SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (novembre 2004)

ALLEMAGNE

Les droits à la dignité, au libre épanouissement de la personnalité, à la liberté et à l'intégrité physique sont explicitement garantis par la Loi fondamentale et fondent le droit au libre arbitre du patient. Par conséquent, tout acte médical, même lorsqu'il vise à prolonger la vie, requiert l'accord du malade.

L'arrêt des soins sur un patient en fin de vie est donc considéré comme justifié lorsque l'intéressé s'est exprimé clairement pour que l'on ne le maintienne pas en vie de manière artificielle.

Cependant, pour pallier l'incertitude juridique due à l'absence de législation spécifique, le ministre de la justice prépare un projet de loi sur les droits des patients en fin de vie .

Un groupe de travail ad hoc a donc été mis en place en septembre 2003. Dans son rapport, rendu en juin 2004, il suggère notamment de modifier le code civil pour y introduire des dispositions sur les directives avancées , qui acquerraient force obligatoire.

1) Le malade est capable de donner un consentement juridique valable

La situation actuelle

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Les propositions du groupe de travail

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La jurisprudence et la doctrine sont d'accord pour reconnaître au malade incurable le droit de refuser des soins, dans la mesure où le processus létal a commencé.

Le fait pour un médecin de ne pas prodiguer des soins, même nécessaires au maintien en vie, n'est pas punissable lorsque le traitement contreviendrait à la volonté du patient et que ce dernier se trouve en phase terminale. A contrario , le non-respect de cette volonté pourrait être pénalement considéré comme une infraction.

Ce principe s'applique quelle que soit la nature des soins : il permet non seulement de refuser le transfert dans une unité de soins intensifs, le traitement d'une nouvelle complication ou une transfusion sanguine, mais justifie également l'arrêt de la respiration assistée ainsi que de l'alimentation artificielle.

Les directives de la Chambre fédérale des médecins sur l'accompagnement des malades en fin de vie rappellent que les soins peuvent être arrêtés à la demande de patients atteints de pathologies mettant en jeu à court terme le pronostic vital.

Néanmoins, en pratique, l'article 216 du code pénal , qui punit l'homicide sur demande , empêche souvent les médecins de respecter les volontés des patients en fin de vie.

Le groupe de travail propose de modifier l'article 216 du code pénal , relatif à l'homicide sur demande, pour y insérer la disposition selon laquelle l'arrêt des soins n'est pas punissable lorsqu'il a été demandé par le patient, même s'il se traduit par le décès de ce dernier.

Cette modification permettrait d'ancrer dans la législation la solution jurisprudentielle actuelle et d'en étendre l'application, aujourd'hui limitée aux patients atteints d'une maladie incurable et dont la mort semble prochaine.

2) Le malade est incapable de donner son consentement

a) Le malade a exprimé clairement son opinion par avance

La situation actuelle

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Les propositions du groupe de travail

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Si le malade a, par avance, exprimé sans équivoque son refus de tout acharnement thérapeutique, ses volontés s'imposent au corps médical, à condition que l'intéressé se trouve en fin de vie et qu'il n'ait pas ultérieurement émis, le cas échéant à l'aide d'un geste ou d'une mimique, un souhait contraire.

C'est par exemple le cas lorsqu'il a rédigé des directives anticipées très claires et qui se rapportent précisément à la situation dans laquelle il se trouve. Aucune condition de forme n'est requise pour l'établissement des directives anticipées, auxquelles la Chambre fédérale des médecins confère force obligatoire.

À titre exceptionnel, la jurisprudence admet aussi la validité des directives anticipées dont l'application conduit à l'arrêt des soins sur des personnes incurables, mais dont le décès n'est pas prévisible à court terme.

Tout en reconnaissant la valeur des directives anticipées, la Cour suprême a suggéré en 2003 au législateur de prendre position sur la question.

Le groupe de travail suggère d'introduire dans le code civil un article sur les directives anticipées : le mandataire du malade aurait l'obligation de respecter les volontés exprimées par ce dernier dans des directives anticipées, même si la fin de vie ne semble pas imminente. Cette proposition permettrait notamment de prendre en compte la volonté des malades plongés dans un coma jugé irréversible.

b) Le malade n'a pas clairement exprimé son opinion


La loi de septembre 1990 sur les majeurs protégés, entrée en vigueur le 1 er janvier 1992 et qui modifie le code civil, apporte une solution au problème du patient qui ne peut plus donner son consentement à un acte médical. Elle prévoit en effet la possibilité pour toute personne qui se trouve dans l'impossibilité de traiter elle-même ses affaires, de désigner ou de faire désigner par le tribunal des tutelles, un mandataire habilité à décider à la place de l'intéressé si besoin est.

La situation actuelle

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Les propositions du groupe de travail

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En ce qui concerne les décisions médicales, l'article 1904 du code civil prévoit que l'avis du mandataire doit être confirmé par le tribunal des tutelles si la décision prise risque de causer un préjudice important au patient, voire de provoquer son décès.

La Cour suprême admet l'utilisation de cette procédure pour l'arrêt des soins.

Le groupe de travail suggère une clarification de l'article 1904 du code civil :

- en présence d'indices tangibles révélant la volonté du patient, le tribunal des tutelles aurait l'obligation de donner son accord au refus de soins ;

- la confirmation par le tribunal des tutelles ne serait nécessaire qu'en cas de désaccord entre le médecin et le tuteur sur l'interprétation de la volonté du patient.


Lorsque le patient incapable de jugement ou d'expression ne dispose pas d'un mandataire, la jurisprudence admet que le médecin traitant, en se fondant sur la volonté présumée de l'intéressé , que des opinions précédemment formulées par écrit ou par oral et des convictions religieuses ou philosophiques peuvent par exemple permettre de mettre en évidence, décide de l'arrêt des soins. Dans une telle hypothèse, les proches ne peuvent prendre aucune décision, leurs dires ne constituent que des indices. En cas de doute, la vie doit être préservée .

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