Service des études juridiques (octobre 2007)

ALLEMAGNE

D'après la Loi fondamentale, le droit de grâce est exercé par le Président fédéral, mais le code de procédure pénale limite cette prérogative présidentielle aux seuls cas où l'intéressé a été jugé en première instance par une juridiction fédérale. Dans les autres cas, le droit de grâce est exercé par les autorités du Land .

Bien qu'aucun texte ne prévoie de mesures collectives de clémence, le Parlement fédéral a, depuis la création de la République fédérale d'Allemagne, voté plusieurs lois dites « d'impunité ».

1) L'amnistie

a) Les effets

Les lois fédérales d'impunité bénéficient aux auteurs de certaines infractions commises avant une date donnée. Elles peuvent avoir les effets suivants :

- dispense d'exécution ou atténuation des peines déjà prononcées mais pas encore exécutées, la dispense étant généralement exclue lorsque l'infraction a été commise en présence de circonstances aggravantes ;

- remise partielle des peines en cours d'exécution ;

- interruption des procédures en cours ;

- absence de poursuite pour les procédures non entamées.

b) Le champ d'application

Il n'est pas a priori limité, mais est défini par chaque loi , celle-ci pouvant exclure certaines infractions (homicides, atteintes à la sûreté de l'État, etc.).

c) Le titulaire

L'amnistie résulte d'une loi votée par le Parlement selon la procédure législative de droit commun.

d) La pratique

Depuis la création de la République fédérale d'Allemagne, le Parlement fédéral a, outre plusieurs lois d'amnistie fiscale, adopté quatre lois d'impunité.

Les deux premières, en 1949 et 1954, sont liées à des événements de la seconde guerre mondiale. Les deux autres, qui datent de 1968 et 1970, ont été votées à la suite de réformes du droit pénal, afin de faire bénéficier rétroactivement certaines personnes des nouvelles dispositions. La loi de 1968 s'appliquait aux auteurs de certaines infractions contre l'État et la paix publique, et celle de 1970 tenait compte de la modification du droit des manifestations.

2) La grâce

a) Les effets

La grâce laisse inchangée la condamnation. En revanche, elle peut annuler la peine, la commuer en peine plus légère, ou la réduire. Elle peut s'appliquer à la peine principale et à la peine complémentaire.

b) Le champ d'application

La grâce est toujours une mesure individuelle . En principe, elle ne peut être accordée qu'une fois tous les recours judiciaires épuisés.

c) Le titulaire

Selon les cas, la grâce est exercée par le Président fédéral ou par les autorités du Land , puisque l'exécution des peines relève de la compétence des Länder .


• L'article 60 de la Loi fondamentale prévoit que le Président fédéral exerce le droit de grâce au nom de la Fédération et qu'il peut déléguer ces pouvoirs à d'autres autorités. Toutefois, l'article 452 du code de procédure pénale limite la compétence du Président fédéral aux affaires qui sont jugées en première instance par une juridiction fédérale, c'est-à-dire essentiellement aux atteintes les plus graves à la sûreté de l'État (terrorisme, espionnage, etc.).

En application des dispositions constitutionnelles relatives aux décisions du Président fédéral, la grâce présidentielle doit être contresignée par le ministre de la justice. La Cour constitutionnelle fédérale a estimé que les décisions de grâce n'étaient susceptibles d'aucun contrôle judiciaire.


• Pour toutes les autres affaires, l'exercice du droit de grâce appartient aux Länder . Les constitutions de tous les Länder confient ce droit à l'exécutif : au gouvernement à Berlin, Brême, Hambourg ainsi qu'en Sarre, et au chef du gouvernement dans les autres Länder . En règle générale, l'exercice du droit de grâce est délégué au ministre de la justice, sauf pour les affaires les plus importantes . En pratique, les recours en grâce sont examinés par un service spécialisé qui, le plus souvent, est rattaché à l'administration chargé de l'application des peines.

d) La pratique

Les recours en grâce devant le Président fédéral restent exceptionnels du fait de la délimitation des affaires qui relèvent de sa compétence. En 2007, le Président Hörst Köhler a rejeté le recours d'un ancien terroriste de la Fraction armée rouge, ce qui a donné lieu à un débat public sur le principe même de la grâce dans un État démocratique.

Dans les Länder , de nombreuses grâces sont attribuées pour les fêtes de fin d'année. En effet, à l'exception de la Bavière et de la Saxe, tous les Länder octroient de courtes remises de peine à cette occasion. Les prisonniers qui auraient dû être libérés par exemple entre le 1 er décembre et le 8 janvier peuvent ainsi bénéficier d'une libération anticipée avant Noël, fixée à la même date pour tous. Cette remise de peine de deux à trois semaines en moyenne est subordonnée à certaines conditions soigneusement vérifiées par le service des grâces (faible durée de la peine de d'emprisonnement : inférieure à deux ans ou à un an dans le cas d'une infraction sexuelle, bonne conduite pendant la détention, hébergement et moyens de substance assurés après la sortie de prison, etc.).

D'après les statistiques disponibles, en 2006, 12 500 recours en grâce ont été déposés dans onze des seize Länder , avec de grandes différences d'un Land à un autre. Le pourcentage de grâces accordées varie également selon les Länder , de 9 % à 50 %.

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