Question de M. MARINI Philippe (Oise - RPR) publiée le 24/03/1994

M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sur l'évolution récente de la jurisprudence des cours d'appel en matière de licenciement pour faute professionnelle. De façon désormais fréquente, les cours d'appel annulent des licenciements considérés comme étant sans cause réelle et sérieuse, non pour des raisons de fond, mais parce que les lettres de licenciement ne comporteraient pas les précisions nécessaires et les circonstances des manquements invoqués à l'encontre du salarié. Et cela quoique de façon certaine elles aient été évoquées contradictoirement et non contestées, soit au cours de l'entretien préalable, soit en audience prud'homale ou encore devant la cour elle-même. Il s'agit d'une interprétation très restrictive de textes qui visent à juste titre, en principe, à protéger les droits des salariés faisant l'objet d'une procédure de licenciement pour faute professionnelle mais qui conduit, dans ce cas, à condamner injustement des entreprises, souvent petites ou moyennes, à de lourdes indemnités dans une période où celles-ci peuvent compromettre leur pérennité. Il souhaite donc connaître ses projets sur ce point précis, et en particulier s'il envisage une modification technique des dispositions en vigueur.

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Réponse du ministère : Travail publiée le 26/05/1994

Réponse. - Il est précisé à l'honorable parlementaire qu'en l'état actuel des textes, l'article L. 122-14-2 du code du travail indique que l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement mentionnée à l'article L. 122-14-1. L'article L. 122-14-3 prévoit que le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. S'agissant de la jurisprudence relative à l'absence d'énonciation du ou des motifs de licenciement, la Cour de cassation considère qu'il s'agit d'une formalité substantielle pour l'employeur et que le défaut d'énonciation des motifs du licenciement ou leur énonciation insuffisamment précise équivaut à une absence de cause réelle et sérieuse de licenciement. Dans un arrêt du 26 octobre 1976 (affaire Janousek) la Cour de cassation avait estimé qu'un employeur qui ne répondait pas à la demande du salarié d'énoncer par écrit les motifs du licenciement, était présumé, de manière irréfragable, avoir prononcé un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La portée de cet arrêt a toutefois été progressivement limitée par la Cour de cassation, qui a finalement considéré que l'absence d'énonciation des motifs de licenciement constituait une présomption simple d'absence de cause réelle et sérieuse que l'employeur pouvait combattre en rapportant la preuve que le salarié avait eu connaissance de ces motifs par d'autres moyens (Cass. soc 29 mai 1979, 4 novembre 1982, 9 avril 1987). Dans ces conditions, il paraît préférable d'examiner l'évolution de la jurisprudence afin de déterminer si une modification législative s'avère nécessaire. L'éventualité d'une modification des dispositions en vigueur sur cette question pourra être envisagée ultérieurement en tenant compte de cette évolution.

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