MONOGRAPHIES PAR PAYS

ALLEMAGNE

L'article 30 de la Loi fondamentale allemande ( Grundgesetz - GG ) répartit les compétences entre la Fédération et les Länder : toute disposition qui n'est pas expressément inscrite dans cette loi relève des Länder . Tel est le cas de l'agriculture.

Dans les remarques préliminaires à la directive cadre fédérale relative à l'octroi de subventions étatiques pour répondre aux dommages dans l'agriculture et dans la sylviculture occasionnés par des catastrophes naturelles ou des mauvaises conditions climatiques, le ministère fédéral de l'Agriculture indique que la gestion du risque agricole est avant tout du ressort de l'agriculteur : celui-ci doit souscrire les assurances adéquates. L'État fédéral, quant à lui, assume la gestion de crise. Il peut également participer à l'octroi de subventions pour faire face à des dommages dans l'agriculture et dans la sylviculture occasionnés par des catastrophes naturelles ou de mauvaises conditions climatiques, en concluant des accords administratifs avec des Länder .

Le régime des subventions relatives aux maladies animales relève de la loi relative à la prévention et à la lutte contre ces maladies. Celui applicable aux maladies végétales, aux infestations de parasites et au paiement des primes d'assurance relève du droit européen 2 ( * ) .

On examinera successivement :

- le régime des assurances ;

- et le régime des indemnités versées par les pouvoirs publics.

1. Le régime des assurances

Le régime des assurances agricoles en Allemagne relève des assurances privées.

Selon le conseil consultatif scientifique pour la politique agricole, organisme placé auprès du ministère de l'Agriculture, la gestion du risque lié aux récoltes et aux prix relève de l'agriculteur. L'État peut cependant aider ce dernier en renforçant la position de marché des agriculteurs et des assureurs, en favorisant l'information et la transparence et en mettant en oeuvre des infrastructures, afin d'améliorer la capacité de fonctionnement des marchés pour chaque participant 3 ( * ) .

D'après la même source, les instruments de stabilisation ayant un effet collectif ne peuvent être utilisés pour aider les agriculteurs car ils ne sont pas assez ciblés. De plus, ils occasionnent des coûts très importants non justifiés. Le subventionnement permanent d'une assurance multirisque n'est par conséquent pas acceptable (vertretbar) non seulement pour des raisons financières, mais aussi pour des motifs ayant traits au fonctionnement du secteur des assurances et à l'économie nationale.

S'agissant de la volatilité des revenus, le conseil consultatif scientifique pour la politique agraire estime que les paiements directs en tant qu'instrument de gestion du risque ne sont pas la bonne solution, car ils ne correspondent pas à une situation de risque spécifique de chaque agriculteur d'autant que certains secteurs ne sont pas, ou presque pas, concernés.

L'étude de l'OCDE réalisée en 2011 relative à la gestion des risques agricoles en Espagne présente un tableau comparatif entre l'Allemagne, l'Espagne et les Pays-Bas faisant apparaître le pourcentage d'agriculteurs utilisant les outils de gestion des risques 4 ( * ) . S'agissant de l'Allemagne, ce document montre que :

- 68,7 % des agriculteurs ont souscrit une assurance récoltes ;

- et 75,1 % d'entre eux ont souscrit une assurance dommages.

Concernant les animaux, leurs propriétaires ont l'obligation de payer une cotisation (Beitragsplicht) pour pouvoir prétendre aux dédommagements versés en cas de maladie animale (article 20 de la loi fédérale relative à la prévention et à la lutte contre ces maladies). Les Länder sont chargés de l'application de cette disposition et du prélèvement de la cotisation.

Tel est le cas du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, dont l'article 1a du règlement pour l'application des règles dans le domaine de la lutte contre les maladies animales dispose que les propriétaires d'animaux doivent s'acquitter d'une cotisation annuelle auprès de la caisse pour les maladies animales (Tierseuchenkasse) 5 ( * ) . Le montant de celle-ci s'élève, par exemple :

- pour les boeufs à dix euros par exploitation pour une ou deux têtes, et cinq euros par tête au-delà ;

- pour les cochons à dix euros par exploitation pour une à cinquante têtes, et vingt centimes par tête au-delà ;

- et pour les ovins à dix euros par exploitation pour une à dix têtes, et un euro par tête au-delà.

La cotisation minimale des propriétaires d'animaux est fixée à dix euros. Pour les entreprises de commerce de bétail ou les animaux des centres de rassemblement (Sammelstellen Tiere) , la cotisation de base s'élève à cinquante euros.

2. Le régime des indemnités versées par les collectivités publiques

Ce régime, qui résulte d'une intervention de la Fédération ou d'un Land , peut être lié à la souscription préalable d'un produit d'assurance privé : à défaut, son montant est susceptible de diminuer.

On évoquera ici :

- la gestion des risques climatiques et des catastrophes naturelles ;

- puis les risques concernant les animaux.

a) Gestion des risques climatiques et des catastrophes naturelles

L'Allemagne a adopté au printemps 2015 une directive cadre 6 ( * ) fédérale relative au versement de subventions pour répondre aux dommages dans l'agriculture et dans la sylviculture occasionnés par des catastrophes naturelles ou de mauvaises conditions climatiques.

• Définitions

? Catastrophes naturelles

Les catastrophes naturelles au sens de la directive cadre sont les tremblements de terre, les avalanches, les glissements de terrain, les inondations, les cyclones, les ouragans, les éruptions volcaniques et les incendies d'origine naturelle.

Pour les entreprises forestières, le résultat de la destruction doit être supérieur à 20% du potentiel de la forêt.

En cas de catastrophe naturelle, l'indemnisation peut atteindre jusqu'à 100 % du dommage global.

? Mauvaise conditions climatiques

Les mauvaises conditions climatiques sont définies comme le gel, la grêle, la glace, les pluies fortes ou soutenues, les tempêtes n'ayant pas atteint la force d'un ouragan et la sécheresse. Elles ne sont avérées que si plus de 30% de la récolte annuelle moyenne de l'entreprise concernée ou au moins 20% de la forêt est détruite.

• Modalités de l'aide

Toutes les entreprises agricoles peuvent bénéficier d'une subvention au titre des calamités climatiques, à l'exception de :

- celles détenues à plus de 25% par l'État ;

- celles devant rembourser des fonds indûment perçus à la Commission européenne ;

- et les entreprises en difficulté, sauf si ces difficultés résultent de l'évènement à l'origine de la demande d'indemnisation.

En cas de mauvaises conditions climatiques, l'indemnisation peut atteindre jusqu'à 80% du dommage.

? Procédure de calcul

La compensation couvre les dommages directement causés par les évènements naturels, y compris les dépenses exceptionnelles telles que l'achat de nourriture pour les animaux ou les coûts de réparation ou de remise en état d'utilisation des chemins. La diminution des revenus de l'entreprise agricole est compensée.

Le dommage peut également être calculé en fonction des valeurs de référence moyennes régionales au lieu des valeurs individuelles.

Le dommage global (Gesamtschade) représente le cumul de la baisse des revenus, des dommages aux biens et aux animaux et des réserves.

L'estimation est effectuée par un expert indépendant reconnu par l'autorité compétente ou par une entreprise d'assurances.

? Montant de la subvention dans les cas particuliers

Si l'agriculteur n'a pas souscrit d'assurance pour les risques climatiques les plus importants et couvrant au moins 50 % de la récolte annuelle moyenne, la dotation à laquelle il pouvait prétendre est réduite de 50 %. Ce système ne s'applique pas si le risque climatique est particulier au point qu'il n'existe pas d'assurance disponible ou à un coût raisonnable dans le secteur privé.

Le montant de la subvention est également réduit pour éviter une surcompensation du dommage global : les sommes reçues d'une compagnie d'assurance, de tiers ainsi que les coûts étrangers à la catastrophe naturelle sont déduits du montant de la subvention.

Enfin, en l'absence de droit absolu à indemnisation, c'est l'autorité compétente qui décide de l'octroi de l'aide, sous réserve de la disponibilité des ressources budgétaires.

b) Risques concernant les animaux

Aux termes du chapitre 6 de la loi relative à la prévention et à la lutte contre les maladies animales de 2013, un dédommagement est notamment prévu pour :

- les animaux tués sur ordre des autorités ;

- les animaux abattus à l'initiative des autorités, victimes d'une maladie dont la déclaration est obligatoire (anzeigepflichtige Tierseuchen) ;

- les animaux morts du charbon, du charbon symptomatique ou de la rage ;

- les boeufs morts de la maladie d'Aujeszky ;

- et les animaux dont on peut présumer avec suffisamment de certitude qu'ils devraient être abattus en raison d'une règle vétérinaire ou d'une inoculation, d'un traitement ou de mesures diagnostiques prescrites par les autorités, ou en lien avec leur mise en oeuvre respective, et dont la mort s'est produite dans les 30 jours suivant la mise en oeuvre de la mesure.

Le montant du dédommagement est fixé par l'article 16. La compensation est fondée sur la valeur usuelle de l'animal, déterminée abstraction faite de la dépréciation de la valeur suite à la maladie de l'animal ou de mesures vétérinaires ou prescrites par les autorités. Le montant ne peut dépasser :

- 6 000 euros pour un cheval, un âne, un bardot ou un mulet ;

- 4 000 euros pour un boeuf ;

- 1 500 euros pour un cochon ;

- 800 euros pour un mouton ou une chèvre ;

- et 50 euros pour une volaille.

Certains Länder ont mis en place un fonds contre les maladies animales (Tierseuchen Fonds) en application de la loi relative à la prévention et à la lutte contre ces maladies. Tel est le cas du Schleswig-Holstein, dont le fonds est administré par le ministère de l'Agriculture du Land. Un conseil consultatif composé de six membres issus du secteur agricole ayant voix délibérative et d'un vétérinaire disposant d'une voix consultative est placé auprès du fonds. Cette instance est entendue avant l'attribution de subventions. Les prestations facultatives financées par le fonds ne peuvent être décidées qu'avec l'accord du conseil consultatif.


* 2 Le texte allemand fait référence aux lignes directrices de l'Union européenne concernant les aides d'État dans les secteurs agricole et forestier et dans les zones rurales 2014-2020 (2014/C 204/01), lesquelles sont également visées par le Règlement (UE) n ° 702/2014 de la Commission du 25 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides, dans les secteurs agricole et forestier et dans les zones rurales, compatibles avec le marché intérieur, en application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 3 Wissenschaftlicher Beirat für Agrarpolitik, Stellungnahme, Risiko- und Krisenmanagement in der Landwirtschaft , April 2011.

* 4 Source : Palinkas et Székely in Meusissen, M. et Van Asseldonk, M., Income stabilization in European Agriculture, Wageningen Academic, 2008.

* 5 Cette caisse est placée auprès de la chambre d'agriculture du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

* 6 Cette directive cadre a été notifiée à la commission européenne le 29 juin 2015.

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