III. LES RELATIONS ENTRE MONDE MULTILATÉRAL ET ENSEMBLES RÉGIONAUX

Aujourd'hui, les accords régionaux constituent un élément essentiel de la vie commerciale. 74 accords préférentiels sont en vigueur, sans compter les excroissances de certains de ces accords, couvrant le monde entier. Les principaux sont l'ALENA, le MERCOSUR, la « nébuleuse » européenne, l'accord de libre-échange entre les pays de l'ASEAN, celui entre l'Australie et la Nouvelle-Zélande, celui d'Afrique australe, autour de l'Afrique du Sud, les projets de l'APEC, du libre-échange américain et, de façon moins formalisée, les idées de libre-échange transatlantique, pour l'instant limité au « dialogue d'hommes d'affaires » et à la négociation d'accords sectoriels entre l'Europe et les États-Unis. L'OMC est donc concurrencée et ne règne plus seule sur le commerce mondial.

La crainte d'un monde tripolaire, partagé entre l'Europe, le continent américain et la sphère Pacifique, se développe. Les « pessimistes », dont Monsieur Ruggiero, Directeur général de l'OMC, y voient essentiellement un risque de fragmentation du monde en trois blocs, avec les connotations négatives qui s'y rattachent. Les « optimistes » y voient la consolidation de liens économiques naturels et la possibilité d'encourager et de faire progresser la libéralisation des échanges.

Cette évolution a provoqué des réactions de la part de l'OMC. Celle-ci a d'abord créé, il y a huit mois, un comité des arrangements commerciaux régionaux poursuivant deux objectifs : donner à l'OMC, pour la première fois, une vue d'ensemble de ces phénomènes dans le monde ; mener un débat sur les « implications systémiques » des accords régionaux.

L'OMC a également entamé une discussion sur les règles applicables aux accords régionaux. Elle avait en effet défini des règles, mais celles-ci étaient insuffisantes et inapplicables.

Enfin, une réflexion est menée sur la ligne directrice future de l'OMC. Deux tendances s'opposent. La première, soutenue par Monsieur Ruggiero, s'inscrit dans la logique de sa vision pessimiste. Selon cette tendance, l'OMC doit se fixer des objectifs ambitieux, le libre-échange mondial à l'horizon 2020. Il s'agit, à l'extrême, de supprimer les 74 accords régionaux et de les remplacer par un unique accord mondial de libre-échange. Suivant la deuxième approche, l'OMC doit veiller à ce que les accords régionaux respectent les règles du jeu et ne créent pas de nouveaux obstacles au commerce. D'autre part, elle doit continuer, comme elle l'a fait depuis 45 ans, de libéraliser les échanges mondiaux de façon progressive.

Ce débat sur l'avenir de l'OMC aura lieu dans un mois à Singapour, à l'occasion de la première conférence ministérielle de l'OMC et surtout à l'approche de l'an 2000. Cette date servira de base à de nouvelles discussions multilatérales d'ensemble, qui permettraient à l'OMC de rejouer son rôle classique et de veiller à ne pas se laisser supplanter par les initiatives régionales.

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