EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La préservation de la ressource en eau et la lutte contre son gaspillage constituent des enjeux majeurs pour lesquels une connaissance fine des écosystèmes, une capacité à intervenir rapidement ainsi qu'une gouvernance souple et adaptée s'avèrent indispensables.

Jusqu'en 2015, les compétences eau et assainissement ne figuraient pas parmi les compétences obligatoires des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Certes, ces compétences figuraient parmi celles obligatoires des communautés urbaines et des métropoles, mais elles demeuraient optionnelles pour les communautés de communes et d'agglomération . La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) est venue bouleverser cette organisation en prévoyant une unification progressive du régime au profit d'une compétence obligatoire pour tous les EPCI.

La mise en place de cette « communautarisation » généralisée a été voulue pour éviter une trop forte dispersion des modalités d'exercice de ces compétences, celle-ci étant supposée engendrer un manque de rationalisation des services selon le législateur de l'époque. La loi du 7 août 2015 se donnait ainsi pour objectif une mutualisation efficace des moyens techniques et financiers nécessaires à une meilleure maîtrise des réseaux de distribution d'eau potable et d'assainissement, notamment dans les zones rurales.

Certes, on ne peut écarter d'emblée l'idée selon laquelle dans certains cas l'échelon intercommunal soit le plus adapté à l'exercice de ces compétences. Mais il n'est pas possible d'en tirer un principe général au vu de la très grande hétérogénéité des situations locales. À cette aune, la fixation du niveau d'exercice de ces compétences ne peut être uniforme et déconnectée du terrain mais doit au contraire relever de considérations matérielles et techniques propres à chaque territoire. Cela vaut encore davantage pour les territoires ruraux où les modalités de gestion d'un service public peuvent varier d'une commune à l'autre et nécessiter de maintenir une gestion directe par la commune ou les syndicats en place afin de permettre une capacité d'intervention plus souple et plus efficace.

Or les conditions du transfert de ces compétences optionnelles au sein des communautés de communes ont suscité de nombreuses réticences parmi les communes rurales ou encore les communes de montagne. Celles-ci ont en effet fait valoir, à juste titre, les investissements coûteux et les recrutements qui seraient nécessaires à la seule mise en oeuvre de ces transferts, sans réel bénéfice en termes d'efficacité pour les territoires concernés. Elles soulignent également que ces transferts s'accompagneraient dans certains cas d'une hausse importante du prix de l'eau, ce qui serait déjà très difficilement acceptable pour nos concitoyens en temps normal s'agissant de l'accès à des services publics essentiels, mais qui l'est encore davantage dans un contexte inflationniste .

Les auteurs de la présente proposition de loi souhaitent encore rappeler que le transfert de la compétence « eau et assainissement dans les communautés de communes » a fait l'objet de récentes mesures d'adaptation législatives qui ne paraissent pas avoir répondu aux inquiétudes des élus de la ruralité et de la montagne.

La loi du 3 août 2018 relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes prévoyait tout d'abord un report possible de l'échéance de transfert au 1 er janvier 2026. Elle proposait par ailleurs la possibilité d'une minorité de blocage de communes souhaitant s'opposer au transfert de compétences eau et assainissement dans le cas de communautés de communes.

Pourtant, l'Assemblée des communautés de France a constaté que, fin 2021, seules 33% des communes ont effectivement transféré aux communautés de communes les compétences en question. Cette situation atteste encore une fois des difficultés rencontrées par de très nombreuses communes rurales ou de montagne dans la mise en oeuvre d'un transfert complexe et aux effets pas toujours convenablement mesurés.

Aussi, s'agissant des communautés de communes , les auteurs de la présente proposition de loi entendent privilégier une approche pragmatique, moins coûteuse et technocratique, adaptée aux réalités géographiques et hydrologiques des territoires.

La présente proposition de loi qui consiste en un article unique a donc pour objet de maintenir les compétences eau et assainissement parmi les compétences optionnelles des communautés de communes. Suivant l'essence même du principe de subsidiarité, il reviendrait aux communes de décider du niveau d'exercice desdites compétences en matière. Il ne s'agit pas en effet de revenir sur le choix et engagements déjà pris par les exécutifs communaux en termes de transfert aux communautés de communes dont ils sont membres.

À ce titre, la présente proposition de loi s'inscrit dans le droit fil de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale , et en particulier de l'article L. 1111-3-1. du code général des collectivités territoriales selon lequel « Dans le respect du principe d'égalité, les règles relatives à l'attribution et à l'exercice des compétences applicables à une catégorie de collectivités territoriales peuvent être différenciées pour tenir compte des différences objectives de situations dans lesquelles se trouvent les collectivités territoriales relevant de la même catégorie, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit proportionnée et en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit ».

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