Question de M. ARTHUIS Jean (Mayenne - UC) publiée le 30/10/1998

Question posée en séance publique le 29/10/1998

M. le président. La parole est à M. Arthuis.
M. Jean Arthuis. Il me paraît essentiel que le Parlement puisse être un lieu de débat. Nous comprenons tous la
détresse des hommes et des femmes qui sont menacés dans leur emploi. Faut-il pour autant porter atteinte au principe
d'inviolabilité du Parlement ?
M. Louis Boyer. Très bien !
M. Jean Arthuis. Je ne le crois pas. C'est pourquoi j'ai personnellement trouvé regrettable que certains de nos
collègues aient cru devoir, il y a un instant, s'associer à la manifestation qui était la conséquence d'une effraction. (Très
bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Braye. C'est une honte !
Mme Hélène Luc. Je les soutiens et je les soutiendrai !
M. Jean Arthuis. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Le diable est dans les détails. J'en trouve l'illustration dans l'article 27 bis du projet de loi de finances pour 1999, qui
vient d'être voté par l'Assemblée nationale.
Cet article exclut du champ de la TVA les terrains acquis par des personnes physiques en vue de la construction
d'immeubles que ces personnes affectent à leur usage privatif. Toute la presse a salué cette initiative. Des terrains
valant 100 francs le mètre carré hors taxes, soit 120,60 francs toutes taxes comprises, voient ainsi leur prix
soudainement ramené à 100 francs. Quel progrès ! En fait, il convient d'ajouter un droit de mutation de 4,8 %. Il reste
que 104,80 francs, c'est sensiblement moins que 120,60 francs. Fantastique, n'est-ce pas ?
Je voudrais cependant rendre le Gouvernement attentif à la perplexité et aux interrogations qui se font jour çà et là sur le
territoire national.
Nombre de communes sont des lotisseurs. Lorsque l'une d'entre elles aménage un lotissement pour vendre des
parcelles à des familles qui souhaitent accéder à la propriété, elle réalise un certain nombre de travaux pour aménager
la voirie, amener l'eau, l'électricité : bref, tout ce qui contribue au confort des constructeurs.
Dans beaucoup de nos communes rurales, mais aussi dans un certain nombre de villes, le prix du foncier est tout à fait
marginal. Autrement dit, le prix auquel ces communes cèdent les parcelles en question est essentiellement constitué
par le coût des travaux qu'elles font effectuer par des entreprises et dont elles acquittent le prix toutes taxes comprises.
Or, lorsqu'on exonère une vente de TVA, cela veut dire que ceux qui ont fait réaliser les travaux ne peuvent plus
récupérer cette TVA. Dès lors, le prix de revient est un prix de revient toutes taxes comprises.
Ainsi, ce qui coûte en fait déjà 120,60 francs devra en outre supporter un droit de 4,8 %.
Cela semble tout à fait contraire à l'objectif affiché par nos collègues de l'Assemblée nationale et par le Gouvernement.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Arthuis.
M. Jean Arthuis. J'ajoute que cette mesure doit s'appliquer à compter du 1er octobre de cette année.
C'est donc la confusion la plus totale. Là où l'on voulait annoncer un avantage pour les familles, il risque d'y avoir un
préjudice. Veut-on faire prendre aux Français des vessies pour des lanternes ? (Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Budget publiée le 30/10/1998

Réponse apportée en séance publique le 29/10/1998

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir approuvé cette
initiative, qui permet de supprimer la TVA sur les terrains à bâtir.
Cette TVA de 20,6 % - elle était, je le rappelle, de 18,6 % avant 1995 - représentait en effet une charge importante pour
les jeunes ménages et les familles aux ressources modestes et moyennes qui souhaitaient accéder à la propriété.
La disposition que vous avez évoquée résulte d'un amendement présenté par le groupe communiste de l'Assemblée
nationale, et je vous concède que, au moment où il a été discuté, puis adopté, une certaine confusion régnait dans
l'hémicycle du Palais-Bourbon. (Ah ! sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, et du
RPR.)
Mais revenons à l'essentiel.
Cette disposition doit s'appliquer à compter du 22 octobre. Vous avez souligné qu'elle pouvait poser certains problèmes
aux communes et nous allons nous employer à les résoudre.
M. Alain Gournac. Il fallait y réfléchir avant !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en débattre ici même dans quelques
semaines, lorsque le Sénat examinera le projet de loi de finances pour 1999. Nous pourrons ainsi mettre au point,
ensemble, des dispositions transitoires permettant de ménager les intérêts des communes, sans pour autant sacrifier
la mise en oeuvre immédiate d'une disposition qui répond à un souci de justice sociale puisqu'elle permet l'accès à la
propriété de familles modestes, et qui présente en même temps un intérêt économique puisque le secteur du bâtiment
va, à l'évidence, en tirer profit.
Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à refléchir d'ores et déjà aux détails - détails importants, je vous l'accorde -
de l'application de cette mesure, l'essentiel étant qu'elle ait été adoptée par l'Assemblée nationale. Je ne doute pas
que, ces questions de détail réglées, le Sénat l'adoptera également. (Applaudissements sur les travées socialistes
ainsi que sur les travées du groupe communiste, républicain et citoyen et sur certaines travées du RDSE.)

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