TABLE RONDE 2 -
LES OPPORTUNITÉS D'AFFAIRES ET D'INVESTISSEMENTS

Table ronde animée par M. Arnaud FLEURY, journaliste économique


Ont participé à cette table ronde :

M. Lourenço SAMBO, Président du CPI (Centre de Promotion des Investissements, Maputo)
M. Jacques TORREGROSSA, Directeur Afrique subsaharienne, Business France Johannesburg

M. Lourenço SAMBO. - Le développement du Mozambique est très encourageant. Entre 2011 et 2013, le pays a connu une croissance moyenne de 7,4 % tandis que l'inflation diminuait. Il comptait alors parmi les pays enregistrant la plus forte croissante au monde.

Le Mozambique jouit d'un avantage comparatif en raison de sa localisation et des richesses naturelles qui ont déjà été largement décrites. Mais il faut également souligner l'hospitalité du peuple mozambicain. En 2013, le pays fut le deuxième pays d'accueil d'investissements étrangers en Afrique. Nous avons une législation de qualité, qui est prévisible et permet la protection de la propriété des investisseurs. Il n'y a pas de discrimination dans le traitement des investisseurs au Mozambique ni de restriction aux prêts. Vous pouvez demander des prêts pour investir et y prospérer. M. le Ministre a évoqué un flux d'investissements approuvés de 7,3 milliards de dollars entre 2010 et 2014. Les secteurs vers lesquels se sont orientés les investissements au cours de cette période ont été principalement l'énergie (27 %), les transports et communications (15 %) et l'agro-industrie (14 %), pour ne citer que ceux-ci.

Parmi les dix principaux pays d'origine des investissements réalisés au Mozambique en 2014 figurent, par ordre décroissant, les Émirats Arabes Unis, Maurice, l'Afrique du Sud, le Portugal, la Chine, le Royaume-Uni, Macao, la Turquie, le Kenya et la France. Souhaitons que la France reste parmi les dix premiers investisseurs étrangers dans notre pays. S'agissant des investissements français approuvés au Mozambique entre 2010 et 2014, citons par exemple le projet Maeva Foods (localisé à Maputo), dans le domaine de l'agriculture. Un autre projet lancé à Maputo doit créer jusqu'à 600 emplois.

Il est important de souligner que nous avons des accords bilatéraux avec aujourd'hui près de 20 pays - dont la France - pour la promotion et la protection de l'investissement. Le cadre légal favorable au développement des affaires est donc en place. Seul un accord visant à éviter la double imposition fait actuellement défaut dans notre dispositif avec la France. Pour le reste, notre taux de TVA s'établit à 17 % et le taux d'impôt sur les entreprises à 32 %. Il n'est que de 10 % dans l'agriculture, secteur qui a toujours bénéficié d'une exception compte tenu de son caractère central dans le développement du pays.

Notre dispositif prévoit par ailleurs toute une série d'incitations de diverses natures, applicables notamment lorsque nous importons des équipements que nous considérons comme des biens de capital. Je pense également aux crédits fiscaux de 5 % dont bénéficient les investisseurs à Maputo. Ce taux atteint 10 % dans les autres provinces.

En cas de formation de travailleurs mozambicains, l'impôt sur les sociétés est réduit de 5 %. Des incitations spécifiques existent par ailleurs dans des secteurs tels que les infrastructures, l'industrie et le commerce dans les zones rurales ou encore dans l'agriculture, la pêche et l'hôtellerie.

Quant aux domaines que nous jugeons prioritaires, outre l'agriculture, déjà citée, le gaz et le traitement du charbon sont également très importants pour le développement du pays, de même que les infrastructures et l'énergie. Mais je tiens aussi à souligner la mise en place de parcs industriels, qui doivent créer un environnement favorable au développement des PME. Il nous faut aussi investir dans le capital humain et dans la connaissance.

S'agissant de l'agriculture, nous avons 12 produits très bien définis, avec une priorité notamment pour le riz, le soja, le maïs et la banane. Le Mozambique veut sortir de la pauvreté et ne plus voir sa population souffrir de la faim. Il existe par exemple une forte demande de soja, sur le marché national comme à l'international. Dans le cas du coton, que nous exportons déjà vers l'Europe, l'enjeu consiste essentiellement à donner davantage de valeur à nos productions.

Dans le domaine du gaz, un bloc est déjà exploité par Sasol. Nous exportons le gaz, via un gazoduc, vers l'Afrique du Sud. Le défi consiste à poursuivre cette exploitation et à aller de l'avant en regardant un peu plus loin. Nous souhaitons commencer cette année la construction d'une usine de gaz naturel liquéfié afin de pouvoir l'exploiter dès 2018.

Il existe des projets gaziers dans le bassin du Zambèze et à Palma. La carte des gisements indique immédiatement les défis logistiques à relever pour exploiter ces richesses. Nous souhaitons pouvoir mettre en oeuvre ces projets d'ici 2016 et faire émerger, à cette échéance, des services logistiques compétitifs qui seront utiles aux acteurs industriels du gaz mais aussi aux entreprises maritimes et à de nombreux acteurs économiques.

Nous avons des sites de transformation de gaz en carburant et souhaitons les exploiter au mieux de leurs potentialités.

Nous souhaitons aussi que les entreprises françaises apparaissent davantage dans ce vaste panorama de la logistique. Elles pourraient travailler dans les opérations aériennes, dans les opérations liées à la navigation maritime et dans le secteur des transports lourds. Nous avons de grands ports, par exemple celui de Nacala, où il faut réaliser le dragage. Nous avons aussi des projets de ports en cale sèche.

Un autre défi a trait à l'utilisation de l'énergie hydrique. Nous pouvons produire l'énergie à partir des fleuves et la capacité de production électrique tirée de ce moyen est estimée à 12 000 MW pour l'ensemble de la région. Nous devons également étudier les modalités d'exploitation du charbon. Dans le domaine du gaz naturel, dont nous avons déjà parlé, quelques entreprises sont déjà actives mais nous souhaitons développer ce secteur bien davantage. L'énergie sera indispensable pour faire reculer la pauvreté et accroître l'indice de développement humain du Mozambique.

Le tourisme constitue par ailleurs un de nos grands atouts. J'ai déjà eu l'occasion de comparer, sous forme de boutade, le Kenya et le Mozambique. Comme chacun sait, le Kenya a, sur son territoire, les Big Five (le lion, le léopard, l'éléphant, le rhinocéros et le buffle). Le Mozambique a ces animaux aussi, et le sixième plus grand animal. Je veux parler du peuple mozambicain.

Le CPI (Centre de promotion des investissements) assiste les investisseurs et les aide à prendre contact avec des partenaires de même qu'à trouver l'information économique ou statistique dont ils ont besoin. Il est de notre devoir de le faire, car la délivrance des incitations est conditionnée par un passage préalable au CPI. Je me suis entretenu avec une dizaine d'entrepreneurs français, dans le cadre d'un petit déjeuner à Maputo, et j'ai constaté qu'une faible part des entreprises présentes au Mozambique bénéficiait des incitations prévues par notre gouvernement. Les entrepreneurs que j'ai rencontrés m'ont confirmé vouloir passer par le CPI pour bénéficier de ces incitations. Enfin, un autre pilier de l'action du CPI est la promotion des affaires. Nous travaillons, dans ce domaine, en partenariat avec Business France.

M. Arnaud FLEURY. - Avez-vous des questions pour M. Sambo ?

De la salle. - Vous souhaitez des quotas plus souples concernant le personnel mozambicain à employer, notamment pour les premiers mois d'installation d'une société au Mozambique. Plaidez-vous également pour une accélération de la délivrance des visas d'affaires ?

M. Lourenço SAMBO. - Nous avons trois types de visas : le visa touristique, le visa de travail et le visa d'affaires, pour les sociétés qui s'installent au Mozambique. Il y a une autre possibilité proposée par le Mozambique, à savoir un permis de séjour.

Au CPI, avec le service de l'immigration, nous facilitons l'obtention de ce type de visa. J'ai l'habitude d'affirmer que les collaborateurs du CPI (qui compte 67 employés) doivent délivrer ce qui est demandé. Il ne fait pas de doute, en ce qui concerne les visas d'affaires, que la situation va s'améliorer. Nous avons récemment signé un accord avec le Brésil en ce qui concerne la délivrance des visas. Nous pourrions tout à fait procéder de la même façon avec la France.

Quant aux quotas de personnel mozambicain, je comprends votre interrogation. Nous facilitons aussi, au CPI, la recherche de solutions sur les questions relatives aux quotas. La loi mozambicaine dispose que pour un expatrié, il faut employer cinq Mozambicains. Cela dit, nous ne sommes pas toujours rigides et il peut y avoir des exceptions à la loi, avec l'accord du ministère du travail. Dans une première phase, si un projet technique requiert un grand nombre d'expatriés, le ministère du travail peut l'autoriser, avec l'aide du CPI. Encore faut-il taper à la bonne porte. Adressez-vous à nous. Nous nous tournerons alors vers le ministère du travail.

M. Jacques TORREGROSSA . - Je suis en poste depuis près de trois ans à Johannesburg afin de prendre en charge l'ensemble de l'Afrique subsaharienne au nom de Business France. Je voudrais d'emblée rebondir sur l'intervention de M. Sambo, car le service apporté par le CPI est formidable et constitue la porte d'entrée pour venir investir au Mozambique.

Je vous montre un article paru sur le Mozambique dans le journal de bord de la South African Airways . Celle-ci n'hésite pas à qualifier le Mozambique de pays héroïque (« from zero to hero »).

Le Mozambique a une longue histoire et il a fallu près de 400 ans (durée qui sépare l'arrivée de Vasco de Gama de celle de Livingstone par l'intérieur du pays) pour que l'Occident découvre le Mozambique de l'intérieur.

Le Français le plus connu au Mozambique n'est pas le plus connu des Français : c'est le Président Mac-Mahon. Il a donné son nom à une bière au Mozambique, car Mac-Mahon a réglé - en faveur du Mozambique - un différend entre le Mozambique et la Grande-Bretagne à la fin du XIX ème siècle.

Je voudrais également souligner les relations particulières qui lient l'Afrique du Sud et le Mozambique. L'actuel Président de l'Afrique du Sud, M. Jacob Zuma, a passé de nombreuses années d'exil, durant les années noires de son pays, au Mozambique, tandis que M. Nelson Mandela avait épousé la veuve du premier Président du Mozambique, M. Samora Machel. Ce ne sont que deux exemples des liens étroits qui existent entre les deux pays.

Sur le plan des données économiques, soulignons la très faible inflation qui prévaut actuellement au Mozambique. Le pays connaît une croissance démographique de l'ordre de 2,4 % chaque année. La majorité de la population est chrétienne. Il existe malheureusement sans surprise un taux de chômage aussi élevé au Mozambique qu'ailleurs en Afrique (de l'ordre de 30 %).

Si les bailleurs de fonds sont si présents et investissent autant au Mozambique, c'est parce qu'ils croient tous au succès de ce pays dans l'avenir.

Certes, le Mozambique a aussi quelques points faibles. Les infrastructures y sont insuffisantes - ce qui est d'ailleurs synonyme de grands contrats à signer, avec les débouchés que cela suppose.

M. Arnaud FLEURY. - Arrêtons-nous un instant sur l'économie sud-africaine, dont dépend fortement l'économie du Mozambique. Va-t-elle repartir, selon les perspectives que vous connaissez ?

M. Jacques TORREGROSSA. - L'Afrique du Sud a connu un « trou d'air » mais pas de récession. Sa croissance avoisine 1,5 % et se trouve effectivement « sur un plateau », ce qui n'est pas rare parmi les pays riches, qui lorgnent non sans envie sur les taux de croissance que connaît le Mozambique depuis quelques années. On peut aussi rappeler que l'Afrique du Sud s'est fait ravir l'an dernier la place de première puissance africaine par le Nigeria, ce qui a constitué un choc pour le pays.

Revenons au Mozambique en évoquant les secteurs porteurs pour les entreprises. Les réserves gazières prouvées situeraient le pays au huitième rang mondial, ce qui en dit long sur l'étendue de ce potentiel.

Dans le secteur public mozambicain, on utilise la langue portugaise. En revanche, on peut se débrouiller avec l'anglais dans le domaine des affaires. Si le dollar était jusqu'à présent incontournable pour les facturations, l'euro progresse rapidement et sans doute tous les biens venant d'Europe pourront-ils un jour être facturés en euros.

La faible qualification de la main-d'oeuvre a été largement évoquée. J'aurai, à ce sujet, des propositions à faire au ministre.

M. Arnaud FLEURY. - Un de vos transparents évoque les « petits cadeaux très appréciés ». Que voulez-vous dire par là ?

M. Jacques TORREGROSSA. - Je parle vraiment des petits cadeaux.

M. Arnaud FLEURY. - Qu'en est-il des « gros cadeaux » ?

M. Jacques TORREGROSSA. - Cela existe, comme partout. Contentons-nous des petits cadeaux.

Quant à Business France, nous ne sommes pas installés au Mozambique mais travaillons sur ce pays depuis Johannesburg. À part moi, toute notre équipe est lusophone et peut donc dialoguer avec l'administration mozambicaine. Nous avons suivi le pays depuis fin 2012 et ce fut un succès immédiat, car nous recevions de plus en plus de demandes. Nous avons organisé en 2014 quatre opérations collectives et avons accompagné 48 entreprises, avec un taux de succès de l'ordre de 75 %. Les vingt dernières entreprises françaises implantées au Mozambique sont passées par Business France pour le faire. Cinq opérations collectives sont confirmées à ce jour pour 2015. Elles porteront sur les domaines de la santé, du transport ferroviaire, de la sécurité, sur les bailleurs de fonds et sur la FACIM à Maputo.

Nous avons actuellement 12 volontaires internationaux en entreprise (VIE) dans une dizaine de structures au Mozambique. Cela constitue un progrès énorme par rapport à la situation qui prévalait il y a un an, où leur nombre était de deux. Il me paraît important de bien expliquer aux Mozambicains les principes de ce programme, qui est unique au monde. En Afrique du Sud, je conditionne la présence des VIE à la formation de personnels locaux afin de s'inscrire véritablement dans une logique « gagnant-gagnant ».

La FACIM sera organisée pour la 51 ème fois en 2015. Cette manifestation attire plus de 3 000 exposants, dont 600 étrangers. Nous serons en bonne compagnie, avec des exposants qui viendront aussi, en ce qui concerne l'Europe, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne, du Portugal et de Suède. La Réunion était déjà présente l'an dernier, avec une vingtaine d'entreprises qui nous ont montré la voie. La France y sera représentée pour la première fois, en tant que telle, en 2015. Nous prévoyons un démarrage « en douceur » avec un pavillon de 200 mètres carrés et une trentaine d'exposants. Je suis partisan de prévoir de petits stands afin d'abaisser les prix. Nous proposerons ces mini-comptoirs à moins de 2 000 euros chacun.

Je voudrais enfin féliciter le Mozambique pour la tenue de sites Internet très riches en information et de grande qualité - principalement en portugais en ce qui concerne les sites officiels.

M. Arnaud FLEURY. - Le français est-il inconnu au Mozambique ?

M. Jacques TORREGROSSA. - Pas du tout. Je crois qu'il y a davantage de francophones au Mozambique qu'en Afrique du Sud.

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