Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

M. le Président du Sénat, qui assiste à des obsèques, ne peut présider notre séance.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et du temps de parole.

Commission d'enquête sur les aides publiquesaux grandes entreprises

M. Fabien Gay .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe SER) Une soif de justice sociale et fiscale grandit. Deux idées sont majoritaires dans la population : côté recettes, la taxe Zucman, enterrée à l'Assemblée nationale par les droites et l'extrême droite coalisées ; côté dépenses, les 211 milliards d'euros d'aides aux entreprises identifiés par notre commission d'enquête, à Olivier Rietmann et moi - quatre fois le budget de l'éducation nationale !

Notre travail a été caricaturé : nous n'avons jamais proposé la suppression des aides publiques, qui sont des leviers économiques essentiels. Notre travail a aussi été invisibilisé : pas moins de vingt-six recommandations ont été adoptées à l'unanimité, préconisant plus de transparence dans une jungle de 2 267 dispositifs d'aide, leur conditionnement, leur suivi et leur évaluation.

Depuis, nous attendons une réaction du Gouvernement. Monsieur le Premier ministre, allez-vous enterrer notre rapport sans même nous recevoir, au mépris de votre engagement devant l'intersyndicale ? Ou soutenir nos amendements, voire une proposition de loi transpartisane ?

L'argent public n'est pas pour les actionnaires. ! À la suite de l'audition de ses dirigeants, d'un Complément d'enquête et de ma tribune dans Libération, Michelin s'est engagé à rembourser 4,3 millions d'euros qui n'ont jamais été investis sur le sol français. Pouvez-vous vous engager à ce que ce remboursement intervienne dans les meilleurs délais ? (Applaudissements à gauche et sur des travées du RDSE)

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique .  - Permettez-moi de saluer le travail de votre commission d'enquête - complet, rigoureux, médiatisé.

La France est le pays d'Europe qui aide le plus ses entreprises ; c'est aussi celui qui les taxe le plus. (M. Fabien Gay proteste ; M. Vincent Delahaye approuve.) La transparence doit être absolue, sur les aides comme sur la fiscalité.

Le Premier ministre m'a demandé de vous recevoir, avec Amélie de Montchalin, pour évoquer les recommandations de votre commission d'enquête.

Nous souhaitons renforcer la transparence sur la fiscalité et sur les aides le plus rapidement possible. Une plateforme dédiée aux petites aides existe déjà - c'est paradoxal, j'en conviens. Bientôt, toutes les aides apparaîtront sur cette plateforme.

Contrairement à ce que l'on entend parfois, l'immense majorité des aides est conditionnée : le crédit d'impôt recherche l'est à de l'investissement dans la recherche (exclamations ironiques sur les travées des groupes CRCE-K et SER) ; les allègements de charges, à de l'emploi.

Ce n'est pas tous les jours qu'une entreprise souhaite faire un chèque à l'État : nous travaillons avec Michelin pour mener ce dossier à bon port. (MM. François Patriat et Bernard Fialaire applaudissent.)

Libération de Cécile Kohler et Jacques Paris

Mme Olivia Richard .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Vincent Louault applaudit également.) Quel soulagement ! Hier, notre ambassadeur en Iran est allé chercher Cécile Kohler et Jacques Paris à la prison d'Evin, après 1 277 jours de captivité. Ces moments-là donnent un sens à la mission diplomatique, disait-il ce matin sur France Inter.

Ma gratitude va aux équipes de l'ambassade, notamment Pierre Cochard, son prédécesseur Nicolas Roche et le premier conseiller Rémy Bouallegue.

J'associe Ayda Hadizadeh, présidente du groupe d'amitié France-Iran de l'Assemblée nationale, à ma question : comment vont-ils ?

Après trois ans et demi de captivité dans des conditions inhumaines, Cécile et Jacques sont à l'abri à l'ambassade ; c'est l'aboutissement d'un travail diplomatique de longue haleine. Il n'y a plus de Français incarcérés en Iran.

Nos otages sont libres et en sécurité, mais en liberté conditionnelle. Nous partageons l'impatience de leurs proches. Quelles sont les prochaines étapes ? Peut-on lire dans cette libération le signal faible d'un dialogue plus constructif à venir avec le régime iranien ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Rachid Temal applaudissent également.)

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Merci d'avoir rendu hommage à notre ambassadeur, à son prédécesseur et à nos agents en poste à Téhéran. Je me suis entretenu ce matin avec Cécile Kohler et Jacques Paris. Je leur ai dit ma joie de les savoir en sécurité et en bonne forme. Je leur ai aussi fait part de l'immense élan de solidarité en France.

Ils m'ont chargé de transmettre leurs remerciements à tous celles et ceux qui se sont mobilisés pour que leur cause ne soit pas oubliée : aux agents du ministère, dont je salue le dévouement ; aux services de l'État qui ont contribué à ce résultat ; à tous les comités de soutien ; à vous-même, madame la présidente du groupe d'amitié, ainsi qu'à l'ensemble des parlementaires qui les ont soutenus.

C'est une très bonne nouvelle -  les conditions de leur détention étaient indignes. Mais ce n'est qu'une première étape avant leur libération définitive. Leur calvaire ne s'est pas arrêté à leur sortie de la prison d'Evin et ne s'arrêtera même pas à leur libération définitive au vu de ce qu'ils ont subi. Nous serons à leurs côtés.

Merci à vous et à tous celles et ceux qui les ont soutenus. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe UC et sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains)

COP et diminution de l'APD

M. Ronan Dantec .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Karine Daniel applaudit également.) La COP de Belém sera celle d'un accord sur le financement de l'action climatique mondiale ou ne sera pas.

Le Conseil de l'Union européenne du 21 octobre considère que les flux financiers doivent être compatibles avec l'accord de Paris. En avril, le Conseil présidentiel pour les partenariats internationaux a fait du financement des énergies renouvelables dans le monde la première priorité de notre aide publique au développement (APD).

Pourtant, madame la ministre, vous partez au Brésil avec un budget en contradiction absolue avec l'urgence climatique : l'APD a diminué de 2,5 milliards d'euros en deux ans -  dont 700 millions de coupes pour 2026 !

Hier, à Bruxelles, vous affirmiez que nous devions autant réduire nos émissions de CO2 qu'accompagner les pays du sud pour qu'ils réduisent les leurs. Or nous ne serons même pas capables de respecter les engagements financiers pris lors des COP précédentes !

Comment assumez-vous une telle contradiction ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Monique Barbut, ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature .  - La France est deuxième contributeur européen en matière d'APD et l'un des principaux contributeurs mondiaux de la finance-climat internationale.

M. Mickaël Vallet.  - On n'est pas la Lettonie, non plus !

Mme Monique Barbut, ministre.  - En 2024, nous avons mobilisé 7,2 milliards d'euros de financements-climat à destination des pays en développement, bien davantage que l'objectif de 6 milliards fixé par le Président de la République : nous tenons nos engagements financiers.

Au sein des financements-climat mondiaux, les financements publics sont par nature minoritaires, de l'ordre de 30 %. L'enjeu est aussi de mobiliser massivement des financements privés. C'est l'esprit du Pacte de Paris pour les peuples et la planète, conçu par le Président de la République en 2023.

Discutons aussi de financements innovants : quid d'une taxe carbone aux frontières dédiée au changement climatique ? (M. Yannick Jadot écarte les bras en signe de perplexité.)

Nous voulons faire de la finance-climat non pas une dépense, mais un levier au service d'une transition juste et solidaire. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

M. Ronan Dantec.  - L'an dernier, le Sénat avait trouvé un accord pour éviter le coup de rabot sur l'APD. Mais le Gouvernement d'alors ne l'a pas respecté. Monsieur le Premier ministre, soutenez rétroactivement cet accord de consensus, vous qui les prisez, et remettez les 700 millions d'euros dans le budget 2026 ! (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Didier Marie applaudit également.)

PLF et compétitivité des entreprises

M. Olivier Rietmann .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Depuis plusieurs semaines, une étrange hostilité se déchaîne contre les chefs d'entreprise, érigés en ennemis publics numéro 1, en profiteurs qui ne paieraient pas d'impôts ! (Protestations sur les travées du groupe CRCE-K)

Pour les punir, l'Assemblée nationale s'est lancée dans un catalogue de pénalités de plus de 43 milliards d'euros !

Mais d'où viennent les plus de 1 200 milliards d'euros de recettes fiscales et sociales redistribuées ? D'où viennent les investissements qui font l'emploi en France ? D'où viennent l'innovation et la prise de risque, garants de notre souveraineté face aux Chinois et aux Américains ? De nos entreprises, bien sûr !

M. Mickaël Vallet.  - Et des travailleurs, accessoirement !

M. Olivier Rietmann.  - Lundi, le choc : l'exécutif s'est engagé à transmettre au Sénat tous les amendements votés par les députés. Au-delà de l'étrangeté procédurale, comment ne pas voir dans cette annonce l'adhésion du Gouvernement à l'obsession fiscale et au discours anti-productif ? (Protestations sur plusieurs travées du groupe SER)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Incroyable !

M. Olivier Rietmann.  - Disons aux entreprises, haut et fort, que nous avons besoin d'elles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Si le projet de loi de finances n'est pas adopté à l'Assemblée nationale, vous engagez-vous à transmettre au Sénat un texte délesté de tous les amendements anti-entreprises ? (Protestations à gauche ; vifs applaudissements à droite)

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique .  - Un budget n'est pas juste un exercice comptable, c'est un exercice économique qui permet les autres politiques publiques, notamment de soutien à la compétitivité des entreprises. (M. Marc-Philippe Daubresse approuve.)

Jusqu'ici tout va bien : la croissance tient et la production industrielle a rebondi au mois de septembre. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Ne cassons pas la dynamique en cours.

M. Olivier Paccaud.  - Et Bruno Le Maire ?

M. Roland Lescure, ministre.  - Nous devons lever les incertitudes politiques, qui ont un effet sur l'économie, pour que nos entreprises continuent d'investir et d'exporter.

Le Premier ministre a fait un choix audacieux : laisser le débat se faire et ne pas recourir au 49.3. Les votes dépendent moins du Gouvernement qu'avant, mais nous donnons notre avis, comme je l'ai fait contre la taxe sur les multinationales.

Nous devons continuer à travailler ensemble pour aboutir à un budget sérieux et qui soutienne nos entreprises.

Laissons le débat se dérouler à l'Assemblée nationale, le Sénat le poursuivra ensuite. Ne préemptons pas les conditions du débat. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Fonds d'amorçage pour la reconstruction de Mayotte

Mme Salama Ramia .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Voilà bientôt un an que Chido frappait Mayotte. Les communes tirent la sonnette d'alarme, faute de toucher le fonds d'amorçage, pour la reconstruction des écoles notamment. Des notifications ont été reçues, mais toujours pas d'acompte : le non-paiement est la règle, et non l'exception.

À Mamoudzou -  96 millions d'euros de dégâts  - , la commune a demandé 9 millions d'euros pour la rénovation des écoles, mais seuls 2 millions ont été notifiés et pas un seul euro n'a été débloqué. Zéro !

Comment les communes se relèveront-elles dans ces conditions ? L'inquiétude grandit, d'autant que la saison cyclonique a débuté. Quelles sont les raisons de ce retard ? Quand l'État honorera-t-il ses engagements ? (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Anne-Sophie Patru, MM. Stéphane Demilly et Olivier Bitz applaudissent également.)

Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer .  - Je salue votre engagement et votre travail sur la loi d'urgence et sur la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.

De nombreux dossiers ont reçu un accord de principe : l'État s'est engagé à hauteur de 91 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 9 millions d'euros pour le ramassage des déchets.

J'ai entendu les critiques des maires sur les délais de validation et d'instruction. Les municipalités ont été accompagnées par la préfecture, mais des dossiers ont été modifiés et le manque d'ingénierie a ralenti le processus. Nous avons déjà autorisé 37 millions d'euros et versé 23,5 millions de crédits de paiement.

Oui, il faut faire plus, plus vite. Je veillerai à la bonne consommation de l'enveloppe avant la fin de l'année. Le soutien de l'État se poursuit avec 200 millions d'euros inscrits au budget 2026. (M. François Patriat applaudit.)

Comptes bancaires des candidats aux élections municipales

Mme Laure Darcos .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) J'exprime la solidarité du groupe Les Indépendants aux victimes de l'attaque survenue sur l'île d'Oléron et à leurs familles.

Au-delà de la polémique sur les règles relatives aux découverts bancaires, je vous alerte sur la vive inquiétude des candidats aux élections municipales. Tout candidat dans une commune de plus de 9 000 habitants doit ouvrir un compte de campagne. Or les banques pourraient facturer l'ouverture d'un compte entre 600 et 900 euros. Tel serait le prix à payer pour concourir à la vie démocratique de notre pays ! Cette pratique abusive ne trouve aucune justification.

Le rôle de la banque est négligeable, pour ne pas dire nul. Tout relève du mandataire financier, qui perçoit les recettes et règle les dépenses.

Les frais bancaires liés à la gestion de ces comptes sont considérés comme des dépenses électorales à prendre en compte dans le calcul du remboursement par l'État, à supposer que le candidat ait dépassé le seuil de 5 % des suffrages exprimés au premier tour.

La plupart des maires choisissent de se représenter en dépit des agressions qu'ils subissent et des ponctions financières croissantes dont font l'objet leurs communes, car ils ont l'intérêt général chevillé au corps.

Entendez-vous saisir la Fédération bancaire française afin que les banques harmonisent leurs pratiques et prélèvent des frais raisonnables ? Les citoyens doivent pouvoir concourir librement aux élections ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et CRCE-K, sur plusieurs travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique .  - (M. Rachid Temal s'exclame.) À l'approche des élections municipales et un an et demi après des élections législatives qui n'étaient pas nécessairement attendues par tous, votre question met au jour les difficultés relatives à l'ouverture des comptes de campagne, que j'ai pu constater moi-même lors de mes trois candidatures.

Le poste de médiateur du crédit aux partis politiques avait été créé en 2017 pour répondre aux difficultés rencontrées par des candidats ennuyés par des procédures trop lourdes ou -  je le découvre avec votre question  - par des frais exagérés. Or ce poste est actuellement vacant. Je m'engage à le pourvoir très rapidement.

Le bilan établi par l'ancien médiateur fait état de 1 500 dossiers traités en six ans, soit 250 par an. C'est beaucoup. Il relevait en revanche peu de problèmes d'ouvertures de comptes (Mme Cécile Cukierman proteste), car les banquiers connaissent les candidats locaux. (Protestations sur plusieurs travées)

En tout cas, ce n'est pas parce que l'État rembourse les frais qu'ils doivent être aussi élevés. Je rencontre prochainement la Fédération bancaire française et votre question fera partie des très nombreux sujets que j'évoquerai avec elle.

Enfin, j'y insiste, il n'y a pas de durcissement des conditions du découvert.

PLF et apprentissage

M. Christian Bilhac .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) L'apprentissage a fait ses preuves pour aider les jeunes à entrer dans la vie professionnelle et soutenir les entreprises. Nous avons progressé dans ce domaine, même si nous sommes encore loin de l'Allemagne.

Pourquoi un tel acharnement de la part du Gouvernement dans le projet de budget pour 2026 ? Depuis le 1er janvier, les coups de rabot s'accumulent : assujettissement à la CSG, contribution au remboursement de l'aide sociale, taxe de 750 euros pour les employeurs embauchant des apprentis de niveau Bac+3. Résultat : 6 000 apprentis en moins !

En outre, le PLFSS prévoit la suppression de l'exemption de cotisations salariales, soit une baisse de salaire net pouvant aller jusqu'à 187 euros pour les apprentis. Cela les placerait sous le seuil du revenu éligible pour la prime d'activité - c'est la double peine !

Pourtant, ces jeunes sont méritants. Avec un salaire mirobolant de 700 à 800 euros, les considérez-vous comme des nantis ?

Enfin vous supprimez l'aide de 500 euros pour obtenir le permis de conduire, pourtant indispensable en zone rurale : absence de justice sociale, et surtout, négation de la valeur travail.

Monsieur le ministre, maintiendrez-vous ces mesures déplorables ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Akli Mellouli applaudit également.)

M. David Amiel, ministre délégué chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État .  - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre du travail, retenu par l'examen du PLFSS à l'Assemblée nationale.

Le Gouvernement est très attaché à la politique en faveur de l'apprentissage, qui est une réussite. Ainsi, nous avons franchi le cap du million d'apprentis ; c'était impensable voilà quelque temps.

C'est un succès et un tremplin vers l'emploi souvent pérenne et bien payé, notamment dans l'industrie.

Après les dispositifs de soutien mis en oeuvre face aux crises, une réflexion doit être menée sur le soutien général à l'apprentissage. L'exonération d'impôt sur le revenu et l'exonération partielle de CSG sont maintenues.

Un débat se tiendra sur les exonérations de cotisations. Le Parlement s'en saisira. L'aide aux permis de conduire ne dépend pas des ressources ou des autres aides que les apprentis peuvent toucher. Comptez sur la détermination du Gouvernement pour soutenir l'apprentissage. Ces jeunes travaillent et se battent pour obtenir un emploi pérenne. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

M. Christian Bilhac.  - Je n'ai pas entendu que vous renonciez à ces mesures. Errare humanum est, perseverare diabolicum ! (On apprécie à droite ; applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

Dotations d'investissement pour les collectivités rurales

Mme Isabelle Briquet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) J'associe le groupe SER aux expressions de solidarité envers les victimes de la tentative d'assassinat survenue ce matin sur l'île d'Oléron.

Le Gouvernement annonce la création d'un fonds d'investissement pour les territoires (FIT). Meilleure lisibilité, mutualisation des moyens, simplification des procédures, est-il prétendu. Mais, en réalité, ce nouveau fonds fusionne trois instruments différents : la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation politique de la ville (DPV). Trois instruments différents, trois objectifs complémentaires, trois politiques publiques au service d'une même ambition : soutenir les territoires dans leur diversité.

Ne nous y trompons pas, cette fusion n'est qu'un moyen pour mieux les réduire. Ce sera le cas dès 2026. Les élus locaux redoutent une dilution des priorités et une disparition d'outils ciblés. Ils ont raison. Vous prenez le risque d'effacer ces spécificités et de substituer à des politiques lisibles un dispositif uniforme, centralisé et technocratique.

Déjà amputé de 200 millions d'euros à sa naissance, ce fonds aux obscurs critères d'éligibilité fera-t-il des territoires ruraux les grands perdants de votre réforme ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K ; M. Guy Benarroche applaudit également.)

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Merci de votre question, dont nous avons longuement parlé hier. Les collectivités territoriales représentent 70 % de l'investissement public. Nous les saluons.

Nous présentons un budget de responsabilité et de redressement.

M. Pascal Allizard.  - Sobriété !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Cela implique que l'on espère des jours meilleurs pour améliorer les services rendus à la fois par les collectivités et par l'État.

Le rassemblement dans une seule enveloppe de la DETR, de la DSIL et de la DPV répond à une demande de simplification des préfets et des associations d'élus. Vous qui siégez à la commission DETR, vous savez que nous sommes tous très heureux de bénéficier d'un peu de chacun des trois instruments.

Une voix au centre.  - C'est faux !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le montant de la DETR est maintenu dans ce fonds. Nous débattrons de tout cela.

Mme Isabelle Briquet.  - Je vous sais attentive à la ruralité. Vous saurez donc répondre aux associations d'élus qui sonnent l'alerte de la fin de la DETR. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

PLF

Mme Marie-Pierre Mouton .  - (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains) Je rends hommage à notre collègue Gilbert Bouchet, à qui j'ai l'honneur de succéder. (Applaudissements)

Votre projet de loi de finances (PLF) pour 2026, c'est la politique du sparadrap ! Plutôt que de soigner la plaie des dépenses, vous posez le sparadrap de l'impôt. C'est facile et commode, mais, dans un pays qui détient le record des prélèvements obligatoires, c'est dangereux. Près de la moitié de votre effort de consolidation repose sur des mesures fiscales, pas sur une baisse en valeur des crédits de l'État ni sur une vraie réforme des politiques publiques. Hergé nous avait mis en garde sur le sparadrap du capitaine Haddock... Il est impossible à enlever !

La contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) ne devait valoir que pour 2025, vous la reconduisez ; pareil pour la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises (CEBDGE), pareil pour le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), puisque nous avons le droit cette année au Dilico 2... Le sparadrap éphémère colle toujours autant !

Quand soignerez-vous la plaie, c'est-à-dire la dépense, au lieu de masquer l'hémorragie par de nouveaux impôts ? (Applaudissements et bravos sur les travées des groupes Les Républicains et sur quelques travées du groupe U; Mme Laure Darcos applaudit également ; Mme Silvana Silvani s'exclame.)

M. David Amiel, ministre délégué chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État .  - Regardons le chemin parcouru (murmures sur les travées du groupe Les Républicains) : entre 2017 et 2025, le taux de prélèvements obligatoires baisse de 35 milliards d'euros, autant d'argent pour les ménages et les entreprises ; l'écart entre les impôts payés en Allemagne et en France a diminué d'un tiers, du jamais vu.

L'effort proposé par le Gouvernement porte majoritairement sur les dépenses. L'effort demandé à l'État est historique. Nous proposons de poursuivre les baisses d'impôts de production - ainsi de la CVAE, qui percute de plein fouet notre industrie.

M. Yannick Jadot.  - Et les collectivités ?

M. David Amiel, ministre délégué.  - Le débat se poursuit au Parlement. Certains amendements déposés par LFI et le RN, à la volonté politique bien connue, sont contraires à la Constitution et au droit de l'Union européenne. Les mesures conformes au droit européen et à la Constitution ne font pas augmenter les impôts. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Marie-Pierre Mouton.  - Ne méprisez pas les remèdes à la folie fiscale proposés par le rapporteur général Jean-François Husson (on renchérit à droite ; on ironise à gauche) et par Christine Lavarde, qui a accompli un travail remarquable sur la réorganisation des opérateurs et agences de l'État. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Manque d'AESH

Mme Marie-Pierre Monier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La loi Handicap a vingt ans. Un bel anniversaire, qui s'accompagne, hélas, d'un triste chiffre : à la rentrée de septembre, près de 50 000 enfants étaient sans accompagnant d'élève en situation de handicap (AESH), malgré la notification de leur situation.

Selon la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les défaillances de prise en charge du handicap, 14 % des enfants ne bénéficient pas de l'accompagnement auquel ils ont droit, un tiers de plus que l'an dernier. Nous ne tenons pas la promesse de 2005.

Or les conséquences sont graves : une AESH qui manque - ce sont à 90 % des femmes - signifie de mauvaises conditions d'apprentissage pour les enfants concernés et des classes difficiles à gérer. Budget après budget, nous relayons les alertes des parents, des personnels éducatifs, des élus locaux et des AESH elles-mêmes. Le manque d'effectifs rend également difficile l'application de la loi Vial sur l'accompagnement pendant le temps méridien.

On a du mal à recruter, dites-vous. Cessez donc de payer les AESH en dessous du seuil de pauvreté, formez-les et donnez-leur un statut !

Le temps des rapports est fini : il faut agir, pour que chaque enfant bénéficie de l'accompagnement dont il a besoin et que nous lui avons promis. (Applaudissements à gauche)

M. Edouard Geffray, ministre de l'éducation nationale .  - Nous partageons l'objectif : tout enfant de la République doit avoir un parcours scolaire qui lui permette d'aller au bout de ses potentialités.

Ces dernières années, nous avons créé un service public de l'école inclusive : les AESH sont devenus le deuxième métier de l'éducation nationale. Il y a désormais autant d'enfants en situation de handicap dans le second degré que dans le premier - nombre d'entre eux vont jusqu'au baccalauréat, ce dont témoigne le nombre croissant d'aménagements de l'examen.

Mme Colombe Brossel.  - Et la question ?

M. Edouard Geffray, ministre.  - Reste l'enjeu de l'accompagnement humain des enfants. Même s'il n'en restait qu'un sans accompagnement, ce serait une situation humaine problématique de trop.

Le nombre de prescriptions augmente de 10 % par an : nous courons donc après ce phénomène, avec des situations territoriales et des viviers très variables. À la veille des vacances de Toussaint, 42 000 enfants n'étaient pas accompagnés. Nous continuerons de faire baisser ce nombre.

Nous prévoyons 1 200 postes supplémentaires d'AESH dans le budget pour 2026, et les créations se poursuivront sans doute les années suivantes. Mais nous devons aussi réfléchir au juste équilibre entre accessibilité et compensation, et probablement retravailler l'ensemble de la prise en charge de ce point de vue. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

Mme Marie-Pierre Monier.  - Nous parlons d'enfants en souffrance, de familles mises en difficulté, de mères souvent obligées d'arrêter de travailler. La clé, c'est la titularisation des AESH ! (Applaudissements sur de nombreuses travées à gauche et sur des travées du RDSE ; Mmes Nadia Sollogoub et Jocelyne Antoine applaudissent également.)

Protoxyde d'azote (I)

M. François Bonhomme .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a quelques jours, à Lille, Mathis a été tué par un chauffard multirécidiviste conduisant sous l'emprise du protoxyde d'azote, mis en examen pour homicide routier avec refus d'obtempérer et délit de fuite.

Ce n'est pas un fait divers. Chacun peut se procurer facilement du protoxyde d'azote sur internet, alors que la vente de ce produit est interdite aux mineurs. Le marché parallèle est alimenté par des réseaux de trafiquants étrangers qui exploitent une faille juridique : ils prétendent stocker des bouteilles à l'usage de la pâtisserie.

Deux propositions de loi ont été votées, l'une au Sénat, l'autre à l'Assemblée nationale, mais aucune n'a été inscrite à l'ordre du jour de l'autre chambre. Allez-vous enfin inscrire ces textes à l'ordre du jour du Parlement ? Comment comptez-vous lutter efficacement contre la vente de cette substance dangereuse ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe INDEP)

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - La mort du jeune Mathis, fauché par un chauffard à Lille, est un drame absolu ; il aurait fêté ses 20 ans aujourd'hui.

Un équipage de policiers a aperçu le conducteur circulant à vie allure et consommant du protoxyde d'azote. Il s'est, en outre, rendu coupable d'un refus d'obtempérer ? avec Laurent Nunez, nous serons intransigeants pour lutter contre ce phénomène.

Je sais que les deux chambres ont travaillé sur la question du protoxyde d'azote. Nous continuerons d'avancer pour lutter contre ce fléau, avec l'appui des parlementaires. (MM. François Patriat et Jean-Baptiste Lemoyne applaudissent ; marques d'insatisfaction sur de nombreuses travées.)

M. le président.  - Un peu d'attention, mes chers collègues, par égard pour la famille de la jeune victime.

M. François Bonhomme.  - Votre réponse est déplorative et décorative. Ce fléau n'est pas nouveau, et nous connaissons bien les conséquences de cette substance de même que les circuits utilisés par les trafiquants. Le volet préventif ne suffit pas, il faut combler la faille juridique. Nous attendons un interdit clair et une réponse pénale efficace. Hélas, il y a pire que l'absence de réponse : c'est ce simulacre de réponse...

Protoxyde d'azote (II)

M. Guislain Cambier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je reviens sur ce sujet. Le ministre de l'intérieur était dans le Nord avant-hier, à la suite du drame qui a coûté la vie à Mathis. Nous pensons à sa famille et à ses amis. La justice est saisie, je souhaite qu'elle soit particulièrement sévère avec le chauffard.

Ce drame met à nouveau en lumière l'usage détourné du protoxyde d'azote à des fins psychoactives, un fléau connu depuis une décennie. Une première proposition de loi, déposée par Valérie Létard, a été adoptée par notre assemblée. D'autres textes sont en cours d'examen.

Mais le Parlement mène ce combat seul : aucun gouvernement ne s'est emparé du sujet ! C'est d'autant plus choquant que nous parlons d'un fléau pour la santé publique, mais aussi pour l'environnement - les cartouches explosent dans les incinérateurs et les endommagent - et pour l'ordre public, notamment la sécurité routière.

Alors qu'un jeune sur dix a déjà consommé du protoxyde d'azote, dont la moitié au volant, le Gouvernement va-t-il enfin s'emparer du sujet ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains)

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur .  - Je vais préciser ma réponse.

Je le redis, le refus d'obtempérer est un fléau : le Gouvernement entend agir fermement sur ce point.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce n'est pas la question !

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée.  - L'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi d'Idir Boumertit et votre assemblée celle d'Ahmed Laouedj pour pénaliser la consommation détournée de protoxyde d'azote. Le Sénat a prévu de sanctionner aussi la détention et le transport du matériel d'extraction de ce gaz.

En outre, nous devons donner aux préfets la possibilité de prononcer une fermeture administrative des commerces ne respectant pas les règles.

Le Gouvernement sera pleinement engagé à vos côtés. (Marques de scepticisme sur de nombreuses travées)

M. François Bonhomme.  - C'est la même fiche !

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée.  - Nous travaillerons aussi avec la DGCCRF.

M. Guislain Cambier.  - Allons au bout du travail ! Réunissez rapidement les députés et sénateurs qui ont travaillé sur le sujet, dont Isabelle Florennes et Jean-François Longeot. Comme les Pays-Bas, interdisons la vente des capsules aux particuliers et l'usage de ce produit au volant ! (« Bravo ! » et applaudissements sur de nombreuses travées)

Déremboursement des cures thermales

M. Jean-Marc Boyer .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Une cure thermale, ce n'est pas trois semaines de vacances au frais du contribuable. Les curistes sont des patients qui souffrent, et une soixantaine d'études cliniques prouvent l'efficacité de la médecine thermale.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Absolument !

M. Jean-Marc Boyer.  - L'année dernière, le remboursement des cures a coûté 244 millions d'euros, soit 0,1 % des dépenses d'assurance maladie.

Le Gouvernement parle de révision du niveau de prise en charge plutôt que de déremboursement, mais le résultat serait le même : des patients ne seraient plus soignés.

La baisse du taux de remboursement de 100 à 65 % pour les patients en affection de longue durée, et celle des forfaits thermaux de 65 à 15 %, ferait économiser 200 millions d'euros, dites-vous. Mais vous faites un mauvais calcul. Vous fragiliseriez les 88 stations thermales, essentiellement rurales, accroîtriez le recours aux médicaments et perdriez 212 millions d'euros de taxes et cotisations liées aux 25 000 emplois et 4,8 milliards d'euros de retombées économiques du secteur. Bref, en tapant sur les patients, vous risquez d'appauvrir les territoires, et finalement, l'État.

Non, la France n'est pas le dernier pays européen à rembourser les cures thermales ! Certains même les prennent mieux en charge.

Quand cesserez-vous de taper inutilement et injustement sur les cures thermales ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Gisèle Jourda et MM. Hussein Bourgi, Jean-Baptiste Lemoyne et Marc Laménie applaudissent également.)

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Un projet de décret revient sur le remboursement intégral des cures thermales pour les patients en affection de longue durée ; M. Anglars m'a interrogée hier matin sur le sujet.

La France est l'un des derniers pays de l'OCDE à rembourser ces cures.

M. Jean-Marc Boyer.  - C'est faux !

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée.  - La dépense se monte à 200 millions d'euros pour l'assurance maladie. La Cnam a préconisé un déremboursement partiel.

Un déremboursement, ce n'est pas notre proposition : le reste des dépenses pourra être pris en charge par les complémentaires santé.

L'examen du PLFSS a débuté à l'Assemblée nationale. Sur ce sujet comme sur d'autres, le Gouvernement avance des propositions ; le Parlement débat et votera.

Shein

M. Hussein Bourgi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le Premier ministre, depuis le week-end dernier, les Français, médusés, estomaqués, découvrent que des entreprises vendent sur le territoire national des poupées pédopornographiques. (Huées à droite) La mondialisation et l'ubérisation du commerce génèrent ce qu'il y a de plus hideux, de plus scabreux. La pédopornographie est l'antichambre de la pédocriminalité. Que comptez-vous faire pour sanctionner les auteurs de ces infractions, ceux qui vendent et ceux qui achètent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Serge Papin, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, du tourisme et du pouvoir d'achat .  - Nous ne les laisserons pas faire. (Applaudissements sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

M. Serge Papin, ministre.  - Après les poupées à caractère pédopornographique, ce sont désormais des armes qui sont en vente sur Shein - l'une a servi à l'assassinat du jeune Elias, dans le 14e arrondissement de Paris, le 26 janvier dernier.

Si une plateforme veut vendre en France, elle doit respecter nos règles, nos normes, nos valeurs. Il faut dire non au Far West numérique.

Nous agissons. Sur instruction du Premier ministre, le Gouvernement engage la procédure de suspension de Shein. (Applaudissements, des travées du groupe SER aux travées du groupe Les Républicains)

Nous mesurons le temps nécessaire à la plateforme pour démontrer que ses contenus sont en conformité avec nos lois, et ferons un point d'étape dans 48 heures. Tous les services de l'État sont mobilisés pour intensifier les contrôles. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Hussein Bourgi.  - J'attendais de votre part trois réponses.

La première, vous l'avez apportée. J'avais été troublé par les propos du ministre de l'économie, qui hier semblait tergiverser. (M. Roland Lescure le conteste.)

Nous sommes pour la tolérance zéro en matière de pédocriminalité. (Applaudissements) Vous suspendez enfin le site, j'en prends acte avec satisfaction.

J'attendais aussi une réponse sur les actions initiées en matière policière et judiciaire. Avez-vous demandé communication de l'identité des clients ? Il y aurait parmi eux des récidivistes, déjà condamnés.

J'attendais enfin une réponse sur les initiatives que le ministre de l'Europe compte prendre avec ses homologues pour agir à l'échelle de l'Union européenne.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée.  - Très bien !

M. Hussein Bourgi.  - Chaque société se construit sur des principes et des interdits.

Mme Sophie Primas.  - Il n'est pas interdit d'interdire ?

M. Hussein Bourgi.  - Ces interdits protègent les plus fragiles. Le droit doit être le bouclier qui protège les enfants et le glaive qui combat leurs prédateurs. (Applaudissements)

Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)

M. Daniel Gremillet .  - Monsieur le Premier ministre, la loi portant programmation pluriannuelle de l'énergie, la PPE, aurait dû être adoptée il y a deux ans. Face au retard pris, le Sénat a déposé une proposition de loi en avril 2024 ; nous attendons toujours son examen en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Hier, le ministre Lescure affirmait que le sujet était « au sommet de la pile » ? mais le récent courrier du ministre des relations avec le Parlement qui liste les priorités des quatre prochains mois n'en fait pas mention.

Vos prédécesseurs Michel Barnier et François Bayrou s'étaient engagés à ne pas publier la PPE par décret, mais à laisser la navette parlementaire se poursuivre. Et vous ? Quelles sont vos intentions ? Quel calendrier et quelle méthode envisagez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP.)

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique .  - Merci de votre travail sur ce sujet important, monsieur le sénateur.

En février 2022, le Président de la République a prononcé à Belfort un discours que la majorité d'entre vous, je crois, partage : relance d'un ambitieux programme nucléaire, avec six nouveaux réacteurs ; engagement fort sur les énergies renouvelables, dont l'éolien marin.

Au gré des vicissitudes de la vie politique, on a oscillé entre décret et proposition de loi. J'étais ministre de l'énergie, je n'ai pas eu le temps de publier le décret prévu.

M. François Bonhomme.  - On n'a pas le temps de suivre !

M. Roland Lescure, ministre.  - L'essentiel, désormais, est d'avancer. Dès le début 2026, nous devons lancer les appels d'offres sur l'éolien marin et commencer les travaux sur le nouveau nucléaire.

Mon équipe contactera les parlementaires les plus investis, dont vous êtes, pour un échange informel, puis nous reviendrons devant la représentation nationale pour proposer une stratégie afin d'avancer vite et bien. Ce sera en tout état de cause à l'automne.

M. Daniel Gremillet.  - Oui ou non, est-ce le Parlement qui conduira le débat à son terme ? (M. Yannick Jadot s'exclame.) Le Premier ministre a renoncé à l'article 49.3 de la Constitution pour faire vivre le débat budgétaire à l'Assemblée nationale. Ferez-vous également confiance au Parlement sur la PPE ? Allez-vous enfin donner une trajectoire énergétique à la France, alors que la bataille économique mondiale fait rage ? En matière d'énergie, nous vivons sur les décisions du passé ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi que sur plusieurs travées du RDSE)

M. Guy Benarroche.  - Le nucléaire, c'est le passé !

Avenir de Novasco

M. Jean-Marie Mizzon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) À ce rythme, nous n'aurons plus besoin d'un ministre de l'industrie, car il n'y en aura plus en France. (M. Alain Houpert applaudit.) On ne parle que de réindustrialiser - mais sans protéger le peu d'industrie qui nous reste !

Notre sidérurgie se meurt. Les sites de Novasco, ex-ArcelorMittal, vont fermer les uns après les autres. C'est le cas chez moi en Moselle, à Hagondange, où 450 emplois pourraient disparaître dès la semaine prochaine, mais aussi dans la Loire, le Nord et en Meurthe-et-Moselle.

Novasco connaît son quatrième redressement judiciaire en onze ans, car l'État, refusant d'entrer au capital, a privilégié comme repreneurs des financiers plutôt que des capitaines d'industrie : en 2024, Greybull Capital, un fonds d'investissement britannique, plutôt que Venete, un industriel italien sérieux.

Novasco est une entreprise à préserver : écologique, car elle recycle l'acier, moderne, car elle tourne à l'électricité, stratégique. Toutes les grandes puissances du G7 ont une industrie sidérurgique. Allez-vous enfin agir pour sauver la sidérurgie française ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique .  - Depuis huit ans, on a créé plus d'usines qu'on en a fermées ; on a créé 130 000 emplois industriels, alors que des millions avaient été détruits auparavant. (M. Laurent Somon en doute.) Nous devons amplifier, accélérer cette politique de réindustrialisation - ne l'oubliez pas lors de l'examen du budget.

Nous devons aussi agir en Européens, en faisant aboutir la clause de sauvegarde de l'industrie, cruciale pour sauver nos aciéries.

J'étais ministre de l'industrie quand la reprise d'Ascometal a été organisée en 2024. Il y a eu de bonnes nouvelles : Marcegaglia a repris les activités de Fos-sur-Mer, sauvant 300 emplois. Et de moins bonnes : le fonds Greybull n'a pas respecté ses engagements. J'ai demandé qu'on regarde cela de près.

L'essentiel, aujourd'hui, est de sauver les sites et les territoires. Deux offres de reprise seront examinées par le tribunal le 12 novembre prochain. Bercy travaille avec les repreneurs potentiels ; nous serons particulièrement sensibles au traitement réservé aux salariés et aux territoires. Sébastien Martin suivra le dossier directement.

La séance, suspendue à 16 h 15, reprend à 16 h 30.