Comment maintenir le commerce de proximité en milieu rural ? Comment soutenir son développement futur ? Comment faire en sorte que 100 % des Français puissent accéder à un panier de services de la vie courante en moins de cinq minutes ? C’est à l’ensemble de ces questions que les sénateurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques ont souhaité répondre, alors que les conclusions des Assises du commerce se font encore attendre.

Le rapport d’information adopté par les deux commissions le 15 mars dernier part du constat que le déclin du commerce dans les zones rurales peu denses n’est pas une fatalité, pour peu que l’État se dote d’une politique d’aménagement du territoire véritablement ambitieuse et de moyens à la hauteur des enjeux de nos territoires ruraux.

Le rapport propose 43 mesures concrètes, déclinées en 10 axes de propositions et qui ont vocation à constituer une "boite à outils" complète pour soutenir le dynamisme commercial dans les petites communes de moins de 2 500 habitants.

Le constat rappelle l’ampleur de la déprise commerciale en zones rurales et l’urgence à agir : alors que 25 % des communes françaises ne disposaient d’aucun équipement commercial en 1980, c’est désormais le cas de 60 % des communes. Dans ces communes, la moitié des habitants doivent par exemple parcourir plus de 2,2 kilomètres pour atteindre une boulangerie. 22 % de la population française habitant dans des communes de moins de 2 500 habitants, les inégalités territoriales continuent donc de se creuser dans les zones rurales peu denses et très peu denses.

Depuis 2017, le Gouvernement a fait le choix de concentrer en priorité son action sur des communes qui occupent une situation-clé de centralité dans des territoires souvent isolés. Ce sursaut était positif et nécessaire mais les deux commissions appellent à ce qu’une attention plus importante soit portée aux territoires en perte de vitesse , en revalorisant les fonctions de centralités de communes en difficulté. L’enjeu est de combler les « trous dans la raquette » de nos politiques de revitalisation territoriale .

Des mesures ambitieuses peuvent permettre d’enrayer cette déprise commerciale. Zonage règlementaire, transmissions d’entreprise, développement du commerce en ligne et omnicanalité, urbanisme commercial, fiscalité locale : les propositions du Sénat veillent à traiter l’ensemble des problématiques qui concourent aujourd’hui à fragiliser le secteur commercial, et qui participeront demain à son regain.

Parmi ces 43 mesures, déclinées en 10 axes de propositions, figurent notamment :

· la mise en place d’un programme d’actions intitulé "400 territoires de commerce" doté de 600 millions d’euros sur 5 ans, afin de compléter les programmes de revitalisation existants (Action cœur de ville, Petites villes de demain) et de renforcer l’équipement des territoires hyper-ruraux en commerces et services de quotidien. Ce programme a vocation à financer des actions de préemption, des opérations de réhabilitation de logements et de permettre des dérogations réglementaires ainsi qu’un soutien renforcé en ingénierie ;

  • la création d’un fonds de 200 millions d’euros dédié à la transmission des entreprises commerciales pour compléter l’apport d’un jeune aspirant commerçant visant à racheter un fonds de commerce ;
  • la suppression de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) avec compensation intégrale aux collectivités pour la part de recettes qu’elles percevaient ;
  • un accompagnement financier des collectivités créant des postes de managers du commerce ;
  • un dispositif fiscal de prise en charge des dépenses de formation au numérique.

L’Essentiel, qui contient la liste des propositions, est disponible ici .

Pour Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable : "Ce rapport permettra de nourrir l’action de revitalisation commerciale pour le prochain quinquennat. Les mesures proposées supposent des évolutions législatives et réglementaires que nous devons mettre en œuvre en lien avec la réforme de la géographie prioritaire de la ruralité".

Pour Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, "la disparition du dernier commerce dans une commune accélère le départ des populations et contribue grandement à son déclin. Ce constat évident n’a jusqu’à présent entraîné aucune réponse de l’État, qui a concentré son action sur les villes moyennes, et qui n’a publié aucune conclusion des Assises du commerce. Or les atouts de ces territoires sont nombreux, et cette boite à outils permettra de les valoriser".

Pour Bruno Belin, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable : "Il n’y a que des avantages à préserver et développer le commerce de proximité en zones rurales, pour renforcer le lien social, pour maîtriser l’empreinte carbone liée aux déplacements et préserver le pouvoir d’achat de nos concitoyens qui utilisent leur voiture pour accéder à des services de la vie courante. Nos propositions, qui touchent le commerce physique, le commerce en ligne mais aussi le commerce non-sédentaire, ont vocation à s’intégrer dans la grande boite à outils que nous devons refonder pour soutenir nos territoires ruraux".

Pour Serge Babary, rapporteur de la commission des affaires économiques, "le développement du commerce ne peut se réduire à une ou deux mesures symboliques. Il devra être le fruit d’un ensemble de mesures cohérentes, qui n’esquivent aucun sujet, y compris fiscaux. C’est tout l’objectif de ces 43 propositions, au plus près des réalités du terrain. Il est urgent que les pouvoirs publics s’emparent du sujet".

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est présidée par M. Jean-François Longeot (Union Centriste – Doubs).

La commission des affaires économiques est présidée par Mme Sophie Primas (Les Républicains – Yvelines).

M. Bruno Belin (Les Républicains – Vienne) est rapporteur de la mission d’information sur les perspectives de la politique d’aménagement du territoire et de cohésion territoriale.

M. Serge Babary (Les Républicains – Indre-et-Loire) est rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques, du volet « attractivité commerciale en zones rurales » de la mission d’information sur les perspectives de la politique d’aménagement du territoire et de cohésion territoriale.

Chloé HUMPICH
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