SÉANCE

du jeudi 6 mai 2021

90e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

Secrétaires : M. Daniel Gremillet, M. Jean-Claude Tissot.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle 32 questions orales.

Moyens d'alerte des services de secours dans les ERP

M. Stéphane Piednoir .  - Ma question porte sur les moyens d'alerte des services de secours dans les établissements recevant du public (ERP), comme les salles des fêtes et autres lieux de socialisation essentiels à la vitalité de nos communes.

Selon la catégorie à laquelle ils appartiennent, les ERP doivent répondre à un certain nombre d'obligations en termes de sécurité : notamment, garantir une ligne téléphonique fixe sans discontinuité de service pour l'alerte aux secours. Compte tenu de l'abandon du réseau cuivré, ils doivent s'équiper d'une box : installation onéreuse et peu judicieuse, surtout lorsqu'il n'y a pas d'accueil du public.

La téléphonie mobile pourrait constituer une solution plus abordable tout en répondant aux objectifs de sécurité, puisqu'il est possible d'appeler les numéros d'urgence même sans forfait. Or, l'alerte des secours par un téléphone mobile n'est pas autorisée dans la plupart des ERP. Le Gouvernement envisage-t-il de faire évoluer la réglementation ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Le choix de l'opérateur historique a été l'abandon de la boucle locale cuivre. Un arrêté de 1980 pose les règles pour garantir l'alerte et l'intervention précoces des secours. Une note d'information de 2017 a admis pour les plus grands ERP, de première catégorie, la possibilité de recourir à des box et pour les plus petits, de cinquième catégorie, celle d'utiliser la téléphonie mobile.

Si un exploitant souhaite des adaptations, il doit en faire la demande justifiée à l'autorité de police, qui consultera la commission de sécurité compétente.

Salle de shoot du Xe arrondissement de Paris

Mme Catherine Dumas .  - Je souhaite alerter sur le projet de la maire de Paris de créer deux nouvelles « salles de shoot », ou salles de consommation à moindre risque (SCMR), dans les XVIIIe et Ier arrondissements de la capitale.

La création de ces salles est encadrée par la loi. Elles sont tenues d'adresser chaque année un rapport sur le déroulement de l'expérimentation à l'agence régionale de santé (ARS), au maire et au ministre de la santé. Dans un délai de six mois avant le terme de l'expérimentation, le Gouvernement doit adresser au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation, portant notamment sur son impact sur la santé publique et sur la réduction des nuisances dans l'espace public.

Mais aucun audit annuel n'a été publié depuis la création de la salle de shoot en 2016. J'en ai réclamé un au ministère de la Santé mais souhaite qu'il soit complété par une étude d'impact « nuisances et sécurité » rendue par le ministère de l'Intérieur.

Les riverains sont désemparés et exaspérés depuis quatre ans : comme me l'a signalé Bertil Fort, élu de l'arrondissement, des personnes s'injectent de la drogue sur la voie publique, l'insécurité règne, des seringues jonchent le sol, des toxicomanes hurlent. Cet environnement constitue une préoccupation majeure en matière sociale, de sécurité et de santé publique.

Une étude d'impact permettrait d'évaluer les effets de l'implantation de ce type d'établissement pour un quartier.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - La salle du Xe arrondissement fait l'objet d'une surveillance adaptée depuis sa création, mais les nuisances, qui existaient déjà auparavant, n'ont pas disparu. Le commissariat organise des patrouilles régulières, vérifie chaque signalement ; les policiers en uniforme, la brigade territoriale de contact des Xe et XVIIIe arrondissements et le service local transmissions, via les caméras de vidéoprotection de la préfecture, assurent la sécurisation. Les usagers qui font usage de stupéfiants hors de la salle sont appréhendés.

En tant qu'ancienne élue de Paris, je suis sensible à ce sujet. Néanmoins, une étude d'impact aurait peu d'intérêt car la situation est connue et suivie. En revanche la préfecture et la mairie font un point régulier au comité de voisinage.

Six mois avant la fin de l'expérimentation, le rapport du Gouvernement au Parlement, qui comprendra les diagnostics de la préfecture de police, évaluera les résultats.

Mme Catherine Dumas.  - Au nom de mes collègues Marie Tubiana et Rudolph Granier, je tiens à attirer l'attention sur le quartier Stalingrad, également touché par le fléau de la drogue.

Au lendemain du drame d'Avignon, il faudrait tirer les conséquences des expériences passées.

Avenir de l'usine de PSA de Douvrin

Mme Sabine Van Heghe .  - L'usine de PSA - aujourd'hui Stellantis - à Douvrin, dans les Hauts-de-France, produit le moteur EP qui équipe les modèles hybrides rechargeables haut de gamme. Mais ce dernier est voué à disparaître au profit d'un successeur, l'EP « Gen 3 », qui de ait être fabriqué en Hongrie.

La mobilisation des syndicats et des élus a permis de maintenir cette production à Douvrin mais nous avons besoin d'une vision de long terme. Comment le Gouvernement va-t-il se mobiliser pour assurer l'avenir de cette usine ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Ces inquiétudes sont légitimes. Le secteur doit s'adapter à marche forcée : 50 000 emplois pourraient disparaître d'ici 2030 notamment dans la sous-traitance. C'est pourquoi notre plan de 8 milliards d'euros agit sur les primes d'achat, les aides aux industriels qui s'engagent à relocaliser, le soutien à l'innovation, l'anticipation de la transition.

Oui, la production sur notre sol du moteur de nouvelle génération est une bonne nouvelle. Bruno Le Maire est très attaché à la transformation de la filière automobile, les annonces du 21 avril en témoignent : contrat stratégique de la filière automobile, plan d'action pour la fonderie auto. La situation de l'usine de Douvrin est suivie avec attention.

Mme Sabine Van Heghe.  - Notre industrie est abandonnée : délocalisations, fermetures de grands sites comme Bridgestone à Béthune. Il est temps de stopper l'hémorragie.

Programme « New Deal mobile »

Mme Nadège Havet .  - En janvier 2018, l'autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de presse (Arcep) et le Gouvernement ont annoncé les engagements des opérateurs pour accélérer la couverture mobile des territoires.

Afin de répondre aux attentes des citoyens et des territoires en matière de connectivité mobile, un dispositif de couverture ciblée a été mis en place. Les communes du Finistère ont ainsi été retenues pour l'implantation d'une antenne de téléphonie.

Jusqu'à peu, ces pylônes édifiés en discontinuité de l'urbanisation étaient autorisés comme installations techniques non constitutives d'extensions d'urbanisation. Le juge a cependant annulé en décembre 2019 un tel projet, qu'il a assimilé à une opération de construction isolée.

Il semble donc désormais difficile d'autoriser de tels projets en discontinuité de l'urbanisation en zone littorale. Deux politiques publiques entrent en conflit : la couverture du territoire par la téléphonie mobile et le respect de la loi littoral.

Les implantations d'antenne en zone de montagne bénéficient depuis la loi ELAN d'une dérogation : pourquoi ne pas l'étendre aux zones littorales ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Je partage votre constat. La loi du 3 janvier 1986 pose en effet des contraintes fortes pour l'implantation d'antennes en zone littorale. Des propositions similaires à la vôtre ont déjà été faites, notamment par le député Éric Bothorel. Mais les amendements de ce type ont été rejetés par le Parlement, qui s'est prononcé clairement.

Le Gouvernement considère qu'il n'est pas opportun de modifier l'équilibre trouvé dans le cadre de la loi ELAN.

Indemnisation des fonds de commerce des discothèques

Mme Annie Le Houerou .  - Depuis plus d'un an, les discothèques sont fermées. Près d'un quart d'entre elles pourraient disparaître. Elles ont bénéficié de mesures de soutien... insuffisantes. Le secteur est durement et durablement affecté et les habitudes de consommation risquent de changer.

Les chefs d'entreprise concernés sont inquiets. L'intégration en 2020 dans le dispositif conçu pour le secteur des cafés-hôtels-restaurants n'a pas été suffisante car ces établissements sont totalement fermés sur une période très longue.

Le Gouvernement a prévu un plan, mais envisage-t-il une indemnisation complémentaire des fonds de commerce ? Comment soutiendra-t-il le monde de la nuit ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Le Gouvernement est mobilisé sur cette question. Les discothèques contribuent à la joie de vivre dans notre pays. Je comprends l'abattement des professionnels.

Dès juin 2020, ils ont eu accès au volet 2 du fonds de solidarité. Depuis le 1er décembre 2020, le fonds a été renforcé pour ces établissements, afin de financer l'aide de 20% du chiffre d'affaires ou la prise en charge de frais fixes. Le 14 janvier 2021, une nouvelle aide a été créée, qui se monte à 70 % des coûts fixes des établissements fermés administrativement. Les discothèques peuvent aussi bénéficier de l'aide exceptionnelle au titre des congés payés pris depuis le début de l'année.

Ces mesures s'ajoutent aux aides de droit commun ouvertes à toutes les entreprises, prêts garantis par l'État, activité partielle, exonérations de cotisations.

Des réflexions complémentaires sont en cours. Mais à ce jour, aucun dispositif ne retient le fonds de commerce comme valeur à indemniser ! Les fonds de commerce devraient retrouver à terme leur valeur normale.

Le Gouvernement restera mobilisé pour soutenir fortement le secteur.

Fermeture de bases Air France en province

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - La crise que traverse le transport aérien est sans précédent. Dans cette période complexe, nous avons appris l'intention d'Air France de fermer trois bases à Bordeaux, Toulouse et Marseille. Des centaines de familles devront déménager à Paris ; les conséquences sociales et économiques sont lourdes pour les zones concernées.

Pourtant, l'ouverture en province des bases d'Air France avait été saluée.

L'État est monté au capital de cette entreprise, largement aidée et qui porte les couleurs de la France : le Gouvernement doit donc pouvoir intervenir !

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - À cette heure, aucune décision n'a été prise. Air France ne se désengage pas de son implantation sur le territoire. Ces bases sont récentes -  2012  - et sont une modalité d'organisation des plateformes.

Air France-KLM fait face à une baisse d'activité durable. Dans ce contexte difficile, Bruno Le Maire a annoncé 7 milliards d'euros de prêts et l'État participera à la recapitalisation à hauteur de 4 milliards d'euros. Air France doit s'aligner sur les meilleurs standards mondiaux et adopter une stratégie de soutenabilité économique et sociale à moyen et long terme. Le Gouvernement sera attentif à ce que les plans de compétitivité soient menés en concertation avec les syndicats et les parlementaires, dans la transparence.

M. Olivier Cigolotti.  - Merci de votre vigilance. Ces bases apportent une dynamique économique, limitée mais symbolique. Une recentralisation vers Paris serait un mauvais signal.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Message reçu.

Paiement de la contribution à l'audiovisuel

M. Yves Bouloux .  - Les entreprises de la restauration, de l'hôtellerie et des loisirs nocturnes demandent une exonération exceptionnelle de leur contribution à l'audiovisuel public.

Pour faire face à la crise sanitaire, le Gouvernement a mis en place des dispositifs exceptionnels de soutien : les cafés-restaurants sont fermés depuis six mois et ont souffert d'une sous-activité durant les cinq autres mois ; les discothèques sont toujours fermées, sans aucune perspective de réouverture ; les rares hôtels-restaurants ouverts affichent un taux d'occupation moyen de 15 %.

Au mois d'avril 2021, ces professionnels devront s'acquitter de la contribution à l'audiovisuel, parfois plusieurs milliers d'euros. Un report d'échéance a été annoncé mais les difficultés de trésorerie seront les mêmes dans trois mois !

À titre exceptionnel, la contribution à l'audiovisuel public au titre de 2021 ne pourrait-elle pas être annulée pour ces entreprises ? Une autre piste serait de leur faire bénéficier d'un abattement de 25 %.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Nous oeuvrons depuis plus d'un an pour soutenir la trésorerie de ces entreprises.

Bruno Le Maire et Olivier Dussopt ont annoncé le report de trois mois de l'échéance d'avril de cette contribution.

Par ailleurs, les hôtels ayant travaillé moins de neuf mois en 2020 pourront appliquer une minoration de 25 %. Ce dispositif s'applique à d'autres résidences de tourisme, auberges collectives, villages de vacances, refuges de montagne, campings. C'est une réponse immédiate à l'inquiétude des entreprises.

Nous en reparlerons dans le cadre du projet de loi de finances ; car nous sommes dans une position d'adaptation permanente.

Communes rurales et plan de relance

Mme Marie Mercier .  - Ma question porte sur les mesures du plan de relance à destination des collectivités territoriales et sur les difficultés que rencontrent les maires des communes rurales. En décembre 2020, le Gouvernement a expliqué les axes retenus. Mais la désillusion est vite arrivée, tant la mise en oeuvre s'avère inadaptée à nos territoires ruraux. Un plan de relance ? Il faudrait d'abord relancer la préfecture !

L'abondement de la seule dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) interroge les élus puisqu'elle est orientée vers des priorités décidées par l'État. Il est dommage que la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) n'ait pas bénéficié du même régime.

Le pilotage est trop complexe du fait de l'absence d'un guichet unique en préfecture. En outre, les programmes développés sont multiples et marqués par des critères qui deviennent vite restrictifs.

Pourquoi ne pas avoir prévu une augmentation substantielle de la DETR, avec une possibilité de bonification des subventions pour les projets qui répondent aux exigences fixées par le Gouvernement ?

Pourquoi avoir privilégié une piste alambiquée et rigide ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Depuis 2017, nous avons stoppé la baisse de la DGF et pérennisé des crédits auparavant temporaires. En Saône-et-Loire, les communes recevaient auparavant 8,7 millions d'euros de DETR, mais l'an dernier, elles ont reçu 14,2 millions de DETR et - je dis bien « et » - 5,8 millions de DSIL.

Dans le contexte de la relance, nous allons plus loin en majorant la DSIL de 950 millions d'euros pour des projets liés à la transition écologique, au sanitaire et à la rénovation du patrimoine.

Une enveloppe équivalente permettra la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales, dont 650 millions d'euros pour les communes.

Ces outils sont bien connus des collectivités territoriales et bien ciblées sur la ruralité. Les communes rurales bénéficieront de ces financements. Les préfets veilleront à l'équilibre territorial des subventions accordées.

En 2020, dans votre département, 25 projets ruraux ont bénéficié de subventions DSIL, dont 14 portés par des communes rurales. N'opposons pas DETR et DSIL !

Mme Marie Mercier.  - Vous me parlez chiffres, chiffres et encore chiffres.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Vous me le reprocheriez, sinon !

Mme Marie Mercier.  - Facilitez, simplifiez, pour aider les maires ! Ils développent leur territoire et font vivre la démocratie de proximité, mais aujourd'hui, ils sont plutôt découragés.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - La DSIL serait-elle compliquée ?

Dépenses liées aux documents d'urbanisme et automatisation du FCTVA

M. Olivier Cigolotti .  - La loi du 2 juillet 2003 dite urbanisme et habitat, a rendu éligibles au FCTVA les dépenses réalisées par les collectivités locales concernant les frais d'études, d'élaboration, de modification et de révision des documents d'urbanisme. Mais la loi de finances pour 2021 a mis fin à cette possibilité avec l'automatisation du FCTVA.

Désormais, les frais afférents à ces documents sont à amortir sur dix ans, et ces amortissements pèsent lourdement sur les dépenses des collectivités. Les conséquences seront très dommageables pour le bloc communal.

Les élus locaux sont inquiets, à la veille de l'examen du projet de loi Climat et résilience qui rendra obligatoire une modification des documents de planification et d'urbanisme nationaux, pour intégrer l'objectif de lutte contre l'artificialisation des sols.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en place pour compenser la charge financière de cette mesure ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Avec l'automatisation de FCTVA à compter de 2022, l'éligibilité qui reposait sur des critères juridiques s'inscrit désormais dans une logique comptable.

Le périmètre des dépenses éligibles a dû évoluer ; le Gouvernement a veillé à consulter les élus locaux et à réduire autant que possible les modifications apportées à l'assiette.

Cependant, les documents d'urbanisme du compte 202 ne sont plus éligibles. Cela représente au total 20 millions d'euros par an, soit 0,3 % des 6 milliards d'euros du fonds. D'autres dépenses deviennent plus largement éligibles, je songe aux biens confiés à des tiers par les communes.

Le gain net pour les collectivités territoriales pourrait atteindre 235 millions d'euros en fonction des années. Elles gagneront également du temps grâce à un système de remboursement direct. Il faut avoir une vue d'ensemble de la réforme.

M. Olivier Cigolotti.  - On attendait une simplification mais cette mesure est perçue par certaines communes comme une sanction.

Conséquences de la suppression de la taxe d'habitation sur les politiques de logement social

Mme Marie-Claude Varaillas .  - La suppression progressive de la taxe d'habitation sur les résidences principales affecte les conditions de financement des communes et des intercommunalités par la réduction de l'assiette de leur prérogative d'imposition directe.

Un effet pervers de la réforme apparaît, une conséquence négative indirecte sur les politiques de logement social. Pour les maires assujettis aux obligations de l'article 55 de la loi SRU, l'implantation d'une proportion de logements conventionnés est une obligation légale. La particularité fiscale du secteur du logement social réside dans les exonérations de fiscalité foncière dont il bénéficie.

Avec la fin de la taxe d'habitation, les futures constructions de logements sociaux ne produiront quasiment plus de ressources fiscales pour les communes d'accueil. Ces dernières vivront un étonnant paradoxe : des charges éducatives et sociales plus lourdes pour un public fragile et une privation de ressources.

Dans les départements moins denses, le logement social fait l'objet d'un sur-financement par les collectivités. Ces apports sont essentiels au secteur. La réforme de la taxe d'habitation, si elle n'est pas corrigée sur ce point, risque de donner un véritable coup d'arrêt à la politique de construction. Le Gouvernement compte-t-il corriger cette anomalie ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Le sujet est complexe et fait intervenir plusieurs facteurs. Chaque collectivité a été compensée de sa perte de taxe d'habitation et de taxe foncière de manière intégrale, grâce à un mécanisme pérenne et dynamique : cela concerne les logements sociaux existants. S'agissant de futures constructions, un rapport sera remis au Parlement en 2023.

Une analyse approfondie est nécessaire.

Il est rare que les programmes ne comportent pas aussi des logements privés, source de revenus fonciers pour la commune. En outre, l'exonération n'est pas définitive, les logements sociaux fourniront donc bien à moyen long terme des revenus pour les communes.

Enfin, celles qui accueillent des logements sociaux et de nouveaux habitants bénéficient d'une péréquation via la DSU et la DGS.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Il faudrait attribuer une base plancher de taxe d'habitation à chaque logement exonéré !

Subventions communales aux cinémas

Mme Sylviane Noël .  - Les salles de cinéma peuvent aujourd'hui recevoir une aide financière directe ou indirecte de la municipalité. Pour les aides directes, la loi Sueur autorise les collectivités locales à contribuer au fonctionnement ou aux investissements des salles de cinéma. Mais les exploitants doivent être en mesure de fournir un certain nombre de documents pour percevoir ce type de subvention.

Qu'en est-il pour ceux qui n'ont pas encore pu ouvrir leur cinéma et n'ont aucune antériorité d'exploitation ? Certaines communes se sont vu refuser le versement de telles subventions par le contrôle de légalité.

Pourtant, il existe bien un intérêt public local et une carence de l'initiative privée.

De plus, le secteur du cinéma, dont l'activité est suspendue depuis des mois, souffre tout particulièrement de la crise sanitaire. Si l'on empêche les communes de lui apporter cette aide, cela le condamnera définitivement.

Le Gouvernement est-il prêt à envisager une solution dérogatoire pour ces situations ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Les cinémas sont au coeur de notre vitalité économique et culturelle. Les communes peuvent déjà aider les petites salles indépendantes.

Le Conseil d'État a jugé que l'intention du législateur était de réserver ces subventions aux entreprises existantes. Il ne s'agit pas de développer le cinéma municipal. Aussi, le préfet a-t-il bloqué une délibération.

Le projet de loi 4D prévoira une nouvelle possibilité de soutien aux entreprises existantes, mais pour financer de nouveaux cinémas.

Par ailleurs, les communes peuvent recourir à d'autres bases juridiques pour créer un service nécessaire en cas de carence de l'initiative privée, sur le fondement de l'article L. 2251-3 du code général des collectivités locales (CGCT).

Je prends pleinement la mesure de ces difficultés et suis à votre disposition pour regarder si le cas précis dont vous avez parlé entre dans l'un ou l'autre de ces dispositifs.

Mme Sylviane Noël.  - Je vous remercie et vous transmettrai le dossier de cette commune.

Financement de la formation des élus locaux

Mme Catherine Procaccia .  - Deux ordonnances sur la réforme de la formation des élus locaux ont créé de nouveaux problèmes, alors que la formation des élus est plus importante que jamais.

Les élus, qui accédaient jusqu'alors à 20 heures de formation renouvelables et cumulables chaque année, doivent maintenant composer avec une enveloppe annuelle de 700 euros, sans possibilité de report. Pire, un arrêté abaisse à 80 euros hors taxes par heure et par élu local le plafond des frais pédagogiques que les organismes de formation peuvent facturer dans le cadre du droit individuel à la formation des élus (DIFE). Ces nouvelles restrictions limitent dangereusement la qualité des formations qui pourront être suivies.

Cela risque de dissuader les organismes agréés de proposer des formations individuelles de qualité. Soutiendrez-vous la position du Sénat à l'Assemblée nationale ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Le Sénat a réalisé un travail important sur le texte qu'il a adopté à l'unanimité le 8 avril.

La réforme de la formation des élus repose sur les crédits de formation des collectivités territoriales pour leurs propres élus, le DIFE, et sur un financement qui relève des élus eux-mêmes.

Le DIFE fait face à des difficultés financières ces derniers mois, en particulier parce que certains organismes ont augmenté leurs prix jusqu'à 450 euros par heure, asséchant le fonds.

C'est pourquoi un plafond par heure et par élu a été instauré. Le plafond de 80 euros reste raisonnable.

Les ordonnances créent une plateforme numérique, gage d'accélération des démarches. Les droits libellés en euros et non plus en heures permettront des formations plus longues dès lors qu'elles ne sont pas trop onéreuses.

La réforme consolide la formation des élus et assure la transparence de l'activité de formation.

Mme Catherine Procaccia.  - Certains organismes ont abusé, ce n'est pas une raison pour les pénaliser tous. Il y a aussi les frais de gestion prélevés par la Caisse des dépôts : 25 % du coût de formation, c'est beaucoup !

Représentation dans les syndicats mixtes de gestion forestière

M. Éric Gold .  - Les syndicats mixtes de gestion forestière, ouverts, regroupent la gestion de forêts communales et sectionales, notamment dans les territoires du Massif Central, caractérisés par un morcellement important de la forêt publique. Ils assurent la gestion courante des forêts sans transfert de propriété, ainsi qu'une gestion durable et multifonctionnelle des forêts publiques.

L'association des communes forestières du Puy-de-Dôme est en désaccord avec la préfecture sur l'application de la loi du 27 décembre 2019, dite Engagement et proximité.

Les services de l'État demandent que seuls des conseillers municipaux siègent au syndicat mixte de gestion forestière. Cette interprétation des textes va au-delà des objectifs de la loi.

La loi de 2019 n'étant pas prévue pour les sections de communes, les services de l'État appliquent, par défaut, les règles valables pour les communes. Quel intérêt d'avoir un syndicat dont l'organe délibérant ne représente que la commune ? Un tel fonctionnement menacerait la gestion mutualisée centrée sur la valorisation des biens forestiers communaux et sectionaux et la production de bois.

L'association des communes forestières du Puy-de-Dôme regrette un manque d'échanges. L'interprétation des services préfectoraux est-elle la bonne ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Cette question recouvre des enjeux essentiels de gouvernance et de démocratie.

Le Conseil constitutionnel a rappelé en mai 2019 que le législateur a entendu favoriser - en 1985 comme en 2013 - une gestion par les communes.

Ces prérogatives - notamment de désignation des délégués de section - sont exercées par le conseil municipal lorsqu'il n'y a pas de commission syndicale.

La loi Engagement et proximité prévoit que « pour l'élection des délégués des communes, des départements et des régions au comité du syndicat mixte, le choix de l'organe délibérant peut porter uniquement sur l'un de ses membres. » Le conseil municipal désigne donc en son sein les délégués représentant la commune ainsi que les délégués représentant les sections de communes. Les membres de la section demeurent associés en cas de changement d'usage ou de vente de tout ou partie des biens de la section.

M. Éric Gold.  - Merci pour votre réponse. Dans certains cas, il peut y avoir place pour l'interprétation. L'État doit accompagner les communes forestières et les représentants qui ne sont pas forcément des élus.

Difficultés de recouvrement de la taxe de séjour

M. Max Brisson .  - L'obligation de collecte de la taxe de séjour relève de la responsabilité des plateformes numériques afin de prendre en compte les nouvelles spécificités de l'activité de location de courte durée. Celles-ci doivent transmettre au moment du reversement de la taxe un état déclaratif aux collectivités.

Cependant, les collectivités observent de nombreux manquements à ces obligations et des disparités entre les états déclaratifs retournés, parfois peu exploitables, erronés et incomplets. Dans ce cas, les plateformes ont tendance à se dégager de toute responsabilité sur les loueurs.

Si la loi prévoit des amendes en cas d'omission ou d'inexactitude, des flous juridiques demeurent, leur permettant d'échapper aux obligations des professionnels ou autres loueurs indépendants. Cette inégalité est inacceptable.

Les conditions et les modalités de transmission de l'état déclaratif ne sont pas fixées par la loi, contrairement au calendrier de reversement de la taxe de séjour, ce qui complique l'exercice.

Le Gouvernement compte-t-il engager une réflexion avec les acteurs pour préciser le cadre réglementaire applicable ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Depuis 2015, les évolutions législatives et réglementaires ont été nombreuses.

La loi de finances pour 2017 a prévu une taxation proportionnelle à la nuitée et obligé les plateformes à collecter la taxe. C'est une avancée considérable pour les collectivités territoriales : le produit de la taxe de séjour a progressé de 18 % en 2019 par rapport à 2018.

La loi de finances pour 2020 a modifié la périodicité de reversement de la taxe de séjour aux collectivités : avant le 30 juin, puis avant le 31 décembre. Elle a supprimé la possibilité d'appliquer le régime forfaitaire aux hébergements non classés.

La loi de finances pour 2021 a prévu que l'administration fiscale fournisse plus rapidement les tarifs aux plateformes, et que celles-ci reversent plus régulièrement aux collectivités. Ces évolutions sécurisent les collectivités territoriales.

S'ajoute une garantie financière puisque le rendement de la taxe sera augmenté avec la modification du plafonnement applicable aux hébergements non-classés adoptée dans la loi de finances pour 2021.

Si certaines pratiquent peuvent toujours être améliorées, la taxe de séjour a surtout besoin d'un cadre juridique stable.

M. Max Brisson.  - Je connais la complexité du sujet et la volonté de réduire les distorsions avec les hébergeurs professionnels mais les plateformes trouvent toujours des failles. Limitons les effets d'aubaine.

Maisons France Services

M. Édouard Courtial .  - Il y a urgence à inverser la tendance au désengagement de l'État. L'accès aux services publics de proximité est un prérequis, qui conditionne la liberté de choix de vivre à la ville ou à la campagne.

Le Gouvernement promet le déploiement d'une Maison France Services (MFS) par canton, soit 2 000 maisons d'ici 2022.

Le succès repose sur trois conditions. D'abord, un maillage territorial efficace, or l'échelle retenue est celle de 2013 : de très grands cantons n'auront qu'une MFS. Ensuite, un budget suffisant. Or, la dotation de l'État se limite à 30 000 euros par an, ce qui ne couvre la rémunération que d'un seul agent ! Le Gouvernement doit s'engager dans la durée : ce n'est pas aux collectivités d'assumer des missions qui incombent à l'État. Les MFS ne doivent pas se résumer à un outil de communication politique, alors que le sentiment d'abandon des territoires ruraux ne fait que croître.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Chaque MFS bénéficie de 30 000 euros, soit un total de 61 millions d'euros en 2021. La formation des agents et l'animation des réseaux sont également financées. Nous attribuons 60 000 euros par projet à 80 MFS mobiles - dont une dans l'Oise - pour un total de 4,8 millions d'euros en 2020.

Quelque 1 304 MFS sont déjà déployés ; elles ont réalisé 860 000 accompagnements personnalisés, dont 8 000 dans l'Oise.

L'objectif de 2 500 MFS sera atteint en 2022. De douze aujourd'hui, l'Oise passera comme prévu à 31 MFS en 2022, conformément à la circulaire du 8 juin 2020. Une attention particulière sera portée aux territoires les plus en retard.

Création d'une régie publique de l'eau dans neuf communes du Val-de-Marne

Mme Sophie Taillé-Polian .  - La production et la distribution d'eau potable sont déterminantes pour la qualité de l'eau, le coût pour les usagers, la sécurité sanitaire et l'environnement. Un retour en régie publique de la distribution d'eau potable permet une tarification sociale.

Dans le Val-de-Marne, les maires d'Arcueil, Cachan, Chevilly-Larue, Fresnes, Gentilly, Ivry-sur-Seine, Le Kremlin-Bicêtre, Orly et Vitry-sur-Seine évaluent depuis plusieurs années les possibilités de gestion publique de la distribution d'eau potable sur leur territoire. Ils ont obtenu, après moult difficultés, la reconduction pour une année de leur convention provisoire auprès du syndicat des eaux d'Île-de-France (Sedif). Mais ce dernier refuse de travailler à une déconnexion virtuelle des réseaux, préférant imposer des travaux, quitte à faire peser des coûts exorbitants sur les usagers.

Le rapport du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) de 2016 privilégie un retour en régie publique de l'eau et des infrastructures existantes. Celles exploitées par le Sedif et par Veolia ont été financées par les collectivités ou par les usagers, selon le principe de « l'eau paie l'eau ».

Quelle est la position du Gouvernement sur la rétrocession des biens aux collectivités en cas de création d'une régie ? Quid de la déconnexion des réseaux ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Cette décision relève des communes et de leurs groupements. Aucun obstacle juridique ne s'oppose à la création d'une régie si la décision est prise par délibération de l'autorité compétente.

Selon le CGEDD, une recomposition doit favoriser les interconnexions et les mutualisations d'ouvrages afin d'éviter les coûts inutiles.

Le CGCT organise les modalités de la rétrocession des biens dans le cadre d'un transfert de compétences. Les biens peuvent revenir gratuitement au délégataire en fin de contrat.

Le préfet de la région Île-de-France est bien informé de ce projet et accompagne les collectivités territoriales dans leur démarche, dans le respect des principes que je viens de rappeler.

Report de la réforme Grand âge et autonomie

Mme Jocelyne Guidez .  - Le rapport Libault pointait en 2019 le manque de moyens financiers et humains des structures d'accompagnement des personnes âgées en situation de dépendance.

Le fonctionnement des Ehpad et des établissements pour personnes handicapées m'inquiète, alors que le nombre de seniors en perte d'autonomie va doubler d'ici 2050 et qu'il n'y a parfois qu'un seul directeur pour trois établissements.

Le Gouvernement a annoncé une loi Grand âge et autonomie, hélas reportée à la fin de la crise sanitaire.

Que comptez-vous faire pour garantir à nos aînés en situation de dépendance le droit à une fin de vie décente ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Le Gouvernement se prépare au choc démographique à venir. Sur le fondement du rapport Libault, Brigitte Bourguignon s'attache à renforcer l'attractivité des métiers du grand âge. Le Ségur de la Santé a revalorisé les rémunérations de professionnels des Ehpad et des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), à hauteur de 160 à 183 euros nets par mois. Avec l'avenant 43, les aides à domicile verront leur rémunération s'aligner.

L'État apportera 200 millions d'euros aux départements pour les augmentations de salaire des aides à domicile du secteur associatif, qui peuvent aller jusqu'à 15 %. Cette main tendue est historique.

Les structures ne sont pas en reste avec 1,5 milliard d'euros sur cinq ans pour les Ehpad de demain qui seront plus ouverts, plus sûrs et plus adaptés. La loi relative à la dette sociale et l'autonomie a déjà dégagé des moyens importants, avec une montée en charge progressive.

Le Gouvernement cherche à attirer les jeunes vers ces emplois, pérennes et non délocalisables, qui ont montré leur importance lors de la crise sanitaire. Le travail se poursuit sur le projet de loi que Brigitte Bourguignon présentera dès que possible.

Mme Jocelyne Guidez.  - Vous n'avez pas répondu sur la gouvernance des établissements.

Direction des établissements accueillant des jeunes enfants

M. Patrick Boré .  - Le code de la santé publique prévoit des dérogations en matière de qualification des personnes dirigeant un établissement accueillant de jeunes enfants (EAJE) en fonction de la capacité d'accueil de l'établissement. Il retient trois cas de figure en fonction du nombre de places.

Dans les structures de 21 à 40 places, la dérogation au profit des sages-femmes et infirmiers diplômés d'État n'est pas explicitement mentionnée, ce qui laisse croire que ces professionnels ne sont pas qualifiés quand le nombre de places est insuffisant. Certains services de protection maternelle et infantile émettent un avis défavorable à la création d'une structure sur ce fondement.

Face au manque de places en crèche et à la difficulté pour les employeurs de trouver un directeur d'établissement, une interprétation large de cet article du code devait être de mise. Quelles sont vos recommandations ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Plusieurs plans ont été lancés pour créer des places, valoriser l'existant et rendre les professions de la petite enfance plus attractives.

L'article 99 de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap) autorisait le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification, d'harmonisation et de clarification sur les modes d'accueil du jeune enfant. La complexité des règles pèse sur les créations de places.

Nous avons procédé pendant huit mois à une large concertation. Une réforme d'envergure sera prochainement présentée afin de simplifier et mieux reconnaître les professionnels ; les projets de textes sont soumis aux acteurs et le terme du processus est proche.

La Caisse nationale des allocations familiales finance également un plan de rebond de 200 millions d'euros pour créer des places en crèches.

Cet après-midi, je lancerai le plan de formation des 600 000 professionnels de la petite enfance, prévu par la stratégie de lutte contre la pauvreté. Le Gouvernement est au travail.

Tests PCR pour les enfants en bas âge

Mme Brigitte Lherbier .  - Les écoles viennent de rouvrir et les parents s'interrogent sur la situation épidémique.

Les tests nasaux sont souvent traumatisants pour les enfants. Des tests salivaires sembleraient plus adaptés. Le ministre de l'Éducation nationale a annoncé que les classes fermeront dès le premier cas détecté. Tous les enfants seront-ils testés ? À quelle fréquence ? Surtout, avec quel type de tests ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Dès le 1er février dernier, le protocole dans les écoles a été renforcé. Nous veillons particulièrement à l'aération des pièces et à la limitation des brassages. Le contact tracing est renforcé. Dès le premier cas positif, la classe ferme.

Nous avons déployé une politique ambitieuse de tests. Des milliers d'infirmiers scolaires sont mobilisés. Dans le premier degré et au collège, les tests salivaires se déploient de plus en plus largement avec l'objectif de 600 000 tests par semaine. À partir du 10 mai, les lycéens pourront faire des autotests, avec l'aide de médiateurs. Les professeurs volontaires aussi. Des tutoriels ont été diffusés. Mais nous voulons éviter trop de tests et notamment des tests trop douloureux. La Haute Autorité de santé a récemment levé la limite d'âge des tests antigéniques sur prélèvement nasal. Conservons cette logique.

Mme Brigitte Lherbier.  - Vous m'avez rassurée. Vous êtes le garant de la protection de l'enfant, y compris dans les maltraitances familiales. J'espère que les départements ne feront pas d'économies sur le dos de plus petits. Je compte sur vous pour y veiller.

Désertification médicale dans la Loire

Mme Cécile Cukierman .  - Les maires sont désabusés de voir les services publics se retirer de leurs communes, notamment des médecins partant à la retraite et jamais remplacés.

Près de 41 % des communes du département de la Loire - soit 134 communes  - sont dans un désert médical. De nombreux Ligériens n'ont plus de médecin référent, et les médecins ne prennent plus de patients supplémentaires.

Le maire de Saint-Martin-la-Plaine déplore un accès aux soins totalement déséquilibré : un médecin ne sera pas remplacé, et six départs sont prévus dans la commune voisine. La zone avait donc été classée en « zone de vigilance à moyen terme ». La commune est prête à s'investir financièrement mais elle n'a aucune réponse de l'Agence régionale de santé (ARS).

Quelles solutions comptez-vous apporter pour que chaque Français ait accès aux soins ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Nous sommes attentifs à ces enjeux de maillage territorial. Le zonage de 2018 confirme une densité médicale faible dans la Loire. L'ARS travaille à la structuration des soins de premier recours.

Les jeunes professionnels attendent plus de coordination et de pluriprofessionnalité : dans cet esprit, l'ARS travaille sur des projets des maisons de santé pluriprofessionnelles et de centres de santé. La Loire en compte quarante. Deux MSP ont vu le jour en 2020 et plusieurs projets sont en préparation. Des stages sont l'occasion de faire découvrir ce département semi-rural aux futurs médecins. Plusieurs dizaines de contrats de praticiens en médecine générale ou ambulatoire ont été signés, qui leur assurent un chiffre d'affaires minimal les premières années.

La télémédecine se développe également, notamment en Ehpad, avec un très bon taux d'appropriation pour les praticiens. J'interrogerai l'ARS sur la demande de la commune dont vous avez parlé, et nous y donnerons suite.

Mme Cécile Cukierman.  - C'est urgent, car des milliers de Ligériens n'ont plus de médecin référent.

Baisse tarifaire des prestations de santé à domicile

M. Bernard Bonne .  - Alors qu'un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en juillet 2020 soulignait leur rôle croissant, on annonce des baisses tarifaires des prestations effectuées par les prestataires de santé à domicile. Ceux-ci accompagnent quotidiennement plus de deux millions de patients atteints de pathologies chroniques et aiguës, mais aussi des malades sous perfusion.

Les prestataires de santé à domicile participent au maintien de à domicile des personnes âgées et en situation de handicap, et sont des acteurs essentiels du virage ambulatoire.

Grâce à la prise en charge à domicile, le système de santé évite des hospitalisations coûteuses, tout en garantissant un niveau de qualité et de sécurité des soins. Pourtant, le Gouvernement refuse toute augmentation de la dépense, en contradiction avec les objectifs de prévention et de suivi.

Quelle suite donnerez-vous à la demande de moratoire sur ces baisses de prix ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Des négociations sont en cours. Chaque année, des montants d'économies sont fixés par un comité. Le secteur est dynamique, avec une croissance de 4 % à 5 % par an. C'est donc à juste titre qu'il est inclus dans le plan d'économies. Le rapport de l'IGAS pointait une forte hétérogénéité de la qualité des pratiques professionnelles, ce qui nous a conduits à instaurer une certification de la qualité.

Un moratoire sur les baisses de prix est une demande récurrente des professions. Le plan d'économies a été suspendu en 2020 en raison de la crise sanitaire. Nous ne prônons pas une gestion comptable, mais responsable.

M. Bernard Bonne.  - Il faut permettre aux personnes de rester à domicile, avec l'appareillage nécessaire, afin d'éviter l'entrée en Ehpad. La concertation doit donc rester permanente.

Accès à des traitements innovants contre le cancer du sein

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Les patientes souffrant de cancers du sein résistant à des chimiothérapies classiques rencontrent des difficultés d'accès aux traitements innovants.

Le cancer triple négatif métastatique, l'une des formes les plus agressives, touche plus de dix mille femmes, souvent jeunes et sans antécédent. Lorsque les premières métastases sont décelées, leur espérance de vie ne dépasse pas quinze mois.

Aucune chimiothérapie classique ne permet de traiter efficacement ces patientes dont la plupart terminent leur parcours en soins palliatifs, faute d'alternative thérapeutique.

Des cliniques privées allemandes proposent un traitement révolutionnaire à 100 000 euros, non remboursé par la sécurité sociale, qui repose sur un vaccin conçu à partir de leurs propres cellules, couplé à une thérapie ciblée.

Si cette option n'est pas agréée en France, elle soulève la question des inégalités d'accès aux traitements novateurs.

Un autre médicament vient d'arriver dans notre pays : le Trodelvy, d'un laboratoire américain. Mais des difficultés d'approvisionnement limitent sa prescription. Qu'envisagez-vous pour rendre accessibles les nouvelles thérapies du cancer du sein en France ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Le Gouvernement partage votre volonté d'assurer le meilleur traitement de ces cancers triple négatif qui touchent dix mille femmes chaque année et nécessitent des réponses innovantes.

La procédure d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) est en cours de réforme ; les textes devraient être publiés d'ici l'été. Le Trodelvy est disponible depuis novembre dernier. Fin 2020, la production est devenue temporairement insuffisante et a été réservée aux patientes américaines par Gilead. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a réservé les dernières unités disponibles aux patientes en cours de traitement. Gilead a fait une demande d'autorisation de mise sur le marché le 14 mars. Le dossier est en cours d'évaluation : une mise à disposition précoce du produit est envisagée.

Les pratiques en Allemagne posent des problèmes éthiques. Mieux vaut passer par l'ATU.

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Il y a urgence à agir, car de nombreuses patientes sont dans une situation désespérée.

Banque alimentaire et dispositif national « chèques alimentaires »

Mme Brigitte Micouleau .  - Depuis mars 2020, la crise sanitaire a dramatiquement augmenté la précarité alimentaire.

La banque alimentaire de Toulouse a connu, depuis mars 2020, une augmentation inédite de 60 % de ses bénéficiaires. Les associations partenaires ont distribué l'équivalent de 6, 6 millions de repas en 2020.

Le Président de la République souhaite reprendre la proposition de la convention citoyenne sur le climat de chèques alimentaires destinés aux plus fragiles. Mais les modalités de ce projet interrogent les acteurs associatifs historiques de l'aide alimentaire.

La mission des banques alimentaires implique non seulement une aide alimentaire d'urgence mais aussi un accès à une alimentation équilibrée et de qualité. Les associations de proximité apportent aussi un appui psychologique aux bénéficiaires, qu'elles connaissent bien.

Assurons-nous que les populations fragilisées emploient ces chèques à une alimentation saine. Une aide uniquement monétaire pourrait éloigner les bénéficiaires des aides complémentaires.

L'expertise de la banque alimentaire lui permet de procéder à des commandes et achats adaptés aux besoins des associations, de gérer les flux et d'y intégrer la distribution de produits locaux de qualité, soutenant ainsi l'économie régionale et locale.

Pouvez-vous nous confirmer que la banque alimentaire est au coeur du futur dispositif d'aide ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - La crise a malheureusement fragilisé de nombreux foyers, les exposant à la précarité alimentaire.

Le Président de la République a repris l'idée du chèque alimentaire. Des réflexions sont en cours mais la notion d'accompagnement sera centrale, quelle que soit l'option retenue.

La loi EGalim de 2018 a fixé comme objectifs une alimentation sûre, diversifiée et de qualité suffisante, mais aussi le développement de la capacité à agir des personnes aidées. Il faut leur permettre de se rendre dans des commerces de proximité, ce qui est moins stigmatisant.

Nous avons consacré 144 millions d'euros à l'aide alimentaire, en sus des 100 millions d'euros de France Relance pour les associations caritatives. Les fonds européens pour l'aide alimentaire ont été sanctuarisés. L'action Urgence Premier Pas s'adresse aux parents de tout jeunes enfants.

Modernisation de la route nationale 102

Mme Anne Ventalon .  - La RN 102, classée « grande liaison d'aménagement du territoire » en 2003 traverse le département de l'Ardèche d'ouest ; elle en est le seul axe structurant, sans avoir le gabarit nécessaire.

Elle présente de nombreux points accidentogènes comme le carrefour de La Fayette à Coucouron ou le virage de la Teyre. Vous n'envisagez cependant pas de nouveaux créneaux de dépassement, alors que parfois un véhicule léger ne peut pas croiser un poids lourd.

De nombreux points n'ont pas encore fait l'objet d'études comme la liaison entre la RN 102 et l'autoroute A 7. Or la loi d'orientation des mobilités prévoit que des travaux doivent être aménagés pour de telles routes. Le contrat de plan État-Régions va être prochainement négocié et la région Auvergne-Rhône-Alpes y prendra toute sa part. L'État jouera-t-il aussi son rôle ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - La sécurisation et la modernisation de la RN102 mobilisent l'État. Plusieurs aménagements sont étudiés ou en cours de réalisation, comme les carrefours de La Fayette à Coucouron et de Bernardy à Aubenas. Ils sont financés par le budget de l'entretien du réseau national. Les études se poursuivent pour d'autres. La rectification du virage de la Teyre fait l'objet d'une étude actualisée. Une démarche de sécurisation des usagers est également menée, notamment sur la côte de ville entre Aubenas et Lavilledieu. En 2021, l'État financera des aménagements de sécurisation pour les piétons.

Enfin, de nouveaux créneaux de dépassement pourront être envisagés d'ici la prochaine contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales.

Mme Anne Ventalon.  - La généralisation discutable de la limitation à 80 kilomètres/heure avait pour but de réduire le nombre d'accidents. Que l'État s'en donne les moyens en agissant sur les points accidentogènes.

Projet de contournement routier de Vitré

M. Daniel Salmon .  - Le contournement routier de Vitré pose plusieurs problèmes, tant sur le fond que sur la forme.

Ce projet d'emprise foncière de 40 hectares dont 12 hectares de zones humides entre en contradiction avec l'objectif de zéro artificialisation nette.

Il affecterait des captages d'eau potable essentiels pour l'alimentation de la population ainsi que pour l'économie locale dont les besoins augmenteront de 25 % dans les prochaines années.

Un autre point d'inquiétude est la protection de la vallée de la Vilaine.

La hausse du trafic et celle de la population ont été surévaluées. L'efficacité de ce contournement est contestable. Il est incompréhensible d'accepter une hausse de 15 % des gaz à effet de serre engendrée par ce projet contradictoire avec le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) de Vitré Communauté.

Un projet alternatif moins impactant et moins coûteux existe mais a été balayé. Comment ce projet peut-il encore être justifié au regard de ses nombreux aspects négatifs ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - Ce projet, qui a fait l'objet de concertations en 2018 et 2020, relève de la maîtrise d'ouvrage d'une collectivité territoriale. Selon le principe de libre administration, l'État ne peut intervenir à ce stade. Cependant, le projet doit satisfaire aux exigences réglementaires. L'État veillera au respect des procédures au regard de l'environnement, mais la lutte contre le changement climatique ne peut pas à elle seule conduire à bloquer tout projet routier, en application de la théorie du bilan qui juge le rapport entre coûts et avantages du projet. L'État sera vigilant à l'étape des autorisations.

M. Daniel Salmon.  - Je compte sur la vigilance de l'État. Nous ne sommes plus dans les années 1970 : le tout-routier a fait son temps. Trouvons des mobilités alternatives conformes à nos engagements.

Moratoire sur la fermeture de classes maternelles et élémentaires dans les communes audoises

Mme Gisèle Jourda .  - Les annonces de fermeture de treize classes dans l'Aude sont particulièrement inappropriées, notamment en territoire rural, au regard des annonces ministérielles en faveur du renforcement des moyens pour l'enseignement primaire. Supprimer des classes reviendrait à prendre des mesures contraires.

Il est surprenant d'envisager la fermeture de classes avant de connaître l'évolution de la pandémie et ses conséquences à court, moyen et long termes. Des investissements financiers ont été réalisés par ces communes pour assurer l'entretien et la modernisation des établissements scolaires ainsi que l'amélioration des conditions de travail pour les enfants et les enseignants. Il faut tenir compte des difficultés de nombreux enfants, ceux qui sont aidés par des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) comme à l'école Jean-Jaurès à Carcassonne. Grâce à la mobilisation audoise, nous avons obtenu quelques maintiens, mais je demande un moratoire.

Il faut conditionner la fermeture de classes à l'accord des maires des communes concernées, sur le même modèle que les fermetures d'écoles. Acceptez-vous ce moratoire ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles .  - L'école primaire est une priorité du Gouvernement. Depuis 2017, 11 900 postes ont été créés malgré la baisse démographique.

Dans les zones prioritaires, le dédoublement de classe se poursuit pour consolider les apprentissages fondamentaux. Les effectifs de grande section, de CP et de CE1 ont été plafonnés à 24.

Le nombre moyen d'élèves par classe a baissé dans l'Aude à 21,5 en 2020 contre 22,1 en 2019. Il y a désormais 5,92 professeurs pour 100 enfants contre 5,58 en 2017 ; c'est plus que la moyenne nationale de 5,74. La barre des six sera franchie à la rentrée prochaine, signant l'amélioration du taux d'encadrement. Les effectifs fléchissent dans l'Aude. Néanmoins, une Unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS) sera créée dans le département à la rentrée prochaine.

La carte scolaire répond aux besoins des territoires. Nous sommes déterminés à maintenir l'école de proximité conformément aux engagements du Président de la République. Dans l'Aude, aucune classe ni aucune école rurale n'a fermé en 2020. Aucune école ne fermera en 2021.

Mme Gisèle Jourda.  - Je ne puis accepter cette réponse. Vous me parlez de statistiques, mais, sur le terrain, les effets sont désastreux. Les fermetures de classes en milieu rural remettent en cause l'investissement des communes. Quant aux ouvertures, elles se concentrent en milieu urbain.

La séance est suspendue quelques instants.

Inégalités entre les étudiants dans l'accès au dispositif de deux repas par jour à un euro

M. Guillaume Chevrollier .  - La précarité des étudiants en milieu rural est un phénomène préoccupant et en augmentation. Elle entraîne une détérioration de leur santé psychologique et un accroissement de leur précarité.

De nombreux jeunes fréquentent les épiceries sociales dans la Mayenne. L'offre de deux repas par jour à un euro bénéficie aux étudiants des métropoles, mais le sentiment d'abandon se renforce en milieu rural. Les inégalités territoriales s'accroissent.

Les collectivités territoriales se mobilisent - la ville de Mayenne et ses 380 étudiants par exemple. La maison des adolescents, le centre médico-psychologique et les centres communaux d'action sociale interviennent également. À Mayenne et à Laval, une aide alimentaire d'urgence a été mise en place avec la Croix-Rouge, la Banque alimentaire et le conseil départemental. Des espaces de coworking sont mis à disposition des étudiants.

Il est anormal que les étudiants ruraux soient exclus des aides d'État. Comment comptez-vous les aider ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Là où il n'y a pas de restaurant universitaire ni de cafétéria, l'accès aux repas à un euro est effectivement impossible. Je rappelle tout de même que le Crous compte plus de 700 lieux de restauration dans plus de 221 villes.

Ce maillage répond aux besoins d'une grande majorité d'étudiants, notamment dans les villes d'équilibre. Plus de 7,6 millions de repas à un euro ont été servis depuis janvier.

Pour les lieux où l'accès à ces repas est difficile, nous apportons des financements aux associations étudiantes et aux épiceries sociales. Nous conventionnons avec les régions pour les étudiants de BTS ou de classes préparatoires qui, étant en lycée, relèvent de leurs compétences.

Nous sommes soucieux de soutenir les étudiants partout sur le territoire. Ainsi nous dénombrons près de 90 campus connectés et plus de 55 implantations du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) en coeur de ville.

M. Guillaume Chevrollier.  - L'État doit s'engager davantage au côté des élus locaux qui soutiennent les étudiants et les apprentis, partout et très concrètement.

Carences de la réforme des études de médecine en première année

M. Pierre-Antoine Levi .  - Il est de plus en plus difficile de trouver un praticien. C'est pourquoi la première année commune aux études de santé (Paces) a été réformée afin d'augmenter le nombre d'étudiants en diminuant le taux d'échec à la fin de la première année.

Le numerus clausus a été remplacé par le numerus apertus qui n'a pas encore produit les effets escomptés.

Cette réforme semble avoir été mal préparée et mal comprise par les étudiants. Le nombre de places ouvertes dans les nouvelles filières a diminué par rapport aux années précédentes en raison des places réservées aux redoublants issus de l'ancien régime Paces. Dès lors, l'immense majorité des étudiants qui n'intègreront pas ces filières nouvelles ne pourront pas redoubler. En clair, leur chance de réussite sera très faible. Beaucoup resteront sur le carreau. Ils ont été très nombreux à me faire part de leur désarroi. Leur détresse m'a touché. S'engager dans des études de santé est une vocation, un objectif de vie. Mais l'impossibilité de redoubler et le faible nombre de places disponibles briseront des rêves !

Coup de théâtre le 28 avril : le Conseil d'État a suspendu l'arrêté du 25 janvier 2021 sur le nombre de places. C'est un coup dur pour la réforme. Il y a urgence à la réajuster et à trouver une solution acceptable. Nul doute que la mission d'information sénatoriale de Mme de La Provôté vous fournira de nombreuses solutions.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - La réforme des études de santé vise justement à diversifier les voies d'accès et à mettre fin aux injustices. Jusqu'à présent, des étudiants redoublaient même après avoir obtenu la moyenne. Désormais, ceux qui l'obtiennent s'inscriront dans un parcours de réussite et ne seront plus sélectionnés par l'échec. Ils pourront tenter leur deuxième chance à l'issue de la deuxième ou de la troisième année.

Nous avons tenu nos engagements quant au nombre de places. Pour tenir compte de la transition, environ 6 000 places sont réservées aux redoublants. Pour les primo-accédants, le nombre de places est bien supérieur, de près de 2 000, au nombre antérieur. Plus de 16 700 places seront offertes à tous, soit une hausse de 12 %.

Je m'emploie à expliquer et rassurer, aux côtés du ministre de la Santé. Un nouvel arrêté sera publié.

Réforme des études de médecine

Mme Florence Lassarade .  - En 2018, dans un rapport remis à la commission des affaires sociales, la Cour des comptes a montré que la répartition des places dans les études de santé était inégale selon les territoires et que tous les étudiants n'avaient pas la même chance d'accéder à la deuxième année selon leur lieu d'origine : en Aquitaine, le ratio était de 17 pour 100 000 habitants, là où en Limousin il était de 31.

La réforme des études de santé a aggravé cette disparité chronique en raison du nombre d'étudiants autorisés à redoubler.

Cette année est de transition - les étudiants en parcours accès spécifique santé (PASS) et licence à mineure santé (LAS) doivent partager la capacité d'accueil avec les derniers redoublants Paces, sans que la capacité d'accueil n'ait été significativement augmentée.

Cette année, les étudiants PASS ont l'obligation de suivre un double cursus, avec une majeure de santé et une mineure d'une autre licence. En cas d'échec à l'examen, ils ont interdiction de redoubler.

À l'université de Bordeaux, les modalités de contrôle des connaissances sont particulièrement dures pour la validation de la PASS : pas de compensation entre les unités de valeur, moyenne à 10/20 dans chaque matière. Les exigences sont différentes à Aix, Rouen, Marseille, Toulouse ou Amiens...

Des mesures particulières auraient dû être mises en place pour accompagner cette année de transition, afin de rétablir l'égalité des chances. Comment le Gouvernement envisage-t-il de pallier ces inégalités, notamment à Bordeaux ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - L'objectif de cette réforme est de trouver des professionnels de santé sur tous les territoires. Les étudiants ne pouvant terminer leurs études que dans des centres hospitaliers universitaires (CHU), la répartition était jusqu'à présent centrée sur les métropoles, en fonction de l'attractivité des CHU.

À la rentrée 2020, l'accès aux études de santé se fait via 35 parcours accès santé mais aussi 457 licences axées santé réparties partout sur le territoire, même sans proximité d'un CHU. La réforme des 2e et 3e cycles changera aussi la situation.

On ne demandera plus aux jeunes de passer douze ou quatorze ans à proximité d'un CHU. Ils pourront conserver leurs attaches avec leur territoire.

Les études de santé sont extrêmement exigeantes ; c'est pourquoi la sélection reste forte. C'est normal.

Chaque année, quelque 16 700 places sont offertes pour accéder à la deuxième année des études de santé : du jamais vu ! C'est près de 2 000 de plus que l'an dernier. Elles sont réparties sur les territoires en fonction des besoins reconnus par les agences régionales de santé (ARS), les facultés et les collectivités territoriales.

Mme Florence Lassarade.  - Les victimes des statistiques échouent de manière définitive. C'est triste. On leur coupe les ailes.

Financement de la formation des orthoptistes en distanciel

Mme Nadia Sollogoub .  - Le plan de relance devrait créer des places dans l'enseignement supérieur : 16 places supplémentaires ont ainsi été ouvertes en orthoptie à Limoges et Nevers avec un financement de 6 000 euros chacune. La formation se déroule dans des conditions optimales.

Les stages sont réalisés en milieu privé, les élèves étant deux par deux, au lieu de vingt par vingt en région parisienne. Cela est très satisfaisant. Seul bémol, il semble que le financement promis, de 96 000 euros, n'ait pas été débloqué. Qu'en est-il ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Des financements supplémentaires ont été actés après la création de nouvelles places dans certaines spécialités à la rentrée 2020. Nous avons ainsi augmenté de 5 % le nombre de places en orthophonie, de 6 % en orthoptie et de 3,5 % en audioprothèses.

L'université de Paris, que je remercie d'avoir pensé des parcours délocalisés, recevra une subvention supplémentaire de 96 000 euros pour la création de ces places. L'engagement de l'État a été confirmé en avril. L'université recevra prochainement les financements promis.

Mme Nadia Sollogoub.  - Votre réponse me fait très plaisir.

Je rappelle que ces formations ont débuté en septembre 2020.

J'espère que nous pourrons vous recevoir à Nevers pour vous présenter ce modèle gagnant-gagnant qui mériterait d'être généralisé ! Ce serait très dommage qu'il y soit mis fin.

Contrôles des exploitations agricoles dans le cadre de la politique agricole commune

M. Pierre-Jean Verzelen .  - Quelque 70 % de la prime PAC est versée en octobre. Mais lorsque des contrôles sont réalisés, les aides sont gelées. C'est un peu fou : les agriculteurs subissent une présomption de culpabilité.

Les primes sont parfois bloquées pendant plusieurs mois car s'il y a un seul problème au contrôle aérien, on passe au contrôle physique. Il faut sortir de ce système car les agriculteurs ont des charges importantes.

Le délai et la méthode des contrôles physiques pourraient également être améliorés. Sortons de la méfiance et privilégions le conseil, la confiance et la bienveillance.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Le ministre de l'agriculture aimerait vous donner satisfaction mais la réglementation européenne, stricte, impose la finalisation des contrôles avant le paiement des aides. C'est un gage de légitimité de la PAC. On assure ainsi une bonne gestion des crédits et des impôts.

Les services instructeurs sont pleinement mobilisés pour payer les primes au plus vite. Je les remercie pour leur implication qui ne s'est pas démentie en 2020 en dépit de la crise.

Dès les premiers jours de décembre 2020, 99 % des agriculteurs ont reçu leurs paiements décomptés, 97,5 % leurs paiement verts et autant leur indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) lorsqu'ils y étaient éligibles.

Nous sommes parmi les États membres de l'Union européenne les plus rapides. Le ministre de l'Agriculture plaidera à Bruxelles pour le droit à l'erreur et la simplification des procédures dans le cadre de la nouvelle PAC.

M. Pierre-Jean Verzelen.  - Le contrôle est logique s'agissant d'argent public mais il faut modifier la réglementation si l'on veut rapprocher le citoyen de l'Europe.

Épandage des boues d'épuration

Mme Chantal Deseyne .  - La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire fixe des critères de transformation des boues d'épuration et les conditions dans lesquelles elles peuvent incorporer des déchets verts compostés.

Les options de traitement des boues en vue de leur hygiénisation dépendent de considérations géographiques, techniques, historiques et financières diverses qu'une modification brutale et uniforme pourraient gravement fragiliser.

La nouvelle réglementation suscite des inquiétudes, notamment s'agissant de l'usage agricole des boues. Comment le Gouvernement compte-t-il y répondre ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Cette loi a habilité le Gouvernement à transposer par ordonnance les directives européennes sur la gestion des déchets.

Le décret « socle commun des matières fertilisantes » prendra en compte les boues d'épuration. Les référentiels doivent être révisés au plus tard le 1er juillet. Si elles ne respectent pas les normes, les boues ne pourront plus être épandues à compter de cette date avec toutefois une période de transition pendant laquelle les dispositions des arrêtés de janvier et février 1998 continueront à s'appliquer.

Des mesures exceptionnelles ont été prises pendant la crise, mais l'hygiénisation obligatoire ne sera pas maintenue avant l'épandage.

Les agriculteurs seront protégés et l'économie circulaire progressera.

Mme Chantal Deseyne.  - J'ai bien compris qu'il s'agissait d'une transposition de normes européennes. Mais les nouvelles normes seront très rapidement applicables et généreront des coûts élevés pour les collectivités territoriales gérant des stations d'épuration, qui seront répercutés sur les usagers. Les boues qui ne répondent pas aux normes seront envoyées vers des incinérateurs, ce qui n'est ni écologique, ni économique.

La séance est suspendue à 12 h 15.

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.