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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Ministère des affaires étrangères

et du développement international

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PROJET DE LOI

autorisant la ratification du traité de l'Organisation mondiale de la propriété

intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions audiovisuelles

NOR : MAEJ1412353L/Bleue-1

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ÉTUDE D'IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs du traité

La reconnaissance internationale de droits adaptés à l'ère numérique remonte à 1996 pour les auteurs, les artistes interprètes participant à un enregistrement sonore et les producteurs de phonogrammes. Le traité de Pékin du 24 juin 2012 consacre des droits similaires, à ceux accordés en 1996 par le Traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (TIEP), ainsi que la protection juridique des mesures techniques de protection et d'information sur le régime des droits, pour les auteurs, artistes et interprètes qui contribuent à une création cinématographique ou audiovisuelle.

Sur ces différents points, l'acquis communautaire et la loi française octroient déjà une protection équivalente à celle du traité. En effet, lors de l'élaboration de la directive n° 2001/29/CE du 22 mai 2001 relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, aucune distinction n'a été faite entre les artistes-interprètes réalisant une interprétation sonore ou audiovisuelle.

II. - Conséquences estimées de la mise en oeuvre du traité

Aucune conséquence sociale ou environnementale notable n'est attendue de la mise en oeuvre du présent traité. Celui-ci n'a pas davantage de conséquences administratives ou financières puisque les droits consacrés au profit des artistes-interprètes ne nécessitent pas la mise en place de structures administratives particulières et engendreront uniquement des flux financiers entre artistes, producteurs et sociétés de gestion collective. Enfin, ce traité n'a aucun impact sur l'égalité entre les hommes et les femmes .

1. Conséquences économiques

L'Union européenne veille à ce que le traitement national soit limité aux « droits exclusifs expressément reconnus dans le présent traité et au droit à la rémunération équitable » afin qu'il ne soit pas étendu au-delà du minimum conventionnel. Cette précaution doit notamment permettre de préserver la répartition actuelle des montants collectés dans le cadre de la rémunération pour copie privée.

Lors de la conférence diplomatique de 2000, le président de la « Commission principale I » avait fait inscrire dans les actes de la Conférence une déclaration visant à dénier toute base légale à la collecte de toutes sommes pour le compte de ressortissants étrangers dès lors que ceux-ci n'en étaient pas les bénéficiaires finaux, ce qui avait pour effet de remettre en cause le régime de la rémunération pour copie privée qui existe en Europe. L'Union européenne et ses États membres ont alors déposé une contre-déclaration contestant cette prise de position. La question n'a pas fait l'objet de discussions lors de la conférence diplomatique de 2012.

La règle du traitement national contenue à l'article 4 inclut également, sur proposition de l'Union européenne, des dispositions spécifiques pour le droit de radiodiffusion et de communication au public pour lequel il n'existe pas de minimum conventionnel puisqu'il fait l'objet d'une disposition « à la carte » : chaque Etat étant libre d'en déterminer le champ, voire de ne pas le mettre en oeuvre. L'article 4 prévoit ainsi que chaque Etat n'est tenu à l'égard des ressortissants des autres Etats qu'au regard de la protection accordée par ces derniers.

En conséquence, le traitement national s'applique aux droits accordés aux artistes-interprètes étrangers pour leurs interprétations audiovisuelles exploitées en France. Les rémunérations leur sont dorénavant dues et doivent leur être versées. De façon réciproque, les interprétations d'artistes-interprètes français exploitées dans un pays signataire du traité feront l'objet d'une rémunération. Certains flux de rémunération ont déjà pu être couverts sur une base volontaire dans le cadre d'accords de réciprocité conclus entre les sociétés de gestion collective françaises et leurs homologues étrangères.

Pour le reste, les sociétés de gestion collective et les producteurs cinématographiques et audiovisuels devront veiller à se conformer aux obligations découlant du présent traité en ce qui concerne les droits des artistes-interprètes ressortissants des autres parties contractantes pour leurs interprétations audiovisuelles. Les artistes-interprètes français seront, de leur côté, protégés pour la diffusion de leurs interprétations audiovisuelles dans des Etats parties au traité de Pékin.

2. Conséquences juridiques

- Le traité n'a pas de conséquences dans l'ordre juridique français.

Le présent traité établit tout d'abord des règles assurant une protection adéquate des artistes et permettant l'exploitation de leurs interprétations, tant en ce qui concerne la distribution de copies physiques (par exemple sur DVD) que l'exploitation en ligne de leurs prestations. Le traité contribuera ainsi à préserver les droits des artistes-interprètes de l'utilisation non autorisée de leurs interprétations tant dans les médias audiovisuels, tels que la télévision, le cinéma et la vidéo, que sur les réseaux numériques.

Le traité vise ensuite à garantir le bénéfice d'une rémunération équitable aux artistes-interprètes en les associant aux recettes perçues par les producteurs au titre de l'exploitation des oeuvres audiovisuelles. En effet, même si le traité reconnaît aux Etats la possibilité de maintenir ou de mettre en place une présomption de transfert des droits des artistes-interprètes audiovisuels au profit des producteurs, il évoque également la possibilité de prévoir des dispositifs garantissant aux artistes-interprètes le bénéfice d'une rémunération lorsqu'un tel transfert a lieu.

Le traité confère enfin aux artistes-interprètes le droit moral d'exiger que leur nom soit mentionné ou de s'opposer à toute déformation de leurs interprétations.

La France a consacré les droits voisins dans la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 relative aux droits d'auteur et aux droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle. Cette loi et l'ensemble des lois qui sont ultérieurement venues la modifier ont fait l'objet d'une codification en 1992 et les dispositions sur les droits voisins figurent dans le code de la propriété intellectuelle (CPI) aux articles L. 211-1 et suivants.

L'état de droit existant en France est donc constitué par la première partie du code de la propriété intellectuelle, comprenant les dernières modifications apportées par la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 qui avait notamment pour objet de transposer la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information dont l'objectif principal a été de mettre le droit communautaire en conformité avec les traités OMPI de 1996.

Le code de la propriété intellectuelle consacre des droits sur les prestations et protège les mesures techniques de protection appliquées à ces prestations sans distinguer selon qu'elles étaient intégrées à un phonogramme ou à une oeuvre audiovisuelle. Aussi ce code permet-il d'ores et déjà à la France de satisfaire à ses obligations internationales au titre du traité de Pékin.

Aucune mesure réglementaire supplémentaire n'est nécessaire, les décrets pris en application de la loi du 1 er août 2006 vont au-delà de ce qui est requis par le présent traité.

- Le traité ne modifie en rien les accords existants en droit international.

Comme indiqué à son article 1, le traité n'a aucun lien avec les autres accords en dehors du Traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (TIEP). Il ne constitue pas un protocole au TIEP et est ainsi un traité autonome.

- Le traité n'a pas d'impact sur les données personnelles.

Il conviendra de suivre la procédure de ratification décidée dans le cadre du Conseil en concertation avec les États membres et la Commission. Pour l'instant, le Conseil n'a pas encore pris de décision sur les modalités de ratification et de dépôt des instruments à l'OMPI. Néanmoins, il semble tout à fait vraisemblable que le Conseil prenne la même décision que celle relative aux précédents traités de l'OMPI en matière de droit d'auteur et de droits voisins. En effet, le 16 mars 2000 une décision du Conseil a précisé, dans les modalités de ratification, que le dépôt des instruments de ratification de la Communauté européenne et des États membres devait intervenir simultanément. En conséquence, la ratification par la France était nécessaire pour permettre à la Communauté européenne et aux autres États membres de ratifier ce traité. Il conviendrait en conséquence d'attendre l'éventualité d'une décision du Conseil pour déposer les instruments.

III. - Historique des négociations

Les négociations de ce traité se sont déroulées dans le cadre l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et ont évolué en deux phases interrompues par une longue période de blocage.

Les premières négociations ont débouché sur une Conférence diplomatique en 2000 qui n'a pas permis d'aboutir à l'adoption d'un traité. À l'époque, les États membres de l'OMPI n'ont pas pu parvenir à un accord sur la proposition d'une disposition relative à la cession des droits des artistes-interprètes de l'audiovisuel aux producteurs. Un accord provisoire avait toutefois été constaté sur les 19 autres articles du projet de traité. La conférence diplomatique avait alors recommandé aux assemblées des États membres de l'OMPI, pendant leur session de septembre 2001, de « convoquer à nouveau la conférence diplomatique en vue de la conclusion d'un accord sur les questions restant à régler ». Lors de cette assemblée, les États membres ont estimé qu'il était nécessaire de poursuivre les consultations en vue de surmonter les divergences sur la question restée en suspens et ce point est resté à l'ordre du jour de l'Assemblée générale pendant une dizaine d'années avant que la conférence diplomatique puisse être à nouveau convoquée.

La question du transfert des droits n'avait pu être réglée en raison de positions divergentes sur l'opportunité de l'inclusion d'une disposition relative à la cession des droits des artistes interprètes au producteur audiovisuel : certains États membres avaient conditionné leur accord au traité à l'inclusion d'une telle clause alors que les autres États membres de l'OMPI avait soulevé l'inopportunité d'une telle clause dans un traité protégeant les artistes-interprètes, renvoyant donc ce point aux législations des États membres.

Lors de la 20 ème session du Comité permanent du droit d'auteur et des droits connexes (SCCR) de l'OMPI, un accord a été trouvé sur une rédaction suffisamment ouverte pour tenir compte de l'ensemble des législations et pratiques des États membres sur la question. Il a donc été décidé de reconvoquer la conférence diplomatique pour juin 2012.

La conférence diplomatique du 20 au 26 juin 2012 a, d'emblée, adopté en bloc les 20 articles constituant le coeur du texte du traité, écartant ainsi tout risque de réouverture des débats sur les 19 articles provisoirement adoptés lors de la conférence diplomatique de 2000 et le 20 ème , relatif à la cession des droits, qui avait fait l'objet d'un consensus à l'occasion du 22 ème SCCR. La suite des négociations a porté sur la négociation d'un paragraphe additionnel du préambule, destiné à faire référence à l'agenda du développement de l'OMPI ainsi que sur la finalisation de déclarations communes visant à préciser l'interprétation du texte de quatre articles du traité (article 1 - rapport avec le traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT) et l'accord de l'OMC sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC); article 2 - définition des artistes interprètes et article 15 - mesures techniques de protection).

IV. - Etat des signatures et ratifications

Les États suivants ont signé le traité: Allemagne (20 juin 2013); Autriche (19 juin 2013); Belgique (8 mai 2013); Botswana (4 octobre 2012); Bulgarie (19 décembre 2012); Burkina Faso (26 juin 2012); Burundi (26 juin 2012); Cameroun (26 juin 2012); Chili (26 juin 2012); Chine (26 juin 2012); Chypre (26 juin 2012); Colombie (26 juin 2012); Congo (26 juin 2012); Costa Rica (26 juin 2012); Côte d'Ivoire (26 juin 2012); Danemark (26 juin 2012), Djibouti (26 juin 2012), El Salvador (7 novembre 2012); Espagne (26 juin 2012); Estonie (20 juin 2013); États-Unis d'Amérique (26 juin 2012); France (26 juin 2012); Ghana (26 juin 2012); Grèce (20 juin 2013); Grenade (26 juin 2012); Guatemala (27 mai 2013) ; Guinée (26 juin 2012); Haïti (26 juin 2012); Honduras (4 octobre 2012); Hongrie (26 juin 2012); Indonésie (18 décembre 2012); Irlande (18 juin 2013); Italie (26 juin 2012); Jamaïque (26 juin 2012); Jordanie (26 juin 2012); Kenya (26 juin 2012); Luxembourg (20 juin 2013); Madagascar (26 juin 2012); Mali (26 juin 2012); Maroc (26 juin 2012); Maurice (26 juin 2012); Mauritanie (26 juin 2012); Mexique (26 juin 2012); Mongolie (26 juin 2012); Monténégro (27 mai 2013); Namibie (26 juin 2012); Nicaragua (26 juin 2012); Ouganda (8 octobre 2012); Pays-Bas (19 juin 2013); Pérou (26 juin 2013); Pologne (24 juin 2013); Qatar (24 juin 2013); République arabe syrienne (26 juin 2012); République centrafricaine (26 juin 2012); République de Moldova (26 juin 2013); République populaire démocratique de Corée (26 juin 2012); République Tchèque (29 avril juin 2013); Roumanie (24 juin 2013); Royaume-Uni (11 juin 2013); Sao Tomé-et-Principe (26 juin 2012); Sénégal (26 juin 2012); Seychelles (26 juin 2012); Sierra Leone (26 juin 2012); Slovénie (21 juin 2013); Soudan (26 juin 2012); Suisse (26 juin 2012); Tchad (26 juin 2012); Togo (26 juin 2012); Tunisie (26 juin 2012); Union Européenne (19 juin 2013); Zambie (26 juin 2012); Zimbabwe (11 décembre 2012).

Pour l'instant, le Botswana et la République arabe syrienne ont déposé leur instrument de ratification. Le traité n'est pas encore entré en vigueur.

Le nombre de ratifications nécessaires pour que le traité entre en vigueur a été fixé au nombre de 30.

Conformément à une pratique bien établie, la France coordonnera le dépôt de son instrument de ratification avec l'Union et les autres États membres.

V. - Déclarations ou réserves

L'article 11-3 du traité permet aux États membres de ne pas reconnaître ou de limiter le droit exclusif d'autoriser la radiodiffusion et la communication au public des interprétations ou exécutions fixées sur fixations audiovisuelles ou encore le droit à rémunération équitable lorsque des interprétations ou exécutions fixées sur fixations audiovisuelles sont utilisées directement ou indirectement pour la radiodiffusion ou pour la communication au public.

La France reconnaît un droit exclusif aux artistes-interprètes de l'audiovisuel pour ces types d'exploitation. Par ailleurs, ce droit exclusif est harmonisé et la Commission européenne considère que les États membres n'ont plus la possibilité de faire de réserves. L'acquis communautaire sur ce point ne prévoyant pas de limites, la Commission européenne ne devrait donc pas envisager de faire de réserves.

Une telle réserve peut être faite dans les instruments de ratification ou d'adhésion ou ultérieurement, auquel cas la notification prendra effet trois mois après sa réception par le Directeur général de l'OMPI ou à toute date ultérieure indiquée dans la notification.

Aucune notification n'a été déposée pour l'instant.

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