Question de M. GERBAUD François (Indre - RPR) publiée le 09/03/1995

M. François Gerbaud attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'avenir des relations économiques et commerciales entre la France et les Etats-Unis dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il rappelle qu'il avait mis en garde le Gouvernement, lors de la ratification des accords de l'OMC, sur le caractère déséquilibré et inégalitaire, en faveur des Etats-Unis, de ces accords et de sa politique. Plusieurs litiges ont déjà surgi, sans grande surprise, dont l'un est relatif à la banane, et des difficultés sont connues dans le secteur de l'aviation civile, des télécommunications et de la culture. Nous savons par ailleurs que, malgré leur réticence vis-à-vis de l'OMC, les Etats-Unis font tout pour en obtenir la direction en droit ou en fait. Cela n'a pas empêché, encore récemment, M. le ministre délégué aux affaires européennes, dans la " Lettre de la présidence française de l'Union européenne ", de faire l'éloge des accords du GATT et de l'OMC. Il demande si l'attitude du Gouvernement français n'est pas en contradiction avec nos intérêts économiques et commerciaux face aux difficultés que nous rencontrerons systématiquement dans nos relations avec les Etats-Unis et dans le cadre de l'OMC. Le Gouvernement ne doit-il pas tenir compte de la volonté permanente des Etats-Unis de nuire à une institution, en perte de crédibilité, qu'il cautionne et défend plus que de raison ?

- page 531

Transmise au ministère : Industrie


Réponse du ministère : Industrie publiée le 07/09/1995

Réponse. - L'OMC a été mise en place en janvier 1995 : en quelques mois, elle a connu de nombreuses évolutions et elle a été confrontée à plusieurs conflits dans lesquels le rôle des Etats-Unis a été très important. Le cas le plus visible a été le récent conflit sur les importations d'automobiles au Japon, où les autorités américaines n'ont pas hésité à menacer de prendre des sanctions unilatérales contraires aux règles de l'OMC. La position française face à ces développements tient en trois points : 1o La France et l'Union européenne ont poussé à la mise en place de l'OMC, contre les Etats-Unis, pour deux raisons principales : a) la création d'une organisation internationale de plein exercice, en remplacement du Gatt, renforce la crédibilité des discussions en son sein et limite les risques d'accords bilatéraux potentiellement discriminatoires à l'égard des pays tiers. Le caractère très large de la participation et l'organisation permanente de négociations commerciales vont dans ce sens, en créant un cadre de discussion qui a un fort pouvoir d'attraction. La tentation d'une action unilatérale des Etats-Unis s'en trouve réduite ; b) l'institution d'un mécanisme de règlement des différends automatique et contraignant est également une protection contre d'éventuelles actions illégales des Etats-Unis (application de la section 301), car elles auraient toutes les chances d'être condamnées. Nous veillons, avec l'Union, à ce que le fonctionnement de ce système donne les meilleures garanties d'indépendance et d'objectivité. 2o Les débuts de l'OMC ont été marqués par deux succès de l'Union : cette organisation a permis en juillet d'aboutir à un bon accord multilatéral sur l'ouverture des marchés financiers, malgré l'attitude très négative des Etats-Unis, qui se retrouvent ainsi isolés, alors que l'Union européenne, sous l'impulsion de la France, a joué un rôle moteur et décisif dans la conclusion des discussions. L'accord obtenu accroît l'ouverture des marchés tiers asiatiques et d'Amérique latine, et accorde à nos banques et sociétés d'assurance de nouveaux débouchés profitables. La direction de l'OMC est revenue à un européen, M. Ruggiero, qui a bénéficié du soutien de la France contre la volonté des Etats-Unis d'imposer un candidat qui aurait été très proche de leurs vues. 3o L'action de la France à l'OMC et vis-à-vis des Etats-Unis suivra deux axes principaux : a) assurer le bon fonctionnement de l'OMC, en utilisant toutes les possibilités, notamment pour dénoncer et si nécessaire attaquer toute action américaine qui pourrait affaiblir cette organisation. C'est ainsi que nous avons dénoncé sans ambiguïté le comportement des Etats-Unis dans leur conflit avec les autorités japonaises. De même, le Gouvernement soutiendra activement les intérêts de la France dans les négociations sous l'égide de l'OMC. b) En même temps, le Gouvernement vise à agir de façon concertée avec les Etats-Unis sur des sujets d'intérêt commun, comme la protection des investissements à l'étranger ou la relation entre commerce et respect des normes sociales. Cette action commune s'inscrit dans la perspective de la première conférence ministérielle de l'OMC, prévue à Singapour en décembre 1996, et où il sera procédé à un premier bilan ainsi qu'à la définition du futur programme de travail de l'OMC.

- page 1731

Page mise à jour le