Lutte contre les fraudes sociales et fiscales (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Après l'article 5 (Suite)
M. le président. - Amendement n°129 rectifié quater de Mme Imbert et alii.
Mme Corinne Imbert. - L'article 88 de la LFSS pour 2025 prévoit, à partir du 1er janvier 2028 le recours à la biométrie pour contrôler l'existence des bénéficiaires d'une pension de vieillesse d'un régime de retraite obligatoire résidant en dehors du territoire national. Ajoutons aux moyens dérogatoires prévus le recours à des autorités locales - mairies, commissariats, notaires - agréées par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Vous semblez anticiper que la solution biométrique ne sera pas prête en 2028. Suivons plutôt les avancées du projet. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. - Avis favorable. La solution biométrique est en cours de généralisation, mais elle ne peut pas être le seul moyen de preuve.
Mme Pascale Gruny. - L'an dernier, j'ai travaillé l'amendement « biométrie » avec le Gouvernement, et vous revenez déjà dessus ? Connaissez-vous l'histoire des notaires roumains ? Quand le Président Sarkozy a souhaité renvoyer des Roms chez eux, il leur a suffi de changer de nom devant un notaire pour revenir...
M. Olivier Henno, rapporteur. - La commission est attachée à la biométrie ; n'y renonçons pas déjà !
L'amendement n°129 rectifié quater n'est pas adopté.
Article 6
M. le président. - Amendement n°242 rectifié de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Supprimons les dispositions permettant aux MDPH et aux services instruisant les dossiers d'APA de transférer les données personnelles. Les MDPH sont des lieux d'écoute et de droit, pas de contrôle. La fraude dans le champ du handicap et de la dépendance est marginale - moins de 0,3 % des prestations, c'est infime.
Les MDPH souffrent d'un manque cruel de moyens. Les agents sont épuisés, les dossiers s'accumulent ; au lieu de les aider, ce texte les charge de nouvelles tâches de contrôle.
L'augmentation du coût de l'AAH de 400 millions d'euros par an entre 2007 et 2017 est non pas liée à des abus, mais à une meilleure reconnaissance du handicap, notamment depuis la loi de 2005.
Les risques de violation du secret médical, de non-recours et de stigmatisation sont réels.
M. le président. - Amendement n°34 rectifié quater de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - L'article 6 autorise les MDPH et les services instruisant les dossiers d'APA à échanger des informations avec leurs partenaires. Étendons le dispositif à l'ensemble des prestations versées par les départements - prestation de compensation du handicap (PCH), aides sociales à l'hébergement, aides ménagères, etc.
M. le président. - Amendement n°120 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Le contrôle ne relève pas des missions des MDPH. De plus, il faudrait former et habiliter les agents... C'est hors sujet !
M. le président. - Amendement n°288 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
M. Olivier Henno, rapporteur. - L'amendement n°288 est rédactionnel.
Avis défavorable aux amendements nos242 rectifié et 120 : pourquoi les prestations de la branche autonomie ne seraient-elles pas concernées par la lutte contre la fraude ? Cette extension est plébiscitée par les directeurs de MDPH et un récent rapport de l'IGF nous y invite.
Avis favorable à l'amendement n°34 rectifié quater.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. - Avis favorable à l'amendement n°288. Avis défavorable aux amendements nos242 rectifié et 120. Nous avons engagé un travail pour réduire la charge de travail des MDPH. Le PLFSS prévoit des renforts d'effectifs en leur sein, notamment pour l'accueil des primo-demandeurs. Il est nécessaire d'embarquer les MDPH dans la lutte contre la fraude sociale.
S'agissant de l'amendement n°34 rectifié quater, l'essentiel des prestations étant déjà concerné, mon avis est plus réservé : retrait ?
Mme Marion Canalès. - Chaque année, 10 milliards d'euros de prestations sociales ne sont pas réclamés par des personnes éligibles. Pourquoi vouloir faire des économies sur les prestations sociales ? L'étude d'impact nous apprend que nous ne sommes pas en mesure de chiffrer la fraude aux prestations de la branche autonomie - on navigue à vue. Selon le HCFiPS, 20 millions d'euros seraient recouvrables.
Ce sont les allocataires que l'on vise. On chasse les mouches au bazooka alors qu'il n'y a que 1 070 indus d'AAH...
Mme Céline Brulin. - Vous regardez la puce sur le dos de l'éléphant... Le problème des MDPH, ce n'est pas la fraude, c'est qu'elles ne répondent pas en temps et en heure aux demandes. Y a-t-il un département en France où l'on décide en moins de quatre mois, délai réglementaire ? (Mme Pascale Gruny le confirme.) Chez moi, en Seine-Maritime, c'est 8,3 mois en moyenne !
Vous détournez les yeux des méga fraudes fiscales, en vous concentrant sur les petites, et ne donnez aucun moyen aux organismes pour assurer les missions qui leur sont confiées.
M. Jean-Luc Fichet. - Les MDPH sont en surcharge. Dans le Finistère, le président du conseil départemental a réussi à réduire le délai de traitement des dossiers de dix à huit mois.
M. Michel Canévet. - Trois mois !
M. Jean-Luc Fichet. - Non, c'est huit mois.
On fait les fonds de tiroir. Je voterai cet amendement.
L'amendement n°242 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°34 rectifié quater est adopté.
L'amendement n°120 n'est pas adopté.
L'amendement n°288 est adopté.
L'article 6, modifié, est adopté.
Après l'article 6
M. le président. - Amendement n°35 rectifié ter de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - Les prestations sociales soumises à une condition de résidence en France doivent être versées sur des comptes bancaires ouverts en France ou dans la zone Sepa (espace unique de paiement en euros). Mais tel n'est pas le cas de certaines aides sociales versées par le département. Étendons l'application de cette règle à ces dernières.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Avis favorable à cet amendement qui répond à une incohérence du droit.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. - Sagesse, mais ces prestations supposent une résidence effective sur le territoire.
L'amendement n°35 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°131 rectifié bis de Mme Demas et alii.
M. Jean-Marc Delia. - Cet amendement permet aux fonctionnaires chargés de la lutte contre le travail illégal au sein de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) d'échanger librement des informations avec les autres administrations concernées.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. - Même avis : la DGAC souhaite renforcer son action de lutte contre la fraude aux règles du détachement de salariés, le recours à de faux pilotes indépendants ou encore le défaut de déclaration d'activités de compagnies aériennes, entre autres.
L'amendement n°131 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
Article 7
M. Marc Laménie . - Cet article rend obligatoire la géolocalisation des taxis conventionnés. Prises en charge par l'assurance maladie, les dépenses de transport sanitaire se sont élevées en 2024 à 6,74 milliards d'euros, soit une hausse de 43 % depuis 2016.
Les rapports ont mis en évidence deux exigences : modérer les dépenses du transport sanitaire et donner une base légale à la géolocalisation.
Notre groupe votera cet article.
M. le président. - Amendement n°103 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous sommes pour la géolocalisation et ce système de facturation intégrée. Mais ces dispositions existent déjà dans la convention-cadre signée avec la Cnam. N'allons pas court-circuiter le dialogue conventionnel entre l'assurance maladie et les professionnels, et rigidifier un cadre qui relève du champ contractuel.
Aucun argument probant n'a été avancé en commission pour justifier de légiférer. La lutte contre la fraude ne saurait justifier cette atteinte au principe de dialogue conventionnel. Supprimons l'article 7.
M. Olivier Henno, rapporteur. - L'enjeu est considérable : en huit ans, la dépense a plus que doublé, passant de 3 à 6,7 milliards d'euros. Ces deux mesures vont dans le sens d'une meilleure facturation des dépenses de transport sanitaire. La commission a soutenu cette disposition lors de l'examen du PLFSS pour 2025. Avis défavorable.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. - Avis défavorable pour les mêmes raisons que le rapporteur. Ces mesures figurent déjà dans la convention, mais c'est à titre indicatif ; il nous faut une obligation transversale. Consolidons l'ensemble du dispositif.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je ne suis pas contre le système ! Madame la ministre, vous dites que les conventions ont pris des mesures incitatives, mais ce sont les partenaires sociaux en ont décidé ainsi. Au nom d'économies de court terme, vous méprisez les conventions médicales.
L'amendement n°103 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
M. le président. - Nous avons examiné 85 amendements. Il en reste 128.
Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 13 novembre 2025, à 10 h 30.
La séance est levée à minuit quarante.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 13 novembre 2025
Séance publique
À 10 h 30, 14 h 30 et le soir
Présidence : Mme Sylvie Robert, vice-présidente, M. Didier Mandelli, vice-président, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente
. Suite du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales (procédure accélérée) (texte de la commission, n°112, 2025-2026)