quarantaine, la fermeture de leurs entreprises avec le chômage qui en découle, la limitation de leurs déplacements, le port du masque généralisé.

Ce régime transitoire est un état d'urgence déguisé. Comme j'ai refusé sa prolongation jusqu'au 30 octobre, je refuse son extension jusqu'au 1er avril.

Les hôpitaux à Marseille n'ont jamais été saturés, mais hier le préfet a décidé de garder les bars et restaurants d'Aix et Marseille fermés deux semaines de plus !

Depuis mars, aucun lit, aucun investissement, aucun effort n'a été consenti pour les hôpitaux. Le ministre de la Santé porte bien mal son nom : il est en réalité celui du confinement, de la privation des libertés, de la crise économique, de la suppression de centaines de milliers d'emplois, et de la fermeture des bars et restaurants.

Le Président de la République, plus Père Fouettard que père de la Nation, annoncera peut-être demain de nouveaux interdits. Vous décidez seuls, dans votre tour d'ivoire, sans jamais consulter les élus locaux ni les chefs d'entreprise.

Vous êtes le ministre de la Santé le plus incohérent et irresponsable de la Ve République, et pourtant vous aviez de la concurrence...

La relance de l'économie passera par le retour à l'état de droit et aux libertés économiques et individuelles. Pas de relance sans confiance. Or, comme des millions de Français, je ne vous fais plus confiance. Nous sommes la chambre haute : prenons donc de la hauteur, marquons notre opposition à ce projet de loi : face à ce Gouvernement en pleine dérive autoritaire, soyons une assemblée courageuse, garante des libertés et de la Liberté !

M. Alain Marc .  - (M. Emmanuel Capus applaudit.) Depuis de nombreux mois, nous sommes confrontés à une situation inédite et anxiogène. Le virus circule toujours, comme en témoignent les indicateurs. Pendant l'été, le nombre de personnes hospitalisées a plus que doublé.

La loi du 9 juillet 2020 a instauré un régime transitoire jusqu'au 31 octobre. Mais la reprise de l'activité amplifie la circulation du virus. Une interruption soudaine des mesures sanitaires au 30 octobre ferait courir le risque de laisser se reproduire la catastrophe sanitaire que nous avons connue en mars dernier et qui a contraint à instituer l'état d'urgence sanitaire. Dans son avis du 12 septembre, au regard de l'évolution actuelle et prévisible de l'épidémie au cours des prochains mois, le Conseil scientifique a jugé indispensable de proroger le régime transitoire.

Le Gouvernement souhaite donc la prolongation de ce régime transitoire jusqu' au 1er avril 2021, délai que la commission des lois a ramené à trois mois. Je m'en félicite, car l'intervention régulière du législateur s'impose, afin qu'il s'assure de la nécessité et de la proportionnalité des prérogatives confiées à l'exécutif : prenons garde à trouver un juste équilibre entre restrictions et protection de nos libertés, de nos concitoyens et de nos valeurs républicaines !

Je pense enfin aux familles touchées par la maladie ou le deuil, ainsi qu'aux soignants et autres personnels qui ont été en première, deuxième ou troisième lignes, et le seront encore si nous ne faisons rien.

Notre groupe votera le texte enrichi et modifié par la commission des lois. (M. Emmanuel Capus applaudit.)

Mme Jacky Deromedi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'intitulé du projet de loi comprend des termes désormais tristement familiers, y compris pour les nouveaux collègues qui nous ont rejoints et que je salue. Le régime transitoire a été discuté en juin et juillet derniers, sans que nous obtenions un accord avec l'Assemblée nationale, quoique nous ne rejetions pas l'idée même d'un tel régime.

Au regard de la situation sanitaire qui prévalait en juin, juillet 2020, l'ampleur des prérogatives dérogatoires ne nous avait pas semblé de nature à effectuer le bon arbitrage entre les exigences parfois contradictoires de protection de la santé publique et de garantie des libertés individuelles.

Hélas, la situation s'est dégradée, et 74 départements sont classés en zone de circulation active du virus. Aussi, le Gouvernement a-t-il demandé la prolongation du régime transitoire et du Sidep, jusqu'au 1er avril 2021.

Nous souscrivons au principe de cette prorogation, mais non à sa durée : s'agissant de libertés publiques, de données médicales et de la politique de la Nation face au péril épidémique, faire l'économie de l'intervention de la Représentation nationale n'est pas souhaitable. C'est à juste titre que notre rapporteur, le président Bas, a proposé de ramener à trois mois ce prolongement, jusqu'au 31 janvier. Cette position est proche de celle des députés Les Républicains.

Nous sommes sensibles à la volonté du Gouvernement de prolonger l'adaptation du fonctionnement des collectivités territoriales. Les élus ont montré leur réactivité, leur disponibilité, leur inventivité. Il faut avoir confiance en eux et faire le pari de la souplesse.

En matière de systèmes d'information, la commission a apporté des garanties juridiques à l'action des centres communaux d'action sociale (CCAS) et a repris les préconisations de la CNIL sur le recueil des données personnelles à fin de recherche épidémiologique.

Nous y sommes favorables, ainsi qu'à la clarification du régime de droit commun pour la réponse aux situations sanitaires graves dans le code de la santé publique. L'équilibre est plus satisfaisant, il sera je l'espère conservé en commission mixte paritaire.

Il est malheureux que le régime transitoire dure plus longtemps que l'état d'urgence sanitaire. Mais les outils sont adaptés aux exigences de l'heure.

Le groupe Les Républicains votera ce projet de loi tel que modifié par la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Véran, ministre .  - Il est indispensable de maintenir les dispositions en cours, notamment les outils numériques nécessaires au traçage, sans quoi nous serions bien désarmés dans la lutte contre le virus.

Madame de La Gontrie, j'ai consacré une part non négligeable de mon intervention à l'amendement relatif à la prorogation des ordonnances. Place au débat parlementaire sur les articles.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Jérôme Bascher .  - Voilà un dilemme cornélien. Nous prolongeons de trois mois en trois mois des mesures liberticides mais nécessaires ; les mesures sont exceptionnelles mais le Gouvernement ne l'est pas : il n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Il aurait eu le temps de préparer pendant l'été des mesures en fonction du niveau d'alerte, avec des explications claires. Et nous voilà une fois encore, au Parlement, suspendus aux dires du Président de la République qui s'exprimera demain, balayant peut-être ce que vous racontez aujourd'hui. Des élections seront peut-être reportées - après tout, ce n'est que la démocratie - et pourquoi pas Noël déplacé à Pâques ? Non, décidément, vous n'êtes pas à la hauteur !

Les mesures sont efficaces pour ralentir la propagation du virus, mais je n'ai pas confiance dans le Gouvernement ni dans le Président de la République pour endiguer la crise.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - Je m'en suis largement expliquée en discussion générale. Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°14 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Mme Esther Benbassa.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°21, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos1, 14 rectifié et 21 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°39, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer la date :

31 janvier 2021

par la date :

1er avril 2021

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement rétablit la date du 1er avril 2021. Sinon, nous serions amenés à examiner en même temps un projet de loi portant des mesures pérennes, à la demande des sénateurs, et une nouvelle prorogation des mesures transitoires. Ce ne serait pas à la hauteur des enjeux...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous n'avons jamais demandé de projet de loi de pérennisation. Nous avons au contraire refusé l'instauration d'un régime d'état d'urgence sanitaire sur le modèle de la loi de 1955 relative aux catastrophes naturelles, raison pour laquelle le texte sur l'état d'urgence sanitaire ne peut s'appliquer que pendant un an. Le fait d'annoncer un hypothétique projet de loi en janvier ne nous empêche pas de limiter les mesures transitoires au 31 janvier : vous savez que le Parlement sait s'adapter. Si nous discutons de réformes structurelles, nous ne sommes pas interdits de débattre également de mesures conjoncturelles. N'avez-vous pas en mémoire tout ce que nous savons faire pour être agréables au Gouvernement quand il s'agit de l'intérêt national ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Avis défavorable.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°22, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 1° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d?urgence sanitaire, la première occurrence des mots : « ou » et : « interdire » est supprimée.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous ne sommes pas en état d'urgence sanitaire : la liberté doit être la règle et l'interdiction, l'exception.

Notre amendement supprime donc la possibilité, pour le Premier ministre, d'interdire la circulation des personnes et des véhicules, tout en conservant la faculté d'une réglementation.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable, car la période pourrait justifier une restriction voire une interdiction de la liberté de circulation des personnes. La juridiction administrative ne manquerait pas de prononcer une annulation en cas de mesures disproportionnées.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa du 2° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire est supprimé.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il s'agit de limiter la faculté reconnue au Premier ministre d'imposer la fermeture provisoire d'une ou de plusieurs catégories d'établissements recevant du public.

Sinon, passons directement à l'état d'urgence sanitaire... Beaucoup de lieux obtiennent un accès réglementé. Non à la fermeture, oui à la réglementation !

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié quater, présenté par M. Babary, Mme Primas, MM. Bouloux, Saury et Daubresse, Mme Noël, MM. de Nicolaÿ, Mouiller, Sol et Paccaud, Mmes Thomas, Chain-Larché et Deromedi, MM. Perrin et Rietmann, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Meurant, Boré, Savary, Piednoir et Mandelli, Mmes Gruny et Dumont, M. Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. B. Fournier, Bouchet et Duplomb, Mme Belrhiti, MM. Laménie et Segouin, Mme Lherbier, M. Chaize, Mme Micouleau et M. Cuypers.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les établissements fermés en application de l'alinéa précédent peuvent demander au représentant de l'État dans le département de rouvrir provisoirement suivant les dispositions générales communes et les dispositions particulières d'un établissement d'un autre type, sans que cette réouverture ne modifie leur classement initial. »

M. Serge Babary.  - Les établissements recevant du public (ERP) de type P « Salle de danse et salle de jeux » sont fermés administrativement depuis le 14 mars dernier. Ils subissent une perte financière exceptionnelle. Certains ne seront pas en mesure de rouvrir.

Malgré la présentation d'un protocole sanitaire contraignant, la réouverture de ces établissements n'a pas été autorisée.

Nous proposons que les ERP faisant toujours l'objet d'une fermeture administrative puissent développer d'autres types d'activité. Ils demanderaient au préfet l'autorisation de substituer provisoirement à leur activité initiale une activité relevant d'une autre catégorie d'ERP. Ils ne perdraient pas le bénéfice de leur autorisation initiale.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°7 rectifié, présenté par M. Brisson, Mmes Chauvin et Borchio Fontimp, MM. Daubresse, Sol et Meurant, Mmes Puissat et Noël, M. Grosperrin, Mme Gruny, M. Le Gleut, Mmes Lassarade et Joseph, MM. J.M. Boyer, Bonnus et Burgoa, Mme Dumont, MM. Lefèvre, Bouchet, D. Laurent, Courtial, Vogel, C. Vial, Bonhomme, Savary et J.B. Blanc, Mme Dumas, MM. Mouiller, Belin et Regnard, Mme Imbert, MM. Husson, Hugonet, de Nicolaÿ et Duplomb et Mme M. Jourda.

M. Max Brisson.  - On évoque un couvre-feu - sans savoir exactement de quoi il s'agit. Je mesure le décalage de cet amendement par rapport au discours ambiant ; mais il faut permettre aux entreprises en difficulté de s'adapter.

Nous devons trouver des solutions pour éviter la destruction des discothèques et établissements de nuit fermés depuis sept mois. À défaut, les activités s'exercent sauvagement dans la nature, hors de tout encadrement professionnel, nous l'avons vu cet été, au risque de propager le virus.

Mme la présidente.  - Amendement n°17 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Paccaud, Daubresse et Le Gleut, Mmes Puissat et Gatel, MM. Laugier et Wattebled, Mme N. Delattre, MM. Regnard, Levi, Brisson et D. Laurent, Mme Joseph, M. Vogel, Mmes Lassarade et de Cidrac, MM. Rietmann, Perrin et Bazin, Mmes Dumont, Lavarde, L. Darcos et M. Mercier, M. Canevet, Mmes Gruny, Berthet, Dumas et Paoli-Gagin, MM. Lefèvre, Sido et Gremillet, Mme Di Folco, M. Détraigne, Mmes F. Gerbaud et Billon et MM. Husson, B. Fournier, Bouchet, Chasseing, C. Vial, Sautarel, Duplomb, Longeot et Guerriau.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les établissements recevant du public fermés en application du présent 2° peuvent demander au représentant de l'État dans le département de rouvrir après examen de leur protocole sanitaire, notamment pour l'accueil d'activités physiques pour les personnes munies d'une prescription médicale. »

M. Michel Savin.  - Cet amendement permet aux salles de sport, équipements sportifs et maisons sport-santé de solliciter une réouverture dès lors qu'un protocole sanitaire strict est mis en oeuvre, notamment dans le cadre de la pratique d'activités physiques sur prescription médicale.

Dans certains territoires, nous observons des situations ubuesques : telles salles de sport de métropole étant fermées, celles qui, à trois kilomètres, sont ouvertes suscitent un appel d'air et un possible déplacement du virus.

Des patients atteints d'affection longue durée et bénéficiant de prescription médicale d'activité sportive adaptée ne peuvent plus accéder à leurs soins.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ce bouquet d'amendements dégage un parfum envoûtant et il a fallu beaucoup de courage à la commission pour rendre un avis défavorable. (Sourires) Nous comprenons évidemment ce qui motive ces demandes.

L'amendement n°23 supprime complètement la possibilité de fermer certaines catégories d'établissements. Nous l'avions souhaité en juillet mais la situation sanitaire est tout autre aujourd'hui ; il faut le reconnaître.

Monsieur Babary, avec 74 départements en zone orange, nous prendrions un risque à adopter votre amendement n°5 rectifié quater.

Il faut respecter des règlementations, sur les risques d'incendie, le renouvellement de l'air,... Ne devient pas restaurant, même temporaire, qui veut. Une salle de danse ne se transforme pas si simplement.

L'amendement n°7 rectifié est identique.

Enfin, cher Michel Savin, je comprends votre préoccupation vis-à-vis des salles de sport, mais je crains que votre amendement recrée des situations de promiscuité favorables à la circulation du virus.

Le traitement des difficultés économiques des entreprises fermées au nom de la lutte contre le virus doit se faire via les prêts gratuits ou les suppressions de charges. Nous devons être raisonnables. Avis défavorable aux quatre amendements.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Je ne peux pas imaginer que le rapporteur n'ait pas lu précisément les amendements nos 5 rectifié quater, 7 rectifié et 17 rectifié ter. On n'est absolument pas dans l'hypothèse où tout doit rouvrir et partout. Les préfets sauront distinguer ce qui peut être autorisé. Faisons-leur confiance ! Le groupe socialiste, écologiste et républicain votera ces amendements.

M. Michel Savin.  - Il est bon de procéder au cas par cas, puisque la situation n'est pas identique sur tout le territoire. Les gestionnaires des salles de sport et les collectivités ont pris toutes les mesures nécessaires. C'est une question de santé publique. Les patients souffrant de diverses pathologies ne peuvent pratiquer le sport qui leur a été prescrit.

Les professionnels du sport organisent l'activité sérieusement. Ce n'est pas le cas dans d'autres lieux où il y a bien plus de brassage que dans les salles de sport. (M. Laurent Duplomb applaudit.)

M. Max Brisson.  - Il s'agit de sauver des entreprises indispensables, des professionnels dont nous avons besoin pour encadrer des jeunes qui ont envie de faire la fête. Les conséquences seront graves. Or certains établissements de nuit auraient les moyens de se transformer en restaurant mais leur classement les en empêche, et ils voient des jeunes s'agglutiner dans certains restaurants. Cela suscite l'incompréhension.

M. Jean-Marc Boyer.  - Je soutiens ces amendements. L'ouverture des discothèques comme des salles de sport me paraît indispensable. Le matin, on voit la population amassée dans le métro, et on interdit les salles de sport ! Ce n'est pas logique.

Les contacts physiques, les embrassades jouent sur une hormone, la sérotonine. Aujourd'hui, elle est perturbée par les gestes barrière, ce qui entraîne une frustration. Il faut qu'elle puisse s'évacuer, notamment chez les plus jeunes, sinon elle donnera lieu à des comportements agressifs. Des solutions encadrées éviteront les rassemblements dans des appartements et lieux privés où il se fait n'importe quoi.

M. Laurent Duplomb.  - « Cet État se veut si bienveillant envers ses citoyens qu'il entend se substituer à eux dans l'organisation de leur propre vie. Ira-t-il jusqu'à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d'eux-mêmes ? Le plus grand soin d'un bon gouvernement devrait être d'habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. » Cette phrase de Tocqueville vaut encore aujourd'hui.

En Haute-Loire, il n'y a jamais eu plus de trois cas de coronavirus dans les hôpitaux. Ne peut-on lâcher la bride aux habitants ?

Les privations de liberté auront à un moment ou un autre des conséquences, Michel Savin a raison. (M. Jean Bacci applaudit.)

M. Serge Babary.  - On ne peut pas répondre sèchement à des chefs d'entreprise qui ont besoin de sauver leur affaire. Les faire migrer, sur autorisation préfectorale, d'une activité fermée administrativement à une autre, qui fonctionne, ne devrait pas poser problème. On ne peut pas claquer la porte à ces entreprises qui cherchent désespérément à survivre.

L'amendement n°23 est adopté et devient un article additionnel.

Les amendements identiques nos5 rectifié quater et 7 rectifié quater n'ont plus d'objet, non plus que l'amendement n°17 rectifié ter.

Mme la présidente.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute prorogation ultérieure du régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire est subordonnée à la présentation par le Gouvernement d'un rapport au Parlement établissant l'impérieuse nécessité d'une telle mesure. »

Mme Esther Benbassa.  - Depuis le début de l'épidémie, l'exécutif se livre à un exercice solitaire du pouvoir.

Légiférant en procédure accélérée, par ordonnances ou décrets, le Gouvernement ne laisse que peu de place à l'information des parlementaires et réprime toute velléité de débat au nom de la célérité. Combien de temps encore écartera-t-on les élus des territoires des décisions ?

Alors que des clusters apparaissent localement, il est vital que les représentants de la Nation et des territoires soient davantage informés des évolutions de la pandémie, et des moyens engagés par l'État pour la contrer.

Nous demandons un rapport avant toute prorogation ultérieure du régime d'exception. Le Parlement doit être bien informé.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. L'étude d'impact est prévue pour tous les projets de loi. Cet amendement n'est pas nécessaire.

M. Olivier Véran, ministre.  - Le Gouvernement prend acte du vote du Sénat à l'amendement n°23. C'est une position radicale. Si la mesure allait au bout de la navette, les discothèques pourraient rouvrir dans toutes les zones jusqu'à ce qu'il soit prouvé, ERP par ERP, qu'il n'y a aucun risque ni cluster. On accuse souvent le Gouvernement d'être irresponsable...

Avis défavorable à l'amendement n°20 rectifié.

L'amendement n°20 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°16 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Paccaud, Daubresse et Le Gleut, Mmes Puissat et Gatel, MM. Laugier et Wattebled, Mme N. Delattre, MM. Regnard, Levi, Brisson et D. Laurent, Mme Joseph, M. Vogel, Mmes Lassarade et de Cidrac, MM. Rietmann, Perrin et Bazin, Mmes Dumont, Lavarde, L. Darcos et M. Mercier, M. Canevet, Mmes Gruny, Berthet, Dumas et Paoli-Gagin, MM. Lefèvre, Sido et Gremillet, Mme Di Folco, M. Détraigne, Mmes F. Gerbaud et Billon, MM. Husson, B. Fournier, Bouchet et Saury, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Chasseing, C. Vial, Sautarel, Duplomb, Longeot et Guerriau.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase du III de l'article 1er de la loi n°2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les mesures prises en application du 2° et 3° du I du présent article sont strictement adaptées à la situation sanitaire locale et prennent en compte les caractéristiques des établissements recevant du public, notamment la capacité d'accueil. »

M. Michel Savin.  - Aujourd'hui, la réglementation autorise 1 000 personnes dans les stades, qui sont souvent parquées ensemble dans la même tribune. Il ne serait pas illogique de remplir ces stades à 20 ou 30 %, avec des spectateurs bien répartis.

Le sport est stigmatisé. Soyons ambitieux sur le sujet et faisons confiance aux acteurs de territoires - préfet, élus locaux, clubs de sport - pour organiser la présence des spectateurs.

La mesure avait été adoptée en commission à l'Assemblée nationale, mais le Gouvernement est revenu dessus.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il ne faut pas examiner cet amendement trop rapidement. Avec le n°23, le Sénat a choisi de laisser aux représentants de l'État le soin d'organiser les ouvertures selon les caractéristiques des lieux. C'est de bon sens. Quant à dire que cela donne trop de travail aux préfets, je ne sais que dire !

Cela ne concerne pas seulement les salles de sport. Toute mesure doit être prise en fonction de la jauge. Nous l'avons vu pour des lieux emblématiques et connus, où des spectacles ont pu se tenir. Cela doit pouvoir être appliqué dans des lieux moins symboliques.

Nous devrons vivre avec le virus pendant de nombreux mois. Il nous faut donc nous donner les moyens, dans des conditions sanitaires plus strictes, de vivre !

M. Max Brisson.  - Nous sommes au coeur du débat : une approche plus fine, plus territoriale, adaptée aux réalités des territoires. Monsieur le ministre, je trouve votre réaction un peu facile ! (M. le ministre s'étonne.) J'aurais aimé que vous éclairiez la représentation nationale de vos avis avant les votes plutôt que de nous faire ensuite la leçon en invoquant des exemples dramatiques. Là où le risque est très important, le préfet en tiendra compte, évidemment.

Quand des mesures uniformes sont appliquées partout, sans discernement, elles n'entraînent pas l'adhésion.

M. Olivier Véran, ministre.  - C'est formidable ! Pardon, mais vous avez voté une disposition qui interdit d'office la fermeture d'établissements recevant du public par catégorie. Le préfet pourra seulement constater qu'un établissement pose un problème de sécurité sanitaire, et le fermer a posteriori. (Mme Marie-Pierre de la Gontrie s'exclame.) Vous votez la réouverture de tous les bars et discothèques dans toutes les villes de France !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet échange, même s'il est rétrospectif, est utile. Je reconnais avec Max Brisson que les explications du ministre auraient mérité d'être données avant le vote.

Factuellement, le ministre a raison : l'amendement n°23 supprime la faculté pour les autorités sanitaires de fermer toute une catégorie d'établissements recevant du public dès lors que les mesures sanitaires ne peuvent y être appliquées, que prévoyait la loi du 9 juillet. Est-ce ce que vous souhaitiez en votant l'amendement ? Puisque nous sommes maintenant éclairés, je demande une seconde délibération sur cet amendement. S'il devait être alors écarté, vos amendements revivraient, et vous auriez tout loisir de les voter.

M. Laurent Duplomb.  - Très bien.

Mme la présidente.  - La seconde délibération interviendra à la fin de l'examen du projet de loi. Acte est donnée de votre demande.

L'amendement n°16 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°51, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Par dérogation, les Français expatriés rentrés en France entre le 1er octobre 2020 et le 1er avril 2021 et n'exerçant pas d'activité professionnelle sont affiliés à l'assurance maladie et maternité sans que puisse leur être opposé un délai de carence. Les modalités d'application du présent article peuvent être précisées par décret.

M. Olivier Véran, ministre.  - Cet amendement supprime le délai de carence pour bénéficier de la Puma, pour les Français rentrant de l'étranger.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je salue cet amendement et la réactivité de Jean-Baptiste Lemoyne sur le sujet.

Monsieur le ministre, il serait aussi bon que le Gouvernement soutienne la Caisse des Français de l'étranger dont beaucoup d'adhérents ne peuvent plus payer leurs cotisations, ayant perdu leurs revenus. Cela amène certains à rentrer en France. Un fonds de 50 millions d'euros a été voté. Accompagnons aussi ceux qui restent à l'étranger.

M. Olivier Cadic.  - Je salue à mon tour la réactivité de Jean-Baptiste Lemoyne. Vous voyez, monsieur le ministre, nous sommes capables de saluer le bien-fondé de certaines décisions du Gouvernement !

L'amendement n°51 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le coût pour l'État que représenterait la gratuité des masques.

Mme Esther Benbassa.  - Face à la multiplication des clusters, le port du masque dans l'espace public devient une nécessité.

Il a été rendu obligatoire dans certaines municipalités, où les contaminations vont crescendo et où les hôpitaux risquent d'être submergés. Afin de faire respecter cette exigence, les pouvoirs publics ont adopté des mesures coercitives ; notamment une amende pouvant aller jusqu'à 135 euros.

Nous comprenons qu'un dispositif contraignant soit de mise, mais il devrait être accompagné de mesures sociales, comme la gratuité des masques.

Le coût de ceux-ci peut devenir un véritable poids financier pour les foyers les plus précaires, et s'élever à plus d'une centaine d'euros par mois. Comment accepter que nos concitoyens au RSA, que des familles monoparentales, que les travailleurs au chômage partiel, aient à payer de leur poche cette obligation imposée par les pouvoirs publics ?

Le sujet devrait être abordé dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ce genre d'amendement est un aveu d'impuissance de notre part : ne pouvant proposer de dépenses supplémentaires, l'on exige du Gouvernement un rapport. C'est un grand classique de nos débats qui nous donne bonne conscience sans jamais obliger le Gouvernement ; celui-ci n'étant nullement tenu, par la Constitution, de satisfaire à une telle exigence, il s'en garde bien, le plus souvent, rendant cette injonction de nul effet. Avis défavorable.

Cet amendement nous offre cependant l'occasion d'interroger le Gouvernement : quel est, monsieur le ministre, le coût des masques ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°19 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la participation de l'assurance maladie pour une prise en charge à 100 % des masques et des tests de dépistages, afin de faire face à l'épidémie de covid-19. 

Mme Michelle Gréaume.  - Beaucoup de familles portent les mêmes masques pendant plusieurs jours au mépris des règles sanitaires. Il est temps de réfléchir à leur gratuité, comme nous le préconisons dans notre proposition de résolution déposée le 7 septembre dernier sur le bureau du Sénat.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

L'article premier bis demeure supprimé.

Mme la présidente.  - Amendement n°38, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 2 de la loi n° 2020 856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, il est inséré un article ... ainsi rédigé :

« Art. ....  -  I.  -  Le présent article est applicable aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique affectée par une mesure de police administrative prise en application du 2° ou du 3° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire ou du 5° de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique. Les critères d'éligibilité sont précisés par décret, lequel détermine les seuils d'effectifs et de chiffre d'affaires des personnes concernées ainsi que le seuil de perte de chiffre d'affaires constatée du fait de la mesure de police administrative.

« II.  -  Jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la date à laquelle leur activité cesse d'être affectée par une mesure de police mentionnée au I, les personnes mentionnées à ce même I ne peuvent encourir d'intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement de leurs loyers ou charges locatives afférents à leurs locaux professionnels ou commerciaux.

« Pendant cette même période, les sûretés réelles et personnelles garantissant le paiement des loyers et charges locatives concernés ne peuvent être mises en oeuvre et aucune mesure conservatoire ne peut être engagée.

« Toute stipulation contraire, notamment toute clause résolutoire ou prévoyant une déchéance en raison du non-paiement ou retard de paiement de loyers ou charges, est réputée non écrite.

« III.  -  Les dispositions du présent article ne font pas obstacle à la compensation au sens de l'article 1347 du code civil.

« IV.  -  Le II s'applique aux loyers et charges locatives dus pour la période au cours de laquelle l'activité de l'entreprise est affectée par une mesure de police mentionnée au I.

« Les intérêts ou pénalités financières ne peuvent être dus et calculés qu'à compter de l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du II.

« En outre, les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le bailleur à l'encontre du locataire pour non-paiement de loyers ou de charges locatives exigibles sont suspendues jusqu'à la date mentionnée au premier alinéa du même II. »

M. Olivier Véran, ministre.  - Dans un contexte difficile pour les entreprises, cet amendement prévoit des dispositions protégeant les locataires tout en préservant les intérêts des bailleurs.

Jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois après la fin de mesures de restriction de l'activité professionnelle, il est ainsi prévu de faire obstacle aux intérêts et pénalités financières dus pour retard ou non-paiement de loyers ou charges locatives ; à la mise en oeuvre des sanctions de l'inexécution ou de l'exécution tardive prévues au contrat ; à l'engagement par le bailleur de voies d'exécution forcée ; à la mise en oeuvre des sûretés réelles ou personnelles garantissant le paiement des loyers et de mesures conservatoires.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°46 à l'amendement n°38 du Gouvernement, présenté par M. Bas, au nom de la commission.

Amendement n°38, alinéa 5

Remplacer les mots :

de leurs loyers ou charges locatives afférents à leurs locaux professionnels ou commerciaux

par les mots :

des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous sommes favorables à l'amendement du Gouvernement, qui protège les entreprises locataires n'ayant pas les moyens de payer leur loyer, à condition de prendre en compte les difficultés qui peuvent en découler pour les propriétaires.

Aussi, nous proposons de limiter son champ d'application aux loyers et charges locatives afférents aux locaux où l'activité d'une entreprise est affectée par une mesure de police sanitaire.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°47 à l'amendement n°38 du Gouvernement, présenté par M. Bas, au nom de la commission.

Amendement n° 38, alinéa 6

Remplacer les mots :

aucune mesure conservatoire ne peut être engagée

par les mots :

le bailleur ne peut pratiquer de mesures conservatoires qu'avec l'autorisation du juge, par dérogation à l'article L. 511-2 du code des procédures civiles d'exécution

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous proposons aussi de rétablir la faculté, pour un bailleur qui justifierait de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de ses loyers ou charges locatives, de pratiquer des mesures conservatoires. Il s'agit d'une forme de nantissement pour que le propriétaire devienne, en cas de cessation de paiement de son locataire, un créancier privilégié.

M. Olivier Véran, ministre.  - Avis favorable au sous-amendement n°46.

Avis défavorable au sous-amendement n°47, car l'amendement du Gouvernement évite toute action judiciaire du bailleur contre les entreprises en difficulté pendant la crise sanitaire et notre amendement prend déjà en compte les intérêts du bailleur. Il n'est pas question de créer des relations conflictuelles entre les locataires et les bailleurs. Toutes les entreprises ne seront pas concernées, seules celles qui justifieront d'un certain niveau de perte de chiffre d'affaires.

Les sous-amendements n°46 et n°47sont successivement adoptés.

L'amendement n°38, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel. 

ARTICLE PREMIER TER A

Mme la présidente.  - Amendement n°27 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, del Picchia et Regnard, Mme Billon, MM. Canevet et Delahaye, Mmes Dindar et Gatel, MM. Henno, Janssens, Kern, Laugier et Levi, Mmes Perrot, Sollogoub et Vermeillet, M. Yung et Mme Saint-Pé.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Après le premier alinéa du 4° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent 4°, en ce qu'il permet d'imposer aux personnes souhaitant se déplacer par transport public aérien à destination du territoire métropolitain ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution de présenter le résultat d'un examen biologique de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par le covid-19 avant l'embarquement, ne s'applique pas aux ressortissants français. »

M. Olivier Cadic.  - Les ressortissants français aux États-Unis, au Panama, aux Émirats arabes unis et à Bahreïn ont l'obligation de présenter un test PCR négatif de moins de 72 heures, avant l'embarquement. Pourquoi les États-Unis, et pas le Canada, Panama et pas le Mexique, les Émirats, et pas Bahreïn ou le Qatar? Personne ne le comprend !

La conseillère consulaire Stéphanie Kamaruzzaman, récemment élue à Washington, a récemment démontré qu'il était impossible de satisfaire à cette obligation dans de nombreux états des États-Unis.

Le vote de la résolution n°1 par l'Assemblée des Français de l'étranger, le 8 octobre 2020 à Paris, au nom de l'équité entre les Français de l'étranger, demande qu'aucune différence ne soit faite entre les Français en provenance des pays listés rouge et que tous puissent passer le test PCR à leur arrivée en France.

Heureusement, une décision du Conseil d'État était rendue le 18 août après un référé liberté, à l'initiative d'un compatriote de New York, confirmant le droit fondamental, général et absolu de tout ressortissant français à retourner sur le territoire français, même s'il existe des dérogations à obtenir auprès du consulat comme par exemple, pour le décès d'un proche.

Les conditions de mise en place des tests de détection dans le cadre des déplacements par transport public aérien à destination du territoire métropolitain n'offrent pas toutes les garanties constitutionnelles nécessaires.

Cet amendement corrige donc cette situation et fait respecter le droit constitutionnel au retour sur le territoire national des ressortissants français.

Mme la présidente.  - Amendement n°18 rectifié bis, présenté par M. Leconte et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Le 4° du I de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette exigence ne saurait toutefois interdire le retour sur le territoire national d'un ressortissant français, ou d'une personne étrangère y résidant légalement. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement ne se limite pas aux seuls Français, mais s'étend à tous ceux qui ont le droit de résider en France, sans pour autant conférer un droit absolu au retour sans aucune condition sanitaire.

La situation à laquelle nous sommes confrontés est due à la loi du 9 juillet 2020 et surtout à son décret d'application. Pourquoi donc, monsieur le ministre, placer des pays présentant un risque sanitaire identique, sur deux listes différentes, dites « 2B » et « 2C » ?  Pour l'une, il faut faire le test avant le départ ; pour l'autre, à l'arrivée. Aucune raison objective ne justifie ces deux listes !

En effet, comme cela vient d'être mentionné, le Conseil d'État a rappelé que l'entrée en France, pour un Français, relève d'une liberté fondamentale qui doit s'appliquer dans la transparence. Aujourd'hui, monsieur le ministre, c'est du n'importe quoi ! Cette liberté fondamentale est bafouée. Il faut donc corriger le décret pour harmoniser la délivrance des laissez-passer consulaires.

Monsieur le rapporteur, nous ne revenons pas sur l'exigence sanitaire mais nous voulons la transparence. Or les postes consulaires sont livrés à eux-mêmes, surchargés, sans instructions transparentes !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Les amendements ont une portée considérable : s'ils étaient adoptés, plus aucune exigence ne pourra être imposée aux citoyens français revenant sur le territoire national, ni à l'embarquement, ni au débarquement. Si vous pensez, comme moi, que c'est excessif, il faut les rejeter.

Il existe bien sûr un droit constitutionnel pour tout Français à rentrer sur le territoire national, mais aucun droit n'est général et absolu : son exercice est subordonné, comme chaque droit, à des conditions. En l'espèce, un contrôle de l'état sanitaire du voyageur est nécessaire, pour lui comme pour les autres. Je rappelle enfin que les dispositions visées, qui sont d'application exceptionnelle, ne concernent que quatre pays. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je suis choqué par l'attitude du ministre. Quelle désinvolture, alors que nous abordons des sujets essentiels, qu'il s'agisse de la gratuité des masques ou des critères objectifs qui font qu'un pays figure sur la liste 2B ou 2C. J'ai une autre idée du débat parlementaire, et je trouve cette désinvolture inacceptable ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Olivier Véran, ministre.  - Faut-il le dire en criant ?

M. Jean-Yves Leconte.  - Mon amendement ne supprime pas l'exigence que vous mentionnez, monsieur le rapporteur, mais demande une mise en oeuvre ordonnée et transparente. Les postes consulaires n'ont reçu aucune instruction. Sur ce sujet comme sur d'autres, l'improvisation du Gouvernement n'avance pas masquée !

M. Damien Regnard.  - Je suis estomaqué par ce débat ! Je suis témoin de ce qui se passe aux États-Unis, pour avoir accompagné nos compatriotes bloqués cet été, parfois dans une grande détresse : des femmes enceintes n'ont pu rentrer accoucher en France...

Vous demandez des tests PCR de moins de 72 heures, mais contre l'avis de l'ambassade et des consulats, qui disent que c'est impossible ! (M. le ministre le conteste.) Nous n'avons d'ailleurs pas de leçons à donner, quand en France, il faut parfois dix jours !

M. Olivier Véran, ministre.  - C'est faux. Tout cela est faux.

M. Damien Regnard.  - Des dérogations ont été délivrées par les consulats, mais sans fondement clair, parfois à la tête du client. Vous faites voyager dans un même avion des gens qui ont été testés et d'autres qui ont une dérogation. C'est ridicule !

Il faut quatre jours pour obtenir les résultats des tests effectués à Roissy, tout cela sans isolement ni traçage. C'est parfaitement inutile !

Je sais que les droits fondamentaux et le respect de la Constitution ne sont pas votre priorité en ce moment, mais ce manque de transparence est incompréhensible, quand on sait que le Mexique a dix fois plus de cas que les États-Unis !

M. Olivier Véran, ministre.  - C'est encore faux. Tout est faux.

M. Olivier Cadic.  - Merci au rapporteur d'avoir pris le temps de formuler une réponse.

Nous sommes favorables à un test à l'arrivée, comme pour les voyageurs en provenance du Canada. Pourquoi l'exiger avant l'embarquement ?

Une famille venant du Chili, en transit, s'est trouvée bloquée à Houston faute de tests. Que faire ? Les gens prennent KLM et passent par Amsterdam ; puis ils arrivent en France sans test. Voilà la réalité !

Quelque 20 % des dérogations sont refusées ; ce n'est donc pas la solution. Nous attendons des explications.

M. Olivier Véran, ministre.  - Inutile, monsieur le sénateur Leconte, de hausser le ton. Quand le rapporteur a tout dit, qu'il a donné toutes les explications de fond et de forme, je n'ai rien à ajouter ! Je n'ai jamais manqué de respect au Sénat. Monsieur Regnard, je comprends votre émotion, mais vous avez dit beaucoup de choses inexactes. Il y a quelques mois, les sénateurs critiquaient l'absence de tests aux frontières, estimant qu'on rentrait en France comme dans un moulin...

M. Damien Regnard.  - C'est toujours le cas.

M. Olivier Véran, ministre.  - Nous avons mis en place un dépistage systématique. Les frontières sont fermées avec les pays où le virus circule très activement. Si les tests sont matériellement réalisables dans le pays de départ, on demande à ce que cela soit fait avant l'embarquement. Sinon, nous testons à l'arrivée. Reconnaissez qu'il est plus intéressant, quand c'est possible, de s'assurer que les voyageurs sont bien négatifs !

M. Damien Regnard.  - Dans ce cas, n'accordez pas de dérogations...

M. Olivier Véran, ministre.  - Aux États-Unis, où l'on teste massivement, il est possible, sauf cas exceptionnel de détresse, de produire un test dans les délais. Votre raisonnement, c'est un peu le syndrome NIMBY : oui à la protection, mais « not in my back yard »...

Le système que nous avons mis en place est puissamment logique, il a été adopté par la plupart de nos voisins. De toute façon, le sujet sera bientôt réglé par les tests antigéniques, qui simplifieront la donne. Tester tous les voyageurs à l'arrivée est impossible, sauf à transformer tout Roissy en gigantesque barnum de tests !

Il y a eu une difficulté d'accès aux tests à la rentrée, je ne le nie pas, mais le délai moyen de rendu d'un résultat PCR est désormais d'1,2 jour et 91 % des tests sont rendus en moins de 48 heures, sauf situation territoriale particulière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je préfère quand c'est le ministre qui défend la position du Gouvernement que de devoir le faire moi-même ! (Sourires)

Ces amendements nous font trop baisser la garde. Des tests réalisés au départ sont plus protecteurs qu'à l'arrivée - d'autant que dans ce dernier cas, il faut se soumettre à un confinement.

Il est important, monsieur le ministre, que vous preniez acte de faits rapportés par nos collègues représentants les Français de l'étranger. Que faire pour nos compatriotes qui, même aux États-Unis, n'arrivent pas à obtenir les résultats de leur test dans le délai demandé ?

M. Olivier Véran, ministre.  - Il y a le laisser-passer sanitaire.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ce n'est guère satisfaisant sur le plan sanitaire. La situation mérite d'être réexaminée, et non traitée au petit bonheur la chance.

Je partage l'avis défavorable sur ces amendements qui vont trop loin, mais on ne peut nier le problème. Monsieur le ministre, il vous appartient d'essayer de le résoudre.

L'amendement n°27 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°18 rectifié bis.

Mme la présidente.  - Amendement n°28 rectifié ter, présenté par MM. Cadic, del Picchia et Regnard, Mme Billon, MM. Cigolotti, Canevet et Delahaye, Mmes Dindar et Gatel, MM. Henno, Janssens, Kern, Laugier et Levi, Mmes Perrot, Sollogoub et Vermeillet, MM. Yung et Lafon et Mme Saint-Pé.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

Un rapport étudie les modalités d'application de l'obligation de présenter le résultat d'un examen biologique de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 pour les personnes souhaitant se déplacer par transport public aérien à destination ou en provenance du territoire métropolitain, tel que prévu par le IV de l'article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie d'urgence de l'état d'urgence sanitaire.

M. Olivier Cadic.  - Les personnes arrivant en France en provenance d'un pays listé dans l'annexe II ter du décret du 10 juillet 2020 doivent se soumettre à un test de dépistage à leur arrivée à l'aéroport, à défaut d'avoir pu le réaliser dans les 72 heures précédant le départ.

Or les tests sont réalisés de façon très aléatoire, même pour des voyageurs provenant de pays où la situation sanitaire est catastrophique.

La question du dépistage à l'arrivée en France est soulevée depuis le mois de mars. Le premier, je vous ai interrogé, monsieur le ministre, sur les contrôles à l'arrivée. Or rien n'est demandé, les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger arrivés des quatre coins du monde il y a deux semaines peuvent en témoigner.

Cet amendement prévoit l'information régulière du Parlement sur la mise en oeuvre des mesures prévues par le code de la santé publique. 

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission des lois est défavorable aux demandes de rapports. Avis défavorable.

M. Olivier Véran, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°28 rectifié ter n'est pas adopté.

L'article premier ter A est adopté.

Mme la présidente.  - Nous avons examiné 20 amendements, il en reste 27 sur ce texte.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 14 octobre 2020, à 15 heures.

La séance est levée à 0 h 45.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication