EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis quelques années, nous assistons à la libération progressive de la parole des victimes de violences sexuelles encouragée par la pression des mouvements féministes partout dans le monde, notamment après celui de #Metoo. La parole des victimes était comme muselée ou confisquée par peur de ne pas être crédible au regard des policiers, de la justice, des familles, de la société. Aujourd'hui, malgré le phénomène #Metoo, l'influence croissante des réseaux sociaux et les groupes de parole, les victimes ont toujours du mal à porter plainte et à parler de leurs traumatismes. Selon l'Observatoire national des violences faites aux femmes, c'est près de 94 000 femmes qui, au cours d'une année, sont victimes de viols et/ou de tentatives de viol. Seul 12 % d'entre elles portent plainte. Ce constat est alarmant - 80 % des victimes d'un acte à caractère sexuel non consenti sont des femmes.

Si la politique de lutte contre les violences faites aux femmes ne cesse de se développer en France, notre législation demeure toutefois insuffisante sur le sujet.

Pourtant les travaux parlementaires ont, au fil des années, été nécessaires pour répondre à la problématique des violences sexuelles. D'autant plus que l'adoption de la loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste crée de nouvelles infractions et apporte in fine une solution à la question du consentement sexuel des mineurs. Désormais, aucun adulte n'est en mesure de se prévaloir du consentement d'un enfant à une relation sexuelle s'il a moins de 15 ans ou moins de 18 ans en cas d'inceste. Nous pouvons nous féliciter en tant que parlementaires d'avoir fait évoluer notre législation pour la rendre plus protectrice des victimes.

Cela dit, la loi reste silencieuse sur le consentement sexuel des adultes. Pour donner suite aux récentes affaires médiatiques et pénales, il nous apparaît urgent de revenir sur la notion de consentement sexuel qui ne trouve pas de réelle définition juridique dans le code pénal. Ce terme n'est même pas mentionné. En effet, les dispositions 222-22 et 222-23 du Code pénal précisent que tout acte sexuel commis par violence, menace, contrainte ou surprise est une agression sexuelle ou un viol. Sans l'un de ces quatre procédés, l'absence de consentement de la victime et l'intention de l'auteur ne peuvent être démontrés. Cependant, actuellement le défaut de consentement ne constitue pas en lui-même une condition pour qualifier une violence sexuelle. Dès lors, à défaut de ne pouvoir inverser la charge de la preuve, on pourrait créer un balancier où le poids de la preuve ne pèsera pas uniquement sur la victime mais aussi sur le présumé agresseur. Il faudrait d'abord établir qu'il y ait bien eu acte sexuel puis consentement clairement exprimé de la part de la victime.

Certains pays européens ont fait le choix d'inscrire dans leur loi pénale une référence au consentement libre et éclairé des personnes lors des relations sexuelles. C'est le cas de 12 pays européens dont l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Suède, la Belgique, Malte. Plus récemment en Espagne , le Congreso de los Diputados (la chambre des députés) a voté un projet de loi intitulé « solo sì es sì » relatif au consentement sexuel des adultes. Ce texte doit désormais passer entre les mains du Sénat espagnol pour être définitivement adopté. La dynamique européenne est donc en faveur du droit des victimes et de la cause des femmes.

Le législateur français devrait également s'emparer de ce sujet de société si complexe. Il s'agit là de consacrer le consentement sexuel dans le code pénal afin de reconnaître formellement et symboliquement le statut de victimes des violences sexuelles et, par conséquent, pouvoir les protéger et leur rendre justice.

C'est pourquoi il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

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