Question de M. BRANTUS Pierre (Jura - UC) publiée le 23/06/1988

M. Pierre Brantus appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le respect des formes de protection de la vie privée reconnue par la loi du 17 juillet 1970. Un phénomène se répand principalement en période estivale ; il consiste à procéder à des prises de vue aérienne des résidences privées. Les clichés sont proposés à leurs propriétaires moyennant des prix souvent élevés. En cas de refus par ces derniers de l'offre du pollicitant, aucune certitude ne peut être apportée quant à la destruction ou à la non-utilisation à d'autres fins du négatif. Il est de jurisprudence constante que le propriétaire d'une maison peut s'opposer à la reproduction de celle-ci par photographie, film ou peinture, sauf dans le cas où l'image fait partie d'un ensemble ou d'une vue générale. Il lui demande en conséquence quelles limites peuvent être apportées à cette activité commerciale et les mesures susceptibles d'être prises afin de protéger cet aspect particulier de la vie privée.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 04/08/1988

Réponse. - Depuis le décret n° 73-420 du 27 mars 1973, la photographie aérienne est libre pour les citoyens français, excepté dans les zones interdites, à condition qu'ils n'utilisent pas d'appareil en dehors du spectre visible. Toutefois, lorsque les prises de vue nécessitent le survol à basse altitude de zones habitées, les entreprises de travail aérien doivent obtenir des préfets les dérogations prévues à l'article 5 de l'arrêté du 10 octobre 1957, relatif au survol des agglomérations. Sous réserve de ces dispositions, la prise de photographies aériennes est susceptible de constituer le délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée prévu par l'article 368 du code pénal et puni d'un emprisonnement de deux mois à un an et d'une amende de 2 000 à 60 000 francs. Cette infraction ne serait cependant caractérisée que dans la mesure où la photographie d'un immeuble comporterait l'image de ses occupants et qu'il serait démontré qu'elle a été prise avec la volonté de porter atteinte à l'intimité de leur vie privée. La divulgation au public ou à des tiers de telles photos est punie des mêmes peines en application de l'article 369 du code pénal. C'est donc en fonction des cas d'espèce que les tribunaux correctionnels, qui ne peuvent en ce domaine être saisis que sur plainte de la victime elle-même, pourront apprécier si les éléments constitutifs des délits précités sont réunis. Si, même en l'absence d'infraction, le propriétaire de la résidence qui a fait l'objet d'une photographie aérienne subit un préjudice caractérisé, il a la possibilité de rechercher la responsabilité de leurs auteurs devant les juridictions civiles et sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

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