Lutte contre le dérèglement climatique (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Discussion générale

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique .  - Quelle transition écologique voulons-nous pour notre pays ? Avec quelle méthode, quelle vitesse, quels moyens ? Telle est aujourd'hui la question centrale, celle du concret.

Car le diagnostic est aujourd'hui partagé : chaque minute rend l'urgence climatique plus pressante. L'Amazonie émet désormais plus de carbone qu'elle n'en séquestre. Ici, nous subissons gels et canicules, sécheresses et incendies. Une seule issue : la neutralité carbone, le plus vite possible.

Le consensus est déjà une victoire, le préalable à l'action. Celle-ci n'a rien d'aisé car il faut une grande bascule pour sortir du modèle ancien : nous devons interroger nos modes de vie et passer des paroles aux actes. Ce texte trace un chemin, celui d'une écologie qui frappe à notre porte et s'immisce dans toute notre vie quotidienne : habitat, consommation, déplacements, travail, éducation.

L'écologie est une chance et non une contrainte. Nous mesurerons dans quelques années combien ce texte a fait bouger les lignes, quand nous respirerons un air plus pur, et aurons une alimentation plus diversifiée...

Nous devons dépasser les obstacles et avancer ensemble. C'est ce dont notre France du XXIe siècle a besoin.

Devant le changement climatique et la dégradation de la biodiversité, il ne peut y avoir de polémique. Lorsque la maison brûle, nous devons affronter le défi. C'est l'occasion de retrouver un avenir partagé. Il s'agit de donner un héritage à tous les enfants de la République.

L'écologie est une réponse à une grande part des maux contemporains.

Ils s'appellent Muriel, Nicolas, Malik, Mélanie ou Vita, ils sont 150, de tous métiers et de toutes générations, venus de tous les coins de France, ils ont pendant neuf mois fait vivre le mot de citoyen en étudiant un problème, en débattant et en faisant des propositions, au service de l'intérêt général.

Nous avions bien besoin de cette bouffée d'air démocratique. J'en suis fière. Auparavant, on disait que les citoyens n'avaient plus d'intérêt pour la chose commune, la res publica, qu'ils ne pensaient plus qu'à eux. La Convention citoyenne pour le climat a démontré qu'ils veulent s'engager, participer aux grandes décisions, qu'ils ont soif de connaissance et de débat.

L'intelligence collective n'est pas un slogan : c'est le sens même d'une assemblée. Rien ne remplacera jamais le Parlement démocratiquement élu, mais n'ayons pas peur des citoyens, de leur inventivité et leur hauteur de vue. Je m'étonne que certains se sentent menacés dans leur légitimité. Je mesure l'importance du temps parlementaire pour préciser la loi et construire des consensus.

Oui, la démocratie représentative est le moteur de notre pays, mais elle peut être enrichie par la démocratie participative.

Je salue d'ailleurs les nombreux membres de la Convention citoyenne qui prolongent leur engagement en se présentant aux prochaines élections : la boucle est bouclée.

À vous, maintenant, de poursuivre la dynamique enclenchée, d'améliorer le texte, pour passer de 150 citoyens à 67 millions de Français. Notre génération ne peut plus être celle du renoncement ni de l'étroitesse de vue. Nous savons, nous n'avons pas d'excuse. Le présent projet est une nouvelle pierre de cette République écologique qui est notre ambition.

Pour tous les enfants français, la vie d'écocitoyen commence dès l'école. C'est pourquoi nous faisons entrer l'écologie dans les salles de classe.

Maîtriser notre consommation, connaître le coût environnemental de celle-ci, transformer la publicité, c'est amorcer un virage vis-à-vis du modèle de la surconsommation : c'est tout l'objet du titre I.

Porter la transition écologique au centre de notre activité économique en orientant la commande publique, en adaptant le code minier ou en mobilisant les instances de représentation des salariés, tel est l'esprit du titre II. Vous avez réduit cette ambition lors de l'examen en commission, pourtant l'entreprise peut être le lieu de la démocratie sociale et écologique.

Notre République écologique sauvera des vies : 40 000 personnes meurent en France chaque année de la pollution de l'air, principalement due à la circulation routière. Nous agissons en responsabilité. Oui, dans toutes les grandes villes de France, il y aura des zones à faible émission (ZFE). Je regrette que l'ambition de l'article 27 ait été amoindrie. C'est tout l'enjeu du titre III.

C'est une hérésie de prendre l'avion quand on peut faire le trajet en train en moins de 2 heures 30. (M. Laurent Duplomb proteste.) C'est du bon sens ! Nous avons tout à gagner de cesser de construire des centres commerciaux au milieu des champs, de lutter contre l'artificialisation des sols et d'arrêter l'extension urbaine à l'infini.

Il était plus que temps de s'occuper des passoires thermiques. Un logement étouffant l'été, glacial l'hiver, coûteux à chauffer... Cela n'a que trop duré. Le titre IV interdit la location de ces habitations. L'Assemblée nationale a prévu un calendrier précis pour la rénovation énergétique. Je regrette que le Sénat ait décalé l'échéance de 2034 à 2040 pour la classe E. Il faut inciter les propriétaires à réaliser des travaux, sans les laisser seuls : l'État s'engage financièrement pour leur garantir un reste à charge faible.

Nous franchirons aussi une nouvelle étape dans la manière de nous nourrir en amplifiant la transition agroécologique.

Avec le titre V, nous luttons contre la déforestation importée, nous laissons le choix d'un menu végétarien à la cantine. Votre rédaction est en recul sur ce point, alors que notre société évolue sur ces questions, vite et fort.

Notre responsabilité est de soutenir l'excellence agroalimentaire, et d'offrir le choix. Tel est l'esprit du titre V.

La justice fait partie de la solution : le titre VI renforce les sanctions contre les dépôts sauvages, la pollution volontaire, les destructions préméditées de la nature. Il faut agir avec diligence et sévérité contre ceux qui portent atteinte à l'environnement.

En commission, vous avez voulu réserver le concept d'écocide au droit international. Pourtant, quand on dégrade durablement l'environnement, on commet bel et bien un écocide !

Le titre VII introduit par les députés transforme la gouvernance climatique et prévoit une évaluation annuelle par le Haut Conseil pour le climat (HCC) et par la Cour des comptes.

Oui, cette loi est dense. Elle est une nouvelle pierre pour notre République, mais elle n'est pas isolée. Il fallait avoir le courage de mettre fin à des projets datés comme Notre-Dame-des-Landes, EuropaCity, la Montagne d'Or ou le Terminal 4 de Roissy...

Elle s'accompagne d'un plan de relance historique, qui consacre 30 milliards d'euros à des projets de décarbonation. (M. Fabien Gay s'esclaffe.) Elle s'insère dans notre mobilisation internationale de chaque instant qui fera demain de l'Europe la première puissance écologique.

Le texte est désormais le vôtre, pour amplifier le travail des 150 citoyens, pour faire vivre notre démocratie, pour déclencher plus vite et partout la transition climatique dont notre pays a besoin. Je sais qu'ensemble, nous y arriverons. (Applaudissements sur les travées du RDPI ainsi qu'au banc des commissions.)

Mme Marta de Cidrac, rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions) L'ensemble des groupes se réjouit du retour des préoccupations environnementales devant le Sénat.

Issu de la Convention citoyenne pour le climat, ce projet de loi est intéressant mais souvent inabouti, voire en trompe-l'oeil, comportant peu de mesures normatives.

Le Sénat a décidé de jouer pleinement le jeu pour clarifier et compléter le texte. Nous avons rencontré de nombreux acteurs et mené un travail de fond articulé autour de deux principes directeurs : la clarté de la loi et l'acceptabilité sociale des mesures afin de réconcilier les transitions écologique, économique et sociale, en prêtant attention aux conséquences, car la transition doit se faire avec l'ensemble des Français.

Ce texte est un travail collectif issu de l'expertise de différentes commissions. Il s'organise autour de trois axes : fixer un cap clair pour engager durablement notre économie dans la transition bas carbone, notamment la publicité ; établir un trait d'union entre la vie quotidienne des Français, notre modèle économique et nos engagements climatiques et environnementaux ; garantir l'effectivité des dispositions, comme en matière de police environnementale grâce à la territorialisation.

Puissent ces discussions intégrer notre souci de mieux préserver notre environnement, lutter contre la crise économique et améliorer notre modèle social.

J'espère que le Gouvernement apportera une réponse positive à nos propositions. Face à l'urgence climatique, nous devons faire appliquer ce texte le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions)

M. Pascal Martin, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) Nous sommes pleinement engagés dans l'examen de ce projet de loi.

Le retour de la préoccupation environnementale est un symbole majeur, mais le texte satisfait peu de personnes en l'état. C'est un paradoxe. Il faut dire qu'il comprend des mesures inégales, quant à leur effet climatique comme leur portée normative, entre vraies ambitions et renoncements, ajouts d'opportunité ou fausses bonnes idées. Certaines mesures pourraient même s'avérer contre-productives à moyen ou long terme.

Le Parlement est sommé de se prononcer dans la précipitation sur deux réformes importantes, celle du code minier et celle de la gestion du trait de côte - sujets qui auraient mérité un débat spécifique.

N'y voyez pas une critique univoque ! En votant ce texte, nous donnerons des leviers aux citoyens et aux collectivités pour accélérer la transition énergétique, soutenir la relocalisation, protéger les écosystèmes sensibles et maîtriser l'empreinte carbone de notre alimentation.

Anticiper de deux ans le verdissement des contrats de concession est une bonne chose, même si vous n'allez pas assez loin.

Nous avons introduit en commission des mesures ambitieuses contre la déforestation importée. Nous avons renforcé le rôle des collectivités comme acteurs majeurs de la transition écologique - je songe au droit d'option sur la gestion du recul du trait de côte. Mais quel financement pour cette extension de compétence qui ne dit pas son nom ?

Nous avons travaillé sur la stratégie nationale pour les aires protégées, sur l'hyperfréquentation des espaces protégés. J'ai tenu à concilier transition écologique, justice sociale et développement économique - je pense à l'accompagnement renforcé des agriculteurs sur les engrais azotés, et aux mesures visant à mieux territorialiser notre politique alimentaire

Nous avons répondu présent là où nous n'étions pas attendus. La rédaction est désormais plus ambitieuse. Allez-vous vous saisir de nos propositions pour territorialiser notre politique de lutte contre le changement climatique et promouvoir une écologie de l'intelligence territoriale ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)

M. Philippe Tabarot, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions) Urgence économique, écologique et sociale sont-elles conciliables ? Voilà la question à laquelle nous allons devoir répondre durant ces deux semaines. J'ai l'espoir que nous saurons encourager, convaincre, stimuler plutôt que punir, culpabiliser, stigmatiser. Nous avons des marges de progrès, notamment dans le secteur des transports.

À la première lecture de ce projet de loi peu abouti, ma réaction était mitigée. Vous cherchez à contenter tout le monde, à l'image du « en même temps » que vous affectionnez.

Ce texte impactera de nombreux secteurs économiques ; nous devons donc améliorer ce qui doit l'être, sans verser dans l'écologie punitive. Personne ne doit se sentir injustement pénalisé par les mesures écologiques. Après les bonnets rouges et gilets jaunes, sachons privilégier les mesures incitatives...

Le Gouvernement doit travailler pragmatiquement avec le Sénat, qui est force de proposition. Nous avons voulu fixer un cap clair, assurer l'acceptabilité, faire le trait d'union entre la vie quotidienne des Français, la transition écologique et nos engagements internationaux.

Il faut redonner de la souplesse aux collectivités en matière de ZFE. Pour décarboner les transports, il convient d'appliquer une TVA à 5,5 % sur les billets de train pour les voyageurs, car c'est un bien de première nécessité, de fixer un tarif minimum pour les billets d'avion, et d'accompagner par un éco-prêt à taux zéro l'achat de véhicules propres par les ménages modestes.

Il faut aussi doubler le fret ferroviaire et fluvial, oublié, et accompagner le secteur par un verdissement de la flotte. Les outils existent : TICPE, écotaxe, suramortissement, prêt à taux zéro. Mais de grâce, pas de renchérissement de la fiscalité sans offre alternative disponible et au mépris des efforts accomplis !

Le secteur aérien doit prendre toute sa part dans la décarbonation, sans être stigmatisé. Nos propositions sont solides parce que responsables, techniquement possibles, porteuses de justice et de progrès car, comme le disait Victor Hugo, « Le progrès n'est rien d'autre que la Révolution faite à l'amiable. » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions) C'est avec sérieux et sens des responsabilités que la commission des affaires économiques a étudié ce projet avec l'expertise de quatre rapporteurs : Anne-Catherine Loisier sur la consommation, l'alimentation, la forêt ; Dominique Estrosi Sassone sur le logement ; Daniel Gremillet sur l'énergie ; et Jean-Pierre Blanc sur l'artificialisation des sols. Ils ont été dans le passé rapporteurs de textes sur ces sujets et ils ont travaillé avec passion, écoute et réflexion pour améliorer l'efficacité de ce texte.

Une transition ambitieuse vers une économie plus sobre en carbone n'est pas une option mais une nécessité  - mais elle doit être créatrice de valeur et d'emplois. La transition écologique est un formidable gisement d'activités et la France dispose de nombreux atouts, à commencer par des entreprises leaders mondiaux de la croissance verte.

Nous souhaitons une transition fondée sur l'innovation, l'entreprenariat, la liberté et la responsabilité individuelle. Désindustrialiser la France, délocaliser les émissions, ce n'est pas décarboner la planète ; nous importons ensuite massivement de pays qui ne respectent pas nos exigences ! Nous voulons une transition écologique compatible avec notre compétitivité et notre souveraineté. Il faut veiller à notre attractivité. Souveraineté économique et économie décarbonée sont des objectifs complémentaires.

La crise des gilets jaunes a montré le risque de créer des laissés-pour-compte de la transition écologique ; nous avons donc recherché un équilibre entre préoccupations environnementales, économiques et sociales, pour « embarquer » tous les Français.

Ce texte contient des mesures de portée inégale. Certaines, dénuées de portée juridique, relèvent de l'affichage, voire de l'effet d'annonce. Il y a aussi des impasses, comme sur la forêt, et des angles morts, comme sur le volet énergétique, que nous avons musclé en ajoutant des dispositions en matière d'hydrogène renouvelable, d'hydroélectricité et de nucléaire.

Le texte sort considérablement enrichi de commission, avec un niveau d'ambition rehaussé.

De la même façon, nous avons ouvert le sujet de la connaissance de notre sous-sol, dans le cadre de la réforme du code minier. À l'heure d'une transition numérique reposant sur les batteries électriques, nous ne pouvons compter sur les pays en voie de développement où les conditions d'exploitation sont bien moins vertueuses. C'est un enjeu de souveraineté, mais aussi de morale.

Nous avons également pris des mesures pour accompagner les ménages précaires et les petites entreprises, pour améliorer l'accès aux aides et préserver le pouvoir d'achat des plus modestes dans cette transition énergétique. C'est indispensable pour éviter des oppositions frontales.

Enfin, nous avons recalibré certains dispositifs. Nous avons élargi aux produits locaux et aux circuits courts la liste des denrées encouragées dans la restauration collective. Nous avons rendu le plan éco-azote plus opérationnel et incitatif, en évitant d'exposer nos agriculteurs à une concurrence déloyale au sein même de l'Europe. Nous nous sommes attachés à simplifier les dispositifs et à freiner l'accroissement des normes, comme sur le réemploi des friches et sur la petite hydroélectricité.

Nous ne voulons pas d'un dirigisme technocratique qui nous veut du bien malgré nous et qui bride les initiatives. Il faut décentraliser davantage de décisions, notamment en matière d'artificialisation des sols et d'urbanisme commercial.

Le texte du Sénat est à la fois plus ambitieux et plus efficace. Puisse l'intelligence collective aboutir à une CMP positive ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC, ainsi qu'au banc des commissions)

M. le président.  - Nous n'en sommes pas encore là... (Sourires)

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions) Le secteur de l'éducation et de la culture doit prendre toute sa part dans la protection de l'environnement. Mais ce projet de loi n'est pas le texte fondateur attendu. Beaucoup de mesures, essentiellement symboliques, sont sans portée véritable.

L'éducation au développement durable existe pourtant à l'école depuis une instruction de 1977 ! Une circulaire de 2020 a refondu les programmes pour augmenter la part des enseignements sur le changement climatique, la biodiversité et le développement durable.

En matière de publicité dans les médias, le Gouvernement ne prend qu'une mesure symbolique, sans chercher à faire évoluer les comportements. L'interdiction de la publicité pour les énergies fossiles n'affecterait que 0,1 % des recettes publicitaires des chaînes, 0,3 % de celles des radios. Quant à l'autorégulation prévue par l'article 5, elle n'est pas assortie d'objectifs ni de délais.

Nous avons introduit un code de bonne conduite qui s'appliquera à France Télévisions, Radio France et France Médias Monde à partir de 2023. Les publicités pour des produits ayant un impact négatif sur l'environnement disparaîtront. Le service public doit être exemplaire.

Les commissions de la culture et du développement durable sont tombées d'accord pour augmenter les pouvoirs du maire en matière d'affichage extérieur, enjeu d'intérêt local. Mais des prescriptions minimales devront s'appliquer sur tout le territoire afin de lutter contre la pollution visuelle.

S'agissant de la rénovation énergétique des logements, la commission de la culture a accentué l'effort en direction du patrimoine. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions)

Mme Christine Lavarde, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions) La commission des finances a étudié huit articles seulement de ce texte essentiellement programmatique, qui induit peu de charges pour les finances publiques.

Les charges à prévoir sont difficiles à évaluer, comme pour le chèque alimentation à l'article 61. Elles pourraient devenir très élevées, selon le périmètre retenu, mais la mise en oeuvre passera par deux rapports. C'est un exemple parmi d'autres : les mesures prises sont souvent de grandes idées, dont la réalisation concrète prendra du temps. Les conséquences socio-économiques en sont mal appréhendées, je pense à l'emploi dans l'automobile, les transports routiers et l'aviation civile.

Interdire la circulation des camions à moteur thermique n'est pas possible quand l'offre équivalente n'est pas à la hauteur des besoins. C'est notamment le cas pour les plus de 3,5 tonnes. L'avitaillement sera plus fréquent, or avec 38 000 points, nous sommes loin des 500 000 annoncés pour 2022... Et la capacité de chargement sera plus faible.

Nous avons choisi d'accompagner la transition et d'éviter les laissés-pour-compte, surtout si les véhicules doivent desservir des ZFE. On me répondra qu'il y a 1,5 milliard d'euros pour les avions verts, le bonus pour les camions, des aides, mais le compte n'y est pas - le coût d'exploitation des camions à hydrogène, par exemple, est deux à trois fois plus élevé que pour les autres motorisations. Seul le bioéthanol présente des performances compatibles au thermique.

Philippe Tabarot a donc proposé de compléter les prêts à taux zéro, de prolonger les mécanismes de suramortissement ou encore de ne maintenir la trajectoire de réduction de l'exonération partielle du TICPE que s'il existe des alternatives. Dans le domaine agricole, le plan éco-azote aidera nos agriculteurs à réaliser la transition.

Sur tous ces points, il faut discuter entre partenaires européens : la convergence fiscale s'impose. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions ; Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

M. Stéphane Le Rudulier, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions) La commission des lois s'est saisie pour avis d'une trentaine d'articles touchant à des domaines variés : protection judiciaire de l'environnement, commande publique, lutte contre l'orpaillage en Guyane, transports, artificialisation des sols,...

Je ne partage pas l'enthousiasme de la ministre. Ce texte est d'une facture juridiquement décevante, avec des mesures peu normatives et peu abouties. Nous avons ainsi réécrit l'article 68 pour tenir compte des observations du Conseil d'État sur la fragilité de la rédaction initiale.

Mme de Cidrac a fait évoluer le quantum des peines et les seuils retenus en matière d'atteintes graves à l'environnement. L'écocide est un crime ; utiliser cette notion pour qualifier un délit est inapproprié.

Nous avons renforcé l'encadrement de l'usage des drones, dans le contexte de nos travaux sur la proposition de loi Sécurité globale.

Bâtir un dispositif fiscal régional sur une domanialité non encore transférée aux régions est inconvenant. La commission du développement durable a trouvé une solution équilibrée à cet égard.

Réduire l'artificialisation est nécessaire, mais gare à ne pas contraindre exagérément les collectivités territoriales. Les schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet) fixent des orientations, mais une souplesse doit être ménagée aux collectivités pour concilier la protection de l'environnement avec le développement économique et social au plus près des réalités de terrain... et sous l'oeil avisé de leurs électeurs.

Nous avons ainsi amendé ce texte sur le plan juridique pour assurer une cohérence avec les principes constitutionnels. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions ; M. Stéphane Demilly applaudit également.)

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) La méthode de ce texte interroge. Le contenu n'appelle ni l'excès d'honneur de ses thuriféraires ni surtout l'excès d'indignité des décibelocrates de la deep ecology qui ont défilé dans la rue dans des cortèges assez maigrelets. (Sourires à droite)

La Convention citoyenne est un hybride entre un panel pour institut de sondages et une pseudo-démocratie directe. Cela pose question à la démocratie représentative. Quelle est la légitimité de cette convention dont les participants ont été désignés par la providence ? Les animateurs chevronnés des réunions, eux, n'ont pas été tirés au sort...

Est-ce là une démocratie plus vertueuse ? Je n'en suis pas sûr.

Sur le contenu de la loi, je serai plus nuancé. Un texte rejeté par les zadistes, les décroissantistes, les collapsologues et par la France soumise à Bolivar ne peut pas être entièrement mauvais... (Rires sur les travées du groupe Les Républicains)

Dans les propositions de la CCC, il y a à la fois des mesures qui vont dans le bon sens, des solutions à la française pleines de bons sentiments mais qui ne servent à rien, et un catalogue de contraintes qui est le fonds de commerce des décroissants.

Vous avez choisi les mesures qui vous paraissaient les moins chimériques. L'animateur échauffé de la CCC vous a attribué la note de 3,3 sur 10, vous accusant de n'avoir repris qu'un tiers de ses propositions. J'y vois un signe de votre lucidité. La décroissance est inapplicable et vouée à l'échec. Quel sens aurait-elle pour le tiers et le quart-monde, et même chez nous pour tous les précaires ? La décroissance est en réalité le énième avatar de la haine du libéralisme, mais aussi l'opium des bobos, comme l'a prouvé il y a quelques mois dans Le Monde une tribune aussi subversive que du fromage à tartiner.

Réorienter la croissance vers un mode de vie plus respectueux de la terre et des hommes, tel est le passionnant défi de notre génération.

Hélas la Convention n'a pas répondu aux vraies questions. Comment décarboner l'économie en se privant du nucléaire ? Comment cesser d'entraver les techniques de la génomique agricole ? Comment faire payer les émissions de carbone à nos frontières ?

L'Europe a raté la révolution du numérique. La prochaine révolution est celle des industries de transition écologique - hydrogène vert, stockage électrique, ciments, aciers et engrais zéro carbone, fusion nucléaire, et tout ce que nous ignorons, mais qu'inventent en ce moment de jeunes étudiants.

La première fois nous avons été définitivement relégués derrière les États-Unis et la Chine ; la seconde fois, il sera trop tard : car rien ne sert de courir en sens contraire dans le couloir du train quand il est lancé dans la mauvaise direction. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions)

M. Ronan Dantec .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.) Il y a deux mois, le vignoble français était frappé par le gel ; ce coup de froid d'avril a été d'autant plus catastrophique qu'il avait été précédé de fortes chaleurs en mars. En outre le vignoble, notamment dans mon département de Loire-Atlantique, avait été économiquement fragilisé par la sécheresse de l'été dernier. Voilà un exemple concret de l'impact du changement climatique.

Il n'y a plus de débat sur la responsabilité humaine dans cet état de choses. Les températures ont augmenté de 1,1 degré depuis le début de l'ère industrielle et cette hausse s'accélère. Cela suffit à menacer toute l'activité viticole française. Les maisons de Champagne acquièrent des terres en Écosse en prévision... Sans parler de la sécheresse en Californie ou des températures record au Mexique et en Iran.

Al Gore le dit bien : derrière la crise syrienne, on trouve aussi des sécheresses à répétition ; derrière Boko Haram, les évolutions climatiques autour du lac Tchad... La crise climatique entre en résonnance avec d'autres crises.

Tout se jouera dans les prochaines années. Si nous ne faisons rien, nous connaîtrons des températures en hausse de  3 à 4 degrés, totalement incompatibles avec l'autonomie alimentaire mondiale et le maintien de centaines de millions d'habitants sur leurs territoires ancestraux. Je ne suis pas catastrophiste, mais lucide : sans une réponse résolue et rapide de la communauté internationale, notre monde risque l'affrontement généralisé.

Il faut donc une réponse mondiale, esquissée par l'Accord de Paris selon le principe suivant : chacun fait sa part, et se fixe un nouvel objectif tous les cinq ans, afin de stabiliser la hausse des températures à moins de 2 degrés.

La France s'organise-t-elle pour atteindre l'objectif européen de 55 % qui sera présenté à la COP de Glasgow ? La réponse est non : les mesures de ce texte nous placeront à seulement 30 ou 35 % de réduction des émissions de GES en 2030.

Nous avons quinze jours pour changer ce projet de loi en profondeur et montrer au monde que la France est aujourd'hui l'un des pays moteurs de l'Accord de Paris. Nous y parviendrons avec, par exemple, l'obligation de rénovation thermique, ou les mesures sur les engrais azotés et sur l'augmentation des puits de carbone, couplées à des mécanismes de solidarité et de redistribution, pour en favoriser l'acceptabilité.

Nous nous sommes inspirés des travaux de la CCC, mandatée par le Gouvernement dans un processus démocratique novateur. Cette initiative a suscité beaucoup d'intérêt, mais aussi quelques craintes, notamment au Sénat. Mais vous n'en avez pas tenu compte, dans une forme de parjure de la parole présidentielle. Affaiblissement dangereux de la parole politique.

Nous avons donc quinze jours pour montrer que la France fait sa part et qu'elle est en mesure de demander à ses partenaires mondiaux qu'ils fassent la leur.

L'enjeu, c'est tout simplement l'avenir de l'humanité. (Applaudissements sur les travées du GEST ; MM. Jean-Pierre Corbisez et Bernard Jomier et Mmes Angèle Préville et Marie-Claude Varaillas applaudissent également.)

M. Frédéric Marchand .  - Ce projet de loi nous adresse un double défi : combiner démocratie participative et représentative, et accélérer la transition écologique.

Beaucoup de chemin a été parcouru depuis 2017 et le discours du Président Macron reconnaissant le changement climatique comme l'un des plus grands défis de notre temps.

Le mouvement des gilets jaunes a montré le caractère crucial de l'acceptation de la transition par la population.

Je tiens à saluer l'extraordinaire travail - à marche forcée - réalisé par nos rapporteurs et marqué par l'exigence, l'ouverture et l'écoute.

Ce n'est pas une loi des petits pas. Cette loi est une contribution au respect des accords de Paris et du Pacte vert pour l'Europe : 200 milliards d'euros annuels de commande publique en faveur de la transition écologique ; plus de 4 millions de logements rénovés ; division par deux du rythme d'artificialisation des sols ; verdissement des flottes de véhicules ; fin des lignes aériennes de faible durée ; développement de l'alimentation durable dans les cantines. Ce ne sont pas des petits pas, mais des pas de géant en faveur de la transition écologique de notre société.

Les commissions ont fait bouger les lignes, et il nous appartiendra de corriger certains points contraires à l'ambition initiale du texte. Je pense notamment aux titres I, III et V sur l'information du consommateur, la lutte contre le gaspillage, le développement des mobilités douces, le logement, etc.

La transformation écologique passera d'abord par le changement des comportements ; il faut donc préférer les incitations aux interdictions arbitraires. Gardons-nous du grand dérangement prôné par les nouveaux idéologues, comme d'autres prônaient de grands bonds en avant : cela mène à l'autoritarisme et à la misère collective.

Je crois en une écologie partagée, qui tend vers l'idéal, mais qui comprend le réel. Il y a un chemin entre l'écologie de l'injonction permanente et l'immobilisme coupable : une voie centrale de bon sens pour une écologie du quotidien, une écologie qui investit dans le progrès technique et l'innovation, une écologie des solutions concrètes, de l'incitation et de l'accompagnement, une écologie de l'éducation.

C'est la voie tracée par la majorité, depuis 2017.

Ce texte nous aidera à tenir nos engagements climatiques et à orienter notre économie vers la décarbonation, car économie et écologie sont compatibles.

Nos débats nous permettront d'aller plus loin, plus haut, plus fort pour une transition écologique au service de toutes et tous. (Applaudissements sur le banc des commissions)

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Nous y sommes, prêts à débattre de l'une des réformes phares du quinquennat. Au moins sur ce point, le Président de la République aura-t-il respecté son engagement d'inscrire ce texte à notre ordre du jour.

S'agit-il d'une grande loi ? Rien n'est moins sûr, mais notre groupe la fera grandir.

Ce texte a triplé de volume à l'Assemblée nationale, mais la quantité fait-elle la qualité ? Nous aurions aimé aller plus loin, mais les lobbies ont pesé, notamment sur la question des moulins.

Nous devons réaliser un virage à 180 degrés et opérer une révolution intellectuelle : tous les secteurs d'activité doivent être mis au service de l'environnement, pas l'inverse. Oui, cela implique des adaptations complexes, mais c'est un mal nécessaire.

Il faut des mesures incitatives, un calendrier progressif et réaliste, de l'écoute, de la concertation et surtout de la lisibilité pour les acteurs. Or ce texte s'apparente à un saupoudrage sans ligne directrice : d'où un amendement de principe pour rappeler nos objectifs européens de réduction des émissions de GES. Cela constituera un symbole fort dans la perspective de la prochaine présidence française. La France doit être le moteur de la transition écologique en Europe. Or elle reste loin de l'objectif européen.

Nous avons reçu une multitude d'amendements pour corriger la loi pour l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable (EGalim), la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) ou encore la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages : ce texte est essentiellement une loi de correction.

Élu du Pas-de-Calais, je suis particulièrement préoccupé par les conséquences de l'exploitation minière : pollution des sols, remontée des eaux, friches, conséquences sociales et sanitaires. Cela reste un traumatisme qui justifie que nous ayons un véritable débat parlementaire sur le code minier : il faut donc supprimer l'article 21 habilitant le Gouvernement à le réformer par ordonnance et porter une attention toute particulière aux articles de la proposition de loi de nos collègues Gisèle Jourda et Maryse Carrère sur les sols pollués.

Ce texte fait l'impasse sur plusieurs sujets, comme le numérique ou le transport ferroviaire.

Je m'interroge sur l'application très stricte de l'article 45 de la Constitution qui a frappé des amendements pourtant en cohérence avec l'objectif de réduction des émissions de GES, ou encore des amendements destinés à mieux accompagner les acteurs.

Nos commissions se sont efforcées d'enrichir ce texte, sur la lutte contre l'écoblanchiment, le verdissement de la commande publique, la protection des écosystèmes ou encore la lutte contre la déforestation. Quant au RDSE, il a déposé 145 amendements.

Madame la ministre, ce projet de loi ne suffira pas à répondre aux enjeux, qui sont considérables. Saluons les initiatives vertueuses des collectivités territoriales, filières industrielles et entreprises en matière de circuits courts, d'économie circulaire ou de produits ménagers et cosmétiques 100 % d'origine naturelle.

Soyons optimistes, mais aussi précurseurs et ayons à coeur, au cours de ces deux semaines, de nous engager résolument sur la voie de la transition écologique. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe SER, ainsi qu'au banc des commissions)

Mme Marie-Claude Varaillas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) La CCC avait suscité un enthousiasme, brisé par ce texte qui ne répond pas à l'objectif de baisse de 40 % des émissions de GES à l'horizon 2030. Cette convention a été dévoyée et instrumentalisée par le pouvoir en place, par le biais de manoeuvres dilatoires et électoralistes.

La procédure parlementaire qui en découle suscite des interrogations : le Parlement est muselé et cantonné au rôle de simple chambre d'enregistrement, avec notamment une multitude d'habilitations à légiférer par ordonnances qui confirme, une fois de plus, son dessaisissement. Nos travaux ont été menés au pas de charge.

La création de la CCC n'épuise pas le besoin de renouvellement des pratiques démocratiques, de rééquilibrage des pouvoirs et de démocratisation du dialogue social.

Sur le fond, ce projet de loi est en recul par rapport aux propositions de la CCC : aucune mesure de ce texte n'a obtenu la moyenne de la part de ses membres. Les associations sont également critiques, de même que le HCC et le Conseil national de la transition écologique (CNTE). Tous déplorent des mesures limitées, différées, incertaines et regrettent l'absence de changement de logiciel, le manque de moyens et des délais incompatibles avec le respect de nos objectifs. On a le sentiment d'une liste à la Prévert de mesurettes sans cohérence d'ensemble.

Nous regrettons que des propositions importantes aient été ignorées, malgré les apports du Sénat : pas d'obligation de rénovation globale des logements ni d'interdiction des passoires thermiques ; une interdiction de nouveaux centres commerciaux qui ne touchera que 20 % des projets ; une interdiction de vente des véhicules thermiques les plus émetteurs qui ne concernera que 1 à 3 % des ventes de véhicules neufs ; l'interdiction des lignes aériennes intérieures en cas d'alternative ferroviaire ne vise que trois lignes ; la suppression des niches fiscales favorables aux énergies fossiles n'est qu'un vague objectif, alors que 70 % des mesures du Plan de relance auront un impact négatif sur le climat ; rien n'est prévu pour concrétiser les annonces d'Emmanuel Macron sur les petites lignes, le fret ferroviaire et les trains de nuit ; les accords de libre-échange ne sont pas remis en cause alors que la CCC l'avait proposé.

Le Conseil d'État vient d'enjoindre à l'État de respecter ses engagements internationaux. Mais pour cela, il faudrait des moyens supplémentaires ; et les outils de puissance publique comme la SNCF ou EDF devraient utilisés comme des leviers de la transition écologique. Il y a là un formidable gisement d'emplois dans un contexte de fort chômage.

La CCC devait être une réponse au Grand Débat national et au mouvement des Gilets jaunes. Or ce texte ne contient aucune mesure sociale. Pourtant, ce sont bien nos concitoyens les plus fragiles qui sont les plus touchés : victimes de la malbouffe, ils sont aussi 12 millions à souffrir de précarité énergétique. L'urgence sociale et l'urgence climatique doivent être traitées conjointement, et s'appuyer sur une meilleure répartition des richesses. Or sur cette question le projet de loi est muet : rien sur le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), rien sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) dont les Gilets jaunes souhaitaient l'abrogation, rien sur la taxe sur les dividendes qui a fait l'objet d'un veto présidentiel, rien non plus sur la conditionnalité des aides publiques.

Il faudrait mettre en question les logiques de court terme des investisseurs. Or une étude d'Oxfam nous apprend que les entreprises du CAC 40 nous conduisent tout droit vers une trajectoire à plus de 3,5 degrés d'ici 2100...

Nous appelons à reconstruire un futur écologiste, féministe et social en rupture avec le désordre néolibéral. C'est le sens des amendements du CRCE. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Joël Bigot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous nous dirigeons vers une nouvelle défaite dans la lutte contre le changement climatique, avec ce texte qui ne transcrit que partiellement les propositions de la CCC. Cette expérience inédite de démocratie participative a fait naître des attentes et des espérances qui ont été déçues.

Nos concitoyens ont planché durant des mois, avec les meilleurs experts, sur l'information du consommateur, la régulation de la publicité, la rénovation thermique des logements, la pénalisation des atteintes à l'environnement, la décarbonation des mobilités, etc. Or nous constatons que la justice sociale est la grande absente du texte et que vous avez refusé la taxation des dividendes proposée par la CCC. Vos lacunes sont coupables et le Conseil d'État l'a rappelé vendredi dernier en vous enjoignant de respecter les objectifs fixés au cours du précédent quinquennat.

Une majorité de Français voulait que leur pays renoue avec le leadership écologique. Or le Conseil économique social et environnemental (CESE), le HCC, le CNTE ont tous jugé sévèrement la faible ambition de ce texte. Ces instances sont moins conciliantes avec le Gouvernement que le Boston Consulting Group...

Le groupe SER a déposé des amendements pour améliorer l'information du consommateur et renforcer la responsabilité sociale des entreprises. Il faut aller vers une consommation plus éthique et durable et encadrer plus efficacement la publicité, en allant au-delà des simples engagements volontaires. À cet égard, nous sommes favorables à la création d'un fonds pour une publicité responsable.

Il faudra également raccourcir les délais et donner un calendrier clair. Fixer un cap trop lointain serait improductif et c'est à la collectivité de déterminer la trajectoire.

Il ne reste plus rien après le passage en commission des obligations dans les marchés publics. Nous y reviendrons.

Nous défendons une stratégie nationale concertée des emplois et des compétences pour la transition écologique et la résilience, dans le droit fil de la stratégie des territoires zéro chômeur.

Il faut lutter contre notre dépendance aux énergies fossiles, doper le fret ferroviaire et fluvial - en créant une redevance pour les poids lourds -, développer le principe pollueur-payeur et accompagner les ménages modestes dans le renouvellement de leur voiture.

Nous déplorons l'abandon du crime d'écocide. Stop à l'impunité écologique ! M. Durain avait porté une proposition de loi en ce sens. Là est la véritable révolution culturelle.

Il faut un volontarisme écologique à la hauteur des enjeux et de nos objectifs climatiques. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; MM. Jean-Pierre Corbisez et Henri Cabanel applaudissent également.)

M. Didier Mandelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Moga applaudit également.) Nous y sommes, deux ans après la création de la CCC par le Président de la République. Ce projet de loi vient après dix années de textes qui ont amorcé la transition écologique. Depuis 2018, nous avons examiné la loi d'orientation des mobilités (LOM) et la loi AGEC. Ce troisième projet de loi traduit l'aspiration des Français à vivre dans un environnement préservé, à se déplacer et à consommer différemment. Il permet surtout au Président de la République de cocher la case « climat ». La transition écologique est nécessaire, mais elle doit tenir compte des réalités économiques et sociales ; c'est le sens même de la notion de développement durable.

Au législateur de définir l'indispensable, le raisonnable et l'acceptable, pour que transition ne rime pas avec exclusion. Il faut intégrer tous les acteurs dans les réflexions et l'action.

Ce projet de loi souffre d'ambitions difficiles à réaliser. La CCC a dénoncé une trahison face à l'engagement de reprendre ses propositions « sans filtre ». Selon le HCC aussi, le projet de loi manque d'ambition.

Il y a une certaine incohérence entre l'ambition de référence de la Convention et ce projet de loi, qui fait de nombreux mécontents. Ce n'est pas un hasard s'il a triplé de volume à l'Assemblée nationale...

Nous avons manqué de temps pour l'examiner et nous ne connaissons pas l'impact environnemental des nouvelles mesures adoptées à l'Assemblée nationale. On peut en outre déplorer la faible portée de certaines dispositions, comme l'interdiction de la publicité aérienne ou les multiples demandes de rapports.

L'accord de Paris et l'objectif de neutralité carbone semblent inatteignables. C'est pourquoi nous avons adopté un amendement avant l'article premier, largement partagé, afin de redonner au texte une véritable ambition.

Je salue le travail de nos rapporteurs, qui ont entendu au total plus de 200 personnes, examiné quelque 1 960 amendements et adopté 690 d'entre eux. Je salue également la mobilisation des 1 800 élus locaux. Ce travail d'écoute nous a permis d'aboutir à un texte davantage en adéquation avec nos objectifs climatiques.

Conformément à la volonté du Président du Sénat, les commissions ont abouti à une position équilibrée, répondant aux impératifs internationaux, écologiques et sociaux. Je me réjouis de ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC, ainsi qu'au banc des commissions)

M. Stéphane Demilly .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu'au banc des commissions ; M. Yves Bouloux applaudit également.) Le groupe UC est globalement d'accord avec les grands objectifs du projet de loi.

Madame la ministre, vous êtes courageuse et pugnace face au mur consolidé des comportements inadaptés.

Mais nous ne sommes pas d'accord sur les moyens. Nous légiférons pour 67 millions de personnes alors que notre planète est habitée par 8 milliards de terriens. Nous légiférons donc pour 0,8 % de la population mondiale, alors que la pollution ne connaît pas de frontière.

Un comportement national vertueux aura donc peu d'effets sur le réchauffement climatique global et ses terribles conséquences. Évidemment, ce n'est pas parce que les autres feignent d'ignorer leur responsabilité qu'il ne faut rien faire. Certes, mais la stratégie du colibri de Pierre Rabhi ne suffira pas.

Tout le monde pense à changer le monde, mais personne ne pense à se changer lui-même, dirait Tolstoï. Comment agir pour donner l'impulsion sans se sacrifier économiquement ? Avoir raison tout seuls ne nous garantira pas une place au paradis...

En 2020, 34 milliards de tonnes de CO2 ont été émises dans le monde, soit une baisse de 2 milliards par rapport à 2019. Cela ne résulte pas de décisions législatives, mais des effets de la pandémie qui a contracté le PIB mondial de 3,4 %. Du jamais vu depuis la Deuxième Guerre mondiale ! Voilà qui apporte de l'eau au moulin des partisans de la décroissance. Or nous voulons une croissance équilibrée, responsable, intelligente et soucieuse du futur.

L'idée de jouer un rôle de guide mondial est séduisante et répond à l'appel à la cohérence de Michel de Montaigne, qui prônait une harmonie entre le dire et le faire. Mais ce sont nos organisations internationales qui devraient prendre le leadership planétaire.

Nous avons besoin d'une stratégie européenne. Or notre vieux continent est aux abonnés absents. L'Europe n'est ni exemplaire, ni cohérente, ni solidaire. Il faut encore et toujours remettre le métier sur l'ouvrage européen.

Je salue l'amendement avant l'article premier.

Avec ses 40 centrales à charbon, l'Allemagne émet un quart des émissions de CO2 des Vingt-sept. Or une seule centrale émet plus de CO2 que tout le trafic aérien français... (Mme Sophie Primas approuve.) Le trafic aérien n'est à l'origine que de 0,8 % des émissions de GES et l'impact de la suppression de trois ou quatre lignes intérieures est donc tout à fait négligeable... Ce sont des décisions cosmétiques.

Je veux alerter sur les dangers de décisions légitimes, mais que nous prendrions seuls.

Le groupe UC sera constructif, mais déplore l'absence de coordination européenne. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; ainsi qu'au banc des commissions)

M. Yves Bouloux .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Michel Laugier et Philippe Tabarot applaudissent également.) Dans notre XXIe siècle, la lutte contre le changement climatique est un enjeu crucial pour l'humanité. Comment gérer 7,8 milliards d'hommes et de femmes ?

Le climat est tributaire de l'activité économique et de la démographie.

Avec l'ère industrielle, nous avons connu pollutions, gaspillages et un développement difficile à contrôler.

L'Europe, mais aussi les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, le Japon, la Chine et la Russie s'engagent. Bonne nouvelle, si les promesses sont tenues.

En première lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, aucune décision n'a été adoptée pour lutter contre le dérèglement climatique ni aucune mesure sur la question de l'énergie. On modifie des décisions législatives récentes, sur les Sraddet, les ZFE, la loi EGalim, les diagnostics de performance énergétique (DPE), etc. La lutte contre l'artificialisation des sols supposera de revoir les documents d'urbanisme, ce qui aura un coût.

Comment rénover les passoires thermiques sans aides pour les propriétaires ? Et quid du million et demi de logements qui seront exclus du marché locatif ?

La ruralité et l'agriculture sont malmenées. Dans les territoires reculés, il y a peu de transports en commun et les salaires sont faibles. Il faut laisser du temps à nos concitoyens pour s'adapter - à moins que l'État ne décide d'augmenter leurs émoluments... En outre, l'objectif de zéro artificialisation nette risque de se faire au détriment de l'attractivité et du développement des territoires ruraux.

L'agriculture française est un modèle et nos agriculteurs font un excellent travail, mais les Français ne le savent pas. Le texte de l'Assemblée nationale, technocratique et passablement hors-sol, risque, avec ses taxes et interdits, de réveiller les gilets jaunes. Prenons garde !

Le consensus parfait est difficile à atteindre, mais essayons de nous accorder sur le principal. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions)

Mme Nadège Havet .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Le texte adopté à l'Assemblée nationale a donné lieu à l'un des plus longs débats de la Ve République. Je salue le travail des députés.

Nous vous apprêtons à examiner 2 000 amendements dans une période marquée par la sortie de la crise sanitaire, la campagne de vaccination et les prochaines élections régionales et départementales.

Les collectivités territoriales jouent un rôle essentiel en matière de politique environnementale. Le RDPI a déposé plusieurs amendements qui les concernent.

Le changement climatique, cet autre état d'urgence, doit aboutir à des réponses concrètes. Je salue l'engagement du Gouvernement, de la ministre et des rapporteurs. Nous avons un objectif commun : faire de l'écologie notre quotidien, dans toutes nos activités, du lever au coucher, dans un état d'esprit positif et constructif.

Ce texte fait suite à la CCC, qui constitua un exercice démocratique inédit. Nous devons rechercher une écologie incitative, accompagner financièrement ceux qui en ont le plus besoin et échanger avec tous les acteurs, quitte à réaliser des compromis. À l'Assemblée nationale, les positions étaient diverses, y compris au sein des groupes, par exemple sur l'aérien.

Nous pouvons tous convenir que nous n'avons pas fait suffisamment par le passé et le Conseil d'État vient de nous le rappeler. Il faudra toujours aller plus loin. Mais il est injuste de critiquer notre majorité, alors que, pour la première fois au monde, un budget vert a été adopté par la France. En outre, le plan de relance européen a été rendu possible grâce à l'action de notre pays et il prévoit 30 milliards d'euros pour la transition écologique.

Nous devons nous battre à l'échelle internationale. La présidence française de l'Union européenne sera l'occasion de faire entendre la voix de notre pays. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-Pierre Moga .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et au banc des commissions) Nous y voilà : nous entamons l'examen de la dernière loi environnementale du quinquennat.

Qu'en est-il réellement ? Madame la ministre, ce projet de loi ne vous permettra vraisemblablement pas d'atteindre vos objectifs, car il contient trop de mesures programmatiques ou symboliques. Je pense par exemple à l'article 10.

Il est en outre incompréhensible que vous lanciez des missions sur la rénovation thermique ou la publicité alors que ce texte est déjà en cours d'examen !

Des thèmes ont été totalement oubliés : le numérique, la prévention des risques, le ferroviaire ou encore la forêt - qui absorbe pourtant 11 % des émissions de GES.

Nous avons des doutes sur votre capacité à réduire les émissions de GES et tant le HCC que le CESE et la CCC partagent nos doutes.

Le groupe UC souhaite que l'examen de ce projet de loi aboutisse à un rehaussement de ses ambitions.

Nous souhaitons nous engager résolument, dans un esprit pragmatique, sur le fondement du bilan carbone, pour assurer la crédibilité de la France dans la perspective de la COP26 et de la présidence française de l'Union européenne.

Notre approche est également territoriale, afin de replacer les collectivités au coeur de la transition écologique. Une application différenciée de l'article 29 relatif à l'objectif zéro artificialisation des sols est notamment nécessaire pour tenir compte des réalités du terrain.

Aux mesures punitives nous préférons l'incitation et l'accompagnement à la transition vers une écologie sociale. L'article 62 modifié par la commission nous semble ainsi pertinent : mieux vaut accompagner les agriculteurs que les taxer.

Le Sénat a apporté au texte plusieurs ajouts majeurs : en matière de réforme du code minier, de développement de l'hydroélectricité, de lutte contre la déforestation importée ou de baisse de la TVA pour la rénovation énergétique, les travaux de la commission ont été utiles.

La CCC a démontré la viabilité de certaines formes de démocratie, mais éloignons-nous de l'idéal athénien du tirage au sort. Le Parlement n'abandonnera pas son rôle de législateur ni son droit d'amendement !

Ce texte nous permet de nous interroger sur le rôle de l'écologie pour notre avenir. Le groupe UC défendra des amendements cohérents pour concilier écologie et économie, assurer la réduction des GES et conforter le lien entre transition écologique, croissance et emploi, afin de tracer un chemin de transition heureux.

Nous proposerons notamment de développer le stockage de l'énergie et de rehausser notre ambition en matière nucléaire, à rebours du dogme de l'écologie politique sur le sujet. Nous défendons l'idée d'une complémentarité entre le nucléaire, énergie propre et compétitive, et les énergies renouvelables. Elle est nécessaire pour verdir notre mix énergétique.

Le risque politique réside dans l'inaction, dont tous seraient victimes. Nous sommes tous responsables en matière d'écologie. N'attendons pas tout de l'État ! Les collectivités territoriales doivent piloter la transition.

Le groupe UC s'engagera donc dans ce débat avec l'envie d'agir collectivement et avec pragmatisme. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur le banc des commissions ; M. Jean-Pierre Corbisez et Mme Sophie Primas applaudissent également.)

M. Franck Montaugé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) En 1778 déjà, le grand naturaliste Buffon écrivait dans Des Époques de la nature : « La face entière de la terre porte aujourd'hui l'empreinte de la puissance de l'homme. »

À Paris, en 2015, la COP21 a entraîné un changement de paradigme historique. Un phare s'est allumé et l'humanité a pris acte de l'entrée dans l'anthropocène. Cette action est inscrite dans la durabilité. Depuis, des mesures ont été prises - la SNBC par exemple - et de nombreuses déclarations et communications ont été faites, mais, à ce rythme, nous ne contiendrons jamais assez le réchauffement climatique. Aussi, l'Union européenne a-t-elle récemment relevé ses ambitions.

Ce texte est donc nécessaire. Malheureusement, selon les propres mots de la ministre, il demeure insuffisant pour atteindre l'objectif de réduction des émissions de GES de 55 % à l'horizon 2050, fixé par l'Europe. Pour le Gouvernement, il s'agit plus de répondre à une contrainte extérieure que de développer une stratégie assumée de transformation.

Le phare de 2015 émet une lumière bien pâle désormais, s'il n'est pas éteint...

La CCC a constitué une méthode utile d'ouverture à la société civile, mais que restera-t-il des propositions formulées ? Elles devaient être reprises sans filtre, mais filtre il y eut et il s'est bouché avant le passage à l'Assemblée nationale...

Quid également des aspects sociaux de la transition écologique ? Bonnets rouges, gilets jaunes : après ces crises, nous avons mis les problèmes de la ruralité sous le tapis. Nous ferons des propositions pour une meilleure reconnaissance de celle-ci et de ses externalités positives dont nous profitons tous. Nous espérons une conversion du regard, prémices d'une nouvelle politique pour la ruralité et l'agriculture.

Il convient, en particulier, d'accompagner l'installation de nouvelles populations ; à cet égard, l'objectif zéro artificialisation nette risque de peser sur la croissance des territoires ruraux. L'Assemblée nationale, sur le sujet, est demeurée sur une position verticale en renvoyant à un décret, bien loin d'un véritable débat démocratique. Les élus locaux verront rapidement les conséquences négatives d'une telle mesure.

Le dispositif proposé n'est pas acceptable. Il ne suffira pas de s'affranchir de l'objectif comme le propose la commission des affaires économiques pour que le problème disparaisse. Mieux vaut, dans la négociation, élaborer un calendrier réaliste afin d'être au rendez-vous de 2050. Mais avec ce texte, ce n'est pas possible !

La transition, l'économie agricole et les aspirations des Français à la ruralité sont une chance, un levier de développement. Il faut les saisir ! Et davantage reconnaître les productions de qualité.

Quant à la politique énergétique, comment peut-on penser que le projet Hercule et l'affaiblissement d'EDF répondront aux objectifs d'une programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) déjà floue ?

Les mesures d'accompagnement ne sont pas à la hauteur des défis du quotidien. Les aides à la rénovation des logements sont insuffisantes pour les ménages modestes. Nous ferons des propositions.

La transition ne se fera pas sans les Français : il faut éviter tout risque de rejet par la société. Or les propositions du groupe SER touchant au dialogue social ont été écartées en commission. C'est dommage !

Des pans entiers de l'économie, émetteurs de GES, ont été oubliés, en particulier - sujet tabou - le secteur de la publicité.

La clé de notre efficacité collective se situe dans le pilotage des processus, avec la fixation d'objectifs clairs, l'évaluation permanente et l'affectation de moyens suffisants. Or la situation budgétaire apparaît aujourd'hui intenable.

Comment allez-vous réduire la dette tout en soutenant les acteurs de la transition et l'évolution des pratiques vers des modèles inclusifs ? Le « quoi qu'il en coûte » sera-t-il prolongé compte tenu de l'urgence de la situation et du retard déjà pris par notre pays ? Où trouverez-vous les ressources pour atteindre nos objectifs dans les délais impartis ? Les entreprises recherchent davantage la croissance et le remboursement de leur dette...

Ce texte ne peut donc être dissocié du projet de loi de finances pour 2022, qui lui donnera - ou pas - les moyens de son existence. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Étienne Blanc .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur le banc des commissions) Il est curieux qu'après un diagnostic quasi unanime sur l'influence de l'activité humaine sur le climat en raison des émissions de GES, le Gouvernement nous présente un texte aussi faible, bien loin de répondre aux objectifs affichés.

La crise des Gilets jaunes a accouché de la CCC, dont on nous dit qu'elle fut constituée par tirage au sort. Vraiment ? Le sort a ouvert la porte à plus de 50 % de militants proches des milieux environnementalistes, dont la part dans la représentation nationale n'excède pas 10 %... Il a de bien mauvaises manières ! Les Grecs voyaient dans le tirage au sort la main insoupçonnable des dieux. À quels dieux devons-nous ce résultat surprenant et improbable ?

Mais voilà que les « tirés au sort » se rebellent contre un texte insuffisant ! En 2020, les Français pensaient que l'Élysée avait trouvé la démocratie idéale, celle que l'on chante depuis Platon, pour lutter contre le changement climatique. Mais, patatras, cela n'a pas marché ! Le constituant de 1958 l'avait prévu : l'ordonnance du 17 novembre interdit d'apporter une pétition à la barre des deux assemblées. Vous avez confondu consultation et décision.

Ce texte est un catalogue de mesures issues d'un « sort » sur lequel pèsent des soupçons, une suite de propositions produites par des lobbies et des associations.

Beaucoup de dispositions sont coûteuses, contraignantes, pour un résultat marginal. Le texte ne compte ainsi pas moins de trente-cinq interdictions, lesquelles donneront sûrement lieu à une réglementation foisonnante ; le ministère de l'environnement n'a pas l'habitude de faire dans la demi-mesure en la matière... Il s'agira de contrôler la publicité, d'éduquer, voire de rééduquer, d'inspecter les cantines scolaires et d'ouvrir leurs réfrigérateurs, de vérifier le nombre d'échantillons de parfums distribués... Les agriculteurs, déjà accablés, seront particulièrement surveillés. Bref, vous allez créer des postes de fonctionnaires et surtout, toujours plus de normes.

Le respect dû au Parlement aurait mérité une étude d'impact digne de ce nom pour mesurer le coût des mesures envisagées.

Ce texte est une belle occasion manquée ! Il aurait fallu partir des causes, bien connues, du réchauffement climatique : l'habitat, le transport et l'industrie, dans des proportions équivalentes.

L'électricité fournit une réponse crédible en associant l'hydroélectricité à la filière nucléaire. Cette dernière apparaît indispensable, sauf à continuer à massacrer nos paysages à coups d'éoliennes et de panneaux solaires fabriqués en Chine. Hélas, les dieux de la CCC ne semblaient pas vouloir la soutenir...

Nous allons donc améliorer ce texte ; nous travaillerons à y intégrer des mesures utiles, mais nous savons d'ores et déjà qu'il créera de nouvelles déceptions, dans une démocratie déjà bien fatiguée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains).

M. Laurent Duplomb .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous pourrions beaucoup dire sur ce projet de loi. J'évoquerai, pour ma part, le renforcement de la résilience. Mais qu'est-ce que la résilience ? À l'origine, il s'agit de la résistance d'un matériau au choc ; autrement dit, la capacité à surmonter des épreuves.

Cette loi en donne une tout autre définition : elle culpabilise avec arrogance, punit sans discernement et interdit sans limite. Elle s'appuie sur la peur. Ce n'est pas là la résilience.

Dans mon métier, on sème toujours, sans être sûr de récolter. La vraie résilience consiste à bâtir des solutions. Prenez l'eau : nos ancêtres ont cherché à la maîtriser, la conserver, la stocker pendant des siècles. Voyez les Dombes, les aqueducs romains, le marais poitevin. Or nous détruisons les ouvrages les plus anciens et les seuils, nous affaiblissons l'hydroélectricité par dogmatisme, nous refusons le stockage destiné à l'irrigation. Nous préférons faire comprendre à nos concitoyens qu'avec le réchauffement climatique, ils sont sûrs d'avoir soif ! Pourquoi tant d'interdits ?

La ligne directrice du Gouvernement semble être la destruction de notre économie par tous les moyens. Tous les métiers sont dans le viseur : l'industrie - le prix des métaux que nous refusons de produire a été multiplié par deux ; l'agriculture - nous devons sans cesse importer davantage de produits ; la plasturgie - importante dans mon département de Haute-Loire - qui pourrait être modernisée, alors que l'on importe des gobelets en bambou venus de Chine.

La France, pourtant, n'émet que 0,9 % des émissions de GES et l'Europe 9 %. Je me suis livré à une analyse : moins on émet de CO2, plus la balance commerciale est déficitaire. Voyez les chiffres de l'Allemagne et de l'Italie, qui polluent davantage, par rapport aux nôtres.

Bref, plus on punit, moins on produit ! Et ce sont toujours les mêmes qui trinquent : ceux qui travaillent. Je pense en particulier à ceux qui ont besoin de prendre l'avion pour aller travailler : ils seront punis par l'interdiction des vols intérieurs d'une durée inférieure à deux heures et demie, ils prendront le train ! (Protestations sur les travées du groupe SER et du GEST ; M. Ronan Dantec s'exclame.)

Vous refusez de prendre en compte les territoires pour appliquer l'objectif zéro artificialisation des sols. Après les bonnets rouges et les gilets jaunes, vous aurez les rats des champs contre ceux des villes ! Quand la campagne ne pourra plus construire, elle crèvera la bouche ouverte !

Vous créez toujours plus de taxes. Celle sur l'azote est absurde : il faut de l'azote pour produire les plantes, tout autant que du phosphore et de la potasse, dont vous voulez que les Français se nourrissent. Dans un kilogramme de salade, vous ingurgitez 1 500 milligrammes de nitrate, mais vous fixez un seuil de cinquante milligrammes par litre pour l'eau...

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Et comment donc faisaient nos ancêtres ?

M. Laurent Duplomb.  - Comme a dit Pompidou en 1966, « mais arrêtez donc d'emmerder les Français ! Il y a trop de lois, trop de textes, trop de règlements dans ce pays ! On en crève ! Laissez-les vivre un peu et vous verrez que tout ira mieux ! Foutez-leur la paix ! Il faut libérer ce pays. » (Protestations sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. le président.  - Veuillez conclure. (On s'impatiente à gauche.)

M. Laurent Duplomb.  - Pompidou disait encore : « comment se ruiner ? Par le jeu ? C'est le plus rapide. Par les femmes ? C'est le plus agréable. Par les technocrates ? C'est le plus sûr ! » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Christine Lavarde.  - Encore ! Encore !

M. le président.  - On reste calme... Nous en avons encore pour deux semaines... (Marques d'amusement à gauche)

Mme Barbara Pompili, ministre .  - Je vous remercie pour ce premier goût de débat, déjà riche et assez proche des discussions que nous avons eues à l'Assemblée nationale. Nous aurons tout le temps de revenir sur vos nombreuses questions lors de la discussion des articles.

D'aucuns disent que ce texte n'est pas à la hauteur ; d'autres lui reprochent d'être trop punitif. Comme d'habitude, la question qui se pose est celle du curseur : où le placer, face à un enjeu qui nous dépasse ? Le changement climatique frappera surtout les générations à venir ; notre responsabilité à leur égard est forte.

Des manques ont été évoqués. Ce projet de loi s'inscrit dans le prolongement des réformes engagées depuis 2017, parfois aussi avant. Logiquement, certains sujets y sont moins développés : les transports, l'économie circulaire et l'énergie ont déjà fait l'objet de textes spécifiques. Au cours du quinquennat, nous aurons couvert tout le spectre.

L'ajout de mesures d'ampleur a également été critiqué. Intégrer la réforme du code minier et du trait de côte est un choix : il est urgent d'actualiser notre droit et le calendrier législatif ne permet guère d'autre solution avant la fin du quinquennat.

De nombreux travaux parlementaires ont préparé les mesures sur le trait de côte, dont la nécessaire réforme nous est rappelée par la situation de l'immeuble Le Signal.

La réforme du code minier me tient particulièrement à coeur - je viens du bassin minier et mes grands-parents étaient mineurs. Le litige de la Montagne d'or en Guyane le prouve : notre droit est devenu inadapté et nous ne pouvons plus retarder le moment de le réformer. Une grande majorité de mesures ont été inscrites dans la loi par l'Assemblée nationale ; l'ordonnance prévue ne servira qu'à nettoyer le code. (M. Fabien Gay ironise.)

Mme Sophie Primas.  - L'Assemblée nationale a tout fait !

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Certains se demandent pourquoi il faudrait agir alors que la France ne représente que 0,8 % de la population mondiale. Ce n'est pas prendre la mesure de notre place en Europe et dans le monde. Alors que les États-Unis se sont retirés du jeu pendant plusieurs années, nous avons maintenu l'enjeu climatique à l'agenda international, en particulier lors du One Planet Summit. J'en suis particulièrement fière ! Nous sommes regardés ; nous avons une réputation à tenir : nous devons mener une politique en cohérence avec nos paroles.

Nous pensons aussi au niveau européen. Monsieur Demilly, vous dites que l'Union européenne ne fait rien ; pardon, mais elle a rehaussé l'objectif de réduction des émissions de GES de 40 à 55 % et présentera le 14 juillet un paquet législatif comportant un vaste panel de mesures pour augmenter la part des énergies renouvelables, développer l'économie circulaire et la production de batteries, créer une taxe carbone à ses frontières. Nos actions s'inscrivent donc dans un cadre global.

Je remercie les rapporteurs pour leur important travail ; je partage une partie de leurs propositions, d'autres moins -  ainsi va la démocratie. J'attends avec impatience le débat, en vous priant de laisser les dieux et les religions à la porte de cet hémicycle ! (Sourires)

La discussion générale est close.

La séance est suspendue pour quelques instants.

Discussion des articles

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier A

M. le président.  - Amendement n°126, présenté par M. Dantec et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

I.  - Avant le tITRE Ier A : Dispositions liminaires

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

En cohérence avec l'Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015 qu'elle a ratifié, et dans le cadre du Pacte Vert pour l'Europe auquel elle a librement souscrit, la France s'engage à respecter les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre découlant de la révision prochaine du règlement (UE) 2018/842 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de 2021 à 2030 contribuant à l'action pour le climat afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Atteindre les objectifs de l'accord de Paris et du Pacte Vert pour l'Europe

M. Ronan Dantec.  - Je suis heureux de présenter cet amendement avec les autres groupes du Sénat. Il est simple, mais il manquait à la loi. Madame la ministre, nous savons où doit se situer le curseur. Cet amendement y pourvoit, en imposant à la France de décliner l'objectif d'une réduction de 55 % des émissions de GES en 2030 fixé par l'Union européenne dans le cadre du règlement sur la répartition de l'effort.

Pour la première fois le Sénat, dans sa diversité, dit son accord et son soutien politique à cet objectif. C'est un soutien pour les négociations internationales. Le Sénat vous fait un cadeau, madame la ministre. Quand vous arriverez à Glasgow, les Chinois ne pourront pas faire valoir que vous ne vous fixez pas d'objectifs... Vous pourrez leur dire que la représentation nationale est derrière vous.

Une question cependant : comment combler les vingt points restants entre cet objectif et la réduction de 35 % auquel ce texte devrait aboutir ? Il faudra trouver une solution durant nos débats. Vous avez quinze jours... Les groupes politiques proposeront des améliorations dans le même sens. (Mme Monique de Marco applaudit.)

M. le président.  - Amendement identique n°128 rectifié ter, présenté par M. Longeot et les membres du groupe Union Centriste.

M. Jean-François Longeot.  - Cet amendement prévoit le respect des objectifs de réduction des émissions de GES qui découleront de la révision prochaine du règlement européen sur la répartition de l'effort. Il fixera, pour chaque État membre, des objectifs nationaux de réduction des émissions de GES cohérents avec le nouvel objectif européen.

Le HCC a jugé le texte insuffisant ; avant la COP26 et la présidence française de l'Union européenne, il faut rappeler cet engagement, alors que le Conseil européen a fixé un objectif rehaussé les 10 et 11 décembre.

Le projet de loi accompagnera la dynamique européenne dans laquelle la France doit jouer un rôle moteur. Cet amendement conforte la crédibilité de notre pays. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. le président.  - Amendement identique n°141, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Cet amendement présenté par tous les groupes rappelle les engagements de la France en matière de lutte contre le changement climatique. Le cinquième rapport du GIEC souligne l'urgence à agir pour maintenir des conditions climatiques compatibles avec la vie.

Depuis 1972, les COP successives ont permis des avancées concrètes, notamment à Kyoto en 2007 et à Paris en 2015. L'Union européenne a posé en 2007, 2014 puis en septembre 2020 des objectifs de réduction des GES toujours plus ambitieux. Le droit de l'environnement a été reconnu.

La France, dans la loi Énergie-climat, s'est fixé un objectif de réduction de 40 % de la consommation d'énergies fossiles à l'horizon 2030 par rapport à 2012. C'est insuffisant. L'État a d'ailleurs récemment été condamné ; en Allemagne, une loi a été retoquée parce qu'incompatible avec l'engagement climatique.

M. le président.  - Amendement identique n°235, présenté par M. Mandelli.

M. Didier Mandelli.  - Cet amendement rappelle la France à l'engagement pris lors de l'Accord de Paris. Le G7 a défini un objectif de réduction de 50 % hier ; d'autres parlent de 55 %. L'important, au-delà des chiffres, réside dans la démarche commune. Espérons que ces amendements nous feront tendre vers l'objectif.

M. le président.  - Amendement identique n°673 rectifié, présenté par MM. Corbisez et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

M. Jean-Pierre Corbisez.  - Le projet de loi devait, en reprenant les propositions de la CCC, atteindre l'objectif de 40 % de réduction des émissions de GES d'ici à 2030. Mais depuis, l'Union européenne, dans le cadre du Green deal, a rehaussé ses objectifs. Il faut donc se remettre à l'ouvrage ; tel est l'objet de cet amendement, à la veille de la COP26, pour ne pas reproduire les rendez-vous manqués que furent les lois EGalim, AGEC et LOM.

M. le président.  - Amendement identique n°1684, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Joël Bigot.  - Nous souhaitons alerter le Gouvernement : nos engagements s'imposent à nous. Or les signaux envoyés inquiètent. Le Gouvernement a abaissé les objectifs de la SNBC ; est-ce à la hauteur du défi climatique ? Nous ne pouvons plus tarder en matière de réduction des émissions de GES.

Les objectifs doivent reposer sur une politique européenne volontariste telle que préconisée par la CCC. Le groupe SER en appelle à la cohérence et à la responsabilité écologique et sociale de l'État.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Il fallait inscrire le nouvel objectif européen au début de ce texte. Avis favorable aux six amendements identiques.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Ces amendements introduisent l'obligation pour la France de respecter un règlement européen.

Vous avez raison de souligner que la révision de l'objectif européen oblige la France à relever le sien à un niveau qui dépendra de la répartition de l'effort négocié entre les pays européens dans les prochains jours.

Pour l'heure, il convient de respecter la hiérarchie des normes : le règlement européen l'emporte sur la loi. Cet amendement me semble relever d'une disposition tautologique d'ordre symbolique. Or nous disons trop souvent que la loi est bavarde...

Je ne suis cependant pas opposée aux symboles. J'y suis même attachée quand il s'agit de nos engagements.

Je m'en remets à la sagesse du Sénat, en espérant que vous vous souviendrez de cette ambition au moment de discuter les amendements qui tendront à la réduire...

Mme Éliane Assassi.  - Ça veut dire quoi ?

M. Ronan Dantec.  - J'entends le côté tautologique de l'amendement, mais la loi elle-même ne respecte pas l'engagement européen. Comment comptez-vous le respecter ? Avec quelles mesures ? Qu'est-ce que la France défendra au niveau européen ?

Le GEST a réalisé un travail sérieux pour une loi Climat qui, mesure après mesure, respecte cet objectif de baisse de 55 % des émissions. Mais même si la France finit à 39 % ou 40 % de baisse, où trouvera-t-on les 15 % restants ? Le Boston Consulting Group et le HCC critiquent l'impact de la loi, qui fait gagner dix à quinze points par rapport aux gains de 1990 à 2020.

Il faut dix ans entre le vote d'une loi et son impact maximum.

Si les mesures ne sont pas crédibles, ce sont l'Accord de Paris et la taxe aux frontières qui seront menacées. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Frédéric Marchand.  - Cette loi est un outil supplémentaire pour respecter les accords de 2015 et être au rendez-vous. Le groupe RDPI votera ces amendements.

M. Fabien Gay.  - Oui, madame la ministre, la politique peut être affaire de symboles. Mais là, ce n'est pas le cas. La politique, c'est une vision d'avenir. Donnons-nous un objectif ambitieux, un calendrier et respectons-le ! Nous en sommes loin.

Réduire de 50 % les émissions de GES d'ici 2030, c'est un bon objectif que le Sénat veut respecter. Le CRCE fera de nombreuses propositions en ce sens.

On ne peut pas débattre d'alimentation sans évoquer les traités de libre-échange, ni d'énergie sans aborder l'avenir d'EDF.

Mais cet amendement n'est pas un symbole. Tout le débat se réorientera dans les prochains jours, s'il est adopté.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Je le répète : cette loi, à elle seule, ne résout pas tout le problème de la réduction des émissions de GES.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Ça, c'est sûr !

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Elle fait partie d'un ensemble de mesures prises depuis le début du quinquennat, que l'analyse du Boston Consulting Group englobe, tandis que celle du HCC se focalise sur cette seule loi. Or le BCG considère que si tout était mis en oeuvre de façon volontariste, nous atteindrions les 40 % de réduction.

La Commission européenne a rehaussé ses ambitions. Nous allons nous y adapter, néanmoins il serait bizarre d'augmenter tel ou tel seuil, de façon désorganisée.

Faisons déjà en sorte d'atteindre 40 % avant d'aller plus loin, vers un objectif qui n'est pas encore défini ni dévolu à la France.

À la demande du GEST, les amendements identiques nos126, 128 rectifié ter, 141, 235, 673 rectifié et 1684 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°131 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 341
Contre 0

Le Sénat a adopté.

Les amendements identiques nos126, 128 rectifié ter, 141, 235, 673 rectifié et 1684 deviennent un article additionnel.

(Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains)

TITRE PREMIER A (Dispositions liminaires)

M. le président.  - Amendement n°1039, présenté par M. Dantec et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Rédiger ainsi cet intitulé :

Soutenir l'action des collectivités territoriales

M. Ronan Dantec.  - Avec l'adoption des amendements précédents, nous avons passé un message puissant.

Je remercie Marta de Cidrac d'avoir accepté, en commission, un amendement important, qui - je l'espère - survivra à la commission mixte paritaire pour enfin mettre en place une dotation climat pour les collectivités territoriales, comme nous l'avons si souvent voté au Sénat à l'unanimité ou presque. Mme Lavarde s'en souvient.

Nous ne pouvons pas atteindre les 40 % sans la mobilisation des collectivités territoriales car la moitié des émissions de GES sont en lien avec la vie quotidienne des Français : se loger, s'alimenter, se déplacer, tous aspects qui doivent être coordonnés par les collectivités.

Les territoires ayant fait des efforts obtiennent déjà des résultats. C'est le cas de Nantes Métropole.

Une dotation climat adossée aux plans Climat air-énergie territoriaux (PCAET) et aux Sraddet doit être mise en oeuvre, avec une recette allant directement aux territoires. Cet amendement est rédactionnel et complète le précédent.

M. le président.  - Amendement n°2210, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :

Financer une écologie de l'intelligence territoriale

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Cet amendement a le même objectif que le précédent mais un autre intitulé. Les trois rapporteurs proposent le titre suivant : Financer une écologie de l'intelligence territoriale.

Avis défavorable à l'amendement n°1039.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - L'action des collectivités territoriales est essentielle. Les deux tiers de la stratégie nationale bas carbone nécessitent une action locale ou un soutien à celle-ci.

Mais nous préférons les entrées thématiques retenues par la CCC, et non des entrées par acteurs. Avis défavorable aux deux amendements.

Le Gouvernement s'est engagé à soutenir les actions des collectivités territoriales par divers financements tels que les contrats de relance écologique.

Même si nous ne déposons pas d'amendement de suppression pour laisser le débat se dérouler, le Gouvernement n'est pas favorable à l'article premier A.

M. Ronan Dantec.  - C'est une demande ancienne des collectivités territoriales : 10 euros par habitant pour les PCAET et 5 euros par habitant pour les Sraddet correspondent à l'analyse de leur coût d'animation.

La compétence du PCAET a été créée, rendue obligatoire pour les intercommunalités, sans aucun financement. C'est une charge sans recette correspondante.

« Pourquoi pas les bonnets rouges ? », nous avait rétorqué Gérald Darmanin, en riant. Quelques mois plus tard, nous avons eu les gilets jaunes, faute d'explications des modalités de mise en oeuvre des normes environnementales.

Il est temps de mettre enfin en oeuvre ces financements de fonctionnement, qui constituent une vraie opportunité pour être vraiment volontariste. Tous les réseaux de collectivités territoriales soutiennent ce dispositif. Ne ratez pas cette vraie grande occasion.

Comme j'ai eu le plaisir de voir mon amendement adopté en commission, je retire celui-ci. (M. Joël Labbé applaudit.)

L'amendement n°1039 est retiré.

M. Bernard Jomier.  - Je partage les objectifs de ces amendements, mais j'ai du mal à comprendre la rédaction du second. Que signifie-t-elle ? L'écologie « par » l'intelligence territoriale, et non « de » l'intelligence territoriale aurait plus de sens. L'amendement de MDantec me semblait plus clair.

M. Jean-François Longeot, président de la commission.  - Il est retiré !

Mme Christine Lavarde.  - Je me souviens très bien de l'amendement évoqué par M. Dantec, le premier que j'ai défendu dans cet hémicycle. Le Gouvernement nous renvoie toujours à plus tard. D'abord, c'était à la loi de financement des collectivités territoriales, que nous attendons toujours et qui ne sera pas pour ce quinquennat. Ensuite, Emmanuelle Wargon m'a promis les contrats de transition écologique, qui ont disparu avant d'être repris dans les contrats de relance et de transition écologique (CRTE).

Nous souhaitons inscrire dans le texte que les collectivités territoriales sont les acteurs les plus proches des citoyens pour mettre en oeuvre l'écologie. Pour rénover leur parc immobilier vétuste, par exemple, elles ont besoin de financements. Certes, l'État en fournit, mais il faut passer par des appels d'offres compliqués.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Je remercie M. Dantec du retrait de son amendement, qui portait seulement sur le soutien aux collectivités territoriales. Notre intitulé fait mieux le lien entre l'article premier et les actions des territoires.

M. Franck Montaugé.  - Qu'est-ce que « l'intelligence territoriale » ? Quelqu'un peut-il me l'expliquer ?

L'amendement n°2210 est adopté et le titre premier A est ainsi rédigé.

ARTICLE PREMIER A

Mme Marie-Claude Varaillas .  - Le groupe CRCE avait déposé un amendement n°142 portant moratoire sur la baisse des effectifs des ministères. Il a malheureusement été déclaré irrecevable. Sans moyens, cette loi n'aura aucun effet.

Le CNTE s'est inquiété des faibles réductions de GES et a demandé davantage de moyens pour les services régionaux et départementaux de l'État et pour ses opérateurs comme l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).

Nous réitérons notre demande d'un rapport au Parlement pour 2022, évaluant le budget au regard des objectifs de la France en matière d'environnement et de biodiversité. Ce rapport doit intégrer les conséquences des coupes budgétaires et des baisses d'effectifs. Les moyens manquent en qualité et en quantité. À terme, toute l'expertise de l'État sera menacée. Dressons un bilan du dégraissage et tirons-en les conséquences. Il ne peut y avoir de réelle transition écologique sans les moyens correspondants. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST ; Mme Martine Filleul applaudit également)

L'article premier A est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier A

M. le président.  - Amendement n°770 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À compter du 1er janvier 2022, les articles du code général des impôts modifiés par l'article 31 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la même loi, à l'exception de l'article 885 U du même code, rétabli dans la rédaction suivante : 

« Art. 885 U.  -  1. Le tarif de l'impôt est fixé par la somme : 

« a) D'un tarif applicable à une fraction de la valeur nette taxable tel que disposé dans le tableau suivant :

« (en pourcentage)

« 

Fraction de la valeur nette taxable du patrimoine

Tarif applicable

N'excédant pas 800 000 €

0

Supérieure à 800 000 € et inférieur ou égale à 1 300 000 €

0,50

Supérieure à 1 300 000 € et inférieure ou égale à 2 570 000 €

0,70

Supérieure à 2 570 000 € et inférieure ou égale à 5 000 000 €

1

Supérieure à 5 000 000 € et inférieure ou Egale à 10 000 000 €

1,25

Supérieure à 10 000 000 € 

1,50

« b) De tarifs de référence applicables à la valeur nette taxable des placements financiers tels que disposés dans le tableau suivant :

« (en pourcentage)

« 

Type de placements financiers

Tarif applicable

Parts ou actions de société avec engagement collectif de conservation 6 ans minimum

1,29

Parts ou actions détenues par les salariés, mandataires sociaux et retraités

1,29

Autres valeurs mobilières (toutes les parts ou actions de sociétés dans lesquelles pas de fonction exercée : actions, FCP, Sicav, etc.)

1,13

Liquidités (CC, livrets, BT, épargne en tous genres)

0,95

Contrats d'assurance-vie

0,59

Titres ou parts de FIP, FCPI, FCPR reçus en contrepartie de la souscription au capital d'une PME

1,29

Droits sociaux de sociétés dans lesquelles le contribuable exerce une fonction ou une activité

1,29

 ».

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Face au dérèglement climatique, nous ne sommes pas tous égaux. Les inégalités climatiques se creusent et vont encore empirer. Des migrations climatiques se produiront inévitablement, en lien avec ces inégalités, sociales et géographiques. Ceux qui ont les moyens de se doter de climatiseurs ou de partir dans des lieux de villégiatures plus frais ne vivent pas de la même manière le réchauffement que ceux qui vivent au douzième étage d'une tour mal isolée.

Face à la pollution non plus, nous ne sommes pas égaux. Ceux qui subissent le moins le dérèglement sont ceux qui polluent le plus. Selon un rapport d'Oxfam de septembre 2020, les 1 % les plus riches de la planète polluent deux fois plus, à eux seuls, que les 50 % les plus pauvres. Ces inégalités vont croissant. En France, l'empreinte carbone moyenne d'un individu appartenant aux 10 % les plus riches est de 17,8 tonnes de CO2 par an contre 3,9 pour les 50 % les plus pauvres. Et l'écart est 13 fois plus important lorsqu'on compare les 1 % les plus riches aux 50 % les plus pauvres en France. (Marques d'agacement à droite)

Le Gouvernement doit disposer d'un outil de justice sociale et de responsabilisation des catégories sociales dont le bilan carbone est le plus élevé.

Cet amendement instaure un impôt sur la fortune basé sur l'empreinte carbone des ménages au patrimoine supérieur à 800 000 euros.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - N'accroissons pas davantage la pression fiscale dans un contexte de crise. (Exclamations indignées sur les travées du groupe CRCE) Le lien entre revenus et empreinte carbone n'est pas aussi simple que vous le dites. Tout dépend des choix de consommation, d'autant que certains biens vertueux pour l'environnement sont plus chers. Cet amendement ne nous satisfait ni sur le fond ni sur la forme. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - La rédaction ambiguë nous expose à une censure du Conseil constitutionnel : l'amendement laisse supposer que l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) est maintenu, créant une double taxation d'un même patrimoine. La formulation est source d'insécurité juridique et pose un problème d'égalité devant l'impôt. Avis défavorable.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°770 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°132 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption   92
Contre 251

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°859 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'instauration d'une taxe carbone aux frontières européennes, pour contribuer à la réindustrialisation des États membres et inciter à la décarbonation des industries dans le monde, figure parmi les principaux objectifs de la présidence française de l'Union européenne en 2022. Cette taxe carbone prend en compte les émissions liées au transport de marchandises.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Défendu.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Le mécanisme d'ajustement aux frontières européennes est une mesure pertinente que la France défendra pendant sa présidence de l'Union européenne. On ne peut que soutenir l'objectif, mais cet amendement constitue une injonction au Gouvernement, ce qui est contraire à la Constitution. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - L'instauration d'une taxe carbone figure parmi les principaux objectifs de la future présidence française de l'Union européenne : l'amendement est satisfait. Nous attendons la proposition législative de la Commission européenne à la mi-juillet. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°859 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°606 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing, Decool, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot et MM. Menonville, A. Marc et Capus.

Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 1er septembre 2022, puis tous les cinq ans, une loi de programmation détermine les objectifs et les priorités d'action de la fiscalité écologique.

Chaque loi prévue au premier alinéa précise :

1° Le périmètre des taxes environnementales ;

2° Les objectifs visés par cette fiscalité, en cohérence avec les objectifs prévus aux articles L. 110-1, L. 541-1 et L. 211-1 du code de l'environnement et L. 100-4 du code de l'énergie ;

3° Une trajectoire prévoyant les taux de chaque taxe environnementale pour une période d'au moins cinq ans. Elle indique à ce titre le montant des recettes anticipées pour chacune des taxes concernées, en tenant compte des différentes exemptions ;

4° Les grands principes d'affectation des recettes des taxes concernées, en cohérence avec les objectifs mentionnés au 2°, ces principes garantissent l'équité de la fiscalité écologique et la protection des ménages modestes et la territorialisation partielle de ces dispositifs.

M. Joël Guerriau.  - La fiscalité écologique, outil majeur de la transition écologique, s'est considérablement développée ces dernières années. La taxe carbone représente environ 8 milliards d'euros de recettes, la taxe générale sur les activités polluantes environ 450 millions.

Le mouvement des Gilets jaunes, qui a débouché sur la création de la CCC, s'est constitué en réaction à la hausse initialement prévue de la taxe carbone et a marqué un coup d'arrêt à son développement.

Pour un débat apaisé, cet amendement crée une grande loi de financement de la transition écologique dans une perspective de justice et d'efficacité.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - L'élaboration d'une loi-cadre sur la fiscalité écologique ne relève pas de la loi ordinaire. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Nous avons toujours privilégié la lisibilité et la progressivité au service d'objectifs clairement annoncés. Nous avons toujours fait preuve de transparence. De nouveaux documents budgétaires ont été créés dans le cadre du budget vert. Je vous invite à vous en saisir.

Cette loi quinquennale n'est pas nécessaire. Avis défavorable.

L'amendement n°606 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°772 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

I.  -  Après l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Afin de participer à l'effort de la nation pour lutter contre le réchauffement climatique et organiser l'adaptation face à ses effets dans un esprit de justice sociale, de contribuer au respect de la stratégie bas carbone mentionnée à l'article L. 222-1 B du code de l'environnement et de favoriser les investissements durables pour verdir l'économie, les entreprises qui distribuent plus de 10 millions d'euros de dividendes annuels, participent, chaque année, à l'effort de financement à la hauteur de 4 % et celles dont les dividendes sont inférieurs ou égaux à dix millions d'euros participent à hauteur de 2 %.

Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022, sous réserve de son adoption et des modalités déterminées en loi de finances.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Chapitre ...

Dispositions de programmation

Mme Raymonde Poncet Monge.  - D'après le dernier rapport d'Oxfam, Jeff Bezos pourrait, avec les bénéfices qu'il a réalisés pendant la crise sanitaire, verser 105 000 dollars à chaque employé d'Amazon tout en restant aussi riche qu'avant la pandémie. (Marques d'agacement à droite) Les grandes entreprises françaises ne font pas exception. Selon IHS Markit, elles devraient verser 52 milliards d'euros de dividendes en 2021. On nous serine qu'il n'y a pas d'argent magique. Voici un moyen d'en trouver ! (Applaudissements sur plusieurs travées du GEST)

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Cet amendement reprend une proposition de la CCC écartée par le Président de la République.

En période de crise, il n'est pas souhaitable d'alourdir la pression fiscale - encore moins de brouiller le message vis-à-vis des investisseurs étrangers. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - C'est une des trois propositions de la CCC rejetée par le Président de la République. Avis défavorable.

M. Ronan Dantec.  - Les 147 autres n'ont pas toutes été acceptées !

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°772 rectifié est mis aux voix par scrutin public

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°133 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 328
Pour l'adoption 92
Contre 236

Le Sénat n'a pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°1609, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I. - Alinéa 4

Après le mot :

affichage

insérer le mot :

unique

II. - Alinéa 8

Remplacer les mots :

ainsi que les modalités d'affichage retenues

par les mots :

pour établir l'affichage environnemental mentionné à l'article L. 541-9-9-1

III. -  Alinéa 12, première phrase

Remplacer les mots :

modalités d'affichage

par les mots :

de concevoir des modalités identiques d'affichage

M. Joël Bigot.  - Nous demandons que l'affichage environnemental soit un dispositif unique pour faciliter les comparaisons entre différents produits et services d'un seul coup d'oeil, conformément au rapport Dutruc du CESE.

Il est important d'envisager ce cadre unique dès le stade des expérimentations afin de pouvoir ajuster aussi bien les méthodologies que leur convergence. L'uniformité du futur affichage environnemental est indispensable pour la clarté de l'information.

C'est une mesure de simplification.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - Je partage l'esprit de cet amendement et le souhait de ses auteurs de donner accès aux informations en un seul coup d'oeil. Mais ne rigidifions pas le dispositif au stade de l'expérimentation. Laissons plusieurs modalités d'affichage.

Retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - C'est en effet un peu prématuré. Le but de l'expérimentation est justement de définir le meilleur affichage possible. Je suis allée voir celui de Décathlon. Des améliorations peuvent y être apportées. L'affichage peut aussi varier selon les types de produits, par exemple le textile ou l'alimentaire. Avis défavorable.

M. Joël Bigot.  - Tout le monde est d'accord sur l'esprit, mais j'entends que c'est prématuré.

L'amendement n°1609 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°1378, présenté par M. J. Bigot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 4

Supprimer les mots :

ou aux impacts environnementaux

M. Joël Bigot.  - Cet amendement rend obligatoire la prise en compte de critères sociaux dans l'affichage environnemental. La rédaction actuelle ne prévoit qu'une faculté, ce qui ne correspond pas aux attentes sociétales actuelles. Comment imaginer un affichage élogieux pour un produit fabriqué par des enfants ?

C'est aussi un moyen d'assurer une concurrence plus loyale. Il est indispensable de prendre en compte des critères humains dans la construction du nouvel affichage.

M. le président.  - Amendement n°766 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

ou aux impacts environnementaux et au respect de critères sociaux

par les mots :

, au respect de critères sociaux et des droits humains dans la production

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Les plus grandes entreprises françaises ont l'obligation, depuis 2017, d'établir un plan de vigilance des risques de violation des droits humains et environnementaux que leur activité et celle de leurs sous-traitants induisent. Or cette mesure législative n'est à ce jour pas respectée.

Le respect des critères sociaux et des droits humains ne saurait être une dimension facultative de l'information du consommateur.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure.  - L'affichage social est possible. L'amendement n°1378 compliquerait le déploiement de l'affichage environnemental alors qu'il faut aller vite. Les premiers travaux de méthode ont été engagés il y a plus de quinze ans. Encore une fois, ne rigidifions pas le dispositif. Retrait ou avis défavorable sur l'amendement n°1378.

Quant à l'amendement n°766 rectifié, il est satisfait. Les droits humains font bien partie des critères sociaux retenus. Retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre.  - L'article premier prévoit la possibilité d'étendre l'affichage aux critères sociaux. Ne le systématisons pas, car ce n'est pas toujours pertinent.

La France, pays pionnier en la matière, travaille activement à un plan pour éradiquer le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains.

Le Gouvernement a confié une mission à la plateforme nationale pour la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) de France Stratégie. Son rapport sera remis fin 2021. La loi ne saurait préjuger de ses résultats. Avis défavorable.

M. Joël Bigot.  - J'entends ces objections, mais n'oublions pas que la France est le pays des droits de l'homme. Les conditions de fabrication de certains produits m'interpellent. La transparence est nécessaire pour le consommateur.

L'amendement n°1378 n'est pas adopté.

L'amendement n°766 rectifié est adopté.

(Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Angèle Préville applaudit également.)

M. Jean-François Longeot, président de la commission.  - Les membres de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sont invités à se réunir à la suspension.