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N° 201

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 février 1996.

PROPOSITION DE LOI

visant à modifier l'article 23 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 relatif à la répartition intercommunale des charges des écoles publiques accueillant des enfants issus de plusieurs communes,

PRÉSENTÉE

Par MM. Alain VASSELLE, Michel ALLONCLE, Louis ALTHAPÉ, Roger BESSE, Paul BLANC, Gérard BRAUN, Dominique BRAYE, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Gérard CÉSAR, Charles de CUTTOLI, Désiré DEBAVELAERE, Luc DEJOIE, Jacques DELONG, Michel DOUBLET, Alain DUFAUT, Xavier DUGOIN, Yann GAILLARD, Patrice GÉLARD, Alain GÉRARD, Daniel GOULET, Georges GRUILLOT, Emmanuel HAMEL, Roger HUSSON, Gérard LARCHER, Edmond LAURET, René-Georges LAURIN, Lucien NEUWIRTH, Alain PLUCHET, Victor REUX, Roger RIGAUDIÈRE, Jean-Jacques ROBERT, Michel RUFIN, Louis SOUVET et Martial TAUGOURDEAU,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Enseignement. - Communes - Compensations financières - Finances locales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Jusqu'à l'adoption de l'article 23 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 mettant en oeuvre les nouvelles répartitions de compétences entre les collectivités locales, aucune règle générale de répartition intercommunale des charges des écoles publiques n'était prévue.

L'application de ce texte a démontré cependant l'existence d'insurmontables problèmes rencontrés notamment par les communes rurales.

Certaines associations départementales de maires ont calculé, dans le souci d'harmoniser le montant des participations des communes de résidence exigé par les communes d'accueil, un coût moyen départemental par strate démographique à partir de résultats d'enquêtes menées auprès des communes.

Il en ressort que la fixation du coût moyen départemental est un faux problème car cela ne règle pas les difficultés de fait posées par la menace de fermeture d'école en milieu rural en raison du comportement des parents et de celui des villes accueillant trop facilement les enfants sans se préoccuper préalablement de savoir si le maire de la commune de résidence a donné son accord ou non.

L'application de l'article 23 est très mal vécue dans beaucoup de départements. En effet, le montant des appels de contribution est souvent disproportionné par rapport à la charge réelle supportée par les communes de résidence pour leur propre école. Les contributions versées par les communes de résidence sont souvent plus importantes que ce que représenteraient leurs propres charges de fonctionnement.

En dehors des conséquences financières de l'application de l'article 23 se pose le problème de la menace de la disparition d'un service public vital en milieu rural en faveur de la population.

En effet, quand le village perd son école, il devient sans vie et se retrouve de plus en plus dépendant de son environnement proche, donc privé de son autonomie et a tendance à souffrir de l'exode de ses habitants.

En favorisant la scolarité des enfants à l'extérieur, il agit sur la qualité du service public. De fait, si les effectifs sont insuffisants, ils ne permettent pas à la commune du secteur d'offrir à la population tous les services qu'elle serait en droit d'attendre, faute de seuil suffisant pour ouvrir certaines classes ou services dans le cadre ou non d'un R.P.I.

Il n'est pas acceptable pour une commune d'avoir à participer aux dépenses de fonctionnement d'une autre école dans une autre localité lorsqu'elle a la capacité d'accueil suffisante pour permettre à tous les enfants de sa commune de fréquenter l'école correspondant au lieu de résidence des parents et ce d'autant plus que les secteurs ruraux sont pratiquement tous couverts par les R.P.I. et donc possèdent des écoles maternelles.

Les appels de contribution de communes d'accueil sont souvent hors proportion de ce que représenteraient pour elles leurs propres charges.

Cette disposition entraîne des doubles charges pour ces localités et a pour résultat de favoriser le suréquipement du territoire national en structure d'accueil scolaire.

Ces enfants en résidence dans les villages ruraux pour la plupart fréquentent les écoles primaires des villes ou d'autres localités pour des raisons personnelles. Les familles ont provoqué la création de classes d'équipement scolaire et de postes d'enseignants dans les villes, alors que les communes rurales pouvaient, dans la plupart des cas, les accueillir sans obligation de construction de classes nouvelles et de création de postes.

Les conséquences fiscales de telles dispositions sont donc néfastes à la collectivité.

Enfin, il faut rappeler que les familles, en décidant de résider dans les communes rurales, ont fait un choix en toute connaissance de cause. Elles connaissaient la nature et le nombre de services qu'était susceptible de leur offrir leur commune de résidence.

Il appartient donc aux familles d'assumer leur choix et non pas de contraindre les collectivités à s'adapter à leurs convenances personnelles.

Plutôt que de faire supporter à la commune des niveaux de dépenses sans commune mesure avec la contribution supportée par les communes d'accueil, plus favorable que celles des communes rurales, il serait préférable de mettre en oeuvre un dispositif incitatif, encourageant les communes rurales à s'équiper et s'entourer de services qui leur permettent d'accueillir et d'assurer une formation scolaire dans des conditions comparables à celles des cités urbaines.

Ce n'est pas avec des mesures restrictives que l'on réussira à atteindre cet objectif.

L'article 23 contribue à accentuer l'exode rural dans la mesure où il tend à favoriser la fermeture des classes ou d'écoles en milieu rural.

Il contrarie une politique d'aménagement du territoire équilibrée. Il peut favoriser sur le long terme le phénomène de banlieurisation par une urbanisation périurbaine dense.

De plus, il est source d'inégalité sociale qu'il renforce entre les ruraux et les urbains.

Le maintien d'un tel service public en milieu rural ne peut que contribuer à favoriser une occupation équilibrée de l'espace national, ce qui correspond à l'un des objectifs principaux aujourd'hui visés dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire du Gouvernement, des régions, des départements et des communes françaises.

Le système existant actuellement restant insatisfaisant, notamment au niveau des participations demandées par les communes d'accueil, une modification radicale du dispositif de répartition intercommunale des charges des écoles publiques s'avère être une nécessité étant donné le nombre sans cesse croissant de problèmes connus en milieu rural.

De plus, il convient de rappeler que l'article 23 reconnaît implicitement l'intérêt que présente pour les enfants une préscolarisation dès le plus jeune âge, en obligeant les communes de résidence à contribuer aux dépenses de fonctionnement des écoles maternelles alors que la formation à cet âge ne revêt pas un caractère obligatoire. Il nous paraît donc préférable, une fois encore, que des mesures incitatives soient prises sur le plan financier afin d'encourager le développement d'un tel système dans les communes plutôt que de leur faire supporter une dépense lorsque celle-ci est assurée par une commune d'accueil.

D'une manière générale, si les communes rurales ne peuvent faire bénéficier tous leurs enfants des conditions comparables à celles des communes d'accueil, c'est souvent en raison d'une insuffisance de ressources dans le cadre des compétences que leur confère la loi.

L'article 23 n'est certainement pas de nature à faciliter la tâche des communes, ni à les aider dans le sens souhaité.

Pour les raisons qui précèdent, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir modifier l'article 23 de la loi du 22 juillet 1983. Tel est l'objet de la présente proposition de loi que nous vous soumettons.

PROPOSITION DE LOI

Article unique.

L'article 23 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, est ainsi rédigé :

« Art. 23. - I. - Lorsque les écoles maternelles, les classes enfantines ou les écoles élémentaires publiques d'une commune reçoivent des élèves dont la famille est domiciliée dans une autre commune, la répartition des dépenses de fonctionnement se fait par accord entre la commune d'accueil et la commune de résidence.

« À défaut d'accord entre les communes intéressées sur la répartition des dépenses, la contribution de chaque commune est fixée par le représentant de l'État après avis du conseil de l'éducation nationale,

« Pour le calcul de la contribution de la commune de résidence, il est tenu compte des ressources de cette commune, du nombre d'élèves de cette commune scolarisés dans la commune d'accueil et du coût moyen par élève calculé sur la base des dépenses de l'ensemble des écoles publiques des communes rurales appartenant à la même strate démographique que la commune de résidence. Les dépenses à prendre en compte à ce titre sont les charges de fonctionnement, à l'exclusion de celles relatives aux activités périscolaires. Un décret en Conseil d'État détermine, en tant que de besoin, les dépenses prises en compte pour le calcul du coût moyen par élève ainsi que les éléments de mesure des ressources des communes.

« Toutefois, les dispositions prévues par les alinéas précédents ne s'appliquent pas à la commune de résidence si la capacité d'accueil de ses établissements scolaires permet la scolarisation des enfants concernés, sauf si le maire de la commune de résidence, consulté par la commune d'accueil, a donné son accord à la scolarisation de ces enfants hors de sa commune. Pour justifier d'une capacité d'accueil au sens du présent alinéa, les établissements scolaires doivent disposer à la fois des postes d'enseignants et des locaux nécessaires à leur fonctionnement.

« Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, il existe des cas dans lesquels une commune est tenue de participer financièrement à la scolarisation d'enfants résidant sur son territoire lorsque leur inscription dans une autre commune est justifiée par des motifs tirés de contraintes liées à des raisons médicales ; et dans la mesure où le maire de la commune de résidence a donné son accord pour la scolarisation de ou des enfants dans la commune d'accueil.

« Par dérogation aux dispositions prévues par le dernier alinéa de l'article 4 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 précitée, les dispositions des alinéas ci-dessus entrent en vigueur pour l'année 1995-1996.

« Lorsque, antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions ci-dessus, une commune ne participait pas ou ne participait que pour partie aux charges des écoles publiques situées hors de son territoire, la contribution mise à sa charge n'est due, sauf accord contraire, qu'à raison d'un tiers au titre de l'année scolaire 1995-1996 et des deux tiers au titre de l'année scolaire 1996-1997.

« À partir de la rentrée scolaire de 1994, la scolarisation d'un enfant dans une école d'une commune autre que celle de sa résidence ne peut être remise en cause par l'une ou l'autre d'entre elles avant le terme, soit de la formation préélémentaire, soit de la scolarité primaire de cet enfant commencées ou poursuivies durant l'année scolaire précédente dans un établissement du même cycle de la commune d'accueil.

« II. - À titre transitoire, pour les années scolaires 1993-1994 à 1996-1997, la répartition des dépenses des écoles maternelles, des écoles enfantines ou des écoles élémentaires publiques se fait dans les conditions prévues aux alinéas ci-après.

« Pour l'année scolaire 1993-1994, sont seuls applicables les accords entre communes en vigueur au 1 er octobre 1985.

« Pour les années scolaires 1994-1995 et 1995-1996, peuvent s'appliquer les accords conclus antérieurement à la date de publication de la loi n° 86-972 du 19 août 1986 portant dispositions relatives aux collectivités locales ainsi que les accords librement consentis ultérieurement.

« En outre, la scolarisation dans une commune d'accueil d'enfants résidant dans d'autres communes ne peut être refusée tant que le nombre moyen d'élèves par classe accueillis dans la commune d'accueil à la rentrée scolaire de l'année précédente n'est pas atteint.

« Pour l'année scolaire 1996-1997, et sauf accord contraire entre les communes, la commune de résidence est tenue de supporter, pour l'ensemble de ses élèves scolarisés dans la commune d'accueil, 20 % de la contribution calculée dans les conditions fixées au troisième alinéa du présent article. Pour cette même année, une commune d'accueil doit inscrire les enfants résidant dans d'autres communes tant que le nombre moyen d'élèves par classe accueillis dans la commune à la rentrée scolaire 1995-1996 n'est pas atteint. »

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