Question de Mme HEINIS Anne (Manche - RI) publiée le 14/05/1998

Mme Anne Heinis attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur l'inquiétude suscitée chez les producteurs de l'Ouest par le projet de réforme de l'OCM (organisation commune des marchés) bovine. Ils craignent, en effet, des risques de distorsion de marché qui pourraient résulter d'une utilisation différenciée de l'enveloppe de subsidiarité par les Etats membres. De plus, le critère de chargement unique proposé pour l'accès à la surprime extensification en interdit l'accès à certains producteurs. Enfin, l'organisation du marché suppose un filet de sécurité, donc le maintien du principe de l'intervention. Elle lui demande donc s'il entend veiller, d'une part, à ce que les aides subsidiaires compensent réellement les baisses de prix initiées par la réforme et ne servent pas à financer des handicaps structurels pour lesquels des financements spécifiques sont prévus, d'autre part, envisager une régionalisation du seuil de chargement extensif, enfin maintenir le principe de l'intervention publique indispensable en cas de crise.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 05/11/1998

Réponse. - Les propositions contenues dans Agenda 2000 ne cessent depuis leur parution de soulever nombre de questions et d'inquiétudes, notamment auprès des éleveurs. De son côté, le Gouvernement n'a pas manqué d'exprimer également son profond désaccord avec ce projet lors du Conseil des ministres de l'agriculture, le 31 mars dernier. La politique agricole dans son ensemble doit être repensée pour accompagner l'agriculture dans sa diversité. Tout en affirmant l'importance de sa fonction productive, qui reste essentielle, le Gouvernement considère qu'il faut prendre en considération de nouvelles missions pour traduire, en termes concrets, l'identité agricole européenne : respect de l'environnement, amélioration de la qualité des produits, occupation du territoire et attentes légitimes des consommateurs. Ces orientations, qui doivent guider la réforme de la PAC, ont, sous la forte impulsion de la France, été énoncées dans un document du Conseil en novembre 1997. L'adaptation des prix à l'évolution des autres secteurs et le renforcement de la maîtrise de la production doivent constituer les deux piliers d'une proposition équilibrée. La baisse des prix présentée dans le Paquet Santer ne constitue pas une stratégie adaptée au secteur de la viande bovine. En tout état de cause, elle doit être limitée à ce qui est nécessaire au maintien de l'équilibre entre les viandes blanches et les viandes rouges à moyen terme. Par ailleurs, elle doit être intégralement compensée quel que soit le type de production (vaches allaitantes ou bovins mâles). S'agissant des modalités de soutien, la proposition de compensation partielle sous la forme d'utilisation subsidiaire d'enveloppes nationales risque d'être génératrice de distorsions de concurrence. Afin de minimiser ces risques, il convient d'encadrer les modalités de cette subsidiarité. Par ailleurs, il faut se préoccuper d'assurer une véritable maîtrise de la production. Cet objectif doit être poursuivi en reconnaissant la réalité des divers modes de production pratiqués au sein de l'Union européenne et en évitant toute discrimination à l'égard des systèmes de production assurant une gestion équilibrée du territoire. Il faudra donc veiller à ce que les efforts de maîtrise soient répartis de façon équilibrée, d'une part entre troupeau laitier et troupeau allaitant, et d'autre part entre les Etats membres. Il importe également de soutenir les efforts des éleveurs en matière d'extensification, car ces élevages situés en zones herbagères occupent et entretiennent le territoire mieux que tout autre et répondent le plus fidèlement aux préoccupations nouvelles qu'expriment le consommateur et le citoyen. Ils veulent une viande de qualité, produite avec une alimentation naturelle constituée d'herbe et de fourrages : l'élevage allaitant leur en apporte la garantie. Il est donc indispensable qu'un soutien adapté soit consenti à ce type de production. Or les modifications que la Commission propose d'apporter au régime du complément extensif sont discriminatoires et pénalisantes pour de nombreux élevages engagés aujourd'hui dans la voie de l'extensification. C'est un durcissement inacceptable, que la France conteste vigoureusement. Enfin, le stockage privé, prévu dans le Paquet Santer, est un instrument totalement inadapté à la gestion d'un secteur de cycle long tel que celui de la viande bovine. Ce mécanisme n'a d'ailleurs jamais été appliqué au cours des vingt dernières années. Le maintien de l'intervention publique constitue un élément indispensable de gestion des marchés. Le recours efficace à cet outil en 1996 en est l'exemple le plus récent et le plus probant. La France aborde les négociations communautaires sur la réforme de la PAC avec l'objectif que toutes ces orientations soient respectées. Elle restera vigilante afin que soit préservé l'intérêt de ses élevages, notamment extensifs.

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