EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La démocratie française est de plus en plus fragilisée, et ce depuis de nombreuses années. La chute de la participation aux élections et la défiance croissante envers les représentantes et les représentants du peuple en constituent deux des symptômes les plus préoccupants pour l'avenir. Les causes de cette désaffection sont désormais bien connues : perte de confiance, scandales multiples, manque de compréhension de l'architecture institutionnelle, déficit de moyens d'intervention dans les décisions politiques en dehors des élections, etc.

L'esprit de cette proposition de loi est d'associer plus étroitement les citoyens à la politique. Celle proposition a donc été élaborée durant plusieurs mois avec des citoyennes et citoyens non-élus, au sein d'un « collège citoyen » ouvert à toutes et tous les volontaires. Cette initiative a d'ailleurs permis de faire vivre la démocratie au travers de fructueux débats permettant l'enrichissement mutuel. Ainsi, les vastes réformes proposées ici entendent permettre que cette atmosphère d'échange et de délibération démocratique fasse véritablement partie du quotidien de nos concitoyennes et concitoyens.

La présente proposition de loi, comprenant à la fois un volet constitutionnel, un volet organique et un volet ordinaire, entend donc apporter des mesures d'urgence pour répondre à ces défis et restaurer la confiance dans les institutions.

En matière constitutionnelle, il est ainsi proposé de simplifier la procédure de référendum d'initiative partagée (RIP), qui, plus d'une décennie après son inscription dans la Constitution, n'a jamais été mis en oeuvre. Il est ici proposé d'abaisser le nombre de signatures nécessaires à son organisation à un million d'électeurs, un seuil à la fois facilement compréhensible et correspondant à la promesse du Président de la République lors du « Grand débat national » en 2019.

La proposition de loi organique prévoit une limite au cumul des mandats pour favoriser le renouvellement de la vie démocratique et un système de parrainages citoyens pour la sélection des candidates et candidats à l'élection présidentielle. Ainsi, elle prévoit l'impossibilité d'exercer plus de trois fois le même mandat, afin de permettre un renouvellement du personnel politique, tout en laissant la possibilité aux élus de se présenter à d'autres types d'élections. L'instauration d'un système de parrainages citoyens, suggéré par l'ancien Premier ministre Lionel Jospin et par la France Insoumise, permet, en complément du système actuel de parrainage par 500 grands électeurs, de faire concourir des candidates et candidats disposant de peu de soutien de la part des élus, mais d'une popularité importante dans la population française.

La loi ordinaire agglomère quant à elle les autres mesures. Elle comporte tout d'abord plusieurs réformes institutionnelles et relatives aux modes de scrutin, afin de renforcer la représentativité des élus et d'assurer une véritable parité entre les hommes et les femmes.

Diverses propositions sont également formulées dans le but d'augmenter la participation aux différents scrutins. Il s'agit de simplifier l'inscription sur les listes électorales, d'octroyer le droit de vote aux 16-18 ans et de reconnaître le vote blanc.

Afin de lutter contre la corruption et de démocratiser davantage le financement des partis politiques, deux réformes importantes sont également proposées : l'inéligibilité des individus condamnés pour certains délits durant une plus longue période et la création de « bons pour la démocratie ».

Enfin, considérant que la vie démocratique ne peut se réduire aux seules élections, plusieurs mesures permettant aux citoyens d'intervenir plus régulièrement dans la vie politique sont également mises sur la table. Il est ainsi proposé la création d'une délégation parlementaire citoyenne, la simplification de la procédure de référendum d'initiative partagée, l'encadrement de conventions citoyennes locales, des pré-conseils municipaux ou encore le soutien aux budgets participatifs.

Si certaines mesures sont inédites, d'autres correspondent à des propositions qui refont régulièrement surface dans le débat public. Ainsi, les trois propositions de loi suivantes sont notamment inspirées de :

- la proposition de loi n° 4682 pour une nouvelle démocratie déposée le 16 novembre 2021 par Mme Paula Forteza,

- la proposition de loi n° 1774 visant à renforcer la parité à l'échelle locale, déposée le 20 mars 2019 à l'Assemblée nationale par la Délégation aux droits des femmes,

- du projet de loi pour un renouveau de la vie démocratique déposé le 29 août 2019 à l'Assemblée nationale

- la proposition de loi organique n°3478 instaurant une procédure de parrainages citoyens pour la candidature à l'élection présidentielle, déposée le 26 octobre 2020 à l'Assemblée nationale par le groupe La France insoumise.

Si la longévité politique peut parfois signifier la bonne appréciation des électeurs quant au travail d'un élu, elle est au contraire très souvent perçue comme un signe d'immobilisme et d'accaparement du pouvoir par les élus sortants. Instaurer une limite de trois mandats consécutifs identiques, comme le proposent les articles 1 et 2 de cette proposition de loi, permet donc aux élus, si les électeurs le souhaitent, de conduire d'importantes réalisations au cours des mandats successifs (soit 18 ans pour un sénateur, un élu municipal, départemental ou régional et 15 ans pour un député national ou européen), tout en venant poser une vraie limite dans le temps. Gage de renouvellement et de vitalité démocratique, cette règle n'empêcherait pas pour autant de poursuivre une carrière politique à un autre échelon. Par ailleurs, cette mesure ne s'appliquerait pas aux communes de moins de 9.000 habitants, où la constitution de listes électorales est plus difficile en raison d'un vivier plus faible de candidats.

Afin d'encourager le renouvellement du personnel politique et la possibilité pour des personnalités populaires auprès de la population mais peu soutenues par les élus de se présenter à l'élection présidentielle, l'article 3 propose lui d'instaurer un système de parrainage citoyens, en plus du système actuel de parrainages. Le nombre de signatures nécessaire est fixé à 200.000, répartis dans au moins 50 départements, un même département ne pouvant excéder 10% du total des signatures. Inspiré du rapport « Pour un renouveau démocratique » publié en 2012 sous la direction de l'ancien Premier Ministre Lionel Jospin, cet article a également pour objectif de remédier aux difficultés du système actuel (de plus en plus loquet par la publicisation des parrainages des candidatures, qui conduit de nombreux élus, généralement non-encartés, à rechigner à parrainer des candidatures, de peur d'être assimilé à un soutien à cette candidature ou à un parti politique.

Enfin, l' article 4 instaure un referendum d'initiative citoyenne local en obligeant les collectivités locales à organiser un référendum local sur un sujet relevant de leur domaine de compétence, s'il est demandé par au moins 10% du corps électoral de la collectivité. Ce référendum d'initiative citoyenne local permet donc à une part de la population d'une collectivité de mettre un sujet à l'agenda et de lancer des campagnes « pour » et « contre » afin de trancher des enjeux importants.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page